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Mon père, Aron Nathan Gorsd

Hanna Gorsd Levy, née en 1979 à Paris, dont le père Aron Nathan Gorsd a quitté ce monde en septembre 2022, suivi de peu par son épouse, tient à lui rendre hommage, en faisant retour sur son histoire à travers ce texte qu’elle nous a fait parvenir.

Mon père Aron Nathan Gorsd est né en janvier 1930 à Paris. Sa mère issue de la dynastie Houminer était native de Jérusalem. Son père, Yakov Menahem, originaire de Lituanie, avait fui l’enrôlement forcé sous le régime du tsar. Il tenait une boucherie cacher dans le 9ème arrondissement de Paris. Son appartement était un refuge pour les juifs de l’Est. Chouchani fréquentait assidûment sa table sous le nom de Der Maguid. C’est dans cet appartement que la famille fut arrêtée le 3 juillet 1944.

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Le policier chargé de l’opération recommanda à mon père d’aller faire un tour au square d’à côté. Il avait 14 ans. Les scellés furent ensuite posés sur la porte. À cette époque, l’école Lucien de Hirsh accueillait des enfants dont les parents avaient été arrêtés. La responsable de l’école invita mon père et ma tante Renée à la rejoindre, mais n’ignorant pas ce qui s’était passé le 6 avril de la même année à Izieu où avaient été raflés les 44 enfants et leurs éducateurs, ils ne donnèrent pas suite à cette invitation. Par chance, une voisine, madame Choquart, recueillit mon père, qui la suivit à la campagne et s’y cacha. Aussi, bien lui en avait pris, lorsque l’on sait que dans la nuit du 24 juillet, les enfants et leurs maîtres de l’école Lucien de Hirsch furent arrêtés et déportés. Ce sentiment d’être un survivant, doublé d’un sentiment de désolation envers ces enfants qui ne furent pas

Hommage

Une plaque en mémoire de Hans Isaac

Tout ce qui est entrepris pour sauvegarder le souvenir des nôtres mérite d’être souligné. À fortiori lorsqu’il s’agit d’un acte de mémoire d’un fils rendu à ses parents. Tel est le cas de Michel Isaac, qui s’est farouchement investi pour honorer la mémoire de son père, en faisant apposer une plaque, le 4 septembre, au 34 rue de Moscou, où il est désormais gravé : « Ici habitait Hans Isaac, né le 18 mai 1909, à Berlin. Arrêté le 16 juillet 1942 lors de la rafle du Vel' d’Hiv. Déporté par le convoi 7 du 19 juillet 1942 de Drancy à Auschwitz. Assassiné à Auschwitz en 1944 ». Au cours de ce dévoilement par sa petite fille, en présence de François Heilbronn, vice-président du

Zakhor

Cette adolescente que l’on voit sur cette photo, extraite du Mémorial des enfants juifs déportés de France de Serge Klarsfeld, s’appelait Rachel Bally. Elle était née le 11 octobre 1932, à Biarritz. Arrêtée lors de la grande rafle des Juifs français dans la région de Bordeaux, le 10 janvier 1944, Rachel fut déportée à Auschwitz avec ses parents le 20 janvier 1944 par le convoi 66. Le petit garçon qu’elle tient par le épaules, Isaac Halfon, fut le seul qui échappa à cette rafle, où il perdit ses parents.

dispersés à temps, mon père en fut habité toute sa vie. Au sortir de la Libération, il ignorait tout de son judaïsme. Il ignorait également ce qu’avaient subi les jeunes de Buchenwald croisés à l’OSE qui lui révélèrent l’ampleur de la catastrophe. Il retourna alors à ses racines. La rencontre avec le rabbin de Loubavitch et de ses émissaires accompagna son retour. Il fonda une famille forte de huit enfants et un centre cultuel et culturel à Brunoy avec son épouse Aliza (un Gan, un Talmud Torah, une bibliothèque, des conférences), et plus tard ils fondèrent le Heder à la yeshiva de Brunoy.

Mon père aimait profondément Israël, Yeroushalaim et aussi la France. Il n’avait jamais oublié ses sauveurs. En 2007, la fille de Madame Choquart reçut au nom de sa mère la médaille des Justes parmi les Nations. Mon père nous a transmis, et au-delà de ses enfants, sa fidélité à Israël et au peuple juif. Il s’est éteint le 17 Eloul 5782 et est inhumé sur le mont des Oliviers ».n

Mémorial et de Serge Klarsfeld, qui fut invité à prendre la parole, Michel Isaac rappela l’itinéraire de ses parents qui se sont fiancés à Berlin et qui gagnèrent Paris, avec la grand-mère paternelle, et un jeune oncle, où ils se marièrent en 1935. L’oncle s’engagea dans la Légion étrangère. En 1939, ses parents, apatrides, furent internés dans un camp sur la Loire et à Gurs. En 1940, après avoir été libérés, ils élurent domicile à l’hôtel situé 34 rue de Moscou.

C’est là que leur fils Michel est né le 8 juin 1941. Comme il en témoigne, « lors de la rafle, le 16 juillet, mon père a été arrêté au 34 rue de Moscou. Un policier a recommandé à ma mère de disparaître. Ma grand-mère, elle, s’est cachée dans les combles de l’hôtel. Je suis resté quelque temps chez la gardienne. J’avais un an. Après diverses péripéties, nous avons pu nous cacher dans un pavillon à Sèvres, sous une fausse identité, grâce à l’aide de la résistance ».

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