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Les conséquences des images de guerre sur les enfants
Psychologie
Notre chroniqueur, le médecin Bruno Halioua, explique pourquoi il faut tenir éloignés les enfants le plus possible des images qui circulent sur les réseaux sociaux.
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Nous sommes rivés sur nos smartphones, nos radios et nos télévisions à suivre en famille avec attention l’évolution de la situation en Israël. Nous avons tous été choqués par ces scènes de violence perpétrées par les membres du Hamas à l’encontre des civils israéliens. La peur dans le regard de cette jeune fille, tirée de force hors de la voiture par les cheveux, nous emplit d’effroi. L’humiliation de cette femme âgée exhibée comme un trophée de guerre nous plonge dans la tristesse.
Il convient toutefois de faire attention aux conséquences que peut avoir chez les enfants la visualisation de ces images violentes et choquantes, en particulier à l’âge préscolaire. C’est ce que vient de montrer une récente étude canadienne réalisée par l e professeur Linda Pagani de l’université de Montréal (J Dev Behav Pediatr. 2023 Jan 1;44(1) : e1-e11.). Elle vient de démontrer les effets néfastes à moyen et long terme de la visualisation de ces images violentes sur les jeunes enfants. Les auteurs de ce travail ont identifié au sein d’une population
PARENTS, OUVREZ L’ŒIL
L’influenceur « HugoDécrypte »… déraille
« H ugoDécrypte » , de son vrai nom Hugo Travers, né le 6 avril 1997, à Versailles, est un vidéaste web franco-britannique qui connaît une grande notoriété grâce à sa maîtrise parfaite de la plateforme YouTube (plus de 1 million d’abonnés) et des réseaux sociaux TikTok, X ou Instagram. Ses vidéos, qui totalisent des millions de vues, rencontrent un grand succès, notamment auprès des jeunes. Un jeune qui explique de façon « pédagogique » la marche du monde, c’est séduisant. En vérité, les vidéos « HugoDécrypte » sont une véritable entreprise de désinformation et de propagande, voire de complotisme. Il raconte, à sa manière, l’actualité, entre autres, les raisons du conflit israélo-arabe. Un narratif simpliste et quelques dates, une allure jeune et branchée, et ça marche. Les jeunes l’adorent et prennent son discours pour argent comptant. Morceaux socialement isolé et de difficultés scolaires. Selon cette étude, la violence perçue et reçue peut entraîner des détresses émotionnelles et une distorsion de la réalité avec, pour conséquence, une passivité dans leur parcours scolaire. Les jeunes enfants confrontés à des images violentes ont du mal à distinguer le réel du fictif, et les images télévisuelles, même limitées à un écran, montrant des corps ensanglantés, peuvent leur sembler réelles, influençant potentiellement le comportement et les choix de vie de l'enfant et du futur adolescent.
Le caractère flou des images qu’on voit à la télévision est susceptible d’ac - de 978 filles et de 998 garçons, âgés de 12 ans, ceux qui ont déclaré avoir visualisé des émissions télévisées violentes à l'âge préscolaire (entre 3 et 5 ans). Ils ont ensuite interrogé les parents et les enseignants de ces enfants qui avaient vu des images violentes et ceux qui n’avaient pas vu d’images violentes à l’âge préscolaire. Ils se sont aperçus que la visualisation d’émissions télévisées violentes à l'âge préscolaire était associée à un risque plus important de détresse émotionnelle, de troubles de l’attention, d’un comportement croître l’horreur de la situation avec des conséquences non négligeables. Il devient donc essentiel de surveiller et de limiter l'exposition de son enfant aux écrans et à la visualisation d’images violentes. C’est ce que nous faisons en cas de projection d’un film ou d’une série violents. En revanche, nous ne faisons pas autant attention au moment des actualités. La prévention et la communication demeurent les meilleures défenses face à la profusion d'images circulant sur Internet et les écrans. Ne l’oublions pas. n Bruno Halioua choisis : « En 1929, 180 000 juifs s’installent en Palestine après l’effondrement de l’Empire ottoman » . Hugo Travers oublie de préciser que les juifs avaient acheté légalement de nombreuses terres, laissant supposer qu’ils ont « colonisé» cette région hostile, remplie de marécages et de moustiques transmettant la malaria. Autre extrait : « Les partis de droite israéliens et le Hamas se sont opposés aux accords d’Oslo », omettant de dire que les assassinats de juifs n’ont pas cessé après la signature des accords. « HugoDécrypte » se veut à lui tout seul un concurrent direct de « Brut » et « Konbini ». Au grand dam de ces médias en ligne qui n’en reviennent pas de voir une équipe restreinte s’imposer avec un minimum de moyens. Parents, si vous entendez vos enfants ou vos ados citer « HugoDécrypte », soyez en alerte !

R aphaelle Mazal
Expertise
Pédopsychiatre à Tel Aviv, le docteur Michaël Larrar donne des conseils pour tenter d’avoir la meilleure attitude possible vis-à-vis de nos enfants.


«Entant que parent, il ne s’agit pas de culpabiliser dans notre façon de gérer la situation avec nos enfants ni d’être trop sévère avec soi-même. Nous sommes tous dans un moment traumatique et nul n’est naturellement préparé à gérer un état de guerre.



Le temps de l’immédiateté est celui réfléchir et de tenter de répondre au mieux aux questions de nos enfants, en fonction de leur âge.


Pour les plus jeunes et jusqu’à environ 10 ans, on ne les laisse pas trop sur les réseaux sociaux, parce qu’il y a des images terribles, y compris sur TikTok. À cet âge, on peut encore beaucoup les protéger de ce qu’ils peuvent savoir. Et normalement, ils ne savent pas les atrocités que l’on a vues, ni qu’une guerre, sans doute sans précédent, s’annonce. Ils ne savent pas tout cela et je ne vois pas l’intérêt qu’ils le sachent. Ça va juste leur faire très peur. Il faut aussi beaucoup les rassurer. Ce qui les inquiète est de savoir si cela va leur arriver à eux. On leur répond non, que l’on est les plus forts. On leur rappelle que le pays est très armé, bien plus que ses adversaires. On a eu beaucoup de peine parce qu’on a été pris par surprise mais on va gagner, c’est certain, il n’y a pas de doute. Il faut jouer un peu la comédie mais il faut leur donner cette impression. Il y a ce qu’on va leur dire et comment on va le leur dire. Tenter de minimiser cette angoisse, en n’étant pas trop accrochés à l’information lorsqu’ils sont près de nous.

Les adolescents, connectés en permanence, vont évidemment voir tout ce que l’on ne voulait pas qu’ils voient. Il faut leur offrir un espace de parole qui ne résout pas tout mais qui fait du bien. Se poser et discuter avec eux, sans avoir l’idée que parce que l’on est parent, on aurait des réponses à apporter à tant d’horreur. Mais le fait de parler apaise et écouter fait du bien. Discuter aussi de la réalité de l’humanité qui a malheureusement aussi un côté monstrueux. On va discuter avec eux du bien, du mal, de la civilisation des hommes et de ceux qui ne sont pas toujours civilisés. Débattre est une manière de reprendre de façon intellectuelle quelque chose qui est insupportable