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[ 7 OCTOBRE : LES ATTAQUES LES PLUS EMBLÉMATIQUES ]
Massacres aux kibboutz de Be’eri et de Kfar Azar
Les habitants du kibboutz sont réveillés par des tirs de mortier et, très vite, des tirs d’armes automatiques qui se rapprochent. L’équipe de défense locale se précipite et voit des dizaines de terroristes faire irruption dans le kibboutz. ILes habitants sont attaqués, capturés. Le bilan définitif des morts et des otages emmenés à Gaza n’est toujours pas connu, de
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1 200 morts
2 600 blessés les communications de Tsahal. Ce qui explique que l’effet de surprise ait été total. Il faudra encore établir com-ment une attaque d’une telle ampleur n’a pas été repérée à temps. Comment l’organisation de la riposte a été si longue à se mettre en place. Il s’agit non seulement d’un échec retentissant pour les capacités de renseignement et d’analyse et d’un très mauvais calcul des forces nécessaires pour protéger la ligne frontalière de Gaza. Mais il faudra aussi comprendre les choix stratégiques de l’échelon militaire et de l’exécutif. Depuis la 1ère Intifada à la fin des années 80, Israël avait laissé, voire encouragé, l’émergence du Hamas comme moyen de diviser et d’affaiblir le front palestinien. Depuis le retrait unilatéral de la bande de Gaza en 2005 et la prise de l’enclave par le Hamas en 2007, Israël a accepté que l’organisation islamiste terroriste soit aussi un acteur politique. Si le Hamas avait quelque chose à perdre, il deviendrait pragmatique. Une conception qui vient de donner la preuve de son échec.
Mais si le Hamas s’est organisé seul, cela ne veut pas dire qu’il ait agi de sa seule initiative. Pour Israël, il ne fait aucun doute que l’attaque porte la signature
La rave party tourne au cauchemar
même que le nombre de victimes de celui de Kfar Aza, particulièrement atroce, où des corps d’enfants décapités ont été découverts. On dénombre 200 personnes tuées sur les 700 habitants et 40 enfants victimes de décapitation.
Plusieurs milliers de jeunes participaient à un festival de musique dans la forêt de Re’im depuis la veille au soir. Ils voient arriver des jeeps avec des hommes en armes qui ouvrent le feu. Les jeunes tentent de fuir, mais sont rattrapés par les terroristes, qui les attaquent au RPG et par des grenades jetées depuis des ULM. D’autres sont mitraillés à mort dans leurs voitures. D’autres encore abattus jusque dans les arbres où ils se sont cachés. On retrouvera 260 corps, sans compter les otages emmenés à Gaza.
N° 1707 - 12 octobre 2023 de l’Iran. Et dans ce cas, ce n’est que le début d’un plan par étape qui doit ouvrir d’autres fronts : la Judée-Samarie, Jérusalem, le secteur arabe israélien et le front nord.
QUE VA FAIRE LE HEZBOLLAH ?
C’est d’ailleurs ce qu’avait promis le chef de la branche armée du Hamas, Muhammad Deff, dès le matin du 7 octobre, en annonçant le lancement du « Déluge d’al-Aqsa ». Pour la chercheuse Orna Mizrahi de l’INSS, l’entrée du Hezbollah dans le conflit est à peu près certaine. Ce qui l’est moins, c’est à quelle intensité. « Il y a trois scénarios. Le Hezbollah se limite à quelques actions ponctuelles pour marquer sa solidarité avec le Hamas. Il peut aussi entrer dans le conflit avec des objectifs limités. Ou il peut céder à la tentation d’engager une guerre totale. J’opterais pour une combinaison des deux premiers scénarios », estime Orna Mizrahi. Et le front nord a déjà connu plusieurs incidents, dont une tentative d’incursion en Galilée occidentale, revendiquée par le Jihad islamique.
Le gouvernement israélien a proclamé l’état de guerre. « Le Hamas, c’est Daech et nous le vaincrons comme le monde libre a vaincu Daech », promet Benyamin Netanyahou. L’aviation de Tsahal répand un déluge de feu sur Gaza pour dévaster l’infrastructure politique et militaire du Hamas. L’évacuation des localités frontalières de l’ouest du Néguev est en cours. Celle des habitants des localités de la frontière nord est en préparation. Un rappel général des réservistes pourrait suivre celui des 300 000 déjà mobilisés. Et les Israéliens espèrent que la formation d’un gouvernement d’urgence avec les partis d’opposition achèvera d’apaiser les tensions internes de ces derniers mois. Si la colère se mêle encore à la sidération, l’état de choc fait progressivement place à la conscience de la gravité historique de ce qui restera peut-être comme les heures les plus sombres d’Israël. Les comptes se feront plus tard. Maintenant, il faut se battre pour la maison. n
Pascale Zonszain
Entretien
Le géopolitologue israélien et président d’Elnet Israël répond aux questions d’Actualité Juive.
Comment expliquer qu’une offensive du Hamas d’une telle ampleur ait pu avoir lieu sans qu’Israël n’ait rien anticipé ?
Emmanuel Navon : Depuis 2009, la stratégie de Netanyahou a été de pactiser avec le Hamas et de le laisser se développer et parallèlement de miser sur la défense, avec une barrière de sécurité et un blocus maritime militaire en coordination avec l’Égypte. L’analyse était que tant que le Hamas dirige Gaza, cela contribue à la division entre l’enclave côtière et les territoires de Judée-Samarie sous contrôle de l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas. Et la situation était gérable, malgré les attaques périodiques de roquettes et les contre-attaques de Tsahal. Mais cette conception s’est révélée biaisée. Le Hamas a fait la preuve de ses capacités, avec le soutien logistique, politique et financier de l’Iran. Il a attaqué Israël par air, terre et mer avec des conséquences catastrophiques, encore pires que celles de la guerre de Kippour en 1973. Avec des massacres de civils, d’enfants tués devant leurs parents, de vieillards pris en otage. Avec des missiles tirés jusqu’à Tel Aviv. Une humiliation bien pire que celle infligée à Israël il y a cinquante ans.
Sdérot en état de guerre Des terroristes qui entrent dans les rues de la ville. Ils ouvrent le feu et font plusieurs victimes. Les forces de sécurité, après de violents affrontements libèrent les habitants cernés dans leurs maisons. Les terroristes prennent d’assaut le poste de police et se barricadent avec des otages. Il faudra près de 20 heures de combat et l’intervention d’armes lourdes et d’un blindé pour libérer le poste et éliminer le dernier terroriste.
Quel rôle a joué la crise politique intérieure qu’Israël traverse depuis dix mois sur fond de réforme judiciaire ?
E.N. : Ce n’est pas cela qui a affecté les capacités de défense d’Israël. Il s’agissait de manifestations légitimes contre une partie de la politique gouvernementale. Ce n’est pas cela qui explique que le Hamas ait réussi à neutraliser les capacités technologiques de Tsahal. C’est un échec de l’armée qui n’avait pas assez de forces sur le terrain. En revanche, dans la perception du Hamas, oui, la crise politique a joué un rôle. Le Hamas, comme toutes les organisations terroristes, ne comprend pas les sociétés libres. Il a interprété à tort les divisions sociétales comme un effondrement du pays. Parce que c’est comme ça que ça se passe chez eux. Mais chez nous, c’est l’inverse. Chez nous, la société resserre les rangs et refait l’union quand elle est attaquée.
Comment peut-on résoudre la tragédie effroyable des otages israéliens retenus à Gaza ?
E.N. : C’est un piège. Soit on négocie en position de faiblesse, soit on lance l’offensive avec le risque de toucher les otages et de perdre la possibilité de les libérer. C’est une catastrophe.
Quelles peuvent être les répercussions régionales de cette guerre qui s’ouvre avec le Hamas ?
E.N. : Aucune espèce d’importance pour le moment. On est en guerre, ce n’est pas le problème.
Le soutien international s’est manifesté très rapidement et en particulier celui des États-Unis, mais pas seulement. Est-ce que ce soutien va durer quand les opérations militaires de Tsahal vont s’intensifier ?
E.N. : Le soutien américain est constant depuis la fin des années 60. Le président Biden a de nouveau prouvé dans les faits qu’il est l’allié d’Israël. Les États-Unis comprennent que l’Iran est derrière le Hamas et aussi que l’Iran est soutenu par la Russie et par la Chine. Donc, leur soutien n’est pas seulement motivé par leur amitié pour Israël. Ils comprennent parfaitement les conséquences possibles d’une victoire ou même seulement de points marqués par l’Iran. Exactement comme les conséquences qu’aurait une défaite de l’Ukraine face à la Russie. L’aide américaine est aussi importante dans l’éventualité d’une guerre sur deux fronts. Quant à l’Europe, elle soutient aussi Israël car elle a compris que le but du Hamas n’est pas de mener une lutte pour l’autodétermination, mais qu’il s’agit d’une organisation barbare, ennemie des Juifs et de l’Occident. Pour la suite du soutien en Europe, cela dépendra évidemment des dirigeants des différents pays. Certains maintiendront un soutien inconditionnel, d’autres émettront probablement des réserves. Mais si l’on regarde la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni ou l’Italie, et même la cheffe de la diplomatie européenne, Ursula von der Leyen, on sait qu’on peut compter sur eux.
Un gouvernement d’union est-il indispensable ?
E.N. : Non. Pas pour la population qui soutiendra de toute façon le gouvernement et qui se battra. Car les Israéliens se battent pour leur pays, pas pour un dirigeant. Que l’opposition entre ou non au gouvernement, elle a déjà assuré qu’elle soutiendrait le gouvernement de l’extérieur. Mais il est vrai qu’un gouvernement d’union aurait des avantages. Notamment celui d’envoyer un message clair à l’ennemi. Mais il ne peut se former à n’importe quel prix. D’ailleurs, le jour où la guerre prendra fin, il faudra des élections. Ce gouvernement ne devra pas rester en place une minute de plus. n Propos recueillis par Pascale Zonszain
Hamas : acr onyme de Mouvement de résistance islamique
l Fondé en 1987 par la branche des Frères musulmans en Cisjordanie dirigée par le sheikh Ahmed Yacine. Objectif : fonder un État islamique sur le territoire de l’État d’Israël, la Judée-Samarie et la bande de Gaza par le djihad et la destruction d’Israël l Classé organisation terroriste par Israël, les É tatsUnis et l’UE l Au cours de la seconde Intifada, il a perpétré 425 attentats qui ont fait 377 morts et 2056 blessés l 2000 : premières roquettes c ontre Israël l Aux législatives de 2006, le Hamas emporte la majorité. L’AP ne reconnaît pas le résultat. En 2007, il prend le contrôle de Gaza après avoir renversé l’AP.
Organisation : l Branche armée commandée par Muhammad Deff. Effectifs estimés : 20.000 hommes l Direction politique de Gaza : Yahya Sinwar l Direction politique extérieure : basée au Qatar sous la direction d’Ismaïl Haniyeh et de Salah Arouri, chargé de la Cisjordanie l Financement : l’Iran participe à hauteur de 100 millions de dollar s par an l Arsenal estimé : 30 000 à 50 000 r oquettes