La Puce n° 107

Page 1

LA PUCE à L’OREILLE Publication du MFPF 34 - N°107 - 3ème trimestre 2010

Sommaire P.2 Actualités nationales et internationales Université d’été Marche mondiale

P.5 Actualités locales Colloque mariages forcés Estime de soi

P.8 Droits fondamentaux Marions-nous gayment Homoparentalité

P.10 Santé Mortalité maternelle Dépistage VIH

P.11 Culture Littérature jeunesse

P.12 Bulletin d’abonnement

C olè r e à t ous le s é t a ge s Depuis septembre, les raisons n’ont pas manqué de descendre crier notre colère, notre indignation, notre sentiment d’injustice : xénophobie rampante qui mine l’idéal républicain, réforme des retraites qui pénalise les femmes aux carrières en dents de scie et aux salaires minorés, accentuant les inégalités qui perdurent entre hommes et femmes ; réforme de l’Hôpital public (loi Hôpital-patient-santé- territoire) qui menace le droit à l’avortement et la qualité des soins ; violences faites aux femmes... À Montpellier, comme des milliers de citoyens dans toute la France, nous avons battu la pavé, sous la bannière du Comité de vigilance, et nous continuerons d’être mobilisé(e)s contre tout ce et tous ceux qui entravent la liberté des femmes et la marche vers l’égalité. n Fatima Bellaredj, président de l’AD 34

1

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Actualités nationales & internationales

Université d’été tonifiante Deux jours durant à Bordeaux, les militant(e)s du Planning ont échangé et débattu sur l’éducation à la sexualité, thème de l’université d’été 2010. Retour non exhaustif sur ce week-end vivifiant. ACCUEILLIE du 10 au 12 septembre dans les locaux du conseil général de la Gironde, l’université d’été du Planning familial avait cette année pour thème « Education à la sexualité, éducation sexualisée ? ». Entre ateliers, tables rondes et apéros-discussions militant(e)s et intervenant(e)s ont réfléchi à cette action commune à toutes les associations locales du MFPF et qui allient deux principes fondamentaux : le féminisme et l’éducation populaire. Comme l’a rappelé Carine Favier, présidente nationale, il s’agissait avant tout de s’interroger sur le sens de nos interventions, notamment auprès des jeunes et à travers l’ « outil » pas toujours utilisable, qu’est la circulaire de 2003 sur l’éducation à la sexualité dans les établissements scolaires. réflexions sociologiques La première table ronde abordait les relations filles-garçons, à travers les interventions d’Isabelle Clair, Virginie Descoutures et Pierre Liotard, tous trois sociologues, et de Vanessa Watremez, doctorante en sociologie et membre de l’association Arteisia (créée par des étudiants de l’université Toulouse-le Mirail pour développer un réseau rassemblant des professionnels du secteur social et des spécialistes de l’égalité des chances entre les femmes et les hommes). Isabelle Clair et Virginie Descoutures ont mené des enquêtes qualitatives sur les rapports garçons-filles dans les cités d’habitat social, en banlieue parisienne et à Paris intra-muros. Le dernier volet de cette vaste enquête est en cours et porte sur le milieu rural (Sarthe). Au centre de ces trois enquêtes, la question de la surveillance de la sexualité des filles, assurée tantôt par le « grand-frère » (figure réinventée), tantôt par la mère et atténuée par la mobilité (importance de la prise en compte de l’espace). La sexualité des filles reste culpabilisée partout mais Isabelle Clair met en garde contre la stigmatisation des garçons de banlieue, dominant envers les filles et dominés partout ailleurs dans

la société. Vanessa Watermez étudie l’homophobie. et la lesbophobie à l’école et souligne l’importance de déconstruire les stéréotypes sexuels dans un contexte où le modèle de couple femme/homme est le seul valorisé. Dans une enquête menée en 2002 dans les établissements scolaires par SOS Homophobie, 30% des jeunes interrogés ont rapporté des actes homophobes. Vanessa Watermez rappelle les conséquences de l’isolement social dont sont victimes les homosexuels et les lesbiennes, qui peuvent aboutir au décrochage scolaire, à des comportements sexuels à risques, à la dépression, voire au suicide. Un tiers des tentatives de suicide des jeunes sont en effet liées aux questions d’orientation sexuelle. D’où l’importance de former les personnels encadrant. « Créer un environnement sécurisant pour tous les jeunes est une obligation morale et légale. » D’après Pierre Liotard, « ce qui inquiète les adultes, c’est la sexualité des jeunes ». Éduquer à la sexualité s’accompagne de discours, de valeurs qui ont un impact, qu’on le veuille ou non. Il faut donc travailler sur l’examen de nos propres réactions spontanées, de nos stéréotypes, aller contre les évidences, contre l’émotion première. L’intervenant doit pouvoir faire émerger des choses en dehors du contexte du terrain, « créer des espaces de parole inhabituels, des dispositifs désaxés ». Retenons également l’intervention le ven-

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010

2

dredi, à l’heure de l’apéro, de Camille Bernard, secrétaire nationale du GEsT (Groupe d’étude sur la transidentité) et administratrice de l’A.D 34. Au-delà des aspects réglementaires et techniques, c’est surtout la question du genre qui était posée. « Arborer les stéréotypes de genre peut choquer les féministes que nous sommes, admet Camille. En réalité la personne en réassignation (en processus de changement d’identité sexuelle, ndlr) tente de résoudre qui elle est dans le regard de l’autre. » objectifs politiques Le premier travail en atelier était organisé le samedi matin, sous la forme d’une analyse de la pratique à partir de la question « la première fois ». Qu’est-ce qui nous semble important d’écouter et de dire quand émerge la question de la première fois dans une intervention collective en milieu scolaire ? Qu’est-ce qui peut nous mettre en difficulté ou, au contraire, qu’est-ce qui serait confortable pour nous en tant que professionnels ? Impossible de restituer l’ensemble de ce qui a pu s’échanger dans les différents ateliers, mais cela fut en tout cas l’occasion de partager nos expériences, entre A.D et de nous enrichir mutuellement. La deuxième table-ronde du week-end proposait un regard croisé entre Janine Mossuz-Lavau, politologue, et Claire Ricciardi, présidente du Planning 13. Sans doute la table ronde la moins marquante, mais qui fut néanmoins l’occasion de re-


Actualités nationales & internationales

poser des questions qui traversent tout le mouvement : vers quel militantisme-action peut-on renvoyer les jeunes que nous rencontrons et quelle forme de politisation proposons-nous ? Comment articuler notre pratique et nos objectifs politiques ? Cette table-ronde a aussi engagé un débat avec la salle sur la laïcité : concept perçu comme central par certains, dont Janine Mossuz-Lavau. L’après-midi fut consacrée au second atelier, en lien avec la tableronde : « rôle de l’animateur(trice) et objectifs politiques du Planning : questionner ou transmettre ? Information ou éducation populaire ? » Et de s’interroger sur la posture professionnelle et la posture militante. Éducation Nationale et éducation à la sexualité La journée n’était pas terminée. Une troisième table-ronde, intense, attendait les participant(e)s : comment aller vers une éducation sexualisée ? Et pour enrichir le débat, plusieurs intervenants avaient été invités : Ingrid Darroman, co-responsable du groupe femmes au SNES (syndicat nationale de l’enseignement secondaire), Béatrice Gaultier, secrétaire générale du SNICS (syndicat national des infirmiers et conseillers de santé), Gwenaëlle Pomares, reponsable du Pôle prévention et citoyenneté au Conseil général des Bouches du Rhône et Jean Faller, du SNPDEN (Syndicat nationale des personnels de direction de l’Education Nationale). Ingrid Darroman a relaté avec humour son parcours de combattante pour dénicher des informations sur l’éducation à la sexualité sur le site Eduscol (entre développement durable et sécurité routière !). Cette jeune syndicaliste déplore l’absence de formation uniforme au niveau national, une capacité d’accueil insuffisante dans les formations, le manque de moyens financiers des Comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté… Tout repose en fait sur la volonté individuelle. Elle identifie cependant plusieurs leviers : la mobilisation sur les droits des femmes, la mise en réseau, la sollicitation des missions égalité hommes/femmes au sein des rectorats et appelle de ses vœux la construction d’un réseau militant au sein de l’éducation nationale. Seul homme à intervenir, Jean Faller, chef d’établissement ne s’est pas fait que des amis, à la tribune comme dans la salle, se réfugiant derrière les contraintes réglementaires. Réjouissante fut l’intervention de Gwebaëlle Pomares, qui a démontré que lorsqu’on veut, on peut. En 2009, le conseil général 13 a débloqué 297 000 € pour mener 290 actions dans 91 des 135 collèges que compte le département et proposé

LA DOC SUR LE PONT ! Saluons la présence pendant ces trois jours des documentalistes du Planning confédéral. Elles ont assuré la présentation et la vente d’une partie des ouvrages disponibles au centre de documentation. Textes toujours bienvenus pour réactualiser ses connaissances et pour alimenter ses réflexions. Parmi les « spécial université d’été », citons le dossier documentaire « Sexualité et éducation à la sexualité », Les jeunes et l’amour dans les cités (Armand Collin, 2008) d’Isabelle Clair et La première fois. Le passage à la sexualité adulte (Payot, 2007) de Charlotte La Van et Didier Le Gall. L’ouvrage collectif Réflexions autour d’un tabou : l’infanticide était également présenté. Support d’un prochain débat confédéral, il est disponible au prêt à l’AD 34. On peut aussi le commander (8 €) auprès du centre de documentation du MFPF. centre de documentation : 01 48 07 29 10 ou documentation@planning-familial.org.

un guide des actions éducatives à tous les établissements. Dernier jour et dernière table ronde : travailler avec les jeunes. À la tribune, trois représentants d’organisations de jeunesse : le président de la Mutuelle des étudiants (LMDE) , le vice-président de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF) et le président de l’Union nationale lycéenne (UNL). Si la salle n’a pas toujours été tendre face à ces trois jeunes hommes, interrogés notamment sur la mixité de leur mouvement, certaines ont applaudi leur discours résolument féministe. L’UNEF propose ainsi à tous ses nouveaux militants une formation obligatoire sur les droits des femmes et le féminisme. Et si on en faisait autant au Planning ? Des différentes interventions, toutes pertinentes, il ressort la nécessité autant que la volonté d’un partenariat entres les acteurs, et notamment entre l’UNEF, la LMDE, l’UNL et le Planning pour toucher le plus grand nombre de jeunes. Se pose également la question de la façon d’associer les jeunes à l’éducation sexualisée, de les mettre en dynamique (formation par les pairs notamment). La problématique des études de médecine, qui font l’impasse sur la contraception, a été largement évoquée. Au moment de clore l’université, Carine Favier a insisté sur la nécessité de poursuivre la construction de politiques relais, de redéfinir notre politique avec les jeunes et d’interpeller les politiques sur leur engagement à faire avancer l’éducation sexualisée. Cela dans un contexte de remise en cause des droits sociaux (retraites, A.M.E...), de désengagement de l’État et de réforme des collectivités locales, qui pèsent lourd dans le financement des associations. «Nous savons que les lendemains ne seront pas faciles mais je pense que nous avons puisé dans cette université d'été l'énergie nécessaire pour les futures mobilisations.» n Marion Danton

3

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Actualités nationales & internationales

En avant, marche ! Une conférence débat s’est tenue en octobre à Montpellier pour rendre compte de l’étape de la Marche mondiale des femmes à Bukavu, en République démocratique du Congo.

AFP - NR

LES FEMMES ONT MARCHÉ A BUKAVU et une conférence débat était organisée jeudi 21 octobre à Montpellier, pour rendre compte de cet évenement (voir encadré) : il s’agissait d’attirer l’attention sur les liens entre la violence envers les femmes, les conflits et la militarisation. Cette soirée avait reçu le soutien du Centre de Documentation Tiers Monde. Ce fut une soirée à la fois chaleureuse et créative, riche en informations et éléments d’indignation et de colère, peu relayée dans les différents réseaux. Joëlle Sembi-Nzeba, journaliste congolaise, vivant actuellement à Bruxelles et mandatée reporter par la Marche mondiale des femmes, a couvert la manifestation de Bukavu. Elle a projeté de très belles photos de la marche et de femmes victimes des crimes de guerre qu’elle a rencontrées. Elle a parlé de la double persécution de ces femmes qui ont été victimes de viol par des soldats et qui souvent sont rejetées par leurs familles et communautés. La grande manifestation de Bukavu a eu très peu de répercussions dans la presse, tant au Congo que dans le monde - en France, « silence radio ». Ritta Baddoura, libanaise, auteure et artiste psychologue clinicienne et animatrice d’ateliers d’écriture m’a profondément

Des Pygmées congolaises participent à la marche des femmes à Bukavu en octobre. émue et a vraiment charmé mes oreilles en déclamant son poème Ici désert : sa voix, son corps disaient, parlaient autant que ses mots. Un moment très fort pour ouvrir et clore cette soirée où nos mots, nos détresses vis-à-vis des témoignages de souffrance et d’indifférence, semblent vains. Valéry Meynadier, romancière, nouvelliste, poète et comédienne, anime des ateliers d’écriture en collèges, lycées, milieu carcéral et hôpital psychiatrique : elle a lu des extraits de Centaure, son dernier roman, qui donne voix à une prostituée. Raymond Kimika a dû fuir le Congo depuis que la guerre a commencé. Il a créé l’Association pour la santé, l’alimentation et le développement (ASAD*) en lien avec la branche existant depuis 1997 en République Démocratique du Congo. Officiellement, la seconde guerre du Congo, impliquant neuf pays africains sur le territoire a pris fin en 2002 et son bilan est de 4 à 4,5 millions de morts, notamment de famine et de maladie. Des millions d’autres personnes ont été déplacées ou ont trouvé asile à l’étranger. Au Nord-Kivu, environ 100 000 personnes vivent encore dans des camps de réfugiés et les exactions continuent. « Depuis 1996, les équipements médicaux ont été pillés, les femmes violées et utilisées comme des armes de guerre, le pays se confronte à un avenir très sombre » a témoigné Raymond Kimika. Son objectif avec ASAD est de réaliser un programme sur la santé et l’éducation pour redonner des bases constructives au pays. L’association congolaise tente également un travail de médiation entre les femmes victimes de viols et leurs conjoints, leurs familles. n

Marche mondiale : troisième édition Dès 2009, le mouvement avait lancé un appel pour la 3ème Marche mondiale des Femmes (MMF) : « Changer le monde pour changer la vie des femmes, changer la vie des femmes pour changer le monde ». L’appel rappelait qu’au Nord comme au Sud, les droits des femmes sont menacés, remis en cause, voire niés. La logique de la crise capitaliste aggrave la précarisation, le chômage et la privatisation des services publics, ce qui affecte en premier lieu les femmes. En même temps, les pouvoirs d’Etat et intégrismes religieux imposent ou tentent d’imposer leurs choix patriarcaux aux femmes et de les renvoyer au foyer et à la procréation. Entre le 8 mars et le 17 octobre 2010, des actions collectives en France, en Europe et dans le monde, ont été organisées sur les quatre thèmes de la 3ème Marche Mondiale des Femmes pour 2010 : biens communs, biens publics ; paix et démilitarisation ; travail des femmes et autonomie financière ; violences envers les femmes. À Montpellier, une marche symbolique a eu lieu pour le 8 mars, soutenue par le comité de vigilance pour les droits des femmes. Les « Marcheuses » de nombreux pays se sont retrouvées du 14 au 17 octobre à Bukavu (sud Kivu), en République Démocratique du Congo pour représenter les femmes du monde en action commune pour la liberté, l’égalité, la solidarité, la justice et la paix. La 3ème Marche Mondiale des Femmes a rassemblé des milliers d’africaines et des délégations de différents pays du monde dans la douloureuse région des Grands Lacs pour manifester leur soutien avec toutes les femmes vivant et subissant les dérives criminelles dans les zones en guerre et en conflit. LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010

Marie-Christine Vion-Leclerc, avec la collaboration de Nicole Nourrigat de la MMF sBibliographie Le monde est gueule de chèvre, Joëlle Sembi-Nzeba, Biliki (www.biliki.com) De l’obscure étincelle, Ritta Baddoura, l’Harmattan. Du même auteur : Ritta parmi les bombes, Saqi books éditeur et Ici désert, Dergham Centaure, Valéry Meynadier, éditions Chèvre feuille étoilée

4


Actualités locales

Estime de soi et prise de risque Depuis plus d’un an, le planning familial lozérois a pu diversifier et développer ses actions. « RÉVEILLÉ » EN 2006 sur le territoire lozérien, le Planning familial 48 fait petit à petit son chemin sur le département : de la formation des bénévoles, rencontre des acteurs de terrain, création d’un lieu d’écoute sur les questions de sexualité à la professionnalisation de l’association avec la création d’un poste salarié de conseillère conjugale familiale. Ainsi, depuis maintenant plus d’un an, l’AD 48 a pu diversifier et développer ses actions : entretiens individuels, animations collectives, groupes de paroles… L’estime de soi est un élément essentiel que nous travaillons dans nos actions de prévention. Le manque d’estime de soi est le moteur de bien des conduites à risques. Il est donc important de le mesurer pour pouvoir le travailler avec une personne, un groupe. Travailler à « se-restimer » peut être un des chemins de la réussite et de la réduction des conduites à risques. Par exemple, notre objectif premier dans nos animations collectives est l’instauration d’un dialogue entre garçons et filles ouvrant sur la prise en charge, la création de situations ou les jeunes se sentent appréciés et compétents. Il est pour nous indispensable de multiplier les surfaces de reconnaissances, toutes occasions permettant de recréer de la valeur, de la qualité, dans le respect mutuel. Cela signifie de reconstruire de l’échange, du social où il s’est fragmenté et là où l’on incrimine les difficultés de communication en stigmatisant encore davantage ceux qui sont dans des difficultés extrêmes et ceux qui ne sont pas dans la norme sociale actuelle. Dès le départ, un certain cadre est choisi et défini ensemble, ce qui permet, dans un premier temps, de sécuriser et de mettre en confiance le groupe. Ensuite, nous nous appuyons sur leurs propres ressources, l’objectif est alors de développer l’estime de soi, la confiance en soi, les aptitudes à communiquer avec l’autre, avec le groupe, la gestion des émotions afin de garantir le bien être au sein du groupe. L’enjeu est d’arriver, à partir d’un travail concret autour de l’expression et de la communication de leur propre vécu ou de leur représentation, à créer une prise de conscience individuelle. Il est intéressant que le groupe luimême puisse amener certaines personnes qui

ont des modes de pensées et des comportements relativement stéréotypés, à découvrir qu’il existe des comportements et des modes de pensées différents. Nous essayons dans un groupe que chacun puisse prendre la parole et exprimer son propre point de vue en garantissant le non jugement. Le partage au sein d’un groupe permet de donner une dimension collective à des difficultés individuelles rencontrées dans la vie privée. Dans les groupes, les personnes échangent, se soutiennent, prennent conscience qu’elles ne sont pas seules à vivre certaines situations difficiles, qu’elles ne sont pas toujours responsables de ces difficultés. reprendre du pouvoir L’intérêt majeur, pour le public que nous rencontrons, soit en entretien individuel soit en groupe, est qu’en prenant comme axe principal de nos interventions, de développer l’estime de la personne, celle-ci peut reprendre du pouvoir sur sa vie tout en sachant ce qui est réalisable et bien pour elle-même. L’échange en groupe permet de développer des capacités personnelles et de découvrir de nouvelles compétences, contribuant à renforcer ainsi l’estime de soi. Dans le même temps, on travaille particulièrement sur les questions des relations fille/garçon, femme/homme, en échangeant sur les deux points de vue du masculin et du féminin. Il s’agit de faire réfléchir sur les rôles et les assignations de genre, et non pas de faire la guerre des sexes ! Ce sujet est en transversal dans toutes nos interventions et il est pour nous indissociable du travail sur l’estime de soi. Pour conclure, nous pouvons dire que nous travaillons essentiellement à l’accompagnement d’une réflexion et non pas sur un modèle de transmission de savoir. Nous travaillons davantage autour du choix que sur la défense de nos positions. Partir du vécu des personnes et leur permettre de réfléchir à leur rapport aux risques, aux alternatives possibles, n’est pas renoncer à une amélioration des comportements. C’est faire confiance aux capacités des personnes, bref c’est de l’éducation populaire.n Fanny Vandermersch conseillère conjugale et familiale

5

Cause toujours ! OVNI apparu dans les kiosques en mars 2009, Causette, le magazine « plus féminin du cerveau que du capiton », sort en cette fin d’année son onzième numéro. En dix-neuf mois, il a su faire son trou, comblant l’espace vacant entre la presse féminine aux sommaires peoplebeauté-sexe-cuisine, et les hebdomadaires d’information dits généralistes. Bannissant des ces pages la publicité ainsi que toutes les images stéréotypées et les injonctions de genre qui polluent les Elle et autres Biba, ce bimestriel se veut impertinent et aiguiseur de sens critique. Si la qualité des articles reste encore inégale, on apprécie son ton énergique et revendicatif et ses points de vue engagés et résolument féministes. Un bol d’air dans le paysage conforme et uniforme de la presse magazine !

En vente dans certains bons kiosques (liste sur www.causette.fr- rubrique kiosque, « où trouver causette ? »), tous les deux mois, 4,90 €.

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Actualités locales

Dire non dans toutes les langues En attendant la publication des Actes du premier colloque européen sur les Mariages forcés qui s’est tenu le 8 octobre à Montpellier, voici un bref compte-rendu de cette journée. UN COLLOQUE EUROPÉEN sur les mariages forcés était organisé le 8 octobre par le Planning Familial, avec le Réseau de jeunes filles confrontées aux violences et aux ruptures familiales, le Fonds européen d’Intégration, et le soutien du Ministère du travail, de la solidarité et de la fonction publique, et du secrétariat d’État chargé de la Famille et de la solidarité. Après une remise en perspective sociologique du mariage, les interventants invités ont présenté plusieurs initiatives européennes. Toutes abordent les situations vécues par les jeunes filles sous l’angle des violences, et non comme un problème lié aux origines des personnes concernées. Elles insistent également sur le lien aux parents, et la nécessité d’un travail à mener avec eux et non contre eux. Le combat est bien celui de la liberté. En introduction, Coline Erlihman, déléguée régionale aux droits des femmes et à l’égalité, représentant le Préfet, a rappelé qu’il n’y a pas de mariage sans consentement libre, réel, et éclairé et que la loi française de 2006 a porté l’âge légal du mariage des filles à 18 ans. Carine Favier, présidente nationale du Mouvement Français pour le Planning Familial a introduit les travaux du colloque, en évoquant la « clause de l’Européenne la plus Favorisée (*) » votée le 19 Février 2010, qui doit maintenant être mise en œuvre. Elle a aussi précisé que l’Assemblée Nationale a alourdi les peines de violences, actes de barbarie et meurtres qui accompagnent les mariages forcés. Elle insiste et rappelle que les jeunes filles ne se battent pas contre leurs parents, mais pour leur liberté. Dès 2004, le Planning Familial a organisé un premier colloque sur ce sujet et travaille dessus depuis près de dix ans. Le but maintenant serait de pouvoir organiser onze colloques dans onze régions de France. dix ans de travail à Montpellier Fatima Bellaredj, présidente du Planning de l’Hérault, a résumé le travail effectué depuis dix ans à Montpellier. Dès l’année

Projet de couverture d’Olivia Paroldi-Vukojiac pour un ouvrage regroupant des témoignages sur les mariages forcés. 2000, sept situations de mariages forcés s’étaient présentées avant l’été. Les mariages forcés sont une violence singulière qui vise au contrôle du corps et de la sexualité. Plusieurs outils ont été mis en place : un numéro de téléphone, un guide des démarches à effectuer, un réseau de familles d’accueil, une campagne d’affiches diffusées nationalement, la création d’un site Internet… En 2008, la signature d’un accord avec le ministère a représenté une reconnaissance nationale. une réalité sociale complexe Durant la suite de la matinée, Christelle Hamel, sociologue à l’INED, a présenté une étude réalisée en 2008 sur les mariages forcés. « Une réalité sociale complexe ». Cette étude est basée sur un questionnaire d’une heure, proposé à un échan-

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010

6

tillon de 22000 personnes migrantes ou pas, âgées de 18 à 60 ans. Tous les courants migratoires y sont représentés, venant d’Espagne, d’Italie, du Maghreb, du Portugal, Vietnam, Laos ou Cambodge, Turquie, Afrique centrale etc. Il s’agissait de savoir qui avait pris l’initiative de leur mariage. Pour les mariages dans les années 60, près de 24% avaient été initiés par pression familiale. Actuellement on n’en trouve plus que 3%. En général, 40 à 60% des mariages sur initiative familiale se sont produit avant la migration .77% des femmes qui ont initié elles-mêmes leur mariage, sont entrées en France célibataires. 40 à 50% des femmes immigrées mariées sur l’initiative de leurs parents, n’ont aucun diplôme. En conclusion, il semble plus pertinent de faire de la prévention auprès des jeunes. Il faut remarquer que l’âge moyen au ma-


Actualités locales

riage a énormément augmenté au Maghreb. Il est actuellement de près de 26 ans et de 2O ans en Turquie. un centre refuge à Berlin Eva Kultus a présenté l’expérience du centre Papataya de Berlin qui reçoit dans un centre secret des Jeunes femmes principalement Turques depuis 25 ans. Ce centre qui a dû souvent déménager, reçoit maintenant également des Tunisiennes, des Palestiniennes, des Iraniennes, des Yougoslaves ou des Roumaines. L’équipe mixte germanoturque est composée de travailleurs sociaux et d’éducatrices. Elles disposent d’environs huit places et gardent ces jeunes femmes près de six semaines. La plupart sont victimes de violences et d’abus sexuels. « Elles n’ont pas appris à dire : non », et en général ont beaucoup souffert avant d’arriver au refuge. Eva pense qu’un grand nombre sont encore enfermées. Elle espérait que leur nombre diminuerait rapidement, mais ce n’est pas le cas car elles sont considérées comme l’honneur de leur famille et sont souvent enfermées à partir de leur puberté. Un mariage précoce permet de confier la charge de l’honneur de la famille à une autre famille. Cette équipe lutte pour que les services de la Jeunesse prennent en charge les plus de 18 ans. Elles ont également instauré un service de conseils par internet pour ces jeunes. Papataya est financé au trois-quart par le Sénat de Berlin, et le reste par des dons privés. aide psychologique en suède Sevil Brenner, Suédoise, psychothérapeute et écrivaine, s’est engagée il y a huit ans au sein de Save the Children, suite au meurtre d’une jeune fille par son père. En Suède on parle surtout de crimes d’honneur. Les filles sont battues et trouvent cela normal. Il faudrait pouvoir diagnostiquer les risques que courent les filles (ainsi que quelques garçons). La Suède veut absolument que l’on considère qu’il s’agit d’un problème suédois et non d’immigrés. Elle a mis en place un site internet pour permettre à ces jeunes filles d’appeler au secours. La plupart sont loyales vis-à-vis de leurs parents et se sentent coupables. Ce sont vraiment

des «poissons hors de l’eau » Il est important de travailler avec ces victimes sur les sentiments de haine et d’amour qu’elles peuvent éprouver. Le risque de dépression suite à une rupture avec leur famille est important. Presque toutes parlent de suicide. Donc les psychothérapies sont importantes en direct ou par Internet.

un réseau belge efficace Après les questions et précisions demandées par les participantes dans la salle et le repas partagé, Patrick Petitjean de la Fédération Laïque des centres de Planning Familial de Bruxelles a présenté son travail. Le réseau mariages forcés s’est créé avec les groupes engagés contre les violences envers les femmes. En 1999, une enquête a révélé que 13% des personnes d’origine turque les connaissaient. Sur 1200 jeunes de 15 à 18 ans, 40% en avaient entendu parler, et 23% connaissaient quelqu’un de leur entourage qui en avait été victime. La question se pose de savoir s’il s’agit ou non d’une pratique en voie de disparition. Le mariage et le regroupement familial sont les seules voies d’entrée dans le pays. D’autre part, la charge de la preuve des violences in-

7

combe toujours à la victime. Leur équipe a mis en place une ligne téléphonique gratuite, et réalisé un film qu’ils présentent dans les maisons de quartier. Cela touche en particulier une population qui « importe des brus et des gendres pour que la pureté turque du conjoint guérisse les blessures de l’immigration ». Certaines filles se protègent en poursuivant des études. La création d’une pièce de théâtre : Amours mortes, ça n’arrive qu’aux autres, est utilisée suivant le principe du théâtre-forum. l’engagement de l’État britannique Kay Sweet, fonctionnaire du ministère des relations Extérieures de Grande Bretagne, a expliqué que dans son pays, ce sont les ONG qui ont forcé le ministère à prendre en charge ce problème dont la plupart des victimes sont des femmes. Mais il y a aussi 4% d’hommes, souvent homosexuels. La plupart sont Pakistanais ou Bengladais. L’objectif de cette Unité, est d’aider les victimes. Leur centre a reçu 1682 appels en 2009 sans compter les appels reçus par la police. Cette année 2010, ils ont traité (jusqu’en octobre) 371 cas. En Grande Bretagne, tout en garantissant la confidentialité de l’aide, ils donnent des informations sur les services sociaux et les abris possibles. Ils donnent des aides pour déménager, des informations juridiques. Au sein de chaque unité de policiers, il y a une personne compétente et formée dans ce domaine. À l’étranger, ils sont aidés par les chaînes des ambassades, et peuvent aider à récupérer des jeunes qui ont la nationalité britannique et qui ont été envoyés dans leur pays d’origine pour ces mariages forcés. Les principaux pays dans lesquels ils interviennent sont le Pakistan, le Bengladesh, l’Inde, la Somalie, l’Ethiopie, l’Irak, l’Afganistan, DubaÏ, le Koweit, la Turquie, le Maroc, l’Europe. Mais c’est au Yémen qu’il est le plus difficile d’agir. n Marianne Loupiac *Cette clause vise à faire bénéficier chaque citoyenne européenne de la législation la plus avancée existant dans l’Union pour chaque aspect de la vie des femmes.

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Droits fondamentaux

Rions un peu...

Ils se marièrent gayment... Depuis dix ans, les législations évoluent pour ouvrir le mariage aux couples de même sexe. Petit panorama mondial de ces avancées. EN AUTORISANT LE 15 JUILLET 2010 le mariage de deux personnes de même sexe, l’Argentine est devenu le douzième Etat dans le monde à légiférer sur l’union homosexuelle. D’autres pays avaient ouvert la voie. Petit rappel historico-législatif (1). En Europe Le 1er avril 2001, ce sont les Pays Bas qui les premiers ont autorisé le mariage aux couples de même sexe leur reconnaissant les mêmes droits qu’aux couples hétérosexuels, dont le droit d’adopter. En juin 2003, la Belgique a légalisé le mariage homosexuel. Ce droit au mariage est reconnu aux étrangers à condition que l’un des deux conjoints soit Belge ou séjourne régulièrement dans le pays. Cependant, la validation de ce mariage en Belgique n’est pas assurée dans son pays d’origine et dépend exclusivement des positions du pays sur la question. En juin 2005, l’Espagne a voté une loi reconnaissant aux gays et aux lesbiennes le droit de se marier et d’adopter des enfants. Le débat sur la question fut houleux dans ce pays encore très catholique. En 2009, la Norvège et la Suède autorisent à leur tour le mariage homosexuel et l’adoption. En janvier 2010 c’est le Portugal qui légalise le mariage gay. Il est suivi par l’Islande fin juin 2010. La Première ministre islandaise, Johanna Sigurdardottir, a inauguré ce nouveau droit en épousant sa compagne le jour de l’entrée en vigueur de la loi dans son pays. Dans le reste du monde Le Canada a reconnu le mariage homosexuel en juillet 2005. Depuis plusieurs années, la majorité des provinces canadiennes l’avait déjà autorisé, arguant en effet que d’interdire un mariage homosexuel était anticons-

titutionnel, au motif de l’égalité entre tous les citoyens. Il n’est pas obligatoire d’habiter sur le territoire ou d’avoir la nationalité canadienne pour y contracter un mariage gay. Aux Etats-Unis, le mariage gay a été autorisé dans les Etats du Massachusetts en 2004, du Connecticut en novembre 2008 ; de l’Iowa en avril 2009 ; dans l’état du Vermont en septembre 2009 ; dans l’état du New Hampshire en janvier 2010 ; enfin dans la ville de Washington depuis le 3 mars 2010. En Californie, des mariages homosexuels ont été effectués entre juin et novembre 2008, puis l’interdiction du mariage homosexuel a été rétabli. Mais le 4 août 2010, cette interdiction a été jugée illégale par la Cour fédérale de San Francisco qui a estimé que c’était anticonstitutionnel. «Date à marquer d’une pierre blanche pour souligner l’avancée des droits des couples homosexuels dans le monde» selon les termes d’une journaliste du journal Le Monde. Au Mexique, il n’est autorisé que dans la ville de Mexico. Enfin, en ce qui concerne le continent africain, seul l’Afrique du Sud a approuvé le mariage homosexuel : c’était en novembre 2006, à une très large majorité. Mais dans de nombreux pays africains l’homosexualité est encore considérée comme un crime sanctionné par une peine de prison, voire par la peine de mort selon les pays. n Françoise Michel sources : lemonde.fr et gaymariage.com (1) Rappelons que le Danemark et la France, sans avoir franchi l’étape matrimoniale depuis, ont été les premiers en Europe à élaborer un statut pour les couples de même sexe : en 1989 pour le Danemark et en 1999 pour la France.

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010

8

petites annonces décalées imaginées par Béatrice et Sophie Cascales u Femme n'aimant pas le sexe cherche éjaculateur précoce pour écourter le devoir conjugal. u Homme

cassé par la vie et au bord du gouffre cherche celle qui saura le recoller et lui faire faire un pas en avant. u Homme

cherche femme pas trop intelligente, mais pas trop bête non plus, enfin comme il faut quoi, sachant tout faire, pour vie commune.

u Homme

maraîcher de profession cherche sa moitié d'orange.

u Homme

efféminé cherche femme hommasse pour être complémentaires.

u Routier

cherche camionneuse pour voir si ça roule.

u Vraie

femme cherche un homme, un vrai, pour relation authentique.

u Homme

attiré par les hommes cherche femme attirée par les femmes pour relation chaste.

u Lesbienne

cherche homme se sentant femme à l’intérieur pour relation homosexuelle discrète.


Droits fondamentaux

.... et eurent beaucoup d’enfants ? La France a encore du mal à considérer que les homo-parents et leurs enfants sont des familles comme les autres. Pourtant, les mentalités s’assouplissent lentement. HOMOPARENTALITÉ : le mot n’existe que depuis 1997. Ce terme englobe aussi bien, selon Anne Chemin, journaliste du journal Le Monde, «les lesbiennes qui partent en Belgique pratiquer des inséminations artificielles avec donneur, les gays qui reviennent des Etats-Unis avec des enfants nés de mères porteuses ou les homosexuels qui adoptent des bébés en passant sous silence leur vie de couple. Il fait également référence aux «coparentalités», ces couples d’hommes et de femmes qui s’associent pour élever à quatre leurs enfants». La France est très divisée sur ce sujet. Les uns soutiennent que la procréation n’est biologiquement possible qu’à partir des deux sexes et que «la construction psychologique d’un enfant a besoin de repères issus de l’altérité sexuelle des deux parents». Ceux qui défendent l’homosexualité, s’appuient sur des études démontrant que les enfants de couples homosexuels, «ne vont ni mieux, ni moins bien que les autres» et, comme le cite Anne Chemin, « ne deviennent pas plus souvent homosexuels que les autres, que leur identité sexuée est aussi solide que celle des autres et que leurs comportements sexués - ontils des amis filles ou garçons ? Choisissentils des jeux associés au féminin ou au masculin ? - sont semblables à ceux des autres. En revanche, ces enfants affichent parfois une certaine inquiétude face au regard des autres». Mais «Les choses pourraient changer grâce à l’Europe» déclare Philippe Rollandin, porte-parole de l’Association des parents gays et lesbiens (APGL) car le 15 septembre 2010, «la Cour européenne des droits de l’homme a déclaré recevable la requête d’un couple de femmes homosexuelles auquel la justice française refuse l’adoption de l’enfant de l’une par l’autre». Évolution également récente du juridique en France puisqu’en juillet 2010, la Cour de Cassation a ordonné qu’un jugement d’adoption prononcé aux États-Unis au bénéfice d’un couple de femmes franco-

américaines soit exécuté en France. Il s’agit de deux femmes dont l’une, américaine, est mère d’un enfant ; l’autre, sa compagne française, voulait adopter cet enfant pour être aussi reconnue parent, ce qui a été accordé par la loi aux EtatsUnis. La loi française ne reconnaissait pas ce jugement et seule la mère biologique était considérée comme parent de l’enfant. Depuis l’arrêt de la Cour de cassation, l’enfant bénéficie d’une double filiation, les deux femmes sont donc reconnues «mères» alors qu’elles avaient été déboutées par la Cour d’appel de Paris en 2008. 100 000 familles homoparentales Bien des couples de même sexe élèvent ensemble des enfants, reconnus ou pas : c’est un état de fait. Sait-on combien d’enfants sont concernés ? En 2005, l’Institut d’études démographiques (Ined) recensait en France, entre 24 000 et 40 000 enfants résidant avec un couple de même sexe, en grande majorité des couples de femmes. Mais n’étaient pris en compte que les couples résidant dans le même logement. L’association des parents gays et lesbiens (APGL) estime quant à elle, que 200 000 enfants sont élevés dans 80 000 à 100 000 familles homoparentales. Il semblerait que 57 % de l’opinion soit favorable à l’homoparentalité . Signe d’évolution encore avec «Les Journées européennes des familles homoparentales» qui se sont tenues à Paris les 17 et 18 septembre 2010 organisées par l’AGPL avec un réseau de 17 association européennes homoparentales (NELFA). Avec pour objectif de «Mettre en lumière la diversité des familles homoparentales en Europe, ainsi que d’élaborer des projets visant à promouvoir la reconnaissance et les droits des familles homoparentales». «Le bilan est très positif», selon Philippe Rollandin, «cependant, a-t-il admis, il reste beaucoup de travail à faire, notamment dans le secteur de l’éducation. C’est

9

un terrain important pour lutter contre l’homophobie de manière générale et contre les préjugés à l’égard de leurs parent.» On ne peut nier que l’homoparentalité existe bel et bien en France, comme l’a précisé lors de ces journées, Najat Vallaud Belkacem, secrétaire nationale du PS chargée des questions de société : « c’est un fait objectif mais notre droit français la nie, ignorant que le monde a changé avec l’union libre, le pacs ou encore les multiples parentalités. La société française est prête. Les Français sont de plus en plus ouverts à ces idées. Il y aura bientôt une occasion de rediscuter de la procréation médicalement assistée pour les homos et de l’adoption lors de la révision de la loi bioéthique. Il faudra alors convaincre sur deux blocages, l’intérêt supérieur de l’enfant et la question du droit de l’enfant. » Affaire à suivre, donc… n Françoise Michel Sources : Revue de presse du MFPF ; www.lemonde.fr ; www.lepoint.fr ; www.liberation.fr ; Le Monde du 19 juin 2010 ; http://yagg.com (articles d’Esther Trousset sur l’homoparentalité)

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Santé

Donner la vie, risquer la mort ? Les femmes meurent encore trop souvent en couche dans le monde, notamment parce que l’accès à la contraception fait défaut, entraînant des grossesses trop précoces et trop rapprochées. PLUS DE 500 000 femmes meurent encore pendant leur grossesse ou leur accouchement chaque année dans le monde. Les ONG médicales internationales s’alarment : les progrès espérés concernant la santé des mères en particulier dans les pays du tiers-monde, ne sont pas au rendez-vous. La moitié de ces décès ont lieu en Afrique Subsaharienne et un tiers en Asie du Sud Est. Ce nombre élevé de décès est dû aux grossesses trop précoces et trop rapprochées. L’accès à la contraception est tout à fait insuffisant. On évalue à 20% le nombre de femmes en Afrique subsaharienne qui souhaiteraient une contraception et n’y ont pas accès. Si cet accès était plus facile, il permettrait de réduire les avortements non médicalisés qui sont à l’origine de 13% de la mortalité maternelle. Pourquoi cette situation alors qu’en 2000, l’ONU s’était engagée à réduire des trois-quarts la mortalité maternelle et à rendre l’accès à la médecine procréative universel ? Les pays concernés ont de la peine à honorer les engagements pris en 2001, et l’aide extérieure est insuffisante. Selon l’organisation mondiale de la

Santé et la Banque Mondiale, 36 Millions de dollars seraient nécessaires (alors que l’aide n’est que de 20 Millions) pour atteindre les objectifs des Nations Unies de réduire en 2015, le taux de mortalité maternelle. Cette situation s’explique par des réticences politiques et religieuses. L’administration OBAMA a maintenant rompu avec la politique de Bush et débloqué 12 Millions de dollars pour la promotion de la contraception en Afrique et en Asie. Mais le gouvernement Canadien maintient une politique conservatrice. D’autre part, en Chine et en Inde, les politiques coercitives de contraception ayant pour but le contrôle de la démographie, ont nui à son acceptation. Aujourd’hui, les politiques se présentent plutôt du point de vue du droit des femmes et sont donc mieux acceptées. Au Niger, l’ONG Médecins du Monde, qui participe à un programme financé par l’Union Européenne, depuis 2007, présente la contraception pour « L’Espacement des naissances » notion mieux acceptée par l’Islam que la « Limitation ». Le Niger, avec 7,1 enfants par femme, a le niveau de fécondité le plus élevé au monde. Mais en Afrique subsaharienne, le taux d’accès à la contraception, n’est encore que de 5 à 10 %. Cette situation insoutenable la condamne à l’aide extérieure, selon Jean-Pierre GEGAN de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD). n Marianne Loupiac D’après l’article de Brigitte Perucca, paru dans Le Monde du 12 Mars 2010.

Banaliser le dépistage du VIH LE TAUX DE DEPISTAGE DU VIH en France est plus élevé que dans les autres pays européens (80 pour mille habitants). On estime pourtant que 50 000 séropositifs ignorent leur statut. Or, connaître précocement son statut, cela permet de ralentir l’évolution de la maladie grâce aux traitements et d’adapter son comportement sexuel en se protégeant, et donc en limitant la transmission du virus. Afin de mieux comprendre le comportement des personnes face au dépistage (Qui se fait dépister ? Pour quelles raisons ? Quels sont les freins au dépistage ?) Sida Info Service a mené une enquête du 15 juin au 26 juillet 2010, à travers des questionnaires diffusés sur des sites internet « communautaires » et par la Mutuelle des étudiants (LMDE). Au total 1 357 réponses ont été enregistrées. (*) Constatant la grande diversité des usages du dépistage et des LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010

non-utilisateurs des tests (âge, pratiques sexuelles, attentes, envies, besoins, craintes… ), l’association conclut à la nécessité de « diversifier les offres de dépistage face à une société plurielle » et de les adapter « à la réalité des pratiques ». Elle rappelle le rôle toujours pertinent des Centres de dépistage anonyme et gratuit (C.D.A.G), « préférés des plus jeunes, ces centres permettent aussi une prévention adaptée grâce au counselling pré et post test » et insiste sur la nécessité d’améliorer l’accessibilité au dépistage, d’en généraliser et en banaliser l’usage (lors des consultations médicales classiques par exemple). n Marion Danton (*) les résultats complets sont consultables sur www.sida-info-service.org, rubrique « études ».

10


Culture

Le sexisme expliqué à ma fille En matière de lutte contre le sexisme, la littérature jeunesse a une longueur d’avance sur les manuels scolaires. Voici un choix de livres pour semer le débat dans la tête des enfants. Édité une première fois aux éditions du Sourire qui mord en 1976, cet album est l'un des tout premiers livres pour enfants à aborder la question de l'identité sexuelle. Les parents de Julie lui reprochent tant d'être un garçon manqué qu'un matin, son ombre est devenue celle d'un petit mâle qui caricature le moindre de ses gestes. D'abord amusée par ce double, Julie finit par douter de sa propre identité. Mais allez donc vous défaire d'une ombre qui n'est même pas la vôtre ! Histoire de Julie qui avait une ombre de garçon de Christian Bruel, Anne Galland, et Anne Bozellec, Etre, 2009, 18,50 € (dès 4 ans).

Voici le cri du coeur d’une petite fille aux yeux noirs qui ne comprend pas les gôuts et les envies qu’on plaque sur les garçons et les filles. Elle, elle aime le noir. Son copain Auguste coud des habits pour ses poupées et Carl peint des fleurs sur ses voitures. «Fille réussie», et non «garçon raté», la gamine se rebelle contre les cases dessinées par les adultes. Une façon tendre et drôle d’aborder la question du genre, habillée par les belles illustrations colorées d’Ilya Green. Marre du rose de Nathalie Hense et Ilya Green, Albin Michel Jeunesse, 2008, 10,90 € (à partir de 5 ans).

Ce jour-là, Léa est parvenue à traîner son papa réticent dans un Hitburger. Mais voilà, des cadeaux sont offerts avec le menu enfant : des poupées pour les filles et des fusées pour les garçons. Ce sexisme ordinaire a le don d'énerver le papa. Quant à la serveuse, ses nerfs lâchent... (*)Menu fille ou menu garçon ? de Thierry Lenain et Catherine Proteaux, Nathan, 1996, 5 € (àpartir de 6 ans).

Anne de Vancy, 16 ans, est contrainte de rester chez sa tante à Moulins pour apprendre les bonnes manières, tandis que son père et son frère s’unissent au Duc de Berry et partent en guerre contre le roi de France. Trois semaines plus tard, la jeune fille n’en peut plus de cette vie quasi monacale, elle qui ne rêve que d'aventure, de chevauchées et de tir à l'arc. Elle s’échappe pour rejoindre sa famille. Anne l’intrépide de Marie Amaury, Castor Poche Flammarion, 20004, 5 € (à partir de 11 ans).

Trois nouvelles très courtes mais d’une force incroyable où l’auteur, à travers la parole de trois jeunes filles en révolte, dénonce l’asservissement de la femme. Les

Jeune maison d’édition créée par deux femmes en 2005, Talents hauts propose une collection intitulée «Livres et égaux» : des romans illustrés pour tordre le cou aux clichés sexistes. Elle organise également un concours, en partenariat avec la délégation aux droits des femmes et à l’égalité d’Ile-de-France : il s’agit d’écrire le manuscrit d’un album antisexiste. Le lauréat sera illustré et imprimé. Cette année, le concours est ouvert aux classes de Cp et Ce1 de l’académie de Créteil. www.talentshauts.fr

11

contextes sont différents mais le désir de liberté, la volonté de disposer de son corps sont les mêmes. Des textes justes, parfois sombres mais pleins d’espoir... Le Ramadan de la parole, Jeanne Benameur, Actes Suds, 2007, 7,80 € (à partir de 12 ans).

Dans une Inde contemporaine, la petite Isaï a le tort de naître fille ; elle ne doit sa survie qu'à l'obstination d'une mère aimante. Mais à la mort de celleci, l'univers d'Isaï bascule. Personne ne peut plus la protéger de la cruauté de sa tante qui règne en maitre dans la maison. Personne, sauf peut-être son père, disparu à Bombay des années auparavant. Déguisé en garçon, elle va partir à sa recherche accompagné d'un jeune garçon qui, comme elle, est indésirable : un intouchable. Et qui, comme elle, arpente Le chemin de Sarasvati, la déesse musicienne. Le chemin de Sarasvati, Claire Ubac, l’Ecole des loisirs, 2010, 12 € (à partir de 13 ans).

Et aussi...

Mademoiselle Zazie a-t'elle un zizi ? de Thierry Lenain, Nathan, 1998 (à partir de 6 ans). Satin grenadine de Marie Desplechin, L'Ecole des Loisirs, 2005 (à partir de 12 ans). Si c'est une fille de Pamela Grant, Hachette jeunesse, 1997. A partir de 12 ans. Un sari couleur de boue de Kashmira Sheth, L'Ecole des Loisirs, 2010 (à partir de 12 ans). De chaque côté des cimes de Claire Mazard, Seuil, 2009 (à partir de 13 ans). On s'est juste embrassés d’Isabelle Pandazopoulos, Gallimard, 2009, 8€ (à partir de 13 ans). Sélection de Marie Testa bibliothécaire jeunesse à Sète (*) Ce livre est épuisé : en attendant sa réimpression, vous pouvez l’emprunter dans toutes les bonnes médiathèques.

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Soutenir nos actions

l Le Mouvement français pour le planning familial (M.F.P.F) est un mouvement d’éducation populaire. Il lutte pour le droit à l’information et à l’éducation permanente et pour créer les conditions d’une sexualité vécue sans répression ni dépendance, dans le resLA PUCE à L’OREILLE est une revue éditée par l’association départementale du M.F.P.F de l’Hérault.

pect des différences, de la responsabilité et de la liberté des personnes. l Le M.F.P.F inscrit ses objectifs dans le combat

Directrice de publication Fatima Bellaredj Comité de rédaction Marion Danton, Marianne Loupiac, Françoise Michel, Dominique Sarrazy, Marie-Christine Vion-Leclerc

contre les inégalités sociales et les oppressions et agit pour le changement des mentalités et des comportements. l Il entend développer les conditions d’une prise de conscience individuelle et collective pour que l’éga-

Maquette

Marion Danton

lité des droits et des chances soit garantie à toutes et tous.

Imprimerie La Souris verte 15, rue de Belfort 34000 Montpellier

l Il défend le droit à la contraception et à l’avortement.

M.F.P.F 34 48, boulevard Rabelais 34000 Montpellier Tél. 04 67 64 62 19

m-f-p-f.montpellier@wanadoo.fr www.leplanning34.org

l Il lutte contre l’oppression spécifique des femmes, contre toutes les formes de discriminations et de violences, notamment sexuelles, dont elles sont l’objet. En cela, le M.F.P.F est un mouvement féministe. Extrait des statuts de l’association départementale du M.F.P.F de l’Hérault

ABONNEMENT NOM................................................................................................................................................ PRENOM......................................................................................................................................... ADRESSE........................................................................................................................................ .........................................................................................................................................................

o o

désire adhérer au M.F.P.F et s’abonner à la Puce à l’oreille : 20 € désire s’abonner à la Puce à l’oreille (4 numéros par an) : 8 € Merci de découper ce bulletin et de le renvoyer, accompagné de votre réglement, au M.F.PF 34 : 48 bd Rabelais 34000 Montpellier

12

LA PUCE à L’OREILLE n 3ème trimestre 2010


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.