Magazine L'Écran - La Crise

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l'édito

L’année 2020 aura été une année d’illustration parfaite de la polysémie du mot «Crise». De la crise sanitaire à la crise économique, de la crise de confiance à la crise de nerf, nous aurons vécu de nombreux chamboulements. Mais de chaque événement vient une réaction, une adaptation, une évolution. Le cinéma aura vu ses plus gros blockbusters repoussés (du dernier James Bond Mourir peut attendre à Wonder Woman 1984), reprogrammés pour une diffusion exclusivement numérique (Mulan sur Disney+ qui en a profité pour faire son lancement en France) de même que nos tresors nationaux Kaamelott et OSS 117 attendent des jours plus cléments pour montrer leurs jolis minois ou ont vu leur exploitation fauchée en pleine course (Adieu les cons de Albert Dupontel est le meilleur démarrage de sa carrière mais n’aura vécu qu’une semaine en salle avant la fermeture forcée pour cause de COVID). Les éditeurs, studios et grandes entreprises de jeux vidéo ont fait un carton plein avec les explosions de ventes de la Switch et de son Animal Crossing, le lancement de Valorant et maintenant la 9e génération de consoles de salon qui pointe son nez avec la Playstation 5 et la Xbox One X. Ainsi votre cher fanzine va tenter de se réinventer, de se relancer pour survivre tout comme nos adorées salles de cinéma qui ont bouleversé leur fonctionnement pour faire

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The wATCHER Rédacteur en chef

face à la crise. Crise étant donc le sujet de ce nouveau numéro qui inaugure une nouvelle formule concentrée avec une pagination plus importante mais une parution moins étendue. Crise de la quarantaine pour Gonzobob, le plus fumé de nos rédacteurs qui s’ébaubit sans fin devant American Beauty avant de céder à la crise nucléaire en s’écharpant avec votre serviteur sur Point Limite et Dr Folamour. Une crise similaire mais du point de vue féminin que Doc Aeryn analyse dans Femmes au bord de la crise de nerf avant de former un duo d’investigation de choc avec Estelle en enquêtant sur la vie sous la COVID des salles de cinéma. Lilith s’interroge sur la possibilité d’un futur avec les dystopies et revient en détail sur Les Fils de l’homme où l’humanité a muté à l’image d’un bon vieux débat sur les internets et est devenue stérile. Enfin un petit nouveau au fumet appétissant, Rillettes, nous présente l’un de nos coups de cœur de l’année 2015, The Big Short qui explique la crise financière pour les nuls. Comme vous pouvez le voir, notre petite publication à l’inverse d’Alain Bashung connaît bien la crise mais fait tout pour la dépasser.

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L'association l'écran souhaite adresser à travers ce numéro tout son soutien aux cinémas, festivals et acteurs du milieu culturel qui subissent la crise de plein fouet.

L'American cosmograph, le gaumont wilson, l'ABC, le cratère, l'utopia borderouge, le kinépolis, cinespana, cinélatino, cinépalestine, le diam, le grindhouse paradise, les cinémas palaces, les cinémathèques de bruxelles & de toulouse, le festival du cinéma coréen, le cinéma nova, le biff, et tous ceux que nous aurons oublié de citer... Nous pensons à vous, et répondrons présents pour fêter la reprise à vos côtés !

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PRENEZ PLACE 2

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. Rétro :

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Les Fils de l’Homme Par Lilith Femmes au bord de la crise de la nerf Par Doc Aeryn

. Rétro :

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. Rétro :

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The Big Short Par Rillettes

American Beauty Par GonzoBob

. Cinémas en crise 16 Cinémas & Covid : l’interview croisée Par Estelle & Doc Aeryn . Crises & Dystopies Par Lilith

LA Le LE RING rencontre Ring

. Dr Folamour VS Point Limite Par GonzoBob & The Watcher

Photo couverture : Lola Dolores Canales Chef rédacteur : The Watcher Maquettiste : Lola Dolores Canales Rédacteurs : The Watcher, Rillettes, Estelle, Lilith, Doc Aeryn & GonzoBob Correcteur : Antoine Rousselin

les pépites 5

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. Rétro :

éditorial

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CRITIQuE rétrO

les

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© United International Picture ( UIP )

Aucun lieu n’est sûr on ne peut faire confiance à personne


FILS de l’homme Alfonso Cuaron - 2006

Quoi de mieux dans un magazine qui a comme sujet principal «les crises» que de parler du film Les fils de l’Homme ?

dans les rues, les écoles et leur cour de récréation. Mais pas dans ce futur sombre où l’enfance n’est plus qu’un mythe éloigné. Cette crise entraîne d’énormes Certes, devant cette œuvre réalisée vagues de migration vers l’Angleterre qui par Alfonso Cuaron en 2006, vous finirez peine à stopper ces arrivées massives de certainement en PLS en dessous de votre migrants et réagit par la répression. Des couverture à pleurer et à prier pour que troupes rebelles se forment et combattent cette dystopie d’un avenir proche ne se la violence de l’État par la violence en produise jamais. perpétrant des Vous finirez sans doute en pls à Mais c’est un de ces attentats afin pleurer que cette dystopie ne se films à côté desquels de faire plier le produise jamais. Mais c'est un des il ne faut pas passer. gouvernement films à côté desquels il ne faut pas totalitaire. Pendant passer. L’intrigue prend ce temps, les place dans l’Angleterre de 2027, un migrants sont enfermés dans des camps futur dans lequel toutes les femmes de en attente d’être renvoyés là d’où ils l’humanité sont devenues stériles et où la viennent. Dans ce monde en crise une personne la plus jeune du monde vient de jeune femme, Kee, est tombée enceinte, mourir à l’âge de “18 ans, 4 mois, 20 jours, elle devient alors le dernier espoir de 16 heures et 8 minutes …” Des détails qui l’humanité et Theo Faron, un ancien nous paraissent futiles dans un monde où activiste qui est là un peu par hasard, les cris des enfants sont encore présents décide de l’aider à quitter l’Angleterre pour un lieu plus sûr. 7


© United International Picture ( UIP )

Ce film est vraiment réaliste de bout en et alcoolique, ancien militant, qui se bout. Il nous parle d’une crise de la natalité, retrouve là un peu malgré lui, rattrapé par mais à travers cette crise le réalisateur son passé, et qui doit faire face à la vie qui arrive à nous ancrer dans notre présent, à ne lui laisse plus le choix de rester sans parler des crises liées au flux migratoires rien faire dans un monde qui s’effondre. mais aussi à nous faire comprendre ce Le personnage de Kee incarné par Clarequ’est la vie en temps de guerre. Aucun Hope Ashitey est tout aussi captivant et lieu n’est sûr, on ne peut faire confiance attachant. Un très bon choix d’actrice qui à personne ou en avait eu son premier tous cas à très peu L'esthétique et les décors du film rôle dans un autre de monde, bref en sont très sombres et participent à film que j’apprécie tant que spectateur intensifier le sentiment d'insécurité é n o r m é m e n t , on a peur, tout un film sur une comme les personnages, on est terrorisé. crise historique cette fois, Shooting L’esthétique et les décors du film sont Dogs (Michael Caton-Jones, 2005) qui très sombres et participent à intensifier nous parle du génocide du Rwanda. Il ce sentiment d’insécurité. Tout est faut savoir que le rôle de Kee devait à la jaunâtre, gris, sale, poussiéreux, bref base être donné à Emma Watson, mais un univers peu accueillant qui inspire la elle était en tournage sur le plateau du misère et la guerre. Je trouve que Clive film Harry Potter et la coupe de feu, une Owen est vraiment parfait dans le rôle chance pour Clare-Hope Ashitey qui a pu de Theo Faron, un personnage cynique ici endosser son second rôle important

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à un panel de 177 personnes, critiques et universitaires du monde entier, de dresser la liste des 100 meilleurs films du XXIème siècle selon eux. A partir de la synthèse de ce corpus un top des 100 meilleurs films a été créé ; Les Fils de l’homme arrive en treizième position. Je vous disais bien que c’était un incontournable !

Parlons maintenant de cette manière de filmer, on pensera bien entendu aux différents plan-séquences et particulièrement à celui de la traversée du camp des réfugiés où la guerre fait rage et où il ne faut ni se faire repérer par l’armée, ni par les rebelles, tout en évitant les balles. C’est un plan-séquence qui je le pense restera dans la mémoire de beaucoup de cinéphiles, ici Cuaron nous livre une partie de son génie en tant que réalisateur. Dans une interview, le directeur de la photographie Emmanuel Lubezki précisait : « La caméra est ici un personnage à part entière. Un personnage inquisiteur, nerveux, qui vous jette au cœur de l’action et vous donne le sentiment de la vivre en direct » et c’est vraiment les sensations que j’ai toujours eues en regardant ce film et en particulier cette scène. Clairement cette œuvre est une expérience autant visuelle, que émotionnelle et physique. On sent la détresse des personnages et leurs souffrances comme si on était avec eux.

- Lilith -

© United International Picture ( UIP )

dans un film qui aura une très grande notoriété. Et surtout mention spéciale au personnage de Jasper incarné par Michael Caine, un hippie un peu fou, caché du reste du monde au beau milieu de la forêt, mais lui aussi très attachant, et son personnage arrive à nous faire rire dans un monde de désolation.

LES FILS DE L'HOMME De Alfonso Cuaron - 2006 Avec Clive Owen, Clare-Hope Ashitey, Julianne Moore ... Scénario Timothy J. Sexton Alfonso Cuarón David Arata Mark Fergus Hawk Ostby D’après l’oeuvre de P.D. James Musique John Tavener

Pour vous dire à quel point ce film mérite d’être vu, en août 2016 la BBC a demandé 9


CRITIQuE rétrO

LA CRISE ...

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© D.R.

Existentielle ?


FEMMES

au bord DE LA CRISE de nerf ALMODOVAR 1988 La première fois que j’ai vu Femmes au bord de la crise de nerf, j’étais littéralement trop jeune pour comprendre. Enthousiasmée après avoir vu Volver au cinéma, je m’étais ruée sur les DVD de la filmographie d’Almodovar, regardant à peu près tout dans n’importe quel ordre et même plusieurs fois. Si mon Almodovar préféré reste Tout sur ma mère (1999), Femmes au bord de la crise de nerf fait partie de ces films que mon moi d’enfant avait enveloppé de mystère, une succession de scènes dont j’avais du mal à comprendre tous les enjeux, sans pour autant en enlever leur aura. Ayant plus tard vu les Étreintes brisées au cinéma, je me souvenais que telle et telle scène étaient des détournements de Femmes au bord de la crise de nerfs. Je me souvenais de ce film par flashes, par ses couleurs et son ambiance. Mais je ne l’avais pas revu.

oublié ce film. Hasard total dû au classement intensif des DVDs du Watcher, ce film refit surface. Enveloppé de mystère encore. Je me dis qu’aujourd’hui, à presque 30 ans, 20 avant après l’avoir vu pour la première fois, j’aurais enfin les clefs pour le comprendre et notamment une des dernières répliques du film : “c’est vrai, tu n’as plus ce visage sévère qu’ont les vierges”.

Une crise... de la communication ? Le film s’ouvre sur un problème de communication. Iván veut appeler Pepa, sa maîtresse, qui ne répond pas, Iván laisse un message, mais pas qu’à Pepa, Pepa l’apprend, rate Iván et essaie de joindre Lucía, la femme d’Iván. On commence donc par des échanges téléphoniques manqués, filmés par une caméra rythmée qui joue sur la tension palpable entre Pepa et le toujours absent Iván.

Quand, à la rédaction de l’Ecran, nous choisîmes le thème de la crise, j’avais 11


faire écho à la relation de Pepa et Iván (Johnny Guitare est considéré comme un des plus importants westerns féministes du XXᵉ, mettant en scène l’affrontement de deux femmes, le film d’Almodovar étant plutôt une parodie de cet affrontement). La ressemblance entre les deux situations est si troublante et la voix d’Iván si présente dans le doublage de Sterling Hayden, qu’elle s’évanouit. Trop d’émotion ? Pas que. Car oui, Pepa est enceinte et c’est cela qu’elle voudrait dire à Iván avant qu’il s’en aille. L’ouverture du film, lapidaire, « pas de cigarette, pas d’alcool » prononcé par un homme en blanc, est géniale de simplicité.

Les séquences “film dans un film” sont donc ici des moyens pour montrer la rupture de la communication, parfois ironique comme lorsque Pepa double une pub pour des préservatifs, soit pour

Une crise... du couple ?

© D.R.

Ainsi est la dynamique entre Pepa et Iván, les personnages ne communiquent que par des intermédiaires, le téléphone, le film qu’il double et enfin par le fils d’Evan, Carlos (joué par un jeune Antonio Banderas AïE AÏE AÏE). Les séquences de doublage, où Pepa et Iván doublent le même film, mais pas en même temps, donnent une idée du fil conducteur du film. Non, ils ne seront plus jamais ensemble, mais faut-il encore que Pepa l’accepte. Le rythme, comme une pulsation nerveuse, ne laisse pas le temps au spectateur de se reposer. La réalisation épouse ainsi « la crise de nerf » de Pepa, qui va se dérouler tout le long de l’oeuvre.

Candela et son amant chiite - axe un peu faible, voire sans conséquence dans le film - densifie l’intrigue autour du couple. 12


Encore une façon d’exprimer l’absence de dialogue avec Iván, qui comme elle le dira plus tard, ne dit jamais rien de toute façon.

réalité de faire le lien avec l’avocate, Paulina, qu’on découvrira être la nouvelle maîtresse d’Iván. Dans une résolution un peu tirée par les cheveux, Pepa fait le lien entre le billet d’avion en direction de Stockholm qu’elle a vu sur le bureau de sa secrétaire, le fait qu’Iván lui a dit qu’il partait en voyage et le fait que Paulina soit l’ancienne avocate de Lucía.

Tout ce petit monde se retrouve dans l’appartement de Pepa autour d’un gaspacho bourré de somnifères, précipitant la fin du film.

© D.R.

Cette dernière, mannequin, suite à un week-end en amoureux passionnel, se retrouve mêlée à un attentat en cours à l’aéroport de Madrid. Cela permet en

Le film peut aussi être lu comme un “men are trash” de 1988. Pepa explique ainsi que la psychologie des hommes est trop compliquée à comprendre. Sa voisine est avec elle dans le taxi à la poursuite de Lucía, cette dernière étant partie sur la moto du petit ami de cette voisine, un révolver à la main, et un dans le sac, pour tuer Iván. Cette voisine explique que si elle avait la moto, elle n’aurait pas besoin de l’homme (et s’éviterait ainsi pas mal de tracas).

Troisième couple et dernier lien, Carlos et Marisa, venus visiter l’appartement de Pepa : on devine une absence de relation charnelle entre les deux, qui sera un des ressorts du film pour Marisa. Carlos se trouve être le fils d’Iván et Lucía, ce que Pepa ignore.

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failli se suicider à coup de gaspacho empoisonné, avoir affronté les revolvers de Lucía et après avoir finalement sauvé son ancien amant, à l’aéroport... 2h plus tôt, Iván aurait pu revenir. Maintenant, à l’aéroport c’est trop tard.

Si le scénario tourne autour des hommes, il tourne aussi autour de leurs manquements. Lucía explique avoir été internée suite à la naissance de Carlos et l’abandon d’Iván. Carlos ne fait pas grandchose : Marisa perd sa virginité... toute seule, en rêve. Et Candela ne montre qu’un intérêt mesuré envers lui, malgré ses avances un peu bancales à base de baisers volés. Loin d’être désarçonnée, Candela semble exprimer de la tendresse plus que du désir.

À aucun moment la présence d’Iván ne se pose pour sa maternité. Pepa ne lui a finalement rien dit et, sans que le film ne le dise clairement, elle envisage clairement d’élever son enfant seule. L’absence du père (voire de la mère, Carlos a été élevé par ses deux grandsparents) est un motif crucial dans le film par le non-traitement dont il fait l’objet.

2 jours, 2 nuits 2 jours, 2 nuit c’est la durée du film dans sa diégèse. C’est le temps qu’il faut à Pepa pour enfin se détacher d’Iván, après avoir brûlé son lit, détruit son téléphone, les fenêtres de son appartement, avoir

La crise est passée.

© Mandarin Télévision

Le retour dans l’appartement, avec non seulement Carlos et Candela enlacés, et les deux policiers et le réparateur endormi par terre, semble sans conséquence pour Pepa, dont la seule inquiétude est de ne pas se couper sur le verre et de ne pas glisser sur le gaspacho. C’est elle qui dit à Marisa de ne pas s’inquiéter, quand elle se réveille après avoir dormi toute la journée.

© D.R.

- Doc Aeryn -

De Pedro Almodovar - 1888 Avec Carmen Maura, Antonio Banderas, Julieta Serrano... Scénario Pedro Almodovar Musique Bernardo Bonezzi

femmes au bord de la crise de nerfs

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L'ĂŠcran, c'est aussi deux ĂŠmissions radio par mois, en partenariat avec Good Morning Toulouse !

Retrouvez les podcasts sur: Notre site Internet asso-lecran.fr/podcasts & Sur le mixcloud de Good Morning Toulouse 15


chronique

© Freepik - Master1305

A M E N I C EN E S I R C 16


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dans l’âme» selon les organisateurs. À une semaine de son déroulé, l’enjeu a surtout été de nouer des partenariats avec des plateformes capables de diffuser les films et ainsi sauver le travail déjà effectué. C’est aussi le choix effectué par les organisateurs du BIFFF (Brussels International Film Festival), outre-quiévrain, qui a pu proposer un BIFFF Confined, sur les réseaux sociaux et sur certaines plateformes VOD. Le Festival Grindhouse Paradise, événement toulousain autour du film de genre, a quant à lui préféré décaler son déroulé, pour le faire en septembre malgré l’annulation de la venue d’invités étrangers. Le plus important ayant été de pouvoir diffuser les films prévus, enjeux partagés par l’ensemble des festivals avec lesquels nous avons pu discuter. Comme le souligne le Grindhouse, il était important de «promouvoir les films qui, sinon, n’auraient jamais pu être montrés.»

Cinema et COVID : L’interview croisee

E

Ouvertes, fermées, ouvertes, fermées... Nos salles chéries ont vécu bien des péripéties depuis le début de la crise du COVID-19. Entre programmation chamboulée et protocoles sanitaires changeants, nous avons interviewé plusieurs cinémas et festivals. Quel avenir pour ces structures en ces temps d’incertitude ? Comment ont-ils vécu la crise et quelles stratégies ont-ils mises en place ? Entre Toulouse (grâce à Estelle) et Bruxelles (par Doc Aeryn) nous les avons questionnés.

La question du passage en ligne fait débat : si certains événements ont été totalement dématérialisés, comme les Korean Film Friday, visibles uniquement sur le territoire belge (Belges, à vos écrans !), ce choix ne fait pas consensus. Le cinéma Le Nova à Bruxelles explique que «par principe, nous préférons éviter de mettre des films en ligne, l’offre virtuelle explose déjà et cela habitue les spectateurs, alors que ce que nous défendons c’est le cinéma en salle comme expérience collective.» Cela a également fait l’objet de choix différents selon la catégorie de film : Cinélatino a choisi de diffuser certains documentaires sur la plateforme de VOD Tenk, avec l’accord des cinéastes. En revanche, le festival n’a pas diffusé en ligne les

Un festival oui, mais comment ?

Le COVID-19 a provoqué la fermeture de nos cinémas, et avec, l’annulation ou le report des festivals. C’est notamment le cas de Cinélatino à Toulouse qui devait se tenir en mars dernier, annulé «la mort 17


longs métrages de la compétition, et ce pour «laisser la possibilité aux films de participer à des compétitions ultérieures en France, et nous laisser la possibilité de reprogrammer ultérieurement ces films en salle»

Le documentaire Baracoa, que Cinélatino a basculé sur la plateforme Tenk, dont nous vous parlions sur notre site Internet

En effet, si un basculement en ligne n’est pas toujours la solution idéale, c’est parce que l’activité des festivals ne se limite pas à la diffusion de films. Un festival, c’est aussi l’occasion d’accompagner les sorties de films, et de faire se rencontrer distributeurs et producteurs. Faute d’événement physique, Cinélatino a par exemple innové pour que leurs plateformes professionnelles “Cinéma en Construction” et “Cinéma en Développement” aient lieu en ligne, avec des visioconférences. La diffusion en ligne fait donc non seulement l’objet d’un débat de principe sur l’opportunité de sacrifier le présentiel pour le tout en ligne, mais aussi d’un débat sur la faisabilité de cette diffusion, pour les festivals en eux-mêmes mais aussi pour les films. La diversité des options

Et le futur ? Tous les festivals nous confirment l’incertitude dans laquelle ils se trouvent. Le BIFFF nous explique vouloir trouver une solution «dans l’air du temps» : «les jauges, la distanciation sociale, les mesures de sécurité et de prévention et, le cas échéant, un basculement digital sur une plateforme dédiée. Même si une plateforme digitale va à l’encontre de l’essence même d’un festival, puisqu’il s’agit par définition d’un lieu d’échanges, de rencontres et de partage !». Le Grindhouse Paradise ne préfère pas se projeter mais indique vouloir garder la même dimension de festival, soit le même nombre de films diffusés. L’engouement du public les y encourage. 18

© Baracoa

choisies montre qu’il est possible de trouver des compromis : diffuser un peu, certains films et pas d’autres ? Les deux solutions apparaissent ici comme complémentaires, bien plus que concurrentes.


Faire du cinéma en salle pendant la crise

Ces mesures étaient assez pénibles car mal coordonnées». Le Nova, de même, décrit des “mesures pas toujours claires”.

Tout comme les festivals, les salles de cinéma ont dû s’adapter à d’importantes contraintes sanitaires. L’American Cosmograph à Toulouse détaille ces mesures contraignantes : “protection en plexiglas”, “terminal carte bleue”, “sens de circulations”, “désinfections régulières”, “limitations de jauge”, autant de changements qui ont “demandé plus de travail qu’habituellement pour recevoir moins de spectateurs, mais cela était nécessaire pour permettre au cinéma de fonctionner.» Le Nova a opté pour un système de préventes pour éviter de devoir refuser des spectateurs, car au vu de la réduction de jauge, le public était trop nombreux pour la capacité du lieu.

Côté spectateur, ces mesures ont été dans l’ensemble bien acceptées, même si elles ont changé à plusieurs reprises. Le Palace décrit un public «éduqué et responsable». Pour le Cosmograph, «cela n’a pas toujours été simple, notamment pendant l’été quand les règles n’étaient pas vraiment claires, et nous avions parfois l’impression de ne plus avoir de place pour parler de cinéma au milieu de toutes ces nouvelles contraintes...» Des deux côtés de la frontière, on déplore une certaine confusion au niveau des directives. Sans surprise, la dépendance à l’actualité a épargné les Cinémathèques : Franck Loiret, directeur de Cinémathèque de Toulouse, souligne le “cas particulier” de ce lieu, “à contre-courant de ce qui s’est passé dans les salles”. En effet, avec une programmation forte constituée de classiques, la Cinémathèque n’est pas dépendante de l’actualité. Le Festival du Cinéma en plein air, qu’elle a organisé cet été, a par exemple très bien marché, malgré la contrainte du masque. Parfois, ces structures ont constaté un succès plus important en ligne qu’en physique : la Cinémathek bruxelloise nous explique que «De notre côté, nous avons lancé une série de films muets avec accompagnement piano en live sur Facebook. On s’attendait à un certain enthousiasme, mais finalement cette série a atteint plus de 150.000 personnes. C’est énorme.» L’enjeu d’une programmation originale, loin des vicissitudes de l’actualité est donc ce qui fait la force de nombre de structures, à l’instar des cinémas indépendants. Pour des lieux comme la Cinémathèque de

Les cinémas insistent sur l’importance de ces protocoles sanitaires pour rassurer les spectateurs et créer une ambiance sereine : pour l’American Cosmograph, «notre responsabilité était avant tout de protéger notre équipe et nos spectateurs, mais nous voulions aussi rassurer le public sur la sécurité d’une sortie cinéma». L’ABC à Toulouse souligne également le fait d’avoir : «totalement joué le jeu pour que les spectateurs puissent revenir en confiance.» Les salles soulignent la difficulté de devoir s’adapter à une situation extrêmement changeante : l’impression d’avoir été baladés de restrictions en restrictions sans logique apparente a été plusieurs fois soulignée. Ainsi, Le Palace à Bruxelles explique : «Avant la fermeture actuelle, nous avons par ailleurs fait face à 4 adaptations du protocole sanitaire en deux semaines (limitation des jauges, interdiction de vente de boisson et de nourriture, couvre-feu…). 19


Toulouse, la pandémie a aussi été une opportunité de montrer un autre aspect de leur activité avec du contenu en ligne centré sur leurs archives, activité qui était peu mise en avant jusqu’à présent. Le public comme pilier Pour les festivals qui ont pu se tenir à Toulouse et à Bruxelles, les spectateurs ont été au rendez-vous. Pour le Centre Culturel Coréen de Bruxelles, «la 8e édition du Festival du Film Coréen de Bruxelles a été un franc succès”, avec “près de 1 300 spectateurs à travers 17 séances du film”. Ils soulignent que “Grâce au festival, nous avons pu vérifier à nouveau l’engouement du public envers le cinéma coréen, et cela a également été très encourageant car divers genres de cinéma coréen, tels que le documentaire, le film-auteur, le court métrage, etc. sont très bien accueillis». Tous nos interlocuteurs nous ont confirmé cet enthousiasme du public : Le BRIFF, hébergé par le Palace, a connu un bon accueil. Pour le Cosmograph, qui a accueilli cet automne le Grindhouse et le Fifigrot, en plus de projections spéciales de Cinespana, ces séances “se sont magnifiquement déroulées. Malgré les limitations de jauges qui n’étaient pas toujours faciles à gérer face à l’affluence, le public a répondu présent au-delà de nos espérances et tout le monde a joué le jeu de s’adapter aux nouvelles règles.» Lors de la réouverture des cinémas après le premier confinement, le public a massivement repris le chemin des salles avec beaucoup d’enthousiasme. Pour le Cosmograph, «Sur les dernières semaines, avec les sorties d’Un pays qui se tient sage, Drunk et Adieu les cons, 20

nous avons vraiment senti cette envie de vivre en chœur les émotions d’un film, avec par exemple des applaudissements à la fin des séances. (...)”. Cet élan a rendu la fermeture des cinémas cet automne d’autant plus difficile. «Avec ces succès et la sortie de films plus «importants» à partir du mois de septembre, nous avions vraiment l’impression d’être dans un bel élan vers un retour à une forme de «normalité»... La situation nous a donné tort et la déception est un peu rude, nous attendons donc maintenant de pouvoir redémarrer de nouveau, nous sommes prêts !» . Ce que cette crise montre, c’est l’importance pour le public de pouvoir voir des films en salle. Aux antipodes d’un remplacement des cinémas par la VOD, le COVID prouve l’importance de l’existence de ces salles et du lien qu’elles entretiennent avec leur public. Pendant cette crise, les relations avec les spectateurs sont restées très bonnes voire se sont renforcées. L’ABC explique que «les spectateurs revenaient, chacun à son rythme. Par leur attitude, leurs phrases, beaucoup manifestaient leur solidarité par rapport à la situation que nous vivions. Sans doute les cinémas Art et Essai de proximité ont développé depuis toujours cet attachement aux spectateurs, cette relation de confiance, par la ligne éditoriale, le sens de l’accueil.» La différence entre les multiplexes et les cinémas d’art et d’essai est ici fondamentale. «Si cette crise a eu des effets positifs, il faut les voir dans l’engagement du public pour le cinéma d’art et d’essai. Contrairement aux multiplexes, largement tributaires de l’offre de blockbusters et de la vente de boisson et de confiserie et dont


la fréquentation a pu chuter de 80% en juillet et août, nous avons pu compter sur la fidélité de notre public (chute de 20% de la fréquentation en juillet-août)» (Eric Franssen, directeur général du Palace). De même, le directeur de la Cinémathèque de Toulouse Franck Loiret explique que, s’il y a une crise du cinéma, c’est surtout celle du cinéma américain. C’est ce qui fait que les réseaux de salles ont souffert, car ils “font les frais de la dépendance au cinéma américain”. Les pays qui s’en sortent le mieux sont donc ceux qui ont une production locale, notamment de films d’art et d’essai : la France a en effet eu cette année de beaux succès comme Antoinette dans les Cévennes ou Tout Simplement Noir. D’autres pays européens sont plus impactés, comme le Royaume Uni, qui se trouve être très dépendant au cinéma américain, ou encore l’Espagne et l’Italie, qui produisent peu de films locaux. Pour Franck Loiret, dans les mois à venir, «la question va être de mettre en avant un cinéma différent». Ce sera

©Jérôme Prébois – ADCB Films

Adieu les cons, avec plus de 600 000 entrées, a réalisé le meilleur démarrage de tous les films de Dupontel.

peut être l’occasion de voir davantage de productions européennes. En définitive, deux choses sont partagées par l’ensemble de nos interlocuteurs : le rôle du public, avant tout. Et l’importance du mot “rencontre”. Comme l’explique le Grindhouse Paradise, «pour moi un festival c’est un voyage... ça permet de faire des découvertes et des rencontres... ça permet de s’immerger pendant quelques jours dans une atmosphère et une ambiance spéciale, presque hors du temps. Personnellement c’est quelque chose que j’aime profondément et qui me manque beaucoup». Nous remercions les cinémas Palace, ABC, l’American Cosmograph, la Cinémathèque de Toulouse et celle de Bruxelles, le Cinéma Nova ainsi que les festivals BIFFF, Grindhouse Paradise, Cinélatino, et le Centre culturel coréen pour le Festival du Film Coréen de Bruxelles pour leurs réponses. Nous leur souhaitons plein de courage pour l’avenir et une belle réouverture que nous attendons tous avec impatience. Nous encourageons nos lecteurs à retourner fréquenter les salles de cinéma, des deux côtés de la Meuse. - Estelle & Doc Aeryn -

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K - 1964 KUBRIC Y E L N A RGE C. DE ST ERS, GEO L L E S R TE HAYDEN AVEC PE TERLING N SCOTT, S OUTHER TERRY S IO R K A IC N SCÉ Y KUBR STANLE G EOR E PETER G N JOHNSO E LAURIE MUSIQU

Les années 60 représentent le culminant la crise des missiles de Cuba citoyens et toute une littérature se dévellope ouvriront et conclueront l’année 64. Deux livres public. La lutte reprend ici. The Watcher prend la 22


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DE SYDN EY LUM ET - 196 AVEC H 4 ENRY FO N DA, WAL MATTHA TER U, FRITZ WEAVER SCÉNAR IO WALT ER BERN MUSIQU STEIN E LAURIE JOHNSO N

pinacle de la paranoïa et de l’hystérie provoqués par la guerre froide avec comme point et l’assassinat de Kennedy. Le sujet de l’holocauste nucléaire occupe les esprits des autour finissant par inspirer deux des réalisateurs les plus en vue de l’époque. Leurs films et deux adaptations qui s’affronteront devant les tribunaux avant de se présenter au défense de Point Limite en opposition à Gonzobob qui pardonne tout à Dr Folamour. 23


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The Watcher: Alors petit merdeux, on a pas honte de plaisanter avec les choses sérieuses ? Dénaturer un message d’alerte à la population mondiale pour assouvir de bas instincts primaires ? Ça sert à quoi de se taper toute la littérature scientifique sur les risques d’holocauste nucléaire de l’époque pour au final pondre une farce pareille ?

Gonzobob : Hé non mon gars, bien au contraire c’est dans cela que réside l’idée de génie de Stanley Kubrick: tourner le récit original en comédie absurde et hilarante. C’est d’autant plus fort de réaliser un film comique sur ce sujet gravissime et encore relativement brûlant en 1964, soit seulement deux ans après la crise des missiles de Cuba, moment où le monde n’est jamais passé aussi près d’une authentique apocalypse nucléaire. Le réalisateur se livre ici à une totale désacralisation du sujet et il tourne militaires et politiques des deux côtés en ridicule devant l’absurdité abyssale de la situation. On a l’impression d’assister à une dispute entre deux gamins passablement attardés, les Américains disent “On va péter la planète !”, et les Soviétiques leur répondent “Non, d’abord c’est nous qu’on va péter la planète !”.

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The Watcher : Vous n’avez pas le monopole de l’absurdité. Nos dialogues entre les leaders des 2 blocs ainsi que notre conclusion sont également absurdes mais plus poignants car basés sur la réalité des doctrines en place. Si t’étais aussi sûr de ton génie, tu n’aurais pas fait un procès en plagiat pour nous empêcher de sortir le film. C’est honteux. Faire racheter le film par la Columbia pour qu’elle saborde la distribution du long métrage était une manœuvre indigne. 24


c cc c Gonzobob : Que veux-tu, c’était de bonne guerre. Et puis avoue qu’on aurait juste eu l’air d’une bande de sales gosses qui respectent rien ni personne si on avait sorti notre version parodique juste après. Tu peux pas faire flipper les gens comme jamais avec Point Limite et leur dire quelques mois après avec Dr Folamour “non mais en fait ça pourrait être super marrant comme sujet”. Cela aurait pu réduire le film à un simple gimmick: et si on faisait le même film, juste en remplaçant tous les personnages par des débiles profonds. Il y a là une véritable démarche d’auteur, comme en témoigne le sous-titre “Comment j’ai appris à ne plus m’en faire et à aimer la Bombe”.

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The Watcher : Nos personnages, du président Henry Fonda au traducteur Larry Hagman en passant par le professeur Walter Matthau sont bien plus réalistes et respectueux de la situation de crise que nous dénoncions. Si le sujet de l’attaque nucléaire totale nous est commun, l’élément déclencheur est bien différent : ton général délirant est idiot face à la probabilité d’une erreur mécanique. L’erreur humaine est de persister à suivre un déroulement enclenché par une machine défectueuse. La tragédie vient de cette incapacité à sortir du schéma de pensée de l’équilibre de la terreur. C’est là la supériorité de Point Limite sur Folamour. Les acteurs et les personnages jouent leur vie et leur santé mentale à chaque scène.

Gonzobob : Les acteurs de Point Limite sont bons, là n’est pas la question, mais leurs performances ne sont pas mémorables pour un sou. Dans Dr Folamour, tout le monde crève l’écran et les personnages sont devenus mythiques : Peter Sellers, ce génie comique, qui joue non pas un, non pas deux, mais trois rôles (le colonel Mandrake, le président Merkin Muffley et le fameux docteur Folamour, un vrai caméléon le Peter), George C. Scott dans le rôle de sa vie qui excelle en militaire borné et excité comme un pervers sexuel à la seule évocation de la guerre et de la violence (Buck Turgidson), Sterling Hayden en contre-emploi total qui campe le militaire parano et complètement taré qui déclenche la mécanique infernale de la guerre nucléaire globale (le général Jack D. Ripper). Bref un casting 5 étoiles pour un film 5 étoiles. 25

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c cc c c v

The Watcher : Tellement caméléon le Peter qu’il a dû se casser une jambe pour forcer Kubrick à lui lâcher la grappe et pas jouer en plus le commandant Kong. Lumet lui aime vraiment ses interprètes, tire d’eux la substantifique moelle du jeu. Fonda est si performant que de nombreuses personnes l’encouragent à se présenter à la présidence 20 ans avant Reagan. Walter Matthau, plus connu pour son duo avec Jack Lemmon, confirme qu’il est aussi à l’aise dans les rôles sérieux. La réalisation se fait au plus près d’eux pour les mettre en valeur là où le grand Stan les écrase dans ses décors monumentaux.

Gonzobob : Ah les décors de Dr Folamour, la fameuse salle de guerre et sa table ronde qui met tous les protagonistes sur un pied d’égalité: les militaires autant que les politiques sont aussi incompétents les uns que les autres et n’ont aucune foutre idée de ce qu’ils font. Les responsables sont irresponsables, et c’est montré aussi par les décors extraordinaires de Ken Adam. Ceux de Point Limite font vraiment cheap à côté, notamment le bureau du président, qui ressemble à une vieille piaule étudiante de 9m² perdue en cité U miteuse, ou la salle de commandement de l’armée qui est d’une tristesse absolue. L’univers visuel du film de Kubrick contribue activement au propos du film, et le réalisateur maniaque a passé un temps fou à les concevoir, pour un résultat marquant et impactant.

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The Watcher : Les décors ressemblent à des vrais lieux pas à des fantasmes d’adolescent prépubère complexé par son corps en mutation. Entre les lectures de Playboy en service, les allégories sexuelles poussives sur les armes et l’utopie machiste finale, Kubrick est en phase anale à cette période. ‘S’agirait de grandir ! Aux ardeurs adolescentes de Folamour, Point Limite propose la sécheresse de l’adulte face à la crise. Si le film fût boudé à l’époque suite au succès fulgurant de Folamour, Point Limite est resté en tête des gens sérieux qui en firent un superbe remake en live sur CBS en 2000 : George Clooney (également producteur et initiateur du projet), Brian Dennehy (le shérif de Rambo), Sam Elliott, James Cromwell, Hank Azaria et Richard Dreyfuss au casting excusez du peu ! C’est pas les diffusions du théâtre des Variétés sur France 2 avec Arditi et Berléand !

Gonzobob : C’est tout le concept : la guerre c’est le sexe, et les armes c’est de la compensation ! Docteur Folamour est une véritable parabole sur l’aspect primaire et purement sexuel que revêt la guerre aux yeux des protagonistes. Et puis comment parler de Docteur Folamour sans évoquer la fin, pour moi l’une des meilleures de l’histoire du cinéma avec ce générique qui voit les champignons atomiques proliférer aux quatre coins du monde, accompagnés du superbement ironique We’ll meet again de Vera Lynn, qui sonne autant comme l’oraison funèbre de l’humanité que la promesse d’une revanche à venir. Une fois l’hiver nucléaire passé et les belligérants survivants sortis de leurs abris souterrains respectifs, on aura droit à un match retour entre Américains et Soviétiques, qui se jouera probablement avec des cailloux et des bâtons. Enfin, ce n’est pas un hasard si le film de Kubrick est resté dans les annales de l’histoire du cinéma, alors que celui de Sidney Lumet a été relégué dans les oubliettes du 7è Art... 27

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FIN DE LA CRISE D’ADO POUR ADAM MC KAY 28

© FParamount Pictures

CRITIQuE rétrO


a aa THE

LE CASSE DU SIÈCLE

SHORT

BIG

ADAM MC KAY - 2016

Lorsqu’il a été question de parler de “la crise”, l’économie est le premier sujet qui m’est venu à l’esprit. On nous l’a tellement rabâchée depuis presque 15 ans maintenant, sous divers sobriquets : “crise”, “récession”, “krach”, “dépression” , tous plus sympathiques les uns que les autres, vous en conviendrez. Et la première œuvre cinématographique qui m’est passée par la tête fut The Big Short, réalisé par Adam McKay, sorti en 2015.

aussi absurde (mais pas vide de substance pour autant), qui pouvait imaginer que Adam McKay s’attaquerait à l’adaptation d’un livre qui traite de la crise économique de 2008 ? Hormis celles et ceux qui ont regardé le générique de fin de Very Bad Cops...

Et avec du recul on ne peut que féliciter Adam McKay d’avoir fait ce choix : qui d’autre que lui aurait si bien réussi à rendre quelque chose d’aussi complexe et rasoir à ce point passionnant Qui d'autre qu'adam McKay aurait si et désopilant ?

Cinéaste américain actif depuis les bien réussi à rendre quelque chose années 2000, McKay d'aussi complexe et rasoir à ce point semblait vouloir Pour nous faire passionnant et désopilant ? sortir de sa zone passer la pilule, on de confort : connu pour ses comédies retrouve un casting triple A avec un retour potaches avec Will Ferrell (premier rôle de Steve Carell (The Office, Foxcatcher) de toutes ses productions jusqu’à celle dans le rôle de Mark Baum, dirigeant qui nous intéresse aujourd’hui), personne acariâtre d’une société de gestion de n’attendait le réalisateur sur un sujet aussi fonds. A ses côtés, Christian Bale (Batman, sérieux. Après un diptyque Ron Burgundy The Machinist) incarne Michael Blurry, un 29


Très vite, The Big Short nous jette dans la fosse aux lions avec les subprimes, les credit default swaps ou encore les fameux mortgage backed securities. Heureusement pour nous, McKay n’y comprenait rien non plus et se montre très didactique tout au long du métrage en demandant par exemple à Margot Robbie dans son bain de nous parler des obligations de Ranieri. On croise

d’intéresser n’importe qui à tout ce foutoir. Ces quatre protagonistes ont, à leur façon, su anticiper les signes de l’effondrement boursier de 2008 et ont tenté d’en avertir les autorités en la matière. Mais que peut une poignée d’hommes face à un système qui pèse des milliers de milliards de dollars ?

également Selena Gomez ou le chef étoilé Anthony Bourdain qui nous initient au courtage grâce à des comparaisons aussi simples que cyniques. Le film brise le quatrième mur à de nombreuses reprises, nous rappelant que même si les personnes que l’on voit à l’écran ne sont que des acteurs, tout cela s’est réellement passé. Des millions de personnes ont réellement perdu leur maison, leur emploi... et McKay n’a de cesse de nous le rappeler.

© FParamount Pictures

ex-médecin reconverti dans le trading avec brio ainsi que Ryan Gosling (Drive, Blade Runner 2049) qui prend les traits de Jared Venett, gestionnaire de fonds belliqueux mais brillant. Pour compléter le tableau, on rajoute Brad Pitt (vous avez vraiment besoin de références ?) en tant que Ben Rickert, ancien génie du trading ayant raccroché et PAF : on obtient une brochette d’acteurs populaires capables

Malheureusement pour nous, la finance est un monde extrêmement complexe. 30


Le réalisateur semble d’ailleurs très à l’aise avec les limites entre la réalité et la fiction : outre la présence de célébrités qui font le lien entre l’intra et l’extra diégétique, Ryan Gosling joue également le rôle de narrateur tantôt en voix off, tantôt à l’écran. Très moqueur, il nous avertit parfois que les situations ont peutêtre été un peu modifiées... Cela permet notamment à McKay de prendre quelques libertés dans l’écriture des personnages, par exemple celui de Michael Burry.

ne sont plus remboursés. L’arrêt du remboursement de ces prêts devrait entraîner une baisse de la notation des actions des banques : AAA étant le plus haut en termes de sécurité financière, puis AA jusqu’à B, l’indice le plus bas. Hors, rien ne bouge. Et pour cause : les agences de notation refusent de baisser les indices des banques, craignant que celles-ci ne fassent plus appel à leurs services. Et l’employée chargée d’expliquer tout ceci aux traders (et donc à nous) est rendue complètement aveugle à la suite d’un examen ophtalmologique. “Je n’y vois absolument rien” commence-t-elle par déclarer. On comprend dès lors que les dés sont pipés, que le jeu est truqué : les banques distribuent les cartes et se servent un 21 à chaque partie. Les allusions au jeu et au pari sont par ailleurs légion dans The Big Short, les personnages eux-mêmes pariant sur l’explosion de la bulle immobilière pour s’enrichir, et compléter le grand tableau de l’insolence.

Metallica, Pantera, Mastodon : les goûts musicaux de Burry sont plutôt violents, à l’image du monde de la finance. L’ancien médecin nous est présenté comme étant un homme extrêmement sûr de lui, et celui qui maîtrise le mieux la situation. Après plusieurs affrontements avec d’autres experts qui le contredisent encore, on finit par le voir chez lui, sur sa batterie, en train de jouer By Demons Be Driven de Pantera où il finit par exploser, à bout de souffle. Littéralement broyé par un système “dirigé Le film se veut difficile d'aspect par des démons”.

Le film se veut difficile d’accès malgré son aspect didactique. Un malgré son aspect seul visionnage est loin d'être McKay nous didactique : bourré suffisant pour saisir les concepts offre une autre de références à abordés métaphore lors la finance et ses de la rencontre de deux économistes acronymes indigestes, frénétique, parfois avec une responsable d’une agence de décousu. Un seul visionnage est loin d’être notation de banques. Alors que le marché suffisant pour saisir les concepts abordés de l’immobilier a déjà commencé à mais est assez pour saisir l’essentiel : The s’effondrer, les banques refusent d’avouer Big Short est un drame avant tout. Huit que les prêts contractés par les particuliers millions de personnes au chômage, six 31


2018 avec Vice, excellent biopic sur Dick Cheney qui était vice-président des Etats Unis sous Bush Jr. Cette volonté d’afficher les inégalités et les injustices de notre

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millions qui se retrouvent à la rue. Pour la simple et bonne raison que le système a tenté de s’entretenir lui-même, alors que les indicateurs de son effondrement

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© Mandarin Télévision

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imminent étaient détectés. Le mépris des monde se retrouvait déjà en filigrane banques et des institutions est similaire dans la première partie de sa carrière, au mépris que peut avoir ce film pour le mais semble être beaucoup plus affirmée spectateur lambda : vous ne comprenez depuis The Big Short et sa portée politique pas ? C’est pas grave, signez ici et là, et plus définie. En essence cependant, le attendez que ça passe. Le résultat sera style du réalisateur est resté le même : le même. Tout avance très vite alors soit un montage sous caféine, la présence vous prenez le train d’un narrateur et un A y regarder de plus près, le cinéma en marche, soit humour des plus vous restez sur le de McKay se rapprocherait de plus grinçants… A y quai en regardant en plus d'un certain Michael Moore regarder de plus vos économies près, le cinéma de disparaître. Vous pourrez leur faire McKay se rapprocherait de plus en plus coucou, la larme à l’œil. de celui d’un certain Michael Moore, qui est connu pour ne pas porter dans son Ce changement de style initié par McKay cœur ni George W. Bush, ni le monde de la avec cette œuvre s’est poursuivi en finance. Comment lui en vouloir ?


© FParamount Pictures © FParamount Pictures

Puissant, touchant, viscéral : les adjectifs ne manquent pas pour parler de l’effet produit par The Big Short, dont on ressort avec la tête qui tourne. On est d’abord sonné par l’énorme quantité d’informations qu’on a reçu dans la tronche pendant deux heures ; ensuite par le dernier quart d’heure du film qui rappelle les conséquences réelles de la crise ; enfin par la qualité intrinsèque du long métrage qu’on vient de regarder. Le rythme, le ton, la mise en scène : Adam McKay a su mettre à profit son savoirfaire de réalisateur pour nous plonger dans l’univers étouffant et sans pitié de la finance. Et le pire, c’est qu’une fois que le film est terminé, on comprend qu’on est encore dedans, et qu’on y sera pour toujours.

THE BIG SHORT De Adam McKay - 2015 Avec Christian Bale, Steve Carell, Ryan Gosling ... Scénario Adam Mc Kay Charles Randolph Michael Lewis Musique Nicholas Britell

- Rillettes -

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CRITIQuE rétrO

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© FDreamworks

UNE VIRULENTE ATTAQUE AU VITRIOL CONTRE LE MENSONGE DE L’AMERICAN WAY OF LIFE


American Beauty o q

SAM MENDES - 1999

Lester Burnham (Kevin Spacey) a 42 ans, il tout et tout le monde lui marche dessus et vit dans une banlieue américaine comme sa vie n’est que mensonges et apparences. il en existe tant d’autres, avec sa famille Bref, Lester Burnham est en pleine midlife en apparence parfaitement ordinaire crisis, la crise de la quarantaine entre constituée de sa femme agent immobilier crise existentielle et dépression liée à matérialiste et superficielle Carolyn l’impression de n’avoir rien fait de sa vie, (Annette Bening) et sa fille adolescente ou en tous cas pas assez. Jane (Thora Birch), renfermée sur ellemême et pleine d’insécurités. Lester Son existence bascule lorsqu’il fait la Burnham est détesté par sa fille et méprisé connaissance de Angela (Mena Suvari), par sa femme, avec une amie de lycée de Lester Burnham traverse la vie qui il n’a plus de sa fille, et commence comme un fantôme, il se décrit vie sexuelle depuis à développer à son lui-même comme“sous sédation” des années. Lester égard une attirance Burnham ne ressent aussi foudroyante aucune passion pour son travail dans que malsaine. Il va alors péter un câble, une boîte de publicité, de laquelle il ne décider qu’il n’a plus rien à perdre et va de toutes façons pas tarder à être viré tout envoyer valdinguer, à mesure que comme un malpropre, après 15 ans de l’apparente normalité de sa famille vole bons et loyaux services par une bande en éclat et qu’elle se déchire. Il quitte de jeunots arrivistes. Lester Burnham son travail en faisant chanter ses extraverse la vie comme un fantôme, il se employeurs, résiste enfin aux attaques et décrit lui-même comme “sous sédation”, humiliations que lui fait subir sa femme 35


qui le trompe avec un agent immobilier du coin, se met à fumer du cannabis par l’intermédiaire de Ricky (Wes Bentley), le fils dealer de son voisin ancien colonel des US Marines haineux et borné Frank Fitts (Chris Cooper), commence la musculation au son de Pink Floyd dans l’espoir vain de séduire la fameuse Angela, pendant que sa fille se rapproche dudit excentrique Ricky.

réalisateur pour Sam Mendes et enfin Meilleure photographie.

American Beauty sort en 1999, c’est le premier film du Britannique Sam Mendes, depuis connu pour avoir réalisé les 2 derniers volets de la saga James Bond (Skyfall et Spectre) ou encore 1917. Et quel coup de maître ! Le film rencontre un énorme succès public et critique, et rafle toutes les récompenses sur son passage, remportant notamment 5 Oscars :

professionellement. Les rôles secondaires ne sont évidemment pas en reste avec notamment la famille Fitts, campée par un touchant Chris Cooper en père autoritaire et homophobe et Wes Bentley (vu depuis dans American Horror Story par exemple) en fils faussement modèle, qui profite de ses petits boulots de serveur pour dissimuler à son paternel son florissant et lucratif commerce de cannabis.

© FDreamworks

Le casting est impeccable, Kevin Spacey en tête, qui porte véritablement le film sur ses épaules dans ce qui reste comme l’une de ses toutes meilleures performances à l’écran, mais aussi Annette Benning, excellante en femme castratrice aussi méprisante que frustrée sexuellement et

Meilleur film, Meilleur scénario pour Alan Ball, showrunner de la géniale série Six Feet Under et de True Blood, Meilleur acteur pour Kevin Spacey, Meilleur

La réalisation de Sam Mendes est au diapason, rendant superbement et dans des plans élégants tout en froideur 36


chercher un emploi “au plus bas niveau de responsabilités possible” dans une chaîne de fast-food où ses managers ont la moitié de son âge. La performance XXL de l’immense acteur qu’est Kevin Spacey achève de donner ses lettres de noblesse à un film considéré par beaucoup comme l’un des tous meilleurs du vingtième siècle, œuvre de l’un de mes réalisateurs favoris et selon moi criminellement souscôté, j’ai nommé Sam Mendes.

l’enfermement de Lester dans une vie qu’il ne reconnaît plus et dans laquelle il n’est plus heureux depuis bien longtemps. Que ce soit chez lui ou au travail, il est systématiquement écrasé par le décor ou par les autres personnages dans la composition des plans, traduisant par l’image son profond mal-être. La maîtrise formelle montrée par Mendes pour ce qui est son premier film est étonnante et ne se démentira pas par la suite dans sa carrière fournie en films de qualité. Je recommande par ailleurs le visionnage de Les Sentiers de la Perdition (2002), Jarhead (2005), et Away We Go (2009). Le moins que l’on puisse dire est qu’il n’a pas volé son premier Oscar du Meilleur Réalisateur.

- Gonzo Bob -

© Dreamworks

American Beauty est en somme une virulente attaque au vitriol contre le mensonge de l’American Way of Life, sa vie de banlieue érigée au rang d’objectif suprême à atteindre pour postuler à un bonheur aussi illusoire que superficiel. Le film critique violemment le matérialisme tout américain qui en est une conséquence directe, et le culte des apparences, des conventions sociales éculées et faussement positivistes. Il est parfaitement jouissif de voir le personnage de Lester tenter de s’en démarquer par des actions simples, telles que le fait de se masturber dans le lit du couple, n’en pouvant plus de la frustration sexuelle qui lui est imposée par sa femme, ou encore de

AMERICAN BEAuTY De Sam Mendes - 1999 Avec Kevin Spacey, Annette Bening, Wes Bentley, Mena Suvari, Thora Birch, Chris Cooper... Scénario Alan Ball Musique Thomas Newman

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REMETTRE EN QUESTION LE MONDE QUI NOUS ENTOURE POUR NE PAS TOMBER DANS DES CRISES EXTRÊMES 38

© Creative Commons

Chronique


Crises ET Dystopies Les crises sociales, humaines, politiques et technologiques sont les terrains favoris des films ou séries dystopiques.

film où la monnaie n’est plus l’argent, mais le temps, ceux qui sont pauvres ont une espérance de vie extrêmement courte, les riches ,eux, peuvent vivre pour l’éternité. Si ces films et ces séries anticipent D’autre part, créer un univers filmique si bien le futur c’est seulement parce très différent peut aussi être une manière qu’ils essayent souvent de parler de détournée de parler d’événements qui ont problématiques actuelles et de ce qu’elles eu lieu dans notre passé. C’est ce que fait pourraient engendrer. Donc non les le film District 9 (Neil Blomkamp, 2009) qui scénaristes et réalisateurs ne sont pas est une allégorie de l’apartheid transposé des Nostradamus dans un univers ou en puissance, mais Non, les scénaristes et réalisateurs les extraterrestres ne sont pas des nostradamus en bien des personnes arrivés sur Terre puissance, mais bien des personnes ancrées dans le sont mis au ban de ancrées dans le présent présent, qui parfois la société dans un s’inquiètent pour district en Afrique notre futur et trouvent un moyen grand du Sud, car personne ne s’intéresse à ces public pour en parler à une très grande créatures hormis pour leur armement. partie de la population (ou pas). Avec un regard politique, c’est aussi le cas Les univers dystopiques vont souvent de la saga Star Wars. Qui s’installe dans créer un monde assez différent pour parler un univers différent du nôtre, la prélogie des crises et problématiques actuelles. montre comment l’État totalitaire se met Par exemple l’allégorie de la pauvreté en place progressivement avec le sénateur avec Time Out (Andrew Niccol, 2011) un Palpatine au sein de la République qui 39


poussé une nation au totalitarisme en divisant les femmes en 3 rôles obligatoires, les femmes riches qui dominent la maison, les Martas qui servent et les servantes qui

tromper, il n’y a pas non plus une idéologie à proprement parler car, très vite, on revient vers une simple lutte entre le bien (les Jedis) et le mal (l’Empire et les Sith). Ces mondes parfois anxiogènes ne sont donc pas forcément là seulement pour nous divertir, mais bien aussi pour nous informer et pousser notre imagination à remettre en question le monde qui nous entoure pour ne pas tomber dans des crises extrêmes ou en tous cas pour essayer de les anticiper. C’est le cas des films ou des séries d’anticipation, par exemple The Handmaid’s tale : La servante écarlate qui imagine un monde où une crise de la natalité aurait

sont des femmes supposées fertiles, qui sont là pour la reproduction. On peut aussi parler de Interstellar (Christopher Nolan, 2014) qui vient dénoncer les problèmes écologiques qui auraient poussé la Terre dans une crise alimentaire sans précédent, forçant la population terrienne à essayer de trouver des solutions pour aller vivre sur des planètes plus accueillantes et favorable à la survie de l’Homme. Peuton aujourd’hui parler de cinéma et de séries d’anticipation sans citer Black Mirror (Charlie Brooker, 2011). Cette série, largement popularisée par son arrivée sur Netflix, nous explique dans des épisodes, à chaque fois avec un thème et des personnages différents, les dérives et les

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deviendra ensuite Empereur en prenant peu à peu tous les pouvoirs au Sénat. Bien que la politique ait l’air d’avoir une grande importance dans la saga, il ne faut pas s’y

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crises que peuvent entraîner les nouvelles technologies.

Niveau crises sanitaires dans les univers dystopiques on pourra simplement citer une bonne vieille série de films de zombies, Resident Evil qui met en scène une crise sanitaire comme on les aime, avec un beau virus qui s’est échappé du laboratoire d’Umbrella Corporation et qui a précipité notre cher monde dans le chaos le plus total (les fans de la saga de jeux vidéos vous diront qu’il vaut mieux jouer aux jeux, moi j’aime bien les films, ça c’est à vous de voir).

Pourquoi les dystopies fonctionnent-elles si bien ? C’est une recette assez simple, on commence par inviter le spectateur à se plonger dans un univers qui sort un peu de ses habitudes, mais qui lui rappelle sa réalité actuelle. Ensuite, bien souvent, on ajoute une poignée d’éléments perturbateurs inspirés de l’actualité médiatique et souvent on parle des crises en cours. Enfin, on saupoudre d’une pointe de faits inconnus qui éveilleront Attention il faut aussi noter que certains la crainte et l’angoisse chez le spectateur. univers dystopiques dans le cinéma n’ont Des sensations dont Les dystopies fonctionnent aussi parfois qu’une sont très friands les bien car La recette est assez simple visée esthétique. amateurs du genre. Le réalisateur pose Pour ceux qui ont un peu suivi l’actualité, une ambiance qui sera appréciée par les cette recette vous rappellera certainement amateurs du genre, mais n’essaiera pas un « documentaire » (si on peut appeler forcément de transmettre un message ça comme ça) sorti il y a peu de temps et moralisateur. qui a fait pas mal polémique. Oui c’est bien de Hold-Up (Pierre Barnérias, 2020) dont Si pendant le confinement, vous vous je parle. D’ailleurs pour ceux qui aiment ennuyez et que vous vous posez la les délires complotistes, je vous conseille question « que pourrait-on vivre de pire de regarder la série Utopia (Denis Kelly ? » allez regarder ces films et séries et 2013) car elle évoque un complot mondial vous aurez peut-être une partie des selon lequel une crise sanitaire serait réponses… Mais surtout, gardez votre lancée sciemment pour faire vacciner en esprit critique et ne tombez pas dans un masse et rendre une grande partie de la délire conspirationniste comme certains population mondiale stérile et ça afin de peuvent le faire en ce moment, car tout contrer la surpopulation et les problèmes ceci n’est que fiction les amis (enfin, pour écologiques sur Terre. le moment…). - Lilith -

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pépites

T T Les pépites De la rédaction TT TT Films inconnus, chef d’oeuvres oubliés, oeuvres mal aimées, découvertes récentes ou coup de coeur rétro... Voici les recommandations de la rédac’ pour occuper vos soirées d’hiver !

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LILITH VOUS RECOMMANDE...

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© IMDB

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RILLETTES VOUS RECOMMANDE...

L'EFFONDREMENT - 2019 SÉRIE TÉLÉ

LA CABANE DANS LES BOIS - 2012 FILM

Guillaume Desjardins, Jérémy Bernard, Bastien Ughetto

Drew Goddard 42


GONZOBOB VOUS RECOMMANDE...

DOC AERYN VOUS RECOMMANDE...

T

TT © IMDB

© IMDB

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MR. VAMPIRE - 1985 SÉRIE TÉLÉ

LES SENTIERS DE LA PERDITION - 2018

Ricky Lau

Sam Mendes

FILM

ESTELLE VOUS RECOMMANDE...

THE WATCHER VOUS RECOMMANDE...

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TT © IMDB

© IMDB

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CHUTE LIBRE - 1993 FILM

MALEVIL - 1981 FILM

Joël Schumacher

Christian de Challonge 43


- Contacts asso.lecran@gmail.com @lecranut2j

www.asso-lecran.fr

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