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ADJUVANTS
from InfoChimie 566
« Notreambitionest de participerau développementdenouveaux vaccins»
Créateur et fabricant d’ingrédients pour la cosmétique et la pharmacie, Seppic a su tirer son épingle du jeu en proposant de nouveaux produits dans sa gamme d’adjuvants. La filiale d’Air Liquide mise aussi sur la production en France en mettant à contribution son site de Castres, dans le Tarn, qui a récemment bénéficié d’une aide à l’investissement dans le cadre d’un appel à manifestation d’intérêt. Entretien avec le p-dg de Seppic, Jean-Baptiste Dellon.
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Propos recueillis par Nicolas Viudez
InfoChimie magazine : Quel bilan faites-vous pour Seppic de cette année 2020 si particulière ?
Jean-Baptiste Dellon : Cela a été en effet une année particulière pour tout le monde, mais nous avons la chance d’être positionnés sur des marchés très résilients. Notre activité cosmétique a souffert lors du premier confinement, mais nous avons pu compenser la baisse des volumes par une augmentation sur la production pour les gels hydroalcooliques qui ont connu un pic de demandes, au moment de la crise. De même, l’activité pharma nous a aidés aussi à mieux traverser cette crise. C’est la raison pour laquelle il est important que Seppic conserve cette diversité dans ses activités. Du point de vue de nos équipes, nous avons pu nous adapter très rapidement durant le
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Jean-Baptiste Dellon, p-dg de Seppic. premier confinement, beaucoup de nos activités étant réalisables en télétravail. Nous avions un accord en vigueur depuis deux ans sur ce sujet, ce qui a facilité la bascule vers ce mode de fonctionnement.
Bien évidemment, les activités liées à la production ont été plus complexes à gérer, mais nos équipes ont su s’adapter très vite.
Que représente l’activité des adjuvants pour Seppic?
J.-B.D. : Sur cette gamme, nous sommes présents à la fois en santé animale et en santé humaine avec des technologies qui sont assez similaires. La vente aux fabricants de vaccins vétérinaires représente une grande partie de notre activité adjuvants. Concernant la santé humaine, nous étions jusqu’à maintenant
SEPPIC, LAURÉAT DE «FRANCE RELANCE»
Seppic a fait partie des premiers bénéficiaires de l’Appel à manifestation d’intérêt (AMI) « résilience sanitaire», lancé en juin 2020. L’objectif de cet AMI est d’identifier des projets innovants d’industrialisation de produits de santé pour renforcer les capacités nationale et européenne face, notamment, à la crise sanitaire de la Covid-19. Il s’inscrit dans le cadre du programme «France Relance » qui a consacré, le jeudi 19 novembre 2020, un total de 31 lauréats. Dans le cadre de ce projet, Seppic s’est engagé à investir sur son site de Castres et à créer à terme une dizaine d’emplois. essentiellement présents sur le marché des vaccins thérapeutiques, notamment en oncologie, où nous soutenons un certain nombre d’études cliniques sur des vaccins innovants. Ce qui est nouveau pour nous, c’est que nous souhaitons désormais nous lancer sur les vaccins prophylactiques, comme le vaccin contre la grippe saisonnière ou pandémique. Notre ambition est de participer au développement de nouveaux vaccins, sur la base d’une technologie innovante, déjà éprouvée, que nous allons rendre accessible pour tous les laboratoires qui souhaitent développer des vaccins à cet usage.
Quelles sont justement vos innovations en matière d’adjuvants ?
J.-B.D. : Nous avons lancé, cette année, le Sepivac SWE (N.D.L.R. : émulsion de squalène dans l’eau), un nouvel adjuvant destiné à lutter contre les grippes saisonnière et pandémique, ainsi que contre le Covid-19. C’est un développement que nous avions démarré, il y a plusieurs années, bien avant la pandémie actuelle, en partenariat avec le VFI (Vaccine Formulation Institute), un organisme de recherche proche de l’OMS. Bien sûr, ce que nous n’avions pas forcément anticipé et qui constitue la nouveauté sur ce produit, c’est qu’il y a un intérêt d’un certain nombre d’acteurs pour des applications sur des vaccins contre le Covid-19. Par rapport à des technologies plus traditionnelles, cet adjuvant a un bon profil d’efficacité tout en étant sûr. Pour le fabriquer, nous avons recours à des technologies d’émulsion que l’on utilise aussi
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sur des adjuvants développés sur les vaccins thérapeutiques et la santé animale.
Seppic propose de nouveaux adjuvants.
Seppic a bénéficié de fonds issus d’un appel à manifestation d’intérêt pour son site de Castres.
LES TROIS SITES DE SEPPIC EN FRANCE
Seppic possède cinq sites de production dans le monde, aux États-Unis, en Chine et en France où Seppic dispose de trois unités. Dans le Tarn, à Castres, son usine la plus importante en nombre d’employés, Seppic a à son actif 26 unités de fabrication qui produisent à la fois des ingrédients fonctionnels et des excipients pour les produits cosmétiques, nutraceutiques, pharmaceutiques, vétérinaires et les spécialités industrielles et des ingrédients actifs cosmétiques. Dans le nord de la Bretagne, son site BiotechMarine est, lui, dédié à la production d’ingrédients actifs cosmétiques issus de biotechnologies marines. Enfin, son troisième site français, appelé Serdex, est implanté à Lons, près de Pau. Il est spécialisé dans l’extraction botanique d’ingrédients actifs cosmétiques et pharmaceutiques.
Comment s’organise Seppic pour continuer à innover sur ce marché ?
J.-B.D. : Nous disposons d’une équipe R&D intégrée, avec des compétences en immunologie. En santé animale, nous gérons ainsi des recherches cliniques. Pour la santé humaine, nous nous associons à d’autres organismes, comme le VFI, des instituts de recherche, des laboratoires ou des biotechs qui nous aident à développer de nouvelles solutions d’adjuvants. Nous intervenons sur des marchés dynamiques en termes d’innovations, notamment le marché de la santé animale, mais il reste encore beaucoup à faire, à la fois sur le plan du progrès technologique mais aussi sur l’accès à la vaccination, partout dans le monde. Nous voyons arriver des technologies de vaccination dans lesquelles l’usage d’adjuvant est moins indispensable, mais cela ne constitue pas nécessairement un frein à leur essor, il reste encore beaucoup de choses à développer dans ce domaine. La France dispose d’une bonne expertise avec des grands laboratoires qui savent se positionner sur les adjuvants pour leurs propres vaccins, mais il y a peu d’entreprises comme Seppic, centrées sur les adjuvants, qui sont capables à la fois de développer de nouveaux produits, de les fabriquer et de les commercialiser.

Seppic s’est positionné récemment sur un Appel à manifestation d’intérêt (AMI). Comment ce projet va-t-il transformer votre site de Castres ?
J.-B.D. : Sur le site de Castres, c’est un développement qui ne date pas d’hier, nous avions déjà progressé vers un niveau de production GMP pour des études cliniques, de phase I ou II. Nous avons cette capacité de production sur le site, mais l’objectif désormais est de changer d’échelle et de basculer sur des productions commerciales. Demain, nous serons en mesure de produire plusieurs millions de doses en nous appuyant sur les ateliers existants et sans avoir à lancer de grands chantiers pour agrandir le site. C’est ce qui nous permet d’aller vite sur ce projet, avec un impact positif sur l’emploi, même si nous sommes déjà 370 employés sur cette usine. Notre modèle de production par lot nécessite des interventions humaines.
Quel regard portez-vous sur l’émergence du sujet de l’indépendance sanitaire et de la relocalisation en France?
J.-B.D. : Nous disposons de trois sites en France, donc nous sommes déjà très bien implantés dans le pays et nous n’avons jamais rencontré de problème pour nous développer en France. Au-delà de l’implantation locale, notre stratégie est surtout d’avoir des produits innovants et différenciants. L’AMI a cependant été une aide très appréciable, elle nous a confortés dans l’importance du projet prévu pour le site de Castres. Je ne sais pas s’il aurait été réalisé avec le même calendrier sans cette aide, même si nous aurions, de toute façon, investi dans cette activité des adjuvants. •