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ACIDE ACRYLIQUE

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NATURALITÉ

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IFPENetAxenspartenairesdeCargill pourdéployer un procédévert

L’entreprise américaine Cargill a choisi IFP Énergies nouvelles et Axens pour l’extrapolation et l’industrialisation de son procédé de production d’acide acrylique biosourcé à partir d’acide lactique. Un partenariat qui pourrait aboutir à la construction d’une usine commerciale d’ici à quelques années.

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Par Dinhill On

Sera-t-il possible un jour de produire à échelle industrielle de l’acide acrylique à partir de mat ières prem ières renouvelables ? L’acide acrylique (AA) est habituellement élaboré à partir de composés issus de ressources fossiles (propane, propylène, etc.). Avec un marché évalué à l’heure actuelle à six millions de tonnes par an, ce produit sert notamment à la fabrication de polymères superabsorbants, de matériaux plexiglass ou encore de peintures. Devant l’essor de la chimie verte et pour répondre à une demande sociétale forte, le groupe américain Cargill travaille à l’obtention d’alternatives renouvelables à l’acide acrylique d’origine fossile. Un intérêt qui est apparu avec la société Codexis avec qui il a découvert, en 2005, une voie de synthèse de l’acide 3-hydroxypropionique (3-PH), un précurseur de l’acide acrylique (AA). Avec le spécialiste de l’ingénierie biotechnologique, Cargill est parvenu à obtenir par voie fermentaire du 3-PH à partir de dextrose de maïs. En outre, le groupe américain s’est emparé, via la reprise de la société OPX Biotechnologies en 2015, d’une technologie pilote de production d’acide acrylique par fermentation, via la voie du 3-PH. Développé en collaboration avec Dow et l’Institut de biotechnologie du Michigan, le procédé d’OPX était en mesure de produire environ 3 000 litres d’acide acrylique

EN FP © I

IFPEN est chargé de mettre au point la catalyse hétérogène du procédé.

LE GLYCÉROL, UNE AUTRE VOIE D’ACCÈS JADIS ÉTUDIÉE

En ce qui concerne l’acide acrylique biosourcé, il est possible de partir du glycérol, connu comme coproduit des esters méthyliques d’huiles végétales ou biodiesel. Une voie qu’a notamment étudiée le groupe français Arkema. Dès 2009, le chimiste de spécialités a initié un projet de plusieurs millions d’euros en association avec des partenaires tels que l’Ensic et Hte Aktiengesellschaft, expert allemand de la catalyse. Ce programme souhaitait s’appuyer sur la conversion du glycérol en acroléine, en vue d’obtenir de l’acide acrylique par oxydation ménagée. Les travaux d’Arkema sur cette voie de synthèse ont permis d’aboutir, en 2010, à la construction, à Carling, d’un pilote de quelques kilogrammes par jour. Cependant, le manque de disponibilité d’importantes quantités de glycérol de qualité et à des prix compétitifs a eu raison de la poursuite du projet. biosou rcé. Mais c ’est avec un consommateur d’acide acrylique biosourcé, Procter & Gamble, que Cargill va connaître une avancée décisive. La multinationale spécialisée dans les biens de grande consommation a mis au point à l’échelle du laboratoire un procédé de synthèse d’acide acrylique par voie catalytique. Cette technologie s’appuie sur une déshydratation en phase liquide de l’acide lactique. Une innovation pour laquelle Cargill a obtenu la licence technologique exclusive, en mai 2020. Suite à cetaccord, l’entreprise a annoncé, le 3 décembre 2020, la signature d’un partenariat avec IFP Énergies nouvelles (IFPEN) et sa filiale Axens. Cette collaboration a pour objectif de poursuivre le développement et la mise à l’échelle industrielle du procédé de production de l’AA biosourcé de Procter & Gamble. « Dans le cadredupartenariat, IFPENsechargera de la mise au point des aspects de la catalyse hétérogène, tandis qu’Axens aura pour

mission d’industrialiser le procédé catalytique », détaille Vincent Coupard, chef de projet chez IFPEN, en charge de cette coopération.

Un procédé renouvelable et plus simple

Récompensée par le prix 2020 de l’American Chemical Society pour une chimie verte « abordable », la technologie à industrialiser a été développée à l’échelle du laboratoire par le groupe Procter & Gamble. « Le procédé permet d’obtenir de l’acide acrylique à partir d’acide lactique issu de la fermentation de sucres cellulosiques de maïs. À terme, ils pourraient être remplacés par des sucres de deuxième géné-

L’acide acrylique entre dans la fabrication de polymères superabsorbants, utilisés dans les couches pour bébé.

« Les développements devraient aider à la construction d’une ligne de production semi-commerciale d’ici à quelques années.»

Structure chimique de la molécule d’acide acrylique ration provenant de résidus agricoles », explique Vincent Coupard. En ce qui concerne la compétitivité de la technologie à l’échelle industrielle, les acteurs du projet restent confiants, car la production d’AA biosourcé à partir d’acide lactique est plus simple que son équivalent pétrosourcé, avec juste une étape de déshydratation. « Le procédé sur lequel nous travaillons présente l’avantage de n’être constitué que d’une seule étape unitaire, au lieu de deux pour le procédé traditionnelsur base fossile. Donc,s’ildevaity avoir un surcoûtpar rapportà l’acide acrylique pétrosourcé, le différentiel de prix serait moindre que pour la substitution d’alternatives biosourcéesà d’autres produits fossiles». Au cours de l’annonce de ce partenariat, les parties prenantes ont

Cargill et l’acide acrylique biosourcé en dates

• 2005 : Découverte avec

Codexis de la synthèse fermentaire du 3-PH, précurseur de l’acide acrylique, à partir de dextrose issu du maïs • 2008 : Partenariat avec

Novozymes pour la synthèse industrielle de 3-PH • 2012 : BASF s’associe à

Cargill et à Novozymes pour l’industrialisation de la conversion du 3-PH en acide acrylique • 2015 : Abandon du projet par BASF • 2015 : Reprise de la technologie pilote de fermentation d’OPX

Biotechnologies pour la production d’acide acrylique via le 3-PH • 2020 : Obtention de la licence du procédé catalytique d’acide acrylique à partir d’acide lactique auprès de

Procter & Gamble

indiqué que « de premiers échantillons tests pourraient être disponibles pour des clients potentiels au cours des douze prochains mois ». « Les développements devraient aider à la construction d’une ligne de production semi-commerciale d’ici à quelque s année s. L’idée étant de se servir des avancées pour déployer une unité commerciale, proba blement au x États-Unis, ainsi que dans d’autres pays, dont potentiellement la France », indique Vincent Coupard. Avant de conclure : « Pour l’industrialisationdes futuresinstallations, il sera possible de les rattacher à des sites industriels existants, comme des sucreries ou des distilleries, pour bénéficier des synergies en termes, n ot am me nt , d e r éu ti li sa ti on de coproduits». •

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