Ibilka #5

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le magazine

numéro 5 - 2014 negu /hiver

Carnaval

Celui d'Altsasu, comme beaucoup de carnavals navarrais, fait partie des carnavals ruraux que les habitants ont su préserver au fil des ans. Ici, les Momotxorros sont les rois de la fête.

Pierre-St-Martin Des hommes y ont laissé leur vie pour mettre à jour, au début des années 50, l'une des plus grandes salles souterraine du monde, celle de La Verna. Retour sur une aventure hors du commun, que les visiteurs d'aujourd'hui ont parfois du mal à imaginer.

Les trois Etche

Industriel de Mauléon, dans les années 50, René Ellisabide « invente » une chaussure que devint légendaire, le Pataugas, et imagine un marketing très original.

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La pierre à cacao Baionako txokolatea, epopeia baten emaitza Gaur, abentura horren izigarrizko azken lekukotasuna irudikatzen du Baionako Museoan ikus ahal den kakao harriak.

Kakao harria

t e x t e Txomin Laxalt / photographie Cédric Pasquini

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confectionner l’une des plus goûteuses boissons de a gracieuse forme en demi-lune la terre et que l’on appelle en Euskal herria : kokolo, tempère l’aspect pierre brute qui txokolate, xokolet ou encore xokolot. l’aurait distinguée si elle eut été À la première tournée, disent les chroniques, on platement… plate et lui accorde une brisait la fève, à la deuxième on la réduisait en une indéniable esthétique. La pierre à pâte qu’il s’agissait d’harmoniser au moyen d’une cacao, telle que l’on peut l’admirer au troisième tournée. Une affaire qui devait demander Musée basque de Bayonne résume des endosses, un tour de poignet de balèze mais… une épopée où tous les ingrédients la délicatesse de la dentellière. Car sous la pierre, la — pas seulement ceux issus du quacalhualt, l’arbre braise palpite mais attention, trop brûlé le cacao à cacao — de la grande aventure sont réunis. Car serait défectueux, pas assez cuit, il ne produirait pas rien ne manque : pirates, Indiens, le grand océan, le beurre nécessaire pour assimiler le sucre. Vous des formules magiques, quelques rabbins et une l’aurez donc compris, l’aboutissement du grand œuvre communauté juive reléguée, du sang, des conflits réside dans l’accommodement de la graine et de la d’intérêts et pour finir la saga, les Arceaux de Bayonne cassonade. Le résultat est à la mesure de l’épopée, il et un mystérieux… Monsieur Bordaguibus. s’apparente à la constitution d’un Mais nous n’y sommes pas encore. trésor, d’ailleurs est-ce un hasard si À considérer le frustre outil, on ne Mots-clés/Hitz gakoak le chocolat se présente sous forme peut imaginer la subtile alchimie qui pierre : harri de petits lingots ? préside à la concoction du breuvage L’épilogue de l’odyssée gourmande, qui fait la fierté de Bayonne. Car la fève : baba abandonnons-la à une contrerime graine de cacao, selon la légende broyer : txikitu, birrindu de Paul-Jean Toulet (1867-1920), aztèque, apportée sur terre par tasse : katilu le gentil poète qui, pour aimer Quelzalcoalt, le jardinier du paradis, passionnément Bayonne autant pour peu qu’on la croquât est amère que l’absinthe qui le tua, sut le céder aussi à notre comme chicotin, une de ces pépites végétales qui onctueuse et noire boisson : incendient la bouche, désolantes d’acerbité. Des Bayonne, un pas sous les Arceaux jungles d’une Amérique pas encore latine aux nappes Que faut-il davantage brodées d’un salon de thé bayonnais un samedi Pour y mettre son héritage après-midi d’emplettes, il y eut des conquistadores Ou son cœur en morceaux ? mal intentionnés, des pirates basques qui, à la Tel s’enivrait à son Phébus pointe du sabre, ont détourné quelques cargaisons, D’un chocolat d’Espagne des Juifs séfarades confinés à Saint-Esprit lesquels, Chez Guillot le feutre en campagne entre les abruptes et sibyllines pages du Talmud, ont Monsieur Bordaguibus. glissé, telles des amatxis, les recettes idoines pour

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Éditorial

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Surprenante nature

Société éditrice : BAMI Communication Rond-point de Maignon, Avenue du 8 mai 1945 BP 41 - 64183 Bayonne bami-communication@bami.fr Directeur de la publication : Jean-Paul Inchauspé Coordination : Jean-Paul Bobin Textes : Txomin Laxalt, Jean-Paul Bobin Direction artistique : Sandrine Lucas Fabrication : Patrick Delprat Iru Errege Le Forum 64100 Bayonne N° ISSN 2267-6864 Photos : Kepa Etchandy : p. 20. Santiago Yaniz Aramendia: p. 19 Couverture : Santiago Yaniz Aramendia

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Les premières semaines de cette année 2014 resteront gravées dans nos mémoires en raison du déchaînement des eaux, des vents violents et des vagues trop puissantes. Pluies torrentielles, rivières en crue, inondations dramatiques, la liste est longue des dommages causés par les éléments naturels. Avec tout le respect qui lui est dû, n’est-ce pas le moment de se tourner vers la Nature et découvrir, à quelques dizaines de kilomètres de chez nous, l’un de ses trésors, « visité » pour la première fois par l’homme, il y a près de 60 ans au cœur de la Pierre Saint-Martin ? Les quelques photos que vous présente ce numéro d’Ibilka, la lecture du reportage vécu par Txomin Laxalt, vous inciteront à faire cette promenade en Soule, ou plutôt à vivre une expérience extraordinaire et inoubliable qui vous conduira jusqu’à une cavité monumentale de près de 200 mètres de haut et 240 mètres de large creusée par les eaux de la rivière souterraine qui y coulait il y a plus de 200 000 ans. Le second reportage, plus historique, vous fera rester en Soule. Vous serez très probablement surpris et amusés par l’histoire des trois Etche qui, parcoururent l’Europe à pied pendant près de 8 ans pour promouvoir cette fameuse chaussure équipée

d’une semelle crantée obtenue avec de la pâte de caoutchouc chauffée à l’aide d’un réchaud à gaz et dont le nom est désormais célèbre : le Pataugas. L’eau, les hommes, à chacun son chemin et votre magazine Ibilka suit le sien aussi. Depuis un an déjà, après quatre numéros trimestriels et un hors-série, les articles et les reportages se succèdent et le travail suit son cours avec toujours autant d’ardeur et de volonté de bien faire. Nous poursuivons notre route et trouvons notre satisfaction dans les découvertes et les rencontres que nous vous faisons faire. Gageons que nous ne sommes qu’au début d’une route riche en surprises et en émotions. Bonne(s) lecture(s) …

Jean-Paul Inchauspé, Directeur de la publication

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PORTRAIT

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Baionako bihotzean, Guy Néplaz-ek eta Isabelle Bilbao-k bigarren bizi bat liburuei ematen dizkiete, aukera ona ere deskubritzeko nola, tradizioan, liburu bat fabrikatzen zen.

Au pays des livres oubliés

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es tristes courlis annonciateurs de l’automne, venaient d’apparaître en masse dans une bourrasque grise, fuyant la haute mer sous la menace des bourrasques prochaines. » Vous avez bien sûr reconnu les lignes qui ouvrent le Ramuntcho de Pierre Loti. Croyez-moi, les mots de l’officier de marine académicien, n’auront pas la même saveur lus dans une série de poche que dégustés à partir de cet exemplaire que vous tenez entre vos mains, en édition de tête numérotée sur papier vélin ©Rives et illustrée par Tillac. Non point qu’à la librairie bayonnaise Koegui on méprisât les collections qui mettent la littérature à la portée de tous mais on y cultive, en plus, la passion du bel objet, du livre considéré comme une œuvre d’art. Nous n’affirmerons pas, selon la formule éculée, que rien ne destinait Guy Néplaz à devenir libraire, au contraire. Une passion pour la lecture chevillée au cœur depuis toujours et une patente relation de cause à effet répondant à la véritable définition du symbole, c’est-à-dire la

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PORTRAIT

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1941

2006

2010

Naissance à Mantes-laJolie (Yvelines).

Rachat de la Librairie des Pyrénées sise 21, rue Vieille-Boucherie.

En juillet, Isabelle Bilbao s'associe à l'aventure.

dates clés

Isabelle Bilbao & Guy Néplaz

Liburu ahantzien herrian t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e s Cédric Pasquini

réunion des fragments d’un même objet qui, une fois réunis, permettent aux membres d’une même confrérie de se reconnaître, l’ont fatalement conduit au 21 de la rue Vieille-Boucherie. En effet, cet ingénieur aux parcours professionnels multiples, enferma Bayonne dans la malle aux souvenirs d’escale. Le hasard de la quête obstinée du troisième élément d’un tryptique composant une gravure le ramena vers Bayonne, chez un de ces bouquinistes à la boutique aussi ténébreuse qu’improbable, chère à l’écrivain catalan Carlos Ruiz Zafón, vous savez, où gît oublié, le livre de votre vie. Guy y trouva le troisième élément du fameux tryptique en l’occurrence ; il sut alors que ce serait là, à Bayonne et pas ailleurs. Acquise en 2006 la librairie ou plutôt cette bibliothèque, entretient un raffinement sans affectation aucune qui caractérise les espaces où l’on se sent bien. On y respire au seul livre, quand l’œuvre de l’esprit est indissociable du support qu’elle habite. Ne venez pas chercher parmi les 25 000 ouvrages rassemblés, les dix meilleures ventes du mois ou le dernier Goncourt, vous ne les trouverez pas. « Ce lieu répond à la définition d'une librairie patrimoniale mais avant tout nous sommes dans le plaisir, nous cultivons les instants de convivialité. Ici, on prend son temps ! » rappelle Guy Néplaz. Isabelle Bilbao après un DEA d’Histoire contemporaine, s’est détournée sans hésiter d'une carrière qui la destinait à l'enseignement pour s'associer à l’aventure en juillet 2010. Isabelle se révèle le mentor idéal pour s’initier aux arcanes >> de fabrication. Après avoir tiré un exemplaire de son sommeil, elle vous le confiera pour apprécier le grain d’une couverture pour mieux en distinguer la texture, basane ou maroquin, buffle ou autruche. Vous apprécierez les éléments de cette petite cathédrale, le détail de la coiffe, la tranche dorée à l’or, parfois non rognée, la truffe, ce poignant ajout, souvent de la main de l’auteur. Dans un voyage à travers les siècles, avec les mots et les gestes qui gouvernent toute passion — il y a de la sensualité chez le bibliophile — vous entrerez dans l’intimité des dynasties des grands relieurs : Marius Michel, LouisHyacinthe Petitot, comme dans celles des grands illustrateurs : Georges-Antoine Rochegrosse, Gustave Doré, bien sûr, mais aussi Alfred Le Petit. La librairie Koegui ou le livre tel qu’il se décline depuis le XVIIIe siècle, avec ses folio, in quarto, in sexto, in octavo… entrant dans la fabrication d’un ouvrage, bref, le nombre de pages pliées qui, paradoxalement, nous contraignaient,

Un des ces bouquinistes à la boutique ténébreuse où gît, oublié, le livre de votre vie

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autrefois, pour une lecture optimale et obligée, à attaquer un livre… couteau en main. Enfin, quand vous saurez différencier les vélins d’un Japon impérial satiné ou d’un whatman grené, réveillerez-vous le bibliophile qui sommeille et vous laisserez-vous tenter par une édition originale d’une Histoire des Basques d’Agustin Chaho, des Contes populaires et légendes du Pays basque de Barbier, du Maritchu du Père Lhande ou du Mariage basque de Francis Jammes, édité en quinze exemplaires sur papier Japon avec gravures en trois états. Rarissime, ce dernier n’est pas à vendre car il n’a pas de prix ! Pour rappeler que Guy Néplaz est aussi bibliolâtre que passionné de Bayonne, commencez donc par cet accessible Bayonne, ville d’art et d’histoire, édité par ses soins et finement illustré par Dominique Duplantier ou une autre façon de visiter la ville sans quitter son fauteuil ! Librairie Koegui, 21, rue Vieille-Boucherie. Bayonne www.librairie-koegui.fr

Mots-clés/Hitz gakoak :

livre : liburu éditeur : argitaratzaile reliure : liburu joste bibliothèque : liburutegi

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Altsasuko ihauteria,

1982-an izan zen, Altsasu-k, herri nafartarra Ihauteriren suak berpiztu zituela. Dudarik gabe Euskal herriko Ihauteririk zirraragarriena.

Momotxorroen gaua InquiĂŠtantes silhouettes Des personnages aux allures inquiĂŠtantes. L'ĂŠnorme trident, comme les taches de sang, font partie de la panoplie du Momotxorro.

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Altsasuko ihauteria, la nuit des Momotxorroak

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t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e s Santiago Yaniz Aramendia

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’hiver, Altsasu semble engourdie. La ligne droite de l’autovia qui file vers Gasteiz/Vitoria d’un côté et la route qui s’envole au nord vers le col d’Etxegarate, il est vrai, l’ont reléguée sur un morne bas-côté. Ce qui permet sans doute à la commune navarraise, laquelle bénéficie depuis 1907 du titre de Ville très illustre, de souffler un peu et d’être oubliée par une histoire qui, au XIXe siècle, entre les exactions napoléoniennes, deux guerres Carlistes et une guerre dite paradoxalement Réaliste, ne l’a pas épargnée. Tapie entre les sierras enneigées d’Urbasa, Andia et les monts Alzania, Altsasu s’étire dans le couloir d’Arakil au bout de mornes zones industrielles. Immeubles souvent disparates de brique et de béton, lourdes maisons sans style, donnent de prime abord l’impression d’un chantier inachevé. Le visiteur qui s’y risque se trouvera heureusement déconcerté alors qu’il longe la Kale Nagusia, en décelant une ordonnance plus intime, le principe initial d’une existence rurale. La maison navarraise imposante, somptueuse et ouvragée, retrouve alors ses quartiers de noblesse autour de la Place des Fueros.

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Cependant, s’y aventurer, selon le très complexe calendrier lunaire, 47 jours et six dimanches avant Pâques, soit le Mardi gras, peut faire croire que l’on a franchi la frontière indiscernable de quelque monde parallèle. Un Mardi gras qui ressemblerait à tous les autres jours ouvrables de l’année quand la commune égrène ses heures dans la bonace d’une journée de labeur, sans autre bouleversement que le chuintement des voitures sur le goudron verni par les dernières pluies neigeuses.Vers les cinq heures, entre chien et loup — ce soir-là l’expression n’a jamais aussi bien exprimé sa force évocatrice — quelques groupes diffus se concentrent aux angles du bref lacis du vieux quartier qui s’ouvre sur la campagne. >>

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Silhouettes fugaces, sans formes précises, emmitonnées dans de grossiers sacs de jute...

Une quête attendue Silhouettes fugaces, sans formes précises, emmitonnées dans de grossiers sacs de jute, faces sans visages, drapées et enchifonnées sans contours définis et que viennent agrémenter mais à peine, de vagues rubans. Hommes épis, êtres à mi-chemin

Intérêt touristique Le Carnaval rural d'Altsasu a été déclaré Fête d'intérêt touristique de Navarre. Cette année, le carnaval se déroulera les 2, 4 et 8 mars.

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Ils vont etxez etxe, de maison en maison, quémandant avec tapage vin et nourriture !

Momotxorro Figure emblématique du carnaval d'Altsasu, mi-homme, mi-démon, aux cornes démesurées au-dessus d'un heaume panier, il est vêtu de peau de brebis, et taché de sang.

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Censure franquiste Après des années d'interdiction, pendant l'hiver de l'Espagne franquiste, le Momotxorro a fait son retour en 1982. Il représente l'identité d'Altsasu.

entre épouvantails et chimères végétales, ils vont etxez etxe, de maison en maison, groupes bruyants, frappant aux huis, quémandant vin et nourriture… Ils inves>> tissent boutiques et bars, en ressortent, comme après un pillage, harnachés de chorizos hectométriques, exhibent bouteilles en menant grand tapage. Des txistus, seule note véritablement humaine, mènent cette bilketa, une quête dont on devine aux sourires complices de la population que, tacitement, elle est attendue. Alors que la nuit enveloppe Altsasu, une foule commence à investir rues et ruelles se tenant néanmoins à distance respectueuse des masques mais en dégustant de délicieux et brûlants esne torrada, ce succulent dessert composé de farine, de lait, de sucre et de cannelle, offert gracieusement au coin d’une rue par des voisins accorts. Plus loin, aux confins de la ville, le fronton couvert Zerandi dresse sa maussade silhouette de ciment au-dessus d’une pelouse détrempée. Un étrange cérémonial rassemble une centaine de jeunes gens, à la pâle clarté d’une lumière chiche. Une ambiance troublante s’établit alors que

l’on amène, à seaux, du sang de bœuf dont on ne tarde pas à maculer, dans un fraîchin douceâtre et entêtant, draps étalés et, généreusement, bras et visages. L’endroit revêt alors des allures de quelque pré à sabbat, rendez-vous annuel et ponctuel autant que démoniaque des Momotxorroak, figures emblématiques du Carnaval d’Altsasu. Mi-hommes, mi-démons, ils endossent les volutes de cornes démesurées, au-dessus du heaume panier, une peau de bête les couvrant pour moitié et un suaire ensanglanté pour l’autre. Ceints de sonnailles et armés de fourches, ils s’agitent déjà trouant la nuit par dizaines, rejoints par de sombres créatures boucs. Au son de la corne, les curieux se doivent de partir pour rejoindre l’univers plus rassurant des hommes.

Un rituel bref et violent À Altsasu, jusqu’en cette année 1982, on pensait définitivement chassés les sortilèges ; en effet, depuis 60 ans, les Momotxorroak ne hantaient plus que les mémoires des anciens. Une guerre, l’interdit des carnavals ayant banni de la péninsule, chimères, Fêtes des Fous, charivaris et masques. C’était sans compter sans l’obstination de la jeunesse bien décidée à rallumer les feux de la tradition et surtout ceux qui annoncent le Carême et la

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contristée quarantaine qui l’accompagne. Kepa Artetxe, directeur du groupe de danse Andra Mari de Galdakao (Bizkaia), grâce aux documents d’époque, exhumera de la mémoire collective costumes et danses et surtout insufflera le souffle tempétueux qui doit présider à l’éphémère et vénéneuse déferlante. Alors que sept heures perlent au clocher de l’église d’Altsasu, pourtant à mille lieues de ce sabbat, ils s’élancent soudain, vague hurlante et gesticulante, bousculant sans ménagement une foule désormais compacte, la piquant de leurs fourches sanglantes, sans souci aucun des enfants terrorisés. La ville, guipée dans la lumière jaunâtre de l’éclairage public, semble avoir quitté aujourd’hui pour basculer dans l’envers d’un miroir maléfique. Les gaitas accompagnent ce curieux et lugubre cortège, des musiciens font danser les Juan tranposoak, hommes sacs, tandis que Heriotzak (morts) agitent leurs faux dans une gigue macabre. Des sorcières frappent de leurs balais un impressionnant Akerbeltz (Bouc noir) mi-homme triomphant. Momotxorroak, à part, restent groupés derrière deux d’entre eux, courbés sous un joug, rappelant le caractère éminemment rural de cette célébration. Le groupe s’étire au long des rues jusqu’au moment où le Momotxorro

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nagusia (chef), suspendant soudainement sa marche chaloupée, souffle dans une corne. Alors, cessant de tourmenter le public, tous embrayent un zortziko échevelé dans un désordre de fourches et de jambes levées. La ville est prise d’une convulsion soudaine, il s’agit bien là d’un rituel bref mais violent sans règles ni barrières auquel tout le monde se soumet. D’ailleurs, ces dernières années les organisateurs avaient fait remarquer aux participants leur baisse d’agressivité, celle qui donne tout son sens au rituel et les avaient adjoints de passer outre des normes malvenues dans une célébration où la transgression s’impose.Il est déjà vingt-deux heures, les Momotxorroak ont été engloutis par la nuit. Les Altsasuarrak ont maintenant investi les bars dont le pub d’Enrike Zelaia, l’accordéoniste de renom en Hegoalde auquel on doit aussi la renaissance de ce carnaval fantastique. Les Momotxorroak et autres Juantranposoak ont replongé dans leur éternel hiver alors que s’allument déjà pour les hommes les premières lueurs du printemps générateur. >>

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La ville semble avoir quitté aujourd'hui pour basculer dans l'envers d'un miroir maléfique.

Mots-clés/Hitz gakoak : mardi gras : astearte-inautea se masquer : mozorrotu solstice d’hiver : neguko solstizio corne : adar

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t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e s Santiago Yaniz Aramendia

Orain dela 60 urte, La Pierre-Saint-Martin-eko leize-zulotik, Georges Lépineux, Daniel Épelly eta Jimmy Théodor, espeleogoak, lehen aldikotz, La Verna aretoraino iristen ziren, dudarik gabe, Santa-Graziko altxoretako bat.

La Verna, Zuberoaren azpian oinez

LaonVerna a marché sous la Soule U ne discrète porte de fer sertie dans la roche et noyée dans la végétation touffue des pentes du bois de Lèche, au-dessus de Santa-Grazi (SainteEngrâce), au cœur du Baxabürü, cette exceptionnelle extrémité sauvage souletine qui lance ses sentiers vers pâturages suspendus et citadelles minérales. Mais Santa-Grazi est aussi le centre d’un monde insoupçonné. Toutes les eaux souterraines, depuis les arres d’Auñamendi (Anie) jusqu’à la dernière goutte de pluie qui tombe sur la cime navarraise d’Hiru Erregeen Mahaia (La Table des Trois Rois, 2 421 m) y achèvent leur course pour résurger sous le lac de Kakueta. Le canyon d’Arpidia trace son sillon profond dans la forêt, et autrefois, les marcheurs coupant au plus court, l’empruntaient volontiers pour rejoindre au plus vite le lapiaz d’Anialarra (Roncal). Ils ne laissaient traîner qu’un regard distrait sur la porte de fer barrant l’entrée du fameux tunnel EDF, réservé aux seules tribus des clubs spéléos. Ici, entre le chaos karstique de l’Auñamendi et les saignées des grands canyons, Zuberoa s’ensauvage et ne s’offre plus qu’aux séculaires traditions pastorales, au pied sûr du randonneur et au Jumar (poignée autobloquante qui permet de se haler sur une corde fixe) du spéléologue. Car ce pays possède son endroit et son envers.

Dangers à peine imaginables

Un envers dont l’accès, pour tout un chacun, ne saurait passer ailleurs que par cette modeste porte métallique. L’ouvrir demande des muscles d’acier ; non pas que, soumise aux intempéries et aux contraintes des quatre saisons, elle renâcle et coince sur ses charnières, mais l’ouvrir c’est libérer un vent glacial qui semble souffler du centre de la terre. La porte de fer s’ouvre, en fait, sur le souvenir de l’une des grandes aventures humaines du XXe siècle dont on vient de célébrer le soixantième anniversaire. Elle

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renvoie à ce 13 août 1953 quand Georges Lépineux, Daniel Épelly et Jimmy Théodor, depuis l’entrée du gouffre qui porte le nom du premier, atteignent la salle qui sera baptisée la Verna (-734 m), selon le souhait du très catholique Norbert Casteret (18971987), un hommage au mont la Verna, lieu de méditation favori de François d’Assise. Pionnier de la spéléologie Norbert Casteret, après Édouard-Alfred Martel (1859-1938) — ce dernier explora au début du XXe siècle, à renfort d’échelles, les canyons de Soule — entreprit en 1951 d’explorer plus avant le puits (1 717 m), découvert par Georges Lépineux en 1950, depuis la Pierre-SaintMartin. Visionnaire, Norbert Casteret devait écrire en 1961 : « Souhaitons que les guides qui feront un jour visiter la salle terminale du gouffre de la Pierre-Saint-Martin aient alors un mot pour rappeler le labeur et l’héroïsme des spéléologues qui s’aventurèrent les premiers

dans cet abîme démesuré. En l’explorant jusqu’au fond, au prix de dangers à peine imaginables, ils devaient permettre un jour l’utilisation industrielle de ses cataractes domptées, comme ils auront permis la visite de cette merveille souterraine. » (1) Des échelles de Martel et Casteret aux foreuses performantes de la SHEM (Société Hydroélectrique du Midi), de l’eau a passé dans la rivière sans mémoire de la Verna. Franchir la porte de fer, c’est aller à la rencontre de pionniers qui, au prix de leurs vies — ici, le spéléologue Marcel Loubens y a laissé la

Unique Au cœur du massif calcaire de la Pierre-Saint-Martin, le gouffre éponyme est l'un des plus profonds au monde..

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sienne — ont ouvert des voies. Santa-Grazi, depuis plus d’un demi-siècle, demeure l’escale avant le grand franchissement souterrain. Aujourd’hui, une piste de trois kilomètres lance ses lacets jusqu’à la fameuse porte qui ne s’ouvre plus sur un sinistre boyau suintant d’eau noire, encombré de bois de soutènement, comme nous l’avions pu constater il y a une dizaine d’années, réminiscence du premier chantier ouvert en 1956 par EDF, afin d’exploiter la rivière souterraine. Prévu sur un an, le percement du tunnel jusqu’à la Verna demanda en fait quatre années. Une campagne de mesures fit apparaître une trop grande variation de débit, ne permettant pas alors d’assurer une installation hydroélectrique qui viendrait en complément du barrage de Santa-Grazi. En renonçant, EDF abandonna le tunnel à la commune. En 2006, le projet renaissait de ses cendres et la SHEM, héritière de l’ancienne et prestigieuse Compagnie des Chemins de Fer du Midi, faisant partie aujourd’hui du groupe SUEZ, dont elle est le bras énergétique, réalisait une première dans le souvenir de l’exploit des pionniers. Une performance accomplie en étroite collaboration avec l’ARSIP (Association pour la Recherche Spéléologique Internationale de la PierreSaint-Martin). Le tunnel d’accès fut d‘abord sécurisé jusqu’à son issue, au niveau de la mythique Verna, la crypte phénoménale.

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la denière aventure que l'homme peut s'offrir sur la terre, l'aventure souterraine Le quart d’heure que dure la traversée des 660 m du tunnel dans une lumière glauque et un froid mordant, 5°, permet au visiteur une mise en condition, de se pénétrer de l’histoire d’un lieu pas comme les autres, de s’initier à la dernière aventure que l’homme peut s’offrir sur la terre, la souterraine.

Le monde du silence

Dans cette nuit pérenne, nulle constellation pour se guider, dans le grand dédale, les cartes dessinent encore des continents de taches blanches, pareilles à celles portées sur les portulans des premiers découvreurs. Sous la peau du monde le GPS en avale ses coordonnées et le portable demeure coi. Un brusque coude, encore une porte, la température remonte soudainement et bien qu’une nuit close l’enserre, on devine que l’on accoste à un espace démesuré. Ce 13 août 1953, Georges Lépineux, Daniel Épelly et Jimmy Théodor, venant de la direction

3,5 km de galeries La salle de La Verna est découverte, en 1953, après l'exploration de 3,5 km de galeries depuis le puits Lépineux. Au fond, la rivière souterraine, à 734 mètres de profondeur. Ci-dessous, le percement du tunnel pour l'accès à La Verna.

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Gigantisme La salle de La Verna, découverte en 1953, mesure 245 m de diamètre, 194 m de hauteur pour une superficie de 5 hectares et un volume de 3,5 millions de mètres cubes ! Près de 200 goufres, 380 km de réseaux souterrains et 13 grandes rivières constituent aujourd'hui les réseaux connus de La Pierre-Saint-Martin.

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opposée, depuis la Pierre-Saint-Martin, en atteignant ce qui deviendrait La Verna, pensèrent d’abord avoir débouché à l’extérieur, les frontales à acétylène d’alors n’étant pas aussi performantes. Dans un réflexe tout empreint d’une poignante humanité, ils cherchèrent les étoiles mais en vain, leurs regards n’accrochèrent que les ténèbres. Il leur fallut revenir de leur surprise pour comprendre qu’ils se trouvaient dans une salle colossale.L’impression est d’autant plus saisissante que le tunnel aboutit au mitan de la cavité et un délicieux vertige étreint le visiteur dont les yeux, progressivement, s’habituent à une obscurité tempérée par un éclairage progressif et soigneusement étudié. Suffisamment faible pour entretenir le mystère et d’inquiétantes zones d’ombre, un faible halo dévoile le fond de la salle, balaie une inaccessible voûte, touche à la cavité Aranzadi, perchée, en face, 80 m au-dessus

de la rivière souterraine, caresse l’illimité. Jean-François Godart (Pau, 1960) directeur d’exploitation du site de La Verna mais spéléologue avant tout, nous avait confié quelques chiffres touchant au démesuré : « La Verna ? 3, 7 millions de m³ d’air, ce qui représente sept fois le volume de Notre-Damede-Paris. La Verna, désormais accessible à tous est un trésor mais elle fait partie d’un réseau unique de 380 km de galeries pour une surface de 140 km². On peut dire que 1953 fut l’année des extrêmes atteints. » Le visiteur qui souhaite poursuivre la quête souterraine le peut désormais sous la conduite éclairée, frontalement s’entend, d’un guide spéléologue attaché au site. Une bonne condition physique, ne pas être sensible au vertige et surtout à la claustrophobie, s’imposent mais une savoureuse appréhension et l’émotion quand elles s’entremêlent, transforment l’expédition en une expérience inoubliable. Cédric, spéléologue confirmé, nous guide. Un équipement adéquat est nécessaire dès que l’on se risque au-delà de la Verna : combinaison, casque, frontale, harnais et double sangle pour plus de trois heures dans le dédale. Il ne s’agit plus de randonnée mais de déplacement à travers un univers hostile. Les premiers moments d’angoisse passés : respiration courte et

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nature

sensation d’oppression — on approche du noir presque absolu et l’expérience de la lampe soudainement éteinte reste toujours un grand moment — on s’accoutume à une progression difficile sur un terrain chaotique, glissant parce que souvent argileux. Ramping et laminoir sont autant de techniques permettant de franchir boyaux étroits et passages plus larges que hauts, en poussant son sac devant soi. Bref la reptation, les passages en opposition, l’emportent sur l’évolution traditionnelle du plus isard des randonneurs. Inévitablement les pensées se tournent vers les pionniers, s’attachent à leurs hésitations dans cet univers tourmenté, et pour eux vierges, mais d’une beauté rare. Car très vite le décor s’impose, la pâle lueur de la frontale accroche des nuanciers alluvionnaires, des ocres touchant au mordoré, des carnations rocheuses allant du laiteux à l’ivoirin entre des noirs de nuits éternelles. On s’y cogne, on s’y coince des épaules, on y glisse, on y patauge, on tend l’oreille à des égouttements cliquetants, aux borborygmes de rivières souterraines. Au détour dévalent des cascades et, au-dessus d’improbables lacs aux eaux bahamiennes, germent de luxuriantes végétations minérales. Certes, au mitan d’un chaos de blocs la présence de quelque cairn rassure mais « ici on se dirige aux courants d’air », avait expliqué Cédric, et de rappeler, en bon pédagogue, que ces

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franchir des boyaux étroits, plus larges que hauts, poussant son sac devant soi fils d’Ariane : « soufflent par le bas l’été et, au contraire, sont aspirants l’hiver. » Encore une étroite cheminée dont le passage est facilité par une corde fixe, jusqu’à la récompense, la salle Chevalier, une béance comme une pause enfin, un silence martelé par les ronflements sourds d’un torrent… et, enflant comme une vague, la délectable terreur de ne plus savoir où l’on se trouve sinon quelque part dans les entrailles de la terre.

Pionniers Les années 50 furent celles des pionniers de la spéléologie à la Pierre-Saint-Martin. Ils avaient pour nom, Georges Lépineux, Norbert Casteret, Marcel Loubens, Haroun Tazieff, Jacques Moreau, José Bidegain, ou encore Guiseppe Occhialini.

La salle perdue

Cédric nous conte l’histoire de la salle perdue, un lieu mirifique croisé dans leur quête, par les trois découvreurs, basilique ténébreuse, peut-être légendaire, qui se trouverait dans cet écheveau et que tout spéléologue rêve de retrouver. Moment d’intense émotion, nous croisons le rocher où sont gravées maladroitement, les initiales des trois explorateurs, un certain 13 août 1953 : G. L, D. E, JT…

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Visites Plusieurs types de visites sont organisés : découverte, exploration, aventure ou hiver. Renseignements et réservations : 06 37 88 29 05 contact@laverna.fr

Mots-clés/Hitz gakoak : grotte : leize souterrain : lur-azpiko cascade : ur-jauzi boyau souterrain : lurpeko heste

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Comme ultime épreuve, une longue tyrolienne lancée horizontalement une dizaine de mètres au-dessus d’une rivière permet, en se halant, de poser pied sur l’autre rive d’une dernière cavité suspendue et c’est le retour dans la Verna. Une plaque en marbre des Pyrénées y rappelle le martyre du spéléologue Marcel Loubens qui, le 14 août 1952, après une chute effroyable, agonisera 36 heures, l’épine dorsale et le crâne brisés, 330 m sous terre, au fond du gouffre Lépineux, ce jour-là : « plus infranchissable qu’un océan ou un désert », selon les mots d’Haroun Tazieff, témoin impuissant du drame. Le sacrifice de Marcel Loubens n’aura pas été vain. Désormais la rivière Saint-Vincent qui coule au fond de la Verna est captée selon les principes prescrits par le protocole de Kyoto et, par une conduite enterrée de trois kilomètres, amenée en aval vers l’usine où elle est turbinée. L’électricité produit quelque 15 millions de kW/h, soit la

consommation à l’année d’une commune de 6 000 habitants. Réunies au sein d’un SIVU (Syndicat Intercommunal à Vocation Unique) Santa-Grazi (Zuberoa), Aramits et Arette en Barétous gèrent les projets touristiques autour du site se situant sous les trois communes grâce à la redevance qu’elles perçoivent. Depuis 2010, la salle la Verna est ouverte toute l’année au public qui peut y accéder en toute sécurité grâce au tunnel aménagé. 40 000 personnes ont déjà franchi la porte de fer. Jean-François Godart, directeur du site qui emploie aujourd’hui quatre permanents et trois saisonniers, peut se réjouir du devenir de ce haut lieu de l’exploration spéléologique, « enfin mis en lumière pour le plus grand nombre dans le respect du souvenir et de l’authenticité mais toujours destiné à l’amélioration de la connaissance scientifique, libre d’exploration pour les spéléologues du monde entier qui disposent, au sens premier du terme, de la clé d’accès. » Qui peut prétendre encore que les grandes aventures humaines sont exploits de l’inutile ? (1)Ma vie souterraine : mémoires d'un spéléologue. Norbert Casteret. Flammarion, 1961.

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histoire

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t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e s ? ? ? ? ? ?

Hiru Etche-ak, Maulen, zola

Les Trois E quand à Mauléon y’en avait sous la semelle ! Balentria paregabea, zortzi urtez, hiru Mauletarrak, Hiru Etche-ak izenekoak, ibili ziren Europaren gaindi Mauleko zapaten irudia defenditzeko.

1955

Mauléon qui, depuis le début du XXeᵉsiècle, se revendique à juste titre capitale de l’espadrille, connaît quelques revers économiques bien que la sandale emploie encore quelque 1 800 personnes. La faute ? À la concurrence, à l’arrivée du caoutchouc vulcanisé et peut-être à une politique de reconversion à courte vue, une autre histoire. De la fine fibre de l’espadrille industrielle mauléonnaise se détache un personnage atypique, souletin dans l’âme, René Elissabide. Né à Mauléon en 1899, ce fils de bonne famille ne cessera de mettre son dynamisme et un don de la communication au service de sa ville. Il sera adoré et décrié, son goût du faste, sa flambe et ses côtés excentriques n’ayant pas l’heur de plaire à la bonne société locale. Pourtant, entre deux faillites retentissantes, il se révèle bourreau de travail. René Elissabide, ancien 3e ligne talentueux du S.A.M, créateur du Miroir de la Soule — aujourd’hui encore une institution en Ziberoa — s’était distingué en lançant en 1929 la société Regum (R.E, ses initiales et gum pour gomme) pour la fabrication d’une espadrille, judicieuse association de la toile et de la semelle en caoutchouc ; mais l’usine ferme ses portes. L’homme n’en reste pas là. Il invente un apéritif, le Retap, qui connaîtra de brèves tournées de gloire dans les cafés du

Mauléon 2013 Jean Etchebarne et Pierre Etcheberry, à droite, les deux derniers témoins de l'épopée.

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len, zolapean bazelarik !

s Etche

Comme dans un casting de mode, Pierre Etcheberry se retrouve à marcher, dans la cour de l'usine

Pays basque, un savon pendant la guerre quand le savon de Marseille fera défaut, les papoteurs malveillants affirmant qu’il relevait davantage de l’abrasif que du lanoliné ! Le coup de génie viendra après la guerre avec l’invention du célébrissime Pataugas qui chaussera l’armée française des jungles d’Indochine aux djebels d’Algérie. dates Pierre Etcheberry se souvient encore de ce 1955, les Trois Etche jour d’hiver 1955 alors qu’à son retour du rejoignent Lille service militaire, il vient d’être embauché chez depuis Mauléon, René Elissabide. Des embauches convoitées 1 200 km en un mois car celui qui est devenu conseiller général du accompagnés par canton de Mauléon, a la réputation de payer une camionnette. mieux que ses concurrents, ce qui lui vaut de 1957, un Mauléonsolides inimitiés. Comme dans un casting de Londres d’anthologie. mode, Pierre Etcheberry se retrouve à marcher 1963 : dernière étape, dans la cour de l’usine au milieu de plusieurs Mauléon-San Remo, autres ouvriers. René Elissabide a l’idée de 976 km. faire traverser la France, à pied, à trois de ses ouvriers de fière allure et de noble prestance pour défendre l’image du nouveau mocassin Iowa à la semelle vulcanisée. Curieux hasard, les trois sélectionnés s’appellent Jean Etchebarne, Pierre-Paul Etchegoyen et Pierre Etcheberry, ce qui n’échappe pas à un journaliste palois qui a vite fait de les dénommer les Trois Etche, une désignation qui leur collera à la semelle et qui sonnait aussi bien que le slogan publicitaire attaché au mocassin Iowa : « Je n’évite pas les flaques, je les cherche. »

L'Europe à pied

L’aventure durera huit ans. En 1955, les Trois Etche rejoignent Lille depuis Mauléon, 1 200 km en un mois accompagnés par une camionnette. Un formidable succès. L’année suivante, 1956, ils relient Strasbourg, 1 531 km en 21 étapes avec une moyenne de 75 bornes par jour. De formidables marcheurs aux jambes comme des bielles qui tiennent une moyenne de 5 km/h avec des pointes de 7 quand il s’agit de tirer une bourre à des accompagnateurs occasionnels qui ne croient pas « qu’ils font tout à pied ». Mal en prend à ces incrédules, les Souletins sont des Formule 1 du macadam, de furieux arpenteurs de nationales nourris aux produits des terroirs qu’ils traversent. Ils ne disposent ni de médecin accompagnateur, ni de kiné, seulement du fidèle Étienne Pétriz, homme de confiance de René Elissabide, de pommades dont ils s’enduisent les arpions à l’étape. Du vin aussi ; quand au restaurant on leur demande si « ces messieurs prendront du vin ? », ils répondent « Oui et apportez-en deux bouteilles, ici on fonctionne par paires. » Un scénario bien rodé : à partir du mois de mars, bichonnés, les Etche sont dispensés d’usine pour se consacrer à l’entraînement sur les routes de Soule et en mai, c’est le départ. René Elissabide, finaud communicant, fait bien les choses. Ce jour-là l’usine est fermée et la population mauléonnaise est conviée à

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une fête exceptionnelle sans parler des retours à la mesure de l’exploit ! 1957, un Mauléon-Londres d’anthologie, 1 500 km, avec arrivée à Westminster ; 1958 Mauléon- Chamonix avec le Puy-de-Dôme en prime, 1 200 km et toujours la foule, la presse, la télévision pour accueillir ces phénomènes. L’Europe découvre Mauléon-Licharre. 1959 : Mauléon-Mont Saint Michel ; 1960 : un épuisant tour d’Espagne du nord, via Saragosse, Logroño, Bilbao et Donostia. 1961 : MauléonGibraltar, 1 317 km en 47 jours sous un soleil de plomb.1963 : Mauléon-San Remo, 976 km. Ici s’achève la geste. L’usine Pataugas-Iowa est à son zénith que déjà le déclin s’annonce. Malade, abandonné, René Elissabide s’éteint en 1967. Il reste outre une stèle à son nom à Mauléon, cette phrase du général De Gaulle qui l’avait rencontré : « Ah ! Pataugas, c’est vous ? »

Mots-clés/Hitz gakoak : espadrille : espartin semelle : zola borne : mugarri marcheur : ibiltari

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À découvrir

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t e x t e Txomin Laxalt / p h o t o g r a p h i e Céderic Pasquini

Guggenheim

L'âme conviviale de la benta Pito 1820-z geroztik, Juan Pito benta artzainen, mendizaleen eta gormanteen hitzordua da. Erronkariko leku bat historiaz kargaturik.

GAldutako ainaren itsasargia. peut plus roboratif, idéal après une course en montagne — Julian évoque la tradition d’accueil de la benta : « Nous nous attachons à maintenir l’esprit du lieu, une tradition d’accueil, une cuisine simple, familiale et de qualité. Surtout nous n’avons pas oublié que notre grand-mère fut aussi hirondelle. » Hirondelle, ainara, le mot possède une résonance particulière en Erronkari (Roncal). Il évoque des temps difficiles quand les jeunes filles navarraises et aragonaises se rendaient à pied vers les usines d’espadrilles de Maule (Mauléon) pour y faire la saison — d’où leur surnom d’Hirondelles. Il leur arrivait de s’égarer dans le brouillard qui, ici, peut monter comme un lait funeste. C’était sans compter sur le bisaïeul, Donato Alcat Zamboran, dit Juan « Pito » lequel, à renfort de coups de sifflet (pito en castillan) mettait les Hirondelles sur le droit chemin et les abritait à l’auberge.

Déguster à la table d'hôte

L

’auberge Juan Pito est un endroit qui a une âme que les propriétaires n’entendent pas céder aux démons de la modernité. Seuls les mendizale dévalant des cols de Soule ou venant depuis Izaba par les crêtes d’Erronkari (Roncal) reconnaissent et de loin, en salivant à l’avance, la cheminée ronde posée sur le toit pentu de l’auberge trapue. Les autres, ceux qui, véhiculés, abordent la dernière vallée navarraise par la Pierre-Saint-Martin, ne la découvriront qu’au dernier moment, avisés par le panneau posé au creux d’un de ces interminables lacets qui conduisent jusqu’au plateau de Belagoa. Curieux endroit posé à l’écart du passage presque sous la pyramide du Kartxila, là où le regard embrasse les >> géants navarrais, Hiru Erregeen Mahaia, Ezkaurre, les mythiques sommets aragonais Bisaurin, Peña Forca et, loin vers le bas, le long tapis d’herbe généreuse du plateau de Belagoa. Le franc sourire de Julian accueille le visiteur charmé par un décor où le bois l’emporte, où la lourde table d’hôte du bar évoque déjà une familiarité liée à l’histoire de l’établissement. Julian Gabas Martinez et sa sœur Ana sont les gardiens vétilleux de ce temple de la convivialité, caravansérail du montagnard, rendez-vous des bergers, planté sur les pentes d’Arrakagoiti depuis… 1820. Alors que nous dégustons de succulentes migas (4 €), sur le versant sud des Pyrénées, plat à base de pain rassis, ail et lardons — on ne

Côté desserts, la natilla ou un riz au lait qui n'a pas son pareil

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Comme il y a souvent foule, nous conseillons d’arriver le plus tard possible — on sert jusqu’à quatre heures — et l’hiver on pourra toujours patienter en sirotant au comptoir un divin caldo (bouillon). Le jarret d’agneau (9,50 €) préparé au feu de bois sous la fameuse cheminée, fait partie d’un moment fort ; tous les parfums de la montagne roncalaise mêlés à une pointe de cendre, explosent en bouche. On le dégustera à la table d’hôte du bar aux côtés des habitués, généralement des bergers, ou à l’avenante salle à manger, sous des photos rappelant les temps que nous évoquions plus haut. On pourra se laisser tenter par les classiques costillas d’agneau mais goûteuses à souhait. Les ventres les plus affamés préféreront aux frites maison, des alubias (haricots) rouges (4 €) d’anthologie. Côté desserts on ne manquera évidemment pas le fromage de brebis du Roncal (2,90 €), ils ne sont plus que deux à le fabriquer dans la vallée et surtout les desserts (2,55 €) à partir du lait maison, la natilla (crème) et un sacré riz au lait. Pour le vin, ne cherchez pas longtemps, un crianza (8 €) navarrais ou riojano feront largement l’affaire.Comme on sera venu à pied, on n’hésitera pas, avant de reprendre son sac à s’abandonner à quelque patxaran. Il y aura bien un sifflet pour nous remettre sur le droit chemin. Venta de Juan Pito - Puerto de Belagoa - Izaba Tel : 948 893 222 - Ouvert tous les jours à partir de juin D’octobre à mai, fins de semaine seulement.

Mots-clés/Hitz gakoak : vallée du Roncal : Erronkari braise : brasa agneau : bildots hirondelle : ainara

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culture

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Bayonne

Ernesto Neto

agenda >>>

Guggenheim

Exposition

le corps qui m’emporte

Cette rétrospective unique, consacrée à l’œuvre du Brésilien Ernesto Neto, célèbre pour ses sculptures organiques, souvent de dimensions colossales. Ci-contre : El tiempo lento del cuerpo que es piel. L’exposition réunit une sélection d’une cinquantaine de pièces créées entre les années quatre-vingt-dix et aujourd'hui, dont certaines ont été spécialement réaménagées afin de les adapter aux espaces architecturaux du musée Guggenheim. D’autres ont été spécifiquement créées pour être présentées à Bilbao. Jusqu'au 18 mai 2014

L'ombre de l'empereur ou la guerre oubliée (Bayonne 1814). Exposition conçue en partenariat avec l'association Bayonne 1814 pour la commémoration des batailles napoléonniennes dans le Sud-Ouest et le bicentenaire du blocus de Bayonne. Du 11 avril au 29 juin, Musée Basque

Saint-Jean-de-Luz

Euskal Herriko Kantuaren Eguna Chants basques au Jai Alai. Le 13 avril

Bilbao

Rétrospective Yoko Ono

À l’occasion du quatre-vingtième anniversaire de Yoko Ono, cette rétrospective présente près de deux cents objets, films, documentation de performances…, qui offrent une vision complète de la production multiple de cette pionnière de l’art conceptuel. Guggenheim, jusqu'au 31 août

Hendaye

Festival du Film de la Mer et de ses Environnements Du 18 au 21 avril à Sokoburu

À lire Pourquoi le rugby au Pays basque ?

Les derby entre l'Aviron et le B.O. ne sont pas des matchs tout à fait comme les autres, ni pour pour les joueurs, ni pour les spectateurs. Ils parti-

cipent de la mythologie du rugby basque que cette Histoire du rugby au Pays basque contribue à éclairer. Le travail d’Alban David dépasse le champ de l’histoire pour celui de l’anthropologie et mêle les repères chronologiques, notamment à travers l’évolution depuis 1900 jusqu’au professionnalisme, aux analyses sociologiques, et s’interroge notamment sur la présence du rugby sur cette terre basque très fortement inféodée au football en Hegoalde. Histoire du rugby au Pays basque Ed. Sud Ouest 19,90 €

enquête

Qui a le droit ?

La tempête Klaus fait rage sur la façade atlantique. Mais au Pays basque c’est une autre information qui circule : un militant basque, Jokin Sasko aurait disparu. Un journaliste part sur ses traces. De découverte en découverte, il comprend que le cas n’est pas unique et découvre un monde de tortures, d’enlèvements et de trahisons. Une atmosphère anxiogène et un univers de l’ombre aux repères impossible. Bien sûr, il sera difficile aux lecteur de ne pas penser à Ion Anza, ce militant basque disparu le 18 avril 2009 à Toulouse et dont le corps fut retouvé, quelques mois plus tard à la morgue d’un des hôpitaux locaux. Une intrigue haletante qui visite l'histoire contemporaine sans concession, voire…sans illusion. L’Homme qui a vu l’Homme Marin Ledun Éditions Ombre Noires 19 €

Le Pays basque perd son Journal ne fois n’est pas coutume, mais la disparition d’un quotidien nous semblait avoir toute sa place dans cette rubrique culture. En effet, depuis sa création en 2001 c’est une certaine idée de la culture et de l’identité basque que le JPB a contribué à bâtir avec engagement et professionnalisme. Au fil de ses 3 128 numéros le Journal du Pays Basque a favorisé les débats, les analyses, donnant la parole à ceux qui réfléchissent à un autre modèle de développement pour le Pays basque et à une place retrouvée pour l'euskara. Avec d'autres, le JPB a largement contribué au pluralisme des médias et à la richesse des échanges, et s'il disparaît sous la forme papier, gageons que sa parole et les idées qu'il défendaient seront toujours présents.

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Bayonne

Foire au jambon

Immuable, depuis le Moyen-Âge, toujours le vendredi qui précède Pâques. Foire, dégustation et restauration. Au carreau des halles du 17 au 20 avril

Sare

Biltzar des écrivains 21 avril, Salle polyvalente

Mascarades souletines C'est un forme de théatre de plein air organisé, chaque année, par les jeunes d'un village. Les rouges, excellents danseurs, s'opposent aux noirs, plus paillards et obscènes. En 2014, ce sont les jeunes des villages de TroisVilles et Sauguis qui jouent la mascarade.

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diaspora

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Argentine

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quand gouverner, c’était peupler

a scène se passe à la réception d’un grand hôtel de Buenos Aires où Kepa Etchandy, le photographe bayonnais que l’on ne présente plus, était descendu alors qu’il accompagnait un groupe de Argentina, Basques d’Iparralde venus visiter leurs cousins garaian, Gaur egun Argentina, Hegoko Amerikako euskal d’Amérique. La réceptionniste, à l’heure de la répartition des chambres, procède à l’appel : « gobernatu diasporaren adierazgarria da. Toponomiaren Etcheberry, Etcheverry (noter dans la pronon- jendeztatzeko zen mailan, % 12 euskal jatorrikoak dira. ciation, une irréprochable distinction entre le v et le b ! ), Etchegaray, Etchandy... » À la fin de la litanie, elle se tourne vers son collègue et lui glisse : « Tu as entendu ? Ces Français ont tous des noms argentins ! » L’anecdote est trop jolie pour être passée sous silence d’autant plus qu’elle est révélatrice de l’histoire d’une des plus importantes communautés basques en Amérique latine. Les chiffres parlent d’euxmêmes : en Argentine, sur une population de 41 millions d’habitants, 14 millions ont à voir avec le Pays basque, quant aux patronymes, 10 à 12 % sont basques. Tout a commencé après Colomb. Les Navarrais, en particulier les Baztandarrak, embarquent pour cette Amérique du Sud de toutes les promesses où ils occupent très vite les postes clés. En 1776, lors de la création du vice-royaume de la Plata, débarque une nouvelle vague d’émigration composée de Bas-Navarrais, de quelques Labourdins et Souletins mais aussi de Bigourdans et de Béarnais, lesquels n’hésitent pas, du reste, à se déclarer Navarrais. Quand en 1810 sonne l’indépendance de l’Argentine, l’immigration se fait encore plus importante et s’amplifie autour de 1825. À la moitié du XIXe siècle, l’Argentine compte 3,5 millions d’habitants ; entre 1830 et 1914, (FEVA) qui fédère l’ensemble des Euskal etxea. Comité de salut public (mars 1794) suite au 150 000 Basques viennent d’Iparralde, une Kepa Etchandy, parti sur les traces d'un oncle, refus de jeunes de s’enrôler dans les rangs des hémorragie quand on sait qu’en 1870, le s’est passionné pour cette épopée. Auteur troupes révolutionnaires. Le travail d’agents Pays basque Nord ne compte que 160 000 d’un passionnant ouvrage sur les Amerikarecruteurs encourage les départs. Noël Elorga, habitants ! noak (De retour au pays) il ne manque pas fin connaisseur de l’émigration basque en Alors quelles sont les motivations ? On avance de rappeler, comment en sillonnant le pays, Argentine ne craint pas d’affirmer qu’il y avait toujours un droit d’aînesse qui contraint il a été frappé par une toponymie qui vient en aussi « cette volonté de créer là-bas ce qu’ils les cadets au départ mais il faut aussi menperpétuel rappel des origines et de citer les n’avaient pas pu faire ici. » tionner les réfractaires à la conscription, villes d’Ezpeleta, Berazategi, Ezeiza, Urriburu, De plus, les présidents du nouvel état, dicles conséquences des déportations vers les Baigorria, Necochea… Ce sont les decendants tateurs comme démocrates, sont le plus Landes des populations des villages de Sare, des réfugiés des guerres carlistes qui ont souvent d’origine basque (Evita Peron était Saint-Pée, Ascain, Espelette, Itxassou, Souaccueilli à leur descente de bateau les gudaris une Uhart de Behasque par son grand-père raide, déclarées communes infâmes par le du président Aguirre revêtus encore de leurs et une Etchegoyen de Souraide par sa uniformes, après la chute de Bilbao (1937). Si grand-mère, quant à Juan Peron, ses >> la génération d’aujourdhui n’a pas connu la arrières grand-parents étaient origiprospérité de l’Argentine des Années 30, alors naires de Baigorri et Banka) lesquels n’ont 6e puissance économique, nul doute que la qu’un credo : gobernar es poblar (gouverner c’est peupler). nouvelle vague d’émigration, choisie celle là, En 1877 naît Laurak bat, la première Euskal reste la meilleure ambassadrice économique etxea, sous l’impulsion des réfugiés des guerres d’Euskal herria. carlistes ; en 1895, le Centro Vasco-Francés ouvre ses portes ; les membres fondateurs sont tous issus d’Iparralde. Aujourd’hui, plus Mots-clés/Hitz gakoak : de cent Euskal etxe essaiment le pays. La émigration : emigrazio Semaine nationale basque, célébrée chaque hémorragie : odoluste année au mois de novembre dans une ville usage, coutume : usaia différente, est un événement organisé par la Fédération des Entités Basques d’Argentine cadet : haurrik gazteena

La toponymie vient sans arrêt rappeler les origines basques des villes : Ezpeleta, Berazategi, Baigorrita…

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