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Petits souvenirs culinaires
Pour produire une bouteille de Williamine, il faut non moins de 8 kg de poires.
Le fruit dans tous ses états
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Le vent de fraîcheur symbolisé par les nouvelles étiquettes de ses sirops en est le témoin: la Distillerie Morand, vieille de 132 ans, s’offre un coup de jeune en misant sur l’audace et la croissance externe.
TEXTE
Patrick Claudet
PHOTOS
Robert Hofer
D
es lettres qui partent dans tous les sens, avec au milieu des fruits stylisés – poires, abricots, pommes, citrons, pastèques, etc. – comme brinquebalés par un trublion. Voilà à quoi ressemblent les nouvelles étiquettes des sirops Morand, dessinées par Karim Merzoug, et que Jean-Pierre Morand, administrateur-délégué de l’entreprise familiale créée en 1889 par son arrière-grand-père, présente fièrement. Même si les 51 variétés n’ont pas toutes fait leur mue, l’effet est saisissant quand on est face aux bouteilles qui occupent toute une pièce de la boutique de Martigny (VS). Les nombreux visiteurs qui s’y promènent – tout à l’heure un car s’est arrêté devant la porte – ne s’y trompent pas, eux qui admirent le graphisme audacieux en dégustant parfois le produit. «A nos débuts, le sirop était un produit anecdotique. Aujourd’hui, nous vendons un million de bouteilles par an et nos arômes emblématiques – poires et abricots, confectionnés avec des fruits valaisans – sont vendus dans la grande distribution», lance JeanPierre Morand. Du coup, on en oublierait presque que l’entreprise a acquis une renommée mondiale grâce à ses eaux-de-vie, notamment la Williamine, comme nous l’explique le sexagénaire.
Trente ans de croissance
Si la marque est déposée en 1953 par son grand-père André, c’est sous le règne de son père, Louis, que la maison familiale connaît un essor fulgurant. Au cours des Trente Glorieuses, le site de production s’agrandit massivement, portant sa capacité d’encavage à cinq millions de litres, tandis que les ventes dépassent les 30 millions de francs. Grâce au développement à l’international, notamment en France et en Autriche où quelque 200 000 bouteilles sont vendues chaque année à partir des années 1970, la Williamine représente ainsi plus de la moitié des exportations suisses d’alcool. L’année du centenaire, 1989, marque sans conteste l’apogée de la Distillerie Morand. «En 1992, le changement des règles d’imposition sur les alcools étrangers a totalement changé la donne, tout comme l’évolution des modes de consommation et l’introduction en 2004 de la norme du 0,5 pour mille. Le déclin de nos activités a été rapide, celui du secteur helvétique dans son ensemble également. De 900 producteurs au début des années 1990, il en reste aujourd’hui environ 200», résume Jean-Pierre Morand.
A cause de ce repli brutal, l’entreprise doit réduire sa voilure: elle passe de 60 collaborateurs à 29, contrainte de licencier des personnes qui avaient 30 ans de service. Pour les familles Morand et Vocat, c’est un crève-cœur, même si elles sont depuis revenues à une soixantaine d’employés.
Un changement de génération
C’est dans ce contexte difficile que la quatrième génération prend le relais en 2004: Bruno Vocat et Julien Morand s’impliquent au niveau opérationnel, tandis qu’Olivier Vocat et Jean-Pierre Morand, respectivement président et administrateur-délégué, siègent au conseil d’administration aux côtés d’André Morand. Si l’enthousiasme de chacun est grand, le défi qui les attend l’est tout autant. La chance, toutefois, c’est de pouvoir compter sur l’affection des consommateurs pour la Williamine et l’Abricotine, deux produits qui n’ont jamais cessé d’être plébiscités, même s’ils →

L’eau-de-vie, qui sublime les produits du terroir, reste populaire auprès de la clientèle helvétique.









Sous l’impulsion de la quatrième génération, la Distillerie Morand a modernisé son outil de production qui compte 15 alambics Holstein dont la gestion est entièrement automatisée.
s’inscrivent dans un marché de niche. De plus, la stratégie de diversifi cation – qui se traduit entre autres par les nouvelles gammes Douce De (moins alcoolisée) et Cœur (quintessence de l’eau-de-vie, avec 20 kg de fruits par litre), plus tard rejointes par Sur Fruit (compotée de fruits alcoolisée, avec une texture remarquable pour la variété Williamine) – a très vite porté ses fruits. «Parallèlement, nous avons cherché à imaginer de nouveaux rituels de consommation. Pour cela, l’univers de la mixologie nous a semblé une excellente piste, d’autant que Hans-Jörg Dütsch, mari d’Irma, nous avait admirablement ouvert la voie lors de l’Expo universelle de Montréal de 1967 en créant un cocktail à base de Williamine, Schweppes et zeste de citron», poursuit Jean-Pierre Morand. Sa rencontre à Verbier avec le barman François Femia débouche sur la création d’une série de recettes qui vont contribuer à moderniser l’image des alcools Morand, et à diversifi er les canaux de distribution.
Une tradition à préserver
Parmi les créations fi gurent le Williamine Mojito et le Cosmorand, qui rejoignent ainsi l’emblématique Williamine Tonic, et dont le succès est pour l’administrateur-délégué la preuve d’un attachement aux produits du terroir. «On fait beaucoup pour promouvoir nos vins et c’est tant mieux. Mais
Bon à savoir:
On a longtemps dégusté l’eaude-vie en fi n de repas, où à l’heure du «café pomme», dont la tradition s’est depuis perdue. Sous l’impulsion des bartenders et de certains pâtissiers, le produit est toutefois dégusté selon de nouveaux rituels. En dehors de leur utilisation pour les cocktails (cf. texte), la Williamine et l’Abricotine accompagnent avantageusement les sorbets, tandis qu’un peu de Douce De Coing pulvérisée par un brumisateur sur une lamelle de foie gras est un délice, tout comme le Cœur de Coing servi avec une gelée de coing congelée puis émiettée. Parole de Jean-Pierre Morand!
l’eau-de-vie de poire et d’abricot représente elle aussi une tradition à préserver. Aucun autre produit ne contient autant de fruits: le vin, c’est 1,2 kg de raisin par bouteille, alors que la Williamine c’est 8 kg de poires, voire 10 kg pour le Cœur. C’est un produit magique, alchimique, et il est paradoxal puisqu’il est à la fois intense et transparent.»
Une distillation plus précise
Les eff orts de la nouvelle direction passent aussi par la modernisation de l’outil de production. La distillerie compte 15 alambics Holstein, achetés dans les années 1980 et entretenus à grands frais, bénéfi ciant d’une révision complète tous les ans. En investissant deux millions de francs à la fi n des années 2000 pour que leur gestion soit automatisée, l’entreprise a trois objectifs: améliorer la qualité des produits, réduire la consommation de mazout et d’électricité, et régler la question sociale du travail de nuit, auquel les collaborateurs ont été astreints pour assurer le fonctionnement de la distillerie 24 heures sur 24, sept jours sur sept, durant la période de distillation courant d’octobre à avril.
Auparavant, les alambics étaient remplis individuellement et manuellement, avec de la marchandise à température de cave (12° C), puis la distillation était lancée sur l’ensemble des machines. Désormais, ces dernières fonctionnent de manière indépendante et automatisée, tout en pouvant être pilotées à distance. L’avantage est double: la distillation est plus précise, donc de meilleure qualité, et plus personne ne travaille de nuit, à l’exception de la personne de garde qui peut suivre le processus
en temps réel via son ordinateur ou son téléphone. Au niveau écologique, le gain est énorme lui aussi. L’eau servant à condenser la vapeur lors de la distillation est utilisée pour préchauff er les charges qui arrivent de la cave, et non plus jetée aux égouts. De plus, au terme de la distillation, les résidus de fruits sont transférés dans une essoreuse qui sépare le solide du liquide, ce dernier étant utilisé pour chauff er le bâtiment.

De nouveaux relais de croissance
Quid de l’avenir? Jean-Pierre Morand se veut raisonnablement confi ant: «D’une part, le niveau des ventes s’est stabilisé et devrait connaître une hausse au cours des prochaines années. D’autre part, nous avons poursuivi notre politique de diversifi cation, non plus seulement en lançant de nouveaux produits, mais également en favorisant la croissance externe.» En 2015, la maison familiale a ainsi racheté l’entre-
Les nouvelles étiquettes des sirops Morand privilégient une typographie dynamique et colorée.
prise Rostal Herbes Aromatiques GrandSt-Bernard, dont le directeur Fabrice Haenni, qui représente la deuxième génération de Rostal, a été nommé directeur général de la Distillerie Morand. Fin 2020, elle a en outre acquis 50 % des cosmétiques Jardin des Monts, et, début 2021, un tiers de Chomel, dont les soupes artisanales sont vendues en exclusivité par Migros. L’intégration de ces nouvelles marques, favorisée par l’expertise de Fabrice Haenni, conforte la Distillerie Morand dans sa position d’opérateur local attaché à la qualité et au terroir, tout en lui off rant de nouveaux relais de croissance. Dans la boutique de Martigny, qui s’est considérablement agrandie au fi l des ans, la gamme de produits apparaît d’ailleurs dans toute sa diversité. Pour le plus grand bonheur des nombreux visiteurs qui s’y baladent avec un panier dans les mains, et dont l’œil n’en fi nit pas d’admirer les nouvelles étiquettes des sirops Morand. •
CONTACT
Distillerie Louis Morand & Cie Rue de Plaisance 2 1920 Martigny (VS) Tél. 027 722 20 36 www.morand.ch
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