Histoire des femmesen quête d'égalité
•Zéphirine Labrie - femme patriote
•Deux Acadiennes devenues seigneuresses au Canada
•L'histoire sulfureuse du Dictionnaire de la langue québécoise
HISTOIRE QUÉBEC est publié quatre fois par année et imprimé à 1 750 exemplaires. Le contenu de cette publication peut être reproduit avec mention de la source à la condition expresse d’avoir obtenu au préalable la permission des Éditions Histoire Québec (ÉHQ). Par ailleurs, toute utilisation non personnelle ou commerciale doit passer par avec les ÉHQ. Les auteurs assument l’entière responsabilité du contenu de leurs articles et des illustrations utilisées, et ce, à l’exonération complète de l’éditeur.
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HISTOIRE QUÉBEC
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No ISSN 1201-4710
Histoire Québec • Rédacteur en chef / Jean Rey-Regazzi
Équipe éditoriale / Louise Douville, Roxane Martineau, Jean Rey-Regazzi
• Réviseure Design graphique
Couverture
Représentation de la pièces Les fées ont soif au théâtre
Droits d’auteur et droits de reproduction licences@copibec.qc.ca
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Le mot de la rédaction
Deux acadiennes devenues seigneuresses au canada
Zéphirine Labrie, patriote engagée
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Charlotte Tassé (1893-1974), la voix oubliée des gardes-malades canadiennes françaises
Les femmes en sculpture et les ateliers de S aintJean-Port-Joli
Robertine Barry, on l’appelait Monsieur
Julienne Barnard, historienne et muséologue avant l’heure
Symbole de luttes, Les fées ont soif
Eugénie Lapointe et rurales du Lac-Saint-Jean
De Timothy Demonbreun, pionnier de Nashville, aux boucher médiévaux de Mortagneau-Perche
Les origines de l’emblématique boîte de conserve ronde de sirop d’érable du Québec
L’histoire sulfureuse du dictionnaire de la langue québécoise - entrevue inédite avec Léandre Bergeron (première partie)
Histoire de lire
— ZÉPHIRINE LABRIE, PATRIOTE ENGAGÉE
par Anne-Marie Sicotte, historienne et autrice
Aucun portrait de Zéphirine Labrie n’étant connu, voici l’image d’un inconnu. BM99-1_1P256. Acc2005.257. Album de Jacques Viger, Archives de la Ville de Montréal.
Parmi les nombreuses Québécoises qui se sont
Zéphirine Labrie occupe l’avant-scène. Fille d’un couple exceptionnel de Saint-Eustache et épouse du sa dénonciation active de « l’esclavage colonial ».
Bas-Canada qui ont joué un rôle important dans la résistance opiniâtre d’un peuple patriote à l’injustice et à l’oppression.
Née le 1er enfants, desquels seulement trois parviennent à l’âge
dernier, qui a fait son cours classique à Québec grâce à un prêtre bienfaiteur, croit en l’éducation pour former à la vie citoyenne et à la protection des droits démocratiques.
sexes, initiative rarissime pour l’époque. Comme bien
école normale formant des institutrices laïques1
enfance au combat harassant que livre la majorité de vise l’établissement d’institutions démocratiques, comme ce navire amiral qu’est le Parlement à Québec, qu’il faut constamment protéger des attaques de l’oligarchie exécutive mise en place dès la Conquête de 1760. Voici l’essence de notre histoire sous la domination
sous toutes ses formes, arme de prédilection du gouvernement exécutif colonial pour conserver le pouvoir et la source de ses richesses2
Pour le peuple canadien, il est donc vital de soutenir la seule en mesure de le défendre contre les abus. Ceci sous-entend d’emblée une lutte épuisante pour assurer la liberté électorale. Lorsque Jacques Labrie brigue
locaux, relais de l’oligarchie exécutive, qui n’hésitent pas à corrompre et à user de violences. L’adolescente fait aussi l’apprentissage de méthodes populaires d’opposition à l’autoritarisme. Parmi ses tactiques d’intimidation
Lambert-Dumont préside des cours martiales illégales, au les trois hommes doivent impérativement être examinés par son collègue Labrie. Pendant que ce dernier les prévenus sont donc reconduits à Montréal comme de braves citoyens plutôt que des criminels de droit commun.
La population patriote de ce comté est l’une des climat de tension que font régner les favoris du régime. Par le fait même, et peut-être aussi grâce à son niveau publiques et représentations citoyennes parrainent un colonial ou impérial, pour dénoncer les abus systémiques et réclamer des réformes constitutionnelles, entre autres.
et non violente, conduite avec civisme par les patriotes. Présentes dans l’espace public, les femmes assistent aux assemblées, elles manifestent leur joie lors des victoires électorales, elles organisent des banquets festifs et en cuisinent les plats, elles fabriquent des bannières
salons ou des veillées pour commenter l’actualité. Leur la cause 3 . Certaines peuvent même voter, car selon le système britannique, la propriété est à la base du droit de
femmes légalement séparées, qui peuvent avoir accédé au statut de propriétaires par la force des choses.
Un volontaire à cheval, l’un de ces fameux « dragons » tant craints par la on the frontier.
Military Collection, Brown University Library.
perte successive des quatre enfants, en très bas âge, qu’elle 4. Tout ce temps, la clique de favoris du régime qui habite le chef-lieu du comté durcit le
prétexte d’émeute, en est l’exemple le plus révoltant, suivi de près, en matière d’escalade de terreur, par les élections
à-bras qui réquisitionnent même les auberges pour concitoyens dans sa maison; d’autres femmes, desquelles l’histoire n’a pas gardé la trace, agissent sans doute de recrutés parmi les Britons fanatiques du comté, veut faire est sonnée, un bref combat a lieu sur la place devant l’église, et les cavaliers battent en retraite piteusement. Leur humiliante défaite est à l’image de leur échec
législative est plus libérale-démocrate que jamais.
La force de l’association et le prix des souffrances se concerte au moyen de sociétés patriotiques et de comités de liaisons. Le champ d’action des femmes, quant
Toronto pour assurer la coopération des libéraux des deux
admet les femmes à ses réunions. Deux ans plus tard, Londres refuse toute réforme (les résolutions Russell) et permet au gouverneur de puiser à loisir dans le Trésor public. Dans la foulée du boycottage des produits d’importation et de la promotion de l’industrie locale, les dames forment leurs associations et c’est le comté des Deux-Montagnes qui donne l’impulsion initiale.
elle préside à la fabrication des vêtements en étoffe du
L’oligarchie coloniale joue son va-tout en novembre avec l’émission de mandats d’arrestation pour haute
court les plus grands risques, car il s’est fait plusieurs irréductibles ennemis parmi la clique de favoris du comté. Les patriotes se rassemblent donc autour de lui pour assurer sa protection; le même phénomène se passe à
de Saint-Denis et le massacre de Saint-Charles, sur le Richelieu, le commandant Colborne dirige son armée vers le comté des Deux-Montagnes, tandis que le gouverneur douzaines de patriotes, dont Jean-Olivier Chénier.
brutales, pillage et incendie de propriétés, persécutions, manque absolu de ressources, attouchements et viols,
des degrés divers.
Le temps fait malgré tout son œuvre. Remariée et mère
n’est pas tombée dans l’oubli en tant qu’épouse du héros Chénier, nul n’a pris la peine de recueillir ses souvenirs, une perte considérable pour l’histoire de notre pays et celle des vaillantes dames qui en ont défendu la cause5 . •
Notes
1. Histoire Québec correspondance, suivi de ses Notes sur l’histoire du Canada. Sillery, Septentrion, 2009; Le Spectateur canadien
2.
2022 et 2023. Tout l’article, sauf lorsqu’autrement cité, est soutenu par cette source.
3. Le Spectateur
4. La Revue des Deux-Montagnes (2), octobre 1995.
et l’essentiel de ses biens. L’inventaire des violences, directes ou collatérales, qu’y endurent les femmes du
5. Histoire Québec
