HIstoire Québec 30-4 - Sainte-Agathe "The air is like champagne"
La santé
-
au cœur du patrimoine
• Sainte-Agathe, « L’air comme du champagne »
• Les femmes folles
social de l’hystérie
• Nouvelle chronique ethnologie
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Le mot de la rédaction
Les vases d’exposition de la pharmacie de W.-E. Brunet de Québec
Sainte-Agathe, « L’air comme du champagne »
La tuberculose et les Inuits
Les femmes folles et furieuses : l’impact social de l’hystérie
Les collections médicales des communautés religieuses, un matrimoine essentiel pour l’histoire de la santé au Québec
« À l’eau! » : costumes de bain, intimité et villégiature dans une société en mouvement
Aylmer et son hôtel British. Au cœur de deux siècles d’histoire et de patrimoine
Une route des Premières Nations au cœur de l’île de Montréal
Les trésors du Centre d’archives de la Côte-du-Sud et du Collège de Sainte-Anne
L’histoire de speak white : entre mythe et réalité
Histoire de lire
— SAINTE-AGATHE,
santé et les services sociaux occupent une place nous en parler davantage.
Le docteur Luc-Eusèbe Larocque déménage à SaintJérôme après un passage marqué par le succès en
du Nord, sur le lac à la Truite, juste au-delà de la limite
louer ces terres à des fermiers. Cependant, il parvient rarement à collecter les loyers, car, étant docteur, il devient préoccupé par la santé des fermiers et ne veut pas leur causer plus de stress. Quand il n’est pas appelé au chevet de voisins malades qui luttent pour s’établir sur cette nouvelle frontière, il écrit des poèmes à sa femme pour la convaincre de le rejoindre. Malheureusement, il échoue. Elle dit plutôt utiliser les poèmes comme
par Joseph Graham,
Sanatorium Laurentien. Photo de l’auteur, 2021.
Les Ménard et les Dufresne, métaphoriquement et physiquement plus grands que nature, arrivent dans la région avant Larocque. Deux des frères Ménard épousent des Dufresne et un Dufresne boucle le tout en épousant une sœur Ménard. C’est sans surprise que la veuve Ménard
mesure environ six pieds et possède des compétences de sage-femme. Elle aide probablement à la naissance de toute une génération de pionniers de la région. Une histoire raconte qu’à son lac privé, aujourd’hui le lac Méduse, il est totalement interdit de pêcher sans son accord. Un pauvre bougre découvre un matin le châtiment de la mère Ménard lorsqu’elle le surprend à pêcher sur la rive du lac. En chemise de nuit, elle se rend à l’étang et l’attrape, le jette par-dessus ses genoux et lui donne une fessée bien méritée!
la paroisse établit un bureau de santé publique dirigé par le docteur Louis Olivier, auquel se joint rapidement l’un des
sécheresse de trois ans. Les plus jeunes quittent la région et le seul espoir des habitants est le train promis par le curé
l’album historique du cinquantième anniversaire de la paroisse
que la chorale de l’école chante sous le thème de la guérison
prend ce train, initialement construit pour encourager le commerce, et amène des géologues au nord, à cette
le Harper’s Magazine décrivant le petit village et sa haute altitude, ses lacs cristallins et son eau pure. Une jeune
le village de ses propres yeux. Elle y reste et y ouvre une maison de convalescence. Des amis suggèrent de la nommer
qui déclare d’ailleurs que l’air y est comme du champagne.
Hôpital Mount Sinai dans les
village comme lieu parfait pour la cure de repos contre la développé cette cure après avoir constaté la guérison de poursuivant sa passion pour la botanique.
Tremblant, qui entoure quelques centaines d’acres réservés à la cure de repos des tuberculeux, tout près d’un club de chasse et de pêche qui sert à de nombreux politiciens. La majorité de cette partie des Cantons du Nord peut alors être décrite comme un sanatorium, une station sèche en haute altitude pour maintenir les troupes et leurs fonctionnaires. La mais, puisque personne ne semble lui avoir parlé des terres réservées au parc du Mont-Tremblant, il construit plutôt un plutôt une maladie toujours présente et répandue, qui peut très bien être considérée comme le plus important adversaire
Tuberculosis: The Greatest Story Never Told, plus d’un milliard 1900. En tenant compte du fait que la population mondiale n’atteint deux milliards d’individus qu’à partir de 1930, la gravité de la maladie peut être mieux comprise. Pour ajouter l’âge. En effet, sa grande contagiosité, due à une transmission par les bactéries présentes dans l’air, perturbe les familles et affaiblit les communautés.
Le concept de bactérie est d’ailleurs inconnu dans la e gens croient alors que la maladie se trouve dans les zones basses et humides, les nuits de brouillard. Cette croyance est si répandue qu’elle est une des raisons pour laquelle les plus fortunés choisissent de construire leurs maisons sur des collines et des espaces plus ouverts.
La mère Ménard. Edmond Grignon. 1861-1911, Sainte-Agathe-des-Monts Parish, 1 mai, 1912.
Le sanatorium du docteur Richer ouvre ses portes
établissement essentiel. Malheureusement, il est entièrement incendié trois années plus tard.
mais les archives locales et les histoires familiales révèlent que de nombreuses personnes viennent dans la région pour une cure contre la tuberculose, même sans le sanatorium du docteur Richer. Cela cause de tels problèmes que les crachoirs deviennent monnaie courante et que les gens craignent la réouverture d’un hôpital comme celui qu’avait construit le docteur Richer.
C’est ensuite que les communautés anglophones l’Hôpital Mount Sinai (1909). Le sanatorium devient aussi un centre de traitement pour les victimes d’attaques au
de repos. Le docteur new-yorkais Edward Trudeau avait lui-même découvert cette cure quand il était venu là-bas pour mourir, mais qu’il y avait plutôt guéri. En suivant
qu’il n’y ait pas de sanatorium plus près de Montréal.
colline, au-dessus du village. La première tâche est de convaincre le conseil municipal qu’un sanatorium est une une semaine au Saranac Lake, et ce, à ses frais.
D’autres plus petits centres de soins, incluant des maisons de patients américains et canadiens ayant déménagé dans les environs pour la cure de repos, voient le jour. Les rues principales de la ville montrent encore les terrasses construites pour accommoder les patients dans les dernières étapes de la cure. Le docteur Richer construit un plus petit Préventorium, encore debout aujourd’hui, et la maison que ouvrir son bureau était auparavant le Sanatorium Hilltop.
Les Sœurs grises ouvrent le sanatorium Notre-Damede-l’Espérance en 1916 et prennent ensuite en charge faisant un hôpital général.
Les antibiotiques comme remède à la tuberculose sont
Sanatorium Laurentien deviennent un hôpital général en relocalise l’Hôpital Mount Sinai à Montréal, ses anciennes installations deviennent aussi une partie du CHL.
de bénévolat dans les secteurs de la santé et des services la mère Ménard et du docteur Larocque. •
Notes
Fêtes du Cinquantenaire de la Paroisse de Sainte-Agathedes-Monts er albumhistoriquep00grig/albumhistoriquep00grig.pdf
Quisisana
Tuberculosis: The Greatest Story Never Told, Swift Publishers, 1992. Petite Histoire du Centre Hospitalier Laurentien personnelle de l’auteur.
, , pamphlet, collection personnelle de l’auteur.
Dictionnaire biographique du Canada.
— SAINTE-AGATHE, " THE AIR IS LIKE "
by Joseph Graham, an
From its beginnings in the Township of Beresford, health and social welfare services were central to Ste. Agathe. It was in the air, the soil. Maybe the Weskarinis Algonquin could tell us more.
Dr. Luc-Euseble Larocque moved home to St. Jerome after a successful hiatus in California during the 1849 gold rush. In the spring of 1852, he acquired cadastral lots in the Cantons du Nord just beyond the northern limit of A.N. Morin’s experimental farm community now called Ste. Adele. His acquisition was on Lac à la Truite. His plan was to lease the land to farmers, but he rarely managed to collect his rents because, as a doctor, he became preoccupied with their health and did not want to stress them further. When he wasn’t called upon by sick neighbours struggling to establish themselves in this new frontier he wrote poems to his wife to convince her to join him. But he failed to convince her to come. She claimed she used his poems as inspiration for her paintings “which were in the care of their daughter” in 1912.
Laurentian Sanatorium
Photo by author, 2021.
The Ménards and the Dufresnes, larger than life both figuratively and physically, had arrived in the area before Larocque. Two Ménard brothers had married Dufresne sisters, and a Dufresne brother closed the loop by marrying a Ménard sister. It is no surprise that the widow Ménard accompanied them. Smaller than her sons, La Mère Ménard was about six feet tall, and her skills included midwifery. She probably coaxed every newborn into the pioneer community for a whole generation. One story is told about her private trout lake (called Lac Méduse today). It was completely offlimits for anyone without her say-so and a would-be poacher discovered the penalty one morning when he was spotted fishing on the shore. La Mère Ménard lumbered out to the pond in her nightgown, picked him up, put him over her knee and spanked him.
The smallpox epidemic arrived in 1885 and by February 1886 the parish set up a public health office headed by Dr. Louis Olivier, who was soon joined by one of the legendary doctors Grignon who came from St. Jerome. Dr. Edmond Grignon chose Ste. Agathe. It was a challenging location, recovering from the smallpox epidemic and suffering a threeyear drought. The young were leaving and the only hope people had was the promise from Curé Antoine Labelle that the train was coming. Many doctors are listed in Dr. Grignon’s 1912 50th anniversary history of the parish, and he noted that even the school choir sang about healing in 1891. He understood Ste. Agathe’s vocation.
Curé Labelle worked hard to get the train extended through this region, and in 1892 it arrived. Soon after, McGill university director and passionate geologist John Dawson used the train, built initially to encourage import/export, to bring some geologists north to study this newly accessible frontier. He wrote an article for Harper’s Magazine describing the small village with its high elevation, crystalclear lakes and fresh water. A young New York nurse named Elizabeth Wand came to see. She stayed, setting up a convalescent home. Friends suggested she call it Quisisana, which she took to mean here is health, and she offered her services to Montreal doctors. It was Elizabeth Wand who declared that the air is like champagne. Her business grew through the 1890s but she was troubled when Arthur Richer, a Swiss-educated doctor, identified a site overlooking
the village for the tuberculosis rest cure. German doctor Hermann Brehmer had developed the cure when he discovered that the disease had gone away when he moved to the Himalayas, resigned to die, but nevertheless pursuing his passion for botany.
The provincial government had created Mont Tremblant Park, surrounding a few hundred acres reserved for the tuberculosis rest cure in 1895, right beside a fish and game club that served a lot of politicians. Most of this part of the Cantons du Nord could be described as a sanatorium, a dry, high-altitude station for maintaining troops and their officials. Dr. Brehmer’s cure had inspired Dr. Richer’s hospital, but noone seems to have told him about the reserved land in Mont Tremblant, so he built a sanitarium in Ste. Agathe instead.
Tuberculosis, or TB, was not a plague that came and went, leaving devastation in its wake, but was such a common, ever-present disease that it could well be the candidate for the greatest single enemy that our species has ever confronted. According to F. Ryan, author of Tuberculosis: The Greatest Story Never Told, an estimated one billion people died of the disease between 1700 and 1900. Given that the world population did not reach two billion until 1930, the gravity of the disease can be better understood. To add to its impact, the disease tended to cut people down in the prime of life, disrupting families and weakening communities. It was, and still is, highly contagious through airborne bacteria.
Bacteria was not known to most of the medical world in the late eighteen hundreds, and people believed that diseases lived in low damp areas, in night mists and fog. This idea was so prevalent that it was part of the reason the wealthy chose to build their homes high up on hills in airy, open locations.
Dr. Richer’s sanatorium opened in 1899, and 200 doctors came to celebrate this essential development. Sadly, it burned to the ground three years later.
Elizabeth Wand may have been relieved for Quisisana, but local records and family histories show that people came to the region to get cured from TB even without Dr. Richer’s sanitarium. This caused such problems that spittoons became common, and people feared the reopening of a hospital like the one Dr. Richer had built.
Mount Sinai Hospital in the s
La mère Ménard. Edmond Grignon. 1861-1911, Sainte-Agathe-des-Monts Parish, 1 mai, 1912.
Around 1905, Montreal businessman Lorne McGibbon was sent to Saranac Lake for the rest cure. New York doctor Edward Trudeau had discovered the cure himself when he came to Saranac Lake to die but was healed instead. He followed Dr. Bremner’s inspiration and built a sanitarium there. McGibbon overcame the illness but lamented that there was none nearer to Montreal. He sent another Canadian patient, Dr. Roddick Byers, to Ste Agathe with instructions to buy 50 acres of hilltop land above the village. Their first task was to convince the municipal council a sanitarium was a good idea, and McGibbon did so by sending them all to Saranac Lake at his expense for a week so that they could see for themselves.
Subsequently the English and Jewish communities opened the Laurentian Sanatorium (1908) and Mount Sinai Hospital (1909). The Laurentian San also became a treatment centre for gas victims during WWI.
A second Swiss-educated doctor, Albert Joannette, looked after tuberculosis patients at the huge Oblate Brothers’ retreat, the private home of McGibbon that they acquired from his estate early in the 1930s. Other, smaller care centres, including the homes of American and Canadian patients who moved here for the rest cure, followed, and the main streets in the town still show the cure porches built to accommodate patients in the last stages of the rest cure. Dr. Richer built a smaller Preventorium, still standing today, and the house that Dr. Joannette purchased for himself and his office had previously been the Hilltop San.
The Soeurs Grises opened their sanitarium, NotreDame de-l’Éspérence, in 1916 and subsequently took over the physical installation of Edmond Grignon’s pharmacy, turning it into a general hospital.
Antibiotics were developed to cure tuberculosis around 1950, and the Laurentian Sanatorium’s installation became the general hospital in 1971, subsequently known as the Centre Hospitalier Laurentian (CHL). When Mount Sinai Hospital moved to Montreal, its local infrastructure also became a part of the CHL.
Today, that complex serves the central Laurentians and Ste Agathe is known for its volunteerism in the health and social services sector, maintaining its health care vocation 176 years after the arrival of la mère Ménard and Dr. Larocque.
Notes
Fêtes du Cinquantenaire de la Paroisse de Sainte-Agathedes-Monts personal collection and albumhistoriquep00grig/ albumhistoriquep00grig.pdf Wand, Elizabeth. Quisisana privately published (personal collection).
Tuberculosis: The Greatest Story Never Told Swift Publishers, 1992. Petite Histoire du Centre Hospitalier Laurentien personal collection pamphlet, personal collection.