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Le mythe de l’eau
par Dr. Christopher Labos
C’est selon une croyance courante que l’on devrait boire de 6 à 8 verres d’eau par jour. Presque tout le monde a reçu cette recommandation à un moment donné, bien que si l’on demandait la raison pour laquelle ce serait le montant recommandé, la personne donnant la recommandation ne serait sans doute pas en mesure de répondre Il y a d’habitude une quelconque idée vague que l’on doit boire de l’eau afin d’évacuer des toxines de notre système On pourrait aussi suggérer que boire de l’eau serait bénéfique pour nos reins car ce sont eux qui filtrent le sang et qui régularisent le bilan hydrique. Malheureusement, aucune de ces idées n’est entièrement vraie, et le mythe des 6 à 8 verres provient d’une incompréhension fondamentale des bases de la physiologie. L’eau est, bien sûr, essentielle à la vie, et l’être humain ne peut pas s’en priver trop longtemps. En fait, comparé-e-s à la plupart de notre famille animale élargie, nous sommes parmi les êtres ayant les plus bas niveaux d’efficacité hydrique de la planète. La raison est que nous perdons pas mal d’eau à chaque jour, et que nous n’avons aucune réelle façon de conserver un excès d’eau ni de remplir nos réserves épuisées sans simplement en boire davantage Contrairement à plusieurs autres espèces animales, nous ne pouvons pas passer des périodes prolongées sans nous approvisionner d’eau potable fraîche

Au cours de la journée, nous perdons une certaine quantité d’eau sous forme de vapeur provenant de notre haleine, ainsi que sous forme de notre sueur. Ces pertes d’eau sont ce que l’on appelle « pertes d’eau insensibles » car nous n’en sommes pas conscient-e-s, en contraste avec l’eau que l’on perd sous forme d’urine Bien que plusieurs personnes croient que la sueur est signe d’exercice ou de chaleur, même quelqu’un qui ne fait pas d’exercice et qui habite un endroit ayant un climat froid perd de 500–1000ml d’eau libre par jour sous forme de sueur Chose intéressante, cette forme de sueur est constituée d’eau presque pure, translucide et inodore, et elle est principalement utilisée pour contrôler la température corporelle en extrayant de la peau sa chaleur, la permettant de se dissiper dans l’air. La sueur au parfum nauséabond auquel se sont accoutumé-e-s la plupart des gens est produite par un différent type de glande sudoripare et consiste plutôt d’une substance huileuse contenant peu d’eau. Cette perte d’eau est essentiellement inévitable. L’on perdra toujours de la vapeur d’eau sous forme d’haleine, pourvu que l’on continue à respirer, et l’on produira toujours cette sueur aqueuseinodore même si l’on déménageait à une région arctique.
Bien sûr, si l’on déménageait à une région tropicale, l’on produirait sans doute davantage de sueur afin de compenser pour la chaleur additionnelle Mais, en tout, à peu près 1 5–2L de pertes d’eau sont considérées comme étant des pertes obligatoires auxquelles nous n’y pouvons rien Celles et ceux qui font de l’exercice, qui vivent dans des régions ayant un climat chaud, ou qui souffrent d’une fièvre perdront évidemment davantage d’eau en suant davantage. Ainsi, un être humain doit réapprovisionner les à-peu-près 2 litres d’eau qu’iel perd quotidiennement par l’entremise de la sueur, de la respiration, et de l’urination. La notion même de ces 8 verres d’eau par jour provient d’un Conseil américain de l'alimentation et de la nutrition de 1945, qui recommanda une consommation quotidienne de 2.5 litres d’eau. Mais, ce qui est généralement oublié de cette recommandation est, premièrement, qu’elle n’était fondée sur aucune forme de recherche et, secondement, que la recommandation déclarait que la majorité de cette consommation d’eau pourrait provenir de sources alimentaires

Toute nourriture contient un certain degré d’eau, bien qu’évidemment certains fruits frais et juteux en contiendront davantage que, disons, une boîte de raisins secs. Qu’il suffise de dire qu’en mangeant de la nourriture ordinaire et qu’en buvant du café, du jus, et quoi encore, l’on finirait par consommait 2 litres d’eau sans devoir la dénicher expressément Si l’on se trouve en déficit hydrique, nos corps possèdent un mécanisme très simple pour nous le faire savoir Simplement dit, nous aurons soif

Si vous avez soif, buvez de l’eau. Si vous n’avez pas soif, alors vous n’avez pas besoin d’aller délibérément boire de 6–8 verres d’eau par jour, comme vous vous procurerez probablement toute l’eau dont vous avez besoin par l’entremise de votre alimentation habituelle. Une mise en garde importante à se garder en tête, cependant, serait que lors de journées chaudes estivales, vos pertes d’eau par l’entremise de la sueur augmentent, et que si vous planifiez passer du temps dehors, il est important d’avoir de l’eau potable sur soi afin d’éviter la déshydratation et les coups de chaleur Bien que la soif soit assez fiable, elle a certes tendance à se faner avec l’âge, et les personnes aînées ont une probabilité plus élevée de devenir déshydratées sans s’en rendre compte Par conséquent, le message à retenir est de boire de l’eau lorsque l’on a soif, mais qu’au cours de journées très chaudes, il ne nuirait à personne de garder une longueur d’avance en s’hydratant régulièrement.
Il n’est pas particulièrement dangereux de boire davantage d’eau qu’il n’est nécessaire. Buvez plus d’eau, et vous vous en débarrasserez simplement dans votre urine. En fait, la fonction principale de vos reins est de s’assurer que les pertes hydriques restent égales à la consommation d’eau. Si jamais ces dernières ne le demeuraient pas et si la consommation d’eau excédait les pertes hydriques, ainsi s’entamerait un état de rétention d’eau, et à chaque jour vous en accumuleriez de plus en plus jusqu’à ce que vous commenceriez à remarquer un gonflage au niveau de vos jambes (la gravité attire l’eau vers le bas, ce qui explique pourquoi vos pieds seraient premiers à s’enfler)
Ceci est le problème auquel font face celles et ceux souffrant d’une insuffisance cardiaque ou d’une maladie rénale : iels accumulent de l’eau car leurs corps sont incapables de s’en débarrasser Ainsi, bien qu’il ne soit peu probable qu’une consommation d’eau excessive provoque quelque problème sévère, il existe toutefois des patient-e-s dont les médecins recommanderont une restriction de la consommation d’eau en raison de leur maladie cardiaque ou rénale.

Il n’y a aucun réel avantage à boire davantage d’eau. Certaines personnes croient que boire plus d’eau aide à évacuer les toxines ou aide nos reins de façon quelconque, mais ceci n’est pas actuellement la vérité. Notre rein filtre à peu près 180 litres de sang à chaque jour. Étant donné que nos corps contiennent à tout moment environ 5 litres de sang, votre rein filtre l’équivalent de votre volume sanguin 36 fois par jour.
Toute quantité d’eau que vous puissiez boire n’est qu’une goutte dans le vase métaphorique et ne devrait entraîner aucun changement Mais, vous n’avez pas besoin de me croire sur parole Une étude récemment publiée dans le Journal of the American Medical Association interroge cette même question Des chercheur-e-s ont rendu aléatoires 631 patient-e-s souffrant d’une maladie rénale, les divisant en un groupe d’hydratation dont les participant-e-s furent encouragé à boire davantage d’eau et un groupe de contrôle dont les participant-e-s furent encouragé-e-s à entretenir leurs habitudes actuelles. En fin de compte, boire davantage d’eau n’offrit aucun bénéfice au niveau de la fonction rénale.
Il y a une notion courante là-dehors que l’eau, étant donné qu’elle est si essentielle à la vie, a donc la puissance de prévenir la maladie. Malheureusement, boire plus d’eau que le montant quotidien nécessaire ni n’évacuera pas les toxines de votre système, ni n’aideront vos reins. Le seul changement que vous remarquerez sera que votre urine passe du jaune au translucide, trait qui n’a aucune actuelle implication médicale au niveau de votre santé. Donc, vous n’avez besoin de gaspiller aucune énergie à vous préoccuper de boire de 6–8 verres d’eau par jour Vous l’avez déjà inconsciemment accompli à chaque jour depuis celui de votre naissance
Cet article fut originalement publié par le McGill Office for Science and Society et apparaît dans E3 Advocacy avec l’aimable permission du Dr. Christopher Labos et du McGill OSS. Article original : The Water Myth

Dr Christopher Labos
Cardiologue titulaire d’un diplôme en épidémiologie, dévoue une portion considérable de son temps à la poursuite de sa recherche, à l’éducation et au podcasting. Le Dr. Labos est aussi contributeur indépendant au journal The Montreal Gazette et au poste de radio CJAD, étant de plus une voix régulière à la CBC Radio ainsi qu’ayant apparu aux postes CTV et CBC Television. Pour en apprendre davantage, veuillez visiter l’Office for Science and Society.