grandbag / open art revue #24

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Je ne cherche pas, je trouve Zenner (ENd Edition) • Photo / © DR

Texte / Viviane

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out le monde connaît la fameuse phrase de Picasso : « Je ne cherche pas, je trouve ». Mais dans cette déclaration nous donne-t-il les clés pour que nous soyons à même de rentrer dans son processus de création ? Le « mystère » demeure inchangé ou entier… D’ailleurs, Henri-Georges Clouzot tenta de le saisir par l’image… Mis à part l’exergue subtil d’une pratique, qu’avons-nous réellement appris de plus ? Une autre vision, tragique, et qui scelle notre destin d’ « homo occidentalus » : cette magnifique fresque de Masaccio montrant Adam et Ève chassés du Paradis. Se pose déjà dans la Doxa chrétienne la question de la création ; Adam issu de la glaise, Dieu comme créateur, qui chasse plus tard sa création du Jardin d’Éden. Il n’en demeure pas moins que cette chétive création faisait sens en elle-même et notifiait la création comme connaissance chamanique telle que Beuys l’a réactivée au XXème, venant contrecarrer les plans divins. Comment décrire de façon précise le processus d’élaboration d’une œuvre, ce qui lui confère tout son pouvoir de séduction ou de répulsion ? La production d’une œuvre d’art ne répond pas directement à une finalité pratique ou matérielle. Elle est, pour reprendre les termes de Georges Bataille, de l’ordre de la dépense, du don gratuit, sans échange. L’œuvre d’art devient ce flot qui s’écoule, incessant, quasi intarissable. L’artiste, de ce fait, dispose de toute liberté pour la concevoir. Concevoir cette liberté, est-ce inévitablement et invariablement penser ses limites ? L’artiste transmet un message à travers un acte créatif dont le caractère reste ineffable : une œuvre se donne à voir et s’éprouve

LESCOP C2C

comme un soulagement, un soulagement « presque enfantin » : « Mes images sont dans le monde », dit sobrement Craigie Horsfield, « elles ont un espace », « elles assument leur responsabilité vis-àvis de leur sujet » et « ne reposent plus sur moi ». Une autre piste parallèle pourrait se révéler celle de Marcel Duchamp : « C’est le regardeur qui fait l’œuvre », il nous laisse là, à notre entière liberté et se débarrasse en quelque sorte ironiquement du problème de la création. Cependant, le travail de l’artiste, que Proust essaye d’identifier et définir dans « À la recherche du temps perdu », serait d’exposer le monde à sa propre contemplation, et tenter parlà de nous le faire voir et sentir dans sa véritable essence. L’artiste, en dialogue avec une intention créative qui est en lui et qu’il veut extraire de lui pour la placer dans une continuité historique et mémorielle, ne seraitil pas, finalement, le seul sujet conscient de la vraie nature du présent ? « Il n’y a pas quelque chose de plus profond, au-delà de ce qui est là » déclare Olivier Mosset, avec une certaine provocation. Olivier Mosset vient ici s’opposer à Marcel Proust et à l’idée générale du surgissement. La création suscitant semblablement admiration de certains ou détestation d’autres, les mystères de la création se jouent des intentions préalables, des commentaires après coup. Pour reprendre Deleuze « Créer, c’est résister », une résistance à la honte d’être un homme. Au moment où il y a tant d’interdits et d’absences d’images mais pléthore de simulacres, ne jouons pas les censeurs et continuons d’instruire dans la durée notre saisissement.

+ Pop du temps présent +

+ Récréation de sons +

LÉA LE BRICOMTE LES KRIMS

+ Esthétique de l’aléa +

+ En images caustiques +

BERNDNAUT SMILDE ÉRIC POUGEAU

+ Un esprit libre +

GENEVA JACCUZI INNER CORNER

+ L’art qui conte les nuages +

+ Bouillonnantes performances +

+ L’électro grand angle +

SERGE GAYMARD

+ En portées lyriques +

GUILLAUME VINCENT

+ Théâtralisation cinématographique +

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WOZZECK Opéra Alban Berg

Version de John Réa pour 21 musiciens

Ven Dim

08/02 20h30

10/02 14h30

Coproduction : Opéra-Théâtre d’Avignon / Opéra-Théâtre de Limoges Opéra de Rouen Haute-Normandie / La Péniche Opéra Opéra de Reims

bulthaup bulthaup b3 suit des convictions, et non des tendances éphémères.

bulthaup unit précision et cuisine hautement personnalisée. L’amour du détail joue un rôle tout aussi important que le concept architectonique global, ce qui fait de chaque cuisine bulthaup une œuvre absolument unique, pour un travail sur mesure authentique, parfaitement adapté à l’espace et à tous ses occupants.

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MUSIQUE

LESCOP POP DU TEMPS PRÉSENT Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © Antoine Carlier

«

Un pistolet glacé me caresse la joue », ainsi Lescop exprime, dans La forêt, sa noirceur pop, en transe néo new wave. Il ne faut pas s’y tromper, Lescop invente, réinvente un son qu’on pourrait à tort croire sorti des 80’s. Loin des productions aux effluves de naphtaline, c’est en effet avec une œuvre radicalement personnelle, par un phrasé particulier, une voix sensible (qui ne cherche pas à beugler, juste à dire), par des rythmiques métronomiques et des synthés, accompagnés de guitares pointues, comme sur le fil du rasoir, que Lescop nous fait musicalement atteindre l’au-delà spectral de sonorités à l’ambiance glacée. Sur scène, un son beaucoup plus brut, claquant comme une déflagration de pistolet, nous entraine dans l’Univers particulier de Lescop. Une expérience qui ne laisse pas indifférent. À découvrir sur scène à la Cartonnerie de Reims, le 29 mars lors de l’édition de printemps du festival Elektricity. LESCOP

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MUSIQUE

« On me parle tout le temps des années 80, c’est un peu lassant »

Peux-tu te présenter, à ceux qui ne te en plus cette particularité française de connaîtraient pas encore ? textes travaillés ? Mathieu Lescop, chanteur, provincial, banlieusard, obsédé par son travail !

Si tu devais décrire ta musique en une expression, quelle serait-elle ? Musique Populaire.

Ce n’est pas intello, il n’y a aucun mot savant. Il y a, c’est vrai, des références littéraires ou cinématographiques, mais n’importe qui peut lire un livre ou voir un film, donc n’importe qui peut écrire une chanson.

C’est peut-être ce qui en amène certains à te comparer aux dernières « icônes » pop françaises (plus d’1/4 de siècle déjà) telles que Taxi Girl ou Daho ?

Tu qualifies ta musique de «populaire». Or, en France, le populaire s’est souvent traduit jadis par « variété », et aujourd’hui par « productions de Tant mieux! J’adore ces chanteurs. Après, ce ne sont masse », formatée commercialement, pas mes seules influences, je suis un fan des Doors et sans recherche d’une quelconque réelle du Gun Club ou de Reggae, par exemple. qualité artistique. Penses-tu qu’en France le genre pop est plombé pour D’ailleurs, ça ne t’irrite pas qu’on te des siècles ? compare à d’autres ou à quoi que ce Non, je pense que c’est devenu comme ça parce que soit ? la plupart des musiciens sont des bourgeois et qu’ils n’ont pas besoin d’argent, donc ils dédaignent la pop et les artistes qui ont la vulgarité de faire des disques pour les vendre. Ce n’est pas mon cas. Je pense qu’on peut et qu’on doit faire de la musique populaire de qualité. Je fais partie des gens qui prennent leur métier au sérieux et je ne fais pas de la musique en dilettante. Je chante pour tout le monde, peu importe le milieu.

Oui on me parle tout le temps des années 80, c’est un peu lassant… Je pense que si on écoute encore mon disque dans 20 ans (je le souhaite!), ce sera évident pour les gens que c’est de la musique des années 2010 ! Regarde Primal Scream : à l’époque, tout le monde disait que ça sonnait 60’s, mais aujourd’hui, si on le réécoute, on sait tout de suite que Screamadelica, c’est de la musique du début des 90’s, non ?

Quels sont, selon toi, les éléments de Comment te vient l’inspiration ? base qui caractérisent ta musique et la En travaillant tous les jours. rendent unique ? Comment as-tu travaillé pour conceLe fait que le chant soit en français, je pense! Nor- voir ton album éponyme ? malement, ce type de musique snobe le Français.

À l’écoute, tu te rapproches plutôt du rock, d’un rock synthétique, froid, avec 06

LESCOP

J’ai travaillé régulièrement, d’abord sur les textes, ensuite les instrus, après les arrangements avec Gaël Étienne, et enfin la production avec Johnny Hostile,

sur une période de trois ans, par sessions d’enregistrement espacées et courtes, dans un studio froid, humide et exigu !

Et les pires ?

Comment trouves-tu les titres de tes morceaux ? Que signifient-ils, ou plutôt quel univers symbolisent-ils ?

Beaucoup! Il y a Eugene Bullard, le Baron Rouge, Jim Morrison, Jean-Pierre Melville, Bruce Lee, Klaus Kinski, Jean Rochefort … Plein de gens comme ça.

C’est souvent ce que je trouve en premier ! J’écris le titre en haut de la page et je vois ce que je peux raconter là-dessus. Je ne sais pas exactement quel univers ils symbolisent, mais c’est comme une chambre remplie de photos aux murs, de bouquins dans la bibliothèque, et de DVD ! Il y a des fantômes d’autres artistes, de héros, des méchants et des gentils, des Eugene Bullard et des Raspoutine !

Jouer dans des lieux trop éclairés!

As-tu des icônes et des maîtres à penser ?

Y a-t-il des artistes avec qui tu aimerais

travailler ?

C’est un secret.

Comment adaptes-tu, modifies-tu tes compositions entre le format enregistré et l’interprétation en live ?

Je n’ai pas de méthode définie. Je veux juste que ce soit moins subtil et plus brutal. On trouve le moyen de le faire en faisant tourner les morceaux, et c’est un peu au fur et à mesure des propositions des musiciens qui jouent en live. Je pense que c’est important que les musiciens aiment jouer ce qu’ils jouent, donc il faut écouter ce qu’ils proposent... Sauf si ça ne me plaît pas à moi, évidemment ! Hahaha !

Quelles ont été tes meilleures satisfactions musicales, meilleures impressions et souvenirs ? Les premières fois que j’ai joué mes morceaux en live, j’ai vu que ça fonctionnait ! C’est une sensation géniale de se dire qu’on n’a pas fait tout ça pour rien, quand les gens vous disent: «Yes ! Encore ! »

popnoire.com VENDREDI 29 MARS À 20H00 @ LA CARTONNERIE LESCOP + ALINE + GRINDI MANBERG + PHONOGRAPHE CORP. DJ (TARIFS : 10€ / 17€)


MUSIQUE

C2C RÉCRÉATION DE SONS Propos recueillis par / Claire Beheyt, Razmo Ducrot, Julia Ravini • Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © DR

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riginaire de Nantes, C2C (originellement Coups 2 Cross), s’est formé en 1998 autour des djs 20Syl, Greem, Atom et Pfel, issus d’Hocus Pocus et Beat Torrent. 2012 a été marquée par la sortie de leur premier EP puis de leur premier album. Par ailleurs, C2C s’est produit sur de nombreuses scènes, notamment au cours des festivals d’été (Vieilles Charrues, Cabaret vert). C2C

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MUSIQUE

« L’idée c’est au départ de réaliser un premier album normal, de le prendre, de le découper dans tous les sens et de le restructurer pour en faire quelque chose d’autre » Pouvez-vous vous présenter ?

Nous sommes C2C, on est 4 djs qui jouent ensemble depuis un long moment, et on sort notre premier album, après avoir fait de nombreuses compétitions de djing. Avec le scratch il était difficile de se renouveler. On s’adresse au départ à un public très particulier des compétitions de djing, avec du scratch, un domaine technique et pas vraiment écoutable pour les profanes. Aujourd’hui, on arrive avec un projet différent et artistiquement travaillé qui nous donne la possibilité d’explorer plusieurs directions, d’ouvrir de nouvelles perspectives, et une fois qu’on a été au bout, de pouvoir nous ressourcer de l’autre côté.

Comment composez-vous votre musique ? L’idée c’est au départ de réaliser un premier album normal, de le prendre, de le découper dans tous

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C2C

les sens et de le restructurer pour en faire quelque chose d’autre, qui pour nous est plus abouti. On compose donc de manière traditionnelle, avec des instruments de musique. On travaille avec des synthés, des claviers, des guitares, des basses, des batteries acoustiques, auxquels on peut intégrer des cordes en faisant venir des musiciens extérieurs et des voix. Au départ, on se met d’accord sur un son, mais on va surtout s’attarder sur la rythmique car c’est le son de batterie et la programmation qui vont vraiment donner leur charge énergétique aux titres. Parfois, ça passe par de multiples versions, de multiples vitesses pour trouver le tempo qui va réussir le mieux à mettre le morceau en valeur. C’est ce travail rythmique qui crée un fil rouge sur notre album, même si l’on a l’impression que ça part dans tous les sens. Il nous est également arrivé de freestyler à 4 en improvisant avec des disques et de faire ainsi naître des morceaux.

Comment se sont déroulées vos colla- Quel est enfin votre regard sur la scène borations artistiques pour votre pre- musicale française en général et électro mier album ? en particulier ? L’album, intitulé Tetra, comporte 14 morceaux dont 11 nouveaux. Il est bâti sur un mélange de plusieurs influences, car nous avons invité sur l’album, des chanteurs, des rappeurs, de vieux chanteurs de la Motown… Quand on travaille avec des musiciens extérieurs il faut qu’ils soient d’accord pour qu’on tronçonne, qu’on inverse les choses, avec notre logique de djs.

Plus ça va, plus on a en France des artistes qui maîtrisent leur sujet, avec des personnalités fortes qui n’ont pas besoin de copier ce qui aurait pu exister auparavant. En France, on avait une particularité dans l’écriture des textes. Aujourd’hui, une partie du côté précurseur de la musique se trouve dans l’électro. On est content de « partager le bateau » avec toute cette scène électro.

Quelle musique électro appréciez-vous particulièrement ?

On aime ce qui est à mi-chemin entre le son groove et le son digital brut.

onandon-records.com/c2c.php



ART

LÉA LE BRICOMTE ESTHÉTIQUE DE L’ALÉA Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / Page 10 : «Sculpture 2010», balles de tous calibres / © Lara Vincy & Léa Le Bricomte • Page 11 : « 120 000 points », broderie sur veste 2011 / © Léa Le Bricomte • Page 12 : « Love », sculpture 2009 / © Léa Le Bricomte • Page 14 : « Parachute doré », sculpture 2010 / © Granville Gallery et Léa Le Bricomte. • Page 16 : « Free ride», série de balle augmentée 2011-2013 / © Léa Le Bricomte • Page 17 : « Crash », performance sur le marché à Sète 2009 / © Lara Vincy & Léa Le Bricomte.

« Je développe une esthétique sécrétionnelle. Chaque production suinte, se répand, induit sa variation »

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éa le Bricomte, jeune artiste plasticienne et performeuse, développe un art qui détourne les codes liés aux choses, pour leur donner une nouvelle signification, poétique, voire même sensuelle quand elle met en œuvre quelques gastéropodes aventureux. Son art propose une réelle réflexion sur les émotions humaines quant à la beauté ou la laideur, l’apaisement ou l’angoisse… Et nous offre un nouveau rapport au vivant.

Qui est Léa le Bricomte ?

Je suis artiste, je suis née en 1987, je suis capricorne ascendant capricorne… J’ai fait des études d’art à Dijon, Caen et Paris.

Comment êtes-vous arrivée à la sculpture et à la performance ?

Les choses se sont établies progressivement, j’ai commencé par faire de la photographie et de la vidéo lorsque j’étais étudiante à Dijon. En 2007 j’ai participé à un workshop de Joël Hubaut (organisé par Lydie Jean dit Panel et Hubert Besacier). Grâce à cette rencontre, j’ai envisagé la performance

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comme un nouveau champ d’expériences possibles, qui invite à une osmose entre l’art et la vie. Lorsque je réalise des actions dans l’espace urbain, l’interactivité avec le monde extérieur est poussée à son paroxysme. Les spectateurs font partie de l’action, ils en sont le contexte même. Cette posture me permet d’être en état de créativité immédiate et spontanée. La sculpture s’est imposée à moi en simultané. Ces deux pratiques me semblent très proches, elles sont les deux facettes d’une même réalité. Ma sculpture Parachute Doré est pour moi une sculpture performative. En effet, le harnais vide mets l’accent sur le corps manquant. Lors de la réalisation de cette

pièce j’ai beaucoup pensé à Yves Klein « un homme dans l’espace ! Un homme lévite dans l’espace à cinq mètres du sol ; plus rien ne le relie au sol. En suspension les bras écartés comme les ailes d’un oiseau, il vole. Inévitablement la chute approche. ». Ce parachute est en quelque sorte un retraitement sanglé, harnaché, prothèsé du saut dans le vide d’Yves Klein. En fait, j’aime créer des objets ambigus au potentiel subversif comme les balles en vaselines ou Love, une série de moulages de préservatifs en étain.

Comment décririez-vous votre travail ? Une constellation de rencontres, d’objets, d’images

et d’actions engendrés par des glissements, des déplacements et des détournements formels, matériels et conceptuels. Je développe une esthétique sécrétionnelle. Chaque production suinte, se répand, induit sa variation.

Vos choix artistiques et les lieux de vos performances sont-ils des outils ouvrant une fenêtre sur un questionnement sur l’environnement, l’histoire et le monde contemporain ?

Oui c’est une évidence induite par ma manière de travailler. Je commence toujours par recouper


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et greffer les unes avec les autres des informations plastiques et conceptuelles de tous domaines (histoire de l’art, biologie, balistique, spiritualité…). Je digère ces données et les injecte ensuite dans mes propositions plastiques. Par exemple, mes performances et vidéos avec les escargots sont une prise de position « non anthropocentriste ». Il s’agit ici de créer de nouvelles configurations, de nouveaux rapports entre l’homme et les animaux. Mais ce qu’il faut retenir c’est qu’il n’y a pas de message particulier, le champ reste ouvert.

Vous réalisez des performances avec des escargots et des œuvres avec des balles… Le laid, le dégoût sont-ils, au-delà du questionnement qu’ils suscitent sur nos peurs animales, un vecteur de beauté, de réflexion et d’espoir ?

Je ne comprends pas en quoi les escargots convoquent obligatoirement une sensation de dégoût… Alors que moi j’y vois spontanément de la beauté…! La rencontre d’un corps humain avec les escargots notamment dans mes vidéos Snails Invasion n’est pas pour moi une interrogation sur « le dégoût », mais il s’agit de dévoiler une autre facette de notre rapport au vivant. Cette vidéo suggère une métamorphose du corps qui devient un lieu de prolifération animale, un corps qui ne serait plus tourné vers l’humain mais vers l’organique et le monde minéral. J’aimerais également convoquer une symbiose entre la respiration du corps et les mouvements des escargots qui s’approprient les corps devenus paysages, comme un nouveau monde à explorer. Le temps est aussi une notion fondamentale, en transformant le point de vue du spectateur sur les escargots un autre temps se révèle, il est beaucoup

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plus lent plus proche de la vitesse réelle de notre organisme. La bave des escargots, loin d’évoquer le dégoût, devient alors une matière brillante, une subtile peinture post-humaine. La beauté de cette vision est indiscutable. Ces vidéos et performances constituent, par ces mêmes aspects, des vanités positives en ce sens qu’elles suggèrent le cycle infini de la vie. En ce qui concerne les munitions et les armes, ce sont souvent des objets historiques (WW1 et WW2) qui n’ont plus de fonction meurtrière et qui sont voués à devenir des objets muséaux ou bien des décorations et de l’ornement. Ce sont des témoignages, des vestiges de combats passés. Je leur donne donc une autre forme d’existence. J’opère par greffes et croisements d’objets en jouant avec leurs symboliques, leurs histoires et leur portée sur l’imaginaire collectif. Par exemple, Free Rider est une série d’obus 18 pounders de la guerre de 1914-1918, montées sur des roues de skate-boards. Cette pièce mixe deux cultures et époques a priori antagoniste, mais l’objet par son existence même et la logique plastique qui s’en dégage rend le lien réel. Il y a aussi cette série de pièces Guerres de Tribus où j’associe des projectiles issus des guerres occidentales à des tressages de cuir, des perles et des plumes provenant de la culture amérindienne. Ainsi, je fusionne deux éléments provenant de deux cultures et de deux conceptions extrêmement différentes de la guerre, s’agissant de ses objectifs, ses codes et ses modes d’action. Les obus de mortiers renvoient au monde occidental et industriel, tandis que les tressages en cuir et les plumes sont issus de l’apparat guerrier indien. Par ces objets, j’aimerais remettre en question la prédominance du regard occidental au profit d’une conception ouverte, sans frontières. Il s’agit de transformer des signes violents en signaux sensibles.

Pour chacun de mes projets la décontextualisation des objets guerriers les rend inoffensifs. En effet, sortir les armes du champ de bataille pour les mettre dans celui de l’art produit un désarmement. Avec ces œuvres, le matériau munition produit son auto désarmement. Le dégoût et la peur, en tant qu’émotions, ont une véritable fonction politique, définissant ainsi les contours affectifs du réel. Mais ce réel n’a-t-il pas les contours tronqués, amputés par une censure puissante et silencieuse ? Sans doute ! Mais l’idée de réel est déjà une conception de l’esprit. En ce sens, j’adore la pensée bouddhiste qui affirme que les images vues à la télévision ont plus de réalité que ce que l’on croit être réel.

Comment opérez-vous pour concevoir une œuvre ? Vos réalisations sont-elles scientifiquement, à la limite chirurgicalement conçues, ou bien, laissez-vous une part plus ou moins importante au hasard et à l’improvisation ? Mon approche

est vraiment différente en fonction de chaque projet. Certains sont très calibrés et préparés minutieusement à l’avance, tandis que d’autres intègrent dans leur concept même le hasard. Par exemple, lorsque je planifie la réalisation des Affiches Dévorées Anonymes (affiches monochromes dévorées par les escargots) je n’ai pas de prise sur les déplacements et l’action des escargots, car il s’agit d’un processus qui s’auto-génère. C’est le même principe pour mes peintures de bave (traces du passage des escargots sur un carré noir de feutre). Pour les actions performatives, l’accident peut intervenir à tout moment et il faut à tout prix l’intégrer pour qu’il devienne une nouvelle composante de l’œuvre. Il s’agit même souvent du plus beau moment !

Collaborez-vous souvent avec d’autres artistes? Et flânez-vous vers d’autres horizons artistiques, d’autres esthétiques, notamment la musique ? Oui, je

travaille régulièrement avec le collectif « Alias Black Market » (Marie Aerts, Lei Yang, Lucie Mercadal et Marie-Laurence Hocrelle). Nous réalisons des actions individuelles, sans concertation, mais en simultané dans le même espace. Un nouveau scénario se crée en live à chacune de nos rencontres. Le seul élément qui nous relie au départ est le dress code : nous sommes toujours en tailleur noir. Je collabore également avec Joël Hubaut. Notre duo Stone et Charnel tente d’expérimenter l’imprévisible percolation entre poésie sonore et rock-métal. Nos concerts improvisés et performatifs (voix amplifiée, guitare expérimentale, gestes incongrus) engendrent un mix scénique aléatoire. J’aime aussi collaborer de façon ponctuelle avec des personnes qui appartiennent à d’autres milieux comme en Thaïlande avec le boxeur Petch Chor Vigo que j’ai recouvert de feuilles d’or, ou plus récemment avec la chanteuse lyrique Laura Le Parc.

Quels sont vos projets proches ?

Je travaille à la réalisation d’un mandala en douilles de revolver et à l’organisation d’une cérémonie bouddhiste avec des lamas tibétains pour le disperser. Je vais, par ailleurs, participer à une exposition collective au musée LAAC à Dunkerque en Avril, puis à l’exposition des félicités aux Beaux-Arts de Paris.


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LÉA LE BRICOMTE

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PHOTOGRAPHIE

LES KRIMS EN IMAGES CAUSTIQUES

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Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © Les Krims

Depuis plus de 40 ans, Leslie Krims, ou plutôt Les Krims joue un rôle important et particulier dans l’histoire de la photographie aux États-Unis. Né en 1943 à New York, il vit et travaille à Buffalo où il enseigne à l’université d’État. En créateur d’un certain mythe d’une Amérique moderne, Les Krims réalise des photographies au ton provocateur, iconoclaste, qui met à mal l’ »American way of life ». Baroques, kitsch, ses scènes sont une critique cinglante et ironique de la gadgétisation enlaidissant la société. Surtout, Les est un des pionniers de la composition photographique, ordonnancée comme une scène théâtralisée, mêlant vrai et faux. Au cours des années, il délaisse progressivement le noir & blanc pour la couleur, en s’emparant notamment du procédé polaroid à la fin des 70’s avec lequel il joue, en distordant les images qu’il retravaille.

« Les bizarreries de la vie, une compréhension accrue de la culture américaine, et toutes sortes d’art ont plus ou moins inspiré et nourri mon travail » Qui est Les Krims ?

Ma femme dirait probablement que je suis un mauvais coucheur, égocentrique, et antisocial.

Qu’est-ce qui vous a attiré dans la photo et comment êtes-vous arrivé à ce type d’art ?

À l’université, j’ai commencé à faire des photos. Fasciné par l’illusion photographique, j’ai découvert que la « gravure photographique » était plus agréable que la gravure ou la lithographie. Je réalise mes propres développements, sans utiliser les services d’un laboratoire extérieur, et j’en suis fier.

Quelles sont vos sources d’inspiration ?

Pendant mes études supérieures, il me semblait logique de commencer à fabriquer des photographies, à construire des images motivées par mes idées, plutôt que de trouver des photos toutes prêtes. Les bizarreries de la vie (la vérité est plus étrange que la fiction), une compréhension accrue de la culture américaine (Brooklyn, où j’ai grandi n’est pas l’AMÉRIQUE), et toutes sortes d’art ont plus ou moins inspiré et nourri mon travail.

Comment procédez-vous pour concevoir une prise de vue ?

J’ai réalisé que mes photos étaient reliées à l’art conceptuel. Je fais une simple esquisse et une note écrite pour chacune d’elles : comme par exemple «utiliser du rubber cement (une colle à base latex) pour coller des champignons de Paris aux jambes de ma femme». Pour une œuvre intitulée: «La conséquence de vivre dans une pièce sombre et sans rechercher un travail». Vous pouvez voir que la satire

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LES KRIMS

et l’humour sont des aspects importants de mon travail. Quand j’ai quitté New York et commencé à enseigner en continu, j’ai commencé à réaliser un travail plus candide, inspiré par ce qui me semblait plus remarquable. Par exemple, j’ai fait des photos des curieuses présentations que les chasseurs de daim faisaient de leurs trophées (j’aime à penser au daim attaché de diverses manières aux voitures et aux camions, à la manière d’une sculpture). C’était en un temps où tout crétin d’activiste anti-Vietnam appelait n’importe quel chasseur un «meurtrier», ceci de manière non distinctive. J’ai photographié des nains, à l’époque du bourgeonnant État-Providence (The Great Society, une sorte de programme politique des années 60 mise en œuvre sous la présidence Johnson, puis sous celle de Nixon etc...ndlr). Ces gens-là ont accompli des choses fabuleuses grâce à leur singulière détermination. J’ai suivi plusieurs évènements récurrents dans l’aire de la Rust Bealt (La ceinture de la rouille au Nord Est des US pendant les années 70, ndlr) : Il s’agissait de gens se réunissant à des concours agricoles, notamment pour des compétitions de citrouilles géantes (plus de 600kg cette année-là), ou pour des compétitions où l’on tire sur de toutes petites citrouilles, à perte de vue, avec des fusils à air comprimé. J’adore assembler un assortiment des photographies qui sont toutes reliées. Occasionnellement, j’essaie de modifier la lecture d’une photographie avec un texte narratif vu comme un titre. Quelques textes se poursuivent en courtes histoires. Ce sont aussi des coups de gueule, suggérés par l’image elle-même, en parodie de la propagande et propagande parodiant la propagande. L’expérience entière est souvent pour moi simplement un divertissement. Mes

plus récentes photographies sont exclusivement imprimées. Je ne peux imaginer comment un artiste pourrait se soucier de créer, si l’art n’était pas ouvertement divertissant pour celui qui le fait.

Quelle histoire cherchez-vous à raconter ?

Le grand gagnant de l’«histoire» est que le capitalisme, pas le communisme, ni le socialisme, permet au rêve marxiste des travailleurs qui possèdent les moyens de production de créer et d’imprimer les images photographiques qu’ils souhaitent. Désormais, une personne sérieuse et motivée peut, en économisant un minimum, acheter un appareil photo numérique, un iMac et une imprimante, c’est-àdire un équipement qui, il y a 15 ans, était hors de portée des finances d’un gamin de classe ouvrière. Toutes ces machines peuvent désormais facilement se glisser dans un coin d’un appartement ou d’une chambre. Par conséquent, un individu aux moyens très modestes peut faire des photos qui peuvent rivaliser avec n’importe quel artiste photographe, car l’appareil photo numérique a un effet de nivellement sur la prouesse technique.

satire à la manière de William Hogarth, Honoré Daumier, ou Robert Crumb. En tout cas, je n’ai jamais fait quelque chose de mesquin.

Quel rôle joue les titres dans vos photos ?

Un rôle non négligeable, car les titres ou diatribes discrètement imprimés sous certaines photos permettent d’aider le spectateur à mieux comprendre ce qui pourrait ne pas être clair au premier abord.

Quelle photographie vous a donné le plus de plaisir à réaliser ?

Il ne s’agit pas d’une image, mais d’une série de photos liées entre elles que j’ai appelée : «Idiosyncrasiques Photos» Elles ont été publiées dans une édition limitée en 1980. J’ai eu l’idée de réaliser ces photos suite à un assaut contre mon travail par les féministes radicales, influencées par Andrea Dworkin (morte aujourd’hui). Si je savais où elle est enterrée et venais à passer près de sa sépulture après avoir mangé une grande quantité d’asperges, je pisserais sur sa tombe.

La photographie est-elle pour vous un Sur quels projets travaillez-vous ? moyen de sublimer, de dépasser le réel Je travaille actuellement à la réalisation de 150 tirages de grand format (environ 91,5 cm x 111,5 pour montrer l’invisible ? Oui, d’une manière très littérale, je fais des photos « qui permettent de dépasser le réel et de montrer l’invisible.

Quelle place tiennent la dérision et l’humour noir dans vos photographies ? Une place importante. Je dirais qu’il s’agit plus de

cm) pour une exposition en Suisse, la numérisation de négatifs couleur et noir & blanc, qui n’ont jamais été imprimés, et la réalisation d’impression numérique de fichiers RAW 16 bits à l’aide d’une imprimante Epson UltraChrome HDR. Et puis, c’est le moment idéal pour faire des photographies.


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en haut à gauche : « A Marxist view » © Les Krims en haut à droite : « Quack Machine » © Les Krims en bas à gauche : «Taste of Buffalo», Delaware Avenue, Buffalo, New York, Juillet 13, 2009. Le chien me regarda fixement, gêné et honteux, peut-être même humilié parce que sa maîtresse était comme plus intéressée à montrer ses énormes nichons. © Les Krims en bas à droite : « Trevor Ewell B27 » © Les Krims

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en haut à gauche : « Winner & looser Uranium Robot » © Les Krims en haut à droite : « Waving Women Towel Head » © Les Krims en bas à gauche : «Red Leather Car Interior » © Les Krims en bas à droite : « Front Desk » © Les Krims

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en haut à gauche : « Mary’s Middle Class » © Les Krims en haut à droite : « Even a Nazi Wouldn’t Have Thought to Inflict Such Vile Stuff On a Jew’s Body Before Herding One Off to a Freshly Dug Pit to Be Shot, Dusted with Lime, and Buried ». Paris, France, June 10, 2008. Il me semblait curieux que les mamelons, les blessures, et les décolorations cutanées aient été méticuleusement détaillées sur cette Sculpture de Cire de jeune homme torturé. Aucune autre figure masculine, au Musée Grévin, n’a été sculpté avec une si grande habileté. Là, je me questionne à propos de la sexualité de l’artiste (Gay ? hétéro ?). Cette torture pourrait-elle une torture germanique? En effet, on voit un pénis malmené; des croix gammées griffées sur la poitrine; la Parole Hitler tatouée en lettres minuscules sur la lèvre inférieure, une insertion de tige en métal épais… Je sais qu’on peut voir un peu partout des milliers de jeunes qui sont tatoués et percés, et qui ont des barres de métal, des bouchons, des amulettes de différentes tailles insérés à travers la chair des sourcils, du nez, des lèvres, de la langue, du pénis et autres lèvres. Heureusement, aucun de ces ornements en métal ne sont magnétisées, car ces personnes flottant sur les eaux fraîches en été, seraient attirés par les champs magnétiques de la Terre, leur tête pointant au Nord, leurs pieds au Sud, parfaitement alignés. Une telle expérience de physique perverse, soulignerait aux yeux de tous un conformisme à des croyances rétrogrades et une mode primitive. Cet ‘art’ est promu par le nihilisme postmoderne ».

en bas à gauche : « Buffalo Fashion Breadline » © Les Krims en bas à droite : « Glen on Chairlift » © Les Krims

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BERNDNAUT SMILDE L’ART QUI CONTE LES NUAGES Traduction / Nathalie Bye • Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / Page 23 : (haut) « Nimbus Minerva » 2012 - © Berndnaut Smilde • Page 23 : (bas) « Nimbus D’Aspremont » 2012 - © Berndnaut Smilde • Page 24 : « Nimbus Platform57 » - © Berndnaut Smilde • Page 26 : « Nimbus II » 2012 - © Berndnaut Smilde

« Je m’intéresse à un moment de friction entre la construction et la déconstruction »

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erndnaut Smilde est un jeune artiste hollandais, né en 1978, qui vit et travaille à Amsterdam. Après des études en arts de 1997 à 2005 à la Minerva Académie et au Franck Mohr Institut à Groningen, il développe un art fait d’installations qui interagissent avec leurs lieux et qui questionnent sur le rapport à l’environnement. Après des premières œuvres constituées de petits objets tels que des représentations de carcasses de caravanes empilées, des barres de béton sur chariot symbolisant la manutention de la croix du Christ, il se lance dans l’investissement des espaces avec ses installations. Il crée notamment des installations faites de grands tuyaux se déroulant, tels des serpents techniques. Œuvres en partie invisibles, ces canalisations, issues de la haute technologie et habituellement destinées aux espaces à atmosphère contrôlée recréent ici un air aseptisé, dans un lieu qui ne l’est pas par nature. Plus récemment, en 2010, Berndnaut Smilde a réalisé sa première installation éphémère de nuages artificiels en suspension. Ceux-ci sont créés avec le matériau solide le plus léger sur terre, à partir d’aérogel, composé de 99,8% d’air. Ce procédé artistique a été élu par le magazine Time parmi les meilleures inventions de 2012.

Comment procédez-vous pour concevoir une de vos œuvres ?

ginel et ses anciennes fonctions, en tant qu’hôpital militaire et institution psychiatrique, est encore visible. Ce sont des espaces que l’on pourrait définir comme socle de mon travail.

Quelles émotions, sensations ou réac- Quels rôles jouent la lumière, les coutions cherchez-vous à susciter chez le leurs, les matières ...? spectateur ? À la différence des nuages, je peux contrôler le ré-

Vous reproduisez artificiellement la Quel rapport avec l’espace d’exposi- nature (nuages...), les reliques du tion voulez-vous donc mettre en œuvre monde moderne (voitures...). Leur ? réalisme, leur force vivante dans un Mes œuvres sont des installations, sculptures et espace clos, non naturel, sont-ils un photographies. J’essaie souvent d’interagir au moyen d’alerter sur la destruction de la mieux avec l’architecture ou l’histoire des sites. Par nature par l’exploitation des ressources exemple, pour mon travail intitulé Nimbus, les et la consommation ?

Par nature, vos œuvres sont plutôt éphémères. Comment procédez-vous pour en fixer la mémoire ? En fait, l’œuvre ne fonctionne pas en tant qu’installation permanente. Le nuage demeure seulement quelques secondes. L’aspect physique est très important, mais l’œuvre, à la fin, existe seulement en tant que photographie.

Je fais habituellement une maquette de l’espace dans lequel je vais travailler. Cela m’aide à contrôler et visualiser une idée.

emplacements choisis sont particulièrement importants pour le contexte de l’œuvre. Les espaces dans lesquels je travaille sont tous, en quelque sorte, connectés à l’espace d’exposition afin d’interpeller l’art lui-même. Ainsi, la chapelle de «HotelMariaKapel» souligne le divin et véhicule ces mêmes connotations. Bien que la considérant comme un espace d’exposition, j’aime beaucoup l’architecture et les éléments du passé de cette chapelle du XVe siècle. L’architecture joue aussi un rôle important dans un autre de mes travaux intitulé Le Nimbus D’Aspremont, où le contraste entre le château ori-

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Je m’intéresse à un moment de friction entre la construction et la déconstruction. J’exprime des situations dans lesquelles il est impossible de déterminer ce qui est en train de se produire. Dans ces situations de transition on n’est alors plus très sûr de ce que l’on observe, ni d’y trouver une fonction claire et définie, cela reste ouvert à l’interprétation.

Quelle est pour vous la symbolique majeure du nuage ? Leur aspect fugace.

On pourrait voir le nuage comme un signe d’infortune. On pourrait aussi le lire comme un fragment de peinture classique. Les gens ont toujours eu une forte connexion métaphysique aux nuages, et y ont projeté, à travers le temps, beaucoup d’idées. Le Nimbus est une présence transitoire dans un endroit précis. Je m’intéresse beaucoup à l’aspect éphémère. Présent pour un bref instant, le nuage, ensuite, se désagrège. Une sculpture faite d’un air bien exposé pourrait-elle exister ? C’est aussi l’idée potentielle d’un nuage à l’intérieur d’un espace.

Vous recréez, avec vos œuvres, un univers presque féérique, comme un conte malgré les aspects inquiétants ?

Cet aspect de mauvais augure n’est pas tant représenté par la forme du nuage, mais par le fait de le placer en dehors de son contexte naturel. Dans ce cas, c’est la situation non naturelle qui peut être menaçante.

glage, donc c’est plutôt important.

Sur quels projets travaillez-vous ?

J’ai une année chargée devant moi avec des expositions aux États-Unis, aux SFAC Galleries à San Francisco de février à avril, et pour Land of Tomorrow, à Louisville au Kentucky, également de février à avril. En plus de ces expositions je vais par ailleurs collaborer à la réalisation d’un film.

berndnaut.nl


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ÉRIC POUGEAU UN ESPRIT LIBRE Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / Page 28 : «Couronne Fils de Pute» - © JB Mariou • Page 29 : « Feuille Blanche », 2010 - © Éric Pougeau • Page 30 : « La Jeune Fille », 2007 - © Éric Pougeau • Page 31 : « Asshole », 2004 - © Éric Pougeau • Page 32 : « Avions » - © Éric Pougeau

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ric Pougeau crée des œuvres radicales, dérangeantes, qui bousculent les schémas de pensée traditionnels pour mieux révéler les écueils de la société, et de ses théories oppressant l’humain, emprisonnant ce que son être pourrait exprimer le mieux. Frontales, elles sont comme un cri, une révolte envers un mot d’ordre qui dirait : obéissez !

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« Tout ce qui a pour but de blesser, écraser, stigmatiser et nier la personne, c’est quelque chose qu’il m’est difficile de supporter » Pouvez-vous lever un coin de voile sur le mystère Éric Pougeau ?

Je suis né aux Lilas, en Seine-Saint-Denis en 1968. J’ai d’abord fait de la musique dans les années 90. C’était une période forte, j’étais venu de Nice avec ma copine de l’époque et nous avions monté les Flamming Demonics, un groupe de rock bruitiste influencé par la No Wave qui a existé pendant 2 ans.

Quelles furent vos premières incursions dans le domaine de l’art contemporain ?

Suite à cette première expérience artistique, j’ai eu une période d’errances jusqu’à l’achat d’un appareil photographique et ma rencontre avec une jeune femme que j’ai alors commencé à beaucoup prendre en photo. Par la suite, des événements de ma vie, qui m’ont particulièrement touché, m’ont amené vers un mode de création plus matériel, physique et radical. Je me suis alors mis à créer des couronnes et des plaques mortuaires avec des insultes. Le monde de l’art contemporain m’était à l’époque fermé, car je n’avais pas fait d’études d’art, mon orientation me destinant, au départ, à devenir footballeur professionnel. En 2002, les assistantes d’Emmanuel Perrotin m’ont proposé de montrer dans la vitrine de la galerie rue Louise Weiss à Paris ma première couronne mortuaire, où l’on pouvait lire l’inscription « Fils de Pute ». C’était quelque chose d’inespéré pour moi

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car cela me permettait d’entrer dans ce milieu de l’art contemporain. Le matin même de cette exposition, des habitants riverains de la galerie se sont plaints et ont demandé que ma couronne mortuaire soit retirée de la vitrine. C’est là qu’Emmanuel Perrotin a décidé de la présenter dans sa galerie.

Quel est votre rapport à la mort ?

À une époque de ma vie, il y a eu beaucoup de morts dans mon entourage proche. Mon travail ne se nourrit que de mes expériences de vie passées et présentes. C’est donc une chose naturelle que la mort fasse partie de mon travail. Le temps de vivre.

Quel rôle joue justement la révolte provocatrice dans votre travail ?

À l’intérieur de la société, il y a des systèmes qui tentent d’écraser les uns ou les autres, avec la volonté de nier l’autre ou tentant de faire croire aux gens qu’on a un devoir de morale, une autorité sur l’autre. Pour moi, tout ce qui a pour but de blesser, écraser, stigmatiser et nier la personne, c’est quelque chose qu’il m’est difficile de supporter. Toute cette théorie du devoir est franchement quelque chose qui me dérange ! En effet, la morale comme mise en garde, récompense ou punition enferme l’autre.

Concevez-vous vos œuvres comme un outil pour combattre les superstitions, les folklores archaïques et les systèmes oppressant l’humain ?

Je détourne la morale et ses outils pour la critiquer. Progressivement, l’écriture a complété les objets, pour devenir une véritable matière. Ces écritures sont très travaillées. Les textes sont rédigés des dizaines de fois afin d’obtenir la vibration et le graphisme voulu. Dans mon travail, la famille est comparable à une scène à partir de laquelle j’élabore des fictions.

Comment procédez-vous pour concevoir une de vos œuvres ?

Je n’ai pas le positionnement du type qui va dans son atelier et qui en sort quelque chose. Je n’ai pas de pratique manuelle. C’est de ma vie que sortent les choses. Concrètement, mes matinées sont consacrées à la lecture et aux prises de notes. Je travaille ces notes jusqu’à ce que la nécessité d’en faire une œuvre m’apparaisse. C’est comme si je les essorais pour qu’elles se matérialisent en sculpture ou en écriture. Il y a beaucoup d’idées qui toutefois ne voient jamais le jour, car à terme, elles ne sont pas si nécessaires que ça. J’ai souvent l’impression de devoir me taire encore pour continuer de chercher et de creuser.

Si vous deviez décrire votre œuvre en une phrase, quelle serait-elle ?

« Qui cache son fou, meurt sans voix.» Henri Michaux

Sur quels projets avez-vous travaillé récemment ?

En 2010, j’ai fait une exposition intitulée « Mon amour ». J’y ai notamment présenté un texte où il est écrit : « Mon amour, je serai ton malheur pour l’éternité. Éric ». En 2012 toujours, j’ai été invité à participer à l’exposition des 20 ans de Groland au musée des arts modestes à Sète. En fin d’année, j’ai exposé à la Louvière, en Belgique lors d’un événement nommé « L’impertinence ». J’y ai présenté 6 plaques mortuaires, 33 mots de la série « Les enfants » et la couronne « Salope ». J’ai également réalisé pour le tirage de tête de la réédition du livre « Fils de Pute » aux Éditions Dilecta une œuvre intitulée « Mon corps a disparu », en crachant de l’hostie et du sang sur des croix.

Vous parliez, en début d’interview, de votre pratique musicale par le passé. En général comment sont reçues vos Pratiquez-vous encore la musique en œuvres ? concert ? Les réactions sont souvent très tranchées face à mes œuvres, entre Génial et Merdique. Il y a peut-être des gens qui ne s’attachent qu’à l’aspect frontal et radical, plus qu’au fond et au sens de mon travail.

Il y deux ans, je faisais un projet solo de musique instrumentale (guitare électrique, harmonica, loop station) que j’ai dû arrêter. Je pense recommencer prochainement à faire des concerts.


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GENEVA JACCUZI BOUILLONNANTES PERFORMANCES Traduction / Nathalie Bye • Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © DR

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eneva Jaccuzi, jeune artiste et musicienne de Los Angeles cultive un goût particulier pour la darkwave et les titres FM vintages. Ses débuts en tant que chanteuse s’effectuent dans des groupes aux intitulés explicitement humoristiques tels que Pregnant, Sex Carpet ou Hot Pyjamas. Ses premiers disques, No Bosses no Bullshit et Instant Coma sont édités en 2007 sous le nom de The Bubonic Plague. Faisant suite à cette première expérience musicale, elle poursuit seule son travail artistique sous le nom de Geneva Jaccuzi en sortant Lamaze en 2010. Récemment, le clip de son titre Love Caboose met en scène son imaginaire remarquable. Geneva est une sorte d’icône glamour, usant des codes pop, avec toujours un second degré acidulé. C’est surtout en Live que sa démesure s’exprime au mieux. Ici, l’on plonge dans un concept à mi-chemin entre la performance, la danse et le chant. Ses chansons, en forme de ballades disco-gothiques sexy, enivrantes, cotonneuses et inquiétantes, faites d’un érotisme déviant habité de créatures étranges, donnent alors libre cours à leur onirique univers. GENEVA JACCUZI

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« Je pense souvent que le monde autour de moi décide de l’esthétique, et ensuite j’avise. Ou peut-être est-ce le contraire »

Peux-tu te présenter ?

Salut, mon nom est Geneva .C’est un plaisir de vous rencontrer. S’il vous plaît, ne vous levez pas. Où sont les toilettes ?

sonne ou la perception de ma musique, je me tirerais une balle dans la tête. Mais j’aime les retours… et les opinions, parce qu’elles sont puissantes et me mettent en défi de me représenter à travers l’esprit des autres.

références ?

C’est drôle de voir comme les images, les mots et les sons perçus par le public, te reviennent transformés. Je pense souvent que le monde autour de moi décide de l’esthétique, et ensuite j’avise. Ou peutêtre est-ce le contraire. Mais j’ai vraiment l’impression que ce qui doit être remarqué devient invisible, si l’on cherche à faire des catégories. Si quelqu’un jouait une chanson de Geneva Jacuzzi à quelqu’un du haut Moyen Âge, la définirait-elle comme «Kitschy 80’s» ? En fait, il ne pourrait même pas l’écouter... et la chanson n’existerait même pas... ! C’est ce qui me vient à l’esprit quand je suis dans une démarche artistique.

Cette année, j’étais en tournée à travers le monde. En fait j’ai joué dans chaque ville une nouvelle scène d’un spectacle provenant d’une seule pièce : « The Dark Ages. » La pièce se joue alors sous de multiples formes artistiques. Ainsi, la première scène, prend la forme d’un éditorial de magazine de 12 pages et d’un montage vidéo. La seconde scène, « Dracula’s Diorama Through » de Doorwall, était une installation dans une galerie. La troisième scène, « Idiot Menagerie of the Automatic Dream Crud » était un Ballet aérien dans un cirque de New York, où j’étais suspendue devant le public à 9 mètres du sol. C’était drôle. Il y en a eu une douzaine d’autres depuis lors.

Devo, Duchamp, Philip K.Dick, Artaud, Cocteau, Robert Smith, Gurdjieff, Kate Bush, Kraftwerk, Warhol, Jodorowsky, Ken Russell, Freud (plutôt en tant qu’écrivain de fiction) et beaucoup beaucoup d’autres.

Comment es-tu arrivée à la musique et à l’art ? Mais c’est également, au-delà du seJ’ai toujours eu tendance à me détester. Je sais que cond degré, par la recherche d’une Comment s’articulent tes créations ça sonne dramatique, mais je le ressens vraiment esthétique visuelle ou musicale parti- musicales avec tes autres activités artiscomme tel. C’est peut-être à cause de plusieurs culière ? tiques ? choses. C’est-à-dire une éducation religieuse, un trauma, la génétique… Qui sait ? Néanmoins, du plus loin que je puisse me rappeler, je me suis toujours sentie malheureuse, pour aucune raison et pour toutes les raisons. Quand j’ai essayé de comprendre pourquoi, je n’ai rien trouvé qui ait un sens. La seule chose qui faisait sens, c’était faire de l’art. Ensuite tout est devenu plutôt amusant. Je n’en ai plus rien à foutre.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

Mon inspiration vient d’un peu partout. J’aime les artistes comme Marcel Duchamp. Il prend des toilettes et les met dans une galerie. Non seulement un objet ordinaire d’usage pratique devient de l’art, mais il crée aussi alors le potentiel que tout devienne de l’art. Ce qui est purement conceptuel…et antagoniste. N’importe qui aurait pu le faire, n’importe quand, mais personne ne l’a fait. Alors cela rend la chose géniale. C’était une idée… L’objet n’était pas l’art. C’était plutôt comme une Monade sans fenêtres réfléchissant tous les arts au centre d’une galerie. C’est ridicule, mais ça change tout. C’est un principe similaire avec Warhol et ses œuvres. Je pourrais avoir tort au sujet de ce que ces choses signifient pour le reste du monde. Je n’ai pas étudié l’art, mais qu’importe, cela m’inspire !

Tu utilises et détournes l’imagerie populaire des 80’s. Quelle place donnestu au second degré, à la provocation ?

Il n’y a pas de kitsch, il n’y a pas de 80’s. Ou du moins d’aussi loin que je me sente concernée. Je suis totalement sincère. Il n’y a pas d’ironie. Mais je suis consciente que ce que je fais puisse être comparé à quelque chose. Sinon ça serait invisible. Donc c’est 80’s. Ça ne me dérange pas. Les 80’s étaient plutôt cool ! Si j’essayais de contrôler l’image de ma per-

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Le côté surréaliste de tes créations ex- As-tu une anecdote à nous raconter sur prime-t-il une certaine désillusion, ou une de tes performances ? est-il comme une mise en garde, une Ok, je vais vous raconter une histoire embarrassante, parce que ce sont toujours les histoires les réflexion sur l’état de civilisation ? Je suppose que ce serait comme une réflexion... ou une infection. Mais je ne me soucie pas du tout de la civilisation. Je pense que ce serait inutile.

En fait, peut-on considérer que tes créations se rapprochent de la performance artistique ? Parfaitement, ce SONT des performances !

D’où te viennent les idées de chansons ? Les préoccupations émotionnelles me taquinent et me mettent sur le chemin de la création d’une chanson. Alors, au lieu de me plaindre au sujet de mes problèmes, je les transforme en personnages et scènes de pièce ou de récit. Ensuite, ils deviennent chanson. C’est un casse-tête mental pour moi de me contrôler et ne pas agacer les autres.

As-tu des maîtres à penser, des icônes, ou des artistes qui sont pour toi des

plus intéressantes. Je performais à Bogotà, en Colombie pour un spectacle intitulé « Coozbo & the Indelible Fantasies of Time Stop Revolt ». J’étais seule et j’avais convaincu le promoteur du spectacle et quelques locaux de m’aider à construire cette scène. Ensuite j’ai rencontré deux jeunes fans et les ai convaincues de jouer dans le show. C’est une chose qui m’est facile avec les gens. Très vite, après le début du show tout vire au chaos. Le son est coupé sans arrêt. Tout le monde est ivre ou en train de planer (moi y compris), et tout a merdé. Même les pièces de décor ont commencé à tomber... J’étais tellement énervée que j’ai commencé à hurler sur tous ceux qui étaient ivres, ce qui n’a évidemment pas plu. Là, le public n’a pas réalisé que mon personnage était un Tyran et que j’étais en partie en train de jouer. L’ingénieur du son était un con et a quitté le spectacle en plein milieu. Le promoteur également... Ensuite le public a commencé à hurler et à lancer des objets... C’était le Chaos total ! J’étais

tellement blasée que j’ai déchiré l’imposant costume que je portais. Ce n’est pas la première fois que je déchirais un costume de scène, mais cette fois-ci, il était accroché à mes sous-vêtements. Donc, quand j’ai ôté le bas du costume, ils ont été emportés accidentellement, et soudainement, j’ai senti de l’air frais entre mes jambes, et mon anatomie librement exposée aux spotlights. Je sais que ce n’est pas extraordinaire, mais c’était suffisamment choquant sur le moment. Et assez drôle, car je m’étais rasée pour la première fois une semaine avant, donc ils ont tout vu ! Ça fait bizarre… J’étais embarrassée, mais je ne pensais pas qu’on le prendrait pour un geste intentionnel. Comme si j’avais dit «Fuck You». Oops. Bref, je devais partir pour Medellín quelques heures après, mais je ne connaissais pas mon itinéraire. Le promoteur le connaissait, mais il était parti et je ne pouvais pas prendre l’avion sans lui. Je ne parle pas l’espagnol, et très peu connaissent l’anglais en Colombie. À ce moment, j’ai réalisé que j’allais être perdue toute seule et j’ai sympathisé avec un jeune Colombien qui parlait un peu l’anglais. J’ai alors pris un taxi pour trouver dans la ville le promoteur qui m’avait laissée tomber. J’étais prête à lui casser la figure. Et si je n’avais pas pu, j’aurais convaincu mon nouvel ami de le faire. Mais enfin...on ne l’a jamais retrouvé. Donc je suis retournée à l’hôtel, ai fait l’amour rapidement, j’ai ensuite pris la direction de l’aéroport. Après avoir erré plusieurs heures, j’ai finalement trouvé mon vol et j’ai dit au revoir à mon ami.

Te fixes-tu des limites ?

J’ai cet horrible tempérament sanguin. Et je suis vaniteuse. Je peux être aussi paresseuse. Donc je suis ouverte à tout, du moment que je n’ai pas trop de compromis à faire avec ces qualités.

Enfin, quelle est ton actualité ?

J’ai prévu de peaufiner et de finir la pièce de « The Dark Ages », mais je ne sais pas encore comment. Je serais en Europe ce printemps. Peut-être que je viendrai en France...

genevajaccuzi.com


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INNER CORNER L’ÉLECTRO GRAND ANGLE Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © DR

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nner Corner est une association loi 1901 qui a pour but de faire voyager et faire danser les gens sur la musique techno / en jouant une musique électronique underground, dédiée aussi bien au corps qu’au cœur et à l’esprit, en extérieur et pendant de longues heures . Inner Corner comprend 8 membres actifs auxquels se rajoutent les adhérents et divers soutiens qui viennent très souvent aider au montage des événements. Bernoire, Another Pixel et Müeslim sont les trois Djs résidents des soirées Inner Corner. Ayant chacun des univers très différents, ils défendent toutefois la même vision de la techno pointue et pleine d’amour. Le 8 février, inner Corner organise la soirée Sharivari à la Cartonnerie, avec des live de Mekanik Kantatik, I.W.S et NGC777. INNER CORNER

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A S S O C I AT I O N

« Nous ciblons un public très éclectique, et c’est ce qui fait notre force ! » Que signifie le nom de votre association ?

Nous ciblons un public très éclectique, et c’est ce qui fait notre force ! Ce sont des gens ouverts d’esprit et qui aiment danser en général. Cela va du jeune étudiant fan de House à l’ancien raver devenu parent qui vient avec ses enfants quand on joue l’après-midi…

Nous avons créé Inner Corner car nous nous sentions frustrés par rapport à ce qui était proposé dans le paysage électronique. Reims s’est développée musicalement aux cultures électroniques notamment grâce à Yuksek, Elektricity et aux soirées Bonheur Binaire à la Cartonnerie proposées par l’association Binary Gears. À l’époque c’était les prémices d’une électro que l’on entend partout maintenant, c’était une période super enrichissante pour les artistes et pour un public large, qui a été éduqué en écoutant ce style de musique. En outre, la scène s’est vite retrouvée enfermée sur elle-même et dans un positionnement pop de la musique électronique dans lequel nous ne nous retrouvions pas. Et puis, le goût et les attentes du public évoluent. Bien qu’à l’international elle soit reconnue; les gens avaient besoin, après cette vague électro, d’en savoir plus sur les musiques électroniques, d’entendre des choses différentes, de découvrir les sources originelles de la techno et ses expressions actuelles respectueuses de l’âme de sa naissance et tournées vers les découvertes sonores.

Que pensez-vous du paysage actuel rémois en matière de cultures électroniques ?

N’y a-t-il pas une contradiction entre les événements et soirées de qualité (Elektricity, Cartonnerie), l’offre

C’est une private joke donc on ne peut pas t’en dire plus… !

Par quels événements souhaitez-vous développer une culture dance de qualité à Reims ?

Un festival de 2-3 jours comme un Cabaret Vert Techno ou une jolie soirée au Parc Pommery comme peuvent le faire les flâneries, à la nuance qu’elle ne finirait pas à minuit mais plutôt à midi !

Quels sont les publics ciblés par vos événements ?

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pointue des associations de cultures Travaillez-vous en collaboration avec urbaines et l’offre mainstream plutôt d’autres structures, lieux, projets etc..., bas de gamme musicalement des lieux autour de la culture dance ? commerciaux de nuit (discothèques) ? Nous avons créé l’association il y a un peu plus d’un Je ne pense pas qu’il y ait de contradictions mais plutôt un manque de coopération entre les différents acteurs du milieu, bien que la ville soit désormais plus ouverte aux événements dits techno. Chacun reste dans son coin sans vouloir - peut-être un sens ironique caché derrière “INNER CORNER”... - prendre le risque de mélanger les publics alors que c’est au contraire ce qui fait la nature et la force de la techno !

an et de manière totalement indépendante, nous ne dépendons ni de subventions ni d’organismes officiels ou privés. Financièrement notre marge d’action est donc assez étroite puisque nous sommes en autofinancement. Nous travaillons cependant en relation avec la Ville de Reims pour faire découvrir ou redécouvrir aux Rémois des lieux qui ne sont pas forcément utilisés pour la diffusion musicale.

Pensez-vous qu’on puisse un jour développer une véritable culture dance à Reims, lieux commerciaux de la nuit compris ?

Nous organisons le 8 février à la Cartonnerie une soirée de concerts appelée Sharivari, avec 3 lives de musique électroniques. Après les deux soirées techno en salle que nous avons organisées au cours de l’année 2012, on avait envie de se diversifier et d’amener une musique peut-être plus « intelligente » que la musique techno classique. Quelque chose de plus expérimental et moins formaté. C’est aussi la première fois que nous choisissons de faire jouer 3 lives et pas de djs.

Je pense que c’est un processus qui est actuellement en cours. Il y a de plus en plus de soirées organisées dans les discothèques de Reims, en partenariat avec différents acteurs comme le crew Phonographe. Les gérants de boîtes de nuit commencent à se rendre compte de l’existence d’un public présent depuis bien longtemps déjà.

Quels sont les projets d’Inner Corner ?



OPÉRA

SERGE GAYMARD EN PORTÉES LYRIQUES Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © DR

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’opéra de Reims (nommé Grand Théâtre jusqu’en 2010) a été construit en 1874 par l’architecte rémois Alphonse Gosset. Il s’agit d’un théâtre à l’italienne (où l’on vient voir autant le spectacle sur scène, que celui, mondain, qui se joue aux balcons). D’une capacité à l’origine de 1200 place, puis de 1300 en 1930, sa jauge est réduite à 790 places à l’occasion de la dernière rénovation du bâtiment, pour sa mise aux actuelles normes de sécurité. Le bâtiment, restauré en 1930, est considéré, avec sa décoration intérieure art déco, comme l’un des plus beaux de France. En quelques chiffres, la saison de l’Opéra de Reims, c’est environ 60 représentations de 30 spectacles différents, 28 000 spectateurs aux spectacles seuls, 38 000 spectateurs si l’on ajoute les conférences, les générales, la journée « Tous à l’Opéra » et près de 400 h d’intervention en milieu scolaire pour plus de 4 000 enfants. Ce lieu de musique et de voix est dirigé, depuis plus de dix années, par Serge Gaymard.

Pouvez-vous vous présenter ?

En 1999, Je suis nommé, par la ville de Reims, Directeur du Grand Théâtre. En 2010, cet établissement est rebaptisé Opéra, dénomination qui correspond mieux à sa vocation exclusivement lyrique.

Je suis né à Marseille en 1956. Après avoir obtenu mon diplôme de l’ESSEC (École Supérieure des Sciences Économiques et Commerciales) en 1979 et effectué Six mois de stage et d’études au Ministère de l’Économie et des Finances, j’ai poursuivi un DEA (Mastère II) de Mathématiques économiques et économétrie à l’Université Paris I – Panthéon Sorbonne, tout en pratiquant assidument parallèlement le théâtre en milieu étudiant.

Pouvez-vous nous parler de votre lieu, dont l’architecture peut être considérée comme un fleuron de l’art déco à Reims ?

Construit en 1874, le Grand Théâtre a été bombardé pendant la 1ère guerre mondiale. Les photos du lustre écroulé sur les fauteuils du parterre sont saisissantes, − comme dans l’épisode célèbre du “Fantôme de l’Opéra”−, ici la réalité rejoint la fiction. Les architectes de la reconstruction (1930), s’ils ont choisi de restaurer les façades, ont reconstruit l’intérieur selon le style de l’époque : l’Art déco. L’agencement des volumes, l’escalier monumental, les colonnes et les pilastres, le revêtement des murs, la ferronnerie des balustrades, les bas-reliefs et jusqu’au “bouclier lumineux” − qui remplace l’ancien lustre de la salle −, autant de témoignages de ce style Art déco qui fait de l’Opéra de Reims un bâtiment rare.

Quand avez-vous fait le choix de la culture ?

J’ai été Volontaire du Service National Actif de 1981 à 1983 auprès de l’Alliance Française de Santiago du Chili, où j’ai enseigné les Mathématiques et la Physique, tout en fréquentant le milieu théâtral chilien. J’ai alors reçu une formation théorique, par des cours particuliers, et pratique en étant assistant à la mise en scène. J’ai alors monté, avec une équipe franco-chilienne, des spectacles dans la salle de théâtre de l’Institut Français. Mais c’est la lecture décisive de La Culture pour vivre, formidable livre de Jacques Rigaud, qui a décidé de ma vocation : je délaisse alors ma thèse sur “Les Anticipations rationnelles des agents économiques ” et me tourne résolument vers la culture.

Quelle fut votre première expérience en tant que professionnel de la culture à Reims ?

En décembre 1983, je suis arrivé à la Maison de la Culture André Malraux à Reims comme conseiller technique sur “L’Encyclopédie vivante”, une vaste exposition nationale dont la quintessence s’est trouvée à la Cité des Sciences et de l’Industrie de La Villette à l’occasion du bicentenaire Diderot. En 1984, je deviens administrateur de la MCAM, alors l’une des principales Maisons de la Culture en France. Par la suite, le projet culturel de la Maison de la Culture ayant évolué, celle-ci prend le nom de Centre National Art et Technologie et s’installe au Cirque et au Manège de Reims en 1991. Je suis alors nommé

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SERGE GAYMARD

Directeur Adjoint et participe aux instances professionnelles en tant que Vice-Président de l’Union des Maisons de la Culture de1987 à 1991) et membre de la Commission d’Experts Théâtre de la DRAC Champagne-Ardenne de1992 à 1999. En outre, je réalise plusieurs spectacles dans des domaines et des formats différents : Des spectacles musicaux en format de poche : “Petites scènes” (1996) et “Carmen” (1998), musiques de Xavier Rosselle ; ou plus ample : “600 choristes chantent Sheller”, spectacle de clôture des Nuits de Champagne, Troyes 1997, avec Françoise Pollet et William Sheller ; des spectacles-événements déambulatoires sur les promenades de Reims : environ 80 000 spectateurs pour “Christophe Colomb” en 1992, musique de Christian Vander (CD) ou pour “Européennes” en 1994 ; des spectacles multimédias : sur la cathédrale de Prague en 1990 “Prague livre ouvert”, en présence du Président Václav Ha-

vel pour célébrer “La Révolution de Velours” ; sur la cathédrale de Lyon en 1993, “Lumières d’antan”, commande de la Ville de Lyon pour la Fête des Lumières ; dans la cathédrale de Monaco en 1997, “Deo Juvante”, commande pour le 700ème anniversaire de la Principauté

Concrètement, qu’est-ce qui vous a amené à travailler dans le domaine de l’opéra ?

C’est l’émotion particulièrement vive que peut susciter l’opéra qui m’a attiré. Qui n’a pas eu la gorge serrée au dernier acte de La Traviata, Tosca…? Même si l’on connaît l’histoire par cœur. La musique est là. L’onde musicale qui vous porte, vous transporte, vous submerge.

Et quand êtes-vous arrivé à la direction de l’Opéra de Reims ?

L’opéra, c’est un lieu, mais c’est aussi un contenu. Quel est donc le projet artistique et culturel de cette Maison ?

Le projet artistique et culturel de l’Opéra de Reims se veut un projet de service public lyrique, cherchant à faire partager au plus grand nombre le plaisir, sinon la passion, de l’opéra et des disciplines artistiques qui s’y rattachent couramment, sans exclusive ni a priori. Tout d’abord, nous avons mis en place une politique artistique et de production, par l’ouverture artistique de la programmation, du baroque à la création contemporaine, de Don Giovanni (Mozart) à La Route fleurie (Lopez) et une offre plurielle pour s’adapter à la pluralité des goûts de nos concitoyens ; par la systématisation des partenariats, avec la résidence de l’ARCAL, Compagnie Nationale de Théâtre Lyrique et Musical, avec Ballet Biarritz (Centre Chorégraphique National), Césaré (Centre National de Création Musicale), ou


OPÉRA

SERGE GAYMARD

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OPÉRA

nous entraîne vers des “coups de cœur” et l’objectivité qui pousse à respecter l’équilibre entre les différents genres. Il faut être réactif et saisir l’opportunité d’une collaboration quand elle se présente.

le Conservatoire à rayonnement Régional... ainsi qu’avec d’autres Maisons d’Opéra ; par l’affirmation de l’Opéra comme un lieu vivant de création et de coproduction ; par le développement de l’orchestre (emploi artistique local). Ensuite, nous développons une politique de diversification des publics, en direction du jeune public grâce à une convention avec le Rectorat (un tiers du public de l’Opéra a moins de 27 ans) ; par la démocratisation avec un chantier d’action culturelle en relation avec les Maisons de Quartier, projet “ Expériences Lyriques ” (atelier hebdomadaire pour 20 jeunes aboutissant à un spectacle à l’Opéra) ; par le développement d’une plus grande accessibilité aux personnes handicapées, notamment avec Accès Culture (audiodescription pour malvoyants et malentendants). Enfin, nous mettons en œuvre des opérations destinées au rayonnement territorial de l’opéra, par la décentralisation de petites formes lyriques (ARCAL) et de l’orchestre en Région.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les actions concrètes que l’Opéra mène pour inciter le public à venir ? Créezvous des moments privilégiés de rencontres ?

“Tous à l’Opéra” est une invite à découvrir la planète opéra. Dans une grande proximité avec les artistes, le public est invité à voir et écouter chanteurs, musiciens, choristes au fil d’une déambulation libre. Il est en outre sollicité pour participer : chanter en chœur, s’essayer à une barre de danse, tester dans une “chambre noire” les sensations des malvoyants, ou encore se faire maquiller, endosser un costume et en conserver une photo souvenir. Un cycle de conférences préparatoires aux spectacles est organisé ainsi que des rencontres “1 h avec” un metteur en scène, un compositeur, un chef d’orchestre… Nous poursuivons plusieurs types d’actions culturelles envers les jeunes, les publics défavorisés et les handicapés : L’École du Spectateur est organisée en collaboration avec le Rectorat avec l’aide d’un professeur missionné. Elle combine interventions d’artistes dans les classes, visites commentées de l’Opéra, assistance à des répétitions, rencontre avec les personnes qui exercent les métiers du lyrique… Nous travaillons avec les Maisons de Quartier : ateliers, invitations à des générales, rencontres ou encore décentralisation de petites formes lyriques. Enfin nous nous efforçons de donner au public malvoyant les moyens de mieux appréhender les spectacles : visites tactiles (le bâtiment, les décors, les costumes), rencontre avec des artistes des productions, conférences, audiodescriptions pendant les représentations.

L’objectif de la programmation est de toucher les sensibilités les plus différentes par des propositions artistiques de genres volontairement très diversifiés, un opéra de service public. À ce propos, pouvezvous nous parler de Wozzek ? Le livret d’Alban Berg est inspiré de Woyzek de Büchner. Est-ce une sorte de réponse, ou de complément musical, donnant un autre point de vue artistique sur une œuvre qui a par ailleurs été montée au théâtre cette saison à la Comédie de Reims ?

« Je n’ai pas l’opéra pour l’île déserte, j’en aime plusieurs sans hiérarchie »

Tout d’abord rétablissons la vérité : l’Opéra est un édifice dont le propriétaire est la Ville de Reims. C’est donc la Ville qui a mené le chantier de rénovation de l’an 2000. Quant à mes propres rêves de chantiers futurs ils ont fait l’objet d’une étude de programmation, dont le but était d’optimiser la fonctionnalité du bâtiment. En clair cela signifie qu’il y a plusieurs espaces inexploités qui pourraient être aménagés pour certains en lieux de répétitions, pour d’autres en lieux de construction, de montage, voire de stockage pour les décors construits par l’atelier. Ces lieux qui nous font vraiment défaut. À terme je pense aussi au ravalement de la façade du bâtiment, dont parfois de menus morceaux tombent sur la voie publique…

Commission d’Experts Musique de la DRAC et du Comité Conseil Musique de l’Office Régional Culturel Champagne-Ardenne (ORCCA) ; Viceprésident, depuis 2006, du Centre Français de Promotion Lyrique (CFPL), association réunissant des directeurs d’opéras dont l’objet est la promotion et l’insertion professionnelle de jeunes chanteurs ; Secrétaire Général, depuis 2008, du Bureau de la Réunion des Opéras de France (ROF) ; enfin, membre de 2007 à 2010, du Conseil Syndical du Syndicat National des Scènes Publiques (SNSP). Par ailleurs, je suis, depuis 2003, le Président fondateur de l’Association Cultures du Cœur Champagne-Ardenne, reliée à l’Association nationale éponyme. Celle-ci rassemble des structures culturelles, qui offrent des places de spectacle et des structures sociales, qui les distribuent à des populations défavorisées. Ces structures sociales et culturelles collaborent alors pour accompagner ces populations, les préparer et les aider à faire tomber le tabou du « c’est pas pour moi ». Enfin, j’interviens, depuis 1989, en tant que chargé d’enseignement en Master II “ Administration locale, développement local et culturel ” à la Faculté de Droit et de Sciences Politiques de l’Université de Reims Champagne-Ardenne.

Dans quelles instances intervenez-vous en tant que directeur d’opéra ?

Quel est l’opéra que vous appréciez particulièrement ?

Il y a près de 10 ans, vous avez mené un grand chantier de rénovation de l’aménagement intérieur de votre bâtiment. Quels sont les chantiers que vous rêvez de mener à l’avenir ?

À titre de professionnel de l’opéra, je prends part à différentes instances professionnelles, en tant que membre, de 1998 à 2006, de la Commission Interrégionale d’Experts, Aide à la création chorégraphique du Ministère de la Culture ; membre, depuis 2001, de la Chambre Professionnelle des Directeurs d’Opéras (CPDO) ; membre, depuis 2004, de la

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Quel est donc l’objectif de votre programmation cette saison ?

SERGE GAYMARD

Je n’ai pas “l’opéra pour l’île déserte”, j’en aime plusieurs sans hiérarchie. Alors disons que j’aime pardessus tout la réalisation, la mise en œuvre conjointe de tous les corps de métier artistiques – solistes chanteurs, choristes, musiciens d’orchestre, metteur en scène, chef d’orchestre, décorateur, éclairagiste, voire danseurs et chorégraphe, maquilleurs, habil-

leurs, perruquiers − et techniques – régisseurs, électriciens, cintriers, machinistes, accessoiristes – qui concrétise le spectacle et révèle “en vif ”, au fil des répétitions, les beautés de l’ouvrage écrit.

Selon vous, quel doit être l’opéra d’aujourd’hui ? Que doit-il faire passer au public ?

« Nous sommes de l’étoffe dont les songes sont faits » (Shakespeare). L’opéra procède de ce songe et dessine les contours d’un monde sensible au travers du prisme artificiel de sa représentation. N’oublions pas que l’opéra n’est pas le reflet de la réalité : à l’opéra on ne se parle pas (ou peu), on “se chante”…

Pensez-vous que l’opéra dispose encore aujourd’hui, des moyens d’être novateur, ou du moins (re)créateur d’œuvres scéniques ?

L’Opéra ne cesse de proposer des “œuvres scéniques” nouvelles et novatrices tant dans la composition (par exemple Orimita à Reims le 8 mars prochain) que dans la mise en scène (cf Rigoletto par F. de Carpentries en octobre dernier). Il suffit d’y aller… pour voir et entendre ! De plus en plus de jeunes compositeurs se tournent vers l’opéra, en renouvellent les formes, lui créent un avenir.

Comment concevez-vous votre programmation annuelle. Est-ce le résultat d’une réflexion collective et/ou d’opportunités ?

La programmation est un équilibre subjectif raisonné. On ne programme pas pour soi, mais pour le public. On reste sur le fil entre la subjectivité qui

Wozzeck est sans doute l’Opéra du XXème siècle. Une pierre angulaire, un monument lyrique d’une puissance sans égale. Wozzeck est de ces œuvres majeures qui jalonnent l’histoire des arts. C’est en sortant d’une représentation du Woyzeck de Büchner, que Berg s’exclama « N’est-ce pas fantastique, incroyable ? », puis « Quelqu’un doit mettre cela en musique ! ». Wozzeck est le fruit de l’enthousiasme du compositeur face à un texte dramatique d’une radicale nouveauté. Un chef-d’œuvre qui engendre un chef-d’œuvre. Le Wozzeck que nous présenterons à Reims est une coproduction avec les Opéras d’Avignon, de Limoges et de Rouen dont le décor a été en grande partie construit dans nos ateliers. La distribution vocale est absolument remarquable avec des chanteurs très engagés dans l’action théâtrale. La scène est située dans une friche urbaine, en marge de nos cités modernes, avec épave de véhicule, terrain vague encombré de nos rebuts, surplombé par un panneau publicitaire géant… un drame social d’aujourd’hui, de toujours, inspiré d’un fait divers réel. Un drame expressionniste, avec des références au cabaret allemand.

Développez-vous des partenariats avec la Comédie pour la création d’opéras ?

Nous travaillons avec la Comédie (Massacre, The Second Woman), le Manège (Le Sacre la saison prochaine), régulièrement avec Césaré (créations contemporaines) ou Méli’môme (jeune public), avec toutes les structures culturelles de la Ville dans le cadre du Festival Reims, Scènes d’Europe.

Comment se met en place un opéra, quelles équipes cela mobilise-t-il, quels sont les temps forts de cette organisation, avant le lever de rideau ?

Du démarrage des réunions de coproduction à la première il peut se passer de 1 à 4 ans. Au cours de ce processus tous les métiers sont conviés. Tout d’abord les directeurs réunis choisissent l’ouvrage, le chef d’orchestre, l’équipe de mise en scène et la distribution, parfois avec des auditions ou en relation avec les agents artistiques. Les administrateurs règlent les problèmes contractuels et financiers. Puis le metteur en scène propose sa vision de l’œuvre assisté par son décorateur, son costumier et son éclairagiste. Les ateliers construisent les décors, fabriquent les costumes. Les chanteurs solistes et les choristes, d’abord séparément, puis ensemble répètent au piano tandis que de son côté l’orchestre travaille avec le chef. Le décor est “planté” sur scène, les costumes ajustés, maquilleurs et perruquiers se préparent. Puis solistes et choristes retrouvent l’orchestre jusqu’à la générale, ultime répétition avant la première.

Le public peut-il découvrir « l’envers du décor » ?

Tout à fait ! L’Association des Amis de l’Opéra de Reims organise pour ses adhérents l’assistance à des répétitions, permettant ainsi de se rendre compte des méthodes de travail.


PUBLI-RÉDACTIONNEL

COMÉDIE

GUILLAUME VINCENT THÉÂTRALISATION CINÉMATOGRAPHIQUE Propos recueillis par / Sarah Walbaum • Texte / Alexis Jama Bieri • Photos / © Elizabeth Carecchio

J

eune metteur en scène né en 1977 à Montpellier, Guillaume Vincent a intégré l’école du Théâtre national de Strasbourg, après avoir fait des études de cinéma. Ses spectacles sont emprunts de beaucoup de théâtralité et de cinéma. Particulièrement remarqué au dernier Festival d’Avignon par la critique nationale théâtrale pour « La nuit tombe »…, une pièce au suspense et à l’angoisse hitchcockienne, Guillaume Vincent présentera ce spectacle à la Comédie de Reims du 13 au 15 février. GUILLAUME VINCENT

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COMÉDIE

PUBLI-RÉDACTIONNEL

Comment as-tu découvert le théâtre ?

C’est assez tôt que j’ai découvert le théâtre. Très vite, je me suis rendu compte que la position de metteur en scène m’intéressait plus que la position d’acteur. Par conséquent, je me suis vite orienté dans cette voie. On a des fantasmes dans la tête, une sorte d’imaginaire et on se rend compte que la chance que l’on a, en étant metteur en scène, c’est de pouvoir réaliser ces fantasmes, pas dans la vraie vie, mais sur une scène de théâtre, et cela est assez jouissif ! Également, voir ses rêves incarnés par ses acteurs, c’est complètement réjouissant.

Quel est le théâtre que tu apprécies particulièrement ?

Ma particularité de spectateur c’est justement de ne pas aimer de genre précis. Mon théâtre est emprunt d’une multitude de genres de théâtre, qui va d’un théâtre peut-être plus cérébral, à quelque chose qui flirte parfois avec le théâtre de boulevard ou le théâtre pour enfants. On est dans plusieurs zones. Je ne suis pas sectaire en matière de goûts. J’aime particulièrement les spectacles de Marthaler, Castellucci, Ostermeier. Mais je peux aimer aussi Claude Régy. Ce qui prime, c’est l’amour du théâtre, des acteurs et du spectacle.

Quel a été ton premier déclic avec le théâtre ?

Petit, je devais avoir 6 ou 7 ans, j’ai assisté à une représentation du Footsbarn Theatre. Il s’agit de théâtre assez forain et assez populaire. Ce qui m’a marqué, c’est qu’il y avait une des comédiennes qui hurlait alors que les spectateurs n’étaient pas encore installés. Je n’arrivais pas à savoir si c’était une spectatrice ou une actrice et ça m’a fortement impressionné.

Quel lien as-tu tissé entre tes différentes mises en scène ? La grande révolution a été de passer à l’écriture avec « La nuit tombe » et « Rendez-vous Gare de l’Est » et de pouvoir écrire le plus librement possible. Le fait aussi d’avoir travaillé avec l’IRCAM*, lors du dispositif In Vivo l’an passé a également influencé

« La chance qu’on a lorsque l’on est metteur en scène c’est que l’on peut réaliser ses fantasmes, pas dans la vraie vie, mais sur une scène de théâtre » mon travail. La Comédie m’avait choisi, avec 3 autres metteurs en scène, pour être initiés par les ingénieurs du son de l’IRCAM aux outils et aux dispositifs les plus perfectionnés en matière de spatialisation du son et de transformation de la voix en direct. Des séquences deviennent possibles par le travail précis du son. D’un côté, dans mes dernières créations, il y a « La nuit tombe »… qui est assez spectaculaire, assez baroque, voire cinématographique, et de l’autre côté il y a Rendez-vous Gare de l’Est, qui joue sur la présence d’une comédienne

seule, qui interprète son rôle sans artifice. Le cinéma fait partie de ma culture, tout autant que le théâtre. Généralement, il y a en effet dans mon travail un univers cinématographique assez présent mais qui reste tout de même théâtral. Il est vrai que l’on peut parfois avoir l’impression d’être devant un film d’horreur ou un film fantastique.

sonnage central. Ces trois histoires n’ont pas forcément de lien entre elles. Il y a une mère et son enfant la veille de Noël ; celle d’un metteur en scène en prise à des délires, qui voit apparaître sa mère. Il y a enfin l’histoire de deux sœurs qui viennent assister au remariage de leur père. La première histoire est à rebours, racontée avec flash-back, la deuxième est racontée de manière éclatée, sans logique narrative. La troisième est plus classique et linéaire. Concrètement, chacune a ses protagonistes, sa temporalité, sa façon de se raconter. Mais chacune est partie d’un tout, et toutes finiront par se croiser. En écrivant « La nuit tombe », j’ai cherché à retranscrire un monde non pas réaliste, mais un monde qui vrille sous le poids du réel. Un monde où la réalité se substitue au fantasme. Le fantasme à part égale avec le réel. J’ai essayé de me souvenir de sensations très précises, de pertes de repères, d’états limites... Et j’ai écrit, en ayant pour seul objectif la scène et les acteurs. Je ne me suis pas inquiété de faire de la littérature. Mon objectif n’est pas d’inventer une langue. Je n’ai pensé qu’au spectacle à venir.

Quel rôle y jouent le texte, les costumes ? Tous ces éléments sont très importants. Les acteurs sont au centre de la pièce, mais tout ce qui a autour prend autant de place. C’est un spectacle total !

Si tu devais résumer ton théâtre en une phrase ? Un théâtre qui ose le fantastique et le

décrochage avec le réel.

Quels sont, enfin, tes futurs projets ?

Me laisser le temps de réfléchir au prochain projet !

Quel est le propos de « La nuit tombe » ?

Il y a trois histoires qui se déroulent dans une chambre d’hôtel. La chambre est presque un per-

*IRCAM : Institut de Recherche et Coordination Acoustique/Musique

Actuellement à la Comédie Le Misanthrope

La nuit tombe...

Music-hall

L’Encyclopédie des guerres

texte Molière - mise en scène Jean-François Sivadier

texte et mise en scène Guillaume Vincent

texte Jean-Luc Lagarce - mise en scène Chloé Brugnon

conférence-performance de Jean-Yves Jouannais

Alceste est un de ces personnages irréductibles comme Molière aime les camper. Il refuse de composer avec le monde, contrairement à son ami Philinte, à qui il reproche sa tiédeur. Le metteur en scène Jean-François Sivadier voit dans cette intransigeance un trait de caractère plutôt attachant. C’est parce qu’il est excessif et donc loin d’être parfait qu’on aime Alceste. Il rêve d’un monde fondé sur des relations authentiques où l’hypocrisie n’aurait plus cours.

Un lieu unique – une chambre d’hôtel – pour trois histoires qui se croisent et s’imbriquent : celle de deux sœurs, celle de Wolfgang, cinéaste torturé, et celle de Susann, mère en perdition. La pièce imaginée par Guillaume Vincent a des allures de scénario onirique, entre Hitchcock et Lynch. Un univers où le fantasme et la réalité se fréquentent étroitement. Le passé et le présent ne font parfois plus qu’un, les vivants et les morts nous parlent, sans se soucier de leur statut. Une pièce qui a marqué le dernier Festival d’Avignon.

Nouveau Rendez-vous Studio.Théâtre ! L’histoire, drôle et pathétique, d’une chanteuse de music-hall qui déroule le fil de ses mésaventures scéniques. Un récit émouvant et insolite sur une carrière ratée et sur des désirs intacts où le rêve et le fantasme du passé ont la part belle.

Trois ans déjà que cette drôle d’histoire a commencé. Un mercredi par mois à la Comédie, les fidèles se pressent pour écouter les récits de Jean-Yves Jouannais. Un ancien critique d’art qui a largué les amarres pour se consacrer à un projet artistique fou : une Encyclopédie des guerres.

du 6 au 9 février à la Comédie

du 13 au 15 février

du 5 au 7 février

mercredi 13 février - En entrée libre

Retrouvez toutes les dates sur www.lacomediedereims.fr Réservation conseillée au

03 26 48 49 00

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GUILLAUME VINCENT



AGENDA

PUBLI-RÉDACTIONNEL

S.U.A.C. ZIKCINÉ Le SUAC, service culturel de l’université de Reims Champagne-Ardenne et les cinémas Opéra s’associent de nouveau cette année pour vous proposer un programme déclinant musique et 7ème art. Les titres choisis sont représentatifs de différents courants musicaux et appartiennent au patrimoine cinématographique. Cette année encore, nous vous proposons une première partie musicale live avant le film grâce aux divers acteurs de la vie musicale sur Reims : Tam Tam Tambour et Tintamarre pour le 1er soir et l’association MUSICADE, Association des élèves du conservatoire en lien avec les classes du CRR, pour la suite.

Mercredi 6 février à 20h00

+ Spinal Tap VO + (États-Unis – 1984) Le groupe de hard-rock britannique Spinal Tap fait fureur. Les trois jeunes musiciens fougueux de cette bruyante formation rendent les filles folles et font salle comble à chaque concert. Le reporter Marty Dibergi, qui les a découverts et lancés, prend sa caméra et décide de filmer leur tournée. Une tournée pas comme les autres…

CINÉMA OPÉRA

Mercredi 20 mars à 20h00

+ Devdas VO + (Inde – 2002) Devdas, le fils d’un riche propriétaire, et Paro, la fille d’un modeste voisin, s’aiment passionnément. Malheureusement, le père de Devdas n’accepte pas l’entrée de Parvati dans sa famille en raison des différences de classe sociale. Paro va alors épouser contre son gré un propriétaire plus âgé qu’elle, et Devdas, parti à Calcutta, sombre dans l’alcoolisme…

CINÉMA OPÉRA

MONDE EN DOCS (Saison 2012 2013) En France et ailleurs, des cinéastes regardent nos vies. Ils nous donnent le goût du réel, de sa complexité, de son émotion, de sa gravité, de ses rires aussi. Sur l’écran, nous découvrons des visages, des paroles, nous avons la sensation d’approcher une réalité jusqu’ici inconnue ou trop simplifiée. Le cinéma documentaire c’est la vie en éclat devant nos yeux et nos oreilles. Ce nouveau cycle de Monde en docs raconte des histoires de France, de Chine, d’Égypte, de Palestine et d’Israël. Ce cycle est une proposition de La Pellicule Ensorcelée, des Cinémas Opéra et du SUAC.

Mercredi 6 mars à 20h00

+ Last train home de Lixin Fan + (Chine – 2009) Chaque été, les villes chinoises sont plongées dans le chaos, lorsqu’au nouvel an chinois, des millions de personnes tentent de rejoindre leurs villages d’origine, dans les campagnes, où ils ont laissé leurs familles. Les Zhang, un couple de paysans pauvres, travaillent depuis plusieurs années dans une usine de textile à Gangzhou. Élevée par sa grand-mère à la ferme, leur fille ainée révoltée et insouciante décide d’abandonner ses études, contre les attentes de ses parents.

CINÉMA OPÉRA

INFORMATIONS et RÉSERVATIONS INDISPENSABLES : S.U.A.C. (Service Universitaire d'Action Culturelle) Villa Douce Présidence de l'Université de Reims Champagne-Ardenne • 9 Bd de la Paix, 51100 Reims • www.univ-reims.fr • 03 26 91 84 15

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S.U.A.C.



ÉPILOGUE !

Texte / Alexis Jama Bieri

L’éternité des instants « Nos plaisirs les plus doux ne vont pas sans tristesse » (Pierre Corneille)

e la neige fondue jonche le sol. Transformée en masse sirupeuse noirâtre, elle me plonge dans l’univers sombre de mes rêves hantés de gouffres sans fond où l’on chute éternellement et d’étendues d’eau saumâtre où l’on se noie inexorablement. Une sensation glacée de doute, de questionnement, de perte de repères, sans aucune prise sur les évènements m’envahit. Ces rêves abyssaux égrainent, en larmes de plomb, une liste sans fin d’erreurs et d’échecs. Sans doute est-ce un miroir révélateur de la réalité. Celle qui de rêve en cauchemar visqueux nous secoue à l’instar de marionnettes désarticulées, naufragées entre le désespoir romantique du radeau de la Méduse de Géricault et l’Outrenoir de Pierre Soulages. Un sourire pourtant, rappelle à ma mémoire la clarté et la limpidité d’une réalité parfaite, que l’on peut, seulement quelques instants, effleurer des doigts. Quelques instants trop courts, éphémères comme l’humanité à l’échelle de la temporalité terrestre. Une perfection que l’on saccage. Faut-il alors se téléporter sur Vénus, en d’artificiels paradis ? Hélas, je cherche encore la réponse entre quête du Graal et Dame du lac. Et, par cette page blanche, brandie comme un étendard, je me perds en une vaine quête. Alors, je la noircis de lettres baroques.

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FÉVRIER CABARET POP 02 FÉV THE SPINTO BAND I BADEN BADEN I WE ARE KNIGHTS SAM

SHARIVARI BY INNER CORNER 08 FÉV MEKANIK KANTATIK I I.W.S. I NGC777 VEN

LIVE

LIVE

LIVE

LES NUITS DE L’ALLIGATOR 09 FÉV THE HEAVY I THE SKINS I THE COMPUTERS SAM

BOOGAERTS 14FÉV MATHIEU FRANÇOIZ BREUT JEU

CONNEXION 15FÉV SCRED LA SCRED I LA JONCTION I NEFAST VEN

EL GUSTO 20 FÉV PROJECTION DANS LE CADRE DU CYCLE MUMA MER

MARS LILLY WOOD & THE PRICK 08 MARS OWLLE VEN

Journal à parution mensuelle. Prochain numéro : Mars 2013 (#25)

GREMS 09 MARS NEMIR I KELIB I ASHKEN SAM

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EMILY LOIZEAU 13 MARS PREMIÈRE PARTIE

21 BALTHAZAR PREMIÈRE PARTIE JEU

MARS

PSY 4 DE LA RIME 22 MARS PREMIÈRE PARTIE VEN

INDUSTRIAL INVASION 23 MARS VOMITO NEGRO I VIGILANTE I LARVA I DARK CONTROL OPERATION SAM

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Audi Q3. Inspirée d’exigences futures. Location avec Option d’Achat sur 36 mois. 1er loyer de 3 899 € suivi de 35 loyers de 349 €. Montant total dû en cas d’acquisition : 31 817 €. Offre valable du 1er janvier au 31 mars 2013. Un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager. *LOA 36 mois 45 000 km. Ex. : Audi Q3 2.0 TDI 140 ch Attraction au prix spécial pour ce financement de 29 682 € TTC (tarif au 06/12/2012 avec garantie 2 ans + 1 an de garantie additionnelle obligatoire au prix de 370 € incluse dans les loyers). En fin de contrat, option d’achat : 15 713 € ou reprise du véhicule suivant engagement sous conditions de votre Distributeur. Offre réservée aux particuliers chez tous les Distributeurs présentant ce financement, sous réserve d’acceptation du dossier par Audi Bank division de Volkswagen Bank GmbH – SARL de droit allemand – Capital social : 318 279 200 € - Succursale France : Paris Nord 2 – 22 avenue des nations 93420 Villepinte - RCS Bobigny 451 618 904 - ORIAS : 08 040 267 (www.orias.fr) et après expiration du délai légal de rétractation. Assurance facultative Décès - Incapacité Perte d’Emploi : à partir de 6 €/mois souscrite auprès de Cardif Assurance Vie SA au capital de 688 507 760 €, N° 732 028 154 RCS Paris et Cardif Assurances Risques Divers SA au capital de 14 784 000 €, N°308 896 547 RCS Paris, Siège social : 1 Boulevard Haussmann - 75009 Paris. Ce montant s’ajoute au loyer en cas de souscription. Montants exprimés TTC, hors prestations facultatives. **Forfait Service Entretien aux particuliers obligatoire souscrit auprès d’OPTEVEN SERVICES - SAS au capital de 365 878 € - Siège social : 109 bd Stalingrad - 69100 Villeurbanne - RCS Lyon N° B 333 375 426. Coût mensuel du Forfait Service Entretien aux Particuliers : 16 € inclus dans les loyers, coût hors financement : 576 €. Modèle présenté : Audi Q3 2.0 TDI 140 ch BMV6 Attraction, au prix de 30 600 € TTC avec options (non incluses) peinture métallisée (750 € TTC), jantes en aluminium coulé 5 bras partiellement polies 7J x 18” (1750 € TTC), projecteurs Xénon Plus (1 200 € TTC), rampes de pavillon en aluminium poli(100 € TTC) et Pack Aluminium extérieur (190 € TTC). Tarifs au 06/12/2012. 1er loyer de 3 899 € suivi de 35 loyers de 429 €. Montant total dû en cas d’acquisition : 35 862 €. Consommations en cycle mixte (l/100 km) : 5.2. Rejets de CO2 (g/km) : 137. Volkswagen Group France S.A. – RC Soissons B 602 025 538. Audi recommande Castrol EDGE Professional. Vorsprung durch Technik = L’avance par la technologie.

Le Vignoble SAS Cité de l’Automobile - ZAC Croix-Blandin - rue Lena Bernstein - Reims A34 direction Charleville Mézières - sortie Croix-Blandin - Tél. 03 26 79 83 33

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