GastroJournal 29/2015

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Restaurant

16 juillet 2015 | No 29 | www.gastrojournal.ch

Philippe Rochat, une nécrologie personnelle

Paris affiche les résultats des contrôles d’hygiène

A la recherche de la perfection Il était un des tout grands cuisiniers suisses, un maître, un artiste artisan et un travailleur sans concessions. Philippe Rochat est décédé la semaine passée. Souvenirs.

sonnage. Je l’ai ressenti comme incroyablement systématique et si je devais le décrire par un met, je dirais un œuf surprise à l’italienne aux truffes blanches d’Alba et copeaux de parmesan. C’est un met dont l’élégance convainc par son humilité droite et honnête. Spaghettis, jaune d’œuf, truffe blanche, parmesan. C’est fait. Il semble que l’aspiration déterminée et inflexible de la perfection ait été le noyau de sa vocation.

Romeo Brodmann

Lorsque j’ai dégusté, pour la première fois, une sauce de Philippe Rochat, j’étais bouleversé. C’était comme plonger dans une profondeur tridimensionnelle avec le noyau d’un écho d’une perfection sonore gustative, créé par le soulignement de l’acidité qui ne semblait pas provenir de ce monde.

Quiconque travaille aussi durement sur lui-même et aussi dans son métier, ne peut pas le cacher à son entourage. Philippe Rochat m’a toujours transmis un certain pragmatisme qui générait de profondes émotions, une paradoxie créatrice d’harmonie. En 1997, une année après avoir repris l’Hôtel de Ville de Crissier, Philippe Rochat obtint 19 points Gault&Millau ainsi que trois étoiles du Guide Michelin. Philippe Rochat, membre d’honneur de GastroSuisse et de GastroVaud, n’a jamais lâché ni abandonné sa quête de la perfection.

Philippe Rochat. Fils d’un ouvrier de voies ferrées de la vallée de Joux. Apprentissage de cuisinier au Buffet de la Gare à Romont. Six années au Baur au Lac et au Savoy à Zurich. Excursion chez Bocuse à Collongesau-Mont-d’Or. Puis Crissier, neuf ans à l’Hôtel de Ville chez Frédy Girardet, pour lequel il s’enthousiasmait. En 1996, il a pu reprendre la maison de Frédy Girardet.

Il est néanmoins parvenu comme

l’avait d’ailleurs fait son maître Frédy Girardet, à se mettre en arrière-plan, à tout lâcher et à remettre l’Hôtel de Ville de Crissier à son adjoint de longue date qui n’est autre que Benoît Violier. La transition est intervenue en 2012. Ainsi, Philippe Rochat nous a offert en cadeau, à nous les cuisiniers et restaurateurs suisses, un accord du bon goût à trois voix, une institution de l’art culinaire artisanal, qu’on ne trouve nulle part ailleurs dans le monde. ARCHIVES GJ

Lors de mon premier rendez-vous pour une interview, à 9 heures, j’avais un quart d’heure de retard. Ce qui signifie qu’à mon point de vue, j’étais un quart d’heure en avance. C’était un malentendu évident, mais tous deux, nous savions, même si je n’y pouvais rien, qu’il ne pouvait pas le laisser passer. Il m’a fait attendre et j’ai attendu. Il m’a mis à l’épreuve. Il était têtu. Je n’aurais jamais pensé qu’il était aussi dur de me faire attendre jusqu’à 17 heures. J’étais têtu. Il n’aurait jamais imaginé que j’étais suffisamment dur pour résister à sa dureté. Lorsque, vers 17 heures, nous nous sommes assis à une table couverte d’une nappe blanche toute simple, il m’a regardé avec sévérité. Puis, il a effacé d’une main un pli, a affiché un sourire et m’a présenté, sans un mot,

Philippe Rochat a marqué la gastronomie. Il est un symbole de la Suisse culinaire.

ses respects. C’était une bonne discussion empreinte de cordialité. Malgré tout. Nombreuses sont les personnalités qui ont découvert Phi-

lippe Rochat. Elles en ont fait la description en utilisant les adjectifs de dur, de sévère et d’autres. Sans l’avoir vraiment bien connu, ce n’était pas mon impression du per-

La Confédération économise et nous épargne un programme contre la

Dilapidation des denrées alimentaires Aucune dilapidation de ressources «au vu de la situation financière de la Confédération» n’est possible. Les moyens pour réduire le «foodwaste» ne sont plus disponibles pour la campagne de sensibilisation. «L’Office fédéral de l’environnement (OFEV) ne peut donc mener à chef les travaux tels que planifiés.» C’est ainsi que l’Office fédéral de la santé

a justifié, la semaine passée dans le «Tages-Anzeiger» zurichois, l’arrêt de la campagne prévue. L’hôtellerierestauration participait aussi à cette campagne: dès 2012, la Confédération avait recherché la discussion avec les milieux concernés – en plus de l’hôtellerie-restauration, notamment avec le commerce de détail, le commerce de gros et les organisations de consommateurs.

Toutefois, très tôt, l’hôtellerie-restauration avait annoncé ses réserves. D’une part d’ordre politique, parce que ni la nécessité ni l’efficacité d’une telle campagne n’étaient évidentes. Bien au contraire. Nous avons affaire à un interventionnisme classique qui, d’un point de vue libéral ou politico-économique est nocif. Par ailleurs, l’hôtellerie-restauration s’interroge aussi à propos au contenu: en premier lieu, parce que personne dans l’ensemble de la chaîne des denrées alimentaires n’a le moindre intérêt à dilapider. Mais aussi en deuxième lieu, parce que dans la perspective de l’hôtellerierestauration on ne peut aucunement parler de dilapidation. La branche est responsable de 5% de la dilapidation (voir encadré à droite) totale.

La campagne pour la sensibilisation face aux déchets alimentaires s’arrête.

L’ayant compris, la Confédération n’a toutefois pas arrêté la campagne. Elle n’était que suspendue», annonçait Berne. pg

Aujourd’hui, Philippe Rochat n’est plus. Le 8 juillet, il est tombé de vélo et est décédé d’un accès de faiblesse. La stupeur qui nous a envahis nous démontre définitivement l’importance de Philippe Rochat en tant que symbole de la Suisse culinaire. Nous lui en sommes très reconnaissants.

Auf Deutsch

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Déchets alimentaires «Les déchets alimentaires évitables comprennent tout ou partie des denrées qui sont ou étaient une fois consommables et irréprochables au point de vue sanitaire, mais ne peuvent plus être consommés par les êtres humains pour des raisons de pourriture, d’échéance ou de défauts qualitatifs. En font aussi partie les denrées servant de fourrage. Les fourrages qui sont cultivés dès le début à cet effet en sont exclus.» pg

Depuis le 1er juillet, un projet pilote a été lancé en France, dans les villes de Paris et d’Avignon. Les restaurants de ces deux villes voient les résultats de leurs contrôles d’hygiène publiés sur un site internet du Gouvernement sous la forme de trois mentions: à améliorer, acceptable ou bon. Les restaurateurs ont ensuite l’opportunité d’afficher à leur clientèle leur résultat via un QR code. La mesure émane du Gouvernement français et se situe dans la logique des contrôles d’été qui avaient conduits à plus de 18 000 contrôles d’hygiène à l’été 2014 donnants lieux à 137 fermetures et quelque 700 infractions. Le but de la mesure est d’encourager les restaurants à améliorer leurs conditions d’hygiène. Mais l’idée est aussi de faire la transparence sur le travail des services d’hygiène français et sur les notes obtenues par les établissements de la restauration.

Nitro coffee: le café tendance de l’été

Cet été, un café fait fureur dans bien des établissements outre-Atlantique. Il s’agit du nitro coffee, un café long qui est servi glacé à la pression dans un verre à bière. Le résultat est plutôt bluffant. D’une part, la boisson ressemble à une Guiness, avec des effets de mousses en cascade, mais aussi parce que depuis sa création, le nitro coffee connaît toujours plus d’adeptes. Dans bien des établissements le mélange de café est effectué par des baristas reconnus et les saveurs varient beaucoup. Si les EtatsUnis ne sont pas franchement reconnus pour la qualité de leurs cafés, les tendances qui connaissent un essor là-bas ont aussi du succès chez nous, Starbucks en est un exemple. On peut donc s’attendre à bientôt appercevoir des nitro coffee aussi en Suisse, sur les terrasses.

Les cafétérias d’écoles sont souvent peu rentables

www.foodwaste.ch

Société du tout à l’égout Dans le cadre de la définition des déchets alimentaires (voir à gauche), la Suisse dilapide, chaque année, quelque 2,3 tonnes de denrées alimentaires. 45% sont de la faute aux ménages, 30% sont perdus lors de la préparation, 13% dans l’agriculture, 5% dans le commerce de détail et dans la restauration ainsi que 2% dans le commerce de gros. pg

Sur Fribourg, la gestion des établissements de restauration des collèges et écoles est plutôt réputée difficile, relate «La Gruyère». Une bonne partie est déficitaire et les établissements peinent à trouver des repreneurs. Le problème vient de l’Etat qui aurait imposé un modèle qui ne plaît pas: une obligation de régénérer des plats au lieu de cuisiner sur place. La contrainte budgétaire de 8,50 francs par jour est aussi un des facteurs qui rend la chose difficile.


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