L’histoire d’un garçon comme les autres sur le chemin d’une nouvelle masculinité

Page 10

L’histoire d’un garçon comme les autres

nouvelle masculinité Sur le chemin d’une

Marie Bailliard

Préface des créateurs de la web-série Et tout le monde s’en fout

UN RÉCIT ILLUSTRÉ

+

DES INFOS pour tout comprendre

SOMMAIRE Préface 2 L’histoire d’un garçon comme les autres 6 Ressources Le tone policing 28 La culture du viol 29 Le male gaze 42 Le sexisme ordinaire 42 Le genre 43 La déconstruction 43 Le harcèlement de rue 64 Le mythe du bad boy et le mythe de la friendzone 64 La « pilule rouge » du féminisme 65 L’hystérie 76 Parler de ses émotions entre mecs 76 La charge contraceptive 102 Les dangers de la pilule féminine 103 Intervenir contre le harcèlement ..................................................... 103 La sexualité sans pénétration vaginale ............................................ 132 Le plaisir féminin............................................................................. 132 L’asexualité ..................................................................................... 133 Le manterrupting ............................................................................ 158 Le syndrome de l’imposteur chez les femmes .................................. 158 Les stéréotypes de genre 159 Les infections sexuellement transmissibles 178 Les mycoses vaginales 178 La communication non violente (CNV) 179 Le mansplaining 179 Se débarrasser des personnes problématiques ou toxiques 202 La non-binarité 203 À lire / À voir / À écouter pour aller plus loin 204 Postface ......................................................................................... 206 4

DISCLAIMER

Lorsque les ressources emploient les termes « femme » ou « homme », ceux-ci sont à comprendre comme : « femme » femme

Un homme peut avoir un utérus et une femme un pénis (on parle de transidentité, voir ressource « Le genre » page 43).

Le sexe biologique peut ne pas être rigoureusement défini à la naissance (personnes intersexes, voir ressource « Le genre » page 43).

Certaines de ces ressources traitent de sujets extrêmement vastes (genre, non-binarité, culture du viol…), qui ne peuvent être couverts en intégralité par un paragraphe. Comme Arthur, renseignez-vous !

cisgenre « homme » homme cisgenre
5
16
17

LE TONE POLICING

Ce terme désigne le fait de juger une personne sur le ton qu’elle utilise (la forme) plutôt que sur le contenu de ses paroles (le fond). Cette technique est utilisée pour décrédibiliser facilement un propos.

Pourquoi c’est violent ?

Le tone policing nie la charge émotionnelle que certains sujets peuvent avoir pour certaines personnes. Pour Elsa, par exemple, écrire une chanson sur son expérience personnelle et ses questionnements est une manière de réfléchir aux changements importants qu’elle est en train de vivre. L’enjeu émotionnel est fort de son côté, et il est normal qu’elle s’énerve face aux jugements sans concession de Nicolas (qui n’essaie même pas de comprendre).

Qu’est-ce que ça a à voir avec le sexisme ?

Le tone policing est souvent utilisé quand une femme hausse le ton.

× Un homme qui s’énerve est considéré comme puissant (il exerce son pouvoir, il ne se laisse pas faire, cela le montre comme fort).

× Une femme qui s’énerve est considérée comme inélégante, « hystérique1 » ou vulgaire (puisque les femmes sont généralement éduquées à être discrètes et à ne pas prendre trop de place). Cette vision de la colère féminine a aussi une dimension raciale2 :

– les femmes noires sont vues comme plus colériques, castratrices, explosives ;

– les femmes asiatiques se voient attribuer l’étiquette d’une personnalité mesurée, polie et discrète.

Dans les deux cas, il s’agit d’un stéréotype irrespectueux qui ne correspond pas à la réalité.

1. Voir ressource « L’hystérie » page 76.

2. Certaines personnes se retrouvent au croisement de plusieurs oppressions (par exemple, une femme noire subit le racisme ET le sexisme). On parle d’intersectionnalité.

28

LA CULTURE DU VIOL

La culture du viol est un environnement social et médiatique qui banalise les violences sexuelles, voire les excuse et les accepte. Elle véhicule et entretient plusieurs mythes3 sur le viol qui empêchent une reconnaissance claire de celui-ci et la prise de mesures appropriées. Elle est un sous-produit du patriarcat.

C’est quoi le patriarcat ?

Le patriarcat désigne le système social et juridique dans lequel nous vivons, fondé sur la détention de l’autorité par les hommes4. Ces derniers y incarnent à la fois :

× ce qui est supérieur : toutes les personnes qui ne sont pas reconnues comme hommes ne sont pas égales à ces derniers ;

× ce qui est universel : l’homme est la base de réflexion, la valeur considérée par défaut, la norme.

Outre l’oppression des femmes et des personnes appartenant à une minorité (personnes non hétérosexuelles, personnes non cisgenres, personnes non blanches, etc.), le système patriarcal oppresse aussi les hommes en les forçant à correspondre à une norme masculine qu’ils n’ont pas choisie. Cette norme participe au maintien de la culture du viol.

Pourquoi le patriarcat nourrit la culture du viol ?

La culture du viol est notamment entretenue par la manière dont sont éduqués les hommes.

× Ils ne doivent pas hésiter à prendre ce qu’ils veulent (notamment les femmes), parce que les choses leur sont dues.

× Ils doivent museler leur empathie (qui est considérée comme une faiblesse5) et ne jamais évoquer leurs sentiments et leurs émotions.

× Ils ne doivent pas accepter le rejet (qui est considéré comme un échec). Le « non » est perçu comme un challenge, pas comme une fin en soi.

Cette éducation légitime aussi le mythe des « pulsions » des hommes : un « besoin » ancré dans leur nature d’interagir sexuellement avec les femmes (au risque de finir avec les fameuses « couilles bleues6 »). Face à ces « pulsions irrépressibles », la responsabilité de faire plus attention (à leur tenue, à l’heure à laquelle elles sortent, aux endroit où elles se rendent…) retombe alors injustement sur les femmes. Avec le risque constant d’être accusées d’avoir provoqué leur propre agression.

Tanya retoque d’ailleurs Arthur sur sa chanson car cette dernière perpétue cette problématique (« Tu dis non mais je sais que tu veux dire oui ») et oublie la notion de consentement qui devrait être au centre de toute relation entre deux humains.

3. L’un des mythes les plus répandus est celui de l’homme violent, agressant une femme inconnue à l’aide d’une arme dans un lieu mal éclairé. MAIS selon les statistiques 74 % des viols sont commis par une personne connue de la victime, et 67 % des viols ont lieu au domicile de la victime ou de l’agresseur. Toutefois, les agressions commises dans cette « zone grise » sont souvent minimisées (« C’était pas fou comme comportement mais c’est quand même pas un viol ») et la victime est parfois même considérée comme responsable.

4. Et, surtout, par les hommes BLANCS.

5. Voir ressource « Parler de ses émotions entre mecs » page 76.

6. Voir podcast « Épisode 1 : Sexualités empêchées », série « Vivre sans sexualité » d’Ovidie et Trancrède Ramonet, LSD la série documentaire, France Culture.

29
40
41

LE MALE GAZE

Le « male gaze » ou « regard masculin » désigne les représentations stéréotypées des femmes par un auteur homme dans les productions culturelles et visuelles (publicités, films, livres, BD, etc.). Selon le male gaze, les femmes sont généralement inactives (dans l’attente d’un homme), et représentées comme un objet sexuel conçu pour le désir masculin hétéronormatif1. Et comme on compte bien plus d’auteurs et de réalisateurs célèbres que d’actrices et de réalisatrices, ce regard est omniprésent dans le paysage médiatique, au point qu’on oublie parfois son existence.

Pourquoi c’est néfaste ?

Le male gaze encourage à regarder l’autre d’une certaine manière, mais également à être regardé e d’une certaine manière. Ces représentations encouragent les femmes à se sentir accomplies uniquement à travers le regard d’un homme, alors que ce même regard les perçoit comme passives et dédiées à assouvir leurs désirs.

Le male gaze crée une vision des femmes qui a plusieurs conséquences :

× il vient saper la confiance en elles des femmes. Elles sont toujours considérées comme « pas assez comme ci ou trop comme ça » par d’autres personnes, mais surtout par elles-mêmes. Elles s’enferment dans un standard inatteignable : elles doivent être jeunes, minces, sexy, discrètes et accommodantes ;

× l’enfermement produit par le male gaze peut conduire à des angoisses, une dépression, des troubles alimentaires, de l’automutilation ;

× ce standard vient directement alimenter la culture du viol : le public est habitué à voir les femmes représentées comme des objets de désir, c’est donc qu’elles doivent l’être.

Là encore, le male gaze a une composante raciale : ce dernier hypersexualise par exemple les femmes noires ou arabes (la femme sauvage) et présente les femmes asiatiques comme exotiques, fragiles et discrètes (la poupée de porcelaine).

LE SEXISME ORDINAIRE

Le sexisme ordinaire désigne les micro-agressions sexistes quotidiennes comme tellement ancrées dans les comportements ou le langage qu’elles deviennent invisibles et internalisées.

Le sexisme ordinaire nourrit la culture du viol. Il définit une norme de comportements où il est permis de se moquer des femmes, de les rabaisser et de les considérer comme non égales.

Ce comportement est partout, et il est difficilement remis en question par les personnes qui en sont à l’origine. Il est au contraire normalisé (« Çaarriveàtoutlemonde », « C’estpas sigrave ») et internalisé (il finit par faire partie intégrante de nous).

Chacune de ces micro-agressions peut sembler minime, donner l’impression qu’il n’est pas nécessaire de s’en formaliser, ou que la personne qui en est victime surréagit. Mais :

× il est toujours plus facile de balayer ces problèmes d’un revers de main lorsque l’on n’est pas directement concerné.e ;

× un empilement de micro-éléments forme à la fin un ensemble très lourd. Et quand ces microagressions sont vécues plusieurs fois par jour tous les jours, le poids devient vite insupportable.

1. Une personne hétéronormative considère l’hétérosexualité comme la norme relationnelle, avec des rôles très genrés et stéréotypés. Voir ressource « Les stéréotypes de genre » page 159.

42

Il est donc important d’accepter la remise en question de certains de ses comportements, et de ne pas minimiser ce que vivent les victimes de ce sexisme ordinaire. Les publicités critiquées par Tanya existent réellement, et sont récentes. Les publicités sont omniprésentes dans notre paysage visuel et finissent par créer une toile de fond qui vient colorer notre vision des autres et de nous-mêmes. Les représentations des personnes (dans les publicités, les films, les livres, les magazines) sont extrêmement importantes : elles donnent un cadre de référence à celles et ceux qui les regardent. Et si ce cadre est faux, la vision qui en découle est inadéquate et difficilement modifiable.

LE GENRE

Le genre et le sexe sont deux choses distinctes.

× Sexe : attribut biologique. Le sexe n’est PAS BINAIRE, c’est-à-dire MASCULIN ou FÉMININ : il existe des personnes qui naissent avec des attributs qui ne rentrent pas dans l’une des deux cases. Les personnes intersexes peuvent par exemple naître avec un utérus et des chromosomes XY. En France 1 enfant sur 100 000 naît intersexué e. La distinction binaire est ARTIFICIELLE, et source de beaucoup de souffrances pour ces personnes.

× Genre : identité définie par soi-même, donc subjective. Le genre est assigné arbitrairement par les médecins à la naissance du bébé : s’il a un pénis on lui assignera le genre « homme », s’il a une vulve on lui assignera le genre « femme ». Le genre conditionne l’éducation et la construction sociale que la personne recevra ensuite.

Le genre peut changer au cours d’une vie : une personne assignée homme à la naissance et portant un pénis peut prendre conscience qu’elle se définit en fait comme femme. On parle alors de transidentité.

Il s’agit généralement d’un processus long et complexe, et non d’une simple phase ou d’un caprice. Une personne peut aussi s’apercevoir qu’elle ne se reconnaît ni dans le genre « homme », ni dans le genre « femme », et se définir non binaire2. Le genre est un spectre bien plus vaste que « homme » ou « femme ».

LA DÉCONSTRUCTION

La déconstruction est une réflexion longue et poussée sur tout type d’injonctions dont nous sommes tous et toutes victimes. Elle vise à prendre du recul par rapport à elles et, à terme, à s’en affranchir.

Questionner une norme par défaut

Ces injonctions sont liées à la binarité homme/femme, au système patriarcal, au système colonial… On considère que chaque homme et chaque femme devrait correspondre à une norme précise (c’est-àdire à une idée qu’on s’en fait) : cette personne devrait avoir une certaine apparence, une certaine place, se comporter d’une certaine manière, suivre un certain parcours de vie.

Le problème, c’est que nous ne choisissons généralement pas cette norme. Elle nous est imposée par notre éducation et par notre entourage (sauf si ce dernier la remet en question) de façon plus ou moins violente. Et comme elle est partout, on ne la voit même plus et elle devient acceptée par défaut. Déconstruire cette norme permet de comprendre ce qui nous a été imposé, et de faire le tri entre ce avec quoi nous sommes d’accord ou non. Réfléchir à ces normes et à ces injonctions, c’est questionner notre place dans ce système et les privilèges que nous en retirons. Cela permet de rééquilibrer les rapports entre les individus.

43
2. Voir ressource « La non-binarité » page 203.

Cette année, Arthur et sa jumelle Elsa entrent en école d’ingénieur. Arthur est un garçon comme les autres : il aime sortir et faire la fête, il rigole aux blagues, parfois lourdes, de sa bande de potes et il aime passer du temps avec sa sœur — même s’il ne la comprend pas toujours. C’est une de ses camarades qui lui ouvre les yeux : alors qu’il lui soumet une chanson qu’il a écrite pour son groupe de musique, elle lui fait remarquer que ses paroles sont carrément sexistes. Complètement dérouté, Arthur va petit à petit porter un autre regard sur le monde qui l’entoure. Entre discussions avec ses proches, lectures et réflexions, les prises de conscience s’enchaînent…

Au fil du récit, ponctué de pages de ressources sur de nombreux sujets de société, Marie Bailliard offre une réflexion puissante sur la place des hommes au sein de la société d’aujourd’hui. À travers le point de vue d’Arthur, ce livre nous permet de voir le monde et nous-même sous un jour nouveau.

Marie Bailliard , alias Je suis une légume , est graphiste et illustratrice. Concernée par les problématiques de société autour du féminisme et des luttes LGBTQIA+, elle développe depuis quelques années (à l’écriture et au dessin) plusieurs BD autour de ces sujets.

Préface et postface par Fabrice de Boni, Marc de Boni et Axel Lattuada, les créateurs de la web-série Et tout le monde s’en fout qui vulgarise les questions de société avec humour et pédagogie.

www.mangoeditions.com MDS : MN28380 - 17,95 € TTC

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.