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Testament olographe & l’insanité d’esprit Me. Frédéric Frabetti & Me. Carmen Rimondini

Le testament se définit comme étant un document écrit par lequel une personne dispose de la manière dont ses biens seront distribués après son décès. Il s’agit d’un acte authentique passé par devant notaire soit d’un acte sous seing privé établi.

Le testament sous seing privé est appelé testament olographe qui est rédigé en entier, signé et daté de la main du testeur en y mentionnant ses dernières volontés sur la distribution des biens de son patrimoine conformément à l’article 970 du Code civil. La présence de témoins n’est pas obligatoire pour donner toute validité à l’écrit, mais le moment venu, il doit être présenté en original et rédigé à la main en entier. La date indiquée sur le testament reste un élément essentiel afin de savoir si le testateur était en possession de toutes ses facultés mentales afin de pouvoir transmettre ainsi ses biens. En cas de contestation de ce testament olographe, il y aura lieu de prouver par des éléments contenus dans l’acte, confirmés par des éléments extérieurs que le testament a été rédigé à un moment au cours duquel le testateur n’était pas incapable de rédiger ce testament. Le testament authentique passé par devant notaire doit être reçu par deux notaires ou par un notaire assisté de deux témoins conformément à l’article 971 du Code civil. Si le testament est reçu par deux notaires, il leur est dicté par le testateur, l'un de ces notaires l'écrit lui-même ou le fait écrire à la main, dactylographier, imprimer ou reproduire au moyen d'un procédé agréé par le ministre de la Justice. S'il n'y a qu'un notaire, il doit également être dicté par le testateur, le notaire l'écrit lui-même ou le fait écrire à la main, dactylographier, imprimer ou reproduire au moyen d'un procédé agréé par le ministre de la Justice. Dans l'un et l'autre cas, il doit en être donné lecture au testateur, qui doit ensuite signer le testament. Si le testateur déclare qu'il ne sait ou ne peut signer, il sera fait dans l'acte mention expresse de sa déclaration, ainsi que de la cause qui l'empêche de signer. Ainsi, sa validité sera incontestable. Toutefois, conformément à l’article 901 du Code civil, pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d'esprit. Il est donc possible de contester la validité d’un testament et à ce titre, l’action en nullité d’un testament pour insanité d’esprit du testateur n’est ouverte qu’aux successeurs universels légaux et testamentaires du défunt. Mais elle n’est en revanche pas ouverte aux tiers.

Il est intéressant de constater que dans une de ses décisions, la Cour d’Appel de Luxembourg a considéré que tant l’insanité d’esprit, que l’intervalle de lucidité au moment décisif de la libéralité constituent des faits matériels, dont la preuve peut être faite par tous moyens, par conséquent, également, mais pas nécessairement ou exclusivement par le biais de certificats médicaux. Plus précisément, même si l’insanité d'esprit est retenue sur la base de certificats médicaux, la preuve éventuelle d’un intervalle de lucidité peut être rapportée par le biais d’éléments de preuve autres que ceux pouvant résulter d’un certificat médical. En l’espèce, il existait de nombreux certificats médicaux qui démontraient que le défunt avait été atteint d’insanité d’esprit à certaines périodes au sens de l’article 901 du Code civil. Il faut encore considérer que si l’insanité d’esprit était habituelle et assez grave, ce trouble est présumé exister au moment de la rédaction dudit testament. Les juges apprécient souverainement la valeur probante et la portée de cette présomption selon les circonstances particulières de chaque cas. Dans ce cas précis, les attestations du docteur ayant indiqué une insanité d’esprit n’avaient pas formellement attesté pouvoir exclure «la survenance d’éventuelles intervalles de lucidité». Le notaire, qui avait pris acte du testament authentique, auditionné par le tribunal, ne pouvait se souvenir si le testateur avait à ce moment précis toutes ses capacités intellectuelles. Néanmoins, il indiqua au tribunal sous la foi du serment qu’il pouvait confirmer qu’il n’a jamais rédigé un testament sans que le testateur ne dispose de toutes ses facultés intellectuelles et tout en respectant le formalisme légal exigé. Ainsi, il a été retenu que la présomption d’insanité d’esprit est renversée par la preuve que la confection du testament authentique est intervenue dans un intervalle de lucidité du testateur et l’action en annulation a été déclarée non fondée. La validité du testament a par conséquent été retenue. (Cour d'appel – 7e Chambre – 22 mai 2013 – Rôle: 39006)

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