Extrait La cuisine des plantes sauvages - Éditions Ulmer

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Introduction

À propos de la description des plantes Cet ouvrage est bien plus qu’un simple livre de cuisine — c’est également un guide pratique pour apprendre à reconnaître les plantes sauvages les plus courantes à un stade précoce de leur développement. Les photographies mettent en évidence les principales caractéristiques des plantes et les différents stades de leur développement. Chaque présentation est accompagnée d’une photographie de la cueillette, qui montre quelles parties de la plante seront cuisinées. Ce livre n’a pas vocation à remplacer les guides de détermination et les livres de botanique, mais constitue un complément intéressant pour les gourmets amateurs de plantes sauvages. Les portraits de plantes sont relativement courts. Ils évitent au maximum les termes spécialisés et sont formulés de la manière la plus pratique et la plus naturelle possible, à l’instar de mes cours, afin de laisser de la place aux sens. Nous avons délibérément évité de photographier les plantes au stade de la floraison. J’ai plutôt pris le parti de présenter en détail les premiers stades de végétation, qui sont plus importants pour le cueilleur, car c’est là que les herbes sont les plus intéressantes sur le plan gustatif, mais plus difficiles à reconnaître. Pour déterminer de nouvelles plantes, j’ai besoin d’un très grand nombre d’ouvrages différents. Parfois, c’est un dessin précis en noir et blanc, le détail d’une fleur, ou encore la description botanique ou une belle illustration vieille de plusieurs siècles qui me permettent d’identifier une plante. C’est pourquoi je recommande instamment de consulter un maximum de livres. La sécurité est un aspect essentiel de la cueillette: on ne doit prélever que ce que l’on connaît à 100 %. L’apprentissage de la détermination des plantes sauvages nécessite d’observer l’ensemble de leur cycle de vie, parfois pendant plusieurs années; une même plante peut avoir un aspect très différent selon le stade de végétation auquel elle se trouve et l’endroit auquel elle pousse. C’est pourquoi il faut de la patience et de la ténacité: deux à cinq plantes

viennent s’ajouter chaque année à celles que l’on connaît déjà, et d’autres restent « en observation ». Il est également important de savoir nommer les plantes, sinon on les oublie plus rapidement. Il existe toutefois de nombreux noms vernaculaires pour désigner une seule et même plante, ce qui prête souvent à confusion, et entraîne des imprécisions — personne ne sait plus vraiment ce que sont les cornes, dents, gueules, langues, oreilles, pieds, griffes, et autres queues de lièvre, âne, renard, cerf, ours, rat, chien, serpent, veau… C’est pourquoi je vous recommande vivement d’apprendre également le nom latin. Vous ne prenez ainsi aucun risque, notamment lorsque vous quittez votre région et que vous vous rendez dans une contrée où l’on parle une autre langue, que vous échangez avec d’autres amateurs, ou que vous consultez d’autres livres. Je vous recommande également de suivre des cours avec un spécialiste. Le fait d’apprendre à reconnaître les plantes directement dans la nature raccourcit considérablement les délais d’apprentissage. Le présent ouvrage suit la classification botanique usuelle. Les plantes d’une même famille sont donc regroupées ensemble, ce qui est très utile pour leur détermination. Certaines familles de plantes font l’objet d’un paragraphe introductif agrémenté de photographies. Ce paragraphe, mais surtout les photographies qui l’accompagnent, présentent de manière détaillée les caractéristiques essentielles et les similitudes au sein d’un même groupe.

À propos des recettes Les recettes sont simples et donnent des idées pour mettre en valeur les qualités particulières d’une cueillette. Les quantités sont toujours indiquées pour 4 personnes, mais il n’est généralement pas nécessaire de les respecter au gramme près. J’improvise complètement à chaque fois que je cuisine. La nature ne met pas toujours à disposition tout ce que nous voudrions, ou ce que la recette exige ! D’un point de vue culinaire, on peut classer les plantes sauvages comestibles dans


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les groupes d’usage suivants: salades, fines herbes, épinards, légumes tiges, asperges, brocolis, câpres, fleurs, fruits et légumes racines. Par conséquent, il est possible de cuisiner les différentes parties des plantes en se fondant sur les recettes traditionnelles à base de légumes de culture. Toutefois, la saveur de leurs variantes sauvages est généralement plus intense et plus authentique.

nous ne fassions pas peser un poids supplémentaire sur la biodiversité. Par chance, la plupart des plantes comestibles citées dans le présent ouvrage appartiennent à la catégorie des mauvaises herbes ou des espèces invasives, dont nous ne savons parfois plus comment nous débarrasser. Elles ne doivent susciter aucune réticence et peuvent être cueillies sans arrière-pensée.

À propos de la récolte et de la préparation

Comment récolter ?

Où récolter ? Le premier endroit dans lequel je recherche des plantes sauvages est mon propre jardin: je trouve toutes sortes de mauvaises herbes dans le potager et dans les différents coins et recoins, dans le pré et dans les haies alentour. Je ne tonds mon pré qu’un petit nombre de fois par an, ce qui permet à un grand nombre de plantes comestibles de s’y établir. Les champs des agriculteurs bio regorgent de mauvaises herbes, mais les pâturages pas trop fertilisés, les haies et la lisière des bois font également partie de mes sites de prédilection. Bien entendu, je me rends également bien volontiers en pleine nature, dans les forêts, au bord des ruisseaux et dans les Alpes. J’apprécie également les friches, les terrains abandonnés où l’homme n’a pas fait le « ménage » depuis un moment; les espèces pionnières abondent dans ces zones sauvages et l’on peut goûter pleinement le cycle de la nature. La solution la plus avisée consiste à s’en tenir toujours aux mêmes lieux: on apprend ainsi à les connaître peu à peu et l’on collecte de précieuses informations à leur sujet. On apprend ainsi combien de personnes (et de chiens) les fréquentent, comment l’agriculteur travaille sa terre, comment la nature évolue, si la population végétale est capable de se régénérer après une cueillette ou si l’on a récolté en quantité excessive. L’observation de la nature est l’une des principales activités du cueilleur. Nous acquérons ainsi un respect de la nature absolument déterminants pour notre manière d’être, surtout en ces temps où l’homme soumet la planète à des pressions de plus en plus importantes. Nous devons savoir combien de cueilleurs la nature est en mesure de supporter, afin que, emportés par notre enthousiasme,

Matériel nécessaire: pour la plupart des plantes, dont on récolte la partie supérieure de la tige ou de la hampe, plus jeune et donc plus tendre, un ongle du pouce suffisamment long est un outil très utile. Il nous permet également de repérer très rapidement en brisant la tige si la plante n’est pas déjà trop coriace. Bien sûr, j’utilise également un canif, qui me sert surtout pour les feuilles et les rosettes. Les ciseaux sont pratiques pour récolter les orties ainsi que toutes les herbes qui poussent en formant un coussin ou un tapis, dont il suffit simplement de couper la surface. Pour conserver les herbes, j’utilise des sachets en cellophane ou en plastique, qui permettent d’éviter qu’elles ne se dessèchent. La déshydratation est la pire ennemie des salades et des légumes, qui constituent l’essentiel de notre récolte. Des plantes flétries ne sont guère plus appétissantes. Pour les parties sensibles de petite taille et les fleurs, j’ai besoin de récipients rigides qui ferment bien, par exemple des boîtes de congélation. Je ne place qu’un seul type de plante dans chaque sachet ou récipient, afin de faciliter les opérations de vérification par la suite (une intruse est ainsi plus facile à repérer). En outre, cela me permet de décider au dernier moment ce que je vais préparer, une fois que je me trouve dans ma cuisine. Je ne ramasse que la quantité dont j’ai besoin, et je ne prélève jamais la totalité des plantes présentes sur un même site. C’est particulièrement important pour les plantes qui ne poussent pas plusieurs fois par an et pour les sites qui ont manifestement déjà été visités par d’autres cueilleurs. Après une visite, il faut dans la mesure du possible laisser le site dans l’état où on l’a trouvé: l’herbe ne doit pas avoir été trop piétinée, et les plantes comestibles doivent toujours être laissées en quantité suffisante pour pouvoir poursuivre leur croissance et se reproduire.

En haut à gauche : les friches, les zones sauvages, les talus escarpés et les bordures non entretenues sont des sites de cueillette très généreux. Les rochers (ci-contre) engendrent un microclimat — le stade de développement des plantes peut donc être extrêmement variable au sein d’une même région. En haut à droite : pour épargner la prairie, déplacez-vous en faisant de grands pas et en levant les pieds bien haut. Au milieu à droite : parfois, je cueille également les mauvaises herbes qui envahissent le champ d’un agriculteur bio — avec son accord bien entendu !


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La cueillette est nettoyée en grande partie sur place (en haut). Une fois à la maison, on commence par faire l’inventaire (en bas à gauche). En bas à droite : les ciseaux sont très utiles pour la cueillette, des orties par exemple. Page de droite : les différentes parties de la plupart des plantes doivent être cueillies séparément si on les réserve à des usages différents. Ci-contre, des boutons et des jeunes tiges de Crepis (voir page 289).


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38 l Papaveraceae

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Coquelicot Papaver rhoeas Papavéracées

Habitat Le coquelicot est une mauvaise herbe « typique » que l’on rencontre dans les champs de céréales (de plus en plus rarement malheureusement en raison de l’emploi d’herbicides), dans les jardins et sur les terrains incultes, dans les zones sèches et ensoleillées. Grâce à ses nombreuses graines, cette plante annuelle forme souvent de larges groupes.

Caractéristiques botaniques Au premier stade de leur développement, les nombreuses feuilles hérissées de poils et fortement découpées qui composent la rosette basale rappellent quelque peu la capselle bourse-à-pasteur, mais ont un aspect plus rêche et sont plus fines et délicates au toucher. Sur un sol riche, les rosettes peuvent devenir très buissonnantes. Les fleurs comportent quatre pétales d’un rouge éclatant avec une belle tâche sombre à la base. Les feuilles du pavot somnifère (Papaver somniferum), également comestibles, sont plus grandes et ont une consistance plus ferme ; elles sont glabres, non divisées et ont une couleur bleutée.

Cueillette et usage culinaire On cueille les jeunes feuilles avant la floraison et on les utilise crues dans les salades ; malgré leur pubescence, elles sont très fines et tendres ; leur goût rappelle un peu celui de la noisette et du concombre. Leurs pétales très décoratifs sont également comestibles. Les jeunes fruits encore verts sont délicieux à grignoter. Les feuilles peuvent être cuisinées comme des épinards, avec des échalotes rissolées et un peu de crème. Les graines sont utilisées en boulangerie et en pâtisserie, mais se marient également très bien avec la sauce pour les pâtes, le tofu ou la viande : il suffit de les faire griller quelques minutes à la poêle sans matière grasse, elles n’en seront que plus savoureuses. La seule partie de la plante qui peut être toxique à forte dose est le latex issu des fruits du pavot somnifère : il a des propriétés narcotiques, et sert à produire l’opium.

Risques de confusion Avec les autres espèces de pavot, qui peuvent toutes être consommées de la même façon. Certaines espèces sont protégées dans les Alpes.

En haut à gauche : jeune pied de coquelicot. En bas à gauche : les feuilles pubescentes retiennent la rosée. En bas à droite : les feuilles de coquelicot peuvent également être mélangées à de la salade.


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40 l Papaver rhoeas

Papaver rhoeas l 41

Salade de coquelicot aux pois chiches germés 1 pincée de sel marin aux herbes 1 c. à c. de moutarde 1 c. à s. de vinaigre de framboise 1 c. à s. d’huile d’œillette ou de noix grillée 1 c. à s. d’huile de tournesol désodorisée 50 g de pois chiches germés (voir conseil)

Mélanger tous les ingrédients de la vinaigrette. Faire cuire les pois chiches germés 5 minutes dans l’eau bouillante salée.

4 poignées de jeunes feuilles de coquelicot, d’oseille (page 107), de mouron des oiseaux (page 79) et de lampsane (page 268)

Mélanger les pois chiches et les feuilles à la vinaigrette.

Mon conseil : pour faire germer les pois chiches, les laisser tremper 8 heures dans l’eau froide, puis les égoutter, les rincer et les laisser germer à température ambiante dans un récipient plat muni d’un couvercle qu’on ne fermera pas complètement. Les rincer à l’eau de temps en temps et bien les égoutter. Les rincer abondamment une dernière fois avant usage. On peut utiliser cette même méthode pour faire germer les lentilles.

Blé et coquelicot réunis Pour les crêpes : 1 c. à s. de graines de pavot

Faire éventuellement griller les graines de pavot au four pendant 5 à 10 minutes à 150 °C.

100 g de farine complète fraîchement moulue 150 ml d’eau gazeuse 50 ml de crème 2 œufs 1 pincée de sel

Mélanger tous ces ingrédients de manière à obtenir une pâte à crêpes fluide, et laisser reposer 30 minutes. Faire cuire de fines crêpes dans une poêle antiadhésive graissée. Réserver.

Pour la garniture : 150 g de jeunes feuilles de coquelicot

Faire fondre les feuilles dans un peu d’eau dans une casserole à couvert. Laisser refroidir.

200 g de ricotta au lait de vache ou de chèvre 1 pincée de sel marin aux herbes Un peu de noix de muscade, poivre noir

Préparer la garniture en mélangeant tous ces ingrédients, garnir chaque crêpe puis la rouler. Enduire les crêpes d’un peu d’huile d’olive. Faire cuire au four à couvert pendant 20 minutes à 190 °C.


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50 l Urtica dioica

Beurre d’ortie 150 g de beurre doux 1 c. à c. de moutarde fine

Battre le beurre quelques minutes avec une fourchette.

1 c. à c. de sel marin aux herbes

Ajouter la moutarde et le sel et bien mélanger. Émincer finement les feuilles bien séchées avec un couteau aiguisé, mélanger avec le beurre et servir aussitôt sur du pain ou des crackers.

2 poignées de feuilles d’ortie

Mon conseil : le beurre d’ortie ne doit pas être préparé trop longtemps à l’avance, sinon il prend un goût désagréable.

Salade d’ortie et de tilleul Mélanger dans un saladier de jeunes fleurs d’ortie, de jeunes feuilles de tilleul et des fleurs d’acacia. Préparer une vinaigrette avec du sel et du poivre, du vinaigre de vin blanc, de l’huile de noix et de l’huile d’olive et mélanger.

Ci-dessus : beurre d’ortie. Page de droite : salade d’ortie et de tilleul.


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