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Benoît XVI : un grand théologien, humble serviteur (1927-2022)
Une jeunesse allemande
Joseph Aloisius Ratzinger naît le 16 avril 1927 à Marktl en Bavière, sous la République de Weimar, le samedi Saint ; il est baptisé le jour même.
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Troisième enfant de Joseph (1877-1959) et Maria (1884-1963), sa famille est d’un milieu plutôt modeste.
Fervent catholique, son père, officier de gendarmerie, s’opposait aux nazis qu’il traitait de criminels.
Au gymnasium de Traustein non loin de Salzbourg, Joseph Aloisius étudie le latin, le grec et la littérature qui le confortent dans la résistance à l’idéologie totalitaire.
Il reconnaîtra que l’atmosphère « mozartienne » de Salzbourg est pour beaucoup dans son goût pour la musique et le piano qu’il pratique, comme son frère Georg, avec un certain talent, avec une prédilection pour Bach et Mozart.
La biographie vaticane signale sa formation chrétienne, humaine et culturelle, mais souligne aussi les difficultés causées par le régime nazi : Sa Sainteté Benoît XVI rappellera qu’il avait vu son curé roué de coups par les nazis avant une célébration.
On connaît la forte hostilité du régime nazi vis-à vis de l’Eglise catholique. Il fut contraint, comme beaucoup de jeunes de son âge, de faire partie des jeunesses hitlériennes.
Un sacerdoce - un théologien
De 1946 à 1951, Joseph Ratzinger étudie la philosophie et la théologie à Freising puis à Munich. A la Saint Pierre et Paul de 1951, il est ordonné prêtre en même temps que son frère aîné Georg.
Dès l’année suivante, il enseigne à Freisig. Les études de théologie s’enchaînent et ne s’arrêteront pas : maîtrise sur Saint Augustin en 1953, professeur habilité avec un mémoire sur Saint Bonaventure en 1957. Puis il enseigne à Bonn, Munster, Tubingen, Ratisbonne (à partir de 1959).
De Vatican II à l’épiscopat
Cette grande valeur est expérimentée dans sa participation au concile Vatican II, confirmation de sa vocation théologique, ainsi qu’il le définit lui-même.

Le 25 mars 1977, Paul VI le nomme archevêque de Munich et Freising ; le 28 mai suivant, il est ordonné « Collaborateur de la Vérité », sa devise épiscopale.
En juin, il est nommé cardinal rattaché à l’église Santa Maria consolatrice al Tiburtino. On ne peut détailler, mais on souligne l’importance de ses publications, interventions en théologie.
En 1980, rapporteur à la 5ème assemblée générale du Synode des évêques sur le thème de la famille chrétienne, il propose une analyse précise et approfondie sur la situation de la famille dans le monde ; en soulignant la crise de la culture traditionnelle face à la mentalité technicienne purement rationnelle.
Préfet de la congrégation pour la Doctrine de la Foi
Nommé en novembre 1981 par Jean-Paul II à ce poste, il est également président de la commission pontificale biblique théologique internationale.
Sa puissance de travail est impressionnante.
Collaborateur précieux auprès de Jean-Paul II de façon ininterrompue, il est le président de la commission pour la préparation du catéchisme de l’Eglise catholique. On se souvient de ce Vendredi Saint où Jean-Paul II, très affaibli, icône de la souffrance, serrant le crucifix entre ses mains, écoute les paroles de celui qui lui succédera.

C’est lui aussi, en tant que Doyen du collège Cardinalice qui présida la messe d’obsèques de Jean-Paul II et prononça l’homélie avec pour fil conducteur « Suismoi ».
Sa Sainteté Benoît XVI
Le 19 avril 2005, Joseph Aloisius Ratzinger est élu pape. Premier pape allemand depuis le XIe siècle !

Il sera ce « simple et humble travailleur dans la vigne du Seigneur » qui se présenta à la loggia de la basilique SaintPierre, dans une soutane blanche aux manches trop courtes.
A l’issue de l’une de ses premières audiences publiques, ce théologien plus habitué à sa table de travail qu’aux bains de foule demande à ses proches ce que signifient tous ces téléphones portables pointés sur lui !
Par sa rigueur théologique et dogmatique, Benoît XVI marque souvent l’opinion. On lui reproche son conservatisme, son opposition à l’homosexualité, à l’avortement. Il combat fermement l’antisémitisme et la pédophilie.
Sa première encyclique publiée le 25 décembre 2005 : Deus Caritas concerne le cœur de la théologie chrétienne : « Dieu est amour ».
La deuxième, Spe Salvi (Sauvés par l’Espérance) en 2007, traite de l’espérance et de son lien avec la foi, en partant des fondements théologiques.
En 2009, Caritas in veritate (l’Amour dans la Vérité) développe certains aspects du développement durable, dans le respect de la dignité de l’homme.
Pendant son pontificat, Benoît XVI effectue 25 voyages hors d’Italie. Après huit ans de pontificat, il annonce le 11 février 2013, à la stupéfaction de tous, qu’il renonce à ses fonctions.
Il justifie sa décision par sa fatigue, l’affaiblissement de sa vitalité. Il a alors 86 ans.
Sa Sainteté Benoît XVI, pontife romain émérite
Tel est le titre qu’il porte, retiré dans le monastère Mater Ecclesiae dans les jardins du Vatican.
A un pape allemand, européen, succède un pape argentin, américain, quoique d’origine italienne.
Jusqu’ à sa mort à 95 ans, sa Sainteté Benoît XVI continue de travailler. Il ne fait que de rares apparitions pour les canonisations de Jean XXIII et de Jean-Paul II.

Il reçoit des visites : son frère Georg dont il fut toujours très proche. Leur sœur ainée Maria s’est occupée de Georg pendant de nombreuses années ainsi que de son frère Joseph, dont elle tapait les manuscrits.
On pense qu’elle a été non seulement la gouvernante de son plus jeune frère, mais aussi sa lectrice. Sa mort brutale en 1991 affecta profondément ses frères.
Quelques heures avant de s’éteindre, le 31 décembre 2022, dans un souffle, les dernières paroles de Benoît XVI sont pour Celui qu’il a servi durant toute son existence : « Jésus, je t’aime ».
Les obsèques de ce grand théologien sont célébrées le 5 janvier 2023, place Saint Pierre.
L’historien Christophe Dickès dira : « J’ai été frappé par son humilité », moine, philosophe ou simple journaliste, tous témoignent de leur attachement, comme des frères et sœurs, fils et filles de Benoit XVI.
Il affirmait le 1er novembre 2006 : « dans la communion des âmes, le simple temps terrestre est dépassé. Il n’est jamais trop tard pour toucher le cœur de l’autre et ce n’est jamais inutile. »
« Alors, touchons le sien ! » (Alexia Vidot « Cher Benoit XVI » Editions Emmanuel).
