3 minute read

Val-de-Reuil

Next Article
PFE du mois

PFE du mois

l’éco-quartier, modèle pour l’urbanisme durable du XXIe siècle

Une centaine d’années après la construction des premières cités-jardins théorisées par Ebenezer Howard, Philippe Madec s’illustre comme le nouveau précurseur d’une urbanité plus proche de la nature avec la livraison de l’éco-village des Noés à Val-de- Reuil (27), à une vingtaine de kilomètres de Rouen.

Advertisement

Le programme du quartier comprend 100 logements individuels, intermédiaires et collectifs zéro énergie, en basse consommation passive pour les logements locatifs, et BBC (bâtiment basse consommation) pour les logements en accession. Le programme comprend également une halle avec un magasin bio et une blanchisserie coopérative, une crèche municipale, une maison de jardiniers, des jardins familiaux bio et une exploitation d’horticulture bio, les créations, le fermet du parc des rives de l’Eure et une frayère à brochets. La gestion très fine des inondations ainsi que du compost en local font partie intégrante du projet comme la mise en place d’un compost, d’un réseau de chaleur et la mise à disposition de véhicules en autopartage.

Philippe Madec est un architecte fils d’ostréiculteur formé par Ciriani à l’Up7 Grand Palais à Paris de 1972 à 1979. Il tire sa manière de concevoir de la fusion de son apprentissage moderniste avec une conscience environnementale héritée de sa culture bretonne. Dans tous les travaux de Madec, une part importante est laissée à la théorie pour préparer les réponses aux questions futures de dérèglement climatique et de crise de l’énergie. Il cherche également à poser les bases d’une envie de créer un autre établissement humain, équitable et durable, pour faire collaborer en symbiose la terre et les siens. Ses projets sont souvent le fruit de discussions et de confrontations entre riverains, paysagistes, ingénieurs, sociologues, écologues, médiateurs… Pour donner du sens aux volontés locales. Il parle de «genius loci» et pense ambiance et matérialité de ses édifices en fonction du lieu. Les matières doivent être en majorité locales et respectueuses de l’environnement ; leur emploi est souvent inspiré d’une culture constructive locale et on retrouve toujours une grande économie de matières et une grande justesse d’emplois. Les matériaux sont choisis pour leurs qualités techniques et esthétiques.

Mon engagement relève d’un héritage, la Bretagne aux bords battus de mer transmet aux siens, par sa culture trempée, la force d’une accointance intime entre une société qui aime être ensemble et des éléments naturels qui expriment toute leur force avec une régularité obstinée.

Dans le projet de Val-de-Reuil, l’architecte est chargé de faire le lien entre l’urbanité du quartier de la gare à l’ouest et la vallée verte et bleue à l’est, il doit composer sa proposition architecturale en prenant en compte la proximité de l’Eure, capable d’inonder une partie du site. Cette contrainte d’inondabilité est assumée dans un projet paysager se transformant au fil des fluctuations de l’eau.

Village à part entière, l’éco-quartier propose une grande variété de logements, allant du logement simple au logement collectif, et également des équipements permettant une vie économique et sociale (magasin bio et jardins, crèche, jardin d’enfant…). A cette variété programmatique, s’ajoute une variété formelle avec une architecture de volumes simples mais variée par ses couleurs et ses matières organisées de manière à profiter de l’apport solaire sud dans la continuité d’une démarche passive. Philippe Madec refuse le greenwashing romantique au profit d’une architecture plus sensée et réfléchie selon les usages plutôt que peinte en vert. Toutes les pièces, y compris les salles de bains, sont éclairées naturellement. Chaque logement possède obligatoirement des ouvertures sur deux façades opposées pour permettre une ventilation naturelle. Une grande générosité de conception permet aussi d’offrir à budget réduit pour chaque logement un prolongement extérieur de manière à profiter de ce nouveau paysage urbain apaisé.

Le plan masse du quartier a été dimensionné de manière à profiter d’un ensoleillement naturel important permettant d’atteindre les objectifs de consommation zéro. La voiture reste en périphérie et le quartier tisse un réseau de circulations douces (piétons et cycle) qui confère une grande porosité à ce site. Des espaces publics sont dégagés ponctuellement pour créer des espaces de rencontres. La relative proximité des bâtiments et leur basse altimétrie permet de garder une dimension humaine à ce quartier qui aurait pu se trouver vite distendu sur une parcelle aussi vaste.

Antoine Viney

This article is from: