Comité Coubertin La Gazette
1er Semestre 2019
P
ierre de Coubertin (1863-1937) venait tout juste d’avoir 28 ans lorsque, à sa demande, il rencontra pour la première fois, le 2 janvier 1891 à Paris, le père Henri Didon (1840-1900). Le jeune homme était alors un actif
dirigeant de l’Union des Sociétés Françaises de Sports Athlétiques (USFSA) qu’il avait contribué à créer en 1887 et dont il escomptait qu’elle étendrait la place des disciplines « athlétiques », c’est-à-dire autres que la seule gymnastique, dans les établissements scolaires, à l’instar de ce qui se faisait dans d’autres pays, notamment en Angleterre. L’un des moyens de favoriser une telle évolution serait, à ses yeux, l’organisation de compétitions sportives auxquelles prendraient part communément des équipes de lycées publics et de collèges catholiques. Il s’en était ouvert en vain à plusieurs supérieurs de ces
Autour de l’Olympisme: le Père Didon et Pierre de Coubertin
institutions libres, diocésaines ou congréganistes. Certains n’y voyaient aucun intérêt pédagogique. D’autres avaient une objection de principe à ce rapprochement intempestif avec l’enseignement d’État : les jésuites notamment – dont on sait que, premières cibles et premières victimes des mesures de 1880 visant les congrégations non autorisées, ils n’avaient repris le contrôle de leurs collèges qu’à la faveur d’une tolérance de fait et grâce à des montages habiles impliquant des hommes de paille – campaient sur une position intransigeante vis-à-vis de la République laïque. Le père Didon, 50 ans, dominicain, était un esprit libéral
qui n’avait pas ces préventions à l’égard du régime en place. Orateur renommé dès la fin des années 1860, il avait été provisoirement interdit de prédication en 1880, Rome lui reprochant des propos imprudents.
par Yvon Tranvouez - Prof. d’Univ. émérite - Université de Brest
A
près une décennie passée dans l’ombre à documenter et rédiger un fort volume de près de 1 000 pages sur Jésus-Christ, il était à nouveau sur le devant de la scène catholique. Devenu en 1890 prieur du couvent
d’Arcueil et, par voie de conséquence, responsable de l’École Albert-le-Grand (à Arcueil) et de l’École Lacordaire (à Paris), il se trouvait à la tête d’un ensemble scolaire réputé mais qui, traversant une mauvaise passe financière, avait besoin d’être relancé.
L
es vertus pédagogiques de l’éducation physique lui étaient
d’autant moins étrangères qu’il avait été, adolescent, élève du petit séminaire du Rondeau, près de Grenoble, où des hellénistes passionnés avaient mis en place des « jeux olympiques » scandant, tous les quatre ans, la vie de l’établissement, les années intermédiaires étant l’occasion de
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Jésus-Christ, deux volumes rédigés par le Père Didon
compétitions préparatoires qualifiées de « préludes olympiques ».