Perfectio - Collectivité Printemps 2024

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votre référence en formation des adultes

COLLECTIVITÉ

PRINTEMPS 2024

Table des matières

Dans cette revue, le générique masculin est employé dans le simple but d’alléger le texte. Cette publication respecte l’orthographe traditionnelle. Les opinions exprimées dans cette publication n'engagent que les auteurs et ne représentent pas nécessairement celles de la Coalition ontarienne de formation des adultes (COFA).

MOT DE LA RÉDACTRICE EN CHEF 4 BIEN(S) PUBLIC(S), BIEN(S)COMMUN(S) ET COMMUN(S) DE QUOI EST-IL QUESTION? 5 BIEN COMMUN ET JUSTICE SOCIALE 9 LES NOTIONS DE BIEN(S) PUBLIC(S), DE BIEN(S) COMMUN(S) ET DE COMMUN(S) EN ÉDUCATION ET EN FORMATION DES ADULTES 10 RETOUR SUR LE FORUM CONSTRUIRE L’AVENIR  : L’ÉDUCATION DES ADULTES AU SERVICE DU BIEN PUBLIC ET DU BIEN COMMUN 14 L’ALPHABÉTISATION EN MILIEU MINORITAIRE ET LE BIEN COMMUN 20 VILLES APPRENANTES DE L’UNESCO : UN RÉSEAU DE 356 VILLES À TRAVERS LE MONDE 22 EDMONTON : PREMIÈRE VILLE CANADIENNE À INTÉGRER LE RÉSEAU MONDIAL UNESCO DES VILLES APPRENANTES 25 EXEMPLES DE VILLES APPRENANTES 26 DÉCLARATION DE PÉKIN SUR LA CRÉATION DES VILLES APPRENANTES 30 LA LITTÉRATIE COMMUNAUTAIRE AU SERVICE DES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES 32 LES LITTÉRATIES POUR LE BIEN COMMUN 36 SOMMET NATIONAL SUR L’APPRENTISSAGE TOUT AU LONG DE LA VIE 38 RÉDACTRICE EN CHEF Gabrielle Lopez COORDONNATRICE Laurence Buenerd RÉVISION LINGUISTIQUE Lauraine Teodoro + Holly Hunter CORRECTION D'ÉPREUVES Lydienne Guidoin GRAPHISME Teixeira Design IMPRESSION Bradda Printing Services inc

LE BIEN COMMUN Mot de la rédactrice en chef

Dans ce numéro, nous avons eu envie d’explorer la thématique du bien commun, une notion qui englobe ce qui est souhaité pour le développement et le bien-être d’une communauté, avec un ensemble de valeurs, de visées communes et d’idéaux qui orientent des actions collectives et dont les bénéfices sont à partager entre tous les membres de cette communauté.

Pour cette exploration, nous avons fait appel à l’expertise de l’Institut de coopération pour l’éducation des adultes (ICÉA). En lisant les articles de sa chercheuse en éducation des adultes, Émilie Tremblay, vous en apprendrez plus sur le bien commun et les communs.

La raison pour laquelle nous avons eu envie de vous concocter un numéro sur le bien commun est en grande partie liée aux passerelles qui existent entre cette notion et l’éducation tout au long de la vie.

Plusieurs publications de l’UNESCO ont porté sur la notion de bien commun ces dernières années, sur le plan du droit à l’éducation, mais aussi sur celui d’un engagement collectif en faveur de l’éducation perçu comme un bien commun de l’humanité.

C’était aussi la thématique du dernier Forum de l’ICÉA de juin 2023. Émilie Tremblay relate comment les participantes et participants du Forum « Construire l’avenir : l’éducation des adultes au service du bien public et du bien commun » ont collectivement réfléchi aux façons de favoriser et de renforcer le bien commun en éducation des adultes.

Mais cette réflexion n’est pas seulement menée au Canada. Avez-vous entendu parler du Réseau mondial des villes apprenantes de l’UNESCO? Son but est de favoriser l’équité et l’inclusion sociale, le développement économique et le développement durable à travers l’apprentissage tout au long de la vie des citoyennes et citoyens des villes participantes. Selon la Banque Mondiale, 70 % de la population sera urbaine d’ici 2050, les villes auront donc un rôle important à jouer dans la recherche de solutions à leurs défis communs et plus largement à l’avenir de l’humanité. Vous pourrez découvrir comment ailleurs dans le monde, trois des villes de ce Réseau, aux prises avec des problématiques qui leur sont propres, trouvent des façons novatrices ou traditionnelles d’encourager leurs populations de tous les âges à apprendre et à continuer à apprendre.

Enfin, nous nous sommes interrogés sur les liens existants entre la littératie communautaire et le bien commun. C’est Isabelle Coutant, Agente de recherche et de développement en éducation des adultes à l’ICÉA, qui fait les liens dans ses articles entre la littératie communautaire, le bien commun et les communautés francophones en situation minoritaire, et qui illustre par des exemples concrets comment les activités de renforcement de la littératie au sein des communautés contribuent aussi au bien commun.

Un numéro donc, qui s’est donné pour mission de remettre en question le modèle utilitaire qui limite l’éducation à un simple investissement socio-économique individuel. Nous avons bon espoir qu’il vous offrira une lecture inspirante et porteuse d’optimisme.

Nous tenons à remercier Émilie Tremblay ainsi qu’Isabelle Coutant de l’ICÉA pour leur contribution indispensable à ce numéro.

Bien(s) public(s), bien(s) commun(s) et commun(s) DE QUOI EST-IL QUESTION?

Écrit par Émilie Tremblay, chercheuse en éducation des adultes, ICÉA

Cet article reprend certains extraits d’un article d’Émilie publié en 2023 dans la revue Apprendre + Agir.

ON PARLE DE PLUS EN PLUS DU BIEN COMMUN DANS LE DÉBAT PUBLIC, QUE CELA SOIT POUR RÉFÉRER À DES ENJEUX RELATIFS À L’ÉDUCATION, À LA SANTÉ, À L’ENVIRONNEMENT ET AU DÉVELOPPEMENT DURABLE OU ENCORE À LA GESTION DES RESSOURCES NATURELLES, DU NUMÉRIQUE ET DES CONNAISSANCES. CETTE NOTION EST ÉGALEMENT MOBILISÉE DANS UN GRAND NOMBRE DE DISCIPLINES (ÉCONOMIE, DROIT, ENVIRONNEMENT, PHILOSOPHIE, SCIENCE POLITIQUE, ÉDUCATION, ETC.).

L’attribution du prix Nobel d’économie à Elinor Ostrom en 2009 pour ses travaux sur les communs, en particulier sur la gouvernance économique1, a donné une nouvelle visibilité à la notion de bien(s) commun(s) et de commun(s). De même, les crises écologiques telles que les changements climatiques et la perte de la biodiversité, ainsi que l’intérêt pour les communs de la connaissance ou communs informationnels2 ont contribué au regain d’intérêt pour les travaux et la théorie des communs3

Biens

Communauté

Bien partagé ÉtatCommun Production Droits

Bien collectif

Exclusif

Propriété Collectif

Bienprivé

Biencollectif

Partage

Intérêt collec tif Appartenance

Ressources

Intérêt général

Bien commun Gouvernance

Règles

1 Ostrom, E. (2010). Gouvernance des biens communs. Pour une nouvelle approche des ressources naturelles. Bruxelles, De Boeck (éd. originale Cambridge University Press, 1990).

2 Voir : Le Crosnier, H. (2018). « Une introduction aux communs de la connaissance », tic & société 12(1) : 13-41. https://doi.org/10.4000/ticetsociete.2481

3 Voir : Buchs, A. C. Baron, G. Froger et A. Peneranda (2019). « Communs (im)matériels : enjeux épistémologiques, institutionnels et politiques », Développement durable et territoires 10(1). https://doi.org/10.4000/developpementdurable.13701; Dardot P. et C. Laval (2014). Commun : essai sur la révolution au XXIe siècle. Paris, La Découverte.

Droitfondamental
publics Ressources communes
Propriétécommune Bien-être Bien Bienpublic

Ces dernières années, plusieurs publications de l’UNESCO ont porté sur la notion de bien commun, notamment « Repenser l’éducation : vers un bien commun mondial ? »4. Plus récemment, cette notion se retrouve aussi au cœur du rapport de la Commission internationale sur les futurs de l’éducation : « Repenser nos futurs ensemble : un nouveau contrat social pour l’éducation »5. Ce nouveau contrat social pour l’éducation repose sur deux principes : le droit à l’éducation et l’engagement en faveur de l’éducation en tant que projet public et en tant que bien commun de l’humanité.

Plusieurs notions apparentées à celle de bien commun sont utilisées tantôt comme des synonymes, tantôt comme étant complémentaires ou différentes. On peut mentionner les notions suivantes : biens communs, commun(s), biens communs mondiaux, ressources communes et propriété commune. Il en est de même pour la notion de bien public. En voici quelques exemples : service public, biens publics globaux, intérêt général, droit fondamental, bien collectif, bien essentiel, biens partagés, etc.

LA NOTION DE BIEN(S) PUBLIC(S)

Mentionnons tout d’abord qu’un service public n’est pas nécessairement un bien public, et inversement. Un service public peut être fourni par l’État ou par une autorité publique (municipalité, établissement public, etc.), mais il peut également être donné par une entreprise privée. Au fondement de la notion de service public, il y a l’idée que certaines activités ou que certains services sont essentiels et stratégiques, et doivent être accessibles à toutes et à tous. Selon les contextes, les pays, les villes ou les communautés, la définition de service public change, ce qui influence la vision que nous avons du rôle joué par le secteur privé.

Selon certaines théories économiques, peut être considéré comme un bien public, un bien non rival ou non excluable6 . Cela veut dire que c’est un bien dont la consommation par une personne ne doit pas en empêcher la consommation par une autre personne (« non-rivalité des consommations ») et que personne ne peut être exclu de la consommation de ce bien (« non-exclusion des utilisations »). Les biens répondant à ces deux critères qu’ils soient locaux, nationaux, voire mondiaux, ce qu’on appelle les biens publics mondiaux, profiteraient à tout le monde et ne seraient pas soumis à la concurrence du marché. Cette approche économique des biens publics a été critiquée.

Dans d’autres écrits, lorsqu’il est question de bien public, on réfère souvent à deux notions : l’intérêt général ou l’utilité publique et l’accès indifférencié à ce bien à tout le monde. Le bien public réfère également à l’action de l’État, en particulier, aux politiques publiques qui sont mises en place.

LES NOTIONS DE BIEN(S)

COMMUN(S) ET DE COMMUN(S)

Le bien commun (utilisé au singulier) réfère à ce qui est souhaité pour le développement et le bien-être d’une communauté, d’une collectivité politique ou d’une société. Cette notion partage des similitudes avec celle de bien public.

La notion de bien commun renvoie donc à un ensemble de valeurs, de visées communes et d’idéaux orientant l’action collective dont les bienfaits seraient partagés entre tous les membres d’une communauté, d’un groupe ou de la société.

Les biens publics sont considérés comme directement liés aux politiques publiques de l’État. Le terme public est souvent source de malentendus : on comprend à tort que les biens publics sont des biens fournis par le secteur public

(UNESCO, 2015, p. 86).

4 UNESCO (2015). Repenser l’éducation : vers un bien commun mondial. Paris, UNESCO. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000232696/PDF/232696fre.pdf.multi

5 UNESCO (2021). Repenser nos futurs ensemble : un nouveau contrat social pour l’éducation. Paris, UNESCO. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000379705/PDF/379705fre.pdf.multi

6 Boudes, P. et C. Darrot (2016). « Biens publics : construction économique et registres sociaux », Revue de la régulation (19). https://doi.org/10.4000/regulation.11805

6 Bien commun et AFB
On ne peut définir le bien commun qu’en fonction de la diversité des contextes et des conceptions du bien-être et de la vie commune.

Chaque communauté aura ainsi sa propre compréhension d’un contexte spécifique du bien commun. Étant donné la diversité des interprétations culturelles de ce qui constitue un bien commun, les politiques publiques devraient prendre en compte et favoriser cette diversité de contextes, de visions du monde et de systèmes de savoirs tout en respectant les droits fondamentaux (UNESCO, 2015, p. 87).

Selon l’UNESCO, le bien commun doit être défini « en fonction de la diversité des contextes et des conceptions du bien-être et de la vie commune »7. Selon les contextes culturels, les lieux et les époques, le bien commun ne sera donc pas compris et défini de la même manière.

À côté de cette notion de bien commun (au singulier) entendu comme ce qui est souhaité pour la communauté ou la société, comme des visées communes, des valeurs ou des idéaux, il y a aussi des ressources qui sont considérées comme étant des biens communs ou des communs. Un bien commun peut être matériel (eau, air, forêt, semence, etc.) ou immatériel (connaissances, données, logiciel, code génétique, paix, éducation, etc.).

Pour définir ce que sont les biens communs, il est courant de référer à la notion d’appartenance ou de propriété. D’après Proulx (2004), « Un bien est commun lorsque, en raison de l’intérêt général, il appartient à tous [et à toutes] »8 c’est-à-dire à l’ensemble de la communauté plutôt qu’à une personne ou à une organisation. Il ne s’agit donc pas d’un « bien personnel ni d’un bien appartenant à un groupe restreint (UNESCO, 2015, p. 87) ».

La question de la gouvernance est également un critère utilisé pour définir les biens communs. Pour qu’un bien soit un bien commun, il devrait y avoir une gestion démocratique et collaborative d’une ressource par une communauté, une gouvernance partagée à l’issue de choix faits par cette communauté. Il y a ici une différence majeure par rapport au bien public.

La notion de biens communs ne renvoie donc pas uniquement à des ressources, mais également la communauté en action règles de gouvernance que celle-ci se donne9 Cette vision ne fait pas l’unanimité. Verhaegen mentionne qu’il faut aller au-delà de cette triade (ressources, communauté et règles de gouvernance)10 .

Ces biens communs, dont parle Ambrosi, sont appelés par d’autres des « communs »11. La notion de communs renvoie à un ensemble d’initiatives, de pratiques sociales collectives, de pratiques citoyennes, de systèmes sociaux et d’actions collectives visant à produire, à protéger, à valoriser ou à gérer des biens ou des ressources en commun, à créer ou à développer des communs. Les communs sont des « lieux de négociation lieux de négociation » et « d’expression de la société » et « d’expression de la société »12 .

Le mouvement des communs est pluriel. Il regroupe une diversité de personnes et d’organisations, sur les plans local, national et international, les « commoners », qui participent à la réflexion, à la construction et à la mise en pratique des communs, qui peuvent être des communs environnementaux, des communs culturels, des communs de la connaissance, des communs éducationnels, etc.

7 UNESCO (2015). Repenser l’éducation : vers un bien commun mondial. Paris, UNESCO, p. 87. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000232696/PDF/232696fre.pdf.multi

8 Proulx, J.-P. (2004). « L’éducation, un bien commun très particulier », Éthique publique 6(1). https://doi.org/10.4000/ethiquepublique.2053

9 Ambrosi, A. (2012). Le bien commun est sur toutes les lèvres. Remix The Commons. https://wiki.remixthecommons.org/index.php/Le_bien_commun_est_sur_toutes_les_l%C3%A8vres

10 Verhaegen, É. (2018). « Des biens communs au commun », Les Politiques Sociales 1-2(1), p. 19-33. https://doi.org/10.3917/lps.181.0019

11 Pour en savoir plus, voir : Bollier, D. et Helfrich, S. (2022). Le pouvoir subversif des communs, Paris, Éditions Charles Léopold Mayer (traduction collective de l’anglais coordonnée par Olivier Petitjean).

12 Le Crosnier, H. (2011). « Une bonne nouvelle pour la théorie des biens communs », Vacarme (56), p. 92-94. https://doi.org/10.3917/vaca.056.0092

7 Bien commun et AFB

On parle de « bien commun » chaque fois qu’une communauté de personnes est animée par le même désir de prendre en charge une ressource dont elle hérite ou qu’elle crée et qu’elle s’auto-organise de manière démocratique, conviviale et responsable pour en assurer l’accès, l’usage et la pérennité dans l’intérêt général et le souci du ‘bien vivre’ ensemble et du bien vivre des générations à venir (Ambrosi, 2012).

En somme, les notions de bien(s) public(s), de bien(s) commun(s) et de commun(s) sont comparables sur certains points et se distinguent sur d’autres. Pour reprendre Rita Locatelli, il nous semble intéressant de penser les notions de bien public et de bien commun comme « une sorte de continuum, dont le but est de mettre en place des institutions politiques démocratiques qui permettent aux citoyennes et aux citoyens d’avoir

Figure 2 : La triade des communs Matérielles ou immatérielles

davantage leur mot à dire dans les décisions qui touchent leur bien-être »13. Dans cette optique, en éducation et en formation des adultes, cela impliquerait de mettre les personnes apprenantes au centre, de les impliquer dans les processus de décision les concernant et dans la coconstruction des politiques publiques.

Groupes de personnes, association, collectivité, etc.

Partagées, définies en commun

8 Bien commun et AFB
L’éducation
bien public et bien commun : Remodeler la gouvernance de l’éducation dans un contexte en mutation », Recherche et prospective en éducation :
13 Locatelli, R. (2018). «
comme
Réflexions thématiques (22). Paris, UNESCO. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000261614_fre
Ressources Communauté
Règles de gouvernance

Bien commun et justice sociale

LES NOTIONS DE BIEN COMMUN ET DE JUSTICE SOCIALE SONT LIÉES.

POUR CERTAINES PERSONNES, LA JUSTICE SOCIALE EST NÉCESSAIRE POUR FAVORISER LE BIEN COMMUN.

QU’EST-CE QUE

LA JUSTICE SOCIALE?

La justice sociale implique de réduire les inégalités, de lutter contre les différentes formes de discriminations et de reconnaître leurs causes ainsi que de promouvoir et de garantir les droits de la personne. La justice sociale vise donc à assurer l’égalité des droits et l’équité entre toutes les personnes. Travailler pour plus de justice sociale c’est vouloir que toutes les personnes puissent participer pleinement à la société et avoir accès à une vie décente.

L’équité est synonyme de justice, c’est-à-dire que les personnes, quelle que soit leur identité, sont traitées de manière juste1 .

Le philosophe John Rawls a écrit un ouvrage fondateur de la théorie de la justice sociale2. Depuis, de très nombreux écrits ont été produits sur la justice sociale. Selon le ministère de l’Éducation de l’Ontario, la justice sociale est fondée « sur la conviction que chaque individu et chaque groupe d’une société donnée a le droit à l’égalité des chances, aux mêmes droits civils, et à la pleine participation à cette société et à ses libertés et responsabilités, qu’elles soient d’ordre social, éducatif, économique, institutionnel ou moral »3

Selon les Nations Unies, la justice sociale est « fondée sur l’égalité des droits pour tous les peuples et la possibilité pour tous les êtres humains sans discrimination de bénéficier du progrès économique et social partout dans le monde. Promouvoir la justice sociale ne consiste pas simplement à augmenter les revenus et à créer des emplois. C’est aussi une question de droits, de dignité et de liberté d’expression pour les travailleurs et les travailleuses, ainsi que d’autonomie économique, sociale et politique »4 .

Il y a plusieurs types ou conceptions de la justice sociale : la justice sociale distributive, la justice sociale redistributive ou réparatrice et la justice sociale commutative. Aujourd’hui, des auteurs et auteures font des liens entre la justice sociale et la justice climatique.

POUR EN SAVOIR PLUS

Fraser, N. (2011). Qu’est-ce que la justice sociale? Reconnaissance et redistribution. La Découverte. Vargas, C. (2017). Envisager l’apprentissage tout au long de la vie du point de vue de la justice sociale. Réflexions thématiques sur la recherche et prospective en éducation, 21, 1-15. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/ pf0000250027_fre

1 https://edi.uqam.ca/lexique/equite-diversite-inclusion/

2 Rawls, J. (1987), Théorie de la justice. Paris, Seuil, (éd. originale, 1971).

3 Ministère de l’Éducation (2014). Équité et éducation inclusive dans les écoles de l’Ontario. Lignes directrices pour l’élaboration et la mise en œuvre de politiques, p.99, repéré à l’URL : https://files.ontario.ca/edu-equity-inclusive-education-guidelines-policy-2014-fr-2022-01-13.pdf

4 https://www.un.org/fr/observances/social-justice-day

9

LES NOTIONS DE BIEN(S) PUBLIC(S), DE BIEN(S) COMMUN(S) ET DE

COMMUN(S)

en éducation et en formation des adultes

Écrit par Émilie Tremblay, chercheuse en éducation des adultes, ICÉA

LE BIEN PUBLIC EN ÉDUCATION

OU L’ÉDUCATION COMME BIEN PUBLIC

Affirmer que l’éducation est un bien public implique de reconnaître à l’État et aux pouvoirs publics un rôle de premier plan. L’État exerce en effet différentes responsabilités telles que la réglementation, la gestion, l’élaboration de politiques et de programmes, le financement et l’offre de services éducatifs.

Rita Locatelli (2018)1 identifie trois facettes du principe d’éducation comme bien public :

• comme vision;

• comme priorité politique;

• comme principe de gouvernance.

Elle explique : « Qu’il soit compris comme une vision humaniste, une priorité politique ou un principe de gouvernance, le principe d’éducation comme bien public renvoie à la définition et à la protection des intérêts collectifs de la société et à la responsabilité centrale qui incombe à l’État en la matière »2 .

En éducation et en formation des adultes, les gouvernements (provinciaux ou nationaux) jouent un rôle de premier plan, entre autres pour tout ce qui concerne la formation de base3 .

Bien entendu, ils sont loin d’être les seuls acteurs impliqués.

L’écosystème de l’éducation et de la formation des adultes implique de nombreuses organisations autant dans le secteur public, communautaire, associatif que dans le secteur privé. On y retrouve également plusieurs formes d’éducation (formelle,

non formelle, informelle) ainsi qu’une multitude d’approches et de philosophies diverses.

Affirmer que l’éducation est un bien public implique aussi qu’elle bénéficie à la société dans son ensemble. L’éducation a effectivement des retombées positives pour l’ensemble de la société, que cela soit sur la santé de la population ou sur la réduction de la criminalité et des inégalités socioéconomiques. L’éducation des adultes joue elle aussi un rôle important dans la société. Elle favorise l’épanouissement et l’autonomie des personnes, leur intégration sociale et leur participation active à la société (activités économiques, communautaires et politiques), ainsi que leur insertion et leur mobilité en emploi. De plus, les compétences en littératie que les personnes acquièrent ont des impacts notamment sur l’emploi, la rémunération, la participation citoyenne, la santé et la confiance en soi4. Le développement de ces compétences aide à réduire les coûts individuels et sociaux associés à un faible niveau de littératie.

1 Locatelli, R. (2018). « L’éducation comme bien public et bien commun : Remodeler la gouvernance de l’éducation dans un contexte en mutation », Recherche et prospective en éducation : Réflexions thématiques (22). Paris, UNESCO. https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000261614_fre

2 Ibid, p. 3.

3 https://www.tcu.gov.on.ca/fre/eopg/programs/lbs.html

4 ICÉA (2018). Lutte à l’analphabétisme. Circonscrire le problème et trouver des solutions. Avis à M. Sébastien Proulx, ministre de l’Éducation, du Loisir et du Sport, dans le cadre de l’élaboration d’une stratégie d’alphabétisation. Montréal, Institut de coopération pour l’éducation des adultes. 42 p. https://icea.qc.ca/sites/icea.qc.ca/files/politiques-alpha_analyse-et-problematique_avis-ministre-proulx_avril2018.pdf

TROIS FACETTES DU PRINCIPE D’ÉDUCATION COMME BIEN PUBLIC (LOCATELLI, 2018)

COMME APPROCHE/VISION

Pour réaffirmer une vision humaniste/intégrée de l’éducation en se démarquant d’une approche plus utilitariste

COMME PRIORITÉ POLITIQUE

Pour préserver l’intérêt général et le développement sociétal/collectif en se démarquant d’une perspective individualiste

COMME PRINCIPE DE GOUVERNANCE

Pour réaffirmer le rôle de l’État comme garant/ gardien/responsable de l’éducation, à la lumière de l’implication croissante d’acteurs non étatiques dans l’entreprise éducative à tous les niveaux

LE BIEN COMMUN EN ÉDUCATION OU L’ÉDUCATION COMME BIEN COMMUN

Proulx écrit que l’éducation peut être considérée comme un bien commun, car « elle est indispensable au maintien et au développement de la société tout entière, autant comme société civile que comme communauté politique »5 . La notion de bien commun en éducation met également l’accent sur les objectifs de l’éducation en tant qu’entreprise sociétale collective plutôt que comme investissement individuel tel que le défend la théorie du capital humain.

Pour être considérée comme un bien commun ou comme un commun, l’éducation doit faire l’objet d’une construction collective et évolutive élaborée démocratiquement. C’est pourquoi un ensemble de secteurs et de lieux de formation sont davantage des biens publics, car ils sont sous la responsabilité de l’État qui prend les décisions et en assure la gestion. Toutefois, cela n’empêche pas que leurs actions puissent contribuer au bien commun.

Faire de l’éducation un bien commun ou un commun requiert des transformations pour favoriser plus de coopération de même qu’une plus grande participation des citoyennes et des citoyens ainsi que des communautés afin de construire des systèmes éducatifs plus démocratiques, plus inclusifs et plus adaptés aux spécificités et aux réalités des milieux (Locatelli, 2018). Cette démocratisation requiert aussi la consultation et la participation des citoyennes et des citoyens ou des communautés à l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques.

La notion d’éducation considérée comme un bien commun réaffirme sa dimension collective en tant qu’entreprise sociale commune avec une responsabilité partagée et un engagement en faveur de la solidarité ( UNESCO, 2015 : 87)

5 Proulx, J.-P. (2004). « L’éducation, un bien commun très particulier », Éthique publique 6(1). https://doi.org/10.4000/ethiquepublique.2053
11 Bien commun et AFB

DES EXEMPLES DE BIENS COMMUNS OU DE COMMUNS EN ÉDUCATION.

• LA CRÉATION ET LE PARTAGE DE RESSOURCES ÉDUCATIVES LIBRES (REL);

• L’UTILISATION DES LICENCES CREATIVE COMMONS;

• L’UTILISATION DE LOGICIELS LIBRES;

• LA MISE EN PLACE D’ATELIERS ET D’ESPACES DE CRÉATION, DE PARTAGE ET DE COLLABORATION;

• LE DÉVELOPPEMENT DE COMMUNAUTÉS D’APPRENTISSAGE;

• LE PARTAGE DE SAVOIRS ENTRE PAIRS.

On peut citer quelques exemples spécifiques de communs développés pour et par le milieu de l’éducation et de la formation des adultes.

La plateforme Mahara, une application « open source », en est un exemple6. C’est un portfolio numérique complet qui comprend des fonctionnalités de réseau social pour permettre la création de communautés d’apprentissage. Il existe des communautés pour la formation générale des adultes (FGA) et la formation professionnelle (FP). Le logiciel libre Passages, un portfolio transdisciplinaire, permet la reconnaissance des acquis et des compétences ainsi que la validation des acquis de l’expérience (acquis expérientiels et extrascolaires)7 .

Parallèlement à ces communs informationnels et numériques, il existe d’autres types de communs. L’éducation populaire en fait partie. Elle est au cœur des pratiques de nombreuses organisations et institutions, et un véritable outil de transformation sociale. Les centres d’éducation populaire de Montréal (CEP) – créés par des citoyennes et des citoyens pour agir dans leur milieu, et gérés de façon collective – sont un autre exemple de communs. Il y a quelques années, le rôle des six centres d’éducation populaire de Montréal, la spécificité de leur approche et de leurs pratiques éducatives, avait amené Bourret et Ouellet (2006) à les présenter comme un bien commun8. Parmi les communs, nous pouvons également inclure les groupes d’alphabétisation populaire9 . L’alphabétisation populaire implique une prise en charge collective du milieu dans une visée de transformation sociale. Les groupes sont autonomes et gérés démocratiquement.

6 https://mahara.org/

7 https://epassages.ca/

Les communs en éducation et en formation des adultes mettent en évidence de nouvelles façons d’apprendre, de former et de se former, de travailler et de partager des connaissances et des compétences. Bien entendu, des personnes et des organisations travaillaient déjà à faire « en commun » ou à « faire du commun » bien avant qu’on parle de communs en éducation. On peut penser à l’éducation populaire entre autres.

Pour finir, dans un contexte de développement des EdTech10 , particulièrement dans le secteur privé, les communs sont une alternative importante. La communauté du logiciel libre en est un bel exemple ou encore le réseau des Fab Labs. Les logiques contributives et collaboratives sont au cœur des communs. Les communs favorisent le partage de savoirs, de compétences, d’expertises, d’outils et de ressources. Ils favorisent également la participation, la collaboration et l’implication des citoyennes ou des citoyens ou encore des personnes apprenantes dans divers projets et processus décisionnels ainsi que la gestion collective et communautaire. Il importe également que ces voix soient entendues, prises en compte et intégrées dans l’élaboration de politiques publiques en éducation, de manière générale, et en éducation et en formation des adultes, en particulier.

8 Bourret, G. et C. Ouellet. (2006). Six centres d’éducation populaire de Montréal : un bien commun. Rapport de recherche. Alliance des centres d’éducation populaire de Montréal - Inter Cep et Service aux collectivités, UQAM, 65 p.

9 https://rgpaq.qc.ca/

10 « Le secteur EdTech englobe l’ensemble des organisations dotées d’un savoir-faire technologique ou d’outils technologiques innovants dédiés à la transmission du savoir, à l’apprentissage, aux échanges de connaissances ainsi qu’à l’assistance pédagogique ». Voir : https://www.edteq.ca/wp-content/uploads/2021/09/etude-du-secteur-des-technologies-numeriques-educatives.pdf

12 Bien commun et AFB

LES RESSOURCES ÉDUCATIVES LIBRES (REL) SONT DES MATÉRIELS D’APPRENTISSAGE, D’ENSEIGNEMENT, ET DE RECHERCHE SUR TOUT FORMAT ET SUPPORT, RELEVANT DU DOMAINE PUBLIC OU BIEN PROTÉGÉS

PAR LE DROIT D’AUTEUR ET PUBLIÉS SOUS

LICENCE OUVERTE, QUI AUTORISENT LEUR CONSULTATION, LEUR RÉUTILISATION, LEUR UTILISATION À D’AUTRES FINS, LEUR

ADAPTATION ET LEUR REDISTRIBUTION GRATUITES PAR D’AUTRES (UNESCO, 2019).

13

RETOUR SUR LE FORUM

CONSTRUIRE

L’AVENIR  : l’éducation des adultes au service du bien public et du bien commun

Émilie Tremblay, chercheuse en éducation des adultes, ICÉA

Les 7 et 8 juin 2023, l’Institut de coopération pour l’éducation des adultes (ICÉA) a organisé le forum Construire l’avenir : l’éducation des adultes au service du bien public et du bien commun. Ce forum avait pour but d’amener les participants et participantes à réfléchir collectivement aux façons de favoriser et de renforcer le bien commun en éducation des adultes et de mettre en place des chantiers de travail prioritaires pour relever les défis majeurs en éducation des adultes, avec comme finalité de contribuer au bien public et au bien commun.

POURQUOI UN FORUM SUR LE THÈME DU BIEN PUBLIC ET DU BIEN COMMUN EN ÉDUCATION

DES ADULTES?

Depuis plusieurs années, l’ICÉA documente certaines transformations du monde de l’éducation des adultes, notamment l’augmentation et la diversification des lieux d’éducation, de formation et d’apprentissage des adultes. Dans le secteur privé, par exemple, l’offre de formation en ligne s’est considérablement développée, en particulier avec la multiplication des plateformes numériques d’apprentissage telles que Coursera, Udemy, Udacity et EdX. Des auteurs utilisent d’ailleurs la notion de « plateformisation de la formation » pour décrire cette transformation dans l’organisation de la production et de la valorisation des contenus éducatifs. Les acteurs privés ne sont pas les seuls à occuper ce créneau, mais ils y sont particulièrement nombreux.

Par ailleurs, dans la société, les demandes de connaissances et de compétences dans différentes sphères de la vie quotidienne sont omniprésentes (numérique, santé, finances, environnement et développement durable, etc.). Dans cet environnement éducatif en pleine effervescence, l’éducation et la formation des adultes, une composante de l’apprentissage tout au long de la vie, apparaît plus que jamais nécessaire, d’autant plus que nous faisons face à différentes crises, notamment écologiques, qui, pour être surmontées, impliquent de la part des citoyens et des citoyennes de développer de nouvelles compétences.

C’est dans ce contexte de transformation et de recomposition de l’éducation des adultes qu’il est apparu pertinent à l’équipe de l’ICÉA de réfléchir aux notions de bien public et de bien commun. Il nous a semblé que ces notions pouvaient nous aider à mieux saisir les changements en cours et à (re)penser le rôle de l’État et de toutes les parties prenantes de l’éducation des adultes. L’idée d’un forum, après la pandémie de COVID-19, est apparue tout indiquée pour réunir les gens autour de cette thématique.

LE FORUM : UNE DÉMARCHE

DE COCONSTRUCTION

EN

TROIS TEMPS

Le forum a été précédé d’une démarche collaborative qui a impliqué entre autres de consulter une diversité de personnes et d’organisations œuvrant en éducation et en formation des adultes. Cette consultation a permis de recueillir leurs visions de l’éducation et de la formation des adultes, leurs points de vue sur les enjeux actuels et leur compréhension des notions de bien public et de bien commun.

COCONSTRUCTION

• Comité-conseil

• Instances de l’ICÉA

CONSULTATION

• 42 rencontres

• Diversité de personnes et d’organisations

PARTAGE

• Balados

• Sites Internet

• Ressources sur le bien public et le bien commun

La démarche préforum en image (réalisée par Mylène Choquette – Mayava)

Trois notions résument l’essentiel de la démarche préforum :  coconstruction, consultation et partage. Le programme du forum a été construit pour permettre des moments d’échange et de réflexion ainsi que des moments de travail collaboratif. Les participants et les participantes ont ainsi identifié des principes clés pour favoriser et renforcer le bien commun en éducation des adultes ainsi que des chantiers de travail prioritaires à mettre en place pour relever les défis majeurs en éducation des adultes, et pour favoriser le bien public et le bien commun. Parmi les principes identifiés, mentionnons l’accessibilité, la solidarité, l’équité, la collaboration, la responsabilité partagée, l’inclusion, le partage d’expertises et de savoirs, se donner le droit d’imaginer et le savoir de devenir.

DES COMPÉTENCES

QUI CONTRIBUENT

AU BIEN COMMUN

Les différents secteurs et lieux de formation des adultes ont des impacts positifs dans la société. En effet, l’éducation des adultes contribue à l’épanouissement, au développement du pouvoir d’agir et à l’autonomie des personnes, à leur intégration sociale, à leur participation active à la société de même qu’à leur insertion et leur mobilité en emploi. Elle est un moteur de transformation sociale et de développement économique. Alors que nous faisons face à différentes crises, notamment écologiques, l’éducation des adultes et l’apprentissage tout au long de la vie sont plus que jamais nécessaires, d’autant plus que les décisions de même que les choix, tant individuels que collectifs, que font les adultes sont déterminants pour la société dans son ensemble.

Lorsqu’il est question d’éducation et de formation des adultes, on pense souvent à l’alphabétisation, à la formation continue, à la francisation, à la formation professionnelle ou encore à la formation générale des adultes (FGA), mais il faut aussi penser en termes de domaines de savoirs ou de compétences :  finance, environnement, numérique, santé, etc.

Nous nous sommes donc intéressés dans le cadre du forum à différentes facettes de l’éducation des adultes qui semblaient essentielles, en lien avec la demande sociétale de développement et de maintien des connaissances et des compétences utiles à la vie et au travail, telles que l’éducation relative à l’environnement, l’éducation aux médias, et l’éducation financière.

Il en est ressorti, comme l’a souligné Daniel Baril, directeur de l’ICÉA, que la recherche du bien commun implique le développement de « compétences spécifiques dans des domaines ancrés dans la vie quotidienne et dans l’individualité, mais qui ont un impact à l’échelle de l’ensemble de nos familles, de nos villes, de nos quartiers, de nos pays et de la planète tout entière ».

15 Bien commun et AFB

DES PRATIQUES QUI

FAVORISENT LE BIEN COMMUN

Durant le forum, plusieurs pratiques inspirantes dans des secteurs différents de l’éducation et de la formation des adultes ont été partagées. Il a été question, par exemple, de badges numériques avec l’organisme Cadre 21 qui propose une plateforme de formation continue en ligne pour le milieu de l’éducation au Québec, dans la francophonie canadienne et internationale. Les badges numériques jouent un rôle important dans la reconnaissance des compétences et, en ce sens, ils contribuent au bien commun.

Il a également été question de différentes formes de collaboration. Par exemple, mentionnons le Projet Wow, regroupant différents acteurs, qui vise à soutenir la réussite des élèves en formation générale des adultes (FGA), en ayant recours à l’apprentissage numérique et à l’apprentissage à l’aide du numérique. Une autre forme de collaboration partagée a été la mise en place d’une communauté de pratique en éducation juridique, le Réseau en éducation juridique (RÉJ). Ce réseau contribue au bien commun en regroupant plusieurs acteurs qui ne se connaissaient pas et qui ne travaillaient pas ensemble, et en permettant la création d’un espace pour partager des expériences et mettre en commun des ressources.

Un autre exemple très inspirant concerne les bibliothèques publiques. Leur rôle en matière d’alphabétisation a été rappelé ainsi que les changements qui ont cours pour en faire de véritables tiers-lieux et pour les transformer en maisons des communs. Dans cette optique, on retrouve de plus en plus dans les bibliothèques publiques des espaces et des laboratoires de création, d’apprentissage et de socialisation comme les Fab Labs et les médialabs, des grainothèques, des ateliers Wikipédia, etc.

DES CHANTIERS EN ÉDUCATION DES ADULTES

Six chantiers découlent du travail réalisé par les participants et les participantes du forum. Les chantiers sont des espaces libres et autonomes visant à renforcer le bien public et le bien commun en éducation des adultes. Ils sont mis à la disposition des individus et des organisations à titre de laboratoires d’idées, d’échanges, de réflexions et de travail dont le fonctionnement, fondé sur la coconstruction, constitue en lui-même un bien commun. Le lancement de ces chantiers s’est amorcé au mois de février 2024.

SIX CHANTIERS EN ÉDUCATION DES ADULTES

01 COLLABORATION ET CONCERTATION ENTRE TOUS LES ACTEURS ET ACTRICES DE L’ÉDUCATION DES ADULTES

02 RECONNAISSANCE ET VALORISATION DE L’ÉDUCATION DES ADULTES DANS TOUTE SA DIVERSITÉ

03 ACCESSIBILITÉ DE L’ÉDUCATION DES ADULTES

04 POLITIQUE D’ÉDUCATION DES ADULTES

05 PROMOTION DE L’ÉDUCATION ET DE L’APPRENTISSAGE TOUT AU LONG ET AU LARGE DE LA VIE

06 GOUVERNANCE DE L’ÉDUCATION DES ADULTES

16 Bien commun et AFB

UNE DÉMARCHE DE COCONSTRUCTION EN TROIS TEMPS

1

AVANT LE FORUM

Une démarche préforum impliquant de :

• Mettre en place un comité-conseil réunissant une quinzaine de personnes œuvrant au sein de différents secteurs et lieux d’éducation, de formation et d’apprentissage des adultes

• Organiser des consultations des milieux en éducation des adultes :

1. des balados (7 épisodes ont été produits)

2. des rencontres d’échange (42 rencontres ont eu lieu avec une soixantaine de personnes)

• Partager des ressources : balados, références bibliographiques, etc.

2

LE FORUM

Deux jours d’échange et de travail en atelier pour :

• Introduire les notions de bien public et bien commun dans une réflexion sur l’éducation et l’apprentissage des adultes, et restituer le contenu de la démarche préforum

• Réfléchir à l’éducation des adultes comme un élément de réponse aux problèmes et aux défis que rencontrent les sociétés

• S’inspirer de pratiques qui contribuent au bien commun en éducation des adultes

• Construire des orientations partagées et identifier des chantiers à mettre en place pour répondre aux défis majeurs en éducation des adultes

3

L’APRÈS-FORUM

Un travail collaboratif à poursuivre pour :

• Mettre en place six chantiers en éducation des adultes : des laboratoires d’idées, d’échanges, de réflexions et de travail au bénéfice de tout le monde

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les 7 et 8 juin 2023
Fresque réalisée par Mylène Choquette (Mayava)

QU’EST-CE QUI RESSORT DU FORUM ?

Durant le forum, Michèle Stanton-Jean, chercheuse invitée à la Faculté de droit - CRDP de l’Université de Montréal et ancienne présidente de la Commission d’étude sur la formation professionnelle et socioculturelle des adultes, appelée la Commission Jean, a présenté le cadre conceptuel du bien commun qu’elle a développé dans ses recherches doctorales. Ce cadre conceptuel permet de synthétiser plusieurs des réflexions et des préoccupations qui ont été partagées lors du forum.

RESPONSABILITÉ

En effet, la notion de responsabilité a été au cœur de plusieurs échanges. La responsabilité de se former, de s’éduquer ou d’apprendre ne peut incomber seulement aux individus. Elle ne doit pas non plus reposer uniquement sur les épaules des enseignants et des enseignantes du système formel, sur les formateurs et les formatrices ou encore sur le gouvernement. Elle est partagée. On peut se former soi­même, entre pairs ou au sein d’une communauté de pratique. On peut également se former et apprendre dans une diversité de lieux et de contextes (formel, informel, non formel). Des lieux qui sont tous importants et qui ont tous un rôle à jouer pour favoriser le bien commun.

JUSTICE

La notion de justice a également été abordée de différentes manières : le droit à l’éducation, et plus spécifiquement le droit à l’éducation et à l’apprentissage tout au long de la vie, la justice redistributive, la justice sociale, la justice environnementale, l’équité, etc. De nombreux obstacles viennent entraver le droit à l’éducation à tous âges, notamment le manque de moyens financiers pour financer une formation ou des études ainsi que les défis de conciliation famille­travail­ études.

SOLIDARITÉ

À côté de la justice, la solidarité est également ressortie comme étant un élément important. La solidarité encourage la collaboration et la coopération entre les personnes, les communautés et les organisations pour relever des défis communs. Tout au long du forum, des personnes ont justement appelé à plus de collaboration et de concertation pour trouver des solutions aux défis qui touchent les apprenants et les apprenantes adultes ainsi que certains secteurs comme l’éducation populaire. La solidarité est un principe important qui repose sur l’idée que les membres d’une société sont responsables les uns des autres et doivent agir ensemble pour le bien­ être collectif.

AUTONOMIE

Enfin, mentionnons l’autonomie, qui est le dernier concept du modèle. Durant les deux jours du forum, il a été question d’autonomie des personnes, des apprenants et des apprenantes et des organisations, d’autonomie financière et d’autonomie professionnelle. Les acteurs et les actrices de l’éducation des adultes ont des approches éducatives, des visions, des méthodes de travail, des approches pédagogiques et des missions différentes. Ces différentes formes d’autonomie sont assurément un bien commun qu’il faut protéger.

18 Bien commun et AFB

LA PLACE DES APPRENANTS ET DES APPRENANTES ADULTES

Si les apprenantes et les apprenants ne sont pas intégrés dans le modèle de Madame Stanton-Jean, il n’en demeure pas moins qu’ils doivent être au centre de nos actions et de nos préoccupations d’après elle. C’est aussi ce qu’ont rappelé, de diverses manières, les personnes qui ont participé au forum. La question « où sont les apprenant-es? » a aussi été posée plusieurs fois. Évidemment, lorsqu’il est question de populations dites marginalisées, vulnérables ou exclues, nous pouvons constater que ces personnes-là étaient absentes du forum. Mais ne sommes-nous pas tous des apprenants et des apprenantes? Il y avait bel et bien des apprenants et des apprenantes dans la salle. Toutefois, il manquait certaines voix qu’il est important d’écouter et de prendre en compte afin de répondre correctement à leurs besoins et à leurs aspirations.

Pour conclure, prioriser le bien commun en éducation et en formation des adultes implique :

• de s’assurer que toutes et tous peuvent accéder et participer aux activités d’éducation, de formation et d’apprentissage dont elles et ils ont besoin, peu importe leur âge, leur statut socio-économique, leur genre, leur niveau d’instruction, etc.

• de s’assurer que les adultes peuvent étudier, se former et apprendre dans des contextes qui tiennent compte de leurs réalités, de leurs contraintes, de leurs expériences, de leurs motivations, de leurs objectifs, de leurs besoins et de leurs défis. C’est aussi s’assurer qu’ils et elles peuvent le faire dans des environnements culturellement sécuritaires.

• qu’on reconnaisse et qu’on valorise l’apport positif des différents secteurs, organismes et lieux de formation, et l’importance des apprentissages en contexte formel, informel et non formel.

• qu’on prenne soin des personnes qui y œuvrent, peu importe le type de milieux (communautaire, associatif, syndical, institutionnel, gouvernemental, etc.).

Enfin, travailler à renforcer le bien commun en éducation et en formation des adultes est nécessairement un travail collectif, communautaire et collaboratif.

BIEN COMMUN

Cadre conceptuel du bien commun (Stanton-Jean, 2011)

Bien commun et AFB 19
SOLIDARITÉ
AUTONOMIE
RESPONSABILITÉ
JUSTICE

L’ALPHABÉTISATION EN MILIEU MINORITAIRE ET LE BIEN COMMUN

Isabelle Coutant, agente de recherche et de développement en éducation des adultes, ICÉA

Œuvrer pour le bien commun, en éducation des adultes, c’est former en ayant en ligne de mire que les activités de formation ont non seulement un impact sur les personnes en formation, mais également sur toute la société. Par exemple, une personne qui développe son esprit critique grâce à des ateliers d’éducation aux médias sera davantage en mesure de reconnaître de fausses nouvelles, de les filtrer, et sera moins susceptible de les propager.

Dans les communautés francophones en situation minoritaire, cette dimension se révèle d’autant plus importante qu’elle contribue à la vitalité et à l’essor de la communauté. En effet, pour une personne qui se joint à un centre de formation en alphabétisation en français, développer ses compétences en littératie lui permet de parler sa langue et de faire vivre sa culture, ce qui est bénéfique pour elle-même et pour toute la communauté.

Or, partout au Canada, les programmes de formation sont de plus en plus conçus pour répondre à des objectifs d’employabilité ou, de façon générale, avec une vision néo-libérale, qui s’aligne davantage sur les objectifs du marché du travail que sur l’intérêt du bien commun. Même si cette approche est utile pour former la main-d’œuvre et pour aider les personnes ayant besoin d’aide pour intégrer le marché du travail, sa pertinence est moins évidente dans le cas de l’alphabétisation et de la formation de base.

En effet, développer ses compétences de base est utile dans tous les domaines de la vie et pas seulement sur un plan professionnel. Quand on se sent plus à l’aise avec l’écrit, ou avec les technologies, on est plus à l’aise pour communiquer, pour faire des choix à l’épicerie ou pour ses finances personnelles, ou encore pour s’engager dans des activités de loisirs. De meilleures compétences en littératie ont même un impact positif sur l’état de santé, comme l’indiquent les derniers résultats du Programme d’enquête internationale sur les compétences des adultes (Jacobsen, L., Long, A. 2017).

Les bénéfices liés au développement des compétences en littératie se manifestent aussi dans les programmes d’alphabétisation familiale. Les parents qui sont plus à l’aise avec l’écrit sont mieux outillés pour soutenir la scolarité et la persévérance de leurs enfants. Ces bénéfices ne se mesurent pas facilement à court terme, de la même façon que l’on peut mesurer le taux de chômage ou la diplomation, mais ils ont des effets à long terme sur la vie des personnes et, par extension, de leur environnement.

L’avantage des formations offertes par les organismes communautaires est qu’elles cherchent à s’adapter aux différents besoins des adultes qui s’y présentent : plus souples que les services offerts par les agences gouvernementales, ceux des centres communautaires prennent en compte l’environnement de ces adultes, leur potentiel et leurs contraintes.

En Ontario, les programmes d’alphabétisation et de formation de base sont sous l’égide d’Emploi Ontario. C’est donc l’employabilité qui sert d’horizon aux programmes de formation des adultes. Le développement et le renforcement de l’autonomie des adultes font partie des programmes d’AFB, mais dans une optique d’insertion professionnelle. En conséquence, les activités de formation ne peuvent pas se concentrer sur le volet social et communautaire. Échanger sur la culture francophone

commune et sur ses valeurs est pourtant non seulement vital pour les communautés, mais permet aussi de développer des compétences génériques utiles et transférables jusqu’en milieu de travail.

Les centres d’AFB sont des lieux où les personnes peuvent développer leur confiance en soi, leur esprit d’équipe, leur facilité à communiquer, ou encore leur sens des relations interpersonnelles1 : autant de compétences qui sont essentielles à la fois pour la vie communautaire et pour le maintien en emploi.

Quand on travaille sur le rehaussement des compétences des adultes, on n’isole pas ces compétences en fonction du premier lieu où elles seront utiles et rentables. On sait qu’en améliorant ses capacités à utiliser de l’information, une personne sera plus autonome dans toutes les sphères de sa vie. Même si cette amélioration vise l’intégration professionnelle, on perçoit qu’elle aura un impact global. Il se produit la même chose en améliorant des compétences génériques : avoir davantage confiance en soi et en sa culture francophone est un avantage pour la communauté, tout en étant utile en milieu de travail.

Plutôt que de mettre l’accent sur l’employabilité, un ministère responsable de l’alphabétisation des adultes ne devrait-il pas penser à ces services de façon plus globale? Cela permettrait aux communautés francophones en situation minoritaire de ressentir l’engagement gouvernemental envers la culture francophone, de renforcer la participation au sein de la communauté, de partager des valeurs communes tout en gardant à l’esprit qu’elles sont la fondation du bien commun.

Les compétences génériques, citoyennes et communautaires permettent de s’adapter plus facilement aux changements socio-économiques, de se maintenir en emploi, et de maintenir d’autres compétences à jour. Au sein d’une communauté minoritaire, elles permettent de mieux résister aux risques de marginalisation ou d’exclusion.

Miser sur les compétences génériques dans la perspective du bien commun, c’est également reconnaître l’étendue des lieux et des modes de formation, la diversité des façons d’acquérir des compétences, c’est valoriser la pertinence des centres communautaires et de tous les lieux informels de formation : autant d’éléments qui sont utiles à n’importe quelle communauté, mais qui deviennent vitaux pour les milieux minoritaires. C’est ce que promet la Loi sur les langues officielles2 telle qu’elle a été modernisée en 2023. En effet, l’article 41 (3) de la Loi a été reformulé pour indiquer que « le gouvernement fédéral s’engage à renforcer les possibilités pour les minorités francophones et anglophones de faire des apprentissages de qualité, en contexte formel, non formel ou informel dans leur propre langue tout au long de leur vie, notamment depuis la petite enfance jusqu’aux études postsecondaires ». Cette reconnaissance de la variété et de la continuité des occasions d’apprentissage devrait contribuer à affirmer l’importance et la valeur des centres d’alphabétisation et de formation de base, soutenir le développement de compétences multiples et ainsi renforcer le bien commun qu’est la culture francophone.

1 À ce sujet, voir le site consacré aux compétences génériques : http://mescompetencesgeneriques.net

2 Lien vers la Loi : https://laws.justice.gc.ca/fra/lois/O-3.01/page-3.html#h-375173

21 Bien commun et communautés apprenantes

VILLES APPRENANTES DE L’UNESCO, un réseau de 356 villes à travers le monde

En 2013 s’est tenue la première Conférence internationale sur les villes apprenantes, qui a vu l’adoption de la « Déclaration de Pékin sur la création des villes apprenantes »1 et d’un référentiel, « Caractéristiques clés des villes apprenantes »2 . Ces deux documents sont devenus les piliers du Réseau mondial des villes apprenantes de l’UNESCO, créé par l’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie à la suite de cette première conférence, pour favoriser la cohésion sociale, le développement économique et le développement durable dans les zones urbaines. En 2015, le réseau a commencé à recevoir des candidatures et à accepter des membres. Depuis, il est devenu l’une des forces motrices de promotion de l’apprentissage tout au long de la vie et espère ainsi contribuer à la réalisation des objectifs de développement durable de l’ONU sur le plan local.

En 2023, 64 nouvelles villes de 35 pays ont adhéré au Réseau mondial des villes apprenantes de l’UNESCO (GNLC), portant leur nombre total dans le réseau à 356 villes de 79 pays3 .

Dans la cohorte de 2023, on retrouve des villes aussi diversifiées que San Luis Potosí au Mexique, Ocotal au Nicaragua, Recife au Brésil, Lviv en Ukraine, Manchester au Royaume-Uni, Fundão au Portugal, Liège en Belgique, Hô Chi Minh-Ville au Vietnam, Nankin en République populaire de Chine, Gwangju en République de Corée, Bangkok en Thaïlande, Fès au Maroc, Mascate à Oman,

Alexandrie en Égypte, Al-Ahsa en Arabie saoudite, São Filipe au Cap-Vert, ou encore Dakar au Sénégal.

L’appel à candidatures est lancé tous les deux ans. Les villes qui sont, elles, déjà membres du réseau, doivent soumettre un rapport d’avancement détaillant la mise en œuvre de leur stratégie de ville apprenante. Ces rapports d’avancement doivent être eux aussi présentés tous les deux ans.

Les villes doivent suivre des procédures de suivi et de contrôle avec des objectifs et des indicateurs raisonnables qu’elles ont elles-mêmes sélectionnés et qui leur sont propres, en fonction de leurs propres enjeux environnementaux, sociaux, culturels et économiques, de même que des besoins exprimés par leurs citoyens. Ce sont elles qui conçoivent leur propres cadres d’orientation pour la planification, la mise en œuvre et le suivi et l’évaluation.

L’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie (UIL) a publié en 2017 un document visant à favoriser la transposition des objectifs mondiaux de développement durable en actions locales. Il s’est inspiré de mesures concrètes prises par les villes membres du Réseau mondial pour promouvoir des environnements écologiques et sains, l’équité et l’inclusion, de même que des conditions de travail et un entrepreneuriat décents.

Nombre de ces actions ont nécessité un fort leadership politique, une gouvernance intégrée et des partenariats à divers niveaux avec des acteurs publics et privés issus de nombreux secteurs, y compris de celui de la société civile.

1 Voir l’article sur la Déclaration de Pékin en page XXX. Le document a été adopté par la Conférence mondiale sur les villes apprenantes de Pékin (Chine), 21–23 octobre 2013. Il est consultable dans son intégralité au https://icea.qc.ca/sites/icea.qc.ca/files/beijing_declaration_fr.pdf

2 En 2012, l’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie (UIL) a organisé un premier atelier visant à développer un cadre pour l’élaboration des caractéristiques clés des villes apprenantes. Ce document en est le résultat. Il est consultable ici : https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000226756_fre

3 UNESCO, 14 février 2024, Réseau mondial des villes apprenantes de l’UNESCO : 64 nouveaux membres issus de 35 pays, Communiqué de presse, repéré à l’URL : https://www.unesco.org/fr/articles/reseau-mondial-des-villes-apprenantes-de-lunesco-64-nouveaux-membres-issus-de-35-pays

Ce document, intitulé Les villes apprenantes et les ODD : Guide d’action4, compte trois sections thématiques :

• des villes apprenantes écologiques et saines (développement durable environnemental);

• des villes apprenantes justes et ouvertes à tous (autonomisation individuelle, dialogue interculturel et cohésion sociale);

• des villes apprenantes pour l’emploi et l’entrepreneuriat (développement économique et prospérité culturelle).

Ces trois dimensions du développement durable sont intrinsèquement liées et les actions incitant l’apprentissage tout au long de la vie auront, de manière générale, une incidence sur nombre de ces dimensions à la fois. La quatrième dimension, qui est tout aussi importante que les trois autres, est la culture (expression culturelle et patrimoine, et diversité), et elle est transversale.

On retrouve dans le document de nombreux exemples d’actions mises en place par les différentes villes du Réseau qui montrent la diversité des initiatives possibles et reflètent la grande variété des stades de développement des villes apprenantes membres du réseau. En voici quelques-uns :

Exemples d’activités pour un cadre de vie écologique et sain5 :

• offrir des programmes de formation sur la santé aux personnes enseignantes;

• créer des cliniques mobiles pour autonomiser les citoyennes et citoyens en leur permettant d’en apprendre davantage sur leur propre corps et sur les questions de santé;

• mettre en place des comités sur l’assainissement, responsables de créer une conscience collective sur les questions d’hygiène et de santé parmi la population;

• mettre à la disposition de la population des poubelles et des bacs de recyclage;

• créer des équipes de nettoyage de rue;

• intégrer des activités d’apprentissage, comme le recyclage, lors d’évènements pour sensibiliser le public à la protection de l’environnement;

• créer des lieux pour apprendre à faire du vélo;

• promouvoir les mobilités alternatives en ville et informer la population sur les droits et devoirs des personnes qui utilisent les routes, et sur les règles de circulation pour les cyclistes en ville.

Exemples d’activités pour l’équité et l’intégration de tous6 :

• offrir des possibilités pédagogiques alternatives à toute la communauté, et en particulier, aux groupes vulnérables qui ne suivent pas un parcours scolaire ou une formation formelle;

• proposer des cours en ligne gratuits;

• promouvoir les initiatives d’apprentissage intergénérationnel;

• offrir des services d’orientation professionnelle, en particulier aux femmes;

• créer des bibliothèques mobiles pour offrir des possibilités de lecture à tous;

• utiliser les centres culturels comme des lieux d’apprentissage, qui combinent culture, art et apprentissage;

• encourager les jeunes à prendre part à la vie publique.

Exemples d’activités pour assurer un travail décent et encourager l’entrepreneuriat7 :

• proposer des programmes de formation pour les jeunes et les adultes hors des circuits scolaires;

• encourager la production et la vente de produits locaux;

• mettre en place des partenariats avec les employeurs locaux pour améliorer la participation et l’accès des personnes en situation de handicap à la formation et à l’emploi;

• offrir des services d’orientation professionnelle dans les écoles;

• soutenir les entreprises qui offrent aux personnes étudiantes de la formation en alternance ou en milieu de travail;

• proposer des ateliers et des programmes d’encadrement pour favoriser l’esprit d’entreprise auprès des femmes et des groupes vulnérables, et dans les zones rurales isolées, des ateliers et programmes pour tous.

Sachant qu’aujourd’hui plus de la moitié de la population mondiale vit en zone urbaine et que selon la Banque Mondiale, 70 % de la population sera urbaine d’ici 2050, il semble pertinent d’espérer des villes de demain plus apprenantes, plus participatives, et dont les citoyennes et citoyens occupent la première place dans leurs préoccupations.

4 Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie, 2017, « Les Villes apprenantes et les ODD : guide d’action », Hambourg, 24 p, repéré le 22 février 2024 à l›URL : https://unesdoc.unesco.org/ark:/48223/pf0000260443

5 Voir la page 10 du document « Les villes apprenantes et les ODD : Guide d’action », accessible ici : https://www.local2030.org/library/403/2/Les-villes-apprenantes-et-les-ODD-Guide-daction.pdf

6 Voir la page 13 du document « Les villes apprenantes et les ODD : Guide d’action », accessible ici : https://www.local2030.org/library/403/2/Les-villes-apprenantes-et-les-ODD-Guide-daction.pdf

7 Voir la page 17 du document « Les villes apprenantes et les ODD : Guide d’action », accessible ici : https://www.local2030.org/library/403/2/Les-villes-apprenantes-et-les-ODD-Guide-daction.pdf

23 Villes apprenantes

LE RÉSEAU MONDIAL UNESCO DES VILLES

APPRENANTES SOUTIENT LES ODD

Le réseau mondial UNESCO des villes apprenantes soutient les 17 objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies, en particulier l’ODD 4 (« Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie ») et l’ODD 11 (« Rendre les villes et les établissements humains inclusifs, sûrs, résilients et durables »). Les villes apprenantes favorisent les environnements verts et sains, s’efforcent de parvenir à l’équité et à l’inclusion, et soutiennent le travail décent et l’esprit d’entreprise. Elles sont donc des moteurs essentiels de la durabilité au niveau local, tant dans les zones urbaines que rurales.

« L’une de nos responsabilités est aussi de parvenir à créer une narration plus forte et à accumuler davantage de preuves, pour que nous puissions réellement expliquer et démontrer aux décideurs politiques qu’en investissant davantage dans l’apprentissage tout au long de la vie, on contribue aussi d’une certaine manière aux politiques d’atténuation des changements climatiques, à l’emploi, etc. »

Décembre 2022, David Atchoarena, Directeur de l’Institut de l’UNESCO pour l’apprentissage tout au long de la vie* *En entrevue pour le journal The PIE : https://thepienews.com/pie-chat/david-atchoarena-unesco

L’UNESCO et les objectifs de développement durable

Source : https://www.uil.unesco.org/fr/learning-cities

24 Section
Villes apprenantes

EDMONTON : première ville canadienne à intégrer le Réseau mondial UNESCO des villes apprenantes

En octobre 2022, Edmonton est devenue la première ville canadienne à intégrer le Réseau mondial UNESCO des villes apprenantes (GNLC). De toutes les grandes villes nord-américaines, Edmonton est celle qui se trouve le plus au Nord et son adhésion au réseau de l’UNESCO représente l’aboutissement de nombreuses années de mobilisation de toute la communauté en faveur de l’éducation pour toutes et tous et de l’apprentissage tout au long de la vie.

En 2021 a été mise sur pied une coalition communautaire dirigée par le maire d’Edmonton, comprenant la Bibliothèque publique d’Edmonton, les trois commissions scolaires de la ville, soit Edmonton Public Schools, Edmonton Catholic Schools, le Conseil scolaire Centre-Nord et les huit établissements postsecondaires d’Edmonton (l’Université de l’Alberta, l’Université Concordia d’Edmonton, l’Université King’s, l’Université MacEwan, NAIT, le Collège NorQuest, le Yellowhead Tribal College et l’Université d’Athabasca).

« En tant que communauté d’apprenantes et d’apprenants, nous célébrons cette occasion d’échanger avec des villes qui partagent nos valeurs. Notre ouverture, notre diversité culturelle et notre curiosité font d’Edmonton un excellent ajout au GNLC. Nous avons comme ambition d’attirer dans notre ville un million de personnes de plus au cours des prochaines décennies, des personnes curieuses et désireuses de découvrir des idées, des technologies et des façons de travailler et d’apprendre qui sont nouvelles. »

Amarjeet Sohi, maire d’Edmonton

© 2024 City of Edmonton 25 villeS apprenanteS

EXEMPLES DE VILLES APPRENANTES

LA VILLE AFRICAINE DE BOUAKÉ

mise sur l’éducation des adultes et le développement durable

Surnommée la « cité carrefour », cette ville africaine située au centre de la Côte d’Ivoire, à environ 350 km de la capitale Abidjan, a rejoint le réseau des villes apprenantes de l’UNESCO en septembre 2022. Selon le représentant de l’UNESCO en Côte d’Ivoire Mame Omar Diop, « ce n’est pas un hasard. Il y a eu un travail acharné qui a été abattu avant que ce label ne puisse être décerné à la ville, la première en Côte d’Ivoire à en bénéficier »1

Cette municipalité de plus de 830 000 habitantes et habitants estime que les taux d’alphabétisme de sa population sont d’environ 57 %, mais de seulement 41 % chez les femmes2. Et c’est en partie parce que la ville a lancé un programme d’alphabétisation que sa candidature a été retenue. En 2022, la ville comptait 86 centres d’alphabétisation avec un total de 2 091 personnes inscrites dont 1 270 femmes3. La municipalité de Bouaké s’est fixé l’objectif à moyen terme d’atteindre un taux d’alphabétisme de 75 % d’ici à 20354, un objectif ambitieux.

Grâce à son adhésion au réseau, Bouaké pourra partager et échanger des idées avec d’autres villes et trouver des pistes de solutions à quelques-uns des problèmes auxquels elle est confrontée, nouer des partenariats et surtout, tirer parti du mécanisme de financement multidonateurs (MDFM) de l’UNESCO. La ville sait qu’elle doit répondre en priorité aux besoins en sensibilisation, en matériel didactique, mais aussi à des besoins de base comme l’électrification de certains centres ou à l’achat de mobilier5

1 Coulibaly Souleymane (août 2022), Côte d’Ivoire : Alphabétisation et culture - Bouaké fait son entrée dans le réseau des villes apprenantes de l’Unesco, Le Patriote, Presse quotidienne, Abidjan, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://fr.allafrica.com/stories/202208250481.html

² L’inspiration politique (novembre 2023), Bouaké en campagne d’alphabétisation, INNOMEDIAS, Orléans, France, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://www.linspiration-politique.fr/2023/11/07/ cote-divoire-bouake-en-campagne-dalphabetisation

3 Coulibaly Souleymane (août 2022), Côte d’Ivoire : Alphabétisation et culture - Bouaké fait son entrée dans le réseau des villes apprenantes de l’Unesco, Le Patriote, Presse quotidienne, Abidjan, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://fr.allafrica.com/stories/202208250481.html

4 L’inspiration politique (novembre 2023), Bouaké en campagne d’alphabétisation, INNOMEDIAS, Orléans, France, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://www.linspiration-politique.fr/2023/11/07/ cote-divoire-bouake-en-campagne-dalphabetisation

5 Coulibaly Souleymane (août 2022), Côte d’Ivoire : Alphabétisation et culture - Bouaké fait son entrée dans le réseau des villes apprenantes de l’Unesco, Le Patriote, Presse quotidienne, Abidjan, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://fr.allafrica.com/stories/202208250481.htm

La ville a aussi fait beaucoup d’efforts sur le plan du développement durable, conformément aux objectifs de développement durable (ODD), avec des politiques d’insertion des jeunes dans une « économie verte et circulaire » et centre ses efforts sur la formation et l’insertion professionnelle des jeunes, la gouvernance participative et la végétalisation de la ville6. Bouaké avait commencé, dès 2019, la plantation d’arbres sur son territoire, et en 2022 la municipalité a installé 34 poteaux électriques solaires pour alimenter la mairie en électricité.

Début 2024, elle a lancé un programme de « Formation à l’économie verte et circulaire », pour préparer ses citoyennes et citoyens à « adopter des pratiques innovantes et respectueuses de l’environnement, tout en ouvrant la voie à un avenir plus durable et plus prospère »7. Elle souhaite en particulier renforcer le maraîchage urbain en agroécologie : le centre Apicole AZARIA a organisé une première formation sur l’apiculture en milieu urbain et AMEA Energy, une formation

liée au biogaz et au biocharbon. La ville offrira également de la formation, de l’encadrement et du financement en aviculture, en élevage d’escargots, en production de champignons comestibles et en agroécologie urbaine pour outiller ses jeunes entrepreneurs.

Enfin, elle s’efforce de faire participer ses citoyennes et citoyens à la gestion des ordures ménagères en organisant des rencontres avec la société civile (comités de quartier, des associations de jeunes et de femmes), en organisant de grands ménages dans différents quartiers de la ville8 et avec un projet d’usine de recyclage de déchets plastiques qui serait développé par une entreprise de démarrage ivoirienne, Coliba Africa9. Nul doute qu’avec son intégration dans le réseau mondial UNESCO des villes apprenantes, la ville de Bouaké peut jouer un rôle de vitrine encourageant les échanges de pratiques et d’outils favorisant l’inclusion, la durabilité et la démocratisation des apprentissages à travers toute l’Afrique de l’ouest.

6 Voir la page du site Web de l’UIL consacrée à Bouaké : https://www.uil.unesco.org/en/learning-cities/bouake

7 Post Facebook du 16 janvier 2024, repéré le 28 février 2024 à l›URL : https://www.facebook.com/bouakevilledurable

8 Post Facebook du 30 octobre 2023, repéré le 28 février 2024 à l›URL : https://www.facebook.com/bouakevilledurable

9 Page « Échos des villes » (mai 2023), Bouaké passe au recyclage des déchets plastiques, site Web de l’AIMF, repéré le 28 février 2024 à l’URL : https://www.aimf.asso.fr/actualite/bouake-passe-au-recyclage-des-dechets-plastiques

27 villes apprenantes
Les animateurs d’une formation en apiculture à Bouaké, janvier 2024 © Ville de Bouaké 2024

MANTES-LA-JOLIE : une adhésion pour soutenir la cohésion sociale

La ville française de Mantes-la-Jolie est située à 50 km à l’ouest de Paris et compte une population de près de 45 000 personnes, avec beaucoup de jeunes et des familles aux origines très diverses. Elle a régulièrement fait la une des journaux français dans les années 1990 pour sa criminalité, ses émeutes urbaines, et sa cité du Val Fourré, rassemblant tous les clichés qu’on accole aux banlieues des grandes villes françaises.

Mantes-la-Jolie a adhéré en 2017 au réseau des villes apprenantes de l’UNESCO pour, selon son maire, en faire un « outil de politique locale et de cohésion sociale »1. Il faut savoir que la ville compte 42 % de personnes de plus de 15 ans sans diplôme, contre une moyenne de 32 % en France2

La municipalité espère que son statut récent de ville apprenante changera les dynamiques socioculturelles, au point que le maire de la ville, Raphaël Cognet, voit dans l’éducation et l’apprentissage à tous les âges « la solution à 99 % de [ses] problèmes »3 .

Parmi les initiatives soutenues par la municipalité, on retrouve celles-ci :

• L’association Enjoy qui offre des ateliers thématiques mensuels et une sortie culturelle à une vingtaine d’enfants âgés de 9 à 13 ans pour favoriser leur éveil culturel;

• L’association Sigma F qui offre de l’accompagnement scolaire pour « l’acquisition de compétences techniques, académiques et humaines », pour de l’aide à l’orientation scolaire et professionnelle, et des programmes axés sur une citoyenneté engagée4;

• L’implantation de « l’École française des femmes », pour accompagner les femmes dans leur parcours professionnel et leur recherche d’emploi et des « ateliers sociolinguistiques (ASL) », offerts dans trois quartiers pour l’apprentissage du français à des adultes;

• Le projet « Citoyen dans ma ville », qui permet à des jeunes de tirer parti d’une aide financière à la réalisation d’un projet en échange d’un bénévolat de 20 heures au sein d’une association mantaise (souvent des projets de séjours d’études linguistiques ou d’échanges universitaires);

• Le programme « Choisis ton futur », qui vise le partage de leurs expériences par des étudiantes et étudiants universitaires bénéficiaires de la bourse « Mantes + étudiants » avec des étudiantes et étudiants du secondaire;

• La transformation d’un Square en espace polyvalent permettant d’accueillir différents types d’événements et d’animations, avec une renaturalisation (verdure, bosquet, zone humide), une aire de jeux et de sports, des pavillons festivaliers et une aire de lecture attenante à la médiathèque de la ville.

1 Branquart, Victor (décembre 2019), Mantes-la-Jolie, une ville où l’on apprend toute la vie, We demain, consulté en ligne le 28 février 2024 à l’URL : https://www.wedemain.fr/partager/mantes-la-jolie-une-ville-ou-l-on-apprend-toute-la-vie_a4428-html

2 Oddoux, Anaïs (Juin 2019), La « ville apprenante » : réapprendre à faire la ville?, City Linked, repéré le 28 février à l’URL : https://www.detourbycitylinked.fr/la-ville-apprenante-reapprendre-a-faire-la-ville

3 Branquart, Victor (décembre 2019), Mantes-la-Jolie, une ville où l’on apprend toute la vie, We demain, consulté en ligne le 28 fév. 2024 à l’URL : https://www.wedemain.fr/partager/mantes-la-jolie-une-ville-ou-l-on-apprend-toute-la-vie_a4428-html

4 Voir son site : https://sigmaf.org

28 Villes apprenantes

TAFI VIEJO : une ville apprenante particulièrement dynamique

La ville de Tafí Viejo est située dans la province de Tucumán en Argentine. Membre du Réseau des villes apprenantes de l’UNESCO depuis 2022, la ville compte 56 407 habitantes et habitants qui ont en moyenne, selon l’UNESCO, suivi 12 années d’études. Depuis son adhésion au Réseau, la ville a mis en place de nombreuses initiatives pour favoriser les ODD et les apprentissages citoyens.

En voici quelques exemples récents (2024), tirés de la page FB de la municipalité1 :

• Le projet Squares en santé offre plusieurs fois par semaine des activités physiques et sportives gratuites aux citoyennes et citoyens dans plusieurs espaces verts de la ville.

• Un partenariat municipal pour l’ouverture d’un petit kiosque de produits d’alimentation locaux à la station thermale de La Toma pour encourager les bonnes habitudes alimentaires.

• La ville accueille une foire des artisanes et artisans et des entrepreneuses et entrepreneurs en plein air, pour promouvoir la créativité locale.

1 L’été argentin correspond à la période de décembre à février.

• Le centre de santé Los Pocitos a animé un atelier sur la prévention des dépendances pour les familles de la région. Parmi les thèmes abordés : comment dépister une dépendance, les différences entre consommation et consommation problématique, les mythes et les vérités sur la consommation problématique, les facteurs de protection de la famille.

• Un accord a été conclu entre la Fondation La Tierra de Nuestros Hijos (la terre de nos enfants) et la municipalité de Tafí Viejo. Cet accord vise à promouvoir la durabilité environnementale et à mettre en œuvre des projets pour remédier aux dommages environnementaux existants et favoriser le développement durable.

• Pendant l’été, la ville offre des camps pour personnes âgées; en 2024, plus de 70 personnes ont déjà profité d’ateliers artistiques, de yoga, de folklore et de natation.

• Le centre éducatif Jose Perea Muñoz a ouvert ses inscriptions pour les cours de sa rentrée 2024. On y offre des cours variés l’après-midi et en soirée aux citoyennes et aux citoyens qui travaillent ou ont d’autres occupations pendant la journée : couture, graphisme, menuiserie, réparation d’appareils ménagers, informatique, coiffure, cuisine, pâtisserie ou encore production textile.

On peut suivre l’actualité de la ville de Tafi Viejo sur le site Web de la municipalité : https://www.tafiviejo.gob.ar

29 Villes apprenantes
Participants au camp d’été Senior 2024 de la ville de Tafi Viejo © Ville de Tafi Viejo

Déclaration de Pékin sur la création des villes apprenantes

APPRENTISSAGE TOUT AU LONG DE LA VIE POUR TOUS :

INCLUSION, PROSPÉRITÉ ET PÉRENNITÉ DANS LES VILLES

Adoptée par la Conférence mondiale sur les villes apprenantes, Pékin (Chine), 21–23 octobre 2013

Ce document constitue la fondation du réseau des villes apprenantes de l’UNESCO. Nous le publions dans une version abrégée, mais il peut être consulté dans son intégralité à l’adresse : https://icea.qc.ca/sites/icea.qc.ca/files/beijing_declaration_fr.pdf

PRÉAMBULE

Nous, les participants réunis à la Conférence mondiale sur les villes apprenantes, coorganisée par l’UNESCO, le ministère de l’Éducation de la Chine et le gouvernement municipal de Pékin (Pékin, 21 - 23 octobre 2013), déclarons ce qui suit :

Nous constatons que nous vivons dans un monde complexe en perpétuelle évolution, dans lequel les normes sociales, économiques et politiques sont redéfinies en permanence. La croissance économique et l’emploi, l’urbanisation, l’évolution démographique, les avancées scientifiques et technologiques, la diversité culturelle et la nécessité de maintenir la sécurité humaine ainsi que la sécurité publique constituent quelquesuns des défis posés à la gouvernance et à la viabilité de nos sociétés.

Nous affirmons que, si nous voulons autonomiser les citoyens - c’est-à-dire tous les résidents des villes et des communautés, nous devons faire notre possible pour leur donner l’accès à un vaste choix d’opportunités d’apprendre tout au long de leur vie, et pour les encourager à les exploiter.

Nous sommes convaincus que l’apprentissage améliore la qualité de la vie, transmet aux citoyens la capacité d’anticiper et de relever les nouveaux défis, et contribue à édifier des sociétés meilleures et plus durables.

Nous constatons que le concept d’apprentissage tout au long de la vie n’est pas nouveau; il fait partie intégrante du développement humain et est profondément ancré dans toutes les cultures et civilisations.

Nous maintenons que l’apprentissage tout au long de la vie apporte des bienfaits sociaux, économiques et culturels aux apprenants individuels et aux communautés, et doit constituer un objectif primordial pour les villes, les régions, les nations et la communauté internationale.

Nous constatons que la majorité de la population mondiale vit aujourd’hui dans des villes et régions urbaines, et que cette tendance s’accélère. Par conséquent, les villes et les régions urbaines jouent un rôle toujours plus important dans le développement national et mondial.

Nous affirmons que les « communautés apprenantes », les « villes apprenantes » et les « régions apprenantes » sont les piliers du développement durable.

30 Villes apprenantes

Nous assumons que les organisations internationales et régionales ainsi que les gouvernements nationaux ont un rôle décisif à jouer dans le développement de sociétés apprenantes. Mais nous sommes conscients du fait que ce développement doit être ancré dans les régions, les villes et dans tous les types de communautés.

Nous savons que les villes assument un rôle de premier plan dans la promotion de l’inclusion sociale, de la croissance économique, de la sécurité publique et de la protection de l’environnement. Les villes doivent par conséquent être à la fois les architectes et les exécutants des stratégies qui favorisent l’apprentissage tout au long de la vie et le développement durable.

ENGAGEMENTS

Nous nous engageons à entreprendre les actions suivantes qui peuvent transformer nos villes :

1. Autonomiser les individus et promouvoir la cohésion sociale

2. Soutenir le développement économique et la prospérité culturelle

3. Promouvoir le développement durable

4. Promouvoir un apprentissage intégrateur dans les systèmes d’enseignement

5. Raviver l’apprentissage au sein des familles et des communautés

6. Faciliter l’apprentissage pour l’emploi et au travail

7. Étendre l’usage des techniques modernes d’apprentissage

8. Accroître la qualité de l’apprentissage

9. Favoriser une culture de l’apprentissage tout au long de la vie

10. Renforcer la volonté et l’engagement politiques

11. Perfectionner la gouvernance et la participation de toutes les parties prenantes

12. Stimuler la mobilisation et l’utilisation des ressources

Nous constatons que les villes se différencient par leur composition culturelle et ethnique, leur patrimoine et leurs structures sociales. Néanmoins, les villes apprenantes ont çde nombreuses caractéristiques en commun. Une ville apprenante mobilise les ressources humaines et autres pour promouvoir un apprentissage intégrateur de l’éducation de base à l’enseignement supérieur; elle ravive l’apprentissage au sein des familles et des communautés; elle facilite l’apprentissage pour l’emploi et au travail; elle étend l’usage des techniques modernes d’apprentissage; elle accroît la qualité de l’apprentissage; et elle favorise une culture de l’apprentissage tout au long de la vie.

Nous anticipons que les villes apprenantes faciliteront l’autonomisation des individus, établiront la cohésion sociale, favoriseront la citoyenneté active, développeront la prospérité économique et culturelle et poseront les fondements du développement durable.

APPEL À L’ACTION

De nombreuses agglomérations se déclarent d’ores et déjà villes ou régions apprenantes. Elles ont à cœur de bénéficier du dialogue stratégique international, de la recherche-action, du perfectionnement des capacités et de l’échange d’expériences, ainsi que d’appliquer des approches concluantes pour promouvoir l’apprentissage tout au long de la vie. Pour ces raisons,

1. Nous appelons l’UNESCO à créer un réseau mondial des villes apprenantes, en vue de soutenir et d’accélérer la pratique de l’apprentissage tout au long de la vie dans les communautés de la planète. Ce réseau aura pour tâches de : stimuler le dialogue stratégique et l’apprentissage mutuel entre les villes membres, forger des liens, favoriser les partenariats, organiser le perfectionnement des capacités, et concevoir des instruments qui encouragent et reconnaissent les progrès accomplis;

2. Nous appelons les villes et régions de la planète entière à se joindre à ce réseau en vue de concevoir et d’appliquer des stratégies d’apprentissage tout au long de vie dans leurs villes;

3. Nous appelons les organismes internationaux et régionaux à devenir membres actifs de ce réseau;

4. Nous appelons les gouvernements nationaux à encourager les administrations locales à créer des régions et communautés apprenantes, et à participer aux activités internationales d’apprentissage entre pairs;

5. Nous appelons les fondations, les entreprises privées et les organisations de la société civile à devenir des partenaires actifs du réseau mondial des villes apprenantes, en s’inspirant des expériences accumulées par les initiatives du secteur privé.

31 Villes apprenantes

LA LITTÉRATIE COMMUNAUTAIRE

AU SERVICE DES COMMUNAUTÉS

FRANCOPHONES

Écrit par Isabelle Coutant, agente de recherche et de développement en éducation des adultes, ICÉA

Dans le langage courant, l’éducation fait référence au système scolaire de l’école primaire, secondaire et postsecondaire.

Quand on travaille en alphabétisation et formation de base des adultes, on œuvre dans un milieu qui reconnaît que l’on peut apprendre à tous les âges de la vie et développer des compétences de toutes sortes, qui vont bien au-delà des savoirs scolaires. Les apprentissages qu’une personne peut faire dans un centre d’alphabétisation restent toutefois inscrits dans un cadre éducatif, même s’il n’est pas formel.

Par une approche encore plus large de l’éducation, la littératie communautaire est un concept qui s’intéresse à la façon dont toute une communauté peut participer au développement de compétences en littératie. Cela fait référence à la façon dont une multitude d’acteurs, institutionnels ou communautaires, peuvent s’impliquer et se sentir concernés par l’éducation tout au long de la vie, alors que leur première mission n’est pas éducative, ou en tout cas pas perçue comme telle. On peut penser par exemple aux musées, aux cliniques de santé, aux centres de sports et de loisirs, aux bibliothèques, etc.

La littératie communautaire est donc définie comme la capacité d’une collectivité à mobiliser une diversité d’intervenantes et d’intervenants autour de la personne apprenante, favorisant ainsi le développement des compétences de l’ensemble de la communauté. On rejoint donc ainsi la notion d’éducation comme bien commun, à deux niveaux : d’une part la communauté qui se reconnaît comme liée et investie de responsabilités éducatives, et qui d’autre part apprend et construit des connaissances et des compétences.

La littératie communautaire dépasse le cadre scolaire en couvrant toutes les dimensions de la vie et en s’inscrivant dans une perspective d’apprentissage tout au long de la vie, ce qui permet de répondre aux besoins éducatifs des personnes à différents stades de leurs vies.

Les institutions et organismes communautaires qui n’ont pas comme première mission la formation ou l’éducation gagnent à se percevoir comme parties prenantes de l’apprentissage tout au long de la vie, car ils y participent bel et bien. Des groupes de discussion destinés aux parents, offerts par les services sociaux, jusqu’aux jardins communautaires, en passant par les activités en bibliothèques, les opportunités d’apprendre sont partout. Pourtant, les personnes qui interviennent dans ces secteurs ne se reconnaissent généralement pas comme des actrices et acteurs de l’éducation tout au long de la vie. En changeant de posture et en se percevant comme formatrices ou formateurs, ces personnes pourraient se voir comme faisant partie intégrante d’une communauté éducative plus vaste.

Les cours d’informatique, la vulgarisation juridique, le soutien en périnatalité, les activités de loisirs et d’artisanat, ou encore les ateliers de développement de l’employabilité ont des

objectifs différents à court terme, mais ils se rejoignent dans leur visée à long terme : augmenter les compétences des personnes pour favoriser leur autonomie. Toutes ces activités, et bien d’autres requièrent l’utilisation de l’écrit. En encourageant le développement des compétences en lecture, rédaction et compréhension de l’information, la littératie communautaire offre aux personnes la possibilité de s’engager pleinement dans la société, de faire entendre leur voix et de défendre leurs droits. Elle est liée à un engagement de multiples partenaires en faveur de l’émancipation et de la justice sociale.

En facilitant l’accès à l’information et en encourageant la création de connaissances au sein des communautés, la littératie communautaire aide à atténuer les disparités en fournissant à chaque personne les moyens de se renseigner, de se former et de prendre des décisions éclairées.

En période de transition numérique, la littératie communautaire pourrait être vue comme un des piliers de la démocratie, offrant à toutes et tous l’accès aux ressources et aux savoirs essentiels pour une participation active dans les sphères sociale, culturelle et politique.

En somme, la littératie communautaire joue un rôle essentiel dans le développement des compétences individuelles et collectives, la promotion de l’inclusion et de la collaboration.

COMMENT ET AVEC QUI?

Comme mentionné plus haut, la première condition nécessaire à la mise en pratique de la littératie communautaire est l’implication des membres de la communauté, qui doivent se reconnaître comme des actrices et acteurs de l’éducation tout au long de la vie.

Ensuite, chaque communauté doit identifier les besoins et les enjeux en lien avec ses caractéristiques propres, puis prioriser ses actions. Elle peut par exemple choisir de travailler davantage sur la santé de la population ou sur la vitalité de la culture francophone.

Enfin, il est important d’informer et de faire la promotion de la lecture en explorant différentes dimensions de la littératie, par les médias, les compétences numériques, etc.

33 Bien commun et littératie communautaire

LES BIBLIOTHÈQUES

Le rôle des bibliothèques dans la littératie communautaire est essentiel pour promouvoir l’accès à l’information, l’éducation et le développement personnel au sein des communautés : elles offrent un accès gratuit à une variété de ressources, telles que des livres, des magazines, des journaux, des bases de données en ligne et des ordinateurs, et elles facilitent la recherche d’informations fiables et pertinentes. Les bibliothèques organisent des ateliers, des activités de lecture en famille et des cours d’informatique qui améliorent les compétences en littératie et en littératie numérique. Elles soutiennent l’apprentissage tout au long de la vie en proposant des ressources pour tous les âges. De plus, les bibliothèques encouragent l’utilisation du français en rendant disponible la littérature locale et internationale. Elles organisent des événements culturels, des expositions et des clubs de lecture pour favoriser l’échange d’idées et le partage d’expériences. Les bibliothèques sont des espaces ouverts à tous, indépendamment de l’âge, du statut social ou de l’origine ethnique de leurs utilisatrices et utilisateurs.

En somme, les bibliothèques jouent un rôle crucial dans la promotion de la littératie, l’autonomisation des personnes et le renforcement des communautés. Elles sont des gardiennes du savoir et des lieux où chaque personne peut s’enrichir intellectuellement et socialement.

LES ÉCOLES ET ÉTABLISSEMENTS

D’ENSEIGNEMENT

Les écoles, collèges et universités sont bien entendu des acteurs clés pour développer les compétences en littératie chez les personnes apprenantes, car ils ont les ressources pour organiser des activités de lecture, d’écriture et de communication.

LES ORGANISMES

COMMUNAUTAIRES

Les associations locales, les groupes communautaires et les centres sociaux sont généralement très engagés dans la promotion de la littératie. Ils organisent des ateliers, des clubs de lecture et des événements pour les membres de la communauté.

LES ORGANISMES GOUVERNEMENTAUX

Les gouvernements locaux et nationaux soutiennent souvent les initiatives de littératie communautaire. Ils octroient des fonds, créent des politiques et mettent en place des programmes pour améliorer les compétences en littératie. Les points de services locaux relayent l’information et soutiennent la communauté autant que les personnes qui la composent.

LES ENTREPRISES ET LES ENTREPRENEURS SOCIAUX

Certaines entreprises et entrepreneurs s’engagent dans des projets de responsabilité sociale en faveur de la littératie : ils peuvent parrainer des programmes de lecture, de mentorat ou de développement des compétences.

LES MÉDIAS ET LES PLATEFORMES NUMÉRIQUES

Les médias, les blogues, les balados ou encore les plateformes en ligne peuvent contribuer à la diffusion d’informations et à la promotion de la littératie, en créant du contenu éducatif et en encourageant la participation de tous et toutes.

LES PROFESSIONNELLES/ PROFESSIONNELS DE L’ÉDUCATION ET DE LA FORMATION

Les personnes qui travaillent en enseignement, en formation et en éducation ont un rôle clé dans l’amélioration des compétences en littératie puisqu’elles travaillent directement avec les personnes apprenantes pour renforcer leurs capacités.

34 Bien commun et littératie communautaire

LA LITTÉRATIE

COMMUNAUTAIRE

AU SERVICE DES COMMUNAUTÉS FRANCOPHONES

La littératie communautaire est bénéfique aux communautés francophones en situation minoritaire au Canada pour :

LE RENFORCEMENT DE L’IDENTITÉ CULTURELLE

La littératie communautaire permet aux membres de la communauté de mieux comprendre leur histoire, leur culture et leurs traditions. Elle favorise la préservation de la langue française et renforce le sentiment d’appartenance à la communauté francophone.

L’AMÉLIORATION DES COMPÉTENCES LINGUISTIQUES

En encourageant la lecture, l’écriture et la communication, la littératie communautaire contribue à améliorer les compétences linguistiques des personnes. Cela facilite leur participation active dans la société et leur permet de mieux s’exprimer.

L’ACCÈS À L’INFORMATION ET À L’ÉDUCATION

La littératie communautaire améliore l’accès aux ressources éducatives, telles que des livres, des journaux, des ateliers et des programmes. Elle permet aux membres de la communauté d’acquérir des connaissances et de se tenir informés.

LE RENFORCEMENT DU TISSU SOCIAL

Les activités de littératie communautaire, comme les clubs de lecture, les ateliers d’écriture et les événements culturels, favorisent les interactions sociales. Elles créent des liens entre les personnes et renforcent la cohésion au sein de la communauté.

LA PARTICIPATION CITOYENNE

Une communauté alphabétisée est mieux préparée à participer activement à la vie démocratique. La littératie communautaire encourage l’engagement civique et la prise de parole.

En somme, la littératie communautaire est un outil puissant pour autonomiser les communautés francophones minoritaires, promouvoir leur culture et favoriser leur développement.

Elle est un domaine essentiel qui mobilise quantité d’acteurs et d’institutions pour renforcer les compétences en littératie, dans une perspective globale et inclusive.

POUR EN SAVOIR PLUS

Mercier, J.-P. & Martel, M. D. (2021). La littératie communautaire : explorer les pratiques des acteurs institutionnels au sein des communautés éducatives. Revue de recherches en littératie médiatique multimodale, 14. https://doi.org/10.7202/1086910ar

35 Bien commun et littératie communautaire

LES LITTÉRATIES POUR LE BIEN COMMUN

Écrit par Isabelle Coutant, agente de recherche et de développement en éducation des adultes, ICÉA

Les systèmes publics d’éducation ont été mis en place parce qu’ils sont un fondement de société, parce qu’ils servent à consolider le sentiment national et l’unité de l’État-nation. Les gouvernements ont progressivement organisé l’instruction des populations, mis en place des structures de gouvernance et ainsi conçu un bien public. Pour autant, les activités éducatives, même si elles sont offertes dans le cadre d’un système public, contribuent au bien commun. Dans les démocraties, on a voulu améliorer les niveaux de littératie pour que les individus soient plus autonomes et pour qu’ils puissent faire des choix qui contribuent au bien commun, par exemple en participant aux décisions en votant pour celles et ceux qui font les lois.

DE LA MÊME FAÇON, LA FORMATION QUI EST OFFERTE DANS LES MILIEUX INFORMELS OU NON FORMELS CONTRIBUE AU BIEN COMMUN. VOICI QUELQUES EXEMPLES :

Grâce à l’éducation financière, une personne saura faire un budget, gérer ses comptes et planifier ses dépenses. Si davantage de personnes ont développé ce type de compétences, la société tout entière en bénéficie, car sa population est moins endettée et plus autonome financièrement.

Avec l’éducation en matière de consommation, une personne comprend ses droits et ses recours lorsqu’elle achète un bien en ligne. À plus grande échelle, la connaissance des bons gestes en matière de cybersécurité permet à davantage de personnes de se prémunir contre la fraude.

L’éducation aux médias permet, entre autres, de développer des compétences pour savoir réagir en cas de cyberintimidation, que ce soit pour soi ou pour soutenir une victime. Les personnes qui se sentent en sécurité lorsqu’elles utilisent les médias numériques sont plus susceptibles de participer à la cybercitoyenneté, faisant ainsi entendre leur voix pour participer aux débats démocratiques.

Les formations et les ressources en éducation juridique permettent de connaître et comprendre ses droits. Avoir confiance en sa capacité à naviguer dans le système de justice est important lorsqu’il s’agit de faire valoir ses droits : dans une société, plus on compte de personnes faisant respecter leurs droits fondamentaux, plus le droit avance et plus la société devient égalitaire.

Les personnes qui participent à des activités d’éducation à l’environnement sont mieux outillées pour comprendre l’impact de leurs choix sur leur environnement, les enjeux sur la protection des milieux naturels, et contribuent à préserver la biodiversité.

L’éducation interculturelle ou multiculturelle permet aux personnes de s’ouvrir à la diversité culturelle, de savoir comment communiquer avec autrui, ce qui contribue à développer le « vivre-ensemble » dans les sociétés.

37 Bien commun et littératie communautaire

SOMMET NATIONAL SUR L’APPRENTISSAGE

TOUT AU LONG DE LA VIE

Du 4 au 6 mars 2024, la COFA a participé au Sommet national sur l’apprentissage tout au long de la vie, organisé par le Réseau pour le développement de l’alphabétisme et des compétences (RESDAC).

Ces trois jours de rencontres ont réuni les joueurs de la francophonie canadienne pour parler d’apprentissage tout au long de la vie et dans toutes les sphères de la vie.

Le gouvernement fédéral a donné le ton en modifiant l’article 41 (3) de la Loi sur les langues officielles. Désormais, les contextes d’apprentissage formel, non formel et informel sont reconnus dans la Loi. C’est maintenant à notre tour de voir comment chacun et chacune peut y jouer son rôle afin d’accroître notre impact sur la vitalité économique, culturelle et sociale de la francophonie canadienne.

Comme la plupart des personnes ayant un faible niveau de compétences en littératie et en calcul sont principalement d’âge adulte, l’importance de créer des synergies entre les divers milieux d’apprentissage formel, non formel et informel prend tout son sens.

« L’acquisition des compétences tout au long de la vie compte, ça a une valeur. Il faut le reconnaître. C’est notre rôle comme réseau pancanadien de créer des synergies autour du développement des compétences pour s’épanouir. Ne rien faire aurait un coût trop élevé », souligne

Mona Audet, présidente du RESDAC

Pour les 500 leaders qui ont participé à ce Sommet, le bilan est plutôt positif, mais il appelle également à l’urgence d’agir.

« Nous ne pouvons pas nous attendre à des résultats différents si nous continuons à faire les choses de la même façon année après année », déclare Mme Audet.

Dans le contexte actuel postpandémique, caractérisé par la pénurie de main-d’œuvre, la crise économique, les changements climatiques et la révolution numérique, il est impératif pour les francophones en situation minoritaire au Canada d’adopter une nouvelle culture d’apprentissage.

Pour clôturer cet événement, la déclaration du Sommet, signée par les leaders de la francophonie, mobilise des milliers d’organismes sur le concept de communauté apprenante.

En résumé, l’événement a été un franc succès, marquant une avancée significative dans le domaine de l’apprentissage tout au long de la vie au sein de la francophonie canadienne.

39 Sommet national

DÉCLARATION DU SOMMET

Attendu que l’apprentissage tout au long de la vie est un nouveau paradigme pour l’éducation promu par l’UNESCO et qu’il suscite une adhésion croissante à l’échelle mondiale;

Attendu que le gouvernement du Canada a pris acte de ce changement de perspective dans le cadre de sa nouvelle Loi sur les langues officielles qui énonce son engagement « à renforcer les possibilités pour les minorités francophones et anglophones de faire des apprentissages de qualité dans leur propre langue tout au long de leur vie »;

Attendu que le développement des compétences est une façon privilégiée de soutenir l’apprentissage tout au long de la vie, et que plusieurs cadres de compétences ont été adoptés à cet effet, notamment par les ministères de l’Éducation et le Conseil des ministres de l’Éducation (Canada) qui les réunit, le ministère Emploi et Développement social Canada et plusieurs organismes de la société civile;

Attendu que la plupart des cadres de compétences, notamment les récentes Compétences pour réussir, ont été conçus pour la majorité des Canadien·ne·s et ne tiennent pas compte des enjeux de vitalité communautaire et des défis d’apprentissage propres à la minorité francophone;

Attendu que la vitalité de la francophonie canadienne dépend notamment d’enjeux qui lui sont spécifiques tels que sa résilience aux forces d’assimilation et de déclin démographique, la nécessité d’agir collectivement et d’assurer sa gouvernance communautaire, de cultiver son vivre-ensemble, de développer son patrimoine linguistique, culturel et son identité et de rehausser ses niveaux de littératie.

Attendu que la Table nationale sur l’éducation a déduit de ces enjeux spécifiques avec lesquels doivent composer les communautés francophones en situation minoritaire quatre Compétences pour s’épanouir, soit les compétences linguistiques, l’engagement communautaire, l’affirmation identitaire et le vivre-ensemble;

Attendu que les compétences se développent dans différents contextes, souvent de façon complémentaire, en l’occurrence dans le contexte formel des institutions éducatives, le contexte non formel des organismes et institutions communautaires, des milieux de travail et des milieux de vie et le contexte informel de la lecture, de l’observation, de la discussion, etc.;

Attendu qu’au continuum des besoins d’apprentissage des individus doit correspondre un continuum de services, de ressources et d’occasions d’apprendre, ainsi que de moyens de reconnaître ces apprentissages, de façon formelle (diplômes, certificats…), non formelle (attestations, badges…) et informelle (auto-reconnaissance…);

Attendu que le continuum de services et de ressources d’apprentissage en milieu minoritaire francophone est moins diversifié qu’en milieu majoritaire et qu’une prise en charge communautaire doit venir compenser;

Attendu que pour jouer un rôle positif en appui au développement des compétences de leurs citoyen·ne·s, les communautés francophones peuvent elles-mêmes devenir des communautés apprenantes;

Attendu que les organismes et institutions communautaires sont les principales forces qui soutiennent le dynamisme de leur communauté et qu’ils peuvent eux aussi devenir des organisations apprenantes qui collaborent de façon intersectorielle;

Attendu que le nouveau paradigme de l’apprentissage tout au long de la vie et du développement des compétences exige un redéploiement urgent d’efforts et de stratégies à l’échelle des individus, des organisations et de la communauté dans son ensemble, un virage qui s’apparente à un nouveau contrat social;

Attendu que les participant·e·s au Sommet ont déjà entamé ou développé, dans le cadre de laboratoires vivants, divers chantiers qui contribueront à concrétiser ce nouveau contrat social;

En signant cette déclaration, les participant·e·s au Sommet adhèrent aux principes énoncés ci-dessus. Ils et elles s’engagent à inscrire l’apprentissage tout au long de la vie et le développement des compétences dans leur démarche d’épanouissement personnel, tout en contribuant à transformer leur milieu de travail en organisation apprenante et leur milieu de vie en communautés apprenantes.

40 Sommet national

RÉSEAU POUR

LE DÉVELOPPEMENT

DE L’ALPHABÉTISME

ET DES COMPÉTENCES (RESDAC)

Le RESDAC œuvre en éducation des adultes d’expression française, ce qui inclut l’alphabétisation et la formation de base, l’alpha familiale et le développement de toutes les Compétences pour réussir que met aujourd’hui de l’avant le Canada. Ses membres sont des pourvoyeurs de services dans ce domaine d’expertise, présents dans presque toutes les régions du Canada. Au fil des ans, le RESDAC a perfectionné des expertises qui ne sont pas offertes par d’autres organisations.

Le réseau offre une large gamme de services d’apprentissage formels, non formels et informels aux adultes francophones vivant en situation minoritaire, et en particulier à ceux qui sont parmi les plus vulnérables.

Sources :

Communiqué de presse du RESDAC, 28 mars 2024 : Sommet sur l’apprentissage pour la francophonie canadienne : l’urgence d’agir https://resdac.net/wp-content/uploads/CP-RESDAC-Sommet-sur-lapprentissage-Lurgence-dagir.pdf

Communiqué de presse du RESDAC, 21 février 2024 : Le sommet national sur l’apprentissage pour la francophonie canadienne — une première au Canada https://resdac.net/wp-content/uploads/CP-RESDAC-CDP-SOMMET_02212024.pdf

Déclaration du Sommet, RESDAC https://resdac.net/wp-content/uploads/2091.04-Resdac-Declaration-Ok-1.pdf

ALEXANDRIA

Les centres membres DU RÉSEAU DE LA COFA

Carrefour de formation pour adultes inc. www.carrefourformation.com

BARRIE

Le service de formation aux adultes – La Clé www.lacle.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

BRAMPTON

Le Collège du Savoir www.lecollegedusavoir.com

CHAPLEAU

FormationPLUS

www.quatrain.org/fr/fplus

COCHRANE

Centre de formation CochraneIroquois Falls www.votrecentre.ca

CORNWALL

Centre Moi j’apprends Inc. www.moijapprends.ca

ELLIOT LAKE

Centre d’apprentissage d’Elliot Lake www.nclc.ca

GERALDTON

Centre de formation pour adultes de Greenstone www.cfag.ca

HAMILTON

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

HAWKESBURY

Centre Moi j’apprends Inc. www.moijapprends.ca

HEARST

Centre de formation de Hearst www.formationhearst.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

KAPUSKASING

Centre d’éducation alternative www.cscdgr.education

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

KINGSTON

La Route du Savoir laroutedusavoir.org

KIRKLAND LAKE

Centre de formation des adultes inc. www.cfakirklandlake.wix.com/ formation

LONDON

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

MANITOUWADGE

Centre de formation Manitouwadge

Learning Centre

MATTICE

Centre de formation de Hearst www.formationhearst.ca

NEW LISKEARD

Centre d’éducation des adultes www.cscdgr.education

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

NORTH BAY

Le centre de formation du Nipissing www.formationnipissing.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

OTTAWA

Centre Moi j’apprends Inc. www.moijapprends.ca

Collège La Cité — Formation de base de l’Ontario pour adultes www.collegelacite.ca

PENETANGUISHENE

Centre de formation des adultes de La Clé www.lacle.ca

ROCKLAND

Centre Moi j’apprends Inc. www.moijapprends.ca

SAULT STE.MARIE

Centre d’éducation et de formation pour adultes www.cefassm.com

ST.-CHARLES

Alpha en Partage de Sudbury Est www.alphaenpartage.ca

STURGEON FALLS

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

SUDBURY

Centre de santé communautaire du Grand Sudbury www.formationsudbury.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

THUNDER BAY

Novocentre www.novocentre.com

TIMMINS

Centre de formation pour adultes francophones www.cfaftimmins.com

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

La CLEF - La croisée des lieux d’éducation et de formation www.cscdgr.education

TORONTO

Alpha-Toronto : Centre de formation des adultes www.alpha-toronto.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

WELLAND

ABC Communautaire www.abccommunautaire.ca

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

WINDSOR

Collège Boréal – Centre de perfectionnement des adultes www.collegeboreal.ca

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435 , RUE DONALD , BUREAU 301 , OTTAWA (ONTARIO) K 1 K 4 X 5 Cette œuvre est mise à disposition sous licence Attribution - Pas d’Utilisation Commerciale 4.0 International. Pour voir une copie de cette licence, visitez http://creativecommons.org/licenses/by-nc/4.0/ ou écrivez à Creative Commons, PO Box 1866, Mountain View, CA 94042, USA.

Financement offert par le gouvernement du Canada dans le cadre de la Subvention canadienne pour l’emploi. Prestation des programmes assurée par le gouvernement de l’Ontario. Les opinions exprimées dans cette publication ne réflètent pas nécessairement celles du ministère.

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