N°9 - Basique

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Numéro 9 - Jeudi 13 juin 2019

BASIQUE Le monde en toute simplicité

Les enjeux de l’immigation clandestine 6 - 7 Des milliers de manifestants au Liberia

Stonewall : l’histoire de la libération LGBT

Les paquebots de croisière trop polluants

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EDITO Par notre rédactrice en chef, Clémence Bouquerod clemence.bouquerod@iscpalyon.net Mois de juin égal mois des fiertés. Et cette année, c’est particulier. Nous sommes 50 ans pile après les trois jours d’émeutes de Stonewall [ndlr : voir p. 9]. Nous sommes 50 ans après la naissance du mouvement LGBT+, 50 ans après la naissance des marches des fiertés. Et depuis, le ‘‘Gay Power’’ n’a pas fini de prendre de la force. Déjà une trentaine de pays ont légalisé le mariage entre deux personnes du même sexe. Mais sur 194 pays dans le monde, même si c’est déjà un une belle avancée, cela veut surtout dire que beaucoup d’autres interdisent encore la communauté. Encore 74 États pénalisent les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles ou transgenres par de la prison, de la torture, la peine de mort ou des travaux forcés. Par exemple, dans 11 pays, dont l’Afghanistan et le Pakistan, être homosexuel est passible d’une peine de mort. Et c’est inadmissible en 2019. Car être homosexuel, transgenre, bisexuel, ou encore non-genré ne devrait pas vouloir dire faire partie d’une minorité. Finalement, pourquoi ne pas tout simplement laisser les gens être qui ils veulent, qui ils sont, et encore mieux, aimer les personnes qu’ils veulent aimer ? Le mois des fiertés, c’est aussi -comme son nom l’indique- une manière de se rappeler qu’on est fier d’être qui on est. Qu’on soit un homme cisgenre [ndlr : lorsqu’on se sent être du même sexe que notre sexe attribué à la naissance] ou non, qui aime les femmes ou non, ou encore une femme transgenre qui aime les femmes. Ou tout simplement qu’on ne se sente rentrer dans aucune case, qu’on aime ou qu’on est attiré par personne. Tout le monde devrait avoir le droit d’être respecté pour ce qu’il est.

Rédaction : BCHINI Antoine CHEVALLIER Fabien DUMUR Mathilde HECKMANN Manon LOPEZ Paulino PELLOUX Juliette ROSSIER Yann THIEBAUD Octavien

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Crédits photos UNE : ©Kibarya ©Finbarr O’Reilly/ Reuters ©Jacobin ©Mer et Marine Contact Twitter rédaction : @BasiqueMagazine Adresse rédaction 47 Rue Sergent Michel Berthet Lyon 9e


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SOMMAIRE MEDIAS Deux perquisitions chez la télévision nationale australienne

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POLITIQUE Grandes manifestations au Liberia contre le président

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LE GROS DOSSIER Les différents enjeux de l’immigration clandestine

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Perquisitions chez ABC pour divulgations d’informations compromettantes ©Courrier International / Page 4

FRANCE Quel dénouement pour les djihadistes français condamnés à mort en Irak ?

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CULTURE Retour sur la naissance du mouvement LGBT

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En Irak, onze Français sont condamnés à morts pour appartenance à Daesh ©Le Parisien / Page 8

ENVIRONNEMENT Les paquebots polluent davantage que l’ensemble des voitures en Europe

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TOP OU FLOP ? La Malaisie renvoie des milliers de tonnes de déchets dans les pays développés

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LA PHOTO DE LA SEMAINE

La Malaisie a importé 870 000 tonnes de déchets en 2018 venu des pays développés ©Libération / Page 11

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MEDIAS La presse s’inquiète de ses droits en Australie Deux perquisitions ont eu lieu en Australie les 4 et 5 juin. La première dans la capitale, à Canberra, chez une journaliste politique, et l’autre à Sydney, à l’Australian Broadcasting Corporation (ABC) -le réseau de radio et télévision national. Mis en cause, des reportages datant de 2017 et 2018, divulguant des projets du gouvernement sur la surveillance intérieure, et des potentiels crimes de guerre des forces spéciales.

Le domicile de la journaliste Annika Smethurst a été perquisitionné à cause d’un de ses reportages @TheAustralian

La liberté de la presse en Australie a été mise à mal la semaine dernière. ‘‘Divulgation d’information compromettant la sécurité nationale’’, c’est le motif du mandat de perquisition utilisé par la police fédérale à l’encontre de la journaliste Annika Smethurst, chef du service politique au Daily Telegraph. En 2018, elle a réalisé un reportage suite à un projet du gouvernement, plus particulièrement des ministères de la Défense et des Affaires internes. Le projet voulait donner plus de pouvoir pour espionner les citoyens, via les mails, SMS et relevés bancaires. Intimement liée à la première, la seconde perquisition du côté du média national ABC mettait en cause un autre reportage de 2017 sur les actions des forces

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spéciales australiennes en Afghanistan, commettant des crimes de guerre. Entre autres : meurtres d’hommes non armés et d’enfants. Un soutien unanime Les deux victimes et l’immense majorité de leurs confrères journalistes dénoncent une atteinte au droit de savoir. Ces informations sont capitales pour les citoyens qui doivent connaître les actions de leur pays, d’autant plus lorsqu’il s’agit d’espionnage. Si le ministre de l’Intérieur assurait ne pas être au courant de ces actions, c’est le Premier ministre Scott Morrison qui les a justifiées au nom du secretdéfense et de la sécurité nationale. La plus grande

La liberté de la presse est loin d’être un droit acquis pour tout le monde. En France, cette liberté est un droit constitutionnel depuis la révolution de 1789. Article 11 de la constitution : “Tout citoyen peut parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi.”. En Australie, elle ne figure dans aucune loi, ni dans la constitution. Si cette liberté est respectée, elle reste vulnérable contrairement à la France. Depuis 1948, elle est inscrite dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. inquiétude vient du fait que la liberté de la presse n’est pas inscrite dans la constitution australienne, ce qui a poussé les organismes de presse et les syndicats à monter au créneau contre ces perquisitions, par peur d’avoir une liberté réduite. Cette affaire rappelle en France la perquisition avortée à la rédaction de Mediapart, après une enquête préliminaire sur des enregistrements de conversations privées dans le cadre de l’affaire Benalla. La perquisition n’a cependant pas eu lieu.

BCHINI Antoine


POLITIQUE Le président du Liberia George Weah a été confronté à des premières grandes manifestations George Weah, président du Liberia depuis le 22 janvier 2018, doit faire face à des premiers heurts ont éclaté mercredi 5 juin, près du quartier général de la police à Monrovia, entre les forces de l’ordre et plusieurs opposants. Les protestataires, jeunes pour la plupart, réclamaient la libération du député d’opposition Yekeh Kolubah, figure du mouvement, entendu dans une affaire de droit commun. Ce dernier a été interpellé le 5 juin dernier. Il a dû répondre aux allégations d’un homme l’accusant d’avoir ‘‘ordonné à ses gardes du corps de le battre à mort’’. Le député a ensuite été remis en liberté, avec aucune charge retenue contre lui. L’enquête est toujours en cours. Une crise économique importante pour le Liberia Depuis plus de deux mois, de nombreuses associations de la société civile, réunies au sein d’un ‘‘conseil des patriotes’’, ont appelé dans les médias et sur les réseaux sociaux à manifester le vendredi 7 juin dans les rues de Monrovia, contre le gouvernement de George Weah. Le conseil a eu le soutien des partis d’opposition. Leurs revendications font notamment suite à la mauvaise gestion du président pour résorber la crise économique que traverse le pays. Le Liberia connaît en effet une importante inflation causée par une chute de la valeur de la monnaie nationale. L’opposition demande également un renforcement

Le président libérien George Weah, à Paris en novembre 2018 @POOL New

Des partis d’opposition et des associations de la société civile se sont réunis, le 7 juin dernier, pour réclamer les promesses de campagne sur l’amélioration des revenus et des conditions de vie. Un premier test d’envergure pour l’ancien footballeur, devenu président d’un pays au passé agité.

de la lutte contre la corruption, l’une des promesses phares de la campagne de George Weah, ainsi que la mise en place d’un jugement des responsables de la guerre civile de 1989 à 2003 (qui a fait plus de 250 000 morts). George Weah s’était dit prêt à écouter ces revendications, jugeant inutile la manifestation, à laquelle il a interdit aux fonctionnaires de participer. ‘‘Nous ne quitterons les rues que lorsque nous aurons obtenu des résultats ’’ Selon un correspondant de l’AFP, 4000 personnes étaient présentes dans les rues de Monrovia au cours de la manifestation du 7 juin. De son côté, l’ancienne star du ballon rond a promis de garantir la sécurité et le droit de manifester. Ce à quoi le populaire animateur de radio et figure du mouvement protestataire, Henry Costa, a répondu ‘‘nous ne quitterons les rues que lorsque nous aurons obtenu des résultats’’. ‘‘Le problème fondamental, c’est le cours du dollar américain’’, qui a doublé par rapport au dollar

libérien en deux ans, selon le professeur d’économie Samuel Vaye. ‘‘Avant, je pouvais nourrir ma famille pendant un jour avec 500 dollars libériens (2,3 euros). Maintenant, avec 1 000 dollars, je n’y arrive plus’’, se désole Angeline Flomo, une mère de famille de 35 ans. Des opérations monétaires hasardeuses, conduites par la Banque centrale du Liberia (CBL) sous les administrations de Ellen Johnson Sirleaf, l’ancienne présidente, puis de George Weah, n’ont fait qu’aggraver la situation. Cinq anciens responsables de cette institution ont été inculpés en mars pour ‘‘sabotage économique’’. George Weah a annoncé le 29 mai le lancement d’un programme d’aide, synonyme de “sacrifice”, du Fonds monétaire international (FMI), censé stabiliser l’économie de son pays. Il s’est aussi engagé à changer la direction de la CBL, à intensifier la lutte contre la corruption, et à maintenir la priorité accordée à l’éducation, à la santé, aux infrastructures routières et à l’investissement.

PELLOUX Juliette

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LE DOSSIER DE LA SEMAINE

Immigration clandestine : quels enjeux internationaux ? Menacé par Trump, le Mexique va prendre de nouvelles mesures contre l’immigration clandestine. Alors que le durcissement des contrôles aux frontières pourrait devenir une tendance mondiale, les vagues migratoires sont devenues une problématique politique et économique majeure. Face à la menace terroriste ou à la crise migratoire, plusieurs pays de l’espace Schengen ont décidé de rétablir les contrôles à leurs frontières nationales © Carto

européenne ces dernières années. Certains pays ou partis politiques nationalistes et/ou populistes souhaitent un retour des contrôles aux frontières intérieures permanents, remettant en cause la librecirculation entre les pays de l’espace Schengen. Cette fracture s’est particulièrement illustrée avec la Hongrie, qui, pour se protéger des migrants, a érigé un mur de fer de quatre mètres de haut et de 175 km de long à ses frontières.

Ce 8 juin dernier, Mexico a annoncé que des “mesures fortes pour endiguer le flux migratoire” sur son sol allaient être prises. Une décision qualifiée “d’accord avec les autorités mexicaines” par Donald Trump. Ce dernier a assuré que “les tarifs douaniers prévus pour être appliqués lundi par les Etats-Unis contre le Mexique sont suspendus indéfiniment”. Le président américain avait en effet menacé le 30 mai dernier d’imposer dès le 10 juin des taxes sur tous les produits importés du Mexique. Ces taxes, d’abord fixées à 5%, étaient susceptibles de monter jusqu’à 25% d’ici le mois d’octobre. L’objectif était d’obliger le Mexique à se montrer plus sévère et “actif” contre les migrants clandestins entrant aux États-Unis.

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En mai, plus de 144 000 arrestations de sans-papiers ont été effectuées aux ÉtatsUnis, une hausse de 32% par rapport à avril. Ces chiffres n’avaient pas été aussi hauts depuis une décennie.

Face aux vagues d’immigration clandestine, plusieurs pays d’Europe, comme l’Italie ou l’Espagne, ont également durci leur position. D’autres ont rétabli “temporairement” les contrôles aux frontières nationales, dont la France jusqu’au 30 avril dernier, ou encore l’Autriche et l’Allemagne, grâce à une mesure prévue par l’espace Schengen. Cette question de protection des frontières a d’ailleurs été à l’origine d’une rupture au sein de l’Union

L’immigration et le contrôle des frontières sont ainsi devenus un sujet au coeur des campagnes électorales présidentielles, ou plus récemment européennes. Alors que de plus en plus de gouvernements et groupes politiques pointent du doigt les effet négatifs de l’immigration clandestine, qu’en est-il de l’impact économique sur les pays ?


L’IMMIGRATION CLANDESTINE

214 millions de migrants partent de chez eux chaque année. L’organisation internationale pour les migrations recense près de 17 000 morts et disparus en Méditerranée depuis 2014 © L’Economiste Maghrébin

Un atout ou un fardeau pour l’économie ? Selon l’économiste Hippolyte d’Albis, après une vague importante d’immigration, contrairement aux idées reçues, le PIB par habitant va croître de façon significative pendant quatre ans, tandis que le taux de chômage va baisser. Si les dépenses publiques augmentent, les recettes, elles, s’accroissent également grâce aux impôts et aux cotisations de ces nouveaux migrants. L’économiste français affirme que les salaires ne sont pas influencés par l’immigration. En prenant l’exemple des rapatriés d’Algérie de 1962, il démontre que les salaires baissent les premières années après l’arrivée de migrants, mais que cet effet se résorbe au bout de 15 ans. À long terme, l’immigration ne semble pas avoir d’effet sur les revenus. De plus, les migrants consomment dans des commerces locaux, ce qui augmente le pouvoir d’achat du pays en question. Les migrants qui partent de chez eux sont souvent jeunes,

âgés de moins de 40 ou 50 ans, ce qui signifie que les arrivants sont prêts à travailler et à cotiser au service du pays dans lequel ils sont. L’immigration amène un phénomène : la fuite des cerveaux. Par exemple, plus de 80 % des chercheurs nés au Vietnam ou encore au Cambodge résident aux ÉtatsUnis. Les États-Unis profitent des études des migrants et ne tirent que les bénéfices de cette immigration. Sergey Brin, le cofondateur de Google, était d’origine russe. Le père de Steve Jobs, lui, était syrien…

Donald Trump veut durcir les contrôles aux frontières avec son voisin, mais l’impact sur son pays serait très conséquent. Selon le Centre d’études prospectives et d’informations internationales, si les immigrés mexicains quittaient les ÉtatsUnis du jour au lendemain, le PIB du pays subirait une baisse de 0,61 %. À l’inverse, les études démontrent que la légalisation de l’immigration avec un contrôle aux frontières augmenterait de 0,17% le PIB, et qu’une légalisation sans contrôle l’accroisserait de 0,53%.

Les États-Unis sont un pays très atteint par l’immigration mexicaine.

HECKMANN Manon LOPEZ Paulino

Les migrations en chiffres : • • • • •

214 millions de migrants partent de chez eux chaque année 60% des migrants se déplacent entre pays développés ou en voie de développement, les migrations sud-nord ne représentent que 37% des migrations. En 2050, selon les prévisions, plus de 200 000 millions de personnes deviendront des immigrés climatiques L’immigration représente 88% de la population des Émirats arabes unis L’Asie est le continent qui compte le plus de migrants : 106 millions

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FRANCE Djihadistes français condamnés : “Il est difficile de savoir quels accords ont été conclus entre la France et l’Irak” 11 djihadistes français ont récemment été condamnés à mort en Irak. La France assure multiplier les démarches pour leur éviter la peine capitale. Paule Gonzalès, journaliste au service société au Figaro, a décrypté cette affaire. Elle répond à nos questions. Quelle position occupe la France quant à la condamnation à mort des détenus français à Bagdad? Le gouvernement français est clair sur le sujet : aucun retour des djihadistes en France n’est envisageable. Après, il y a une ambiguïté politique entre certains ministres. Pour Florence Parly, ministre des Armées, ces djihadistes ont choisi la guerre. Ils ne peuvent donc pas demander maintenant l’état de droit et revenir dans leur pays d’origine. Alors que pour Nicole Belloubet, ministre de la Justice, la France se doit de respecter l’état de droit et le procès équitable. Malgré ces ambiguïtés, la France met tout en oeuvre pour éviter à ces djihadistes la peine de mort. Certains avocats dénoncent ces condamnations en s’appuyant notamment sur le protocole 13 à la Convention européenne des droits de l’homme. Quels sont les enjeux constitutionnels dans cette affaire? Le ministère des affaires étrangères français a actionné la protection consulaire pour ses djihadistes. Si cette protection est utilisée jusqu’au bout, elle active le protocole 13 à la Convention des droits de l’homme. Ce protocole, qui défend la prohibition de la peine de mort, permet de négocier avec les différents Etats pour que

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120 djihadistes français sont actuellement détenus dans les prisons irakiennes © AFP

la peine capitale ne soit pas prononcée. Visiblement, ce dernier point n’a pas été actionné, étant donné que les djihadistes français ont été condamnés à mort. Néanmoins, il est difficile de savoir exactement quels accords ont été conclus entre l’Irak et la France, car ils sont secrets. C’est ce que cherchent à faire les avocats : prouver qu’il y a bel et bien eu un accord entre la France et l’Irak, et que le protocole n’a pas été activé. Concrètement, est-il possible que la justice irakienne revienne sur ses décisions? Il y un appel en cours. La cour d’appel irakienne peut maintenant revenir sur ces condamnations à mort, ou les confirmer. Ensuite, en Irak toutes les condamnations à mort doivent être signées par le président. Ce dernier est en droit de les accepter ou non. Pour l’instant rien est encore officiel. Mais même si la cour d’appel décide de confirmer ces condamnations, celles-ci peuvent toujours être refusées par le président.

Il faut savoir aussi que les condamnations à mort et la détention des djihadistes coûtent très chères à l’Irak. Qu’en est-il des autres pays? Se rangent-ils du même côté que la France pour leurs ressortissants détenus en Irak, ou procèdent-ils à l’extradition de leurs djihadistes? La Russie rapatrie tous ses ressortissants. Les ÉtatsUnis commencent également à en rapatrier de plus en plus. La Belgique, elle, suit exactement la même logique que la France, et ne les rapatrie pas. Pour la Grande-Bretagne, c’est un peu plus compliqué. Les ressortissants britanniques qui ont une double nationalité n’appartiennent plus à la Grande-Bretagne. Le pays n’est donc plus en mesure de décider de leur sort. Mais pour ceux qui n’ont que la nationalité anglaise, il y a déjà eu des condamnations à mort. Après, je ne sais pas si les Britanniques se rangent dans la même logique que la France pour tous leurs ressortissants.

ROSSIER Yann


CULTURE

Stonewall : cinquante ans plus tôt, la naissance du mouvement LGBT En ce mois de juin, la communauté LGBT fête le « mois des fiertés » à travers plusieurs marches. Mais revenons là où tout a démarré, cinquante ans plus tôt, à New-York, après les émeutes de Stonewall. Le 28 juin 1969. Pour les membres de la communauté LGBT, cette date signifie beaucoup. Cinquante ans plus tôt, homosexuels, transgenres, travestis, afro-américains, latinos et autres marginaux se retrouvent dans un bar newyorkais : le Stonewall Inn. Un lieu qui faisait souvent l’objet de raids policiers. Les forces de l’ordre procédaient alors à des arrestations musclées car, en ce temps, il était interdit de servir de l’alcool à un homosexuel, de danser entre hommes ou encore de se travestir. Jusqu’à ce que les marginaux du Stonewall Inn décident de se rebeller. Le 28 juin 1969, et, pendant trois jours, des émeutes sont lancées. Les clients du bar s’opposent aux forces de l’ordre et crient ‘‘Gay Power‘‘ dans les rues de New-York. C’est le début du mouvement LGBT. Le début de la reconnaissance Ces émeutes sont fondatrices d’un mouvement qui ne cessera de grandir par la suite. Deux mois après Stonewall, deux organisations militantes homosexuelles sont fondées et trois journaux défendant les droits des homosexuels sont créés. En 1970, la ville de New-York autorise 2 000 manifestants à se réunir pour la ‘‘Christopher Street Liberation Day Parade’’, qui sera célébrée chaque année par la suite et qui donnera naissance à la Gay Pride. Aujourd’hui, la ‘‘Marche des Fiertés’’ est d’ailleurs

Malgré la violence des afrontements lors des émeutes de Stonewall, aucune victime n’a été déplorée ©The New York Times

bien différente de ce qu’elle était à son commencement, à savoir, une marche funèbre en l’honneur des victimes de persécutions et de violences. Un militantisme qui a permis à cette communauté, autrefois cachée et dénigrée, d’obtenir des droits. Aujourd’hui, 28 pays autorisent le mariage gay, dont Taïwan, premier pays asiatique et dernier de la liste à avoir légalisé l’union entre deux personnes du même sexe. Aux Etats-Unis, 37 États sur 50 autorisent ces unions. Une grande avancée lorsque l’on sait que 27 États l’interdisaient en 2014. Plus récemment, le 30 mai 2019, la ville de New-York a annoncé la construction d’un monument commémoratif en hommage à Marsha P. Johnson et Sylvia Rivera, deux femmes transgenres et héroïnes des émeutes de Stonewall. Ce sera l’un des premiers monuments rendant hommage à des personnes trans au monde. Les récits disent que Sylvia Rivera est la première à avoir lancé

une bouteille sur les policiers, entamant ainsi le début des hostilités. Et en ce début du ‘‘Mois des fiertés’’, la police de New-York s’est excusée pour la première fois des violences dont elle a fait preuve, cinquante ans auparavant. ‘‘Ce qui s’est passé n’aurait pas dû se passer. Les actions et les lois étaient discriminatoires et tyranniques’’. Pour la communauté LGBT, les émeutes de Stonewall restent donc une date emblématique, fondatrice de toutes les libertés acquises à ce jour.

En 1999, la ville de New-York décide de faire du Stonewall Inn un “monument historique du patrimoine de la ville.” Quelques années plus tard, en 2016, Barack Obama désigne le site du soulèvement de Stonewall comme “monument national”.

THIEBAUD Octavien

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ENVIRONNEMENT

En Europe, 47 paquebots polluent dix fois plus que 260 millions de voitures

D’après l’ONG Transport & Environment, 47 paquebots de croisière émettent dix fois plus d’oxyde de soufre que les 260 millions de voitures du continent européen. Parmi les gazs rejetés, on trouve également de l’oxyde d’azote, très nocif pour la santé. Cela met sur la table le débat des ports à zéro émission.

Les paquebots de croisière sont bien plus poluants que l’ensemble des voitures en Europe ©BFMTV

Pour estimer leurs émissions de polluants, l’ONG a tracé durant un an 203 bateaux. D’après l’organisation, ces navires auraient émis, en 2017, 62 000 tonnes de SOx (dioxyde de soufre), 150 000 tonnes d’oxyde d’azote et 10 millions de tonnes de CO2. L’étude a principalement visé la compagnie numéro 1 de la croisière : Carnival Corporation. Avec ses 47 navires, elle aurait émis dix fois plus d’oxyde de soufre que 260 millions de voitures. Dans cette étude, l’ONG a également dressé un classement des ports, des pays et des villes les plus touchés par ces émissions portuaires. Les ports de Barcelone et de Palma de Majorque sont en tête du classement. Marseille est à la cinquième position. Pour illustrer, 57 bateaux de croisière ont fait escale dans la cité phocéenne en 2017. Ils auraient rejeté 15 tonnes d’oxyde de soufre, près de quatre fois plus que l’ensemble des véhicules de la ville.

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Des ports à zéro émission ? Les solutions deviennent ‘‘impératives’’ pour Transport & Environment suite aux nombreux décès survenus. D’après une étude effectuée en 2015 par des chercheurs allemands, la pollution liée au transport maritime serait responsable de 60 000 décès chaque année en Europe. Alors l’ONG demande dans son rapport la multiplication des ports à zéro émission. ‘‘Il faut étendre la zone d’émission contrôlée de soufre à l’ensemble du continent européen’’ (aujourd’hui, elle concerne uniquement les ports du bassin méditerranéen). Cette zone interdit les navires d’utiliser un carburant qui émet plus de 0,1% d’oxyde de soufre. En dehors de l’Europe, la question est également d’actualité, notamment aux États-Unis. Le 12 juin 2017, les maires démocrates de Los Angeles ont déclaré que d’ici 2030, ils allaient ‘‘investir

considérablement dans les technologies propres afin d’atteindre un taux d’émission de 0%.’’ En Californie, les émissions portuaires sont la première source de pollution atmosphérique. À Auckland, en Nouvelle-Zélande, c’est aussi prévu. Le POAL (Port of Auckland), a l’ambition de réduire son taux d’émission à 0% d’ici 2040. De nombreux accidents graves La question de l’insécurité liée aux bateaux de croisière est également en jeu. Dimanche 2 juin, un paquebot de la société MSC a heurté un quai ainsi qu’un bateau touristique en voulant s’amarrer dans le port de Venise. Résultat : quatre blessés. Jeudi 30 mai, une collision entre un bateau de croisière et une embarcation s’est produite à Budapest, faisant 7 morts et 21 disparus.

CHEVALLIER Fabien


TOP OU FLOP ?

Crise mondiale du plastique : La Malaisie n’est pas ‘‘la décharge du monde’’ Alors que la Chine a bloqué en 2018 son importation des déchets venus majoritairement d’Occident, les autres pays asiatiques s’en trouvent submergés. La Malaisie a vu l’importation de plastique tripler sur son territoire depuis 2016, jusqu’à atteindre 870 000 tonnes en 2018. Le pays a alors décidé de renvoyer les déchets chez leurs expéditeurs. ‘‘Nous exhortons les pays développés à cesser d’expédier leurs déchets dans notre pays’’, a martelé la ministre de l’Environnement de Malaisie mardi 28 mai. Ce jourlà, un véritable business encore méconnu pour nombreux : le recyclage des déchets, a été mis au jour. Cela fait des dizaines d’années que les pays développés vendent leurs déchets en Asie à des entreprises de recyclages plus ou moins légales. Les pays s’adonnent à cette mesure à cause de leur incapacité à gérer l’ensemble des détritus produits sur leur territoire. Greenpeace a publié dans un rapport la liste des 21 pays qui exportent le plus. À la première place, les États-Unis, suivis par le Japon et l’Allemagne. La France se trouve quant à elle en 16e position. La Malaisie a affirmé qu’elle allait renvoyer 3 000 tonnes de déchets plastiques dans ces pays, de quoi créer une crise mondiale des déchets. Le flop dans cette histoire, c’est d’apprendre que des pays développés se servent des pays asiatiques comme de leur décharge. Ainsi, des pays comme la France ou l’Allemagne, mais aussi le Canada, l’Australie ou encore l’Arabie Saoudite se débarrassaient de toutes sortes de déchets : des cartons, des métaux, mais surtout du plastique. Ce même plastique que l’on nous demande de trier dans la poubelle spécifique. Mais le plus gros problème

359 millions de tonnes ont été produits en 2018. © Asyalist

s’avère être que certains des déchets qui arrivent en Asie ne sont pas tous recyclables. En effet, quand des mélanges de déchets non triés arrivent, il est presque impossible de les transformer. Ils s’accumulent alors et finissent par s’entasser dans des décharges à ciel ouvert, et sont brûlés. Sans compter les tonnes de plastique déversées dans la mer. Un désastre pour l’écologie. ‘‘La Malaisie ne sera pas la décharge du monde’’ Le pays asiatique a décidé de prendre des décisions drastiques. Fin de l’importation des déchets, et même retour à l’expéditeur de ceux présents sur le territoire malaisien. Cette décision a créé un léger vent de panique partout dans le monde. Aux États-Unis, les usines de recyclage sont saturées, et des centaines de municipalités n’arrivent plus à recycler leurs déchets ; en Europe on s’organise entre voisins : l’Angleterre envoie ses déchets en Allemagne, qui

commence aussi à saturer ; et en Australie on n’a toujours pas trouvé de solutions, alors on continue d’envoyer les déchets plus ou moins recyclables en Inde. Le ministre français de la Transition écologique François de Rugy a affirmé souhaiter qu’à ‘‘l’échelle européenne, on se donne comme règle que nos déchets, on les recycle en Europe’’. Le monde doit se réorganiser et réinventer son système de recyclage des déchets, maintenant que la solution de facilité -soit l’exportation vers des pays pauvres, n’est plus autorisée. La Chine était la première destination mondiale du recyclage. En 2018, elle a banni l’importation de plastique et autres déchets. Le réseau a donc été redistribué au Vietnam, en Thaïlande et surtout en Malaisie. Pour faire face à cette marée de déchets, la Malaisie va renvoyer 60 conteneurs d’ordures à leur pays d’origine, soit 3 000 tonnes de déchets. Selon un rapport de PlasticsEurope, la production mondiale de plastiques est de 359 millions de tonnes en 2018.

DUMUR Mathilde

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LA PHOTO DE LA SEMAINE

Manifestation anti-Trump à Londres le 4 juin à l’occasion de la visite d’Etat du président américain. Traduction des pancartes : ‘‘Non au racisme, non à Trump’’. / © Alkis Konstantinidis – Reuters

Donald Trump mal accueilli à Londres Le 4 juin, à l’occasion de la visite d’État du président américain à Londres, des manifestations anti-Trump se sont déroulées. Basique a souhaité revenir sur cet évènement avec la photo de la semaine. Sur cette photographie se trouve une jeune femme qui crie, avec un masque autour du cou, où figure le hashtag ‘‘Trump stinks’’, soit ‘‘Trump pue’’. A l’arrière, des pancartes clament qu’il faut ‘‘larguer Trump’’, ‘‘se battre contre la bigoterie’’ [ndlr : synonyme d’intolérance, d’hypocrisie], ou disent ‘‘non au racisme, non à Trump’’. En arrière plan, une horde de protestataires. Mais ils n’étaient en réalité que des milliers à manifester. Affluence nettement moins importante que lors de la dernière manifestation anti-Trump. ‘‘Retourne chez toi !’’

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Entre cris et fumigènes, de nombreuses pancartes différentes

ont été brandies. Les causes étaient nombreuses chez les protestataires : la politique d’immigration fermée de Donald Trump, sa manière de gérer le conflit palestinien, ses opinions sur le développement durable, son racisme, son sexisme, ... Le dirigeable caricatural du président de la dernière manifestation a d’ailleurs été ressorti, devenu maintenant la mascotte des anti-Trump. Ce ballon de 6 mètres le représente bébé avec une couche, dénonçant ses réactions ‘‘enfantines’’. Ces manifestations ont eu lieu lors du deuxième jour de la visite de Donald Trump au Royaume-Uni, peu avant son rendez-vous avec Theresa May à Downing Street. Le but de celles-ci ? ‘‘Faire preuve de solidarité avec ceux qu’il a attaqués aux États-Unis, dans le monde

entier et dans notre pays’’, a tweeté lundi Jeremy Corbyn, leader de l’opposition travailliste. Des partisans toujours présents Des défenseurs du président sont tout de même allés dans les rues pour le soutenir, certains coiffés de l’emblématique casquette rouge de sa campagne, frappée du slogan ‘‘Make America great again’’. Ceux-ci portaient aussi des pancartes hostiles au maire de Londres, traité le 3 juin de ‘‘loser total’’ par Donald Trump. Trump, quant à lui, affirme lors d’une conférence de presse n’avoir vu qu’une ‘‘très petite’’ manifestation à son égard.

BOUQUEROD Clémence


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