Détournement de la gentrification Soutenus par des associations comme East Street Art, des artistes leedsiens ont la possibilité de louer des locaux, y établir un atelier pour une somme dérisoire. Le coût de la vie à Leeds est moins élevé proportionnellement aux salaires que dans le sud du pays. De plus, ces dernières décennies ont été riches pour Leeds en termes de festivals de cinéma indépendant, de danse ou encore de carnavals. En Angleterre, il existe une certaine fierté à revendiquer la culture d’où l’on est issue en transposant par exemple des festivités traditionnelles vers sa nouvelle culture. Ainsi dans le ward de Chapel Allerton, la communauté antillaise organise depuis 50 ans un des plus importants défilés de carnavals des Caraïbes en Europe qui fait aujourd’hui partie de la programmation officielle de la ville (fig.29). Entre les classes créatives et ces communautés souvent regroupées sur le territoire par origines, il existe un rapport vertueux réciproque. Le travail photographique de Johnathan Turner se base essentiellement sur la diversité culturelle du quartier décrié de Chapeltown. Dans son projet Street Studio (fig.28), il réalise des portraits des habitants de son quartier, il les place ainsi au centre de son discours artistique. En 2014, le projet Dark and Lovely propose une semaine de performance autour du débat culturel et social à propos des cheveux noirs et de ce qu’ils révèlent de notre compréhension de l’identité noire. Des artistes sont eux même issus de ces communautés racisées, comme Akeelah Bertram. Cette jeune plasticienne métisse élabore ses installations dans le but de perdre nos repères et d’oublier nos frontières physiques, spatiales et mentales, militant contre l’exclusion sociale. Une cohabitation vertueuse Il apparaît que le phénomène de regroupement de populations d’origines immigrées et la cohabitation avec la classe créative qui base sa production sur cette diversité réalisent le détournement de l’effet de gentrification dans ces quartiers. Ces espaces se redynamisent avec leurs propres résidents. Les initiatives par et pour les habitants de ces quartiers populaires nous véhiculent un regard neuf sur les difficultés de ces lieux ; pourtant accablés par les chiffres officiels. Une grande volonté d’entraide et de partage émane de ce ralenti économique ainsi qu’une requalification spatiale. On assiste à un véritable retournement de la valeur de ces lieux et ces quartiers. D’un aspect désuet et précaire, ils prennent le temps d’une installation ou d’un festival le visage de renouveau de Leeds.
∙45