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Recommandations et futur programme de recherche

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Bibliographie

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ENCADRÉ 2.8 (suite)

Graphique E2.8.3 Taux de survie des entreprises dans une sélection de pays, suivant l’âge

et la taille

Vietnam

Afrique du Sud

Moldavie

Kosovo

Côte d’Ivoire

0 20 40 60 80 Proportion d’entreprises qui survivent (%) Nouveaux entrants Entreprises qui survivent après 5 ans Entreprises de moins de 10 employés après 5 ans

Source : Moretto, Weber et Aterido, 2018. 100

capital humain doivent se concentrer sur la production d’entrepreneurs du numérique hautement qualifiés qui développeront les technologies appelées à créer les grandes entreprises.

Recommandations et futur programme de recherche

L’Afrique subsaharienne doit investir dans le développement des infrastructures physiques et l’amélioration du cadre réglementaire, comme le recommande le RDM 2019, afin de créer les conditions propices à la création d’emplois dans le secteur privé formel. En outre, elle doit agir vite afin de créer les conditions nécessaires en matière de capital humain pour tirer avantage des opportunités de création d’emplois dans la région offertes par les technologies numériques. La clé de voûte de cette stratégie consiste d’une part à former une masse critique d’inventeurs et d’entrepreneurs et à lui permettre de mettre au point et développer à grande échelle des technologies numériques qui vont stimuler

la productivité de tous les travailleurs, en particulier des peu qualifiés, dans leurs activités actuelles et dans de nouveaux emplois, et d’autre part, à renforcer l’offre de services éducatifs et de santé. L’offre actuelle de diplômés en STIM dans la région subsaharienne est insuffisante au regard du nombre nécessaire pour générer un élan d’innovation. Les données indiquent qu’il coûte aux étudiants de la région quelque 20 à 30 % de plus pour s’inscrire à des cursus universitaires en STIM qu’en d’autres matières telles que les sciences humaines et sociales. Sans surprise, la plupart des inscriptions dans l’enseignement supérieur concernent d’autres matières que les STIM. Le coût des études en STIM est élevé non seulement pour les étudiants, mais aussi pour les établissements. Au niveau universitaire, la mise en œuvre d’un cursus de STIM de qualité exige d’énormes investissements pour équiper les salles de cours, bibliothèques, laboratoires et, surtout, pour recruter des experts hautement qualifiés capables d’enseigner les cursus de STIM à un niveau conforme aux standards internationaux. Les États et autres parties prenantes devront procéder à des investissements en capitaux énormes et coûteux afin de permettre aux universités de développer des cursus de STIM de qualité. Les États devront de plus supporter une part de la charge financière des étudiants qui s’inscrivent à ces cursus. Or, au vu de la faible marge de manœuvre budgétaire dont dispose l’enseignement supérieur dans la plupart des pays de la région et du manque de ressources en capital humain adapté, qui empêche la dispense d’un enseignement de qualité de la filière STIM, les investissements devront être stratégiques et ciblés.

Des données et retours d’expériences venant des quatre coins du monde offrent des pistes pour résoudre ce problème. Par exemple, l’Afrique subsaharienne pourrait s’inspirer du succès du programme de croissance ciblée des filières STIM dans le supérieur mené au Brésil. À court terme, les politiques publiques pourraient concentrer les efforts sur l’élaboration de petits cursus de STIM de haute qualité dans le supérieur, la création de pôles technologiques et de centres de recherche en STIM de haute qualité ainsi que sur des investissements ciblés qui accroîtront le potentiel des étudiants en STIM exceptionnellement brillants. À moyen et long terme, il est souhaitable de développer ces programmes et investissements à grande échelle afin qu’ils bénéficient aux autres étudiants inscrits dans des cursus liés à la filière STIM, tout en veillant à maintenir une répartition et un développement équitables des compétences fondamentales, faute de quoi, découragés, beaucoup d’étudiants renonceront à s’inscrire à des cursus STIM de l’enseignement supérieur. Les États de la région subsaharienne devront aussi concevoir des mesures incitatives efficaces (comme une augmentation des rémunérations, une amélioration des conditions de travail, l’octroi de subventions de recherche et le financement de projets de recherche collaborative internationaux) afin d’attirer et de conserver les experts et enseignants qualifiés en STIM.

Certains programmes de bourses peuvent inciter les étudiants à revenir au pays après avoir terminé leurs études et aider à puiser dans le vivier de compétences de la diaspora. Des initiatives telles que le Returning Experts Program (Programme pour le retour des experts), piloté par le German Development Cooperation et le Centre for International Migration and Development, encouragent les étudiants à rentrer au pays à l’issue de leurs études en leur apportant un soutien (notamment une allocation de revenu mensuelle pour aider les étudiants à s’installer à leur retour) et un poste servant le développement 15. Les États devront s’associer à de telles organisations afin de partager le coût de ces programmes. En Afrique du Sud, Homecoming Revolution 16 (Révolution du retour au pays) recrute et place des talents disposant d’une expérience internationale dans des organisations de renom intervenant dans des secteurs tels que les technologies, les médias, la télécommunication, l’éducation et les soins de santé. Fondée en 2003 et lancée en 2004, Homecoming Revolution avait initialement pour objectif d’encourager les expatriés sud-africains à rentrer au pays, dans l’espoir d’inverser le problème de fuite des cerveaux auquel était confrontée l’Afrique du Sud. Homecoming Revolution s’est à présent étendue à d’autres pays de la région subsaharienne – dont le Ghana, le Kenya, la Tanzanie et l’Ouganda – afin de ramener chez elles les meilleures compétences de la région. Entre 2009 et 2013, quelque 400 000 professionnels sud-africains sont rentrés dans leur pays par le biais de cette initiative. Homecoming Revolution est désormais une entreprise de recrutement panafricaine bien établie et fait office de leader en matière de rapatriement de compétences. La région a besoin de plus d’initiatives de ce genre. Il lui faudra aussi impliquer la diaspora en puisant dans son vivier de compétences, en particulier chez ceux qui ont une formation en STIM. Les migrants hautement qualifiés montrent un taux de retour élevé (OCDE, 2008) ; toutefois, pour que les pays subsahariens tirent le meilleur parti de ce potentiel, il faudra des mesures d’accompagnement des rapatriés qui permettent de faire un bon usage de leurs compétences, en s’appuyant sur des programmes de réinsertion sur le marché du travail dignes de ce nom.

Enfin, la région subsaharienne doit prendre des mesures pour surmonter des obstacles critiques, telles que le financement des start-ups en phase de démarrage et l’intégration de l’entrepreneuriat dans le cursus éducatif général. Bien que cette intégration soit essentielle à la création d’emplois, elle n’est le fait que de quelques pays dans la région. Et même dans ces pays, les programmes n’ont pas encore produit d’« entrepreneurs à même de créer des entreprises qui génèrent des retours proportionnels dans des domaines tels que la création d’emplois » (Forbes Africa, 2019). Une étude analysant les programmes d’éducation entrepreneuriale dans des établissements d’enseignement secondaire et supérieur de trois pays de la région – Botswana, Kenya et Ouganda –a révélé que les élèves et étudiants qui achevaient le cursus n’avaient pas la capacité de monter leur

propre entreprise immédiatement après avoir été diplômés. À la différence des cursus techniques et professionnels, dont les diplômés sont plus susceptibles de lancer leur entreprise dans les quelques années ui suivent l’obtention de leur diplôme (Farstad, 2002), la piètre qualité des programmes d’entrepreneuriat dans la région a pour effet que les étudiants, bien qu’ils soient allés au bout, doivent encore emprunter la voie traditionnelle du travail indépendant, c’està-dire commencer par une période d’apprentissage ou un emploi salarié afin d’acquérir une expérience pratique et s’affirmer en tant que professionnels avant de se décider à monter leur propre activité (Adams, Johansson de Silva et Razmara, 2013). L’éducation entrepreneuriale de qualité doit occuper plus de place dans les cursus en Afrique subsaharienne. Préparer les étudiants à devenir des entrepreneurs accomplis créateurs d’emplois nécessitera un changement bien planifié, structuré et systématique des cursus actuels.

Pour préparer l’avenir et orienter les politiques publiques, des connaissances complémentaires sont nécessaires sur plusieurs questions. Premièrement, il est nécessaire de mieux comprendre comment identifier, autonomiser et former les inventeurs et les entrepreneurs transformationnels, plus particulièrement ceux disposant de beaucoup de talent et de faibles revenus. Deuxièmement, bien que les technologies numériques puissent étendre l’accès aux services du capital humain, il est nécessaire de mieux comprendre la portée de l’impact des technologies numériques sur la qualité des services fournis par le capital humain. Les technologies numériques viennent-elles principalement renforcer une main-d’œuvre déjà très performante, en lui permettant de fournir d’encore meilleurs résultats, ou peuvent-elles améliorer les résultats de travailleurs peu performants ? Les technologies numériques permettront-elles un meilleur accès des populations marginalisées, populations rurales, minorités ethniques, personnes âgées et handicapées aux services publics éducatif et de santé, ou vont-elles aggraver ces inégalités ? Comment les risques de fracture numérique peuvent-ils être réduits et palliés ? Troisièmement, il existe un risque réel d’obsolescence rapide des compétences numériques acquises et des cursus en la matière, en raison de l’accélération de l’évolution technologique. Il sera important de comprendre les défis à relever pour maintenir à jour les systèmes éducatifs, la formation des enseignants, les méthodes pédagogiques et les supports d’enseignement au regard du rythme des progrès technologiques. Enfin, des mesures appropriées sont nécessaires sur de nombreux fronts, parmi lesquelles de meilleures mesures qualitatives de l’éducation, des compétences des innovateurs et entrepreneurs, ainsi que des compétences des travailleurs, en particulier les compétences comportementales et d’adaptation. L’une des limites du calcul de l’indice de capital humain est en effet que les scores d’évaluation servant à la mesure de la qualité de l’éducation, par exemple, ne sont pas mesurés fréquemment et ne sont disponibles que pour quelques pays. De plus, les scores d’évaluation des différents programmes internationaux d’évaluation doivent être

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