Oser l'apprentissage… à l'école - extrait

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dire dire prof prof Oser élève hélève l’apprentissage…

Aujourd’hui, plus qu’hier, l’école est confrontée à une crise de sens. Les enseignants sont déboussolés face aux affirmations et aux conseils – souvent contradictoires - qui fusent de toutes parts. - Que faire pour que les enfants apprennent mieux à l’école ? - Quelle importance accorder aux sollicitations et au long cheminement nécessaires à tout apprentissage ? La première partie de cet ouvrage pose un nouveau cadre théorique pour l’apprentissage à l’école, théorie illustrée par de nombreux exemples de la vie courante et par des activités concrètes de classe pour tous les cycles du maternel et du primaire. En seconde partie, un lexique traite, dans l’optique de ce nouveau cadre théorique, des problématiques rencontrées par les enseignants d’aujourd’hui : - Que signifie assurer la continuité dans les cycles et entre les cycles ? - Comment motiver à faire des efforts ? - Inventer ou construire son savoir ? - Suffit-il d’observer ses enfants pour connaître leurs difficultés ? - La différenciation, est-elle vraiment au service de meilleures performances pour tous ? - etc.

école école à l’école

Oser l’apprentissage… à l’école

leçon leçon recevoir recevoir donner donner e e r r d d n n e e r r p p p p a a rimaire

Christine Jamaer

est institutrice primaire de formation. Directrice avec classe, elle est actuellement en détachement pour mission dans le cadre du décret « École de la Réussite ».

Joseph Stordeur

est orthopédagogue de formation, maitre assistant à la Haute École Charleroi Europe, formateur indépendant. Depuis 35 ans, il accompagne tous les courants pédagogiques : de la pédagogie par objectifs en passant par la pédagogie du projet, la pédagogie de la maitrise, l’auto-socioconstruction des savoirs ou la pédagogie dite différenciée.

Oser l’apprentissage… à l’école

Un livre destiné aux enseignants, futurs enseignants, inspecteurs, conseillers pédagogiques, formateurs d’enseignants…

OSEAPP

ISBN : 978-2-8041-8234-2

p é d a g o g i e www.deboeck.com

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Christine Jamaer Joseph Stordeur



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« Si la médecine compte plusieurs millénaires d'existence, elle n'a atteint son âge adulte que depuis moins de deux cents ans. Cela tient à ce qu'elle est à la fois un art et une science. Un art, elle pouvait l'être dès l'origine des civilisations, à la mesure de l'intuition, de l'empirisme, de la psychologie et de l'habileté de ceux qui l'exerçaient. Pour devenir une science, il lui fallait pouvoir s'appuyer sur d'autres sciences et techniques qui sont toutes ses cadettes et dont les applications étaient indispensables à l'identification et au traitement des états pathologiques. C'est ainsi que la connaissance de la cellule impliquait la découverte et la mise au point préalables du microscope par les physiciens ; de même, la physiopathologie biochimique ne pouvait être conçue de façon rationnelle avant que ne soient connues les lois élémentaires de la chimie minérale et organique. »

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Cette introduction à l'histoire de la médecine de l'Encyclopaedia Universalis1, nous pourrions l'appliquer à l'histoire de la pédagogie avec quelques siècles de retard. Nous sommes toujours au temps de l'art et nous commençons lentement à entrer dans la période où les données de la science pourraient accompagner judicieusement l'expression de l'art pédagogique. Cette transformation progressive de l'exercice du métier d'enseignant où l'art et la science devraient s'épauler ne se fait pas sans difficulté. En fait, nous pouvons comparer les difficultés dans le développement d'une pédagogie plus scientifique à celles vécues lors du développement de la médecine scientifique. Bien sûr, toute comparaison a ses limites, mais quand elle permet de mieux comprendre ce qui se passe, pourquoi s'en priver ?

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« Contre les affections dont les causes matérielles étaient indiscernables, toutes les médecines dites «archaïques» ont fait appel à la magie, à la prière et à la divination. La maladie était considérée comme une sanction surnaturelle infligée à l'individu par une puissance démoniaque ou divine, étrangère à lui : seuls les sorciers, les prêtres, les devins - ceux que les ethnographes contemporains désignent sous le nom de «chamans» - pouvaient intervenir utilement dans un tel conflit. La pathologie était en somme un aspect de la mythologie. La médecine, un attribut de personnalités ayant le pouvoir exceptionnel d'entrer en rapport avec les puissances surnaturelles. Cette conception a survécu jusqu'à nos jours dans certaines peuplades primitives et dans certains milieux arriérés ou mystiques. »

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Encyclopaedia Universalis France S.A. 2000

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La pédagogie, comme « science » de l'éducation des enfants, n'est-elle pas encore habitée par les mêmes conceptions ? L'enfant qui rencontre des difficultés d'apprentissage a été considéré pendant longtemps comme victime de son hérédité avant d'être considéré, plus récemment, comme victime de son milieu culturel. L'explication de ses difficultés étant trouvée dans des facteurs extérieurs à l'enseignant, celui-ci était par le fait même dédouané de toute responsabilité comme les « chamans » l'étaient par l'influence des esprits démoniaques. Et si, par hasard, la rencontre d'un enseignant travaillant différemment permet à tel ou tel enfant d'apprendre soudain ce qui lui posait problème auparavant, on évoque l'idée d'un enseignant doué, c'est-à-dire que les réussites pédagogiques de certains enseignants sont considérées comme des attributs de personnalités particulières, parfois hérités génétiquement : « Il est d'une famille d'enseignants», « Oui, mais lui, il est doué... il est tombé dedans quand il était petit ». Que l'on puisse attribuer la réussite à des pratiques précises, correspondant par hasard à un fonctionnement particulier de l'individu apprenant, ne vient même pas à l'esprit parce que ce serait reconnaitre l'incompétence des autres, ce qu'une profession, quelle qu'elle soit ne peut reconnaitre sans risque.

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« Au VIe et au Ve siècle avant J.-C., la médecine helladique primitive se dépouilla peu à peu de son caractère mythico-religieux originel, entretenu par les Asclépiades, pour tomber sous l'emprise tout aussi néfaste des systèmes philosophiques. Dégagés de l'empirisme archaïque mais trop imbus de la primauté de l'esprit, ceux-là même, comme Anaximandre, Parménide, Anaxagore, Empédocle ou Démocrite, qui ont reconnu les vertus de l'expérience, n'ont pas su en tirer les leçons. La médecine en a longtemps souffert. »

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Quand, en pédagogie, nous sommes débarrassés des contraintes de l'hérédité ou du milieu socio-culturel, c'est-à-dire que nous acceptons que l'éducateur, l'enseignant, pourrait avoir un effet de par ses pratiques sur l'enseigné, dans le meilleur des cas sur l'apprenant, la plupart des pédagogues sont tombés sous la coupe exclusive de la psychologie et notamment de la psychologie de la motivation. Sans motivation, pas de possibilité d'apprendre. Si encore les théories de la motivation, basées en partie sur l'observation, étaient utilisées dans tous leurs aspects. En fait, dans la pratique des écoles, elle est ramenée à un aspect périphérique que nous pourrions appeler l'aspect attrayant. D'où la pratique des introductions d'activités de classe par une « motivation » !!! Que cet aspect attrayant s'use vite et qu'il oriente l'enfant « qui ne sait vraiment pas » dans une autre direction que l'objectif d'apprentissage ne semble pas perturber grand monde actuellement. La pédagogie va encore en souffrir longtemps. « Définissant le double rôle du médecin - soigner et enseigner -, Hippocrate a fixé les modalités pratiques et les règles déontologiques de la profession.(...) La thérapeutique hippocratique repose sur deux principes généraux : s'interdire tout ce 6

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qui pourrait nuire au patient ; aider en toutes circonstances l'action spontanément favorable de la nature. Le pas franchi était considérable. Après la mort du «Père de la Médecine», les systèmes philosophiques l'ont malheureusement emporté de nouveau sur l'observation raisonnée. »

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La définition du rôle de l'enseignant est en train de changer. De communicateur d'un contenu, il est de plus en plus appelé à devenir également organisateur de bonnes conditions d'apprentissage de ce contenu. En d'autres termes, son double rôle devrait devenir : organiser les apprentissages et enseigner. Ce double rôle est en devenir. Et ce n'est probablement pas un hasard si l'on réclame actuellement des jeunes enseignants le serment d'Hippocrate. Mais ce double rôle va-t-il pouvoir sérieusement se développer ? Pas sûr ! Il suffit d'observer tous les combats en cours à propos des méthodes de lecture, par exemple, ou à propos des matières par rapport aux compétences : deux aspects importants des obscurantismes en jeu. Où est l'enfant, l'apprenant dans ces débats ? Si le médecin affirmait que c'est sa méthode qui est importante, et du moment qu'elle lui convient à lui, elle conviendra pour le malade quel qu'il soit, que dirions-nous ? Et pourtant, l'affirmation que si la méthode de lecture convient à l'enseignant, alors elle convient pour les enfants, est fréquente pour ne pas dire presque générale. Si, en plus, elle est syllabique (ce qui est le plus fréquent en Belgique francophone2), c'est encore mieux et on pourra toujours attribuer les difficultés dans les années ultérieures à l'utilisation d'une méthode globale (non utilisée !!). Si le médecin affirmait que c'est sa collection de médicaments qui est importante et qu'il va la distribuer en fonction de son programme indépendamment des malades rencontrés, comme l'enseignant distribue sa matière indépendamment des compétences réelles des enfants en face de lui, que ferions-nous ? Est-on sûr de ne pas faire de tort aux enfants en sacralisant le programme matière comme étant la seule manière rationnelle d'organiser l'école ? Justifier cette rationalisation par un manque de connaissances des processus en jeu dans l'apprentissage, est-ce adéquat pour s'engager à ne pas faire de tort au développement des enfants ?

« L'époque médiévale. Les conceptions physiologiques ne s'étaient pas modifiées depuis l'Antiquité. Le diagnostic reposait encore sur l'allure de la fièvre, la qualité du pouls, l'aspect de la langue et des urines. La thérapeutique se bornait à la prescription de préparations végétales à base de «simples», de drogues étranges ou magiques, de saignées profuses, de cautérisations ou de clystères. Les grands fléaux collectifs - peste et lèpre, entre autres - suscitaient une crainte quasi religieuse, tandis

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Voir recherche : L’apprentissage de la lecture au début de l’enseignement primaire en Communauté française de Belgique, Subventions 2004, Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Education, Département Education et Formation, Pédagogie théorique et expérimentale, Professeur Marcel Crahay, Université de Liège, mars 2005.

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que le mysticisme et les superstitions exerçaient un ascendant considérable dont on voit le reflet dans l'usage de la «thériaque» (Préparation médicamenteuse aux nombreux composants, longtemps utilisée comme une panacée - Petit Larousse 2002), le recours à de nombreux saints guérisseurs et la pratique du «toucher royal» des écrouelles. L'ésotérisme - qui a été de tous les temps et qui prendra une forme nouvelle à la fin du XVIIIe siècle avec le «magnétisme» de Mesmer - exerçait (comme il le fait encore) un attrait puissant sur certains esprits imaginatifs. »

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Nous avons l'habitude de prétendre que la pédagogie est encore, pour l'essentiel, comme la médecine à l'époque du Moyen Âge. Quand un enfant n'en sort pas, le diagnostic se base sur certains aspects de ses productions souvent traduits en points. La difficulté est attribuée, soit à un manque de travail, soit à un manque d'attention, soit à une faiblesse mentale génétique ou socio-culturelle. On se borne généralement à exiger plus de travail et d'attention. Devant le nombre important d'échecs, le remède préconisé est souvent de réaliser des contrôles plus fréquents (exemple : des dictées plus fréquentes pour apprendre l'orthographe - des contrôles tous les matins pour apprendre les tables de multiplication - etc.). Quand on travaille sur les difficultés des apprentissages, que l'on propose d'autres pratiques plus pertinentes pour favoriser ceux-ci, la question systématique qui revient toujours est : « Et comment va-t-on pouvoir contrôler ? ».

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« L'éveil de la Renaissance. (...) Bravant les interdits portés jusqu'alors sur la dissection des cadavres, les premiers anatomistes, formés pour la plupart dans les universités italiennes, s'attachèrent à préciser la structure interne du corps humain, préalable indispensable à l'étude de son fonctionnement. (...) Bien que non négligeables, les progrès furent plus limités dans d'autres domaines et l'opposition des défenseurs de la tradition se fit lourdement sentir. Quelques esprits éclairés osèrent toutefois mettre plus ou moins ouvertement en question les données classiques. Ce fut le cas d'Ambroise Paré (1509-1590), qui ne fut pas seulement un chirurgien aux mains habiles et au cœur généreux, mais aussi un grand médecin. (...) Avec Paracelse (1493-1541), cet esprit de réforme qui caractérise la Renaissance prit l'allure d'une véritable insurrection contre la tradition. Malheureusement, sauf en anatomie, bien des faits observés durent être redécouverts par la suite, et le travail accompli demeura pour une grande part sans lendemain. Au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, une fois encore, théories et systèmes freinèrent une évolution qui s'annonçait féconde. Emporté par sa victoire, le rationalisme s'efforça de simplifier la complexité biologique, quitte à trahir les faits et à faire appel à des entités imaginaires. (...) Le raisonnement, affranchi des dogmes, a pourtant été un des principaux instruments de la recherche médicale scientifique au cours du XVIIe et du XVIIIe siècle : quelques personnalités clairvoyantes surent l'employer à bon escient. La Renaissance avait eu pour fruit la naissance de l'anatomie ; par un enchainement logique, les XVIIe et XVIIIe siècles ont vu naitre la physiologie moderne. » 8

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Tout est actuellement théoriquement possible en pédagogie. Mais les recherches sur l'anatomie du cerveau et sur le fonctionnement mental, qu'il soit intellectuel, affectif, moteur, ... sont peu connues d'un public qui devrait pourtant être assoiffé de connaissances dans ce domaine. Les premiers anatomistes et les premiers physiologistes ont rencontré beaucoup de difficultés à lutter contre la tradition. Avec quelques siècles de différence, les mêmes difficultés se retrouvent pour construire une pédagogie qui s'appuierait davantage sur les connaissances du fonctionnement de l'outil de l'apprentissage : notre cerveau. Bien sûr, ces données scientifiques sont encore bien peu nombreuses au regard de ce qui est à connaitre. Mais elles peuvent déjà orienter avantageusement les pratiques et surtout alimenter un débat qui quitterait un peu les sphères des hypothèses métaphysiques et culturelles. Réclamer de tenir compte de l'aspect scientifique ne signifie aucunement qu'il faut tout sacrifier au « scientisme » en faisant abstraction de tous les aspects « artistiques » du métier d'enseignant. Le risque est par ailleurs bien minime actuellement, à un moment où l'essentiel des affirmations concernant la pédagogie vient d'opinions basées plus sur la nostalgie d'un passé soi-disant meilleur ou sur des options politiques de droite ou de gauche à la manière des doctrines spiritualistes du Moyen Âge.

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Les connaissances pour permettre à la pédagogie de sortir de ces grands travers existent et croissent tous les jours à une vitesse extraordinaire. Cependant, elles restent confinées dans les laboratoires comme si elles étaient trop dangereuses à mettre aux mains de ceux qui devraient les maitriser pour passer de l'âge des bricoleurs dits plus ou moins doués, à l'âge d'un professionnalisme respectueux, non des matières et de la structure en classes d'âges, mais respectueux des cheminements communs et personnalisés de l'ensemble des apprenants. Espérons pour nos enfants qu'il faudra moins de temps à la pédagogie qu'il n'en a fallu à la médecine pour se construire une base scientifique suffisante pour pouvoir parler d'efficacité, sans croire, pas plus qu'en médecine, à la toute puissance de la science. La part de l'art ne devrait jamais être rejetée quand il s'agit de parler de l'humain. (...) « La médecine a connu au cours des cent cinquante dernières années des progrès décisifs tellement nombreux, rapides et variés qu'il est impossible d'en dresser la liste, ni même d'en résumer les étapes. » Gageons que l'on pourra écrire la même chose pour la pédagogie d'ici moins de cinquante ans. Il nous faut, dès lors, mieux comprendre comment se passe l'apprentissage dans le cerveau, quels sont les rapports entre apprentissage et mémoire, comment l'encodage, le stockage et l'évocation (rappel) peuvent se construire pour rester efficaces, qu'est-ce qui constitue réellement une compétence, comment maintenir, entretenir ou « réparer » la motivation à apprendre, comment se construisent les grandes fonctions mentales ... Avant-propos

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Les situations qui appartiennent à la réalité sont toujours complexes et extrêmement riches ; il va y avoir approche du réel par approximations successives. Ainsi, malgré le parallélisme possible entre réalité et modèle, il existe, entre les deux, des différences profondes qui, tôt ou tard, entrainent des divergences et le rejet du modèle pour un autre plus élaboré. Ces différences proviennent du fait que la précision expérimentale devient meilleure, que le champ d’utilisation du modèle s’étend, ou que la réalité est abordée par le biais d’une autre problématique.

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André GIORDAN - Gérard de VECCHI

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La société évolue rapidement et cette évolution entraine, de la part des principaux grands acteurs de cette société, une demande de changement du système scolaire. Face à cette pression dont la manifestation la plus concrète se traduit par un ensemble de documents arrivant dans les écoles : décrets, nouveaux programmes, socles de compétences, il est possible de penser que l'école change aussi. Cependant, comme le rappelle Philippe Meirieu3, au-delà de quelques modifications de la structure superficielle : horaire réduit, concertations, réduction du nombre de bulletins, introduction d'une BCD, de moyens audiovisuels,..., ce qui caractérise le plus le système scolaire, c'est son immobilisme. La majorité des activités scolaires est encore caractérisée par la transmission d'un ensemble d'informations plus ou moins bien organisées et qui vont devoir être restituées telles quelles ou en application suite à des exercices répétitifs. Les apprenants sont ainsi souvent renvoyés à l'utilisation de leurs compétences déjà acquises au hasard des sollicitations de la vie. À côté de la constatation assez pessimiste de cet immobilisme du système global, il est possible de voir dans les écoles des enseignants faisant preuve de beaucoup de créativité pour mettre au point des démarches nouvelles favorisant ou devant favoriser un véritable apprentissage en classe pour tous les enfants. Cependant, force est de constater qu'il ne suffit pas de s'agiter pour être efficace et pouvoir prétendre au changement réel du fonctionnement de l'école. Les pratiques dites innovantes ne sont pas en elles-mêmes gages d'une plus grande effi-

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Philippe Meirieu, L’école, mode d’emploi, ESF, 1985. Introduction


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cacité des apprentissages. D'abord, parce qu'elles sont souvent très ponctuelles et surtout parce qu'elles manquent d'un encadrement global qui favoriserait leurs effets espérés sur le long terme. Par exemple, quand le système de fonctionnement de l'école exige la poursuite des pratiques de contrôles fréquents sur de petites unités de matière en vue de produire un bulletin, les démarches de construction de savoir sont vécues comme plus déstabilisatrices que structurantes pour bon nombre de candidats apprenants.

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En fait, pour devenir vraiment intéressantes pour l'évolution du système scolaire, les démarches centrées sur l'apprentissage constructiviste interactif devraient répondre à un minimum de conditions. Même si la recherche dite scientifique est encore très pauvre à cet égard, les expériences des praticiens chercheurs et les débats pédagogiques autour de celles-ci permettent d'établir un certain nombre de principes suffisamment pertinents pour qu'ils puissent devenir des hypothèses d'action.

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Si l'on veut vraiment permettre à tous les enfants d'acquérir l'ensemble des compétences jugées utiles à la formation de citoyens engagés, responsables et solidaires, c'est en classe qu'il faut organiser l'apprentissage. Il ne s'agit plus de le renvoyer à domicile aux bons soins de chacun !

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Si l'action d'apprendre n'est plus confondue avec la restitution, il est nécessaire d'en préciser les contours. Pour l'essentiel, on peut considérer : - que c'est l'apprenant lui-même qui apprend. L'enseignant peut juste mettre les conditions favorisant cet apprentissage. (Parmi ces conditions, on retrouve bien sûr aussi une information apportée par l'enseignant en fonction des objectifs poursuivis.) - que la motivation n'est pas nécessairement préalable. Elle se construit et s'entretient par la rencontre de vraies difficultés et la prise de conscience du dépassement progressif de celles-ci.

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- que l'apprentissage se fait par la déconstruction - reconstruction continue des représentations et des structures de fonctionnement mental des apprenants. Il est donc indispensable de laisser le temps pour les essais et les erreurs sans jugement négatif. De même, il est normal de considérer qu'il puisse y avoir des régressions dans l'évolution d'une compétence ou en d'autres termes que l'acquisition d'une compétence ne se fait pas de manière continue et sans à-coups. - que l'apprentissage demande une sollicitation répétée sur un laps de temps relativement court de la même compétence. Il s'agit donc de se donner les possibilités de mettre en jeu la même compétence dans des situations complexes non connues de nombreuses fois.

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- que l'apprentissage d'une compétence se structure dans l'interaction avec les autres et l'environnement. Il est donc important de favoriser les confrontations cognitives, notamment avec les pairs . - ...

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Si l'on va à l'école pour apprendre, il devient indispensable de réfléchir aux rapports entre apprentissage et production. Puisqu'il semble nécessaire d'agir pour apprendre, l'action de l'apprenant conduit nécessairement à une production, qu'elle prenne la forme d'un objet à trois dimensions, d'un texte, d'un dessin, ... Cette production ne devrait cependant plus être confondue avec le produit fini généralement exigé à la fin d'une activité pour répondre aux attentes de l'institution scolaire. La production en cours d'apprentissage a toujours un caractère provisoire, brouillon, même si pour aider la structuration progressive, les données disparates sont parfois régulièrement réordonnées. Au bout de plusieurs séances d'apprentissage, et pas en même temps pour tout un groupe, les productions s'affinant, elles pourront être considérées, en fonction des exigences du moment, comme des produits finis, c'est-à-dire comme des documents pouvant être communiqués aux autres acteurs de l'école ou servant de références momentanées.

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Si l'école est un lieu pour développer des compétences et pas seulement pour ingurgiter des matières à restituer aux examens, il faut également chercher quels sont les genres de situations qui pourraient favoriser réellement le développement de telle ou telle compétence. On ne peut plus continuer à laisser les sollicitations pour l'apprentissage d'une compétence au hasard d'une programmation empirique. Car, si ce hasard est favorable à quelques-uns, il faut bien constater qu'il apporte peu à un nombre de plus en plus grand de candidats apprenants.

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De nombreuses recherches didactiques mettent l'accent sur l'apprentissage de compétences plutôt que sur la présentation successive de matières découpées en petites unités et dont l'organisation se veut logique. C'est un changement de perspective fondamental. Les matières ne devraient donc plus être à la base de l'organisation scolaire. Elles ne sont qu'un des aspects constitutifs des compétences à développer chez chacun, notamment dans l'enseignement dit fondamental. Une compétence, quand elle est développée, met en jeu non seulement un ensemble d'opérateurs matières, mais aussi des démarches mentales, des démarches affectives et des démarches pratiques de manière harmonieuse et intégrée. Cette position ne signifie nullement que les matières perdent de leur importance. Bien au contraire, il est nécessaire de mieux les maitriser. La pratique d'une pédagogie centrée sur l'apprentissage des compétences montre de manière parfois très

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douloureuse que les matières enseignées, même depuis longtemps, ne sont pas vraiment maitrisées par les enseignants. C'est le rythme de développement des enfants qui devrait devenir la base de l'organisation scolaire. Cela pose bien sûr un certain nombre de problèmes auxquels il faudra de nombreuses années pour arriver à y apporter des réponses plus ou moins satisfaisantes.

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Parmi les problèmes , on peut citer prioritairement : - Apprendre à maitriser la logique exprimée ci-dessus, et ce n'est probablement pas la moindre des difficultés dans l'état d'esprit actuel. - S'approprier le contenu des compétences imposées par le législateur, cycle par cycle. - Trouver des moyens d'organiser des groupes mobiles d'enfants en fonction des objectifs poursuivis : activités d'apprentissage d'une compétence, activités de production, ... - Construire des outils d'observation du développement de l'enfant par rapport à chaque grande compétence, en vue d'organiser les groupes d'apprentissage de la manière la plus efficace possible. - Inventer des modifications de la structure scolaire permettant enfin un peu de cohérence entre les intentions et les réalisations. - Proposer aux enfants les situations les plus adéquates par rapport à la compétence à travailler. - Etc.

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Cependant, avant d'entrevoir la possibilité de traiter vraiment ces questions méthodologiques, il sera aussi important de prendre en compte l'attitude des enseignants face au changement. Comme l'écrivait, voici déjà quelques années, Philippe Perrenoud4, toute proposition de changement « contient, en creux, une critique du système en place. Nul ne peut espérer y échapper entièrement, ni les dirigeants politiques ou administratifs, ni les cadres intermédiaires, ni les enseignants, ni les formateurs d'enseignants, ni les chercheurs, ni même les parents dont les ambivalences et les angoisses ne sont pas sans effets sur les contradictions des systèmes éducatifs. ». Notre analyse (résultat d'une fréquentation régulière des classes) pourra paraitre dure à certains moments. Nous aurions pu choisir de l'atténuer. Cependant, si cette option parait plus raisonnable et certainement plus prudente, elle comporte de nombreuses ambigüités. Et Philippe Perrenoud de poursuivre : « On navigue entre deux écueils : si ceux qui proposent un changement « appellent

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Philippe PERRENOUD, Évaluer les réformes scolaires, est-ce bien raisonnable? Revue « Mesure et Évaluation en Éducation », Vol. 19 n°2, Éditée par l'ADMEE, 1996.

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un chat un chat », ils choquent une partie des enseignants et des parents et sont accusés d'être négatifs, de démobiliser des professionnels déjà aux limites de leurs forces ; s'ils emploient des formules plus neutres, plus personne ne comprend pourquoi une réforme se justifie... ». Nous avons donc choisi de dire avec force ce que nous croyons en précisant que nous nous voulons avant tout constructifs, qu'il ne s'agit nullement de mettre en cause la conscience professionnelle des enseignants, mais qu'une nouvelle construction ne se justifie qu'à partir d'un constat de manques.

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Les pages qui suivent se voudraient une petite contribution à l'établissement d'un cadre théorique et pratique provisoire à la compréhension du concept de l'apprentissage en vue de construire peu à peu d'autres pratiques au caractère plus scientifique5.

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Nous sommes conscients que toute science est aussi idéologique. Voir à ce propos les travaux de Gérard Fourez et Philippe Mathy. Introduction


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Chapitre II UNE AUTRE ORGANISATION DU TEMPS SCOLAIRE

Philippe Meirieu

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Convenons qu'une méthode pédagogique définit le mode de gestion entre trois données, de nature fort différente mais qui sont toujours présentes dès qu'il y a apprentissage organisé : le formateur (ou son substitut : ordinateur, fiche, etc.), l'apprenant (ou le groupe d'apprenants) et le savoir (savoir-faire, savoir être, notion, concept, etc.). Nous nommerons "méthode" ce qui, à un moment donné d'un cursus de formation, noue ces trois éléments et structure leurs relations ; c'est seulement, en effet, par la prise en compte de l'ensemble complexe qu'ils constituent que l'on entre, à proprement parler, dans la "didactique".

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Dans le chapitre I, nous avons décrit le développement des processus de l'apprentissage en trois temps : celui de la construction du sens (motivation), de l'apprentissage strict (montage) et de l'entrainement (rodage). C'était le point de vue du développement de l'enfant. Mais nous pouvons voir les processus de l'apprentissage selon d'autres points de vue et notamment celui des temps et des occasions offertes aux enfants pour apprendre. Quand et où l'enfant peut-il apprendre ? Dans quel contexte ? Les contextes offerts sont-ils adéquats, les plus adéquats en fonction de nos connaissances ? Cette dernière question renvoie directement à ce que l'on doit appeler des choix méthodologiques. Quand l'enfant peut-il apprendre ? Il nous faut immédiatement distinguer deux temps importants : il y a les activités hors école (zone A dans le schéma ci-dessous) et les activités dans l'école. Ces dernières, comme nous le verrons en détails plus loin, peuvent être réparties en trois types d'activités : les activités

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organisées sous la responsabilité de l'enseignant en vue d'apprendre une compétence répondant aux exigences du programme (zone B), les activités organisées sous la responsabilité des enfants et de l'enseignant et répondant à la nécessité pour l'école de s'ouvrir sur le monde, d'interagir avec l'environnement (zone C) et les activités sous la responsabilité de l'enfant (zone D).

Zone C Responsabilité du groupe Apprentissages occasionnels

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Zone B Responsabilité de l’enseignant Apprentissages intentionnels

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Zone A Apprentissages hors école

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Les temps d’apprentissage de l’enfant : développement de compétences

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Zone D Responsabilité de l’enfant Temps libre

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Un certain nombre d'apprentissages se réalisent en dehors de l'école : zone A. Actuellement, pour beaucoup d'enfants, c'est même dans cette zone que s'effectue l'essentiel du montage des compétences de base, d'où l'importance primordiale prise par le milieu socio-économico-culturel dans les résultats scolaires. L'école sollicite et vérifie le fonctionnement adéquat de ces compétences déjà acquises. Le travail scolaire porte, sauf peut-être dans les deux premiers cycles de l'enseignement fondamental, sur le temps d'entrainement, parfois même sur le temps de perfectionnement pour quelques écoles élitistes. Pour saisir les tensions et les contradictions autour des choix méthodologiques concernant les trois temps scolaires mis en évidence ci-dessus, il est nécessaire d'essayer de mettre à jour les modèles d'analyse de la réalité qui servent de toile de fond aux discours et aux diverses prises de décision. C'est en fonction de ces points de vue diversifiés que les innovations pédagogiques s'emploient et prennent du sens. Toute modélisation est obligée de réaliser quelques raccourcis par rapport aux richesses de la réalité. Elle n'en reste pas moins un outil précieux pour éclairer les tensions existantes.

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Partie I : De la théorie à la pratique


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A la suite de la Semaine Pédagogique de 1987 sur le thème « Le temps à l'école fondamentale »12, nous pouvons considérer l'occupation du temps scolaire selon trois axes.

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L'axe du programme, que nous préférons appeler l'axe du développement personnel, pour attirer l'attention sur le fait qu'il contient toutes les activités qui permettent à chaque individu de se développer affectivement, corporellement et intellectuellement. L'axe du sens, que nous préférons appeler l'axe de l'implication dans le milieu pour ne pas enlever le sens au développement personnel et ne pas le réduire aux aspects utilitaires. L'implication dans le milieu recouvre toutes les activités où l'enfant s'engage à modifier, ou au minimum, à interagir avec le milieu scolaire, social, économique, etc... L'axe de la gratuité, que nous appelons également axe de l'autogestion, notion difficile à définir dans l'absolu, mais signifiant ici le temps laissé au choix personnel de l'enfant pour agir selon ses envies dans le cadre structuré de l'école.

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Ces trois axes forment un tout indissociable dans l'optique d'une école de la réussite. Cependant, ils peuvent être considérés selon deux grands points de vue qui, dans la pratique, produisent des écoles très différentes. Nous pourrions les appeler les deux grands paradigmes de vision de l'apprentissage13 : une vision behavioriste, toujours actuelle, concrétisée par les pratiques de l'enseignement magistral, de la pédagogie par objectifs opérationnalisés, de l'enseignement programmé, etc. et une vision constructiviste interactive, développée depuis quelques années, concrétisée par les pratiques de la pédagogie ouverte, de la pédagogie interactive, et en partie de la pédagogie cognitiviste et de la pédagogie de la maitrise.

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En fonction de ces points de vue, les accents mis sur les innovations vont s'opposer. S'il est possible de situer des pratiques actuelles sur un continuum entre les deux points de vue, nous tenons cependant à préciser immédiatement qu'entre les deux il doit exister, à un moment donné, une rupture radicale. Celle-ci ne permet pas une évolution sans renversement complet d'optique sur un ensemble d'éléments interdépendants. C'est en ce sens que nous avons parlé de paradigme.

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Ministère de l’Education nationale, Le temps à l’école fondamentale, Semaine pédagogique 1987 (Bruxelles, Marcinelle, Huy), 41e semaine d’information et de perfectionnement pédagogiques. Propos développés également par Jean-Marie Dumont, Pour la pratique d'une pédagogie active, globale, fonctionnelle et interdisciplinaire dans le cadre d'une école chrétienne qui veut éduquer tout l'enfant, Conseil central de l’enseignement maternel et primaire catholique, Belgique 1991. Raynal Françoise, Rieunier Alain, Pédagogie : Dictionnaire des concepts clés. Apprentissage, formation et psychologie cognitive, ESF, 1997.

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Dans une école toujours très influencée par les théories behavioristes de l'apprentissage, le temps de développement personnel est essentiellement constitué d'exposés, de découvertes guidées, et surtout d'un nombre impressionnant d'exercices sur des matières découpées en petites unités et organisées selon un ordre croissant de difficultés supposées. Ces activités n'ayant que peu de sens pour une grande partie des élèves, les innovations proposées porteront essentiellement sur l'axe de l'implication dans le milieu pour tenter de motiver en valorisant des réalisations socialement significatives. C'est dans cette optique que la pédagogie du projet apparaitra, momentanément du moins, comme une solution très intéressante, pour ne pas dire unique. Si elle réussit souvent à rendre les élèves enthousiastes par rapport à la réalisation d'une production valorisante, il y aurait intérêt à réfléchir sur la différence qu'il y a entre avoir envie de lire par exemple, et avoir envie d'apprendre à lire, avoir envie de construire une maquette et avoir envie d'apprendre à la construire, etc. D'autres, par contre, tenteront d'améliorer le fonctionnement dans l'axe du développement personnel en se centrant sur des techniques permettant au système de continuer à fonctionner de manière un peu plus efficace. C'est dans ce courant que l'on trouve des enquêtes, parfois érigées en recherche, sur la mémorisation, la prise de notes, etc. C'est également là que se situent trop souvent les attentes par rapport à la gestion mentale, à la P.N.L., à l'enrichissement instrumental, etc.

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Dans l'optique constructiviste interactive, la rénovation porte d'abord sur le développement personnel. C'est pourquoi on met l'apprentissage et l'évaluation formative (à ne pas confondre avec une suite de petits contrôles)14 au cœur de la réflexion. Comme c'est l'enfant qui est mis au centre de la rénovation et non plus les matières, on y parle de développement de compétences. En essayant d'acquérir une compétence qu'il ne possède pas encore, l'apprenant va peu à peu déconstruire et reconstruire à sa manière les situations globales dans lesquelles il est plongé. Les innovations vont donc porter sur la recherche de situations complexes permettant réellement ce travail de l'apprenant, sur l'acceptation et la gestion des erreurs comme constitutives de l'apprentissage, sur la construction de grilles de compétences en développement, sur la détermination des nœuds matières, des notions noyaux, des objectifs obstacles. C'est dans cette optique que l'on parlera d'activités de structuration, celle-ci n'ayant plus rien à voir avec les exercices systématiques sur des matières morcelées. Bien sûr, l'axe de l'implication dans le milieu ne sera pas oublié. Permettre à l'enfant de se construire des compétences dont il ne pourrait se servir qu'en dehors de l'école ne peut cadrer avec l'idée d'une éducation globale. C'est pourquoi, la

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Voir à ce propos Partie II, Lexique, Evaluation Partie I : De la théorie à la pratique


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pédagogie du projet et toutes les activités répondant à la nécessité de s'ancrer dans le milieu y sont aussi vues comme fondamentales. Cependant, elles sont davantage considérées comme des occasions de motivation et surtout comme des occasions de valorisation des compétences acquises, aux yeux des pairs. C'est en ce sens que l'on parle d'activités fonctionnelles.

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Contrairement à l'optique behavioriste habituelle où l'on croit qu'il suffit d'aller du simple au complexe, de répéter souvent les mêmes activités, de mémoriser à domicile par un travail laborieux et de réexpliquer en cas de difficulté, les innovations dans l'optique constructiviste se développent dans un essai de gérer les tensions perpétuelles entre des « contraires ». Elles se situent donc essentiellement comme outils pour tenter de répondre aux tensions telles que : - maintenir les exigences nécessaires aux apprentissages tout en tenant compte des fragilités momentanées des apprenants ; - gérer la confrontation entre les informations des apprenants et les informations externes apportées par l'enseignant ; - ne pas considérer le plaisir et l'effort comme des objectifs contradictoires dans l'organisation des activités, mais seulement comme des conséquences momentanées et diversifiées du cheminement nécessaire à tout apprentissage ; - développer réellement l'indépendance des apprenants dans le respect des contraintes d'un programme ; - organiser l'interaction positive et indispensable entre le savoir d'expérience et le savoir intellectuel ; - faire en sorte que l'aide apportée par l'enseignant ne devienne pas un obstacle à la prise de pouvoir des apprenants sur eux-mêmes ; - mettre l'apprenant en projet d'apprendre plutôt qu'en projet de produire ; - comment, pour l'enseignant, assurer un équilibre entre une programmation rigoureuse sur le plan méthodologique, approfondie sur le plan des matières, et une improvisation nécessaire à la différenciation des cheminements des apprenants ? - etc. L'organisation du temps scolaire étant ainsi définie et située dans son contexte méthodologique, on peut ajouter quelques réflexions à propos de l'apprentissage dans ces trois temps. Si l'école voulait vraiment jouer son rôle par rapport à l'égalité des chances et des résultats, le plus grand nombre des apprentissages devrait se situer dans la zone B, c'est-à-dire la zone des apprentissages organisés intentionnellement sous la responsabilité de l'enseignant en fonction d'objectifs définis par la société. À partir d'obstacles précisés, l'enseignant propose des situations complexes

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à vivre en vue de structurer peu à peu l'apprentissage d'une compétence précise dans un laps de temps relativement court. Le saupoudrage, ou le zapping habituel de nos classes ne devrait pas être de mise dans ces moments-là. On ne peut poursuivre deux lièvres à la fois... et si on veut en attraper un, on n'a pas le temps de musarder ! C'est ici que toutes les techniques, méthodes, organisations liées à une conception constructiviste de l'apprentissage sont indispensables pour que les activités prennent sens et le gardent aux yeux de tous les apprenants.

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Il est également possible pour l'enfant d'apprendre dans les activités situées en zone C, c'est-à-dire dans le temps d'implication dans le milieu. Les activités de cette zone sont notamment les projets, mais aussi toutes les activités de production nécessaires pour montrer aux différents acteurs de l'école le travail réalisé : copie ou synthèse au cahier, devoir,... Il s'agit bien d'activités réalisées pour permettre à l'école de rester impliquée dans son milieu de vie. Les obstacles rencontrés dans la réalisation d'un projet, vu l'obligation de résultats dans un laps de temps déterminé, entrainent régulièrement une répartition de tâches en fonction des compétences déjà présentes. Il peut donc bien y avoir apprentissage dans le sens d'entrainement (rodage), mais pas dans le sens d'acquisition première (montage).

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Cependant, il peut arriver que pour l'un ou l'autre enfant, ce soit aussi un apprentissage dans le temps de la construction du sens et du montage (intersection entre zone B et C). Mais c'est toujours le résultat d'un hasard, le hasard qui permet, au bon moment, la rencontre entre le cheminement individuel d'un enfant et l'évènement provoquant présent dans le projet. Chaque enseignant qui travaille par projets a l'un ou l'autre exemple à citer dans ce sens. Il est probable que, dans tous ces exemples, une analyse plus fouillée montrerait que l'enfant en question était dans ce que Vygotski appelle la zone proximale de développement par rapport à cette compétence.

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Il arrive même, de temps en temps, pour une compétence particulière, que le projet sera l'occasion d'organiser un apprentissage au sens strict (temps de montage) pour l'ensemble ou une grande partie d'un groupe. Nous pouvons alors situer cette activité dans l'intersection entre la partie C et la partie B du schéma, celle qui est prioritairement sous la responsabilité intentionnelle de l'enseignant. En fonction des projets, et pour chaque enfant en particulier, l'intersection entre les deux parties prend une importance plus ou moins grande. La zone D, zone du temps d'autogestion, peut aussi permettre certains apprentissages, mais le statut de ceux-ci ressemble davantage à ceux réalisés dans la zone A. Une différence cependant. Si l'enseignant ne peut intervenir dans les occupations de ce temps qui est sous la responsabilité de l'enfant (toute inter-

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vention de l'enseignant enlèverait cette responsabilité en recréant les conditions de la dépendance), il ne doit pas oublier qu'il s'agit d'un temps scolaire. C'est pourquoi, son rôle sera d'assurer une grande richesse du milieu dans lequel l'enfant va pouvoir gérer son temps. C'est par la sollicitation des richesses du milieu que l'enseignant fera face à ses responsabilités d'éducateur et par la richesse de ses observations à propos des compétences en développement chez les enfants. Il est même probable qu'il s'agit d'un temps privilégié pour des observations vraiment significatives des déjà-là actifs.

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L'enfant peut donc apprendre dans les activités des 4 zones au niveau de la motivation et du montage qui sont souvent intimement liés. En fonction des enfants et de l'organisation des écoles, chaque zone prend une importance plus ou moins grande par rapport aux autres. Si l'école veut réussir son pari de démocratisation, il est clair qu'elle doit être capable de développer davantage la zone B en vue de « compenser » volontairement les compétences non développées par certains enfants et cependant exigées par notre type de société. Mais, dans un souci de compréhension mutuelle, il serait tout aussi intéressant de développer, chez ceux qui ont déjà les compétences traditionnellement exigées par l'école, d'autres compétences que possèdent les enfants de milieux dits « défavorisés par rapport aux exigences de l'école », telles que le sens des réalités, l'anticipation pratique, la débrouillardise face aux problèmes concrets, etc.

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Pourquoi parler de différenciation ?

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Quand on parle de différenciation, on se situe souvent très rapidement, parce qu'il s'agit d'un terme pédagogique, dans une recherche de moyens, souci fondamental pour des praticiens. Mais se pose-t-on assez la question du pourquoi ? Le concept de différenciation en biologie évoque la différenciation des cellules à partir d'une première cellule souche qui se multiplie. Il renvoie donc à l'idée de diversification, notamment des fonctions : à partir d'une même cellule, certaines deviendront des cellules des os ou des cellules du sang ou du cerveau, etc. Dans ce sens, l'école fait de la différenciation depuis longtemps, puisqu'elle conduit tous ses élèves à des résultats et des fonctions très différents. Malheureusement, le concept pédagogique est souvent entaché de cette conception. Il devient alors souvent un problème pour beaucoup d'enfants qui sont renvoyés à leurs difficultés dans un souci de respect des différences considérées comme plus ou moins normales.

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En pédagogie, le concept de différenciation évoque, au contraire, l'idée de vouloir atteindre avec tous un minimum commun, quelles que soient leurs différences de départ. Le mouvement est en fait inverse de celui du concept biologique. L'idée en est à peu près claire chez un certain nombre d'enseignants sur le plan d'une déclaration de principe. Autre chose est d'en saisir les implications concrètes et notamment par rapport à son attitude d'éducateur.

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Quand je rencontre quelqu'un dans mes diverses activités de la vie, il est important de respecter sa ou ses différences. Ce respect n'exclut pas d'en parler et même, pourquoi pas, d'exprimer son désaccord. L'échange, même parfois houleux, sur nos différences et nos désaccords, est indispensable pour la construction d'une entente mutuelle qui aille au-delà de déclarations vides d'engagement réel. Et si l'autre en face refuse ce dialogue, par exemple par peur du conflit, je ne suis ni mandaté ni responsable pour essayer de le rétablir. Après tout, c'est aussi une différence à respecter. En d'autres termes, dans la vie de tous les jours, le respect des différences, c'est-à-dire souvent la non-intervention pour juger ou faire changer l'autre, est une valeur commune importante.

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La question se pose tout autrement quand il s'agit d'être dans mon rôle d'éducateur. Éduquer, qu'on le veuille ou non, c'est bien influencer l'autre pour le faire grandir ou tout au moins changer. Et la société me donne même comme mission de le faire évoluer dans une direction spécifique précisée notamment dans les décrets et les programmes. Que signifie alors cette fameuse affirmation du « respect de la différence » ou celle bien plus difficile encore à concrétiser de « tenir compte des différences » ? Que faire devant un enfant en difficulté en mathématique parce que les débuts des apprentissages ont été trop rapides pour lui et qui s'est identifié à ses difficultés parce qu'elles lui donnaient un statut dans sa famille (c'est comme mon papa !). Le respecter dans sa différence, c'est ne pas faire mon travail d'éducateur. Mon travail, c'est de le bousculer dans ce qu'il est, c'est peutêtre lui donner l'impression momentanément que je ne le respecte pas. Fondamentalement pourtant, c'est le respecter dans sa dignité d'être humain, capable d'apprendre les bases mathématiques comme à peu près tout le monde si les conditions, différentes en fonction des cheminements et de l'histoire de chacun, lui sont fournies. Mais, est-il encore possible actuellement d'oser affirmer une attitude volontariste en vue d'atteindre des objectifs précis sans être considéré comme autoritaire et non respectueux de l'autre ? Voilà une question à débattre au niveau des valeurs de chacun. Si la différenciation a beaucoup de difficultés à trouver ses marques, c'est parce qu'elle dépend très fortement de la réponse à cette question, et que, jusqu'à présent, les enseignants se trouvent coincés entre l'objectif d'uniformité minimale (un savoir minimum commun défini par les Socles de compétences) et le discours sur la valorisation des différences.

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Quand la question du rôle volontariste de l'éducateur est résolue dans le sens positif, encore faut-il préciser ce que l'on entend par l'objectif à atteindre. S'agitil de mettre, avec beaucoup de courage et de fermeté, les conditions pour assurer l'apprentissage des compétences que l'enfant ne possède pas ou s'agit-il, comme c'est trop souvent le cas, de trouver les interventions diversifiées pour que chaque apprenant, à partir de ce qu'il est, réussisse à produire ce qu'on attend de lui ? Dans le premier cas, on travaille à la transformation de l'individu en fonction des objectifs de formation. Dans le second cas, on travaille seulement sur les produits dont la réalisation conduit, parfois par hasard seulement, à la transformation des « aspirants apprenants ». En d'autres termes, la différenciation va-t-elle être au service des apprentissages qui se vivent à des rythmes différents ou au service des productions identiques dans le même temps pour une question de gestion du groupe classe ? Les différences entre les apprenants sont une richesse. Est-ce si sûr ? Probablement quand, dans le groupe qu'ils forment, il y a suffisamment d'homogénéité pour faire fonctionner l'hétérogénéité. Dans le cas contraire, c'est un obstacle

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majeur au progrès, surtout de ceux qui savent le moins. Illustrons notre propos par un exemple : l'apprentissage du ski lors des classes de neige. Dès le départ, on sépare les enfants qui savent déjà skier des autres. Parce que, pendant que l'on va mettre les conditions de l'apprentissage montage pour une partie, que vont faire ceux qui sont déjà en rodage ? Non seulement ils risquent de s'ennuyer, mais ils vont renvoyer, à ceux qui essaient, leur mal-être de devoir attendre et donc mettre les moins bonnes conditions qui soient pour apprendre. Après quelques séances d'essais, il arrive souvent que l'on fasse à nouveau deux groupes : ceux qui ont dépassé le seuil des premiers apprentissages et ceux qui essaient toujours de trouver leur équilibre parce qu'ils n'ont pas eu auparavant l'occasion de monter cet aspect de la compétence. Cette séparation se justifie par les mêmes motifs que ceux évoqués au départ : permettre l'adaptation des conditions d'apprentissage montage ou rodage à chaque groupe d'enfants. Quand tous ont assuré un minimum de montage, il est possible de leur faire vivre des expériences de descentes communes parce que chacun peut alors bénéficier, s'il le veut, des autres, soit en étant forcé d'attendre les plus lents, ce qui est aussi un apprentissage, soit en expliquant l'un ou l'autre perfectionnement, explications qui demandent une bonne prise de conscience personnelle, soit en essayant de se dépasser pour montrer aux autres que l'on ne skie pas si mal que ça, soit... Quand le seuil du montage de la compétence travaillée est dépassé par tous, alors le partage des différences devient une richesse pour chacun. Mais mettre ensemble des enfants qui sont en montage avec des enfants qui sont en rodage pose, dans le contexte actuel des classes, de gros problèmes, et cela, presque toujours au détriment de ceux qui ont le plus besoin de l'école pour assurer les apprentissages spécifiquement scolaires. C'est pourquoi, deux voies sont à travailler dans la recherche des moyens de différenciation : celle des interventions différenciées dans des groupes hétérogènes, mais ayant une homogénéité de base suffisante pour leur fonctionnement, et celle des groupements plus homogènes momentanés, non en fonction d'une faiblesse ou d'une force générale supposée (groupes appelés « de niveaux ») mais en fonction d'une incompétence spécifique constatée (groupes appelés « de besoin momentané »). Le chemin pour clarifier ces deux voies est encore long...

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La différenciation est-elle vraiment au service de meilleures performances pour tous ?10

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Les expressions « pédagogie différenciée » et « différenciation » sont au gout du jour et dans presque tous les discours pédagogiques. Mais derrière cette unanimité d'expression se cachent des représentations très variées. Cette variété pourrait être une richesse (selon l'expression aussi consacrée et à la mode !) si elle ne cachait pas des pratiques contradictoires dont beaucoup sont un véritable danger pour tous les enfants qui ont vraiment besoin de l'école pour grandir.

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En fait, les pratiques développées dans le cadre de la pédagogie différenciée dépendent de la vision que l'on a des différences. Une modélisation de ces visions peut aider à comprendre, même si, dans chaque pratique concrète, on ne retrouve jamais l'ensemble des caractéristiques d'une vision. Comme l'écrit Gérard Fourez11 , « le concept abstrait de diabète a été construit face à des patients spécifiques, mais le modèle abstrait n'est complètement approprié à aucune situation particulière : aucun diabétique n'a exactement le diabète standard. Cependant, ce modèle peut être utilisé pertinemment dans beaucoup de cas... ». La modélisation des visions de la différence peut jouer le même rôle.

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Il est possible de considérer trois attitudes fondamentales devant les différences : - Soit on les gomme, c'est-à-dire que l'on agit comme si elles n'existaient pas. L'individu et ses différences ne sont pas premiers. On s'occupe de la matière à transmettre et chacun fait ce qu'il peut avec ce qu'il est. De toute façon, ces différences sont considérées comme peu modifiables par l'école. Elles sont soit génétiques - et que peut-on faire contre la génétique ! - soit socio-culturelles, et ce n'est pas le rôle de l'école de changer les conditions de vie des enfants qui lui sont confiés. - Soit on les valorise, c'est-à-dire que les différences sont mises en avant comme des caractéristiques singulières à chaque individu. Cette attitude de valorisation de telle ou telle différence à un moment donné a comme résultat de la fixer comme un attribut du sujet. C'est une manière de développer l'individualisme. Chacun met ses différences en avant pour se positionner face aux autres. Comme dans le cas précédent, c'est aussi basé sur la génétique ou le milieu socio-culturel sur lesquels on n'a pas de pouvoir. Derrière une générosité apparente (la richesse de la diversité), cette attitude est bien plus dangereuse que la précédente, parce qu'elle permet encore moins à un enfant de sortir des premières caractéristiques développées par le hasard des rencontres de sa vie. Il est

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L’essentiel de ce texte est également paru dans La rage de faire apprendre, de la remédiation à la différenciation: un nouveau modèle pédagogique, L. Guillaume et J-F Manil, Editions Jourdan-Leclercq, 2006 Gérard Fourez, Compétences, contenus, capacités et autres casse-têtes, Forum Pédagogies, Mai 99 Partie II : Lexique : quelques problématiques


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très vite stigmatisé dans ses richesses comme dans ses difficultés. Elles sont sa marque de fabrique, son individualité. - Soit on les utilise (droit) pour les changer (devoir). Les différences sont considérées comme des faits à un moment donné, résultats de rencontres aléatoires entre les bases génétiques et les sollicitations environnementales. Mais d'autres possibilités auraient pu être développées si le hasard avait produit d'autres rencontres. À partir de ce que chacun est, il est du devoir des éducateurs de proposer des situations permettant, favorisant le développement des caractéristiques exigées par les programmes. Dans cette vision, on croit à l'éducabilité de tous, on croit en la possibilité pour l'éducation de réduire volontairement l'aléatoire du développement de chacun. Réduire pour permettre un minimum pour tous au niveau des compétences de base, et non supprimer car la complexité du développement humain laissera toujours une très grande place à la diversité des caractéristiques. Comme en médecine où une maitrise de plus en plus grande des moyens pour développer une meilleure santé a amélioré sérieusement le capital santé général et l'espérance de vie, sans pour autant supprimer ni la maladie, ni toutes les différences face au bien-être santé.

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Ces visions conduisent chacune à des pratiques de différenciation très différentes. Pour une question de compréhension et d'organisation de l'exposé, nous allons les développer selon deux points de vue : celui de l'organisation des groupes d'enfants, c'est-à-dire de la répartition des enfants avant de commencer le travail d'enseignement - apprentissage, et celui du fonctionnement pendant le travail d'enseignement - apprentissage. Gommer les différences par les groupes de niveaux

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Une manière de gommer les différences dans la situation d'enseignement est d'organiser des groupes de niveaux dits homogènes du point de vue « intellectuel ». C'est dans cette optique que l'on organise des classes fortes et faibles. C'est dans cette conception des différences que l'on trouve les filières du général au professionnel en passant par le technique. L'idée de base est bien de grouper les enfants pour que les différences à l'intérieur de chaque groupe s'estompent. Ces groupements permettent de continuer à présenter dans les classes les mêmes situations d'information et d'application en même temps et selon un programme préétabli. L'organisation majeure allant toujours du collectif à l'individuel à propos de matières dites adaptées au niveau moyen présumé du groupe que l'on a en face de soi. Bien sûr, on accepte parfois des productions différentes en fonction des groupes, mais ce sont les mêmes cahiers, les mêmes livres et les mêmes exercices pour tous à l'intérieur de chacun des groupes ainsi constitués. En fin de parcours, les contrôles, identiques pour tous dans un même niveau, portent sur des productions.

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Gommer les différences par un même traitement suivi de remédiation

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Quand on ne sépare pas les enfants en groupes de niveaux, ou qu'on ne sait pas, ou plus, le faire, l'enseignant se retrouve devant un groupe hétérogène, hétérogénéité vécue comme gênante. « Que voulez-vous faire avec des enfants si différents ? ». Et malgré ces difficultés exprimées, on continue généralement à proposer les mêmes situations, les mêmes applications et le même programme à tous, en partant de l'information collective vers un certain travail individuel souvent reporté au temps de travail à domicile. Dans ce cadre, la différenciation est pensée en termes d'aides individuelles dans des cours particuliers à l'école ou à domicile, parfois aussi en explications supplémentaires individuelles pendant les séances d'exercices d'entrainement. C'est ce qu'on appelle les activités de soutien ou de remédiation. L'objectif est de rendre l'enfant capable de faire correctement les produits finis attendus en fin de période bien plus que de développer des compétences utilisables à long terme. C'est pourquoi, cette aide particulière prend souvent la forme d'exercices de drill sur les petites unités de matière qui feront partie des contrôles à venir, contrôles qui porteront toujours sur les qualités des productions des apprenants. Gommer les différences les accentue

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Ces différentes pratiques liées à une conception de l'école tentant de gommer les différences ont comme effet réel de renforcer les différences. On peut espérer dans un souci d'éthique que c'est involontaire. Mais est-ce si sûr ? Comme il s'agit davantage de « différenciation », de diversification dans les pratiques d'enseignement et non dans l'organisation des apprentissages, les écarts entre ceux qui savent déjà l'essentiel en arrivant à l'école et qui se trouvent donc en entrainement de compétences déjà maitrisées, et ceux qui arrivent pour apprendre, pour assurer le « montage » des compétences non acquises, mais qui n'en ont pas l'occasion dans le style de pédagogie pratiquée, les écarts donc s'agrandissent peu à peu au fur et à mesure de la scolarité. Les essais de différenciation finissent donc par accentuer les différences en stigmatisant celles-ci dans l'esprit des élèves. On obtient donc finalement tout le contraire des objectifs annoncés et poursuivis par le discours de la « différenciation pédagogique ». Valoriser les différences dans des groupes hétéroclites Quand on part de l'idée de valoriser les différences en les instituant attributs particuliers de chaque sujet, l'hétérogénéité des regroupements d'enfants est toujours déclarée comme richesse en soi. Il ne s'agit donc plus de réunir les enfants en groupes de niveaux, mais au contraire de prôner des regroupements hétérogènes tels que les groupes dits inter-âges. Ces regroupements, que nous appellerions volontiers hétéroclites, posent problème à tous ceux qui, tout en déclarant d'un point de vue éthique la richesse de la diversité (pétition de principe), se demandent concrètement ce qu'ils peuvent bien proposer à des enfants si différents.

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Comme dans les activités productives des usines, il s'agira la plupart du temps d'essayer de mettre les enfants en situation de réaliser une ou des productions collectives : réalisation de projets, d'ateliers « créatifs », ... La répartition des tâches entre les participants se fera généralement en fonction des compétences de chacun. Ce sera donc une occasion de mettre en valeur ce que chacun sait faire de mieux. En d'autres termes, c'est une manière pour chacun d'apprendre dans le sens de s'entrainer à faire avec plus de précision et de rapidité ce qu'il sait déjà. Si le souci de l'apprentissage montage est présent chez l'enseignant, les tâches seront peut-être réparties au hasard ou en fonction des incompétences. Mais, comme la réalisation dans un laps de temps déterminé ne laisse pas suffisamment de place pour l'apprentissage montage, les réactions du groupe sont souvent très négatives et l'on finit toujours par négocier une répartition en fonction des compétences déjà là. La réalisation d'un produit commun permet à chacun d'être fier d'avoir participé à l'œuvre collective. Cette joie exprimée par tous cache malheureusement d'autres sentiments auxquels il serait peut-être intéressant d'être plus attentif dans un souci d'éducation pour tous. Il y a bien sûr le sentiment de valorisation personnelle par rapport à ce que l'on a montré comme compétence particulière, compétence dans laquelle on se spécialise davantage pour avoir la possibilité de se valoriser d'autres fois. Par cette attitude, l'éducateur voit trop peu qu'il met un obstacle supplémentaire vers une éducation plus globale de tous les enfants. On privilégie toujours spontanément ce qui nous valorise. Mais à côté de cette valorisation personnelle pour quelques-uns dans un domaine bien particulier, il y a aussi, et surtout, les sentiments de dévalorisation chez tous ceux qui constatent en leur for intérieur qu'ils n'arriveront jamais à faire comme un tel ou un tel. Comme le temps de la réalisation ne permet pas à l'enseignant d'apporter les moyens de l'apprentissage montage, il est plus facile pour l'apprenant de se convaincre qu'il n'est pas fait pour telle ou telle compétence, puisqu'il ne voit pas comment l'acquérir par ses propres moyens. L'espoir de l'enseignant que l'enfant se sente « provoqué », motivé pour essayer de faire comme celui dont il a admiré le savoir-faire lors de la réalisation est bien souvent déçu. Les évaluations et le contrôle en fin d'activité portent sur le produit, sur la réalisation commune. Comme on a profité des compétences de tous, l'avis est généralement très positif, ce qui permet à chacun d'être fier ou tout simplement soulagé d'être arrivé au bout avec les honneurs. Si l'on évaluait vraiment les apprentissages de chacun et les sentiments développés par rapport aux possibilités d'apprentissage ultérieurs, on serait très surpris des résultats par rapport aux objectifs d'éducation globale pour tous demandés par les programmes, donc par la société. Valoriser les différences et s'y adapter Dans l'optique de valorisation des différences, on peut aussi simplement travailler avec des groupes d'âges acceptés dans leur hétérogénéité. Dans ce cas,

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l'effort sera placé sur une adaptation de l'enseignant à cette diversité. On parlera alors de diversification des méthodes et des moyens. Mais, comme il est pratiquement impossible pour un enseignant de s'adapter consciemment et volontairement à chacun des 25 enfants qu'il a en face de lui, on tiendra un discours correspondant à la célèbre formule des fromages belges « Un peu de tout ». Si l'enseignant varie suffisamment son travail, par exemple en présentant des consignes écrites et orales, chacun pourra prendre en fonction de ce qu'il sait faire le mieux. Si par ailleurs, quelques essais d'individualisation sont tentés pour s'adapter au rythme de chacun, souvent grâce à un système de fichiers, on pourra avoir l'impression de faire le maximum pour respecter les différences. Cette double adaptation aux enfants peut conduire aussi à deux attentes différentes, distinctes ou combinées. L'enseignant attend un produit identique pour tous mais par des chemins et des moyens différents ; ou il attend des produits différents à des rythmes différents. Où est, dans cette optique, l'idée d'une éducation globale minimale pour tous (principe d'égalité). Mais surtout, comment mettre en place concrètement ces adaptations et cette individualisation pour 25 enfants dans une optique de développement des compétences ? Le contrôle en fin de parcours porte sur des produits identiques ou différents en fonction des compétences de chacun. Cette diversification de la pédagogie renforce en fait les différences, soit volontairement quand on parle de respecter les différences de départ, soit involontairement quand on constitue des groupes hétéroclites.

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Utiliser les différences dans des groupes de besoin12

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Dans une troisième optique, les différences sont perçues comme des faits momentanés et donc modifiables. Dans ce cas, si l'on se met du point de vue de la formation des groupements d'enfants, l'objectif devient la formation de groupes de besoin. Il s'agira de grouper, momentanément, un certain nombre d'enfants en vue de permettre l'apprentissage des démarches mentales, affectives, pratiques, et des opérateurs matières permettant de dépasser une incompétence bien identifiée. L'idée est de se donner les meilleures conditions pour fournir aux apprenants les situations, les contraintes et les ressources les plus pertinentes pour leur permettre de s'approprier la nouvelle compétence. Ces regroupements n'ont de valeur que pendant ce que nous appelons les « apprentissages montage », c'est-à-dire pendant le temps des essais et erreurs pour maitriser les premiers éléments de la compétence. Par exemple, pour prendre une image facile mais qui permet peut-être de comprendre les enjeux, il est plus utile pour un cours d'informatique de grouper les enfants en fonction de leurs acquis et non acquis dans l'utilisation de l'outil. En mettant ensemble ceux qui découvrent l'outil, on peut mieux leur fournir ce dont ils ont besoin en s'adaptant à leur rythme. Sinon, on va trop vite pour ceux qui débutent, ou on les laisse trop long-

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Voir à ce propos, Partie II, Lexique, Dispositif pédagogique : « En quoi la notion « groupes de besoin » est-elle plus positive que la notion « groupes de niveau » ? Partie II : Lexique : quelques problématiques


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temps sans aide parce qu'on est accaparé par les demandes d'autres plus avancés. En fait, l'enseignant tente de jouer à l'homme orchestre en n'arrivant jamais à fournir ni les situations ni les ressources les plus adéquates pour chacun. Bien sûr, dans l'exemple de l'utilisation d'un ordinateur, les ressources interactives du matériel permettent en général de compenser ce manque d'adéquation entre la demande et l'offre. Il en va tout autrement dans l'apprentissage du savoir écrire ou du savoir calculer. Les groupes de besoin sont donc importants pour permettre aux apprenants de travailler à leur rythme, dans les meilleures conditions, sans la pression de ceux qui savent déjà et qui avancent plus vite parce qu'ils sont dans l'apprentissage rodage, c'est-à-dire dans l'entrainement en vue d'une plus grande rapidité et précision. Dans ces groupes de besoin, après un premier travail individuel pour avoir le temps d'évoquer ses déjà-là, il sera tout aussi indispensable d'organiser les interactions entre les apprenants, et de fournir les ressources nécessaires à la progression de tous. La différenciation se jouera aussi à ce niveau comme nous l'expliquerons plus loin. La grande difficulté pour pratiquer la différenciation des regroupements est de pouvoir déterminer les aspects significatifs des compétences. Il s'agit de se construire des grilles d'observation des compétences en construction pour pouvoir adapter ses propositions d'apprentissage aux incompétences vraiment constatées chez les enfants. Par exemple, il ne sert à rien de faire apprendre par cœur des tables de multiplication chaque année à des enfants qui n'ont toujours pas construit ni le sens des nombres ni le sens des opérations, et pour qui tous les nombres cités ne sont que des mots vides de sens. Il serait bien plus utile de leur proposer des situations leur permettant de « re »construire du sens sur le comptage, la numération, les opérations, etc. Regrouper, momentanément, les enfants pour travailler spécifiquement leur incompétence constatée, indépendamment de l'âge ou de la classe, c'était l'idée de base d'un véritable travail en cycle. La difficulté majeure de ce genre d'organisation, c'est d'abord de maitriser les différents aspects des compétences du programme. Il ne s'agit nullement de regrouper les enfants qui savent compter jusqu’à 10 et ceux qui savent compter jusque 30. Ces regroupements n'ont aucun sens si les enfants comprennent tous le système numérique de position. Par contre, il est vraiment utile de travailler spécifiquement ce système numérique de position avec ceux qui ne l'ont pas compris, en prenant tout le temps nécessaire parce que cette compréhension assure les bases de tout le travail ultérieur en mathématique. L'utilisation des groupes de besoin comme outil de différenciation des apprentissages a comme objectif de pouvoir contrôler chez tous l'acquisition d'une performance minimale identique, indépendamment du rythme d'acquisition. Cet objectif de contrôle de la performance minimale participe bien à encourager la recherche de tous les moyens pour réduire les différences sur ce que l'on considère comme les socles de base. En partant des différences constatées comme des faits en vue de les modifier, l'enseignant propose des activités permettant de construire un peu plus d'égalité.

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Utiliser les différences pour les faire interagir au service de plus d'égalité

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Les différences considérées comme des faits à modifier peuvent aussi conduire à une différenciation de fonctionnement dans des groupes hétérogènes. Quand des enfants qui viennent d'assurer le montage d'un aspect d'une compétence rejoignent ceux qui maitrisaient cet aspect de la compétence depuis plus ou moins longtemps, ils forment ensemble des groupes très hétérogènes. C'est dans ces groupes où on trouve la diversité des acquis et des cheminements mais aussi la maitrise au moins partielle de la compétence, que les partages pour résoudre des situations complexes vont provoquer les conflits socio-cognitifs les plus pertinents pour faire avancer chacun dans la maitrise de la compétence spécifiquement travaillée. Au-delà de cette différenciation des apports, des cheminements, et des éléments construits par chacun des apprenants, que l'enseignant doit reconnaitre comme tel et considérer comme normal, il est important de considérer aussi les apports différents de l'enseignant. Les grilles des aspects des compétences qu'il doit maitriser, autant du point de vue des démarches mentales, affectives et pratiques que du point de vue des opérateurs matières, lui servent d'outils d'observation pour décider des ressources qu'il doit mettre à la disposition de tel ou tel groupe, pour décider des interventions individuelles ou collectives en vue d'apporter un complément d'informations nécessaires aux apprentissages et approfondissements en cours. Ces observations vont aussi servir à l'organisation ultérieure de groupes de besoin. À côté des grilles des aspects des compétences, il est aussi nécessaire, pour pratiquer la différenciation face aux groupes d'apprentissage hétérogènes, de maitriser les grilles des qualités des produits ou des performances attendues. Ce sont ces grilles qui permettront à l'enseignant de savoir si derrière tous les résultats momentanés obtenus et différents, les performances minimales sont réellement construites. Les contrôles porteront sur une ou des performances considérées comme significatives de la maitrise de la compétence visée. Cette différenciation dans les cheminements des apprenants, acceptée et utilisée dans l'établissement de conflits socio-cognitifs, accompagnée de la différenciation des réactions et des ressources utilisées consciemment, volontairement par l'enseignant en fonction des observations réalisées vont concourir à réduire peu à peu les différences par rapport aux Socles de compétences. Tout le monde marche, mais avec de grandes différences dans la manière, la rapidité, l'esthétique, etc. Tous savent bien écrire, mais avec de grandes différences dans le style, l'aisance, le plaisir ressenti, etc. Dans cette dernière conception de la différenciation, tout est utilisé pour réduire un peu les effets de l'aléatoire des rencontres entre les possibilités génétiques et les sollicitations nécessaires de l'environnement.

C'est dans cette optique que les recherches sur la différenciation devraient résolument se tourner si les discours politiques sur la recherche d'une certaine égalité des résultats de la formation veulent enfin être pris au sérieux. 132

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Les différences Les gommer

Les valoriser

Les utiliser (droit) pour les changer (devoir)

La matière est première, pas l'individu. Les différences des individus sont génétiques, ou socio-culturelles, mais peu modifiables à l'école

Les différences sont des attributs du sujet Mettre en avant ce qui différencie à un moment donné et donc le fixer (individualisme !)

Les différences sont des faits, résultats de l'aléatoire génétique et environnemental Educabilité de tous : réduire (un peu) l'aléatoire

Fonctionnement Groupements

Fonctionnement Groupements

Groupes de niveaux, dits homogènes du point de vue « intellectuel »

Groupes d'âges hétérogènes considérés comme gênants

- Des groupes d'âges hétérogènes avec essais d'adaptation de l'ens. - Des individus

Situations Diversification pertinentes pour - des méthodes un aspect du - des moyens (un peu de tout !!!) montage d'une ex : fichiers nom- compétence breux, enseigne- (grille des aspects d'une ment compétence) programmé (informatique), ... - soit l'enfant Travail individuel prend en fonction Interaction dans de ce qu'il est les groupes (ex. : visuel Ressources (pas auditif ) aides !) - soit l'enseignant spécifiques (grille s'adapte à des démarches) chacun : individualisation

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Mêmes situations Mêmes situations Même situation d'informations et de production d'informations pour tous et d'applications d'applications Ex. : Projets, pour tous en pour tous en ateliers dits même temps même temps créatifs, etc. selon un selon un Ou «Que faire programme programme avec des enfants préétabli préétabli si différents ? »

Groupes de besoins homogènes uniquement pour l'incompétence à dépasser

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Groupes hétéroclites (comme dans la vie productive) ex. : inter-âges

Fonctionnement

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Groupements

Groupes hétérogènes utiles pour les conflits sociocognitifs

Situations interactives identiques pour tous à propos de la motivation ou du rodage d'une compétence

Du collectif à l'individuel. Aides différentes (soutien, remédiation) pour atteindre ...

- Répartition des tâches pour mettre en valeur ce que chacun sait. - Diversité des tâches réparties au hasard

Productions différentes en fonction des groupes, mais mêmes cahiers et mêmes contrôles dans chaque groupe

Le même produit fini pour tous. Mêmes cahiers, mêmes contrôles

Réalisation d'un « produit », parfois commun, dont chacun peut être fier (en fonction de son apport !!!)

Contrôle des produits

Contrôle des produits

Evaluation du ou Contrôle des des produits produits

Evaluation de la performance

Diversification de la pédagogie qui renforce les différences soit volontairement, soit involontairement (groupes hétéroclites)

Différenciation de la pédagogie pour réduire les écarts en fonction des Socles (recherche d'équilibre entre homogène et hétérogène)

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Du collectif à l'individuel Matières adaptées au niveau présumé des groupes

Renforce les différences « involontairement »(!!) entre ceux qui savent (entrainement) et ceux qui n'ont pas encore construit les outils nécessaires

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- soit produit identique par des chemins différents - soit produits différents à rythmes différents

Travail individuel Cheminements différents (grille des démarches ...) Conflit sociocognitif Ressources différentes

Résultats Performance momentanés minimale iden- différents. tique pour tous à Performance des rythmes dif- minimale idenférents tique (grilles des qualités des produits, des performances) Evaluation // Contrôle ... de la performance

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Pourquoi penser et adapter son dispositif pédagogique ?

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Prévoir l'organisation de l'espace (situation des bancs, locaux occupés,...), la gestion du temps (temps utile entre certaines étapes,...) et les types de groupement des enfants, en fonction des activités que l'on propose relève du dispositif pédagogique. Dans toute préparation d'activités, que celle-ci soit d'apprentissage, d'implication dans le milieu ou même d'autogestion, le dispositif pédagogique sera pensé en relation avec les objectifs poursuivis.

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Dans les activités d'apprentissage, les enfants ont souvent un temps individuel pour découvrir la tâche et l'obstacle qu'ils doivent affronter, pour mobiliser leurs ressources et commencer à diriger leur recherche. Ensuite, un temps de confrontation avec des pairs dont les différences de développement de la compétence en construction ne sont pas trop grandes, est très souvent un moment important pour l'apprentissage... Quand les représentations se confrontent... Le temps collectif peut être intéressant quand il est utilisé comme ressource pour ensuite réinvestir la tâche. L'apport de l'information par l'enseignant, l'observation des découvertes réalisées par un groupe, etc., se vivent lors de temps collectifs qui, inscrits dans une logique de construction des apprentissages, apportent un nouvel élan dans l'appropriation individuelle de la compétence. Cependant, très souvent, le temps de partage collectif est peu utile car il ne concerne que l'enseignant et quelques enfants... Si ce schéma : travail individuel, puis partage en petits groupes suivi d'éventuels temps collectifs, est de plus en plus véhiculé par les enseignants qui vivent une approche de l'apprentissage « constructiviste », il ne faudrait pas imaginer que ce seul dispositif soit pertinent. Par exemple, lors de certaines activités d'apprentissage, face à un matériel, pour une certaine tâche, le regroupement de deux enfants de même niveau de développement de la compétence travaillée peut s'avérer être très porteur d'interactions constructives... Dans les activités d'implication dans le milieu, le dispositif sera extrêmement varié. En fonction de la tâche qui, à ce niveau, permet essentiellement de mobiliser

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ce qui a déjà été appris, le temps sera délimité. En effet, toute production est intimement liée au temps disponible pour la réaliser. Tous les groupements sont possibles. Souvent, on valorisera l'hétérogénéité pour encourager la répartition des tâches, le leadership, les interactions entre enfants de compétences diverses, etc.

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Dans les temps d'autogestion, le dispositif pédagogique est également très variable, d'autant plus, qu'on ne peut prévoir les activités qui seront choisies et par quels enfants. L'enseignant, en concertation avec les apprenants, se centrera essentiellement sur l'accessibilité aux choix et les conditions de faisabilité. Par exemple, il ne peut y avoir que 5 enfants maximum au coin bibliothèque, 3 enfants au bac à sable, 4 enfants aux ordinateurs, ...

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Il n'est pas très intéressant d'être répétitif et de fonctionner toujours de la même manière. Le fait de penser et de noter le dispositif prévu lors de la préparation d'activités permet parfois de prendre conscience de cet aspect répétitif et peut amener un peu plus de créativité dans les manières de s'organiser. Si l'enfant a besoin de certains rites et de certains rythmes, il est aussi nécessaire qu'il s'habitue au changement pour pouvoir mieux s'y situer à l'avenir.

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Pourquoi réfléchir à la gestion de l'espace ? Pour favoriser les échanges permettant la construction d'apprentissages, il est souvent nécessaire de revoir la gestion de l'espace commun. Dans une classe où la conception de l'apprentissage est centrée sur une approche interactive, la confrontation et la collaboration entre les pairs sont constamment sollicitées. Dès lors, il s'avère utile de prévoir une disposition des bancs adéquate, souple, une réelle accessibilité aux ressources, ... Il ne s'agit pas de changer l'espace en croyant que ce changement de surface (visible) annonce un changement en profondeur. Cependant, pour permettre la mise au travail rapide des élèves et pour les habituer à changer d'organisation en fonction d'une intention annoncée... il est indispensable de réfléchir à une autre organisation spatiale.

En quoi la notion « groupes de besoin » est-elle plus positive que la notion « groupes de niveau » ? Un enfant entouré de camarades qu'il considère comme plus "forts" que lui peut se sentir mal à l'aise et essayer de cacher ses difficultés en développant certaines attitudes comme la copie sur son voisin, la demande d'aide systématique, l'expression du refus de travailler, ... Il s'agit toujours d'une réaction intelligente pour Partie II : Lexique : quelques problématiques

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se protéger contre une dévalorisation de l'image de soi. Avoir des endroits où l'incompétence ne "ridiculise" pas est important. Fournir à l'enfant des occasions de s'améliorer, de comprendre, de découvrir, entouré d'autres enfants ayant plus ou moins la même incompétence (quel que soit leur âge) devient donc une priorité au début d'un apprentissage. Il ne s'agit pas d'organiser des groupes de niveaux définitifs, mais seulement de regrouper momentanément des enfants commençant l'apprentissage d'une compétence pour leur assurer les meilleures sollicitations. Quand ils auront atteint un certain seuil, ils rejoindront des groupes plus différenciés pour bénéficier de l'émulation provoquée par une plus grande diversité.

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Cette pratique des groupes de besoin organisée parallèlement aux groupes diversifiés entraine la perte de l'habitude de parler d'enfants forts ou faibles. Chez les enfants aussi, on ne parlera plus de forts ou de faibles. Ces notions n'ont de sens que par rapport à une norme à un âge donné. Les activités complexes proposées révèlent des difficultés chez tous les enfants et cela dès l'école maternelle. Chacun sait donc qu'il a quelque chose à apprendre avec d'autres. Ces difficultés seront "traitées" sans dramatisation puisque tous commencent à considérer que l'on ne peut apprendre que lorsqu'on ne sait pas, que l'expression des difficultés est indispensable pour se donner le projet d'apprendre. Même les enfants présentant, dans les activités scolaires répétitives, une certaine aisance globale, se rendent compte de leurs besoins spécifiques. Ils apprennent ainsi une certaine humilité. L'intention n'est pas "d'humilier" les enfants, mais de modifier leur conception de la réussite et de l'erreur dans une perspective de développement.

Le tutorat, une stratégie au service de l'apprentissage ?

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Parmi les différentes stratégies que l'on peut mettre en place au sein de son école pour susciter le développement de compétences, le tutorat est un outil intéressant quand on en connait clairement les objectifs. Le tutorat est un temps d'entraide qui réunit un demandeur (un apprenant en difficulté dans un domaine particulier) et un tuteur (un apprenant qui pense être suffisamment avancé dans ce domaine pour apporter de l'aide). Dans les écoles fondamentales, le tuteur peut être un camarade du cycle mais également d'un autre cycle. L'enfant, conscient de son savoir mais également de son non savoir, s'inscrit seul ou avec d'autres pour demander de l'aide. Cette inscription peut se faire égale136

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ment à la demande de l'enseignant. En général, un tableau est mis à la disposition des enfants durant un laps de temps défini pour permettre tant aux demandeurs qu'aux tuteurs de s'inscrire.

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Avant la séance, le tuteur disposera d'un temps pour préparer des activités en lien avec le niveau de développement de son « pupille ». Il sera aidé par l'enseignant qui lui donnera certaines informations utiles.

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Le temps de tutorat se vit dans des espaces définis, pour un temps déterminé, le tuteur et son/ses pupille(s) s'installent et vivent cette rencontre sous l'œil attentif d'un enseignant. Ce dernier sera assez distant pour permettre un climat d'intimité mais vigilant pour cadrer d'éventuels débordements non souhaités. Après la séance, un temps d'évaluation est proposé pour ajuster et envisager l'avenir.

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Pour les enseignants, il ne s'agit pas d'un temps d'apprentissage au sens le plus strict, mais bien d'un temps de motivation pour le pupille et un temps de rodage pour le tuteur. On ne peut demander à un enfant de comprendre l'apprentissage pour faire le même travail que l'enseignant, mais il peut témoigner de son cheminement, de sa manière de s'y prendre. C'est donc pour sa valeur de témoignage que l'activité est considérée comme très intéressante.

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Aussi, dans ces temps de tutorat, on observe une sollicitation importante des compétences transversales (relationnelles, instrumentales, métacognitives...). C'est donc l'occasion pour l'enseignant de relever certains indices de développement de ces compétences.

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Pour les enseignants, c'est également un travail important au niveau de l'éducation à la citoyenneté. Il s'agit d'apprendre à l'enfant qu'aider autrui est un devoir de personne responsable : aide à personne en danger ... de ne pas apprendre ! Dans certaines expériences, on constate : - que les enfants « tuteurs » préparent très sérieusement les activités pour aider, souvent en imitation de celles qu'ils ont vécues et qui les ont aidées. - la présence de relations entre enfants « tuteur et pupille » en dehors du cadre de la classe et cela même quand l'accompagnement est terminé. - qu'un couple « tuteur-pupille » peut être formé pour une séance ou pour plusieurs séances, il n'y a pas de règle prédéfinie. - l'importance de ne pas enfermer les enfants dans des étiquettes de « tuteur permanent » ou de « demandeur né ». Chacun sera un jour tuteur et pupille. - ... Partie II : Lexique : quelques problématiques

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Suffit-il d'observer les enfants pour connaitre leurs difficultés ?

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C'est à partir de nos sens que nous découvrons le monde. C'est donc aussi à partir de l'observation que l'on peut découvrir la richesse de ce qui nous entoure. L'affirmation semble évidente. Et pourtant, ce n'est probablement pas si simple. S'il suffisait de regarder pour voir ce qui est là, pourquoi l'humanité mettrait-elle tant de temps à découvrir ce qui ensuite parait relativement évident à tous ?

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Réfléchissons d'abord sur la notion d'observation telle qu'elle est souvent vécue dans les classes. En fait, la première conception de l'observation, qui dirige encore beaucoup de pratiques, tient pour évidente l'idée qu'il suffit de regarder pour voir. On présente à l'enfant une situation et on lui demande ce qu'il voit. Les réponses données sont souvent loin de celles attendues par l'enseignant. Et ce dernier se plaint que l'élève est faible, que ça ne sert à rien de les laisser observer, qu'il faut tout leur dire, etc. L'enseignant a prévu la situation en fonction de certaines caractéristiques qu'il voulait travailler. Ces caractéristiques sont donc évidentes pour lui. Mais pour celui qui est en apprentissage de ces caractéristiques, ce n'est absolument pas évident. D'abord, dans tout ce qui est visible, qu'est-ce qui est significatif pour le moment présent ? Bien sûr, ce que l'on peut nommer les caractères externes de la situation sont assez vite perçus : la couleur, le nombre de mots dans une phrase, etc. Mais l'apprentissage porte généralement sur d'autres caractères que l'on peut appeler internes : le fonctionnement, les relations entre les mots, etc. Et ces derniers ne peuvent être vus que si on les connait déjà ou si l'on a des hypothèses de leur existence. C'est pourquoi, il est important de concevoir l'observation d'une autre manière. En fait, même pour un certain nombre de caractéristiques externes, mais surtout pour toute caractéristique interne, on ne voit que ce que l'on connait déjà ou ce pour quoi on a une hypothèse de leur existence. C'est le déjà-là qui oriente presque exclusivement l'observation. Celle-ci est donc toujours précédée d'une réflexion à partir d'un savoir déjà là et parfois, dans ce qu'on appelle une démarche scientifique, à partir d'hypothèses, de suppositions, d'attentes précises. Dans toute situation d'observation, par exemple un classement d'objets, il est 138

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donc intéressant d'observer l'enfant sur les savoirs mobilisés et aussi de lui laisser le temps d'évoquer certains questionnements, c'est-à-dire certaines hypothèses. C'est à partir de ces observations, parfois très limitées en fonction du savoir déjà là de chacun - limites que l'on doit considérer comme normales - que l'enseignant doit, obligatoirement, apporter des informations permettant d'agrandir les possibilités d'observation. C'est cet apport neuf d'informations qui va changer le regard, qui va permettre une plus grande richesse d'observation appliquée à de nombreux objets. Et même cette information neuve ne va pas aller de soi. Ce n'est pas parce qu'on vient de vous parler des différentes formes des pieds des champignons qu'il est soudain facile de les distinguer. L'information a orienté l'observation vers une caractéristique dont on n'avait pas pris conscience plus tôt. Elle n'a pas donné la compétence de distinguer avec certitude les différentes formes des pieds. Il faut encore essayer, se tromper, ajuster le regard, s'entrainer régulièrement. Ce sont les mêmes actions qui peuvent permettre à l'enfant de reconnaitre, par exemple, les différentes caractéristiques d'une phrase. En d'autres termes, l'enseignant conscient que l'observation ne fonctionne qu'à partir du déjà-là, va conduire ses activités de connaissance du monde d'une tout autre manière. Il va pouvoir considérer comme normal que celui qui est en apprentissage ne puisse exprimer les critères attendus puisqu'il ne peut les voir. Seuls ceux qui savent déjà peuvent en parler. L'enseignant sait donc que son rôle est d'apporter des informations, mais il sait aussi que celles-ci ne sont pas suffisantes pour assurer le montage de la compétence attendue.

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Les difficultés que nous venons d'évoquer dans les activités d'observation demandées aux enfants sont identiques pour les activités d'observation des enfants par les enseignants. Il ne leur suffit pas de regarder pour voir. L'enseignant ne peut repérer chez les enfants que les difficultés qu'il attend, c'est-à-dire celles qu'il connait. Comme leur formation a été, jusqu'à présent, peu centrée sur l'observation des difficultés des enfants, il est souvent très difficile, pour beaucoup, d'aller plus loin qu'un constat de difficultés. Ces dernières sont, par ailleurs, attribuées à des causes très générales telles qu'un manque de travail, ou une faiblesse intellectuelle ou un manque de maturité. De temps en temps, on peut préciser de quelle faiblesse il s'agit, mais souvent en termes de matière. Il est en difficulté pour l'orthographe grammaticale, ou dans la connaissance des tables de multiplication. C'est beaucoup plus rare d'entendre dire qu'il ne se représente pas les liens entre les mots parce qu'il ne sait pas encore faire un retour réflexif sur la langue, ou qu'il ne comprend pas les rapports entre les nombres, ou qu'il manipule des mots et non des quantités, qu'il ne sait pas comment mettre en mémoire à long terme, etc. Pourtant, ce sont des observations de ce genre qui permettraient de chercher les outils adéquats pour amener un enfant à dépasser ses difficultés. Sans ces observations, les propositions d'activités sensées aider les enfants à dépasser leurs difficultés ne peuvent être efficaces que par hasard. Et il faut bien reconnaitre que ce hasard n'est pas vraiment très Partie II : Lexique : quelques problématiques

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efficace. À part quelques exceptions qui nous servent parfois de justification pour continuer les mêmes pratiques, ce sont toujours les mêmes enfants qui sont en difficulté dans les mêmes compétences.

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Il ne suffit donc pas d'observer les enfants pour connaitre leurs difficultés. Il est nécessaire d'apprendre à maitriser les différents aspects d'une compétence, c'està-dire aussi bien la composante « démarches mentales, affectives et pratiques » que la composante « opérateurs matières ». L'enseignant ne peut bien observer les enfants que s'il connait les démarches mentales nécessaires à la réalisation de la performance demandée et s'il connait les difficultés précises de la matière travaillée. Par exemple, contrairement à ce qui est souvent affirmé, il ne suffit pas de lire pour avoir une bonne orthographe. Il faut surtout qu'en lisant l'enfant se construise des images mentales non seulement du contenu mais aussi de l'écriture des mots. Il faut en d'autres termes que les mécanismes perceptifs de l'appréhension de la forme des mots fonctionnent automatiquement aussi bien que les mécanismes (processus) de représentation mentale des situations évoquées. Il ne s'agit pas d'un don, mais d'un apprentissage que certains font un peu par hasard parce qu'ils rencontrent les conditions adéquates au bon moment pour eux, et que d'autres ne font jamais si on ne leur propose pas des pratiques pertinentes pour obtenir le développement de cet aspect de la compétence.

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De même, il est indispensable de percevoir où sont les difficultés, les obstacles majeurs dans la construction d'une matière, dans son appropriation pour la rendre rapidement utilisable, « opérante », d'où la notion d'« opérateurs matières » liée au concept de compétence. Par exemple, tant que l'on ne voit pas que le problème de l'orthographe n'est pas d'abord pour beaucoup d'enfants un problème de règles non connues, mais un problème de reconnaissance des catégories de mots dans leurs propres écrits, c'est-à-dire dans des écrits où la structure des phrases n'est pas donnée, comment peut-on penser d'autres pratiques que les exercices systématiques sur des phrases prévues à cet effet ? Et comment alors ne pas continuer à poser le faux problème du transfert ? Apprendre à observer les enfants, c'est donc, d'abord, apprendre un peu mieux comment fonctionne notre cerveau, tout en sachant que l'on connait encore peu de chose. Mais il faut bien commencer un jour. Pas mal de données existent, même s'il est probable qu'un certain nombre d'entre elles seront remises en cause dans les années futures. C'est ainsi que la science avance. C'est vrai dans les autres disciplines. Acceptons-le aussi, avec humilité, en pédagogie. Apprendre à observer les enfants, c'est aussi mieux maitriser les matières enseignées, c'est en connaitre les « nœuds », les obstacles majeurs, les subtilités dans lesquelles les apprenants se laissent régulièrement piéger. C'est l'apport majeur des didacticiens des disciplines. Et là aussi, si les données commencent à être

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nombreuses, le chantier reste grand ouvert. Mais ce n'est pas un motif pour ne pas profiter de ce qui est déjà connu.

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Apprendre à observer les enfants, c'est le chantier de l'avenir. Il est immense, il est à commencer dès aujourd'hui. Mais il n'est possible que si l'on travaille avec des situations pédagogiques où ce sont les enfants qui sont essentiellement actifs en classe. Pendant un exposé de l'enseignant, ce dernier peut difficilement observer les enfants, si ce n'est dans leur compétence à prendre la position adéquate pour au moins faire croire qu'ils écoutent.

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Ce chantier de l'avenir, c'est la construction de grilles d'observation, non à cocher sur une feuille, mais utilisable facilement parce que maitrisée dans le répertoire cognitif de chacun. Le problème immédiat, à défaut d'outils déjà bien construits, est de se donner une démarche pour les élaborer peu à peu en équipe. La question devient donc pour chacun : « Comment construire des outils d'observation des cheminements des apprenants ? »

De quels outils d'observation faudrait-il disposer ?

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Pour améliorer leurs compétences professionnelles, les enseignants doivent se donner les moyens d'évaluer des compétences en développement. Il s'agit de devenir capable d'observer les apprenants en train d'acquérir ou de cheminer vers une certaine maitrise de l'une ou l'autre compétence.

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Observer, c'est prendre des indices dans une situation et leur donner du sens en fonction d'hypothèses explicatives. Une observation facile et rapide ne peut être réalisée qu'en fonction de ce qu'on connait déjà, de ce qu'on attend de la situation observée. Ce sont ces attentes qui permettent de sélectionner et de donner du sens à certains évènements parmi tous ceux qui se produisent. Ce sont ces attentes qui font que, dans une même situation globale, deux observateurs ne sélectionnent pas les mêmes évènements ou ne leur donnent pas le même sens. Mis devant une situation problématique (cadre 1 du tableau ci-dessous) lui permettant de commencer à acquérir une compétence définie, l'apprenant se mobilise pour exprimer au bout d'un certain cheminement une première production (cadre 2). L'enseignant peut observer la situation problématique pour en vérifier les caractéristiques en fonction de sa connaissance de la matière, et en fonction de ses options pédagogiques.

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- Par exemple, la situation correspond-elle bien à tel nœud matière et est-elle assez difficile pour constituer une vraie difficulté pour les apprenants?

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Il peut aussi observer, après un certain temps, le produit fini obtenu ou même les produits partiels. Il observe ceux-ci en fonction d'une grille13 de critères de ce qu'est le produit attendu (cadre 8). - Par exemple, qu'est-ce qu'une comparaison ou un problème bien résolu?

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Cependant, comment aider un apprenant entre cette situation de départ et le produit partiel ou final quand il n'en sort pas tout seul? Comment comprendre ce qui lui pose problème ? Comment l'aider dans son cheminement ? Comment provoquer un réel apprentissage des processus à mettre en place pour acquérir la compétence visée ? Pour essayer de répondre à ces questions, il faudrait aussi une grille des aspects de la compétence en train de se construire (cadre 6). Cependant une difficulté de taille se présente. Même si l'enseignant possède une bonne connaissance des processus possibles à mettre en jeu dans leur variabilité individuelle, comment peut-il les observer ? A partir de quoi peut-il émettre ses hypothèses explicatives pour ensuite ajuster le plus adéquatement possible ses actions en vue de favoriser l'apprentissage du sujet apprenant ? C'est pour tenter de répondre à cette question que, parallèlement à la grille des aspects de la compétence (cadre 6), il est intéressant, voire indispensable de construire aussi une grille d'indices de développement de la compétence (cadre 7). C'est à partir de ces indices que l'enseignant pourra faire ses hypothèses et les vérifier dans un dialogue personnalisé avec l'apprenant. Même si elle en est très différente, cette grille d'indices n'est pas sans rapport avec la grille de critères de ce qu'est le produit "idéal" (cadre 8).

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La succession des mises en situation va permettre aux apprenants d'améliorer peu à peu les produits (cadres 3 , 4, ...) jusqu'à une certaine maitrise de la compétence, maitrise jugée suffisante à un moment donné de leur évolution. C'est seulement alors que l'on pourra confronter le produit (cadre 5) avec la grille de contrôle de la qualité de la production dans son état attendu à ce moment (cadre 9). En situation de classe, l'ensemble de ces grilles construites lors de l'apprentissage des compétences professionnelles doit fonctionner en interaction. Elles font partie du répertoire cognitif mobilisable à tout moment. Elles permettent de voir ce qui serait, sans elles, sans signification utile pour une pratique de classe plus efficace.

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Le mot grille est utilisé à défaut d'avoir trouvé une expression plus pertinente. Dès lors, chacun doit s'interroger sur les représentations qu'il a de ce concept en n'oubliant pas que c'est moins le contenu que la démarche qui est important. Partie II : Lexique : quelques problématiques


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Quelles « grilles » d'évaluation ? Situation complexe (1)

Produit 1 (2)

Produit 3 (4)

Produit X (5)

apprentissage

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Produit 2 (3)

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Grille de contrôle de la qualité de la production attendue à ce moment (9)

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Grille des critères de ce qu’est le produit

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Grille des aspects de la compétence

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Grille d’indices de développement de la compétence (7)

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Comment construire des outils d'observation des cheminements des apprenants ? Pour permettre à l'enseignant d'aider l'enfant, pour amener les enfants à s'aider entre eux, il est nécessaire que chacun puisse observer le travail des autres, puisse prendre des indices dans les cheminements différents, puisse évaluer. Évaluer et s'évaluer pour l'enfant comme pour l'adulte, c'est pratiquer cette observation fine de la construction de la compétence en train de se faire, c'est prélever un certain nombre d'indices caractéristiques du développement de cette compétence, indices prometteurs ou moins prometteurs, impliquant une régulation de l'activité d'apprentissage.

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Cependant, on ne peut observer qu'en fonction de ce que l'on s'attend en partie à trouver, en fonction de ce que l'on a déjà comme représentation de la situation. C'est pourquoi, la plupart des enseignants ne pratiquent pas cette évaluation fine. Ils contrôlent régulièrement l'acquisition ou non des savoirs, les produits finis obtenus au bout des activités. Maitrisant mal le sens même des compétences en développement, non outillé pour observer l'enfant en apprentissage, pour prélever des indices de développement, l'enseignant se contente de reconfronter l'enfant au même genre de situations, à plus d'exercices du même type, voire à un retour en arrière sur des situations simplifiées puis progressivement plus compliquées.

VA

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Pour aider les enseignants à faire un pas de plus dans l'appropriation de cette question de l'apprentissage de compétences proposées dans les programmes, il devient nécessaire sinon impératif d'élaborer des outils de pratiques d'évaluation : des grilles14 d'explicitation des compétences en développement, des listes d'indices observables, ...

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Il s'agit bien de construire avec les enseignants, comme avec les enfants, des listes d'indices que telle compétence est en développement, d'indices à observer pendant que l'enfant est en train d'apprendre, donc quand la compétence n'est pas encore suffisamment développée. Ces indices doivent être disponibles en permanence dans la tête de l'enseignant et de l'enfant pour qu'ils puissent être reconnus quand ils se manifestent. Il sera donc nécessaire de prévoir des activités pour se les approprier.

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Les grilles construites ne peuvent en aucun cas être collectionnées dans un livret qui servirait de bulletin et dans lequel il faudrait cocher au fur et à mesure les indices relevés dans le cheminement de chaque enfant. Une telle pratique serait incohérente par rapport à la logique d'apprentissage. De plus, elle s'avérerait rapidement impossible dans une classe, davantage encore dans un cycle.

Comment une équipe éducative qui cherche à aider les apprenants à se construire leurs compétences grâce à une évaluation formative, peutelle s'y prendre ? La démarche suivante15 , souvent proposée en formation, peut apporter des éléments de réponses et constitue toujours un premier pas vers un changement

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Le mot grille est utilisé à défaut d'avoir trouvé une expression plus pertinente. Dès lors, chacun doit s'interroger sur les représentations qu'il a de ce concept en n'oubliant pas que c'est moins le contenu que la démarche qui est important. Le compte-rendu de la démarche suivante est fortement inspiré d’un texte rédigé par F. Lucas à partir d’une formation pensée et animée par J. Stordeur Partie II : Lexique : quelques problématiques


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d'optique dans l'animation d'une classe. Un exemple concret de démarche à mener avec des enfants du cycle 4 est proposé sous le titre : « Présenter et écouter un exposé. » , partie I chapitre III, Des démarches pratiques.

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1. Réunir des conditions de travail - Mettre des enseignants volontaires ensemble (avec leurs différentes sensibilités, histoires, compétences ...). - Se donner du temps (prendre le temps de l'échange et de la construction...) - Se choisir un lieu (le plus convivial possible et en même temps fonctionnel pour la recherche). - S'entourer de personnes ressources, de référentiels et de documents utiles: programmes, Socles de compétences16, textes sur l'évaluation, outils d'observation construits par d'autres, ... - S'armer d'une bonne dose d'humour, de respect de l'autre, d'humilité (ces capacités vont grandir, s'enrichir, se construire... à force d'être sollicitées).

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2. Se mettre au travail pour se construire une grille d'évaluation formative - Choisir une compétence ou un aspect d'une compétence. - Se mettre en situation problématique sollicitant la mise en oeuvre de cette compétence pour en vivre soi-même le développement. Envisager une situation du niveau adulte, mettant en difficulté, en recherche. - Analyser ce qu'on a fait, comment on s'y est pris, ce que l'on a mobilisé pour résoudre cette situation problématique, seul d'abord, puis confronter en groupe pour aboutir à une formulation commune. - Induire de cette recherche les divers aspects de la compétence choisie en termes d'opérations mentales sollicitées (avoir la rigueur de toujours écrire ces aspects par un verbe à l'infinitif). - À partir de la situation vécue mais aussi de sa connaissance des enfants en apprentissage, exprimer des indices observables du développement de la compétence chez eux (ces indices indiquent « à quoi l'enseignant voit » que l'enfant est, peut-être, en train de se construire un aspect de la compétence choisie, avoir la rigueur de toujours écrire ces indices par un « Il... action de l'enfant »). 3. Essayer d'utiliser la grille d'évaluation formative - Se persuader que la grille ainsi obtenue est à avoir en tête et non en main (il ne s'agit pas de pointer par écrit tous les élèves, par rapport à chaque aspect, mais de se familiariser progressivement à observer l'enfant qui chemine dans l'apprentissage d'une compétence, en repérant les indices).

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Socles de compétences, Communauté française, Belgique, 1999

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- Se lancer dans l'observation de la mise en œuvre de ces différents aspects, des obstacles rencontrés pendant les activités d'apprentissage des enfants (il ne faut vraiment pas attendre d'avoir l'illusion de maitriser le processus, « c'est en forgeant que l'on devient forgeron », dans les moments de panne, de perplexité... faire exprimer par l'enfant ce qui se passe dans sa tête). - En fonction des indices prélevés, poser un diagnostic en termes de divers obstacles à dépasser chez un certain nombre d'apprenants et envisager les activités régulatrices. - Améliorer, compléter... régulièrement la grille d'évaluation formative d'une compétence (une grille d'évaluation formative ne sera jamais définitivement élaborée, il est important de se concerter, de confronter les découvertes et les questions).

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4. Confronter éventuellement la grille que l'équipe s'est construite avec la grille qu'une autre équipe s'est construite ailleurs - Se mettre en rapport avec une autre équipe éducative qui s'est construit une grille (il peut être intéressant de rencontrer une équipe qui a travaillé de son côté). - Dialoguer avec cette équipe et non considérer une des deux grilles comme inférieure (c'est dans la mesure où une équipe s'est construit sa grille qu'il devient enrichissant pour elle de la confronter avec une autre, il n'est jamais intéressant de prendre une grille toute faite pour l'utiliser). - Éventuellement, retravailler sa propre grille en équipe (à la lumière de ce qu'on s'est approprié de la démarche de l'autre équipe).

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5. Permettre aux apprenants de se construire et de se mettre « dans la tête » de telles grilles pour s'auto-évaluer - Après une résolution de situation complexe mettant en oeuvre une compétence déterminée, inviter chaque enfant à analyser et à exprimer comment il s'en est sorti, ce qu'il a mobilisé, inviter à confronter en petits groupes pour améliorer les productions personnelles. - Demander à chaque apprenant de rédiger, avec ses mots, sa perception momentanée de la compétence en construction. Par exemple, « pour pouvoir classer, je... » ou « pour pouvoir calculer aisément sur de grands nombres naturels, je... ». - Lors d'autres apprentissages sollicitant cette compétence, inviter l'apprenant à se remettre en mémoire la grille construite et à s'y référer. - Solliciter des confrontations, des représentations diverses des apprenants et assurer régulièrement des améliorations, amplifications, ajustements de ces outils.

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TABLE DES MATIÈRES ...................................................................

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AVANT-PROPOS

INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10 PARTIE I : DE LA THÉORIE À LA PRATIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15

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Chapitre I : UNE CONCEPTION DE L'APPRENTISSAGE . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17

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Chapitre II : UNE AUTRE ORGANISATION DU TEMPS SCOLAIRE . . . . . . 27 Chapitres III : DES DÉMARCHES PRATIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 35 1. Pour comprendre le canevas des activités d'apprentissage . . . . . . . . . . . 37 2. Grille pour préparer/analyser une activité d'apprentissage . . . . . . . . . . . 45

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3. Quelques exemples d'activités d'apprentissage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51

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Cycle 1 : Mathématique, Savoir Structurer l'Espace Le vocabulaire de l'espace . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Langue Française, Savoir Écrire Atelier d'écriture en maternelle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Cycle 2 : Langue Française, Savoir Lire Explorer un texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Mathématique, Savoir Calculer les Nombres Exprimer une situation donnée par une opération . . Cycle 3 : Langue Française, Savoir Lire Reconstituer un texte . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Éveil : Comprendre l’Espace Construction d'un concept : le relief . . . . . . . . . . . . . . . . . Cycle 4 : Langue Française, Savoir Parler et Savoir Écouter Présenter un exposé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Écouter un exposé . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Éveil : Comprendre l’Espace Mémoriser un document . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . Éveil : Représenter l’Espace Mémoriser un document . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Table des matières

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PARTIE II : LEXIQUE : QUELQUES PROBLEMATIQUES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 107

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COMPÉTENCE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110 - Quels sont les liens entre « matière » et « compétence » ? . . . . . . . . . . . . . . . . 110 - En situation apprentissage, pourquoi se centrer sur une compétence alors qu'il y en a plusieurs qui sont sollicitées ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 112 - Comment articuler compétences transversales et compétences disciplinaires ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 113 CONSTRUCTIVISME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 116 - Faut-il parler d'une conception constructiviste de l'apprentissage ? . . . . . 116

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CONTINUITÉ . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118 - Que signifie assurer la continuité dans les cycles et entre les cycles ? . . . . . 118 - Pourquoi situer une activité dans le temps du montage plutôt que dans le temps de la motivation et inversement ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 121

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DIFFÉRENCIATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 - Pourquoi parler de différenciation ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 123 - La différenciation est-elle vraiment au service de meilleures performances pour tous ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 126

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DISPOSITIF PÉDAGOGIQUE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 134 - Pourquoi penser et adapter son dispositif pédagogique? . . . . . . . . . . . . . . . . 134 - En quoi la notion « groupes de besoin » est-elle plus positive que la notion « groupes de niveau » ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135 - Le tutorat, une stratégie au service de l'apprentissage ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 136

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ÉVALUATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 138 - Suffit-il d'observer ses enfants pour connaitre leurs difficultés ? . . . . . . . . . . 138 - De quels outils d'observation faudrait-il disposer ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 141 MANIPULATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 - La manipulation est-elle nécessaire pour apprendre ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 147 MATIÈRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 - Inventer ou construire son savoir? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 150 - Qu'est-ce qu'un nœud matière ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 151

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Table des matières


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MÉMOIRE . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 - Existe-t-il une différence entre apprendre et mémoriser ? . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 - Peut-on encore parler de « la » mémoire ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 - Comment inscrire le savoir dans la mémoire à long terme ? . . . . . . . . . . . . . . 163 - Nos connaissances actuelles sur le fonctionnement des neurones peuvent-elles nous aider à clarifier un modèle théorique de l'apprentissage ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167

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MOTIVATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173 - Comment motiver les apprenants ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173 - Comment motiver à faire des efforts ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 177

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OBJECTIF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182 - Pourquoi présenter l'objectif aux apprenants ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182

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PRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187 - La production est-elle nécessaire pour apprendre ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187 - Apprendre ou produire ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 187

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SENS . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190 - Quel sens l'apprenant peut-il donner aux différents types d'activités proposées ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 190 - Est-ce que cela a du sens de considérer l'apprentissage sans implication fonctionnelle ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193 - Pourquoi faut-il être attentif aux différents aspects du sens pour construire « le » sens ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 197

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SITUATION PROBLÈME . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201 - Qu'est-ce qu'une situation complexe ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 201 - Le drill a-t-il encore sa place à l'école ? . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 205

CONCLUSIONS (ou pour terminer sans conclure...) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 209

BIBLIOGRAPHIE

Table des matières

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