LA VIE CONSACRÉE : UNE ESPÉRANCE
QUI TRANSFORME
ASSEMBLÉE PLÉNIÈRE 2025

Numéro 187- 2025
Numéro 187- 2025
Numéro
Sr. Mary Barron, OLA
La vie consacrée : une espérance qui transforme
Sr. Mariola López Villanueva, RSCJ
Comment la vie consacrée représente-t-elle une espérance transformatrice ?
Sr. Simona Brambilla, MC et Card. Ángel F. Artime, SDB
Sr. Margaret Maung, RNDM
dans des contextes de souffrance
Sr. Alba Teresa Cediel Castillo, MML
Les Religieuses : Porteuses d’espérance dans les situations difficiles
Sr. Lisa Buscher, RSCJ Les Religieuses, espérance dans une Église synodale
Sr. Solange SIA, NDC Les Religieuses, espérance dans une Église synodale
Sr. Geraldina Céspedes Ulloa, MDR
Les Religieuses, des phares d’espérance dans une Église synodale
Sr. Shalini Mulackal, PBVM Rapport UISG 2022 - 2025
Sr .Mary Barron, OLA - Sr Pat Murray, IBVM
Sr. Mary Barron, OLA Déclaration
Du 5 au 9 mai 2025, s’est tenue à Rome la XXIIIe Assemblée Plénière de l’Union internationale des Supérieures Générales (UISG), sur le thème « La Vie Consacrée : une espérance qui transforme ».
Neuf cent cinquante Supérieures Générales, provenant de 75 pays et nationalités différents, se sont réunis en assemblée et ont témoigné, dans une atmosphère de réflexion et de prière joyeuse, la vitalité de la vie consacrée, qui se reconfirme comme une présence vivante, capable de générer des graines d’espérance et de transformation dans le monde d’aujourd’hui.
Le thème de l’Assemblée s’inscrivait dans le contexte du Jubilé de 2025 et du 60e anniversaire de la fondation de l’UISG (1965-2025). En outre, l’événement a eu lieu à un moment particulièrement significatif pour l’Église tout entière, marqué par le récent décès du Pape François et l’attente dans la prière du nouveau Pontife, qui a culminé avec l’élection de Léon XIV à la tête de l’Église universelle.
Dans ce numéro du Bulletin, nous rapportons tous les textes de la 23ème Assemblée Plénière de l’UISG.
Sr. Mary Barron, OLA, Président de l’UISG
Chères sœurs, honorables membres de l’Union Internationale des Supérieures Générales, et invités,
C’est avec une profonde joie et gratitude que je me tiens devant vous aujourd’hui pour vous souhaiter la bienvenue à l’Assemblée Plénière de l’UISG 2025. Quel cadeau d’être réunis ici, dans cet espace sacré et partagé, unis par notre vocation et notre appel communs à la mission, par notre foi collective et par notre engagement inlassable à servir en particulier les personnes les plus vulnérables de notre monde.
Cette Assemblée se déroule à un moment très important pour l’Église catholique dans son ensemble. Nous venons de terminer la phase de deuil officiel à l’occasion du décès de notre cher Pape François. Que son âme repose en paix. L’Église et le monde entiers retiennent leur souffle dans l’attente du nouvel élu de Dieu, le 267e Pontife de l’Église catholique romaine. Il semble opportun en ce moment de rappeler certains des messages clés du pape François pour la vie consacrée tout au long de son pontificat. Et peut-être de nous demander ce que nous sommes maintenant appelés à faire, à faire avancer le renouveau qu’il a initié au sein de notre Église et de la vie consacrée.
Il dépendait de la vie consacrée pour soutenir sa vision du renouveau et, en ce moment, nous devons être vigilants et faire notre part pour maintenir vivante cette flamme du
Mary Barron, OLAAllocution de bienvenue
renouveau de l’Église. Nous devons persévérer dans la prière avec Marie, la mère de Jésus, afin que le choix de son successeur soit celui que Dieu désire pour conduire notre Église vers l’avenir. C’est une intention particulière que nous prendrons tout au long des journées de notre Assemblée.
Un thème clé de tout son pontificat est l’importance de la rencontre : à tous les niveaux, avec Dieu dans la prière, les uns avec les autres en communauté, avec ceux que nous sommes appelés à accompagner et à servir... en soulignant que tout commence par une rencontre personnelle et quotidienne avec Jésus. « Suivre Jésus n’est pas une décision prise une fois pour toutes, c’est un choix quotidien... Nous le rencontrons dans nos vies, dans le concret de la vie » (2019).
Les discours du Pape François aux Assemblées de l’UISG de 2013, 2016, 2019 et 2022 offrent un aperçu profond de sa compréhension et de sa vision de la vie consacrée. Je n’en mentionnerai que quatre :
1. S ‘appuyant sur les réflexions du pape Benoît XVI, il a souligné que l’autorité dans l’Église est synonyme de service, d’humilité et d’amour. Il a appelé les dirigeants consacrés à exercer l’autorité en accompagnant, en comprenant et en aimant, en particulier ceux qui sont en marge.
« Gardons le regard fixé sur la Croix : il y a toute autorité dans l’Église, où Celui qui est le Seigneur se fait serviteur jusqu’au don total de lui-même » (2013).
2. Il a invité les hommes et les femmes consacrés à reconnaître leur propre fragilité et à s’abaisser au service des autres, à l’exemple de Jésus lavant les pieds des disciples. Cette vulnérabilité est perçue comme une source de renouveau et de croissance.
« Ayant reconnu notre vulnérabilité, demandez-vous quelles sont les nouvelles vulnérabilités devant lesquelles, en tant que personnes consacrées, nous devons nous abaisser aujourd’hui » (2022).
Ce message est d’autant plus poignant que nous avons à l’esprit l’exemple de ses dernières semaines sur terre. Il n’a pas eu peur de montrer sa fragilité et sa vulnérabilité et, à travers tout cela, il a servi l’Église et l’humanité et s’est occupé des personnes vulnérables jusqu’à la fin.
Bulletin n. 187, 2025
3. Le pouvoir de la prière et de la présence Il a souligné l’importance de la prière, de l’adoration et du service humble comme éléments centraux de la vie consacrée, nous rappelant que notre présence et notre soutien dans la prière sont essentiels pour aider l’Église à remplir la mission qui lui a été confiée.
« Prier, louer et adorer n’est pas une perte de temps. Plus nous serons unis au Seigneur, plus nous serons proches de l’humanité, en particulier de l’humanité souffrante » (2019).
4. Construire la communion et la synodalité Il n’a cessé de souligner l’importance de la synodalité comme caractéristique déterminante de l’Église et a appelé la vie consacrée à s’engager activement dans le cheminement en apportant nos
OLAAllocution de bienvenue
Mary
charismes et nos expériences et par le ministère de l’accompagnement. Il nous a également appelés à assurer le renouveau synodal au sein de nos propres congrégations.
Alors que ces pensées du Pape François résonnent dans nos oreilles, et alors que nous entamons ensemble ce voyage significatif, tout au long de cette Assemblée plénière, arrêtons-nous un instant pour réfléchir sur le chemin extraordinaire qui nous a amenés ici.
Nous venons de divers coins du monde, chacun portant des histoires, des défis et des espoirs uniques. Pourtant, nous sommes liés par le même appel : un appel à la vie de disciple, au leadership et à la transformation au nom du Christ.
Cette année, alors que nous explorons le thème « La vie consacrée : une espérance qui transforme », nous nous rappelons le pouvoir transformateur de notre appel. La vie consacrée n’est pas seulement une réponse aux besoins du monde ; c’est une source d’espérance, un témoignage vivant de l’amour durable et de la miséricorde de Dieu.
« L’espoir est la chose avec des plumes – Qui se perche dans l’âme – Et chante la mélodie sans les mots – Et ne s’arrête jamais – du tout »,1 a écrit Emily Dickinson. Comme cet oiseau inébranlable et chantant, notre vie consacrée proclame une espérance inébranlable qui élève et inspire même face aux tempêtes les plus violentes de la vie.
Alors que nous nous rassemblons en ce temps sacré de la saison pascale, nos cœurs sont remplis de l’espérance rayonnante du Seigneur ressuscité, une espérance qui nous appelle continuellement à la transformation et au renouveau. Il est opportun
Sr. Mary Barron, OLAAllocution de bienvenue
que notre Assemblée coïncide avec l’Année jubilaire de l’Église, un temps où nous sommes appelés à être des pèlerins de l’espérance, en cheminant ensemble dans la foi et la solidarité, témoignant de « l’ espérance qui ne nous décevra jamais » (Romains 5, 5). Profitons de ce moment pour réfléchir profondément à notre vocation, en puisant notre force dans le pouvoir transformateur de l’espérance pour porter la lumière du Christ dans notre monde, surtout en ces temps difficiles.
Dans un monde qui semble souvent fracturé et incertain, notre unité en tant que religieuses témoigne du pouvoir de la foi et de la force de la sororité. À une époque où l’humanité est aux prises avec des défis qui semblent souvent insurmontables – guerres, pauvreté, crises environnementales et un sentiment omniprésent de déconnexion – nos vies témoignent d’une vision alternative. Par notre consécration, nous proclamons que la transformation est non seulement possible, mais inévitable lorsqu’elle est enracinée dans la foi, l’espérance et l’amour.
Comme nous le rappelle Maya Angelou, « Tout comme les lunes et comme les soleils, / Avec la certitude des marées, / Tout comme les espoirs qui jaillissent, / Je me lève toujours. » Ces mots font écho à l’essence de notre voyage commun. Par la grâce de notre vocation, nous nous levons encore et encore pour incarner l’Évangile d’une manière qui défie la complaisance, inspire le renouveau et comble les divisions.
Ensemble, nous sommes appelés à être la lumière dans les ténèbres, l’espoir dans le désespoir et les ponts de paix dans un monde divisé. Ensemble, nous sommes appelés à être des témoins prophétiques, en osant rêver d’un avenir qui reflète l’amour infini de Dieu. Ensemble, nous sommes appelés à faire confiance aux possibilités inimaginables qu’offrent les relations enracinées dans l’amour, le respect et la confiance mutuels, les relations qui dissipent la peur et la suspicion, les relations qui brisent les murs de la division. Tout comme les espoirs jaillissent, / Nous nous levons toujours.
Bulletin n. 187, 2025
Au cours des prochains jours, nous engagerons un dialogue constructif, partagerons notre sagesse et ouvrirons nos cœurs à de nouvelles idées et inspirations. Notre programme commun nous mènera dans un voyage, en appréciant d’où nous sommes venus, en particulier au cours de ces trois dernières années depuis la dernière Assemblée en 2022. Ce que nous avons vécu et vécu au cours de ces trois années s’est entièrement déroulé dans le cadre du chemin synodal dans l’Église universelle. Cette année, dans notre Assemblée, nous sommes invités à continuer à embrasser l’esprit de synodalité, à marcher non pas en tant qu’individus, ou en tant que congrégations individuelles, mais en tant que communion de cœurs, d’esprits et de mains. Nous sommes invités à poursuivre le chemin synodal que nous traçons par nous et entre nous. Nous sommes invités à nous écouter profondément les uns les autres, à discerner les mouvements de l’Esprit parmi nous et à renouveler notre engagement envers les valeurs évangéliques qui ancrent notre vie. C’est ce que nous nous efforcerons de faire en utilisant la méthodologie de la conversation dans l’esprit.
En nous souvenant du passé immédiat, nos esprits s’égareront également vers l’histoire entière de notre Union. Cette année, nous commémorons avec joie le 60e anniversaire de la fondation de l’Union internationale des supérieurs généraux (UISG), établie le 8 décembre 1965. Née dans l’esprit de renouveau inspiré par le Concile Vatican II, l’UISG est devenue un réseau mondial dynamique de femmes leaders religieuses, unies dans
Allocution de bienvenue
la mission et le service à l’Église et au monde. Au fil des décennies, l’UISG a été témoin de profondes transformations de la vie consacrée, favorisant la collaboration, le dialogue et le soutien mutuel entre les congrégations à travers les cultures et les continents. Alors que nous célébrons cette étape importante, nous rendons hommage à la vision et au dévouement de ceux qui ont ouvert la voie à ce voyage extraordinaire, et nous envisageons avec espoir un avenir de fidélité continue et d’impact transformateur.
Au cours de notre parcours commun à travers cette Assemblée, nous ferons une pause pour jeter un regard réfléchi autour de nous, sur la beauté et la force de ce que nous sommes en ce moment en tant qu’union. Nous engagerons un dialogue profond, en réfléchissant à la façon dont notre vie consacrée continue de nous transformer, de transformer nos communautés et le monde qui nous entoure. Cette Assemblée est l’occasion d’écouter, de discerner et de se renouveler dans notre engagement envers la mission prophétique qui nous a été confiée. En ce moment sacré, ouvrons nos cœurs pour nous voir et nous affirmer vraiment les uns les autres : dans nos vocations, qui sont sources d’espérance ; dans notre fragilité partagée, où habite la tendresse ; et dans notre courage résilient, qui transforme les défis en grâce.
Galway Kinnell nous rappelle dans sa poésie que l’amour et la reconnaissance ont le pouvoir de nous guérir et de nous soutenir. Dans son poème « Saint François et la truie », il nous rappelle l’espérance profonde que trouve l’affirmation : « ... Parfois, il est nécessaire / de réapprendre à une chose sa beauté... / jusqu’à ce qu’elle refleurisse / de l’intérieur. Dans notre vie commune de consécration, nous assistons à cette floraison, à cette transformation intérieure qui devient un signe d’espérance pour le monde. Que cette Assemblée soit une occasion profonde de nous célébrer les uns les autres, en tissant nos expériences individuelles dans une tapisserie d’espoir et de fidélité collectifs.
de bienvenue
Le dernier élément de notre voyage commun à travers cette Assemblée sera une invitation pour nous tous à écouter la voix de l’Esprit qui nous appelle à avancer vers un avenir inconnu mais rempli d’espoir. Nous méditerons et discernerons ensemble les appels doux mais transformateurs de l’Esprit. « Une carte vers le monde d’à côté » de Joy Harjo nous rappelle que le voyage de transformation est à la fois personnel et collectif, nécessitant du courage, de l’intention et le renouvellement de l’esprit. Comme la carte décrite par Harjo, notre chemin n’est peut-être pas clair ou conventionnel, mais il est éclairé par le langage de l’espoir et de la sagesse de l’Esprit.
Dans les profondeurs tranquilles de nos cœurs et dans la sagesse collective de notre rassemblement, nous sommes invités à écouter attentivement la voix qui nous fait avancer vers un avenir qui reste inconnu, mais rempli de promesses divines. Comme des pèlerins d’espérance, nous avançons, non pas avec certitude, mais avec foi, confiants que l’Esprit illuminera le chemin qui nous attend et nous donnera la force de porter la lumière du Christ vers de nouveaux horizons inexplorés de service et d’amour. Ensemble, naviguons dans ce voyage sacré, confiants que l’Esprit nous conduira vers de nouveaux horizons de grâce, où notre résilience et notre foi partagées continueront de transformer le monde.
Je voudrais profiter de ce moment pour remercier chacun d’entre vous de votre présence, de votre dévouement et de votre volonté de cheminer ensemble. À nos conférenciers et animateurs invités, merci de partager vos dons et d’enrichir notre assemblée de vos idées. Au comité organisateur, merci pour vos efforts inlassables afin de mener à bien ce rassemblement.
Alors que nous nous lançons ensemble dans ce voyage, tenons-nous aux paroles du pape François, à sa vision de la mission de Dieu confiée à l’Église, à son désir que nous devenions tous des « artisans d’espérance », façonnant activement un avenir rempli de promesses et de possibilités. Soyons convaincus que la lumière que nous portons en tant que femmes consacrées a le pouvoir de transformer même les coins les plus sombres de notre monde.
Gardons dans nos cœurs les paroles du prophète Isaïe : « Voici, je fais une chose nouvelle ; maintenant il jaillit, ne l’apercevez-vous pas ? (Isaïe 43:19). Que ces paroles nous inspirent à être courageux et créatifs, à faire confiance aux nouvelles choses que Dieu fait en nous et à travers nous.
Sœurs, que cette Assemblée soit un moment de grâce, une célébration de notre vocation commune et un engagement envers l’espérance transformatrice qui définit la vie consacrée.
Accueillez-nous, et que l’Esprit nous guide et nous bénisse dans les jours à venir.
Merci.
1 « L’espoir » est la chose avec des plumes Par Emily Dickinson
Sr. Mariola López Villanueva, RSCJ
Mariola López Villanueva (Bigastro, Alicante, 1966) est une religieuse du Sacré-Cœur, journaliste et théologienne, spécialisée en théologie biblique et spirituelle. Elle a obtenu un doctorat en théologie spirituelle à l’Université Loyola et est actuellement professeure de spiritualité à la Faculté de Théologie de Grenade. Elle fait partie de l’équipe provinciale de sa congrégation en Espagne et, en plus de sa mission académique et pastorale,elleaccompagnesamèredanssavieillesse.Saquêteestorientée vers l’offre de chemins de guérison à la lumière de l’Évangile, aidant à vivre avec plus de sens et de plénitude. Elle a partagé et appris aux côtés de religieuses de diverses congrégations, enrichissant ainsi sa vision de la vie consacrée. Auteure de plusieurs ouvrages, elle a exploré dans ses écrits la prière à travers les récits de femmes, la spiritualité ignatienne et la figure de Madeleine Delbrêl, entre autres thèmes. Ses publications ont été traduites dans plusieurs langues, reflétant la profondeur de sa pensée et sa vocation à l’accompagnement spirituel.
« Le Seigneur désire ouvrir dans notre cœur un chemin par lequel il puisse entrer dans nos vies et faire son voyage » 1
En cette année jubilaire on écrit et on discute beaucoup sur l’espérance. Comment continuer à parler d’espérance dans un monde qui semble devenir de plus en plus hostile, où des millions d’êtres humains souffrent de la violence, subissent la faim, se voient obligés d’abandonner leur terre, se voient niés leurs droits les plus fondamentaux, et sont dévastés par l’indifférence… ? Nous traversons un siècle profondément blessé par les guerres, les polarisations, la diabolisation de l’autre qui est différent de moi, et, en même temps, paradoxalement béni et plein de potentialités parce que c’est le temps où Dieu vient
Villanueva, RSCJLa vie consacrée : une espérance qui transforme
López
Sr. Mariola
Comme femmes convoquées par Jésus, c’est précisément aux fractures de notre monde que nous devons le plus habiter la cause de l’espérance . Une espérance qui se situe dans le cœur, dans le lieu de nos désirs profonds, dans le contact avec ce que nous sommes et ce que nous vivons. Nous relier à l’espérance qui transforme demande de descendre tout au fond, et à partir de là parler de nous-mêmes et de tout ce que nous n’osons pas dire à voix haute mais qui vibre en nous2.
Quelles paroles transmettre à cette communauté internationale de femmes leaders ? À des femmes qui désirent stimuler et inspirer, insuffler l’espérance chez d’autres femmes et d’autres compagnons de mission ? Ce que je peux partager avec vous ne vient pas de grandes connaissances , mais de ce que j’ai entendu et qui m’a enrichie au long des ans, lors de mes rencontres avec des religieuses de différentes congrégations et de tous âges, dont certaines en sont arrivées à être pour moi de véritables sœurs et compagnes de route.
J’ai suivi les réponses sur le site Internet de l’UISG à la question de savoir ce qu’est une espérance qui transforme et comment l’espérance peut transformer la vie quotidienne des sœurs. Sister Ann Carbon écrivait que « l’espérance est se cramponner à quelque chose… » et j’ai été émue de découvrir qu’en hébreu les deux mots pour exprimer l’espérance (miqwah et tipwah) dérivent de corde (qaw) qui comme verbe a aussi le sens d’espérer. L’espérance est une corde que Quelqu’un nous tend et à laquelle nous nous cramponnons.
Toute vie qui commence se tisse à partir de ce « cordon » qui nous unissait au corps de notre mère et qui est composé de deux fils entrelacés, contenant toute notre espérance d’arriver à exister.
Pendant la catastrophe des inondations provoquées par la GOUTTE FROIDE à Valence, nous avons vu des images dramatiques : des voisins lançaient de leur balcon des draps en forme de cordes et les vies de quelques personnes entrainées par les flots furent sauvées parce qu’elles réussirent à s’y agripper.
Une amie religieuse qui fut trois fois supérieure générale d’une petite congrégation me racontait que la première fois qu’elle fut élue elle se sentait pleine de force et elle se disait « je peux », la seconde fois elle touchait du doigt son impuissance et elle murmurait « je ne peux pas ». Et la troisième fois quelque chose susurrait en elle : « Tu es Celui qui peut ».
Je crois qu’elle ne sait pas le bien qu’elle m’a fait. Quand nous ne pouvons pas, quand nous ne savons pas, quand nous nous sentons perdues, découragées … Il est Celui qui peut, Celui qui sait, Celui qui nous cherche, Celui qui nous tend une corde : « Je les menais avec des attaches humaines, avec des liens d’amour » (Os 11, 4).
UISGBulletin n. 187, 2025
Je vous propose de faire l’expérience de l’espérance à travers quatre cordes plus une, comme celles avec lesquelles les amis du paralytique le descendirent devant Jésus, en ouvrant un trou dans le toit (Mc 2, 3-12). Nous essaierons de faire que ces quatre cordes, que nous recevons et que nous offrons, nous entrelacent pour faire de nous une communauté de sollicitude et par là-même une communauté d’espérance
Nous devrons nous agripper aveuglément à la cinquième corde, encore et encore, en toute circonstance, comme des enfants qui se laissent conduire, légères, sur les chemins inédits et surprenants du monde3.
Sr. Mariola López Villanueva, RSCJLa vie consacrée : une espérance qui transforme
1.- La première corde : celle que tendent entre elles Noémi et Ruth
Répondre les unes pour les autres Compagnes d’espérance dans les temps d’appauvrissement
Il y a quelques mois une provinciale d’Europe m’a écrit pour me demander si je pouvais rencontrer un groupe de sœurs de sa congrégation pour leur donner du courage, pour les aider à voir que notre vie consacrée vaut la peine d’être vécue et que, malgré la diminution des effectifs et la grande fragilité dans laquelle nous nous trouvons, il y a en elle un horizon de bonheur et de plénitude. Je pense que nous partageons toutes ce désir, et que beaucoup d’entre nous doivent faire face à cette diminution et à ce tonus vital bien bas. Comment nous aider à garder courage, à rallumer l’espérance dans des temps d’appauvrissement ?
Quand Noémi se sent extérieurement en situation d’échec parce qu’elle a perdu son mari et ses deux fils, et quand elle se sent vide intérieurement, insignifiante, sans courage –appelez-moi “amertume” avait-elle dit – elle n’imaginait pas jusqu’où arriverait la corde que Ruth lui tendait (Rt 1, 16-18) à partir de son cœur résilient.
Deux femmes ayant perdu des êtres chers, en des moments différents de leurs vies, et qui, dans un présent et un futur incertains à cause de leur condition de veuves, se mettent à marcher ensemble, sans autre bagage que de pouvoir compter l’une sur l’autre. Nous sommes elles aussi. Et Ruth, qui appartient à un peuple hostile et à une culture différente, entend Noémi lui dire, comme une caresse qui allège son incertitude et ses peurs : « Ma fille, ne devrais-je pas chercher à t’établir pour que tu sois heureuse ? » (Rt 3, 2) Noémi lui offre un lien : elle l’appelle « ma fille », elle l’unit à elle-même et à son désir intérieur, et Ruth lui offre, à son tour, une compagnie et la possibilité d’une fécondité inédite. Dieu a eu besoin de femmes dans l’hiver de leurs vies pour accomplir l’histoire du salut : Sarah, Élisabeth, la prophétesse Anne… et il met dans la bouche de Noémi, qui traverse aussi cette étape fragile, ce que Lui-même désire pour chacune de ses créatures : pouvoir trouver un lieu où déployer leurs vies, ou pouvoir vivre avec dignité et avec sens. C’est en habitant leur moment propre, leur propre étape, que Noémie et Ruth peuvent s’accompagner de façon bénéfique pour chacune des deux ; et elles s’offrent une fidélité mutuelle, qui ne connait plus de retour en arrière, pour le meilleur et pour le pire. Ensemble elles feront confiance à Celui qui est pour elles celui qui traite avec bonté et celui qui pourvoit.
Comme femmes responsables de vos congrégations, vous désirez vous aussi exprimer à chaque Sœur, et surtout aux plus jeunes générations, le désir que Noémie a offert à Ruth : chercher ensemble un lieu où puisse naitre une vie nouvelle, où l’amour envers les autres puisse continuer à se déployer ; un lieu où l’on puisse bénir et être bénies dans nos différences.
UISGBulletin n. 187, 2025
En la voyant bercer dans ses bras le fils de Ruth, les voisines diront à Noémie: « Béni soit le Seigneur qui aujourd’hui ne t’a pas laissée sans quelqu’un pour te racheter, ta belle-fille qui t’aime ! » (Rt 4, 14) Comment pouvons-nous répondre les unes pour les autres dans nos congrégations ?
Nos conversations, nos manières d’agir, ne sont pas neutres : soit nous nous décourageons soit nous vivons dans l’espérance. Quelles cordes devons-nous tendre entre nous, pour qu’au long de notre route nous murmurions moins et nous bénissions plus ? Des cordes qui expriment que nous pouvons vivre ensemble, même avec nos
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grandes différences et nos frictions quotidiennes. Des cordes qui fassent que notre vie fasse du bien aux autres.
Ni Noémi ni Ruth ne cachèrent leurs peurs et leur vulnérabilité, elles étaient là, mais elles s’appuyaient l’une sur l’autre et elles marchaient attentives à la présence silencieuse du Dieu qui est vivant et qui les voit , comme l’avait expérimenté Agar dans la dureté du désert (Gn 16, 14), confiantes qu’Il agira, bien qu’elles ne puissent pas encore entrevoir comment. Au fur et à mesure du voyage elles apprendront toutes deux qu’être aidées, c’est être humaines.
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L’espérance n’a pas seulement une dimension de futur mais aussi de récupération du passé. Se souvenir de comment Dieu nous a conduits (Dt 8) est la garantie qu’il continuera à le faire à sa manière et qu’il marche devant nous à chaque pas que nous faisons (Ex 13, 21-22). Il n’y a pas d’espérance sans mémoire du cœur, et nous sommes invitées à remercier pour les vies des femmes qui nous ont précédées dans nos congrégations, qui firent confiance et qui s’agrippèrent ensemble dans des moments très difficile, et dont le souvenir nous enseigne que nous pouvons arriver à être des compagnes d’espérance alors même que nous embrassons des temps d’appauvrissement.
2.- La seconde corde : celle que tend Jésus à une femme qui a une forte fièvre
Serrer une main L’espérance des petits gestes
Une compagne médecin disait que ce que nous vivons n’est plus seulement la fragilité, ni seulement la vulnérabilité, mais que beaucoup de nos sœurs passent aussi par la
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López
Sr. Mariola
« précarité ». Nous est-il possible de nous aider à habiter cette précarité physique, psychique, existentielle, en mode espérance ? Le Pape François nous dit : « Le Malin nous pousse à regarder notre fragilité avec un jugement négatif. Au contraire, l’Esprit la met en lumière avec tendresse ».4
Beaucoup de nos sœurs âgées souffrent de dégénérescence mentale, certaines ont la maladie de Parkinson ou celle d’Alzheimer, et elles ne peuvent plus répondre pour elles-mêmes ni pour les autres. Nous savons que les problèmes de santé mentale nous guettent à toutes les étapes du voyage, même avant la vieillesse, et cela demande de la patience, cela demande un regard de compassion.
Dans le domaine de la santé on utilise l’expression hope work, le travail de l’espérance. Il y a un hope work curatif où le patient va de mieux en mieux, et un hope work palliatif, quand la personne ne peut pas aller mieux, mais qu’elle peut se sentir mieux . Cela m’a fait penser que nous devons appliquer ce dernier à nos vies religieuses aujourd’hui. Parfois nous nous rendons compte que nous n’allons pas aller « de mieux en mieux », la réalité est ce qu’elle est, mais que nous devons plutôt coopérer avec l’inévitable : il est certain alors que nous pouvons nous aider à « nous sentir mieux », et cela créera entre nous un climat plus humain et plus chaleureux.
Les experts disent qu’à la clé d’un bon vieillissement il y a les relations, les relations et les relations . Comment arriver à cette étape difficile de la vie avec des liens dont nous sommes sûres ? J’ai eu l’occasion de voir comment la maladie s’emparait d’une sœur avec laquelle je vivais : de sa mémoire, de sa volonté, de son sens de l’orientation… elle la dépouilla de presque tout, mais elle réussit pas à lui prendre son sourire. Je me souviens, dans les débuts de sa maladie, d’un jour où je partais donner une conférence et où je lui ai demandé sa bénédiction : elle me fit un signe de croix sur le front et me dit « Profites-en bien ! » C’est la bénédiction la plus précieuse que j’aie jamais reçue et je la garde toujours avec moi – aujourd’hui aussi je m’en suis souvenue alors que je me rendais ici pour vous rejoindre, parce que si nous profitons de ce moment cela veut dire qu’il y a eu une rencontre.
Dans le livre La Présence pure5, l’écrivain français Christian Bobin raconte l’expérience qu’il a vécue avec son père malade d’Alzheimer et comment il découvrit avec lui une autre forme de perception et un autre langage : « Ils aiment toucher les mains qu’on leur tend, les garder longtemps dans leurs mains à eux, et les serrer. Ce langage-là est sans défaut. »
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Et il continue en disant, en regardant son père : « Il ne restait là rien de plus que la vie élémentaire, qui au fond est l’unique vie : boire un verre d’eau, serrer une main, se regarder dans les yeux, s’écouter, se taire (parfois longtemps), marcher… les choses les plus élémentaires sont celles qui nous sauvent et celles qui donnent à la vie sa vraie valeur ».
Jésus avait lui aussi longuement serré la main d’une femme pour la délivrer d’une fièvre qui l’empêchait de se lever (Mc 1, 29-39) et il serra la main d’une adolescente qui n’avait plus envie de vivre, comme beaucoup de nos jeunes découragés et privés de sens (cf. Mc 5, 41).
Avec une simplicité élémentaire Marc nous raconte : « Jésus s’approcha, la saisit par la main et la fit lever » (Mc 1, 31). Je pensais que, si nous venions à perdre l’Évangile et qu’il ne nous restait que ces paroles, elles portent gravé en elles le don de votre
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service : cette proximité, cette sollicitude, là où est l’autre, au milieu des fièvres qui font perdre le courage, le sens, l’espoir, l’estime, la reconnaissance. Tout simplement être là, s’approcher, parfois pendant un long moment jusqu’à ce que puisse advenir un tout petit contact. Nous serrer la main les unes aux autres pour pouvoir nous lever, et être prêtes à servir et à offrir nos dons. Non pas par obligation, non pas parce que nous devons mener une vie consacrée anesthésiée, mais par profonde gratitude, par le tropplein qui vient de nous savoir sans cesse guéries et relevées.
Nous devinons à peine la souffrance qui se cache derrière l’autre personne. Jésus s’approchait toujours avec délicatesse. Il ne put pas prendre la main, mais il toucha délicatement le dos de cette femme courbée depuis de longues années sans qu’elle parle, sans que personne n’intercède pour elle. Ce fut lui, étant présent, qui la vit et qui s’émut, et qui voulut lui offrir la possibilité de mener une vie différente pour elle (Lc 13, 10-17).
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Quels sont les poids que nous portons, qui nous maintiennent courbées, autoréférentielles, et dont nous devons nous libérer ? Il y a des sœurs qui ne savent pas et qui peut-être ne peuvent pas demander de l’aide. Tendre nos mains, continuer à offrir des cordes d’accueil et d’affection. Même si les personnes continuent à être bloquées pendant de longues années, ne pas cesser d’essayer. Dieu se cache dans les détails. Habiter l’espérance des petits gestes.
« Je ne vaux rien, personne ne vient rien me demander », m’a dit une sœur de ma congrégation. On serre une main en demandant quelque chose, comme l’a fait, dans sa fatigue, Jésus avec la femme qui se rendait au puits sans aucune envie de rencontrer quelqu’un (Jn 4, 7). On serre la main en étant là tout simplement, sans jugement, en
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accueillant le Dieu-qui-vient-et-qui-est-là , dans ce que nous ne comprenons pas encore. Il entre par le côté le plus faible et précaire de la vie et il ne sait qu’accompagner. Le seul fait de découvrir que nous ne sommes pas seules, que quelqu’un est là, ouvre des fissures d’espérance.
3.- La troisième corde : celle qu’une étrangère lance à Jésus
Soutenir le regard et le sens
Des visages qui espèrent nos vies
Nous avons besoin de savoir que quelqu’un est là, mais il faut aussi que ce quelqu’un qui est là nous voie . En Afrique du Sud, pour se saluer en zoulou, on dit Sawubona qui signifie « je te vois » et l’autre répond de la même manière : Sawubona , « moi aussi je te vois ». Nous sentir regardées est nous sentir aimées, mais si nous passons nos journées collés à nos écrans , si nous nous regardons sans nous voir vraiment, quelque chose de l’humain disparaitra6.
Internet colonise notre intériorité et notre intimité, et mine la qualité de nos relations quotidiennes. Nous nous sentons constamment réclamées par l’extérieur et extraverties. Le monde virtuel, qui nous a apporté tant d’avantages, nous disperse aussi parfois, nous fait mener des rythmes peu équilibrés, nous laisse rarement le temps de faire silence, nous déconnecte de nous-mêmes… et il est urgent de récupérer la présence dans nos communautés. Quand je suis réellement présente à l’autre, elle se sent précieuse, je luis dis sans paroles : « Je suis là pour toi, tu comptes pour moi. Je ne cherche pas à mettre à profit ce temps avec toi, je cherche à célébrer ta présence dans ma vie ».
Dans l’Évangile nous observons que c’est dans cet espace de présence concrète, face à face, que l’espérance plonge ses racines : une femme étrangère se présente à Jésus pour qu’il allège la souffrance de sa fille malade (Mc 7, 24-30), mais il semble ne pas la voir . Dans son domaine de guérison c’est comme si elle ne comptait pas, il ne la voit pas dans sa totalité, il la regarde dans ses étiquettes. On dirait qu’il n’a rien à voir avec elle, qu’il n’est pas prêt à saisir la corde que lui tend cette femme, bien qu’il ait saisi auparavant celle de Jaïre, un juif renommé, quand il le priait pour sa fille, elle aussi malade (Mc 5, 23-24). Avec sa réponse négative Jésus semble vouloir détourner d’elle son regard, mais elle fait tout ce qu’elle peut pour qu’il puisse la regarder dans les yeux et se laisser toucher par son affliction.
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Un proverbe acadien dit : « Qui lance une corde à son frère perdu, trouvera un ami parmi les dieux ». Et ici c’est la femme qui lance la corde à ce qui en Jésus était encore perdu et qui n’avait pas pu encore être achevé, certaines zones non encore évangélisées dans son cœur. Cette femme le guérit de son regard juif conditionné, et élargit en lui des espaces inimaginables ; elle l’aide à faire tomber ses frontières intérieures, à découvrir que tous, tous, tous, avaient accès à ce pain qui lui avait été donné gratuitement, à lui aussi. Quand il tourne son regard vers elle, il la voit dans sa dignité et cela implique de respecter sa douleur7. Dans une traduction plus proche du grec Jésus lui dit « Tu m’as évangélisé… » (Mc 7, 29), ou, en d’autres mots : Tu m’as rendu plus humain
Dans une scène du beau film Les délices de Tokyo8, Tokue, âgée et malade de la lèpre, dans un de ses dialogues avec le jeune Sentaro – auquel elle veut apprendre à aimer pendant qu’ils sont aux fourneaux – lui dit quelque chose comme « Le plus important de nos vies est qu’elles peuvent donner un sens à la vie d’autres personnes ».
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À qui donnons-nous du sens, qui sont ceux qui nous en donnent? Qui nous lance des cordes qui élargissent nos horizons et nous rendent plus humaines ?
Il y a deux livres autobiographiques qui m’ont profondément touchée, et qui m’ont amenée à regarder longuement des visages auxquels je n’ai pas accès dans mon quotidien : ils m’ont tous deux fait pleurer ; et dans ces temps menacés par l’inhospitalité et l’abrutissement de certaines pratiques politiques, ils se font encore plus significatifs. L’un des livres est Solito de David Zamora9 ; il raconte l’incroyable voyage d’un enfant de neuf ans de l’État du Salvador vers les États-Unis. Il l’écrit pour guérir et pour retrouver les personnes qui furent sa famille clandestine pendant ces mois qui traumatisèrent sa vie , pendant lesquels il apprit à ne pas pleurer et à ne pas ennuyer les adultes. Il veut remercier ceux qui l’ont sauvé, qui lui ont donné un futur ; leur dire que s’il est vivant maintenant, c’est grâce à eux. Beaucoup d’entre vous, et de vos sœurs, accompagnez de près ces réalités et vous êtes, vous aussi, témoins de cette touchante solidarité qui se développe aux périphéries.
L’autre livre est La mala costumbre10, le récit à la première personne du bouleversant voyage intérieur d’un jeune transsexuel qui raconte comment, né petit garçon, il est devenu une femme. À la fin du livre je découvre que le titre vient de sa mauvaise habitude de pleurer tout seul.
Ce sont des vies marquées par la pauvreté et la douleur d’être rejetés, de ne pas être considérés… Mais Dieu écoute leurs pleurs là où ils sont (Gn 21, 17) et nous appelle à sortir vers ces lieux d’exclusion, à rester là penchées, agenouillées, parce que c’est ainsi que commence tout processus d’espérance : un visage qui se fait ami et quelqu’un de qui s’occuper.
Qui sont ces visages qui donnent espérance à nos vies aujourd’hui? Femmes fragiles et confiantes, Cananéennes qui pleurent des vies brisées, quelques miettes d’espérance pourront-elles nous suffire, comme à cette femme ? (Mc 7,28)
4.- La quatrième corde : celle que tressent Marthe, Marie et Lazare
Nous aimer, c’est nous laisser être Là où il y a de la sollicitude, il y a espérance
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Tout au long de cette année sainte nous nous demandons constamment comment concrétiser l’espérance dans nos contextes et dans notre vie quotidienne, comment lui donner corps11, comment la protéger et la tresser. Lors de notre dernier Chapitre Général, nous avons dit : « Comme femmes apôtres du XXI ème siècle, Dieu nous appelle à marcher avec des personnes en mouvement. Des personnes qui portent une énorme douleur, qui cherchent la paix, le pain, qui doivent apprendre d’autres langues et s’intégrer dans d’autres cultures » 12 .
Les personnes qui ont vécu des drames migratoires avec l’espoir de trouver un avenir meilleur s’accordent pour indiquer trois enseignements vitaux, qui le sont aujourd’hui aussi pour nous. Le premier est la vie commune : nous devons passer dans nos communautés du « coexister » au vrai « vivre ensemble », à l’acceptation et au respect de la diversité qui nous constitue, et à expérimenter que la collaboration est la clé de la survie. Apprendre à nous unir toujours plus entre nous, avec nos compagnons laïcs de mission, et entre congrégations amies. Le second enseignement est celui de l’humilité d’avoir à demander, et le troisième est la persévérance : nous essuyons beaucoup d’échecs, beaucoup de nos essais n’aboutissent pas, mais il n’est pas permis
La vie consacrée : une espérance qui transforme de renoncer, ni de nous avouer vaincues… persévérer c’est continuer malgré tout13 .
Cette communauté de sollicitude qu’est Béthanie nous offre le cadre pour parcourir ces trois enseignements vitaux et pouvoir enrayer la « crise du vivre ensemble » qui se manifeste dans nos sociétés et dans nos propres espaces.
Je me souviens d’une fois où je suis allée dans un autre pays pour donner les Exercices Spirituels à des religieuses. J’ai demandé à la provinciale ce qu’elles désiraient, et elle me dit : “ que tu nous aides à mieux nous aimer”. C’est resté gravé en moi. Les relations sont ce qui nous donne le plus de joie et aussi ce qui nous fait le plus souffrir, et la plupart du temps nous nous heurtons par pure maladresse, à cause de blessures qui n’ont pas eu l’opportunité d’être guéries. Dans un monde de relations fracturées, des relations saines entre nous sont notre plus grand défi aujourd’hui. Si nous ne les travaillons pas nous n’aurons pas de communautés propres à accueillir les jeunes femmes qui nous arrivent.
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Comment pouvons-nous améliorer les liens dans les communautés ? Quelle est l’influence de notre manière de communiquer ? Comment pouvons-nous exprimer notre malaise sans blesser l’autre ? Combien d’hostilité pouvons-nous supporter avant de tomber malades ? Il y a des manières de vivre qui nous guérissent et des manières de vivre qui nous négativisent.
Une religieuse me disait qu’une autre sœur se fâchait et la réprimandait lorsqu’elle dormait plus longtemps certains matins et qu’elle ne participait pas à la prière. Je lui racontai que j’avais vécu jadis avec une sœur qui, quand je ne me réveillais pas, me disait : « Ce doit être parce que tu en avais besoin ». Et ceci m’aidait aussi. Il y a beaucoup
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de manières d’affronter les choses, certaines nous écrasent et nous culpabilisent, les autres nous élargissent le cœur et nous apprennent à aimer notre fragilité.
Nous sommes toutes plus démunies que ce que nous montrons – nous gardons nos douleurs secrètes – et nous sommes toutes plus affectueuses que ce que nous montrons : « Je n’ose pas exprimer avec mes sœurs toute l’affection que j’ai en moi » me dit un jour une amie supérieure générale. Comment réussir à libérer l’amour qu’il y a en chacune de nous ? Comment aider à le libérer chez les autres ?
S’il y a un espace où Jésus allait pour recevoir et se laisser aimer, pour libérer la capacité d’affection et de tendresse qu’il y avait en lui, c’est Béthanie. Cela nous fait du bien de l’observer en train de recevoir, de le voir prendre du temps pour se laisser faire et se laisser aimer par ses amies.
Aimer vos sœurs ne signifie pas vous donner sans limites, ni renoncer à vos propres besoins. Il est possible d’aimer et d’aimer très fort à partir d’un lieu plus sain et moins douloureux, où il y a aussi un espace pour vous occuper de vous-mêmes et où vous pouvez prendre soin de vous, vous respecter et vous aimer vous-mêmes sans pour autant vous sentir ni coupables ni égoïstes.
Jésus a fait pour Lazare tout ce qu’il a pu (Jn 11, 1-44) et maintenant c’est lui qui a besoin d’attention avant l’atrocité de ce qui va lui arriver (Jn 11, 53). Marthe nourrit sa vie, nous l’imaginons en cette occasion concentrée et reconnaissante, et Marie caresse ses pieds et y verse un parfum démesuré ; dans cette scène elles ne parlent pas. Lazare non plus : il partage seulement le repas et il est assis avec lui (Jn 12, 1-8). Il y a des moments où les paroles n’arrivent pas et où les gestes s’enfoncent dans le silence. Il est remarquable que dans les récits où apparait le parfum, la dimension gratuite et festive de la vie, il y a toujours des murmures, des reproches, une certaine frustration (Jn 12, 4-6)14. Compter nous aussi avec ceci, comme le fait Jésus, sans perdre la liberté d’oindre et de se laisser oindre, même si tous ne le comprennent pas. Judas le critique et Pierre aura du mal à le recevoir parce que cela signifie aussi se montrer démuni et dépendant de l’autre (Jn 13, 7).
Avant d’arriver à ce moment où elles ont harmonisé leurs différences, où elles ont pu largement collaborer, les deux sœurs ont dû entreprendre un processus et beaucoup d’allées et venues. Nous pouvons nous reconnaitre dans cette Marthe dépassée, fatiguée, mal à l’aise avec elle-même et avec Marie ; peut-être aimerait-elle être dans d’autres choses ou d’une autre manière. Jésus l’appelle par deux fois – comme fut appelé Moise devant le buisson ardent – pour lui montrer l’unique nécessaire : être présente et entière dans ce moment. Se réjouir de ce qu’elle fait, savourer la présence de Jésus dans la maison (Lc 10, 38-42).
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Ensuite viendront des temps difficiles, mais c’est là précisément que se renforcent leurs liens avec Jésus en partageant la douleur de la perte de Lazare (Jn 11, 1-44). Ils pleurent ensemble, ils ne cachent pas leur vulnérabilité. Elles expriment leurs besoins et leurs limites, et la faiblesse de Lazare les unit. Toutes les deux s’aident à faire confiance à Jésus bien au-delà de ce qu’elles peuvent voir, et elles s’abandonnent au pouvoir guérisseur et vivifiant de Jésus (Jn 11, 43-45).
Nous aimer, c’est nous laisser être , comme Marthe et Marie se laissent être, chacune dans son registre, chacune avec sa carte mentale et affective, bien différente. Elles avaient traversé des moments où elles se comparaient et où elles étaient en concurrence, et où
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le reproche jaillissait facilement. Maintenant elles ont appris la valeur de la collaboration, elles se laissent être, elles savent que lorsqu’elles s’unissent elles ont beaucoup plus à offrir à Lazare et à Jésus ; qu’en entrelaçant leurs cordes elles se multiplient.
Jésus ne leur cache pas sa pauvreté, ni son besoin de tendresse et de beauté, qui nous atteint nous aussi. Et il accomplira ses gestes pour nous laisser le mémorial de sa vie : il dressera la table avec son propre corps, il lavera et oindra les pieds, comme les femmes l’avaient fait pour lui, sans laisser personne dehors.
Il nous faut concrétiser dans nos communautés ces gestes qui humanisent la vie. Pouvoir offrir ensemble-avec-les autres nos pains et nos parfums. Remercier ensemble, faire eucharistie dans un monde blessé et affamé d’amour et de beauté. Parce là où il y a sollicitude et interdépendance, il y a espérance.
Comment tresser ces attentions entre nous, et avec les autres, pour pouvoir générer des communautés d’espérance, des communautés qui aspirent à l’horizon d’une vie agréable pour tous ? Où nous sentons-nous poussées par Dieu à entrelacer aujourd’hui nos cordes avec d’autres congrégations ?
5.- La cinquième corde : celle avec laquelle Jésus attire chacune d’entre nous.
Faire de la blessure une demeure Femmes fragilement heureuses
Sur l’une des faces de notre croix de profession sont gravés les mots Spes Unica : la croix est notre unique espérance. Dans le côté de Jésus, au bord de cette blessure toujours ouverte dans les visages souffrants et rejetés de notre monde, nous sommes convoquées à boire au flux d’une espérance que rien n’arrête.
L’invincible espérance est un livre de Christian de Chergé, martyr du Monastère de Tibhirine en Algérie, où nous trouvons une méditation sur Marie, un samedi saint, qu’il dédie à une amie religieuse : « Tant qu’il y aura une douleur à partager dans le monde, vous serez là, compagnon de la nuit et du doute, de la veille et des larmes. Vous serez toujours cette femme sans âge…prête à toute compassion. Et si l’on vous demande raison de l’espérance qui vous presse à agir de la sorte, vous prenez l’enfant mort qu’on descend de la croix et vous lui ouvrez le tombeau de vos bras, pour que là, tout contre votre sein, il repose et s’éveille et revive en vos entrailles »15 .
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Compagnes de la nuit et du doute, compagnes de la veille et des larmes. Prêtes à compatir avec tout. Il est tellement significatif qu’en cette année jubilaire de L’espérance ne déçoit pas, le Pape François nous invite à pérégriner plus avant dans la terre du Cœur de Jésus, à ne pas cesser de l’explorer (Dilexit nos ). Ce n’est que dans cet espace du Cœur qu’il est possible de descendre dans les vallées, désapprendre les peurs, connaitre l’unique amour qui cautérise les blessures les plus profondes, et nous découvrir liées dans notre essentielle fragilité.
Jésus sur la croix unit Marie et Jean, il leur offre la possibilité de demeurer dans le lieu même où ils ont ressenti la blessure de sa perte (Jn 19, 25-27). Il nous unit nous aussi, il nous offre des liens : il nous donne des fils et des filles, il nous rend mères et sœurs. Devant nous, Marie sera là où nous sommes, la première pèlerine d’espérance, pour que personne, plus jamais, n’ait à pleurer seul.
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Marie nous apprend que l’espérance se nourrit de cette résistance et de cette résilience, qui permet de demeurer dans la douleur sans nous briser. Marie sait que l’espérance s’engendre dans le présent et dans les occasions et circonstances difficiles. Rester et espérer, quand d’autres personnes dans les mêmes circonstances ne le feraient pas. Jean et Pierre s’en vont, incrédules, alors que Marie Madeleine reste, elle est là présente, penchée devant la tombe vide (Jn 20, 10-12), comme tant de femmes que nous avons vues se pencher en pleurs sur les corps de leurs êtres chers tués à Gaza, en Haïti, en Ukraine, au Congo.
Marie avait expérimenté dès le début avec son fiat ce que Jésus découvrira plus tard : que, dans ce qui est fort, ce qui est sûr, ce qui est rigide, l’Esprit ne peut pas vibrer. (Combien de rigidité se trouvent dans les vies désalignées et culpabilisatrices !). Et il tressaillira de joie en découvrant que la Ruah, l’Esprit, vibre dans ce qui est fragile, tendre, faible, vulnérable… et qu’à partir de là il nous transforme. Dieu voit la petitesse, Jésus rend grâce, plein de joie, parce qu’il a voulu se révéler à ceux qui ont besoin des autres (Lc 10, 21-24).
Avoir un cœur vulnérable, comme celui de Jésus, c’est savoir que n’importe qui a droit d’entrée dans nos vies et c’est nous sentir attirées par tout ce qui est blessé et démuni dans ce monde. Pour qu’un lieu hostile, un lieu où sévit la douleur, se transforme en demeure, en lieu de rencontre, il faut un amour qui accueille l’autre avec tout ce qu’il porte. La blessure peut devenir un espace hostile, quand elle est objet d’indifférence ou d’exclusion, ou bien un espace de bénédiction. « Tout dépend de comment nous entrons dans la terre sacrée qu’est la vulnérabilité de toute personne. Si nous y entrons déchaussés et disposés à une conversation entre mendiants nous construirons des espaces de paix… et de célébration pour une vie en commun »16 .
Je parlais un jour avec une sœur qui accompagnait des jeunes en formation et elle me confessa qu’elle se sentait comme un « imposteur » parce qu’elle les encourageait à prier et qu’elle-même voyait qu’elle ne soignait pas son oraison, que le téléphone portable prenait beaucoup de temps, qu’elle se décentrait, et qu’elle jonglait avec beaucoup de choses à la fois ! Je n’eus aucun mal à la comprendre ! Je l’ai remerciée de m’ouvrir cet espace de faiblesse, parce qu’elle exprimait une sensation dans laquelle je me reconnaissais aussi. Ainsi me suis-je sentie en de nombreuses occasions « un imposteur ». Combien de fois me suis-je dit en moi-même : « Si ces sœurs savaient combien la vie que je mène est bousculée, elles ne m’appelleraient pas ». Mais le miracle arrive après, c’est Lui qui passe et qui fait du bien à travers nos vies désalignées, « ébouriffées », avec parfois cette distance entre ce que nous désirons vivre et ce que nous vivons pauvrement et maladroitement.
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Et c’est là paradoxalement, dans ces fissures cachées de nous-mêmes, que sa grâce nous visite sans que nous le méritions et c’est ce qui nous comble d’espérance, une espérance que personne ne pourra nous enlever, parce que nous savons que ce qui est définitif ne dépend pas de nous : « Seigneur, je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais je te reçois avec tant de joie ».
Le pape François relie l’expérience de l’espérance à celle de nous sentir aimées et au désir de bonheur qui nous constitue17. Je vous laisse ma joie pour que votre joie soit complète, avait dit Jésus dans un moment très difficile pour lui (Jn 15, 11).
Depuis quelques mois je passe tout le temps que je peux à m’occuper de ma mère, et j’ai écrit une grande partie de cette conférence alors que j’étais avec elle. Le mois
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dernier elle a fêté son 96ème anniversaire. Un jour, alors qu’elle participait à l’Eucharistie en la suivant à la télévision, je l’entendis dire « je n’aime pas, je n’aime pas ». Je lui ai demandé ce qu’elle n’aimait pas et elle m’a dit que Jésus devait lui pardonner mais qu’elle n’aimait pas la fin de l’Évangile : les pleurs et les grincements de dents pour celui qui, par peur, avait caché son talent (Mt 25, 14-30).
« Comment est-ce que tu le terminerais, toi ? » lui dis-je. « Je lui donnerais un autre talent, me répondit-elle, et je lui dirais d’aller chercher ses compagnons, de leur demander comment ils avaient fait, de se laisser aider et de ne pas avoir peur »… J’ai ri à cette interprétation et je lui dis que j’étais sûre que Jésus aimait beaucoup mieux sa fin à elle que celle de Matthieu.
Notre espérance est de savoir que Jésus ne cessera de nous confier ses talents, encore et toujours, pour alléger la souffrance, pour aider à augmenter la quantité d’amour en ce monde, pour encourager à vivre…
Que les peurs que nous avons, et que l’incertitude que nous rencontrons à chaque pas, ne nous empêchent pas de tresser nos cordes, de tisser avec elles des filets d’alliance qui soignent, réparent, nourrissent et embellissent des vies ; ni de pouvoir converser les unes avec les autres sur le chemin, pour partager ce nous vivons, nos rêves, et les personnes qui nous maintiennent reconnaissantes jusqu’au bout.
Julienne de Norwich, et des générations de femmes tout au long de l’histoire, ont exprimé cette certitude qui leur a permis de vivre et d’entrer en relation avec un cœur dilaté : la profonde confiance que tout ira bien, que tout finira bien. Pas par nous mais par Lui. Non pas parce que nous sommes à la hauteur dans nos communautés, mais parce que c’est grâce à sa Présence qu’elles font du bien aux autres.
Être transformées c’est nous laisser attirer, nous agripper à ses cordes d’affection et de justice, et avoir dans nos vies une unique sécurité: quoiqu’il arrive, Il ne laissera se perdre aucune de ses plus petites créatures, ni un seul moineau (Mt 10, 29-31), ni la faible lumière d’une seule luciole.
Puissions-nous nous aider à être d’humble pèlerins sur cette terre d’un Amour qui nous dépasse, complices et compagnes de route, aux côtés de tous ceux qui aujourd’hui cherchent refuge. Pèlerins qui choisissent-d’aimer-à-fond-perdu en toute circonstance. Des femmes enveloppées de faiblesse (Hb 5, 2) et pour cela prêtes à compatir avec tout. Des femmes fragilement heureuses, fragilement pleines d’espérance.
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1 Origène, Homélies sur l’Evangile de Lc 21, 5-7
2 M.C. De la Fuente, “Espacios de co-esperanza que forjan sentido”, en Sembrar esperanza acompañando el presente, Narcea 2024, 85.
3 Alors que j’écris ces lignes, le Pape François se trouve depuis plus de deux semaines à l’Hôpital Gemelli. J’ai été émue du fait que, dans les moments les plus critiques, il n’a pas laissé passer un seul jour sans appeler
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le curé de Gaza, ou sans demander qu’on lui parle de sa part. Ma prière et ma gratitude parce que sa vie, ses paroles et ses gestes inspirent ces pages et y sont présentes en arrière-plan.
4 Patris cordis, 2.
5 C. Bobin, La presencia pura, Ed. El gallo de oro, 2023.
6 M. López Villanueva - J. Melloni Ribas, Ignatian Spirituality Today. Guide 21, cristianisme i justícia, 2024, 12.
7 A. Odriozola, “Cuidar la esperanza en situaciones de adversidad”, en Jornadas de Justicia y Misión de la confer: Los nombres de la Esperanza hoy. Febrero 2024.
8 Naomi Kawase, Les délices de Tokyo, 2015.
9 J. Zamora, Sólito, Ediciones del Periscopio, 2024.
10 S. Alana Portero, La mala costumbre de llorar a solas, Seix Barral, 2023.
11 Le Pape François nous dit : « L’espérance a nécessairement besoin d’un “corps” ». Audience générale (8 février 2017)
12 Sociedad del Sagrado Corazón de Jesús, Capítulo General 2024, 28.
13 Témoignage de David Obiang, un jeune du Cameroun qui raconte sa traversée et décrit son expérience dans la montagne en attendant de franchir la barrière qui sépare le Maroc de l’Espagne : « Il y avait des milliers de personnes de différents pays, religions, langues… Nous nous acceptions et nous respections, nous partagions tout, un pain pour 7, un kilo de riz pour 20… J’ai fait plus de 40 sauts en 22 mois, à chaque fois je misais sur le suivant. Il n’est pas permis de renoncer, ni de se rendre ; persévérer c’est continuer malgré tout ». “Construir la esperanza”, en Sembrar esperanza acompañando el presente, Narcea 2024, 124-127.
14 Or, de leur côté, quelques-uns s’indignaient : « À quoi bon gaspiller ce parfum ? » (Mc 14, 4-5). Voyant cela, les disciples s’indignèrent en disant : « À quoi bon ce gaspillage ? » (Mt 26, 8-9). Jésus réplique à Simon le Pharisien en l’entendant juger la femme qui était entrée chez lui avec un flacon d’albâtre en pleurant: « Tu vois cette femme ? Je suis entré dans ta maison, et tu ne m’as pas versé de l’eau sur les pieds ; elle, elle les a mouillés de ses larmes et essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas embrassé ; elle, depuis qu’elle est entrée, n’a pas cessé d’embrasser mes pieds. Tu n’as pas fait d’onction sur ma tête ; elle, elle a répandu du parfum sur mes pieds » (Lc 7, 44-46).
15 “Et à tous ceux et celles qui semblent avoir un cœur pour saigner”. Christian de Chergé, L’invincible espérance, Bayard, 1997, pp.41-42
16 C.M. Antunes, Oh noche que guiaste, Grupo Comunicación Loyola, 2023.
17 Spes nos confundit, 21
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