Cah25

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Canard à Hélice

5 2 ° N

LE "CAHNARD" DE TER AELIS

TRIMESTRIEL • PRINTEMPS 2014

Les secrets de la mythologie“


Au printemps, dit-on, les hirondelles reviennent en nos vertes contrées. En l'occurrence, l'hirondelle s'est bien transformée (et a pris quelques kilos, sans doute dus aux fêtes) et est revenu Canard. Mais attention, pas n'importe lequel ! Un Canard à Hélice ! Forte de cette transformation, notre hirondelle-canard de printemps propose ce mois-ci un numéro spécial Mythologie. L'occasion de redéfinir la chimère (comme un canard polymorphe, vous l'aurez compris), et d'explorer les contrées mystérieuses des légendes et autres contes. Tarasques, licornes et autres créatures sont de la partie ! De quoi faire rêver et voyager ! Vous êtes de plus en plus nombreux à nous lire, et toute l'équipe se joint à moi pour vous adresser nos remerciements. Nous sommes heureux de l'intérêt que vous portez au Canard (visible notamment via le succès de notre numéro spécial Avent). Embarquez, désormais, vers les contrées chaudes de la mythologie et de ses fabuleuses créations ! Vous êtes prêts ? Fermez les yeux... Inspirez... C'est parti !

Sharah’In

N°25

S O M M A I R E

Édito

3

5

Bref, soyons brèves !

4

L’information au jour d’hier

6 7

10 13 15

Ad’Mirwane

Ce livre qui vous a plu

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Le mythe de la Tarasque

La Banshee et la Dame Blanche

12

L’intérêt de la mythologie dans les cultures

Les chroniques des Féals

Furs

18

Un Aélissien nous fait découvrir une œuvre

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14

La petite idée culinaire à déguster sans complexe

À ne pas manquer sur le blog

La surprise de Vlynn

CANARD À HÉLICE N°25 - MARS 2014 Rédacteur en chef : Sharah’In ; Rédaction des articles : Alkestes, Cassiopée, Chikoun, De Vaanne, Drystan, dvb, Exodus (...), Grendelor, Juliette, lothindil, Melaka, Nahis, Ramrod, Sharah’In ; Corrections : Ambroise Alifère, Chikoun, Franz, Melaka ; Illustrations : Cassiopée, dvb, Garaehld, JustCryMumu, Melaka, Mirwane, Vlynn ; Mise en page : Melaka.


Rencontre hivernale à Paris Affrontant une neige inexistante et une bruine tenace - importée de Bretagne -, les aelisséens se seront réunis pour une rencontre hivernale à Paris. Il y fut question d'un Loup Garou à base de télétubbies - les meurtres nocturnes étant commis via des... papouilles ! et du nombre de flammekueches pouvant être dévorées par Exodus - la réponse étant 42. Au programme de la prochaine rencontre : l'impact de la chirurgie esthétique sur les poissons rouges.

Drystan

Brèves

Le Phrasévisuel est de retour ! Notre grand concours annuel du Phrasévisuel vient de s'achever par la victoire du duo Mike001/Laylay. Cette édition en demi-teinte a souffert de quelques couacs d'organisation lors de son lancement mais a tout de même réuni vingt créateurs littéraires et gfx sur cinq épreuves bourrées de surprises et de travaux de très grande qualité, preuve s'il en est, que les aélissiens savent repousser leurs limites toujours plus loin. Rendez-vous l'année prochaine avec peut-être une nouvelle formule encore plus intense ! dvb

© photos Exodus (...), dynamosquito & Ter Aelis

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Drame à Galvorn Un minotaure, finalement... Ça n'est jamais qu'une immense vache, donc une immense barrique de lait. C'est ce que croyait un brave paysan des faux-bourgs de Galvorn-Ouest qui s'était mis en tête de tripler sa production grâce à la capture et à l'exploitation fermière de l'animal. Bien lui en prit. Les obsèques de l'éleveur auront lieu dans la chapelle Mille-cas, mercredi midi, à Galvorn-Sud.

Ramrod


Illus’

Ad’Mirwane

© illustration Mirwane

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Annonce Particulier anonyme vend set complet de matériel de golf version luxe avec caddie fourni. Clubs en très bon état, présence d'une patine naturelle virant sur le brun sur certains fers, preuve de la qualité du matériau. Fer N°4 à changer suite à la mauvaise réaction d’une balle (déjà remplacée). Prix à débattre, vente voulue avant les congés de fin d'années (motif : personne pour nourrir le caddie). Contacter la rédaction qui transmettra.

L’information au jour d’hier

Faits d’hiver On a découvert tôt ce matin dans les rues d'Echoriath celle qui est sans aucun doute la quatrième victime du tueur surnommé "le Golfeur". D'après nos sources, la victime, identifiée comme Mme. Lilith, respectable citoyenne et ancienne femme de pouvoir, aurait eu le crâne enfoncé à coups de club de golf - fer taille 4 - « jusqu'à ce que mort s'en suive et même au-delà ». Notre reporter spécial D. Vaibey a d'ores et déjà annoncé travailler avec les enquêteurs pour « les aider à arrêter le plus tôt possible cet homme de goût incompris mais dangereux ».

© photos North Charleston, Tord Sollie & Jon Tucker

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Événementiel L'exposition "Mythes et Aelis" se voit contrainte de fermer prématurément suite a l'arrêt par les forces de police de deux Kraken et trois Centaures soupçonnés de situation irrégulière. Une annonce pour un traducteur franco-poulpe a été lancée dans l'instant suivant l'arrestation.

Exodus (...)


Chronique

Minyana : hors des sentiers D'eschyle à Anouilh en passant par Sénèque, Racine, Giraudoux, ou encore Sartre... la mythologie a toujours beaucoup inspiré les dramaturges. Et le théâtre contemporain poursuit l’œuvre des anciens. Dramaturge en vogue dans le milieu, Philippe Minyana illustre cette perpétuation de l’héritage multimillénaire. Avec Volcan en 1993, il met un premier pied dans le théâtre mythologique en reprenant le mythe de Phèdre. Ayant déjà franchi le Rubicon, le voilà qui écrit en 2008 La Petite dans la forêt profonde, pièce inspirée du livre VI des Métamorphoses d’Ovide. Le mythe raconte l’histoire du roi de Thrace, qui enlève la sœur de son épouse, la séquestre, la viole et lui coupe la langue. La reine, afin de

Un

Aélissien

nous fait

découvrir une œuvre.

venger sa sœur, tue son propre fils et le donne à manger au roi. Après cette scène horrible, la reine se transforme en hirondelle, sa petite sœur en rossignol et le roi en huppe. Minyana reste fidèle au récit d’Ovide, mais y appose un style bien particulier... La pièce débute par cette didascalie : « Le jeune Roi et sa petite belle-sœur arrivent dans le pays du jeune Roi. Avant d’aller au palais retrouver l’épouse ils feront une halte. Dans une bergerie qui est près d’une forêt. C’est un stratagème. Le jeune Roi veut la petite mais elle l’ignore. » Aucune description, ni des personnages ni des décors, mais des révélations concernant les projets du protagoniste. Une didascalie peu théâtrale, car bien difficile à mettre en scène… et précédée d’un titre : « A l’orée de la forêt ». Aucun numéro d’acte, ni de scène… La pièce est séparée en plusieurs « tableaux », en plusieurs lieux. Et dès le début, nous voilà confrontés à un autre problème : les propositions incises. « Tu dis que c’est un havre de paix ? Demande la petite

Il y a toujours un Nicolas Cage pour éclairer ta journée.

Smirt :

© photos roanokecollege & Bahman Farzad

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Oh oui Dit le jeune Roi » Est-ce bien une pièce de théâtre que nous avons là? Ne serait-ce pas plutôt… un conte ? Les bases du récit mythologique (forêts obscures, sacrifices, merveilleux, etc.) semblent détournées, tout au long de la scène, vers l’univers du conte. D’ailleurs, le titre est-il celui d’une pièce de théâtre ou plutôt celui d’un conte ? Les didascalies se mêlent peu à peu aux répliques des personnages, sans être indiquées ni par des italiques ni par des espaces. Le texte est uniforme. Le lecteur ne parvient plus à devenir spectateur. Les paroles, les actes et les intentions des personnages ne forment qu’un seul bloc. La mythologie ne finirait-elle pas par dépasser le théâtre ? Alkestes


livre plu.

Chronique

Ce qui vous a

les choses soient rangées en ordre... » • demander ce qui contribuerait à notre bien-être. L'action concrète qui va changer la donne et que l'autre pourra faire en toute sympathie : « ...voudrais-tu donc faire le tour de la chambre chaque matin pour ramasser ? ». A n'importe quel moment de sa journée, tout un chacun peut avoir recours à la CNV, surtout dans les situations d'agressivité. Une seule restriction à mon sens : ça ne marche pas avec les bébés ! Et oui, il faut savoir parler et écouter. Pour en savoir http://nvc-europe.org/SPIP/

plus

:

Grendelor

Les mots sont des fenêtres (ou bien ce sont des murs) J'ai d'abord été attirée par le titre de ce livre, intrigant et parlant. En effet, notre langage peut avoir cet effet-là : « tout à coup, des horizons se sont ouverts », ou celui-ci « j'ai eu l'impression de me prendre une porte ». L'idée d'une communication non violente n'est alors pas si absurde que ça. Marshall B. Rosenberg est né en 1934 aux États-Unis et est psychologue clinicien. Dès l'enfance, il a pu constater la puissance des mots dits et non-dits. Et c'est en travaillant en tant que psychologue qu'il s'est rendu compte que notre façon de communiquer était la cause de beaucoup de souffrance. La communication non-violente ou CNV est un processus nous permettant d'écouter et d'exprimer nos besoins fondamentaux. Elle part du principe que si nous communiquons avec conscience et non pas machinalement sans y réfléchir, nous éviterions bien des conflits. De même, exprimer clairement nos sentiments et écouter ceux des autres sont des facteurs importants. En clair, comment ça marche ? Quatre points clés : • observer sans évaluer/juger. Décrire la situation sans y mettre d'émotion « quand tu laisses tes chaussettes par terre... » • identifier et exprimer les sentiments. Rechercher quel est le vrai sentiment provoqué « ...je suis horripilé... » • assumer la responsabilité de ses sentiments. Ce n'est pas l'autre qui est la cause de nos sentiments mais le fait d'avoir des besoins satisfaits ou non « ...parce que j'ai besoin que

dvb : Quel est l'idiot qui a dit que le thé c'était la boisson idéale pour écrire ? Comment voulez-vous que je réfléchisse à une nouvelle si j'arrête pas d'aller pisser toutes les cinq minutes !

© photos Wikimedia & Une vie pour réussir

7


Dossier

Au pays d'Aelis, nombre de créatures hantent les lieux et leur mémoire sans fond témoigne d'une sagesse ancestrale. Si vous levez les yeux vers le ciel, telle une Jasmine éperdue, ce n'est pas l'Aladin qui se mirera dans vos pupilles, mais un drôle d'animal, dont le regard envoutant nous livre les histoires d'un temps révolu... L'oiseau lyre. Ainsi était l'oiseau, les serres fermement enfoncées dans la fange du Rhône des temps médiévaux. Fleuve cauchemar, il était le repère des êtres surnaturels, génies ou démons, et aux alentours pareillement redoutés. L'un d'eux prenait, dans la bouche des gens de ce temps, l'aspect d'un monstre

Le

1

Mythe de la

Tarasque. fantastique : un dragon, moitié poisson, moitié animal. On le nommait la Tarasque. L'oiseau n'en avait cure. Les rumeurs étaient légions, et sa tête bien trop petite pour en prendre la mesure. Mais ce jour-là, sur les bords du fleuve, il dut se rendre à l'évidence. Elles existaient bel et bien.

Ce qui m'intéresse, ce sont tes personnages. Y a un truc qui me titille l’œsophage (ah non, ça c'est ma fin de bronchite, pardon) mais j'aimerais voir comment ça évolue avant d'en dire plus.

Ambroise

© illustration Cassiopée

8

Alifère

:

L'agitation remuait la foule hurlante, gesticulante, pointant du doigt une grève de sable. La Tarasque était ici, la fauteuse de troubles, celle qui de son souffle pouvait ôter la vie, de ses griffes écharpait les âmes perdues, de ses dents lacérait les inconscients. C'était un reptile au corps recouvert d'écailles, plus gros qu'un bœuf, plus long qu'un cheval. Dragon monstrueux échappé de l’enfer, elle terrifiait la population alentours : par sa soif, elle asséchait presque tout le Rhône et pour assouvir sa faim, elle dévorait les bateliers. Son nom était sur toutes les bouches ce matin-là. Pressée par la foule, une sainte fille, Marthe, se dirigea d’un pas assuré dans le repaire du dragon. Elle était le symbole de ce christianisme conquérant, qui cherchait à étendre sa domination sur une civilisation encore imprégnée de tradition païenne. Elle disait que sa foi la protégerait, que "tout est possible à l’âme qui croit". D’un seul signe de croix, elle apaisa le dragon. De féroce et enragé, le monstre devint plus doux qu’un agneau, plus obéissant qu’un chien. De mémoire de volatile, jamais personne n’était ressorti vivant de cet antre maléfique. Stupéfiée elle aussi, la foule, muette de saisissement, elle observait Sainthe Marthe frapper sauvagement le monstre, qui ne bougeait pas, littéralement hypnotisé par la Sainte. Un à un, les morceaux du monstre rejoignirent le fleuve que l’oiseau lyre s’empressa de quitter, emportant avec lui les souvenirs de ce jour rédempteur.


Le

2

Mythe de la

Tarasque. La Tarasque Dans l’imaginaire médiéval, la Tarasque est associée à un terrible dragon d’une grosseur et d’une longueur incroyables. Son souffle répandrait une fumée pestilentielle et sa gueule serait une véritable cache d’armes tranchantes d’où s’échapperait une haleine mortelle. Très impressionnante, elle siffle, rugit sa haine et effectue son carnage aux abords du Rhône, entre Arles et Avignon, sur les lieux dit de Nerluc (le bois noir) qui deviendra alors Tarascon. Aujourd’hui, la tarasque est présente sur les armoiries de la ville. Le combat homme/dragon exprime à la fois le passage du paganisme à la chrétienté, et de nombreuses cérémonies représentant la bête vaincue se sont multipliées vers la fin du XIIème siècle et début du XIIIème. Celle de la tarasque a été instituée par le roi René en 1474, à qui l’on doit l’aspect de la bête : « Un monstre à tête de lion, carapace de tortue, armée de crocs et dards au ventre de poisson et queue de reptile. » Sainte Marthe Sainte Marthe aurait échoué sur les côtes de Provence, en l’an 48, en compagnie de Saint Lazare, Marie-Madeleine et des deux Maries fondatrices du village des Saintes Maries. Ce n’est pas Sainte Marthe qui abat le dragon : elle se contente de l’apaiser par un signe de croix et le tient en laisse. Elle réalise ce miracle pour les provençaux qui lui ont promis leur foi et qu’elle encourage par sa hargne et sa vindicte. C’est le peuple qui abattra la bête et la mettra en morceaux. Le pouvoir de Sainte Marthe a été d’empêcher le dragon de nuire, de l’obliger à se laisser faire. Toute la symbolique de la légende est de montrer la puissance de l’Eglise. Le dragon serait le symbole de l’affrontement religieux entre peuples vaincus et peuples envahisseurs. Ainsi, la Tarasque serait le dieu

cornu des anciens peuples gaulois, comparable au diable, que Sainte Marthe, figurant le christianisme salvateur, est venu combattre.

Dossier

Ces dragons qui nous ressemblent Le dragon serait par synonymie « l’impur » et bien vite « le dangereux », « l’autre ». Cette créature présente une morphologie souvent pérenne dans la symbolique médiévale avec son corps recouvert d’écailles comme s’il était lui-même ce chevalier cuirassé, solitaire et puissant. Le corps composite du dragon inquiète. Il est porteur d’une image où les fantasmes prennent leur place. Le dragon est un être hétérogène (la queue virile et la gueule vaginale) qui combinerait les principes mâles et femelles alors que les humains engendrent soit des filles, soit des garçons. Cassiopée & Nahis

Vlynn : Choix homme/femme : c'est pas compliqué a faire, mais dans le genre pas prioritaire, je le mets plus tard.

© illustrations Chabigu & Paul Elliott

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Dossier

Non, la Banshee n’est pas un membre des X-men, pas plus qu’elle n’est un animal Ténébran ou une voie du guerrier aspect. L'histoire de la Banshee, c’est d’abord une histoire irlandaise : celle du peuple divin des Tuatha De Dannan, habitants de droit de l’île après leur victoire contre les Fír Bolg à la bataille de Cath Maighe Tuireadh. Organisés comme une société humaine, ils vainquirent également les Géants de la Mer, les Fomoires, ennemis jurés de tout et de tous. Rien ne semblait pouvoir perturber leur existence. Mais que soit maudit le nom de Tailtinn, car c’est là qu’ils connurent leur première et unique défaite contre les Milesiens, de simples humains. Ce

J'ai usé de mes super-pouvoirs pour te dupliquer, ma grande Sharah. Et te rendre visible là où tu n'étais pas. Ramrod

© illustration Garaehld

1O

:

La

1

Banshee et la Dame

Blanche. fut une longue et rude bataille, jusqu’à ce que les trois rois des Tuatha De Dannan, Mac Cuill, Mac Ceacht et Mac Greine, tombent. C’est alors que le massacre commença. Pour y mettre fin, une trêve fut conclue, où l’on pense voir la main de Dagda, dieu du sacré et des contrats. Le marché passé avec ces humains fut celui-ci : les Tuatha De Dannan seraient autorisés à trouver refuge sous les tertres, les sidhe. A ceux qui n’obtempérèrent pas, la punition fut de garder ouvert le lien entre les tertres et les hommes en devenant les Bean Sidhe, les fées des tertres. Dès lors, la mission des Banshee fut fixée grâce à leur lien avec les Tuatha De Dannan : utiliser ce qu’elles savaient pour annoncer la mort d’un être cher. La forme de leur cri, le keening, sert à expliquer les circonstances de la mort : Un gémissement, paisible ; des hurlements, violente. Dans tous les cas, le keening est le plus horrible des sons qui se puisse imaginer, et la diction monte et descend comme les vagues de la mer. Les Banshees sont donc des êtres non maléfiques, puisqu'elles n'ont aucun rôle dans la mort : qui irait blâmer le messager ? Chaque grand clan irlandais dont le nom commençait par Mac ou O, seuls vrais descendants de la noble race gaélique, possédait sa propre Banshee. By Mac and O You'll always know True Irishmen they say'. But if they lack The O and Mac, No Irishmen are they'. (Grâce à Mac et O, vous saurez toujours qu'ils sont de vrais irlandais.)


La

2

Banshee et la Dame

Blanche.

Le mythe trouve des échos en Ecosse (les Bean Nighe) ainsi que sur le continent où l’on parle, en tout cas en Bretagne, des Kannered Noz, les Lavandières de la Nuit, qui sont condamnées à laver des vêtements tachés de sang pour l’éternité. Quand il s’agit de décrire les Bean Sidhe, peu de témoignages sont concordants : s’agit-il d’une belle jeune fille dont le visage porte les marques de ses larmes ? D’une vieille femme repoussante aux longs cheveux filasses ? Porte-t-elle une robe blanche, verte ? Un manteau gris ? Quoi qu'il en soit, les témoignages s’accordent à dire que la Banshee apparaît le matin, quand la nuit résonne encore. Le mythe a également donné naissance à la Dame Blanche, dont les Lavandières peuvent être vues comme une facette : également annonciatrices de mort, souvent attachées à une grande famille, elles ont évolué jusqu’à devenir les auto-stoppeuses que l’on connaît, signalant d’un cri les lieux de la mort de quelqu’un. Pour certaines, la mission est plus funeste puisqu’elles annoncent l’accident mortel au lieu de le prévenir. Plus prosaïquement, les Banshee viendraient de la figure nordique de la déesse de la mort. Celle-ci, déesse aux prérogatives régaliennes sans être personnifiée comme Pluton ou Hadès, disposait d’un triptyque de pouvoirs : l’annonciation de la mort, la provocation de la mort et l’accompagnement des morts. L’idée d’accompagnement, dans la mythologique nordique, a été dévolue aux Walkyries. Elle n’a pas été reprise dans le mythe irlandais, sauf à considérer que la Banshee fait le lien entre les Sidhe et les hommes. Au contraire, il apparaît que les légendes irlandaises des origines, influencées par les invasions successives des peuples nordiques, connaissaient la dernière mission de la

déesse de la mort mais la séparaient en deux. En effet, outre la Banshee que l’on connaît, existait une Banshee associée à la mort violente (au combat), vêtue de rouge, au visage agressif. Il apparaît probable que les deux se soient entremêlés jusqu’à n’en former qu’une : la guerre, à cette époque, était réservée aux nobles. La banshee rouge leur était donc dédiée. N’y a-t-il pas un parallèle à faire avec les Banshees attitrées des clans irlandais et, de façon plus lointaine, avec les Dames Blanches continentales attachées à une famille noble ?

Dossier

Enfin, la Banshee, la Lavandière et la Dame Blanche ne sont-elles pas toutes trois l’exemple du mythe transformé par le passage du temps, des générations de conteurs et des changements de lieux ? Juliette et De Vaanne

Lilith : Cette semaine j'ai décidé de supprimer un personnage d'un de mes textes. J'avais l'impression d'assassiner un de mes enfants.

© illustrations Aaron Gilson & Bertrand Môgendre

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Dossier

Quand

j’étais universitaire, j’aimais beaucoup traîner dans la bibliothèque d’Histoire, cette matière m’a toujours fascinée. Je prenais plaisir à lire une vieille encyclopédie du bestiaire fantastique. Pour chaque monstre, il y avait le nom, la description, la culture d’origine et une série d’autres noms de créatures proches dans la même ou dans d’autres cultures. C’est en fait ainsi que j’ai découvert une branche de l’Histoire trop souvent oubliée et traitée avec mépris : l’étude des mythes, mythologies et légendes ; et plus particulièrement la mythologie comparée. Cette branche part du principe, simple et souvent mal compris, que dans toute légende il y a un fond de vérité

De Babylone à Rome en passant par Sète. Quel voyage que ce message. Chikoun :

© photos JustCryMumu

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L’intérêt de la

mythologie

dans les

cultures.

ou plutôt que à l’origine de toute légende, il y a un fait ou une peur bien réelle. Les mythes seraient donc à voir comme des textes historiques, déformés par le temps et la tradition orale. La mythologie comparée va un cran plus loin, vu qu’elle ajoute à ce principe celui du parcours de transmission. Cela consiste à comparer les mythes entre les cultures pour trouver le plus ancien et ainsi remonter le flux migratoire. Ainsi en est-il de ce lot de trois légendes des deux côtés du Pacifique : la première parle de la découverte du feu, est commune aux peuples du Pérou et aux Tahitiens. La seconde, uniquement péruvienne, parle d’un prince qui, suite à un présage, part sur l’océan, vers le soleil couchant jusqu’à y trouver une terre. La troisième, polynésienne, parle d’un prince venu du soleil levant, apportant du pain en racine. Ces deux légendes sont à priori anodines, mais si d’un côté on a un prince partant vers l’Ouest et de l’autre un prince venant de l’Est, il est possible que ces deux princes ne fassent qu’un ; d’autant que le pain en racine peut être interprété comme étant la patate douce, racine originaire d’Amérique et pourtant existante en Polynésie depuis avant le Xème siècle. Dans les années 1940, cette idée est révolutionnaire. Il faudra dix ans pour qu’il soit prouvé que les peuples du Pérou étaient capables de traverser le Pacifique (grâce au Kon-Tiki de Thor Heyerdahl), et il faudra plus de trente ans supplémentaires pour que la linguistique et la génétique des populations parviennent à prouver ce lien direct entre les Péruviens et la Mélanésie/Polynésie.

lothindil


Chronique

Certains

ont peut-être plongé dans l’univers fantasy de Mathieu Gaborit, à travers certains de ses ouvrages (Les chroniques crépusculaires, par exemple). Certains encore ont peut-être lu les trois tomes composant les Chroniques des Féals. Et enfin, certains y ont peut-être joué. Depuis quelques temps, les univers fantastiques d’auteurs français se métamorphosent pour devenir des jeux de rôle passionnants. Tel est le cas des Chroniques des Féals. L’univers est vaste et prend en compte les créatures mythologiques que l’on connait bien : licorne, Pégase, basilic ou phénix, pour ne citer qu’eux. Chaque pays (ou territoire) est associé à une créature légendaire, celle-ci y

Pour la gloire, les clefs, les poneys, le futur et les vaisseaux spatiaux.

Drystan :

© photos Les Chroniques des Féals

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Les chroniques des

Féals.

vivant et faisant bénéficier les prêtres de leurs pouvoirs. Ainsi, les dragons sont les gardiens de la mémoire et leurs prêtres peuvent visiter les souvenirs ; les tarasques abritent d’immenses cités et leurs fidèles respirent les effluves de leur évent pour provoquer leur pouvoir ; quant aux licornes, elles vivent dans le désert forgé par leurs larmes, et plus encore... A travers ses romans et le jeu de rôle, Mathieu Gaborit explore et revisite la mythologie et ses créatures, mais aussi ses valeurs, ses buts et son caractère. Un univers riche pour une menace plus puissante encore. Car il n’est pas d’histoire sans antagoniste. Si les joueurs pensent que la Charogne, le royaume des morts faisant des intrusions dans celui des vivants est la principale menace, c’est de l’Oubli et du Néant qu’il faudra se méfier. Le système de jeu est basé sur les blessures, l’Oubli et le Néant. Très sombre malgré des villes bigarrées, les joueurs devront apprendre à composer avec des créatures impressionnantes, des menaces mentales plus douloureuses que les physiques et devront redoubler d’ingéniosité pour comprendre et appréhender un monde où les mystères d’une caste sont plus dangereux que la lame d’un couteau. L’ensemble est à double tranchant : voulez-vous être prêtre chimère et utiliser les pouvoirs de la créature ? Préparez-vous à vous transformer petit à petit en elle jusqu’à perdre votre humanité…

Sharah’In


La petite idée

culinaire à déguster sans

Mettre au four le plat pendant 20 minutes environ.

Recette

Placer deux tranches de jambon cru par assiette, en formant une croix. Une fois les courgettes prêtes, posez-les au centre. Vous pouvez servir !

complexe. Melaka

Courgettes au chèvre sur leur lit de jambon cru.

Recette pour 4 personnes.

Ingrédients : -

4 courgettes rondes 1 bûche de chèvre De l'huile d'olive Des amandes effilées 8 tranches de jambon cru

Étapes de préparation : Préchauffer le four à 180° (thermostat 7). Découper chapeau.

les

courgettes

au

niveau

du

Prendre une grosse cuiller et les vider en enlevant bien tous les pépins. Faire chauffer une casserole d'eau et une fois que celle-ci bout, mettre les courgettes à cuire pendant 5 minutes. Égouttez les courgettes puis les poser dans un plat allant au four. Créer un fond d'amandes effilée. Disposer deux rondelles de bûche de chèvre à l'intérieur (si elles sont trop grosses, les recouper en deux). Rajouter quelques amandes effilées et une goutte d'huile d'olive.

dvb : C'est tout à ton honneur de te décharger ainsi.

© photos Melaka

14


Chronique

Ceux d'entre vous qui fréquentent les salons liés à la culture geek les ont sans doute déjà croisés. Renardes ou pumas en peluche, jeunes créatures aux oreilles de neko ou affublées de queues soyeuses ou encore monstres anthropomorphes. Les furs – du nom anglais qui désigne la fourrure animale – forment depuis plusieurs années déjà un réel fandom* avec leurs propres codes et conventions annuelles. La plus grande d'Europe, l'Eurofurence

(dont

ce

sera

1

Furs.

le

vingtième numéro en août prochain), a lieu tous les ans en Allemagne et réunit plus d'un millier de participants à chaque édition. La plus grande du monde quant à elle se déroule en

Pennsylvanie et accueille plus de trois mille festivaliers.

Organisés et bien implantés sur certaines plate-formes (deviantART entre autres), les furs disposent de nombreux forums et sites dédiés. Cependant ils demeurent discrets et méconnus du grand public. À tel point qu'on pourrait les prendre pour de simples cosplayers. De prime abord la nuance semble mince : tout comme les fans de steampunk et de cosplay, le DIY (Do It Yourself) prend une place essentielle dans la création de costumes et d'accessoires faits main, même si certaines firmes commencent à développer des objets électroniques plus audacieux. Je pense notamment aux fameuses oreilles articulées qui captent les courants électriques du cerveau humain et miment les signes comportementaux liés aux émotions. Ainsi, les porteurs de ces appareils peuvent simuler les comportements des mammifères terrestres et communiquer à l'extérieur leurs émotions ou états d'âme.

Comment j'fais moi pour m'y prendre a la dernière minute si tu sais pas 20 ans a l'avance ?

Vlynn :

© photos dvb

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Le costume, ou fursuit, peut représenter n'importe quel animal réel, imaginaire ou même hybride, du loup au dragon en passant par les créatures mythologiques comme les « taurs » (personnages fabuleux mi-humains comme les centaures). Il est ainsi possible de décliner les créations selon différents degrés d'anthropomorphisme, certains furs allant jusqu'à opter pour le quadsuit – une tenue permettant de se déplacer à quatre pattes – ou même y incorporer des éléments articulés complexes ou animatroniques.


2

Furs.

* Un fandom (de l'anglais fan kingdom) représente tout ce qui touche au domaine de prédilection d'un groupe de personnes et qui est organisé ou créé par ces mêmes personnes. Le fandom furry est l'application de cette définition au domaine des animaux anthropomorphes.

Chronique

(souce : wikifur)

dvb

Pourtant les furs vont généralement au-delà des défilés et regroupements de simples fans. Les communautés en ligne et IRL ont développé une véritable philosophie qui leur permet d'explorer leurs personnalités intérieures. Fanfictions autour de personnages de la culture populaire, bande-dessinées, nouvelles, jeux de rôle, galeries d'œuvres graphiques sont autant d'éléments qui offrent l'occasion de donner vie à la fursona. Car chaque fur possède sa propre représentation intime. Certains la qualifieront de « totem » ou de « mascotte », mais il s'agit bien de la figuration d'un alter ego. De manière plus sociologique, certains ont vu dans ce phénomène une forme de déviance. Les furs peuvent déranger puisqu'on leur prête des comportements ambigus. On les dit auto-centrés et refermés sur leurs propres communautés, on fantasme sur leur sexualité et leurs coutumes au vocabulaire étrange. Le fait est que les furs ont développé une vision très poussée du mouvement trans-humaniste. Les forums consacrés au sujet regorgent de réflexions autour de l'avenir de l'humain, des opportunités et des dangers de la génétique, etc. De façon générale les furs nous enseignent aussi à nous remettre en question en tant qu'espèce animale et à réfléchir à la place de l'Homme au sein des règnes du Vivant. S'ils sont les héritiers des personnages de Disney et des mangas, ils pourraient tout aussi bien être l'avenir d'une société rêvée par les plus grands auteurs de science-fiction.

Laylay : Je ferais de grandes choses quand je saurais lesquelles.

© illustrations dvb & Garaehld

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À ne pas

Chronique

manquer sur le blog.

iconographie et admettre que nous n’avons jamais éprouvé cette expérience par le passé devant une œuvre d’art. Pourtant, derrière le choc initial du what the fuck, nous verrons apparaître les codes et les démarches de leurs auteurs. Si nous parvenons à nous dépasser nous-même, à nous débarrasser de notre crainte, nous verrons la profondeur de la création, pour ce qu’elle est, pour ce qu’elle cherche à nous dire ou à nous faire éprouver. »

Chikoun

Alors que l'activité avait connu une petite baisse de régime durant décembre, le Blog a repris de plus belle en janvier ! Comme d'habitude vous pourrez retrouver les astuces du mois tant en littérature, qu'en rôlisme ou en graphisme. Ainsi, il s'agissait en janvier de quelques rappels quant à la conjugaison et ses accents circonflexes, de correctement dessiner les personnages en marche en comprenant l'effet de celle-ci sur la structure du bassin, mais aussi de faire avancer ses récits rôlistes. A propos des astuces du mois, vous pouvez tout à fait demander une astuce sur un point particulier qui vous intéresserait ou bien même proposer vous-même une astuce que vous utilisez régulièrement ! De manière mensuelle dvb nous propose encore sa chronique « ind'art ». Ce mois-ci, il a amené son focus sur la rétrospective Mondrian qu'il a pu visiter et le mouvement De Stijl. « Nous avons besoin de courage et de force pour passer par une période de dissonance. C'est la peur de la dissonance et parce qu'on s'adapte au passé qu'on ne fait pas de progrès. Il ne faut pas s'adapter, il faut créer. » Piet Mondrian Nous introduisant dans cet univers par cette citation, dvb poursuit sa réflexion sur les codes et les règles imposés par l' « art normal » à notre vision de tout art. Mais je laisse ici place aux mots de dvb : « Alors oui, il en faut du courage pour accepter ce moment de dissonance. Il faut vaincre la peur de l’incompréhension, accepter que nous puissions n’avoir aucun repère dans notre

overdead : Footing, vaisselle, rendu de trophée graphique... J'aime les début de matinée efficace !

© photos dvb & KGA Team 5th Grade

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