
3 minute read
04 Habitat enthalpique
S'emparer des conditions extrêmes
Studio Atacama, architecture at the edge of physics dirigé par Nicolas Dorval-Bory
Située au tropique du Capricorne, la région d’Atacama possède un des climats les plus arides de la Terre – la pluie moyenne dans cette région est d’environ 1 mm par an. Son aridité extrême s’explique notamment par sa géographie : le désert est situé entre deux chaînes de montagnes d’une hauteur suffisante pour empêcher l’advection de l’humidité en provenance des océans Pacifique ou Atlantique. Cela crée l’effet d’ombre pluviométrique, à l’origine de ce paysage exclusivement minéral et sans eau.
Face à ces conditions extrêmes, l’objectif principal des êtres humains pour survivre est de s’abriter et de s’hydrater. Or, comment maintenir un équilibre de confort thermique sans utiliser beaucoup d’eau ? Cette problématique se pose d’autant plus aujourd’hui, au vu des prévisions du réchauffement climatique planétaire.
Contrairement au système de ventilation mécanique contrôlé de base, qui fonctionne uniquement avec un échangeur de chaleur, le système de ventilation enthalpique – ou ventilation à récupération d’énergie (VRE) – récupère à la fois l’énergie thermique et l’énergie latente de l’air vicié extrait des pièces humides : l’humidité récupérée est filtrée et transférée à un air sec et sain provenant de l’extérieur. Cette énergie supplémentaire, qui aurait autrement été perdue, est transférée dans le flux d’air frais entrant avant d’être acheminée vers les pièces. Il s’agit d’une sorte de recyclage de l’humidité.
L’air sec extérieur du désert d’Atacama n’ayant aucune influence sur l’humidité intérieure, ce projet propose alors de concevoir un habitat souterrain auto-suffisant qui, en symbiose avec l’extérieur, se protégerait du climat extrême tout en bénéficiant.
Contrairement à la température extérieure, la température à 3m de profondeur ne varie que de 13 à 15° tout au long de l’année. Pour atteindre les températures souhaitées dans chaque pièce, l’épaisseur de l’isolation des murs varie : plus l’isolation est épaisse, moins la température de la pièce sera influencée par la température du sous-sol. Pour réguler la température de ces pièces, l’air extérieur de surface, chaud et sec, vient chercher l’humidité disponible dans des bassins situés sous la dalle.
Ces bassins contiennent, au départ, la quantité d’eau nécessaire pour atteindre le niveau d’humidité approprié pour chaque pièce. Une fois atteint, toute l’eau sera évaporée dans l’air, et elle sera réutilisée grâce au système enthalpique. Si tout le système de ventilation s’arrête, l’eau reprend sa forme liquide. Les plantes et la végétation situées au-dessus des bassins, au centre, absorbent une petite partie de l’humidité afin d’éviter tout excès d’humidité qui pourrait être produit par des usages tels que la douche ou la cuisine. La croissance des plantes agit comme un indice d’humidité.
La partie centrale, entièrement visible, est le cœur du projet ; dans un habitat enterré, elle prend le rôle de fenêtre, apportant ventilation et lumière dans les quatre pièces. La circulation entre les pièces se fait par des sas aussi éloignés que possible des entrées d’air, évitant ainsi de perdre ou de mélanger les taux d’humidité propres à chaque pièce. En effet, comme dans tout habitat, certaines pièces nécessitent un renouvellement d’air plus important que d’autres : plus il y a d’humidité, plus le débit d’air est important et donc, plus le diamètre de la canalisation est grand.
Les programmes, tirant parti de ces flux d’air, conduisent à une disposition particulière qui permet ainsi d’assurer 4 climats confortables différents.