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ournaux et télévisions portent souvent un regard bien sombre sur le monde et nous pouvons être tentés de penser que Dieu semble absent de ce monde et de notre vie. En ce temps pascal, laissons-nous aider par l’Esprit Saint afin d’observer le monde au-delà des apparences. Pour cela, il nous faut exercer notre regard pour apprendre à aimer, comme le Christ nous a aimés et nous aime. Une parabole va nous permettre de comprendre l’enjeu d’un tel effort.
1. Aveugle comme une pierre du chemin Un père spirituel, voulant faire grandir un jeune moine, lui demanda : “Je veux que tu ailles à la ville ; tu iras au marché et tu m’achèteras un parfum !”. L’ordre semblait si insensé que le disciple crut que le maître voulait tester sa vertu d’obéissance. Il accomplit donc la volonté du maître et rapporta le parfum, qui n’était d’aucune utilité. “Qu’as-tu donc vu dans la ville ?”, demanda le vieillard. “Rien, Père, je n’ai rien vu : sur mes yeux étaient posées des œillères invisibles.” - “Tu as eu tort”, rétorqua le vieillard. “Je ne t’avais pas demandé de ne rien voir, je t’avais commandé d’acheter du parfum !” - “Mon maître, tu connais les mœurs de notre temps ! Je devais me préserver.” “Insensé ! Dieu a créé l’homme et la femme nus ; c’est ton regard qui est impur et non l’œuvre de ses mains. La prochaine fois, tu t’exerceras à regarder chastement, au lieu de te rendre aveugle comme une pierre du chemin.” Notre comportement n’est-il pas souvent celui-là : établir des murs autour de soi pour se protéger d’un monde que nous avons de plus en plus de mal à comprendre. Nous considérant comme non pécheurs, nous nous protégeons du monde, que nous considérons comme mauvais.
2. Il a aimé à en mourir La semaine suivante, le maître demanda au novice d’acheter une liqueur forte. Le moine exécuta l’ordre en faisant bien attention de garder ses yeux ouverts. Il se scandalisa du prix de la liqueur parce que la pauvreté est une vertu. Puis il rentra. “Qu’as-tu vu en ville ?”, demanda le maître. - “J’ai vu des hommes dépravés et assoiffés d’argent et des femmes obscènes et sans scrupule, et j’ai pensé que j’étais bien heureux de vivre auprès de toi dans le désert.”- “Insensé ! Comment peux-tu traiter ainsi les créatures de Dieu ? Il a aimé à en mourir les pécheurs et les
Trimestriel Juin 2018
prostituées, et tu les méprises !” Nous réagissons bien souvent comme ce moine. Notre regard étant faussé et ce qui nous est donné de voir à la télévision ou dans les journaux n’étant que partiel, lorsque nous portons notre regard sur le monde nous sommes désorientés, désespérés. Le monde va mal, mais ce n’est pas notre faute. On se tourne alors vers le passé où tout était si bien. On ne pense pas à changer sa propre vie, puisque le mal vient des autres. On critique d’autant plus facilement que l’on ne veut pas mettre la main à la pâte ou, si on la met, on ne veut surtout pas changer.
3. J’ai vu le Christ Le pauvre disciple se sentit malheureux. Il décida de se replonger dans les Écritures et de les méditer longuement avant de se présenter, un an plus tard, devant le vieillard. “Tu tombes bien”, dit le vieillard. “J’ai besoin de toi pour porter une somme d’argent à une vieille prostituée qui meurt de faim et qui est malade.” Il y alla et en revint. “Qu’as-tu vu à la ville, mon fils ?” - “J’ai vu le Christ, mon maître. Il avait faim et soif, il était abandonné de tous et malade.” Le maître se réjouit grandement et, hochant la tête avec contentement, lui dit : “En un an, tu as gagné trente années d’expérience.” Imitons ce novice. Si nous acceptons d’être à l’écoute de la Parole de Dieu et des autres, alors le monde se trouvera transfiguré, puisque nous y découvrirons le Christ souffrant mais aussi le Christ présent et ressuscité. Cet apprentissage, nous avons commencé à le faire grâce à l’Évangile selon Saint Marc et grâce aux cinq vitamines que nous avons reçues tous les dimanches de carême pour nous exercer à vivre comme fils, frères, disciples, serviteurs et apôtres de Jésus-Christ. Continuons de faire grandir en nous les talents que Dieu nous a donnés pour découvrir le Christ dans notre vie et à travers tous ceux que nous rencontrons. Encourageons ceux qui essaient de transmettre la joie pascale !
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Édito
Journal d’information de la paroisse Sainte-Anne-du-Perche Diocèse de Séez