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L'Adresse - Été 2022

Luc Maurice, un pilier du secteur des RPA

LE RQRA A RENCONTRÉ LUC MAURICE, PRÉSIDENT FONDATEUR DU GROUPE MAURICE, AFIN DE CONNAÎTRE SA VISION FACE À LA RÉALITÉ DES RÉSIDENCES PRIVÉES POUR AÎNÉS, DEUX ANS APRÈS LE DÉBUT DE LA PANDÉMIE. VOICI LE CONDENSÉ D’UNE RENCONTRE AVEC UN HOMME AUSSI PASSIONNÉ QUE PASSIONNANT.

UN PARCOURS PRÉDESTINÉ

Ayant à cœur le mieux-vieillir de la population depuis plusieurs décennies, Luc Maurice est devenu une figure importante au sein du secteur des résidences pour retraités au Québec. Reconnu pour son leadership, son humanité et sa créativité, il a su créer une entreprise à son image.

Le parcours de Luc Maurice est inspirant. Alors qu’il était étudiant à l’université de l’Alberta à Edmonton, son projet de maitrise portait sur la création d’un nouveau modèle de résidences pour retraités. Son chemin fut alors tracé. Influencé par les bâtisseurs de l’époque au Québec, il a rapidement compris que sa fibre entrepreneuriale se mettrait au service des personnes plus âgées.

LE RÉSIDENT DE DEMAIN

Lorsqu’on demande à Luc Maurice comment il voit le résident de demain, sa réponse est claire : il n’existe pas qu’un type de résident et lorsqu’on parle de la clientèle des RPA, il ne faut surtout pas généraliser. On ne peut pas mettre dans la même catégorie une personne de 70 ans très autonome et quelqu’un de 90 ans un peu moins actif. Certains sont en forme, d’autres sont malades, et ça n’a pas nécessairement de lien avec l’âge.

« Voilà pourquoi j’insiste pour dire qu’il faut arrêter de parler des “résidences pour aînés” comme faisant partie d’un bloc homogène desservant un seul et même type de clientèle. Faire ce genre d’amalgame peut être dangereux ; il est impossible de prendre de bonnes décisions, qu’elles soient sociétales, d’affaires ou personnelles, lorsqu’on généralise. C’est primordial d’en tenir compte ! », précise Luc Maurice.

De plus, le groupe des personnes âgées, comme pour toute autre génération, est en constante évolution. Les résidents de demain auront des attentes très différentes de ceux d’aujourd’hui. Ils voudront davantage de confort, de sécurité et, bien souvent, moins de solitude. Ils voudront avoir accès à une panoplie de services. L’important, c’est de bien comprendre pourquoi un client a choisi de vivre en résidence.

« IL EST IMPOSSIBLE DE PRENDRE DE BONNES DÉCISIONS, QU’ELLES SOIENT SOCIÉTALES, D’AFFAIRES OU PERSONNELLES, LORSQU’ON GÉNÉRALISE. C’EST PRIMORDIAL D’EN TENIR COMPTE ! »

Selon Luc Maurice, outre les amalgames, un deuxième sujet entre en ligne de compte dans un désir d’assurer le mieux-vieillir de la population : le manque d’analyse des informations, les réactions ou prises de décisions basées sur des anecdotes et la gestion par crise.

« Tant dans les organisations qu’au gouvernement, on a tendance à gérer les problématiques lorsque survient une crise. On réagit au lieu d’agir en amont. Ce manque de planification et de rigueur est à mon avis très problématique et nous incite trop souvent à mettre l’emphase sur la politique ou la règlementation, plutôt que sur l’efficacité et le niveau de satisfaction. »

QUEL AVENIR RÉSERVE-T-ON À L’HÉBERGEMENT POUR PERSONNES ÂGÉES ?

Lorsqu’on aborde le sujet de l’avenir des RPA, Luc Maurice affirme que des distinctions s’imposent. « Les RPA représentent UNE des solutions en matière d’hébergement pour les personnes plus âgées. Elles ne conviennent pas à tout le monde. Voilà pourquoi il est important d’œuvrer à ce que les aînés aient le choix, beaucoup plus de choix ! »

Le public commence à peine, depuis deux ans, à comprendre et à faire la nuance entre une RPA de type appartements-services, une RPA soins, une RPA de type chambre et pension, une RI et un CHSLD. On a encore pas mal de chemin à faire pour mieux guider la clientèle vers le produit qui lui convient le mieux, sans oublier les très importants soins à domicile. En effet, ceux-ci qui pourraient être tellement plus complémentaires aux RPA. Il faudrait d’abord qu’il y ait suffisamment d’offres de service avant de parler de choix !

« J’entends souvent des personnes me dire “j’aimerais bien aller vivre en résidence, mais je n’en ai pas les moyens.” Le gouvernement ou la société est, à juste titre, responsable d’aider les gens malades, peu importe leur âge, leur statut social ou leur niveau de revenus. Toutefois, je désire être entendu ici : le gouvernement n’est pas responsable de s’assurer à ce que tous puissent vivre, un jour ou l’autre, en résidence », souligne monsieur Maurice.

Pour ce faire, il nous faut investir davantage dans les soins et les services de maintien à domicile et également dans les RPA soins, dans les RI et dans les CHSLD. Par ailleurs, si le secteur des RPA ne fait pas partie intégrante de la solution, nous n’y arriverons jamais, car le secteur public, à lui seul, ne pourra faire face au tsunami démographique qui nous attend.

« LES RPA REPRÉSENTENT UNE DES SOLUTIONS EN MATIÈRE D’HÉBERGEMENT POUR LES PERSONNES PLUS ÂGÉES. ELLES NE CONVIENNENT PAS À TOUT LE MONDE. VOILÀ POURQUOI IL EST IMPORTANT D’ŒUVRER À CE QUE LES AÎNÉS AIENT LE CHOIX, BEAUCOUP PLUS DE CHOIX ! »

Aux yeux de Luc Maurice, voilà une autre épine dans le pied pour la pérennité des RPA. Il est urgent d’adapter les règlements aux différentes offres d’hébergement. Une RPA, qui dessert des personnes autonomes ou en légère perte d’autonomie, ne peut être soumise aux mêmes règles, imposées par le ministère de la Santé, qu’une RPA soins ou une RI. Une complicité et une complémentarité seraient davantage souhaitées entre le ministère de la Santé et les propriétaires de RPA. Le secteur privé peut mieux satisfaire une clientèle en légère perte d’autonomie, surtout si celle-ci peut mieux profiter de soins à domicile, offerts soit par le privé, soit par le public.

« Comme dit l’adage “qui étreint trop, embrasse mal”, surtout en période de manque de main-d’œuvre et de ressources financières. Nous devons être efficaces et mettre collectivement toutes nos forces sur la satisfaction de la clientèle », ajoute le président fondateur du Groupe Maurice.

Luc Maurice - Président et Fondateur du GROUPE MAURICE

Luc Maurice - Président et Fondateur du GROUPE MAURICE

UNE QUESTION DE PERSONNEL

Nous savons depuis l’an 2000 que nous manquerons de main-d’œuvre dans les années à venir et rien n’a été fait pour remédier à la situation. Aujourd’hui, malheureusement, nous en payons le prix. Luc Maurice voit en l’immigration une solution extraordinaire pour résoudre la problématique, pourvu que l’intégration des nouveaux arrivants se fasse dans les règles de l’art. La venue de personnes provenant de pays où, à l’inverse, il y a une pénurie de travail, viendrait non seulement augmenter la main-d’œuvre, mais elle enrichirait les villes (particulièrement en région), tant culturellement, socialement que financièrement.

« En résidence, j’inviterais le gouvernement à être très prudent lorsqu’il est question de bonifier les exigences de qualification, de formation et de personnel minimal en résidence. Il faut être réaliste : dans un contexte de rareté de personnel, nous devons faire preuve de souplesse si nous désirons attirer des talents potentiels, et surtout, qu’ils restent avec nous longtemps. Une formation en continu sur place pourrait très bien compenser ces besoins », souligne Luc Maurice.

LE RÔLE DU GOUVERNEMENT ET LES ENJEUX QUI NOUS ATTENDENT

La société, la clientèle et notre secteur changent à la vitesse grand V. Personne n’est prêt à faire face à la réalité du vieillissement de la population. Pourtant, il est minuit moins une.

Selon Luc Maurice, l’État doit assurer les soins de santé, offrir plus de moyens financiers aux gens en perte d’autonomie, augmenter les soins à domicile, le nombre de places en RPA soins, en RI et en CHSLD. Pour y arriver, on aurait intérêt à mettre en place les conditions règlementaires gagnantes pour soutenir le secteur privé, plus agile, rapide, moins coûteux et, surtout, plus apte à offrir des choix à la clientèle plus âgée du Québec.

Il serait aussi important de mettre en place un comité de concertation qui pourrait assurer une standardisation des pratiques et des règlements à travers tout le Québec. Cela permettrait, en outre, aux acteurs locaux d’en appeler de l’interprétation des CISSS et des CIUSSS face aux règlementations en place. Il est temps que les spécialistes, les joueurs privés et les gouvernements travaillent en étroite collaboration si nous voulons assurer un vieillissement humain et heureux.

Si nous remédions à la pénurie de main-d’œuvre, que nous apportons des changements dans la règlementation imposée aux RPA et que nous revoyons le modèle d’affaires des petites résidences pour leur permettre de mieux servir leur clientèle, nous assurerons la pérennité et la croissance de notre secteur. « Parce que, croyez-moi, des RPA de toutes sortes, il en faut, et il en faudra bientôt beaucoup, beaucoup plus que cela », conclut monsieur Maurice.

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