Première Pluie magazine N°9

Page 1

Ben plg

Neige

Mirabelle

Première Pluie

Pluie

maGazINe

Numéro 9 Printemps 2024
Gratuit
Kay The Prodigy Kaoutar Harchi Jeux & Horoscope

BEN PLG

OURS ÉDITO ICVQ BD C’EST PAS TENDANCE C’EST FASHION LES CHIENSÉCRASÉS

BEN PLG SPORTS D’HIER

DIMANCHE SOIR GOUTTE À GOUTTE GOUTTE À GOUTTE

C’EST ÀSTREAMER PRÈS DE CHEZ VOUS LA BANQUETTE LA BANQUETTE

ICVQ SPORTS D’HIER KAOUTAR HARCHI KAOUTAR HARCHI DIMANCHE SOIR

EN MARGE SÉRIE PHOTO

MIAMMIAMIA JEUX

HOROSCOPE

REMERCIEMENTS & CONTACT

SÉRIE PHOTO KAY THE PRODIGY

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 39 40
SOMMAIRE
3

Les années commencent souvent au sprint, comme si l’univers avait des résolutions. Puis le temps passe et l’année trouve ses marques. L’actualité fait couler son lot de sang, et l’encre suit le mouvement. C’est un ballet, fait de rituels et de déceptions mutuelles, de rendezvous avec la morosité et d’excitations parallèles, d’habitudes du désespoir et de joies de poche.

Y aura-t-il de la neige à Noël? Et du soleil pendant les vacances? Aura-t-on le temps de dire au revoir? Tu veux faire quoi ce soir? Y aura-t-il des fruits sur les arbres? Et des champignons dans les forêts? Est-ce qu’il y aura des forêts tout court ? Y aura-t-il encore des gens? Est-ce que les arbres poussent bien dans

les cratères? Quand s’arrête la paix et quand commence la guerre? Quand est-ce qu’on invente la planète gonflable pour quand la nôtre aura cessé de nous supporter? Est-ce que les animaux ont honte de nous? Jusqu’à quand? Est-ce que c’est tout de suite ou dans cent ans?

Les débuts d’année ressemblent aux questions de l’enfance. Comme si la naïveté pure fleurissait uniquement au mois de janvier et dans les premières années de la vie. Le reste du temps, on cherche des réponses. Des réponses absurdes ou poétiques, cliniques ou évasives. Des réponses d’occasion, ou des réponses sur-mesure. Ces réponses et leurs façons de nous parvenir engendrent nos révolutions annuelles, les batailles de la fin de l’hiver et nos espoirs au printemps.

Comme chaque année, les beaux jours reviennent, et dans ce magazine, il ne faudra pas oublier de dire je t’aime, avec BEN plg. On interrogera les révolutions possibles de la Littérature avec Kaoutar Harchi. On se demandera jusqu’à quand on skiera dans les Vosges, et comment on fait l’eau de vie. On admirera la danse secrète des végétaux, tout en nous préparant à recevoir pour un an des cartes postales de Kay The Prodigy. Ne vous découvrez pas d’un fil mais dévoilez vous vraiment, devant ce magazine numéro 9.

ÉD ITO 4

Pluie

Première

par

édité

est

magazine

Ce

58.14Z

:

APE

-

00014

252

432

844

:

Siret

premierepluie.com

Nancy

000

54

Saint-Michel,

Rue

16

06.10.67.12.90

:

Téléphone

premierepluiecollectif@gmail.com

:

E-mail

:

sociaux

Réseaux

@premierepluie

/

Insta

@Premiere_Pluie

/

Twitter

@premierepluie

/

Facebook

Guillaumot

Arthur

:

publication

la

de

Directeur

Thomassin

Joshua

Guillaumot,

Arthur

:

chef

en

Rédacteurs

Diego

@clara_riff,

/

Riff

Clara

ot,

Guillaum

Arthur

@adeledums,

/

Dumas

Adèle

:

rédaction

de

@gioria_ndengue

/

Ndengue

Gioria

Sarah

ier,

Bouv

Romain

Thomassin,

Joshua

@prodigykay,

/

Prodigy

Comité

The

Zébina, Kay

Valentine

@mathjilde_,

/

Petit

e

Mathild

@diegozebina,

/

Zébina

Diego

:

Artistique

Direction

@nonotuto

/

Dessalle

Noélie

Petit,

hilde

Mat

Aouragh,

Hugo

Zébina,

Diego

Poulet,

@_enorette,

/

Bouchez

Enora

@egreume,

/

é

Morl

Clément

@camille.scali,

/

Scali

it

Pet

Poulet /

@vaalentine.poulet

Valentine

:

Graphisme

Camille

:

Illustrations

Mathilde

@mariannetricot,

/

Tricot

Marianne

zet,

@mathilde.vi

/

Vizet

Mathilde

@kumoonna,

/

Lucile Ourvouai

@shauneseys

/

neseys

Shau

@le.roms,

/

Vadala

Romain

Zébina,

Diego

:

Photographies

@egreume

/

Morlé

Clément

:

Couverture

(54)

d’impression

Nancéienne

la

par

Imprimé

BUSINESS

SERIF,

NOTO

MENLO,

AZO,

FT88,

MIGRA,

AGRANDIR,

GOTHAM,

ECKMANNPSYCH,

:

Fonts

00

MONO,

SANS

NOTO

I,

SATOSH

BAGERICH,

UNBOUNDED,

50,

REDACTION

ROSEVA, SUPERCLARENDON,

NEW

GOODDOG

S,

SAN

PANGRAM

EXTENDED,

MONUMENT

GURMUKHI,

TIRO

FLECE,

HISTORY,

magazine

du

sortie

la

à

effectué

légal

Dépôt

d’exemplaires

plusieurs

à

milliers 5

UO RS
Tiré
Photos
par Diego Z. Colorimétrie par Valentine 6 P.

CLAIRE MOHANT

Fleur parmi les fleurs du Jardin botanique de Nancy, voilà comment pourrait être décrite Claire Mohant dont je vous parle aujourd’hui. Un intérêt majeur pour la botanique, un goût prononcé pour la génétique, un parcours scolaire très brillant sur les bancs de la faculté de Sciences, voilà quelles sont les roses du bouquet de sa vie, débutée en 1851 à Nancy.

La ville est depuis longtemps une cité horticole et un haut lieu de la botanique, très prisée par la bourgeoisie locale. Dès 1756, un jardin botanique est installé rue Sainte-Catherine à l’initiative du duc Stanislas. Lorsque la Société Centrale d’Horticulture de Nancy est fondée en 1877, le secrétariat est confié à… Émile Gallé. En somme, pour y voir plus clair entre les fougères, la botanique à Nancy relie bon nombre de protagonistes qui ont marqué l’histoire de la ville qui a pour emblème le chardon, de Stanislas à Émile Gallé, en passant par Claire Mohant.

Son principal axe de recherche porte sur les formes fractales végétales,

ICI VÉCU

dont elle est la première à faire la description. Un résumé effeuillé de la notion pourrait être le suivant: la façon dont la nature épouse des formes géométriques, et les raisons derrière cette mathématique improbable. Quoi de plus évident pour cette fille de mathématicien, lui-même professeur à la faculté de Sciences ?

Les fleurs et ses formes suscitant la fascination de Claire Mohant ont aussi fait naître une inspiration certaine chez les artistes du mouvement de l’École de Nancy, en vogue à l’époque. Avec les porteétendards de l’Art Nouveau, les travaux de Claire Mohant sur les formes fractales végétales dépassent largement le cercle de la puissante Société Centrale d’Horticulture. Une grande amitié fleurit notamment avec Émile Gallé, fondateur du mouvement. Avec ces éléments, il est utile de se demander comment son nom a pu être effacé avec le temps, et pas célébré comme ceux de ses contemporains masculins.

Texte par Adèle Dumas Illustration par Camille Scali Graphisme par Valentine Poulet
ICVQ
7
Lucile Ourvouai | @kumoonna

C’EST PAS TENDANCE C’EST FASHION

LE NAIL ART

LONGTEMPS CANTONNÉ À PARIS HILTON ET À LA KITSCHITUDE DES GOOD MOM AMÉRICAINES, LE NAIL ART FAIT SON GRAND RETOUR DEPUIS QUELQUES ANNÉES À COUP DE CAPSULES, DE GEL ET DE STRASS.

L’art de peindre sur les ongles remonterait à l’Égypte antique. La découverte de momies datant de 5000 avant J.-C., aux bouts des doigts teints d’or et de henné, a permis aux archéologues de retracer les origines les plus lointaines de cette pratique. Mais c’est à la Chine ancienne (à partir de 3000 av. J.-C.) qu’on attribue les prémices du vernis à ongles: un mélange de blanc d’œuf et de gélatine, coloré de pigments de fleurs. Du rose impatiens, du mauve orchidée; ces mains délicatement manucurées sont alors considérées comme un symbole de richesse.

En 1932, Revlon commercialise le premier vernisàonglesentantqueproduitcosmétique! Du rouge classique à la «French manucure», la sobriété reste de mise sur les ongles des femmes durant plusieurs générations. Ce sont les femmes afro-américaines des années 1980 qui feront de cette pratique, un brin classique, un véritable art, un moyen

d’exprimer sa personnalité et d’affirmer son style. La scène danse, hip-hop et rap new-yorkaise, portée par Missy Elliott ou Lil Kim, impose sa féminité en arborant des ongles bling à l’extrême. Des centimètres d’acrylique ornés de motifs et grigris singuliers, de véritables œuvres miniatures, sans doute trop audacieuses pour l’américaine conservatrice. En 1988, la sprinteuse Florence Griffith Joyner participe aux J.O. les ongles audacieusement manucurés. Son originalité lui vaudra des critiques acerbes: c’est vulgaire, incorrect, digne des strip-teaseuses des bars miteux d’Harlem.

Pourtant cette mise en lumière mondiale contribuera à la popularité des ongles fantaisie. Les jeunes filles du monde entier s’empareront de cette mode ludique et créative.

30 ans plus tard, force est de constater que le nail art s’est finalement imposé dans le monde élitiste de la Haute beauté. Des «Glazed Nails» propulsés par Hailey Bieber aux ongles chromés chéris par Instagram, autant de tendances qui inondent les runways et instituts les plus en vogue. Les nail artist sont désormais considérés comme des créateur•rices. La manucure s’est imposée comme une forme d’art. Toutes les audaces sont permises. Il vous faudra juste trouver quelqu’un pour faire votre vaisselle!

Texte par Clara Riff Graphisme par Valentine Poulet
9

LES CHIENS ÉCRASÉS

Le magazine est gratuit, mais on balance des faits-divers pour vendre plus de papier. Les chiens écrasés, dans la presse traditionnelle, c’est ça. Ici, 3 histoires sont vraies et 1 est fausse. Saurez-vous la retrouver?

HEUREUX ACCIDENT

Début décembre, un couple de meusien·nes s’est rendu à la maternité de Nancy en raison des contractions qui touchaient la future maman. Visiblement, ils ont pris la route un peu trop tard, puisque l’accouchement a eu lieu à quelques centaines de mètres du centre hospitalier, sur le siège de la voiture. Quelques minutes après l’heureux évènement, leur véhicule est entré en collision avec un camion, sans blesser personne. Les émotions.

MALLEHEUR

Tout est réuni pour faire un parfait thriller. Juste avant Noël, le 21 décembre dernier, les pompiers intervenaient à Gondrexange, un village de 500 habitant•es, en Moselle. Ils ont été appelés parce que de la fumée se dégageait d’une habitation. Mais rapidement, alertés par une odeur intense de putréfaction, ils font une découverte macabre dans une malle métallique: un cadavre en état de décomposition avancée. L’autopsie révélera que le corps était celui d’un jeune homme, décédé d’une mort violente et non accidentelle. Pour le moment, l’enquête et l’interrogatoire des habitant•es de la maison n’ont rien donné.

Alain Simonin, le père Noël venu de Gérardmer était heureux de repartir en Chine, à Chengdu, dans le centre du pays, après quatre années sans endosser son costume à cause du Covid. Là bas, le père est une star, et gagne près de 10 000 euros par mois. Malheureusement, il a glissé sur une plaque de vomi gelée le jour de Noël et s’est cassé le bras. C’est pour ça que d’habitude il passe par la cheminée.

SECONDE MAIN

Drôle et bonne surprise pour une jeune habitante de Metz, qui avait acheté une veste sur Vinted. Dans une poche intérieure, elle a trouvé une carte au trésor. Un plan contenant des instructions et des coordonnées satellites. Comme elle n’était qu’à une centaine de kilomètres, elle a décidé d’aller y voir de plus près pendant un de ses jours de congés, avec son compagnon. En creusant au point indiqué, dans un verger isolé, le couple a mis à jour un coffre contenant plusieurs billets de 500 euros, et des bijoux. Elle a voulu contacter la vendeuse de la veste, mais son pro昀椀l n’était plus actif…

Graphisme par Valentine Poulet
10

Ben T’aime

Après plus d’une dizaine d’années de rap et tout autant de projets, BEN plg a sorti son premier album le 26 janvier. Une décennie passée comme une vaste enquête des sentiments éprouvés pour le Nordiste qui a longtemps fait ses armes à Metz avec les beatmakers Martin Murer et Cadillac. Un premier album placé sous l’égide d’un mantra, comme un post-it sur le frigo ou un tatouage sous la peau : Dire je t’aime.

Maintenant que tu as fait cet album, pourquoi est-ce que c’est si compliqué de dire je t’aime ?

Je pense que je le savais avant. Mais j’en apprends un peu plus tous les jours. J’y ai forcément beaucoup pensé. Cet album traite des regrets qu’on peut avoir quand on ne l’a pas dit. Je suis là-dedans.

Je me rends compte qu’il y a plein de moments où j'aurais pu le dire. Mais il y a une grosse distance entre avoir envie de le dire et le dire vraiment. J’avais envie d'insister sur cet espace fascinant.

Tu as capté quand le dire maintenant ? Je pense que ça sera toujours une bataille. Le titre ne doit pas être vu comme un impératif. Je ne veux pas dire aux gens de se dire je t’aime. Je me rends compte moi-même que j’ai plein de pudeur. Dire je t’aime c’est très dur, le plus important c’est de penser les uns aux autres.

Oui, dire je t’aime c’est bien, le ressentir c’est mieux !

Oui, totalement. Tu vois, moi, j’arrive mieux à le montrer qu’à le dire.

Une sorte de love language ? J’ai l’impression que tout ce qui a accompagné la sortie de l’album, autour de la cuisine notamment, c’est une forme de love language aussi. J’aime bien faire à manger pour les gens que j’aime. D’une manière générale, je suis le genre de mec qui pense beaucoup aux gens qu’il aime. J’envoie des messages sortis de nulle part pour qu’on se capte.

« On passe une bonne partie de sa vie d’adulte à comprendre ce qu’on a vécu enfant »

Autour de l’amour et de la musique, il y aussi l’idée d’un langage pudique, est-ce que cet album est une façon de rattraper des cris d’amour ?

Ma musique revient beaucoup sur des émotions que j’ai ressenties avant. On passe une bonne partie de sa vie d’adulte à comprendre ce qu’on a vécu enfant. Donc forcément oui, même si ce n’est pas conscient.

Sur ce premier album, il y avait aussi l’idée de doter ton personnage de anti-héros d’une quête, c’était une forme de fil ?

Je me suis longtemps posé la question. Je ne voulais pas faire un album concept, c’est certain. Ni un album à thème. Pour moi ce n’en est pas vraiment un. Il s’appelle Dire je t’aime parce que je trouve que ça correspond bien à la période et à ce qu’il y a autour du projet, mais il y a des chansons qui ne sont pas dans cet axe.

« La cohérence de mon projet, c’est la sincérité dans l’écriture »

Je disais ça plutôt dans le sens des énergies collectives qui traversent ce disque. Ma manière de travailler, c’est de comprendre au mieux qui je suis au moment où je fais de la musique. Je fais plein de morceaux, et ensuite je vois ce que ça raconte et s’il y a un fil rouge. C’était une problématique importante de ma vie au moment où j’ai fait cet album. C’est celle qui résume le mieux ces chansons et mon état d’esprit. Ce qui a créé de la cohérence dans le projet, c’est le fait d’être sincère dans l’écriture. Comme je suis sincère dans ce que je raconte, et que j’essaie de comprendre qui je suis et ce que je vis, indirectement, il y a un fil rouge, parce que je suis la même personne.

12

Tu as été surpris par ce qui émergeait ?

Oui, carrément. En ce moment, je prépare la tournée, donc je reviens sur mes textes. Je les vois autrement, je suis presque en train de les analyser. C’est marrant, je redécouvre ce que j’ai écrit. Parfois, j’arrive à me positionner comme si j’étais spectateur de moi-même.

C’est une question d’incarnation aussi ?

Oui aussi. Mais tu vois, quand j’écoutais mon album, avant qu’il sorte, je devais me détacher du fait que c’était moi. Mais du coup si ça me provoque une émotion, alors que c’est moi qui l’ai écrit, c’est que ça devrait marcher sur les gens.

Avec le temps, tu as installé des rendezvous récurrents avec un public qui a grossi progressivement, la scène c’est une façon de mesurer les caps ?

Oui, et c’est là que j’ai de la chance. Ce qui compte, c’est que la musique soit vivante, qu’elle tourne. Les auditeurs mensuels ne font pas le bonheur. Je peux faire une tournée en France, il y aura du monde dans toutes les villes, c’est tout ce qui compte.

« C’est comme si la map venait de s’élargir »

Tu es du genre à parfois avoir envie de modifier un morceau déjà sorti, pour un mot, une rime, un verbe ?

Non, je suis en paix. Une fois que c’est sorti, c’est sorti. Tu peux changer jusqu’à ce que ça sorte, mais après c’est fini. Tu sais, les imperfections ça fait partie de la musique. Je suis attaché à l’idée qu’une fois que le morceau existe, il ne m’appartient plus. Je chante le morceau, mais il appartient à des gens qui s’en emparent comme ils veulent. Je sais qu’il y a des gens qui voient ma musique comme un exutoire. Ils aiment que je crie. Il y a des gens qui préfèrent la mélancolie. D’autres qui sont plus dans l’énergie. Parfois, je croise des gens qui n’ont pas compris un morceau. Il y a des gens qui aiment ma musique pour un truc que je ne ressens pas quand j’écris. Si ça leur fait du bien, moi ça me va.

Quand tu as des accomplissements comme le morceau 10h du mat’ avec Sofiane Pamart et Niro, tu te dis que tu peux mourir en paix, ou qu’il faut faire mieux encore ?

Ce genre d’accomplissement donne juste envie d’en voir d’autres exister. Pour moi, il y a des signes qui ne trompent pas. Il y a des moments où l’univers te félicite un peu. Niro, ça s’est fait parce que c’est devenu logique, malgré le fait que ça soit mon rappeur préféré de quand j’avais 16-18 ans. C’est une connexion humaine. Il y a 5 ans j’ai fait un morceau où je l’évoquais. Il l’avait partagé, c’était une validation. Il y a un an, il m’a invité à son Zénith de Paris, comme ça. On a continué d’échanger, et au bout d’un moment, ça a été logique que je lui propose le morceau. Niro est rare, il n’apparaît pas n’importe où. On a fait un vrai morceau, sur lequel il se passe quelque chose. Je suis très content, mais une fois que je suis là, il y a d’autres rêves à aller chercher. C’est comme si la map venait de s’élargir. Ça donne envie de voir la suite !

Tu fais de la musique pour faire, ou pour dire quoi ?

Je ne fais pas de la musique pour être meilleur que les autres. Je ne suis pas en guerre. Je veux juste faire la meilleure musique possible, et être l’artiste le plus intéressant possible. La meilleure des récompenses avec cet album, c’est que les gens comprennent que je suis un artiste intéressant. C’est ça qui me permet de me sentir légitime. Je me sens utile. À partir du moment où tu chantes ta chanson et que ça rend des gens heureux, qu’est-ce que tu veux de plus en fait ? J’ai l’impression de remplir mon utilité sur terre.

La sortie de Dire je t’aime, ça marque quoi dans ton parcours ?

Je passe des caps, je suis le plus heureux. Je découvre de nouvelles émotions, et surtout, je peux envisager l’avenir sereinement, et ça, c’est un truc de fou. Il y a une phrase que j’ai pas gardée sur l’album, qui disait “ Tout a changé depuis que je peux partir sans réfléchir deux semaines en août ”. C’est quand même une dinguerie, à l’ancienne c’était pas le cas.

« Grandir arrosés par l'averse, pour ça qu'on sait danser sous la tempêtе. »

dans Le goût du sel, sur Dire je t’aime

graphisme : Valentine Poulet

interview : Arthur Guillaumot

photographie : Brice Mesnard

14

Ilyaplusieurschosesqu’ons’attendàretrouverquandonpart enviréedanslesVosges,sibienqu’onlesprendpouracquis.Des gens qui portent des vestes en jean. Des bonbons au sapin. Des autocollants qui voient la vie en Vosges sur les voitures. De la liqueur au sapin… et aussi de la neige à la pelle. Sur les sapins des massifs les plus hauts. Sous les skis des touristes venus de par le monde pour se mesurer à la raideur des tire-fesses. Mais pourcombiendetempsencore?

Ilfaitchaud,non

?

Ici,commepartoutailleurssaufdansleschuchotementsdeceuxquin’ycroient pas et complotent au marché de Saint-Dié, le dérèglement climatique fait son beurre.DanslesHautesVosges,lestempératurespourraientaugmenterde1,2°C à1,9°Cà900mètresd’altituded’icià2041-2060.Lesprécipitationsneigeuses relativesdevraientquantàellesbaisserde22à31%surlamêmepériode. En2023,larégionGrandEstacommandéauprèsdeMétéoFranceuneétude complète sur l’évolution de l’enneigement et des conditions climatiques, dans uncontexteoùlapérennitédesactivitésdesportsd’hiverestremiseencause danslarégion.Cettesaison,l’ouverturedespistesàGérardmeretautresstations vosgiennesontétéreportéesauxpremièreschutesdeneige,quiontdûpourla plupart faire une croix sur le mois de décembre. Si les canons connaissent la recettedelaneigearti昀椀cielledepuisdesannées,ilfautqu’ilfassesu昀케samment froidpourqueçatienne,commel’expliquaitStessySpeissmann-Mozas,mairede Gérardmer,pourFrance3:“Au-dessusdezéro,laneigearti昀椀ciellenetientpas”.

Fabriquerdelaneige,çademandebeaucoupdepognon,maisaussibeaucoup d’eau.Lesstationspeuventopterpourcetteoptionencomplémentdechutesde neigenaturelles,maisrestentfortementdépendantesdesconditionsclimatiques. Le rapport de Météo France destiné à dégager les tendances d’enneigement dans les Vosges pour le futur est très clair : l’augmentation des températures vameneràunebaissedeladuréedessaisonshivernales.Troisscénariosont

15

été dégagés dans le cadre de cette étude : le premier (RCP2.6) entrevoit une augmentation des émissions de CO₂ jusqu’en 2030 et une baisse jusqu’à la 昀椀n dusiècle,enaccordaveclesaccordsdelaCOP21.Ledeuxième(RCP4.5)table suruneaugmentationdesémissionsjusqu’en2050,suivid’unebaissepuisd’une stagnation à partir de 2080. Le troisième et dernier modèle (RCP8.5) s’aligne quantàluisuruneaugmentationcontinuedesémissionsjusqu’en昀椀ndesiècle.

En prenant comme point de comparaison la période 1986-2005, la période d’enneigement (+ de 5cm de neige) à 900 et 1200 mètres va baisser tout au

Expérience2021-20402041-20602081-2100

RCP2.6 -11jours-17jours-18jours

RCP4.5 -14jours-22jours-32jours

RCP8.5 -14jours-34jours -63jours

Médiancedunombredejoursd’avancedeladatede昀椀ndel’enneigement(seuil5cmdehauteurdeneige) parrapportàlapériodehistorique1986-2005. TerritoiredesHautes-Vosgesà1200m

longdusiècle.D’unedizaineàunevingtainedejoursenprenantencomptele meilleur des scénarios, d’une quinzaine à une soixantaine de jours en suivant lepired’entreeux(encequiconcernelesaltitudesautourde1200mètres).

En plus d’une augmentation globale des températures, les stations de sports d’hiverdesVosgesvontsubirunresserrementprogressifdespériodeshivernales. Cela impactera directement l’économie du secteur, avec des 昀氀ux de touristes plusconcentrésetpotentiellementdi昀케cilesàgérerpourleparchôtelier,mais aussisurlechi昀昀red’a昀昀airesdetoutel’activité.Dansl’exercicedelasaison20212022,lessitesnordiquesdesHautes-Vosgesontgénéré293000€1 autotal.Un poids économique important en soi, mais qui a aussi un impact sur l’état de santédel’hôtellerie,delarestauration,descommerces,ouencoredesactivités touristiques connexes de la région. L’emploi saisonnier risque lui aussi d’être impactéparcesmutations.“Iln’yaplusdesaisons”.

Déniécono-climatique?

La Cour des comptes a publié un rapport accablant le 6 février dernier. Elle y déplore la prise en compte insu昀케sante de la baisse d’activité attendue par les collectivités territoriales et les stations. Celle de Font-Romeu2 s’est par exempleengagéedansunpland’a昀昀airesétablijusqu’en2047reposantsurune fréquentationstable.Dansuncontexteoùl’Étatetlescollectivitésterritoriales apportentprèsd’unquartduchi昀昀red’a昀昀aires,çanepassepas.

LacommunedeGérardmer,quiexploitelesinstallationsliéesauxsportsd’hiver depuis2008,estendettéeàhauteurde40millionsd’euros.Depuis2020,cesont 2à3millionsd’eurosquisontperdusdanslescoûtsdefonctionnementliésaux remontéesmécaniques.

L’utilisationdeneigearti昀椀cielleestbiensûrelleaussipointéedudoigtdansle rapport.Laproductiond’unhectaredepisteenneigepourlasaisonnécessite environ 4000 litres d’eau, soit une piscine olympique. Les épisodes de sécheressesefontdeplusenplusfréquents,quandlesépisodesneigeux

1 Incluantlesremontéesmécaniquesetlocationsd’équipements

2 Pyrénées-Orientales

16

sefontdeplusenplusrares.Dèslors,laproductiondeneigearti昀椀cielledevrait faire l’objet de réglementations sérieuses, a昀椀n - entre autres - de sécuriser la biodiversitédesespacesoùsontimplantéeslesstations,directementimpactés parlahaussedesrisquesd’incendies.

LesVosges,plutôtbonsélèves?

Commeailleurs,leskidanslesVosgesestensursis.Onnepeutpasprévoiravec exactitude jusqu’à quand les activités nordiques pourront s’y épanouir. Il faut penserlatransitionetàcepropos,larégionn’apastraîné.Sousl’impulsionde Jean-MarieRemy,fondateurvisionnairedelastationdeskideLaBresse,c’est dèsla昀椀ndesannées70quelarégioncommenceàsediversi昀椀er.Bienavantque les di昀케cultés liées à l’enneigement ne s’intensi昀椀ent ou que les préoccupations d’ordreécologiqueneprennentdel’ampleur.Ainsisedéveloppentleskisurl’herbe oulaluged’été.CommenouslerappelleYasmineList,responsablemarketing à l’O昀케ce de Tourisme de La Bresse Hautes Vosges : “La météo a toujours été trèscapricieusedanslarégion,etl’enneigementyestsouventassezaléatoire”. L’o昀昀reentermesd’activitésestivalesestplutôtbiendéveloppée,ettendàl’être de plus en plus à l’avenir. De nouveaux circuits de randonnées continuent de voirlejour,etcertainsprojetsporteursconsolidentlaplacedesVosgescomme destination 4 saisons. Le parc d’attractions Fraispertuis a accueilli 285 000 visiteurs en 2023, pendant que le parc Bol d’Air développait ses activités à sensationsethébergementsdestinésàvaloriserlecadremagni昀椀queo昀昀ertpar lesforêtsvosgiennes.

“IcidanslesVosges,nousn’avonspaslamêmeclientèlequedanslesAlpeset autresstationsdehautemontagne,oùl’onretrouveuntourismedemasseen termesdesportsd’hiver” ,plaideYasmineList,pourquilemanqued’enneigement danslesVosgesnegénèrepaslesmêmesfrustrationsqu’ailleurs.Latransition versuntourismetoujourspluspro-terreetsauvage,danslacontinuitédel’état d’esprit a昀케ché jusqu’à présent, semble très prometteuse. Le développement des o昀昀res spas, la mise en valeur des produits locaux ou la mise en place d’infrastructures pour le luxe. En ce qui concerne les activités nordiques, le développementdescircuitsdeskidefondestunepisteàétudier,celui-ciétant moinsgourmandenneige.

La décennie à venir va être déterminante dans l’étude des précipitations neigeusesdanslesHautesVosges,notammentsurladuréedespériodespropices auxactivitésdesportsd’hiver.Ellevamontrer,assezrapidement,lescapacités d’adaptationd’unterritoiretoutentier.Larégionadéjàbienentamésamutation, maisilluiresteencorebeaucoupàfaire.

LeskidanslesVosges,çadevraitdeveniràtermeunegrossecerisesurlegâteau, qu’onpratiqueseulementlesannéesoùlesconditionsmétéolepermettent.Les partisansduall-insurleskialpin-encoretrèsin昀氀uentsaujourd’hui-onttout faux.Cimenterlespistesdeneigearti昀椀ciellenereprésenteenrienunesolution, transporterdelaneigedecolsavoisinantparcamionnonplus.Ilestprimordial deresterenaccordaveclessaisonsetleurévolution. Et puis, peut-être que dans quelques centaines d’années, on pourra surfer à Saint-Dié?

17

KAOUTAR HARCHI COMME NOUS ÉCRIVONS

texte par arthur guillaumot | graphisme par mathilde petit Kaoutar Harchi est écrivaine et sociologue, elle est née à Strasbourg en 1987. D’abord auteure de 昀椀ctions, elle fait ses adieux au genre au milieu des années 2010, pour s’intéresser à la littérature et à sa sociologie.ProchedeRévolution Permanente, elle se positionne sur de nombreuses questions, comme la souffrance animale, l’exclusion géographique, et les mécanismes de domination. En janvier dernier, les éditions Divergences ont publié son sixième livre, Littérature et Révolution, une grande discussionentreelleetl’écrivain Joseph Andras.

Zone cinglée, le premier roman de Kaoutar Harchi a été publié par Sarbacane en 2009 alors qu’elle n’avait que 22 ans. L’ampleur du saccage a suivi deux ans plus tard chez Actes Sud, avant À l’origine notre père obscur, chez le même éditeur en 2014. La même année, elle soutient à la Sorbonne Nouvelle une thèse dirigée par Bruno Péquignot et intitulée La formation de la croyance en la valeur littéraire en situation coloniale et postcoloniale, avec les exemples

de deux écrivains algériens de langue française: Kateb Yacine et Assia Djebar. En 2016, ce travail est devenu un essai publié chez Fayard Je n’ai qu’une langue et ce n’est pas la mienne, dans lequel elle ajoute les trajectoires de Kamel Daoud, Boualem Sansal et Rachid Boudjedra.

“Ce livre a été un formidable et heureux adieu à la littérature. Un adieu à l’idéologie romantique et libérale qui fonde la littérature. Ce regard sociologique sur la chose littéraire a tout bouleversé. Ça a affecté jusqu’à la composition du récit, et jusqu’à son totem absolu, qui est le personnage.” con昀椀e Kaoutar Harchi.

“J’abandonne le personnage au pro昀椀t des personnes.”

“J’étais une femme : il me fallait apporter un peu de douceur au texte. J’étais une Arabe : il me fallait apporter un peu de folklore. J’étais une 昀椀lle des quartiers populaires : je devais apporter un peu de mystère.” La rupture de Kaoutar Harchi avec le roman s’explique aussi par les jugements racistes, sexistes ou méprisants, qui pouvaient accompagner la réception de ses ouvrages. Une profonde lassitude d’être toujours renvoyée à elle-même. “À l’époque où j’écrivais des 昀椀ctions, je me sentais précédée par mon corps. Mon texte n’avait pas encore été lu mais il était possible que les lecteurs et les lectrices ainsi que l’ensemble des intermédiaires de la production de la valeur des livres aient des attentes.”

Toute citation sans précision est issue de Littérature et Révolution, paru aux Editions Divergences, en janvier 2024 18

Une véritable révolution dans son approche, qu’elle formule ainsi : “J’abandonnelepersonnage au pro昀椀t des personnes.” Pendant les années qui suivent cette rupture avec la 昀椀ction, elle enseigne à Sciences Po Paris et Reims, est professeure invitée à l’université de New York en 2019 puis à Paris 13. L’année 2021 est celle de la sortie de Comme nous existons, chez Actes Sud, un récit autobiographique, qui témoigne de cette rupture.

“Écrivaine est mon métier car écrire est mon action. Mon temps. Mon énergie. Mon ordre. Mon rythme.”

En parlant d’elle, Kaoutar Harchi a parlé de tout le monde et dressé une géographie des endroits sociaux d’où l’on écrit, et de ce que ceux-ci disent de ce que nous écrivons. La sociologie littéraire, c’est une cartographie de tout qui empêche. Dans Comme nous existons, c’est ce qui est prégnant : “Ça n’avait pas de valeur. Je veux dire : ce n’était pas de l’argent. Ça n’achetait rien, écrire. C’était inutile et, plus encore, c’était improductif.” On écrit tous d’un endroit. Kaoutar Harchi a grandi dans un milieu populaire, elle est la 昀椀lle d’une mère employée dans une maison de retraite et d’un père agent d’entretien, tous les deux d’origine marocaine. Elle retrace dans son récit autobiographique son rapport à la condition et à l’écriture. “Comment prendre le temps d’écrire quand Hania et Mohamed1, eux, manquaient de temps pour dormir, manger, se soigner ? Écrire pour écrire était haïssable. Mais écrire pour publier m’apparut d’un tout autre ordre. Cela ouvrait vers un dehors, offrait une issue, cela créait quelque chose. Un objet, un livre, que nous pouvions toucher de nos mains. Un objet réel, tangible, une marchandise déterminée par un prix 昀椀xe. Nous pouvions tous y gagner, j’imaginais.”

Aujourd’hui, peut-être en partie grâce au travail accompli avec Comme nous existons, Kaoutar Harchi aborde en paix son statut d’écrivaine. “Écrivaine est mon métier car écrire est mon action. Mon temps. Mon énergie. Mon ordre. Mon rythme.” martèle-t-elle. “Écrire est mon travail. Une sorte d’ouvriérisme des idées et des phrases et des pages.” Si écrire pour publier constitue une possibilité acceptable, il faut donc rester publiée. “Je voulais que ça dure. Que ma vie, dans cet espace-là, soit longue. Que j’aie, pour moi, le temps d’écrire et l’opportunité, toujours renouvelée, de voir mes livres publiés.” Pas forcément la partie la plus aisée de la tâche, surtout avec “l’impression que l’institution littéraire était une machine à exclure.”

“Je pense travailler pour la vérité et pour qu’elle atteigne sa plus haute réalisation, qui est la justice.”

“Quand j’écris, la colère, au départ, est là. Il arrive même que ce soit la colère qui me pousse à écrire. Mais dès l’instant où il me faut écrire, la colère cesse d’être en colère. Une forme d’espérance l’emporte.” explique Kaoutar Harchi. Ces dernières années, la voix de la sociologue a porté haut sur la centralisation française autour de Paris et sur la souffrance animale, dans le sillon de l’états-unienne Aph Ko notamment. Par ailleurs, Kaoutar Harchi s’est plusieurs fois déclarée proche du mouvement Révolution Permanente. Plus récemment, le génocide en cours en Palestine est au centre de ses écrits, et elle prend régulièrement la parole, sur X (Twitter). “Soutenez-vous la poursuite du génocide du peuple palestinien ou réclamezvous sa 昀椀n immédiate ? C’est à partir de cette seule question que toutes les autres questions politiques doivent être posées.” écrivait-elle le 30 janvier dernier.

“Je crois qu’en commençant à écrire, j’écris contre. Je ressens une adversité forte.” détaille Kaoutar Harchi, qui travaille à un objectif sociologique précis, qui illumine dans l’obscurité: “Je pense travailler pour la vérité et pour qu’elle atteigne sa plus haute réalisation, qui est la justice.” Pour autant, Kaoutar Harchi réfute l’étiquette de la littérature engagée. “Je suis gênée par l’idée d’engagement. Michel Houellebecq ou Sylvain Tesson, en écrivant les livres qu’ils écrivent, eux aussi s’engagent, eux aussi défendent une vision du monde. Il y a, livre après livre, des valeurs qui sont de plus en plus ardemment défendues. Des valeurs nationalistes, sexistes, réactionnaires, notamment. Mais d’eux, il ne sera pas dit qu’ils sont des écrivains engagés. Mais : des écrivains. Des écrivains tout court.”

Au 昀椀l de ses livres, Kaoutar Harchi trace une œuvre qui croise ouvertement la littérature et la politique, les deux étant liées par essence. En actant la 昀椀n de la 昀椀ction dans sa pratique, elle a ouvert la porte à une sociologie contemporaine, qui permet d’analyser les nouveaux mécanismes de lutte et d’oppression. Ses positions et sa voix sont essentielles pour prendre la mesure de nombreux enjeux contemporains.

1 Dans le récit Comme nous existons, Kaoutar Harchi appelle ses parents par leurs prénoms.

19

Les sapins traînent encore sur les trottoirs, les décorations de Noël personne ne les retire, c’est cette période de l’année. On se balade le dimanche pour oublier qu’on erre le reste de la semaine, du frigo des fringales de la nuit aux résolutions du bureau de l’ennui. Virgile n’aime pas ces jours vagues. Il doit à chaque fois revenir chez ses parents pour l’anniversaire de sa mère, début janvier. Entre les repas de Noël et ça, c’est deux fois en trop peu de temps. Deux fois des retours dans la maison de l’enfance, deux fois des plats trop appliqués pour le temps qu’on met à les dégommer, deux fois des discussions interminables sur l’avenir.

Virgile préfère repartir le dimanche soir quand c’est comme ça. Et sa mère accepte très bien les choses. — Comme ça je suis bien prêt le lundi. Virgile dit ça alors qu’il ne travaille pas, en昀椀n pas vraiment. Il est dans la communication. L’école était chère, normalement il devrait déjà gagner deux fois le salaire moyen. C’est ce que garantissait la plaquette des journées portesouvertes et c’est pour cette promesse imprimée sur papiermytho que ses parents avaient réglé la note, parce que dix ans plus tôt : — Ça semblait réglo.

Virgile repart le dimanche soir, plutôt que de taper une déprime dans son lit d’adolescent, à simuler une migraine dans l’obscurité, pour éviter l’overdose de bons sentiments familiaux et les glaces en promo devant un mauvais 昀椀lm sur une mauvaise chaîne. Quand il arrive dans la gare, il a ses repères, dans ce moment si particulier de la semaine. Aux bornes, il sait qu’il doit être patient quand les machines puent la torpeur. Il vaut mieuxvenirenavance,maislebillet s’imprime 昀椀nalement. Pourtant

ce dimanche soir, la machine sort des billets blancs, sans encre, cartonnés de vide. Ce soir tout le monde a un billet pour nulle part.

Ce qui explique l’odeur acide qui en昀氀e dans la gare, mélange de stress et de colère. Le pauvre agent de la petite station est bien seul face à la foule qui interroge. — Eh on ne va pas avoir une amende?!

— Sur l’appli, ça ne marche pas non plus! — On est débité quand même?! — C’est n’importe quoi comme d’habitude. Au bout d’un moment, après avoir tenté d’établir une connexion avec le néant, il monte sur un banc en ferraille et déclare: — Allez où vous voulez, en昀椀n, allez où vous devez aller. Il n’y a pas de contrôleurs ce soir, la panne est générale, les trains à quai du jour vont partir, la compagnie présente ses excuses.

Tous les derniers trains à quai, ça veut dire trois. Et encore c’est beaucoup, beaucoup comme un coup de chance. Chacun a une destination opposée aux deux autres. Pour Virgile, les dimanches soir sont déjà suf昀椀samment tendus pour devoir encore faire des choix radicaux. Au hasard, il monte dans lepremier.Pouresquiverlepassage par le tunnel qui mène aux quais des autres voies. À l’intérieur, une douce effervescence a gagné les passagers. Un petit imprévu dans la normalité trempée de janvier. Le train part, et rien ne semble différent de la vie habituelle.

Le train du dimanche soir regarde de loin, sans siffler, il glisse dans l’ombre, entre les maisons éclairées qui évacuent des souf昀氀es obscurs par leurs cheminées. Un train de bandits, qui sacri昀椀ent leur dimanche soir pour se faire oublier le lundi matin. Le train du dimanchesoirsemoqueduconfort des pavillons qu’il contourne, et

de la chaleur des foyers. Dans le train du dimanche soir, les gens s’habillent comme s’ils ont des choses à cacher, mais c’est un complice idéal, qui sait garder secrètes les larmes discrètes, et les armes sous le manteau.

Un homme regarde Virgile avec des yeux rieurs, et lui dit qu’il va profiter du désordre pour aller jusqu’à la capitale. — Ça leur apprendra! Les billets sont tellement chers d’habitude. Et vous, vous allez où? Virgile essaie de paraître sûr de lui, et annonce qu’il va rejoindre sa petite amie. Il fait mine de chercher une place pour esquiver la discussion. Entre deux wagons, une main se pose sur son épaule. — Eh Virgile, marrant de te voir ici, tu vas où? C’est un ancien camarade du lycée. À ce dernier, qui annonce pro昀椀ter de l’occasion pour rejoindre un ami rappeur, il sert une histoire invraisemblable, de rendez-vous qu’il vient d’improviser de l’autre côté de la France. — Il faut savoir écouter le destin, clame Virgile avec un ton digne des comptes motivation de TikTok.

En昀椀n, il trouve une rangée de sièges vides. Il pose son sac et peut en昀椀n regarder le spectacle du dimanche soir derrière la vitre. Virgile a eu le droit d’aller où il voulait, alors il est juste rentré chez lui.

21

plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc plic ploc

plic plic ploc ploc
22
plotch plotch plotch

Goutte que goutte

TEXTE : JOSH

PHOTOS : ROMAIN VADALA

GRAPHISME : MATHILDE PETIT GOUTTEQUEGOUTTE

En Lorraine, d’irréductibles villages se maintiennent au chaud en hiver.

La potion magique c’est l’eau de vie de mirabelle, ou gnôle, ou goutte, distillée dans de mystérieux alambics. On s’est rendus dans la Meuse, au Domaine de la Goulotte, où la famille Antoine nous a initié aux secrets de l’alcool emblématique de la région.

LA MIRABELLE

Un matin de février en Lorraine comme un autre, au cœur du brouillard, on arrive à Saint-Maurice-sous-lesCôtes, petit village de 350 âmes. C’est ici que réside la famille Antoine sur son domaine, où cohabitent vignes et vergers. Un fruit y concentre toutes les attentions : la mirabelle.

Le duc René II l’aurait implantée en Lorraine au XVe siècle, avant qu’elle devienne une spécialité locale et fierté de la région. En 1995, elle est le premier fruit à obtenir une IGP (Indication Géographique Protégée). C’est la naissance officielle de la Mirabelle de Lorraine. On la trouve en fruit de bouche ou séchée, en confiture ou en tarte, mais c’est l’eau de vie qui attire le plus de convoitises.

LA DISTILLATION

L’eau de vie de Mirabelle de Lorraine est soumise à une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée), ce qui implique des règles strictes pour sa distillation et sa commercialisation. Après la récolte,

la première étape est la fermentation des fruits. “La mirabelle c’est magique”, s’exclame Lucie Antoine, la benjamine de la famille. Le fruit est stocké en tonneaux après l’été et il fermente tout seul,sansajout.Lesmirabellesprennent l’air quelques secondes avant d’être versées par milliers dans un alambic en ébullition. Les vapeurs d’alcool créées sont refroidies pour reprendre leur état liquide sous la forme de “petites eaux”, fortes de 35° d’alcool. “C’est pas encore un alcool de qualité, il reste pas mal d’eau, d’où le nom”, précise-t-elle. Il faut donc une deuxième passe dans un alambic spécial, nommé raffin. “C’est à ce moment-là que le parfum de la mirabelle se met dans l’alcool”. Et l’on obtient l’eau de vie, toute transparente, autour des 65° d’alcool. Elle devra vieillir minimum 6 mois avant d’être commercialisée, à 45° d’alcool minimum, 73° max.

“Le cahier des charges est assez contraignant, il implique des contrôles qui sont coûteux”, note Lucie Antoine. Ces contraintes financières, obligatoires pour revendiquer l’appellation, freinent les producteur•ices, qui abandonnent l’AOC pour rester rentables. Lucie Antoine le comprend, même si elle

Un tonneau de 200L de fruits donnera environ 20L d’eau de vie.

PSSSSSSSSSSCHT blop blop blop blop
23

LES SŒURS ANTOINE, ÉLOÏSE & LUCIE

LES “PETITES EAUX”

regrettelasituation:“nos parents se sont battus pendant des années pour avoir l’AOC, et aujourd’hui elle est presque en train de mourir”. Au Domaine de la Goulotte, on continue le combat pour la préserver: “C’est important pour nous d’avoir «de Lorraine» sur l’étiquette, on en est fiers”, proclame-t-elle.

UN SECTEUR QUI SOUFFLE

Aujourd’hui, ils ne sont plus que 5 producteur•ices à partager cette fierté. Un chiffre historiquement bas, qui inquiète pour la survie du secteur. Lucie Antoine est peu optimiste concernant les solutions: “Ils essaient de rassembler l’IGP et l’AOC pour réduire les coûts administratifs, mais ça prend du temps”.

Le combat pour simplifier la réglementation touche à un problème plus profond, car la distillation en ellemême est un art qui se perd. “De moins en moins de clients viennent distiller chez nous, il n’y a plus que les papismamies qui en ont l’habitude”, confie Lucie Antoine. Elle observe aussi une baisse de la consommation, au

profit de la bière et du vin. La goutte se transforme en image d’Épinal, en un souvenir de l’ancien temps. Pour redynamiser le secteur, la loi Finances 2024 a été radicale: plus aucune taxe sur les 50 premiers litres d’alcool pur produits. Un premier pas pour inciter les jeunes producteurs à s’investir dans la distillation. Comme cela a été le cas ici, chez les Antoine. Les deux sœurs le revendiquent à l’unisson: “On s’était dit qu’on ne reprendrait pas l’exploitation et finalement, on est là, on est attachées à notre terre et à ce métier”.

Au domaine de la Goulotte, la défense de ce patrimoine gastronomique fait partie de l’âme de la production. Lucie Antoinen’imaginepassarégionsansson eau de vie: “la mirabelle et la Lorraine, c’est une grande histoire d’amour”. Il s’agit désormais de l’entretenir, comme pour toutes les relations, sans quoi le fruit perdra de sa saveur.

splash ARTICLE À RETROUVER EN VERSION LONGUE SUR WWW.PREMIEREPLUIE.COM cling cling
24

1 OPÉRA Kurt Weill

LELAC D’ ARGEN

Pluie 20€

mort mort exposition du 13 avril au 24 novembre 2024

Muséum-Aquarium de Nancy 4-20AVRIL 2024 DIRECTION M U S I CALE GAETANO LO COCO MISEENSCÈNE, SCÉNOGRAPHIE ERS A N MONDTAG
T Écharpe Première

NAÎTRE OU NE PAS NAÎTRE

Le 16 janvier, lors de la présentation de ses vœux pour l’année, Emmanuel Macron a appelé la France à un “réarmement démographique”. Un vocabulaire de maréchal pour relancer les naissances françaises, en berne.

Mais doit-on vraiment s’inquiéter de leur baisse ? N’est-il pas enfin temps d’arrêter de promouvoir la natalité ?

Les chi res de l’année 2023 ont de quoi choquer : moins de 700000 bébés sont nés en France cette année, une baisse de 6,6% par rapport à 2022, et de 20% par rapport à 2010. Notre solde naturel (di érence entre le nombre de naissances et de décès) est de 47000, soit le plus bas depuis 19571. Pile ce qu’il fallait pour réactiver les discours rances de la fin du XIXe siècle2 et alarmer les Français.

Mais si l’on arrêtait de voir la baisse de la natalité comme une tare ? Et si on la considérait plutôt comme un facteur favorable à notre progrès social ? La crainte majeure lorsque les naissances diminuent est d’ordre économique : moins d’enfants donc moins d’actifs donc moins de croissance et de cotisations sociales donc moins de retraites. Des frayeurs qui ne verraient le jour que dans une vingtaine d’années, le temps que les nouveaux-nés de 2023 soient

sur le marché du travail. D’ici là, il y a largement le temps de prévenir ces impacts, de remettre en cause la croissance comme priorité et de réinventer notre système de retraite.

Au contraire, à court terme, la baisse de la natalité apporte des e ets positifs dans plusieurs domaines. La diminution du nombre d’enfants par classe est ce qu’on peut souhaiter de mieux à un système éducatif en naufrage. Moins de naissances, c’est aussi plus de pouvoir d’achat pour les parents, moins de freins professionnels, moins d’enfants nondésirés. La formule est simple : moins il y a d’enfants, plus les parents et l’État peuvent prendre soin de chacun d’eux.

Il est peut-être là le but à atteindre: assurer les conditions pour que chaque enfant qui naisse puisse mener une vie digne, heureuse, et libre. La diminution de la natalité globale n’est pas dûe à l’infertilité, comme avancé par Macron, mais à l’obtention de droits majeurs pour les femmes : la contraception et l’avortement. Ne se joue-t-il pas alors dans cette baisse des naissances l’avancée vers une parentalité de plus en plus choisie, qui assure de plus en plus les conditions nécessaires à l’éducation d’un enfant ?

Pour aller plus loin :

La formule est simple : moins il y a d’enfants, plus les parents et l’État peuvent prendre soin de chacun d’eux.

La politique nataliste est par nature écocide. On ne peut nier les bienfaits écologiques d’une baisse globale de la population mondiale. De plus, les migrations inévitables liées à la catastrophe climatique en cours compenseront la diminution des naissances en France. En anticipant ces déplacements forcés, et donc en permettant un accueil et une intégration digne, nous ne serons pas un pays en mesure de nous plaindre de notre nombre d’actifs dans 20 ans.

Cette compensation, c’est à tout prix ce que veut éviter l’extrême droite. Le RN a che notamment dans son livret de propositions pour la famille : “Choisir l’immigration serait considérer que les êtres humains sont interchangeables. Faire le choix de la natalité, c’est s’engager à assurer la continuité de la nation et la perpétuation de notre civilisation”. Pour la deuxième fois en peu de temps, Macron marche sur leurs terres et applique leur programme.

La natalité ne doit pas être au service d’une idéologie. Plus jamais le corps des femmes ne doit être commandé par un projet politique. Plus jamais la parentalité ne doit être une évidence, elle doit être voulue et réfléchie. On pourrait être à l’aube d’un changement de cap. Choisir de ne plus privilégier la quantité de naissances à la qualité de l’accompagnement de chacune d’elles. Dommage, notre président, lui, est resté 150 ans en arrière.

Article en version longue à retrouver sur premierepluie.com

• Serons-nous submergés ?, Hervé le Bras, 2020.

• Le Choc démographique, Bruno Tertrais, 2020.

Texte par Josh Graphisme par Noélie Dessalle Photo par Diego Zébina
26
1 : Bilan démographique 2023 de l’INSEE 2 : politique nataliste menée pour organiser la reprise l’Alsace-Lorraine perdue aux Allemands Série photo
Photos par Diego Zébina Graphisme par Diego Zébina et Mathilde Petit

POSTALE N’1

Je suis Kay The Prodigy J’suis un rappeur avec une chatte. J’ai grandi à Strasbourg, où j’ai plein de souvenirs. Ce qui me vient en premier à l’esprit c’est la nourriture. Je pense encore à mes sorties d’école ou même le week-end avec les parents, quand on sortait manger c’était souvent alsacien et du coup quoi de mieux qu’une tarte flambée. Mais je pense aussi au paysage. Strasbourg est une vieille ville bien conservée qui jusqu'à aujourd'hui reste toujours agréable pour se balader. De plus, l'Alsace regorge de belles forêts pour de la randonnée.

“J’SUISUN RAPPEURAVEC UNECHATTE.”

Pendant les 3 mois qui viennent de s’écouler, comme à mon habitude, j’ai pratiqué la musique. C’est à dire soit j’en écoute, soit j’en fais, soit je vais la vivre lors de concerts.

À part Strasbourg, ces vacances de Noël je suis allée voir mon père à Mayotte. Deux semaines au soleil pendant que l’Europe se les gèle, je le conseille à tout le monde. Et j’ai aussi été en Belgique pour un séminaire d’une semaine. Pour ce qui est des 3 mois qui viennent, j’espère pratiquer encore plus de musique, et j’espère surtout voyager, en particulier à l’étranger et de préférence au soleil! Mais j’ai aussi envie de retourner plus à Strasbourg.

Je fais de la musique, j’espère aller le plus loin possible, prendre tout ce qu’il y a à prendre mais surtout beaucoup à apprendre. Je suis en constante recherche pour définir ce qu’est mon art, je souhaite exceller dans ma façon de le manier.

“LEFAITDE VOYAGERDONNE CETTEIMPRESSION QUELAVIESEMET ENPAUSE.”

Je ne sais pas pour les autres mais pour moi, il n’y a pas de lieu ou de moment idéal pour trouver l’inspiration. C’est tout le temps et partout, puisque c’est la vie qui m’inspire. Ça peut m’arriver lors d’une réunion, d’une discussion ou même à un événement où il y a énormément de monde. Je prends mon téléphone, et j’écris la barz qui m’inspire sur l’instant. Mais les moments où ça m’arrive le plus c’est quand je suis dans les transports.

Le fait de voyager donne cette impression que la vie se met en pause et qu’à ce moment-là, tu as toute la place du monde pour penser sans que quelque chose ou quelqu’un ne vienne interférer.

Dans le dernier rêve dont je me souviens, je me voyais des années plus tard, pétard à la main, dans la plus grande des paix, savourant les joies de la vieillesse dans une résidence secondaire à Kingston.

c’est à streamer près de chez vous

CITÉ MUSICALE

Metz (57)

15 mars - TRINITAIRES

Slimka - Mystico

06 avril - BAM

BEN plg - Dire je t’aime

23 mars

L’AUTRE CANAL

Nancy (54)

27 mars

Nuit Incolore - Crush

27 avril

Kalash Criminel - Zénith

Que des bonnes choses, importées d’ailleurs et à déguster à quelques miles de vos domiciles. Voilà les dates de concerts à ne louper sous aucun prétexte dans la région. Comme on est sympa, on en a fait une playlist.

SOURIS VERTE Épinal (88)

Zed Yun Pavarotti - In amour

13 avril

Pamela Badjogo - Toto

LAITERIE

Strasbourg (67)

05 avril

Bekar - Sans la pluie

25 avril

Johnny Jane - Attitude

31

氀愀 b愀渀q甀攀琀琀e

L’impunité

L’égalité est une valeur cardinale de nos démocraties libérales. Si elle est très souvent ancrée dans la conviction du droit, elle se révèle pourtant timide à l’épreuve de la réalité. Mais comment la théorie peut-elle être aussi complexe à mettre en pratique ?

Dans une société égalitaire, l’ensemble des individus naissent et demeurent égaux en droit et en fait. Il n’y a donc plus de place pour la concurrence ou encore pour le rapport de force. Or, force est de constater que depuis l’avènement de nos démocraties, les corps et les esprits n’ont pas cessé d’être en lutte. Une lutte perpétuelle au bout de laquelle se trouve l’émancipation.

Par ailleurs, si lutte il y a, cela implique la présence d’au moins 2 parties ayant des intérêts contraires voire contradictoires. Lorsqu’il s’agit d’émancipation, ces intérêts contradictoires relèvent de quasiment tous les champs de la vie d’un individu et pour cette raison il s’avère dif昀椀cile d’en dresser une liste exhaustive.

Intérêt général > intérêt personnel

Cependant, l’individu étant avant tout un être social, s’intéresser aux intérêts contradictoires dans le champ social et surtout aux luttes qu’ils impliquent c’est poser les jalons d’une ré昀氀exion sur l’ensemble des champs qui façonnent la vie d’un individu et d’une société.

Dans les sociétés démocratiques, le bien commun et l’intérêt général sont censés primer sur l’intérêt personnel. De ce fait, sont élus des gouvernements chargés de faire respecter ce principe fondamental.

À partir du moment où cette exigence devient incapable à concrétiser ou pire n’est plus le socle sur lequel s’appuie l’action de ceux élus, il apparaît tout à fait légitime de questionner non seulement leur rôle, leur fonction, mais également et peut-être surtout les privilèges qui y sont attachés. Ce d’autant plus que les velléitésd’entraveàl’émancipation des gouverné•es ne sont jamais absolument à exclure.

32

Texte par

Gioria Ndengue

Illustration par

Graphisme par

La mobilisation des corps

De plus, à cette étape de questionnement qui se caractérise entre autres par une capacité à mobiliser ses défenses intellectuelles, peut succéder la mobilisation des corps dans la lutte.

Autrement dit, à partir du moment où l’intérêt général entre en con昀氀it avec l’intérêt individuel et que ce dernier lui est préféré, doit s’imposer la souveraineté populaire traduite par l’exigence de s’émanciper.

MICROPOLIS, un village théâtral éphémère, une fête printanière pour croiser les imaginaires et éclairer le monde. 4 jours pour se tenir ensemble, mobiles et éveillés, curieux et gourmands !

SPECTACLES

Le pain de la bouche

Les hamsters n’existent pas Seuil

Canines de lait

Jeune mort

L’addition

La saga de Molière

Transfiguration

Cabaret à la nation

LECTURES

Information préoccupante De nuit

Trois fois Saly

Quartiers Libres #6

Pour aller plus loin

Du contrat social de Jean-Jacques Rousseau

Discours sur la servitude volontaire d’

Etienne de La Boétie

ET AUSSI

Rencontre autour de l’itinérance

Atelier boulanger

Atelier d’écriture

DJ set

RÉSERVATIONS

En ligne

Aurianne Abécassis / Morgane Deman En Famille

Antonio Carmona En Famille

Marilyn Mattei / Pierre Cuq

Charlotte Lagrange

Guillaume Cayet

Tim Etchells En Famille

Johana Giacardi En Famille

Olivier de Sagazan

Ascanio Celestini / Alexis Barbier

Quartiers Libres de Guillaume Cayet

Les travailleurs de l’enseignement

Les travailleurs de la nuit

Les travailleuses du soin (balade audio)

Les travailleurs du bâtiment

avec Marie-Ange Rauch, directrice du département théâtre (UFR ArtsPhilosophie Université Paris 8) avec Cécile Piot, boulangère avec Aurianne Abécassis, autrice

Casa Alpha Fetura

VENTE SUR PLACE

Le jour même, dans la limite des places disponibles

15 min

Carottes

SALADE DE CRUDITÉS PRINTANIÈRE

INGRÉDIENTS - pour 6 portions en entrée

Pour la salade

3 carottes

1 moitié de chou

1 pomme

1 poireau (ou 1 céleri branche)

Chou

Pomme

PRÉPARATION

Râper :

Poireau

Yaourt vegan

Mayonnaise végétale

Pour la sauce

2 cuillères à soupe de yaourt vegan

3 cuillères à soupe de mayonnaise végétale*

5 cuillères à soupe de vinaigre balsamique

Sel, poivre

Recette par La Bouture Graphisme par Hugo Aouragh Picto et couleurs par Mathilde Petit

*Pour une veganaise maison:

Mélanger :

1 cup d’huile de tournesol désodorisée

1/2 cup de lait de soja

1/4 de moutarde mi-forte

1/2 de cuillère à café de citron

1/4 de cuillère à café de sel 昀椀n

1/4 de cuillère de café de sel noir kala namak.

Vinaigre balsamique

3 carottes épluchées / 1 moitié de chou

Couper en dés :

1 pomme / 1 poireau (ou céleri branche)

Mélanger :

2 cuillères à soupe de yaourt vegan (non sucré, soja) / 3 cuillères à soupe de mayonnaise végétale* / 5 cuillères à soupe de vinaigre balsamique / 1 cuillère à café de sel / 1/2 cuillère à café de poivre

DRESSAGE

Assembler le tout :

À servir frais, avec du persil ou du coriandre haché. Soit en entrée, soit en accompagnement d’une part de quiche ou d’un plat.

La Bouture, installée dans un lieu cosy et lumineux au bord du canal de la presqu’île Malraux à Strasbourg, est un bar-restaurant végétalien. On y goûte des plats de saison tous les midis, qui sont proposés en libre-service, avec une cuisine saine, familiale et gourmande (toujours végétale, avec des options sans gluten). En soirée en 昀椀n de semaine, retrouvez la formule aperitivo, et le dimanche, l’incontournable brunch à volonté. Toute la journée pro昀椀tez de café de spécialité, de thés et infusions bios, et d’une gamme de boissons alcoolisées et softs pour tous les goûts.

La Bouture

11 Presqu’île André-Malraux, Strasbourg

35

Jeux

Céréales renversées. On fait les jeux, on nettoie après.

Les croisés :

Chocolat offert si réussis avant Pâques

Vertical :

1 - Pique si l’on s’y frotte

3 - Lieu central, faire attention

5 - Se défendent mieux accompagnés du bec

6 - L’abeille adore, l’humain éternue

Horizontal :

2 -

Ramasse poussière chorégraphié

4 - À neige ou à particules

6 - Utile à l’enquête et à l’avion

8 - Maladie, à consommer modérément

9 - Bout de devise

10 - Oncle et rappeur qui aime

Sudoku :

À faire dans un parc très calme

Solutions :

Masquez-les avec une 昀氀eur

9 7 6 2 2 4 9 7 9 7 5 5 5 5 8 6 8 4 8 3 3 6 8 4 2 7
1 : CHARDON 2 : BALLET 3 : GARE 4 : CANON 5 : ONGLES 6 : PISTE 6 : POLLEN 8 : GOUTTE 9 : ÉGALITÉ 10 : BEN Graphisme par Mathilde Petit 9 8 8 6 1 6 6 7 2 9 5 1 1 2 9 6 1 2 2 4 6 9 7 5 7 9 9 7 1 2 2 1 2 3 7 4 2 4 1 9 2 4 4 5 5 5 5 5 8 5 6 5 8 3 9 6 8 7 3 4 6 9 3 7 8 4 3 3 3 6 8 4 1 3 8 2 3 7 8 4 7
8 2 3 6 9 10 4 5 1

Arthur

par

Texte

Enora

par

Guillaumot Illustrations

Aouragh

Hugo

Zébina

par

Bouchez Graphisme

par

vous

pour

appellera

vous

singe

petit

le

avec

sympathisé

a

on

l’avenir,

prédire

vous

de

A昀椀n

à

oilà

v

alors

infos,

des

avait

Il

s’habiller.

comment

disait

qui

de Gulli

s.

Bézier

de

ou

bélier

soyez

vous

que

Printemps,

votre

quoi ressemblera

ex

Un

il

duquel

lors

rendez-vous

proposer un

de

avant

mariage

en

vous demandera

“s’entraîner

pour

c’était

vous avouer

dur.

Coup

demande”.

que

vraie

avant la

CAPRICORNE

amende

une

prendrez

Vous

GÉMEAUX

du

star

seule

la

année,

de

TAUREAU

quali昀椀cation

la

après

Juste

pour

autre

une

de stationnement,

une

et

vélib,

votre

raccroché

avoir mal

livre

un

rendre

de

oublié

avoir

autre pour

moins

au

mais

bibliothèque,

à la

acceptée.

sera

Koh-Lanta

à

votre candidature

SCORPION

de

celle

aussi

sera

dégel

du

saison

La

ont

dettes

Vos

banque.

en

votre compte

investisseur.

mystérieux

un

par

été épongées

Diego 37

Ah,

vous.

sera

ça

Cannes,

Cette

festival de

昀椀lm

aucun

dans

tourné

jamais

vous n’avez

parfois

sont

astres

? Les

louez

et

quand-même

mystérieux. Croyez-y

VIERGE

strasbourgeois

week-end

jamais.

sait

ne

on

une tenue,

des

cacher

de

idée

VERSEAU Bonne

pour

petite-amie

votre

œufs chez

donne

ça

Pâques. Malheureusement

le

avec

et

plein sud,

il

maintenant

Bref,

réchauffement climatique…

fondu.

chocolat

le

faut nettoyer

LION

travail.

au

bien

passera

Niveau

couple.

le

dans

la

dans

corps

d’un

découverte

la

Votre

commencera avec

Demandez

AirBnb.

location

en

entreprise

votre

de

l’équipe d’échecs

régionale,

coupe

de

昀椀nale

quart de

la

de

départ

votre

vous annoncerez

Classe.

Mbappé.

Kylian

boîte, façon

cuisine de

se

le remboursement

votre

complet.

double

CANCER

votre

de

partie

bonne

Une

un

après

vous

de

en

Saturne

Y,

en

POISSON Mercure

Uranus

bol,

le

ras

a

en

昀椀le, Jupiter

et

protectrice

Gaïa

mais

en vacances,

de

max

Un

taff.

entourage se

qui

Londres

à

détournera

semaine

séjour d’une

abusive

façon

de

employer

le terme

à

vous pousse

“Outre-Manche”.

le

feront

Titouan le

réussite d’ici

Titan

l’été.

BALANCE

au

gros

perdre

allez

Vous

vous

mais

casino d’Amnéville

un

trouvant

en

vous ren昀氀ouerez

toilettes.

aux

euros

200

billet de

Quelques tensions

Tout

SAGITTAIRE

après

clément

montrera

se

Il

juste.

tout

passe

ça

argent attention

celui-là.

degré

premier

était super

“journaliste”

pote

votre

sur

tribunal

votre homicide

Le

avec

Bourges

de

Printemps

du

de retour

vous

qui

poches”,

les

plein

“des pépites

portable.

son

sur

vidéos

ses

faisait écouter

Photo

ACT

Le prochain numéro sort en mai.

pour

magazine

Pluie

Première

à

Abonnez-vous

sa

à

vous

chez

directement

le recevoir

et

site

notre

sur

Lien

numéros.

4

et

an

1

pour

sortie. 25¤

nos réseaux

profite

pour

internet

site

notre

sur

sociaux. Retrouvez-nous

magazine gratuit c’est dur mais si vous le lisez ça vaut le coup.

Merci à vous d’avoir lu ce numéro et/ou les huit pr emiers. Faire un

:

contenus

r d’autres

Lorraine, Les Francofolies Esch/Alzette, La Zintrie

Aquarium de Nancy, la Cité musicale-Metz, l’Opéra N ational de

une

remarque,

une

question,

premierepluie.com Une

tout.

lit

On

?

déclaration

suggestion, une

000

54

Saint-Michel,

Rue

16

Pluie,

ManufactureCDN Nancy Lorraine, L’Autre Canal (Na ncy), le Muséum-

La Ville de Nancy & la Métropole du Grand Nancy, le Théâtre de la

Nos partenaires, pour ce numéro :

Première

Nancy premierepluiecollectif@gmail.com

06.10.67.12.90

Suivez-nous

@Premiere_Pluie @premierepluie @premierepluie

communiquer

pour

ou

partenaire,

devenir

contacter

forêt de Charmoilles et nos familles.

Paul Lorenzini, Marie Schaaff, Yves, Siméon Zébina, Émilie Gomis, la

Zobnina, Claire Bouffaron, Alice Chatard, Dorianne Leroi, Ninon Soulié,

Emma Bereau, Léo Mercklé, Laure Habert, Marie Sauva nnet, Nastia

Noélie Dessalle, Mathilde Petit, Ismael Azmi Dahman i, Noé Scheer,

JeanneTo, Kalika, Kay The Prodigy, Clément Regazzon i, Hugo Aouragh,

Malvoisin, Elsa Pion, Nathan Boillot, Lilas Faguet, Sarah Tcheir,

Jules

Pelgrims, Marie Pierron, Camille Brandard, El ise Weber, Guillaume

Eloise Dave, Marie-Fleur Lièvre, Sarah Junker Yasmi n, Juliette Arrojo,

April Tacchini, Clara Weiss, Noémie Waldt, Elise Li macher, Marie Tissot,

Tattoo, Arisa Pechin, Léonie Levallois, Océane Mull er, Chloé Popovic,

Erwan Wilhelm, Soline Pin, Mathilde Olry, Inès Aour dache, Listen

Valentine et Baptiste Poulet, Enora Bouchez, Guilla ume Vrignaud,

Ourvouai, Mathilde Vizet, Pierre-Olivier Bobo, Oliv ier Donnadieu,

Pour

nous

pouvez

vous

magazine,

Pluie

dans Première

Chloé Mufraggi, Eunhye Cho, Uy Vinh Landru, Etienne Puaux, Lucile

Clément Morlé, Antoine Graff, Baptiste Thiebaut, Em manuelle Krieger,

ou

premierepluiecollectif@gmail.com

:

adresse

à cette

au 06.10.67.12.90 Nos

Ahlem

Casale,

Sandra

abonné·es

Guillaumot,

: Graziella

Joane Guiheux, Pamela Mansour, Clémentine Taupin, J ules Boillot,

Tinon, Alice Tremeau, Jeanne Idatte, Pierre Mang, J uliette Jeannin,

Romain Vadala, Pauline Gauer, Laure Gaurois, Anaïs Tazibt, Camille

Roux, Anthony Gaborit, Ben Pi, Sam&Max Photo, Léa D idier Marcolina,

Schultz, Emma Tuellion, Thibaud Rolland, Sabrina Be nmokhtar, Nathan

Martin, Valentine Charron, Étienne Petitgenet, Zoé Schutz, Thibault

Weiss,

Clara

Barbaux,

Orianne

Verhaeghe,

Girard, Leo

Esteban

Truchot,

Clélia

Kintzler,

Lou

Anna Taillabresse,

Léo Verhaeghe, Valentin Regazzoni, Eric Gauthier Am oussou, Antoine

Gioria Ndengue, Marianne Tricot, Marianne Thiry, Lo ic Zimmermann,

Sébastien

Guenat,

Mélody

Oger,

Pierre, Benjamin

Riba

Tristan

Rard,

Mélina

Motassi,

Brogniart, Grâce-Emmanuelle

Mélina Rard, Emma Bojan, Camille Scali, Adèle Dumas , Clara Riff, Sarah

Nicolas Petit, Florentine Colliat, Eloïse Remy, Cor alie Epin, Lou Kintzler,

Am

Rohmer,

Jeanne

Meroufel,

Issam

Gully,

ult, Philippine

Pierar

Hugo

Toussaint,

Eloi

Poncik,

Svetlana

elie Knoll,

participé à la vie du média :

Celles et ceux qui composent Première Pluie ou part icipent / ont

Henr

Aline

Figueras,

Quentin

Slavitch,

d, Marine

Villaume,

Theo

Grosdidier,

Manon

Bairi,

Couturier, Zakary

y Gérard.

Merci à :

CONT
38
CIEMENTSREMER

TARIF ÉTUDIANT 6€

citemusicale-metz.fr

DAVID GUETTA

NINHO SHAKA PONK

LOST FREQUENCIES TIAKOLA MEUTE LUIDJI LíIMP…RATRICE

DAMIEN SAEZ SOLO ZAHO DE SAGAZAN

LA F»VE CHARLOTTE CARDIN LUTHER

ASCENDANT VIERGE OLIVIA RUIZ SANTA APASHE LIVE WITH BRASS ORCHESTRA RAPHAÀL TIKEN JAH FAKOLY MENTISSA

JULIEN GRANEL KO KO MO IGORRR J9UEVE

ELOI BAGARRE COLT LYSISTRATA

BABY VOLCANO BLACK LILYS DELUGE THEM LIGHTS

NOSI MAALE GARS ANGEL CARA CULTURE THE KID

FRANCOFOLIES.LU

Ondes Infinies Malo La Zintrie Memories Creator Tour Osees Kerchak Lala &ce Birds in Row
Tellement + que des concerts ! Tellement + que des concerts ! lautrecanalnancy.fr Printemps

Turn static files into dynamic content formats.

Create a flipbook
Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.