Première Pluie maG azINe
Vincent Pourchot & le SLUC
Semaine de 4 jours
Photos volées
Rébecca Chaillon & le désir
Retour à Bayon
Jeux & Horoscope
Numéro 5 NancyPrintemps 2023
Gratuit
VOYOU AGAR AGAR
THE LEMON TWIGS
POGO CAR CRASH CONTROL
THE PSYCHOTIC MONKS
MIEL DE MONTAGNE
JULIEN GRANEL
VIRGAE 5 ANS
BABY VOLCANO
THE BIG IDEA TIMÉA
LAUTRECANALNANCY.FR 45 Bd. D’AUSTRASIE — NANCY
ÉDITO OURS ICVQ BD LES CHIENS ÉCRASÉS C’EST À STREAMER PRÈS DE CHEZ VOUS RIDEAU VERT 24H À BAYON VINCENT POURCHOT PLAN AMÉRICAIN RÉBECCA CHAILLON EN MARGE BIZARRE BEAUX-ARTS JEANNETO
GÉNÉRALE INTERROMPUE PAR LA PLUIE
OÙ Y’A MIAMMIAMIA JEUX HOROSCOPE REMERCIEMENTS & CONTACT SOMMAIRE 3 4 5 6-7 8 9 10 11-13 15-17 18-19 20-22 23-26 28 29-31 32-33 34-36 37 38 39 40 41 42 © Diego Z, p.16 ©
TOURNÉE
ALLEZ
Léa Didier Marcolina, p.22
© Romain Vadala, p.33
édi t o
Breaking News : on ne fera pas des magazines jusqu’à 64 ans. Déjà, parce que c’est dégueulasse de devoir travailler jusqu’à 64 ans. Ensuite, peutêtre que vous ne le savez pas, mais ce magazine n’est pas notre métier, du moins pas pour le moment (clin d’œil sexy à d’éventuelles fortunes de la presse en quête d’un nouveau titre, non je rigole).
Première Pluie, c’est notre temps libre, donc des morceaux de nos jours et de nos nuits. Une passion de jeunesse qu’on entretient désormais comme une affaire aussi sérieuse que vorace. Ce qui est bien avec la passion, c’est qu’on en prend la retraite quand on le veut. Alors, on aura le luxe d’éviter de faire la saison de trop, celle sans nouvelles idées et où l’on rage sur celles des autres. Pour le moment, la récolte des idées est une culture qui rapporte où il nous manque des bras pour tout cueillir.
Donc rassurez-vous, on ne va pas prendre notre retraite tout de suite. En plus, à 38 ans, LeBron James en a encore pour un moment en NBA, on en prend de la graine. Mais dans un pays où il faudrait travailler jusqu’à plus une goutte d’énergie dans la gourde, hors de question de se liquéfier. Dans un monde où tout va trop vite, où notre temps fond sous le soleil numérique d’une vie de labeur, faire des magazines, ou prendre le temps d’en lire, c’est une façon de faire grève du reste.
Bienvenue dans ce 5 ème manifeste de la curiosité, du superficiel et de la volupté, le magazine des préretraité·es très en avance.
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Première Pluie
CE MAGAZINE EST ÉDITÉ PAR PREMIÈRE PLUIE
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DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : ARTHUR GUILLAUMOT
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DIRECTION ARTISTIQUE : DIEGO ZÉBINA / @DIEGOZEBINA, MATHILDE PETIT / @MATHJILDE_, VALENTINE POULET / @
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PHOTOGRAPHIES : DIEGO ZÉBINA, LÉA DIDIER MARCOLINA / @LEADIDIERMARCOLINAPHOTO, MARIKEL LAHANA / @ MARIKELLAHANA, ROMAIN VADALA / @LE.ROMS, SU CASSIANO / @SU_CASSIANO
ILLUSTRATIONS : ANAÏS TAZIBT / @ANEPSY_ART, CAMILLE SCALI / @CAMILLE.SCALI, CLÉMENT MORLÉ / @EGREUME,
CLÉMENTINE TAUPIN / @CLEMENTINE.TAUPIN, ELISE WEBER / @DORAVORAK, ENORA BOUCHEZ / @_ENORETTE, ERWAN WILHELM / @__ESKRO__, GUILLAUME VRIGNAUD / @GUIM0V, JULES BOILLOT / @SAD_USEER, MATHILDE PETIT
GRAPHISME : DIEGO ZÉBINA, HUGO AOURAGH, MATHILDE PETIT, NOÉLIE DESSALLE / @NONOTUTO, VALENTINE POULET
COUVERTURE : DIEGO ZÉBINA
IMPRIMÉ PAR LA NANCÉIENNE D’IMPRESSION (54)
FONTS : COCONAT, ECKMANNPSYCH, GOTHAM, LADI, MATTONE, MESSY, MINIONPRO, MONUMENTEXTEND, VEGAWANKY, AGRANDIR, ARK-ES, HELVETICA, ICIEL ALINA, BAGERICH, CALFINE, STRIVESVG, KENOKY, MENLO, MIGRA, MILLIMETRE
DÉPÔT LÉGAL EFFECTUÉ À LA SORTIE DU MAGAZINE TIRÉ À PLUSIEURS MILLIERS D’EXEMPLAIRES
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Photos par Diego Z. Colorimétrie par Valentine P.
ICI VÉCU ICVQ
En Marie Marvingt, vingt vies ? Telle est la question que l’on peut se poser lorsque l’on se penche sur le destin de cette femme, née en 1875. Pour résumer sa carrière en quelques lignes : elle s’est saisie de tous les interdits qui pesaient sur les femmes de son époque et, un à un, les a bravés.
Une femme ne peut pas faire de vélo ? Voyez-la donc traverser Nancy à bicyclette, équipée de la jupe-culotte dont elle est à l’origine, puis se faire une place au milieu du circuit du Tour de France, qui n’était alors réservé qu’aux hommes.
Les conquêtes de territoires, une affaire d’hommes ? Laissez-moi vous présenter l’une des premières femmes à avoir son permis de conduire, à prendre l’assaut des airs en ballon, en avion, en hélicoptère, en aéronef , etc. Chaque vol - et on en comptera presque un millier - la fait entrer un peu plus dans l’histoire.
Les médailles - mais seulement en or, sinon ce n’est pas drôle - s’accumulent, qu’il s’agisse de sports d’hiver, de boxe ou d’arts martiaux.
Puis, lorsque la Première Guerre mondiale débute, le combat contre les idées reçues dépasse la métaphore. Marie Marvingt prend les armes, se fait passer pour un homme, dans les tranchées. Démasquée, c’est en tant que première infirmière militaire, et avec une méthode innovante de suture qu’elle contribue ensuite à l’effort de guerre. Elle conte ce dernier en tant que reporter sur le front, car il aurait été dommage que l’écriture ne fasse pas partie de ses talents.
Systématiquement, Marie Marvingt est fiancée au danger (son surnom), et voilà la ligne de conduite de ses vingt (ou plus ?) vies. Plus de trente décorations sont décernées à cette femme au parcours qui force l’admiration. Pourtant, il semble en manquer encore une, essentielle : la reconnaissance.
7 Texte par Adèle Dumas Illustration par Camille Scali Graphisme par Valentine Poulet
MARIE MARVINGT
BD par Clémentine Taupin / @clementine.taupin
LES CHIENS ÉCRASÉS
Le magazine est gratuit, mais on balance des faits-divers pour vendre plus de papier. Les chiens écrasés, dans la presse traditionnelle, c’est ça. Ici, 3 histoires sont vraies et 1 est fausse. Saurez-vous la retrouver ?
HACKER VAILLANT
Sébastien Raoult est un jeune hacker vosgien de 21 ans originaire d’Épinal. Accusé de cybercriminalité par les États-Unis, il y a été extradé début janvier depuis le Maroc où il était détenu depuis janvier 2021. Les USA lui reprochent notamment des faits d’usurpation d’identité et de fraude informatique. Pour l’ensemble de son œuvre, il risque plus de 100 ans de prison en cumulé.
SOUS LA CAGOULE C’EST TOUL
Dimanche 12 février, JuL est venu à Toul tourner le clip d’un morceau de son dernier album avec KVRA, rappeur toulois. Tout ne s’est pas passé comme prévu, 4 personnes se sont retrouvées en garde à vue. La municipalité a reproché aux rappeurs de ne pas avoir demandé d’autorisation de tournage, et d’avoir engendré un rodéo urbain et un mouvement de foule qui a bloqué une partie de la ville.
BAGARRE BAGARRE
À Colmar, en Alsace, au début du mois de février, un commerçant de 22 ans a été condamné pour avoir organisé et filmé des combats entre ses stagiaires de 3ème. Il a écopé d’une belle amende et d’un stage de citoyenneté. Si ça se trouve il y connaîtra le même sort. Quel monde de brutes.
FAITES DES GOSSES
En rentrant d’une soirée de Nouvel An très arrosée, un jeune homme a tenté d’échapper à un contrôle de police près de Sarreguemines. Il a rapidement été arrêté. Mais coïncidence, c’est sa mère biologique qui a procédé à l’interpellation. Elle a reconnu son enfant grâce à une marque de naissance sur la main, alors qu’elle lui passait les menottes. Grosse émotion mais le jeune homme a tout de même dormi au poste.
solution : FAITES DES GOSSES
Graphisme par Valentine Poulet
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Que des bonnes choses, importées d’ailleurs et à déguster à quelques miles de vos domiciles. Voilà les dates de concerts à ne louper sous aucun prétexte dans la région. Comme on est sympa, on en a fait une playlist.
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Graphisme par Valentine Poulet
Rideau vert
Dans un monde où les problématiques
La culture. Ça fait du bruit, ça bloque l’accès des rues, ça crée des vocations, ça change les idées, ça met des belles affiches dans les rues, ça se réinvente chaque millième de seconde, ça fait pousser des patates. La culture, c’est un catalogue, une industrie du divertissement, de la représentation, des émotions, du savoir, de l'événementiel.
Pour certain·es, elle est indispensable au bon fonctionnement de la société, pour d’autres, elle est non-essentielle. N’empêche, elle représentait 2,2 % du PIB français en 2020 pour près de 700 000 emplois. Le secteur occupe généralement 0,8% du budget annuel et crée de la richesse en dynamisant les territoires. Bref, le secteur de la culture pèse, et son activité a des répercussions sur toute l’économie du pays. Sur ses émissions de carbone, aussi.
Quelles nouvelles pratiques adopte le secteur ?
Quelles modalités d’application ? En avance, ou en retard ? Pour en découdre avec toutes ces questions qui vous hantent nuit et jour, on a rencontré Anthony Marlier, directeur technique du Théâtre de la Manufacture à Nancy et Olivier Perry, directeur du CCAM (Centre Culturel André Malraux - Scène Nationale de Vandœuvre). Deux structures importantes de la métropole nancéienne. Deux théâtres dont la réforme de leurs activités vers un modèle plus vert s’exprime sur un large spectre.
Au-delà des difficultés liées à sa simple définition, le secteur de la culture se montre assez peu enclin à une approche quantitative, ou à un bilan des émissions de gaz à effet de serre. Le calcul des émissions liées aux flux de personnes ou encore aux dispositifs de scénographie s’avère très difficile à réaliser. Selon l’ADEME (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie), seulement 26% des bilans carbone des établissements publics – dont beaucoup de structures culturelles – étaient conformes en 2018. L’incapacité d’un secteur tout entier à chiffrer son impact sur l’environnement a longtemps entretenu des positions laxistes.
Et pourtant, même si elle feint de donner l’exemple, la culture est loin d’être neutre. “On doit souvent chauffer des gros volumes pour l’accueil du public, qu’on fait se déplacer, tout comme les artistes. À chaque représentation, à chaque répétition, ce sont au minimum 12 projecteurs de 1000 watts chacun qui sont mobilisés.” explique Anthony Marlier. Chaque structure est différente, mais d’une manière générale, le secteur de la culture et notamment de la représentation émet beaucoup de CO2. Déplacements et accueil des artistes, décors, publics, etc.
Fin 2021, The Shift Project publie son rapport final, sobrement intitulé Décarbonons la Culture !. Le laboratoire d’idées a conçu la notice d’utilisation du jouet emballé dans un carton appelé industrie culturelle : 209 pages de constat et de préconisations phares adaptables à chaque structure. La démarche a l’ambition de donner toutes les clés en main au monde de la culture pour qu’il puisse se réformer lui-même, face à l’absence manifeste d’encadrement de l’État sur la question.
liées à l’écologie doivent devenir centrales et omniprésentes dans l’organisation de toute notre activité, comment se débrouille le monde de la culture ?
De son côté, le CCAM a intégré assez tôt des préoccupations écologiques dans son fonctionnement. D’abord avec une relocalisation totale de la carte du bar. C’est possible, plus simple, pas forcément plus cher, mais souvent, on ne le fait pas pour autant.
“L’arrivée du rapport Décarbonons la Culture a été le point de départ d’une certaine systématisation des choses pour nous. En se concentrant sur les préconisations destinées au modèle des “petites salles en périphérie”, nous avons pu calculer plus efficacement notre empreinte carbone et éplucher les modalités d’actions qui pouvaient s’offrir à nous.” se souvient Olivier Perry.
L’idée peut paraître quelque peu évidente, mais elle fonctionne. L’existence de ce rapport traduit la volonté des structures culturelles d’amorcer des démarches de transition pérennes, à défaut d’avoir un encadrement légal ambitieux sur la question. Mais tout miser sur la bonne volonté, est-ce la clé ?
Comme en politique, les ambitions écologiques sur le long terme d’un certain nombre de structures culturelles peuvent être parasitées par la logique des mandats. Or, une transition verte en interne ne peut se faire que dans la durée. Cela dit, rien n’est impossible : “Ici à la Manufacture, la nouvelle directrice en place, Julia Vidit, est aussi une artiste sensible aux préoccupations écologiques. Elle a mis en place une stratégie RSE (Responsabilité Sociale des Entreprises). À toutes les étapes de notre travail, on réfléchit à l’impact que l’on peut avoir sur l’environnement.” observe Anthony Marlier.
Tout miser sur la bonne volonté, c’est en fait la seule chose à faire pour le moment. À cause de son caractère composite, à cause de la quantification difficile de ses activités, ou à cause, tout simplement, du manque d’encadrement de l'État dans cette transition (notamment à cause des deux freins précédemment cités).
Mais la volonté affichée de certaines structures à s’inscrire dans une démarche plus respectueuse de l’environnement peut être remise en question, comme le confie Olivier Perry. “Nous avons besoin d’une intransigeance plus forte sur le rapport de la culture à l’écologie, et notamment sur la sincérité des actions menées. Le greenwashing est bien ancré dans nos milieux aussi, et l’impact de la tenue de certains festivals gigantesques qui nécessitent de détruire de vastes étendues sauvages et de déplacer des dizaines de milliers de personnes ne va pas s'atténuer grâce à des écocups, ou des plantations d’arbres qui vont mettre plus de 20 ans à pousser.”
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L’arrivée du rapport Décarbonons la Culture a été le point de départ d’une certaine systématisation des choses pour nous. "
La culture a encore de la crédibilité sur l’espace public, plus que les médias en général ou qu’en politique. Le discours du secteur a un réel impact, il a donc la responsabilité d’être sincère et cohérent dans ses actions.
Beaucoup de structures se bougent d'ellesmêmes, comme le Théâtre de la Manufacture et le CCAM. Leur préoccupation du moment ? La mutualisation des œuvres et des tournées. Comme le soutient Olivier Perry, “On essaie de s’appuyer sur des spectacles les plus locaux possible, ou à défaut, d’encourager les moyens de transport les plus écologiques. On travaille sur la mise en commun des programmations, afin d’encourager la circulation des spectacles et d’amortir l’impact des déplacements.” Le CCAM contribue d’ailleurs à la mise au point d’une application pour faciliter ce processus. Le secteur est encore historiquement porté sur l’exclusivité, des réfractaires craignent toujours l’uniformisation des programmations.
Autre démarche : en parallèle de ses grosses productions, La Manufacture imagine des formes de spectacles plus mobiles, qui nécessitent moins de logistique pour les déplacements. Le but ? Investir des lieux non appropriés à la base pour aller à la rencontre d’un public qui n’a pas à se déplacer, et en excluant l’utilisation du semiremorque. On conçoit le spectacle mobile à sa genèse.
Il n’y a pas que dans le théâtre que ça bouge. Cette année, après 20 ans d’activité, Shaka Ponk lance sa toute dernière tournée. Pour le groupe aux 1,5 millions de disques vendus, il n’est plus acceptable de continuer à générer autant d’émissions dans leur activité. Coldplay avait décidé de suspendre sa tournée après la sortie de son album Everyday Life fin 2019. 109 personnes à temps plein, 32 camions, 9 chauffeurs de bus et bien sûr pléthore de trajets en avion. Après tout ce qu’avait mobilisé leur précédente tournée aux 122 dates, le groupe britannique a revu sa manière d’approcher l’exercice, conscient de son empreinte carbone désastreuse.
Un peu partout dans le milieu, des protagonistes du changement émergent. Les artistes, les structures d’accueil, une partie du public aussi. Le CCAM et le Théâtre de la Manufacture sont de ces pionniers, et témoignent de la synergie qui se met doucement en place dans le monde de la culture à Nancy et ailleurs. Le milieu se transforme, mais attention à ne pas faire de ces pionniers l’arbre qui cache la forêt. L’écologie, comme ailleurs, est aussi vue par les acteurs culturels comme un argument marketing. Alors, comme ailleurs, l’industrie a développé des méthodes de greenwashing complexes et systémiques, gros festivals de musique en première ligne. À nous, en tant que public, d’être attentifs à la sincérité du renouveau qu’on nous propose. En attendant : amusez-vous. Renversez la bière de quelqu’un. Éteignez vos téléphones. Faites les backs. Criez pour le rappel. Enlevez vos chaussures pendant le film. Ratez le dernier bus. Applaudissez quand c’est fini.
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Tout miser sur la bonne volonté, c’est en fait la seule chose à faire pour le moment. "
Texte : Romain Bouvier / Graphisme : Mathilde Petit / Photos : Diego Zébina
LICENCES L-R-20-9821/9819/9822 • DESIGN GRAPHIQUE STUDIO PUNKAT • ILLUSTRATION LOÏC LUSNIA CCAM / SCÈNE NATIONALE DE VANDŒUVRE ESPLANADE JACK RALITE • RUE DE PARME • 54500 VANDŒUVRE-LÈS-NANCY SAISON 2022/23 scène nationale de vandœuvre WWW.CENTREMALRAUX.COM poésie · performance · voix féminines 04.04 › 08.04.2023 Dans le cadre du Salon Livres d’Ailleurs En partenariat avec Diwan en Lorraine MANRU opera-national-lorraine.fr PADEREWSKI 9 - 16 MAI 2023 À L’OPÉRA DIRECTION MUSICALE MARTA GARDOLIŃSKA MISE EN SCÈNE KATHARINA KASTENING
24 heures...a bayon
Départ en campagne, besoin de renouveler l’air et les gens alentour. Du tourisme local sur une journée complète, car chaque lieu mérite au moins 24 heures.
Voyage à Bayon, ville-falaise protégée par l’Euron et la Moselle.
Texte par Josh Illustrations et graphisme
par Mathilde Petit Photos par Diego Zébina
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7h-10h
Décision cruciale au square des Académiciens
Entrée de ville. Square désert. Bar-tabac proche. Panneau de prévention. Banc reposant. Si vous vous asseyez, vous repartirez avec un choix clair et définitif en tête. Aller à droite, aller à gauche, quitter votre femme, changer de métier, abandonner vos gosses, etc. C’est pas le genre de square à prendre à la légère.
Ricocher à la plage 10h-12h
Sans regarder en arrière, table rase, vous empruntez la promenade des charades. Aucune devinette sur le chemin mais un paysage idyllique à l’arrivée. Petits cailloux presque galets, arbres desséchés presque palmiers, le spot est juste parfait. Avec 27 rebonds, vous établissez le nouveau record français de ricochets.
12h-14h
Adopter un mouton de Bayon
Sur le retour, vous croisez un troupeau de moutons. Vous dévorez d’envie d’en adopter un pour organiser les premières Fêtes de Bayon. Mais leur stratégie de fuite groupée réduira toutes vos tentatives en échecs. Rappel : le droit de propriété vous interdit de courir après les moutons.
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14h-18h
Squatter l’étang
Pour vous consoler, vous traînez autour des étangs de la Saussaie. Le charme de cette campagne française vous touche profondément. Vous installez un campement dans le kiosque local. Levez le poing, attirez des adeptes, faites des pancartes et montez un parti politique. Tout ce qu’il faudra pour inscrire ce site au patrimoine mondial de l’UNESCO.
18h-21h
Château gratos
Grâce à votre combat social, la maire de Bayon vous remet les clés de la ville, promises pourtant chaque année à Saint-Nicolas. Cela donne accès à la plus belle bâtisse du coin, une maison de maître néorenaissance. Quelques travaux plus tard, elle devient le Airbnb le plus prisé de Meurthe-et-Moselle.
21h-7h
Profiter de sa retraite
44 annuités, 176 trimestres cotisés, dispositif carrières longues, etc. Ce n’est plus votre souci, vous êtes devenu riche. Cela tombe bien, à Bayon se trouve une majestueuse maison de retraite pour couler vos vieux jours : jardin, point d’eau, chapelle et un mangeoire qui vous fascine.
Bayon est à 30 minutes en voiture de Nancy, mais on vous encourage à venir découvrir cette cité en train. Deux départs par heure en semaine, un le week-end, vous trouverez le rail qu’il vous faut. Le trajet coûte 4,60 ¤ avec la carte Fluo (1 ¤ pour les - de 26 ans). Ou sinon en vélo, pour une balade d’un peu moins de 2 heures.
tourguardde
ÉCRIT PAR ARTHUR
GUILLAUMOT
GRAPHISME & MISE EN PAGE : VALENTINE POULET
PHOTOS : LÉA DIDIER MARCOLINA
ILLUSTRATION 1 : ESKRO
ILLUSTRATION 2 : GUIM0V
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Vincent Pourchot fait 2 m 22, alors forcément, pour le basket, c’est pratique. Sur la pointe des pieds, il touche l’arceau sans sauter. Le « plus grand basketteur de France » est aussi un hyperactif des réseaux sociaux, où il crée des formats courts. Sur TikTok, il capitalise sur 1,6 millions d’abonnés et une image de proximité, avec ses coups de cœur et ses coups de gueule. On a discuté.
Qu’est-ce que ça change, à ton niveau, quand on a la chance de jouer pour sa ville ?
C’est forcément un privilège. Quand j’ai quitté Metz à l’âge de 14 ans, je savais que je voulais finir ma carrière ici. C’était un symbole de revenir dans mon club de cœur.
Qu’est-ce qu’on voit, qu’est-ce qu’on ressent de plus que les autres, quand on fait 2m22 ?
Déjà, tu vois la vie de haut. Tu vois des choses que les autres ne peuvent pas voir. Tu te sens un peu privilégié. Pour moi, ça a toujours été plus une chance qu’un complexe.
Justement, tu es hyper reconnaissant envers tes parents de ne pas avoir fait stopper ta croissance.
Je remercie ma mère et mon père d’avoir pris cette bonne décision. Je pense que ma mère est contente de son choix aussi.
Quand ton sport c’est le basket, et que tu te vois grandir, qu’est-ce que tu ressens ?
Ça n’a jamais vraiment été une inquiétude. On a vite compris que je serai autour de 2m10, 2m20. En général, tu t’arrêtes de grandir entre 18 et 20 ans.
Mesurer 2m22, c’est pas seulement un avantage, on est aussi beaucoup plus sujet aux blessures non ?
J’ai eu de la chance, sur ma carrière, je n’ai qu’une seule blessure, même si elle était assez grave (rupture des ligaments croisés, ndlr).
C’est aussi beaucoup une question d’hygiène de vie. J’ai toujours été très bien pris en charge et je suis très exigeant. Chez moi c’est comme un cabinet de kiné, il y a des machines partout. Le corps c’est notre outil de travail, mais c’est valable pour tous les sportifs.
Quand tu étais petit, quels étaient les joueurs qui te faisaient rêver ?
Forcément, Michael Jordan. Vince Carter aussi, Allen Iverson, Yao Ming et Shaquille O’Neal.
Qu’est-ce que tu aurais aimé maîtriser davantage, ou mieux ?
Peut-être être encore meilleur à 3 points, même si je suis déjà pas mal. Quand j’étais jeune j’ai eu des coachs qui m’ont fait travailler le shoot.
Tu es de cette génération de pivots qui ont commencé à shooter.
Exactement. Ce que je ne maîtrise pas en revanche, c’est le dribble. À mon époque, un poste 5 1 qui dribble, il allait sur le banc direct. C’est ce qui fait que le basket mute aujourd’hui, des mecs de 2m10 se déplacent comme des mecs de 1m80.
Le basket change de tous les côtés, même en termes de médiatisation, tu ressens ce truc-là toi ?
Ce sont des choses qui sont positives. Il faut juste trouver le juste milieu pour parler des sujets. Tu sais, j’ai eu des tas de médias qui m’appelaient pour me parler de Victor Wembanyama 2 . C’est cool de parler de lui, mais tout le monde cherche une façon de faire du buzz sur lui.
Tu fais beaucoup de vidéos sur les réseaux sociaux, c’est une façon de laisser de la place à une autre passion ou de suivre cette médiatisation qui t’accompagne parfois malgré toi ?
Déjà, je me suis beaucoup ennuyé pendant le Covid. Je ne m’attendais pas à ce que ça prenne une telle envergure. J’ai parfois du mal à me rendre compte de la notoriété que je peux avoir. Dans la rue, tout le monde vient me parler. Encore plus avec TikTok. J’essaie de toucher tout le monde avec ce que je fais, toutes les générations et toutes les sensibilités. J’essaie de faire passer un message alors c’est important.
Ton parti pris, c’est aussi de faire changer de regard sur la différence.
J’ai de la chance, je suis solide mentalement. Je ne montre jamais les gens qui disent des choses méchantes. Leur donner de l’intérêt, ça ne sert à rien. Les réseaux sociaux, c’est un endroit dangereux, j’essaie aussi de sensibiliser à ça.
Que ça soit avec la campagne nationale pour vaincre la maladie d'Alzheimer, ou pour relater les évènements de ce week-end 3 , tu n’hésites pas à prendre la parole, pour toi, l'engagement, quand on est un sportif, ça compte ?
Bien sûr. J’ai de la chance d’avoir du monde sur les réseaux sociaux, alors c’est important. Pour la maladie d’Alzheimer, j’ai eu le déclic quand j’ai perdu mon père. Les réseaux, c’est bon pour faire passer des messages, taper du poing sur la table, ou témoigner de ses émotions.
2 : Victor Wembanyama, jeune joueur français de 19 ans, est pressenti comme un futur grand joueur de NBA.
3: Loïc Akono, coéquipier de Vincent aux Metz Canonniers, a été victime d’insultes racistes lors d’un match à Charleville-Mézières.
19
: Au basket, le pivot, center ou poste 5 est un joueur grand, qui joue proche du panier pour récupérer les ballons qui ne rentrent pas dans l’arceau.
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plan américain
NANCY EST UNE VILLE DE SPORT OÙ LE BASKET A UNE PLACE DE CHOIX. MAIS CES
DERNIERS MOIS, IL Y A QUELQUE CHOSE EN PLUS. LE SALLE DE GENTILLY AFFICHE LA PLUS HAUTE AFFLUENCE MOYENNE DU PAYS. POURQUOI ? PARCE QUE LE SLUC A RECRUTÉ DES JOUEURS DE NBA POUR SON RETOUR PARMI L’ÉLITE NATIONALE ? PARCE QUE L’ASNL, LE CLUB DE FOOT HISTORIQUE DE LA VILLE DÉÇOIT ? PARCE QUE LE BASKET EST EN HYPE ? ON A PRIS LE TEMPS DE RÉFLÉCHIR ET DE PROFITER.
Le 13 mai 2022, Gentilly déjà comble explose à la fin d’un match largement dominé face à Chalon-sur-Saône. Des confettis tombent du plafond sur un groupe uni qui vient d’enchaîner une série de victoires. Le SLUC, club de basket historique de Nancy, sacré champion de Pro B, vient de valider son billet pour retrouver l’élite nationale après quelques saisons loin de ses standards.
Presque un an plus tard, que s’est-il passé ? À une grosse dizaine de matchs de la fin de la saison, le club nancéien ne joue pas les premières places du championnat, mais les fiertés sont ailleurs et les satisfactions sont nombreuses. Par exemple, même pas besoin de chauffer la salle, cette saison, le SLUC peut se féliciter d’avoir le public le plus fidèle. L’affluence moyenne est la plus haute du pays et les billets pour les matchs se vendent souvent en quelques minutes. Mais qu’est-ce qui motive les habitant·es de Nancy à venir sur les hauteurs applaudir les basketteurs ?
En 2008, après 3 finales de suite perdues, le SLUC devenait champion de France pour la première fois, avant son deuxième triomphe en 2011. Le club lorrain, fondé en 1967, fort de ses deux titres nationaux et du trophée européen Korac 2002 a tout connu, les joies et les peines, en 55 ans. Alors des joueurs sont passés sous les arceaux. On peut citer les frères Greer, ou TJ Parker actuel coach de l’ASVEL à Lyon et frère de Tony, Deron Hayes, le père de Killian, qui joue en NBA chez les Pistons de Détroit, les frères Mike et Florent Pietrus, et même Nicolas Batum, qui a fait une pige de 3 mois pendant la grève NBA de 2011, lui qui joue désormais avec les Clippers de L.A. Dans les archives, on trouve même des traces de John Cox, un cousin de Kobe Bryant. Bref, du beau monde à Nancy ? C’est pas nouveau. Mais quand-même.
À l’annonce de la signature de Mike Scott au SLUC, on avait de quoi lâcher les téléphones. Le ricain est un ancien des 76ers de Philadelphie où il jouait encore en 2021, ou des Hawks d’Atlanta notamment. En tout, il a joué 612 matchs dans la grande ligue. Il est le joueur de Pro A avec le plus de matchs NBA au compteur. Son jeu est envoûtant, autant que sa nonchalance maîtrisée. Ses compatriotes Caleb Walker et Donte Grantham n’ont rien à lui envier. Le premier porte l’équipe au scoring et le second chauffe depuis son retour de blessure. Si leurs collègues étasuniens Kyle Vinales et Roberto Gallinat ont dû quitter le navire, c’est aussi parce que le règlement interdit d’avoir plus de 4 joueurs made in USA dans la même équipe. Et le club a voulu faire de la place pour l’arrivée de Frank Mason III, ancien des Kings de Sacramento, qui a joué plus d’une centaine de matchs en NBA.
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Autour de cette bande à paillettes, Stéphane Gombauld gobe les rebonds, Antony Labanca pose ses shoots, ou entre autres, Ike Nwamu pour l’énergie, le coach historique Sylvain Lautié a tout ce qu’il faut pour mener à bien la bataille du maintien dans l’élite. De l’autre côté de la ville, l’ASNL rend dingues ses fans et a du mal à se garantir une place dans le 3ème échelon national du football. Sans doute qu’une partie d’entre elles/eux préfèrent désormais applaudir les cougars du SLUC. Il faut dire que le basket est à la mode. Des médias comme TrashTalk ont démocratisé l’accès à la culture du basket, les vidéos des matchs de NBA tournent partout sur les réseaux, tout le monde vient jouer sur les terrains de basket extérieurs, en attendant l’arrivée dans la grande ligue de Victor Wembanyama, que tout le monde projette comme un futur crack chez l’oncle Sam. Toutes les raisons mènent à Gentilly.
Bref, le basket est à son plus haut niveau de hype, à Nancy plus qu’ailleurs où ce sport est sacré. Prenez des places pour les derniers matchs à domicile de cette saison sous les caméras, en plan américain, ça va flinguer sec dans l’antre du SLUC.
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Interview par Arthur Guillaumot Graphisme par Mathilde Petit
Photo de une par Su Cassiano
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Photos de scène par Marikel Lahana
À partir de quel moment tu as compris que le jeu c’était aussi, et parfois avant tout, une histoire de performance ?
Je pense que c’était en voyant les pièces de Rodrigo García et de Romeo Castellucci. En première année de fac j’ai dû voir Tragedia Endogonidia (de Castellucci, ndlr). Je n’ai rien capté mais j’ai compris que les gens sur scène étaient à fond. Le Jardinage humain (de García, ndlr), aussi, première année de fac. Là, les situations me parlent plus, je vois des gens en plateau, très puissants en train de faire le truc, de mettre les mains dans le béton, de faire l’amour avec des sacs de course, de prendre des douches de Coca-Cola. Je me dis “ok”.
La performance, c’est une façon d’interpeller, d'attraper un public d’une autre façon ?
Oui. J’adore la littérature, mais je ne ne suis pas une experte. Je n’ai pas forcément lu ce qu’il fallait lire. Il y a plein d’autrices et d’auteurs qu’il faudrait avoir lu que je n’ai toujours pas lus. Je n’ai pas encore lu Zola, ni vraiment Shakespeare… J’ai tout fait en loucedé, donc j’ai besoin que ça passe par le corps, par les images. Tout en ayant à cœur que les gens se sentent légitimes à accueillir du texte et de la poésie. Je ne veux pas que l’un aille sans l’autre. Intéressant ce terme de politesse. Je suis reconnaissante, j’ai tout appris d’abord. J’ai commencé le théâtre quand j’avais 12 ans, avec des gens amoureux du théâtre classique, de Peter Brook, d’Ariane Mnouchkine, d’un théâtre de troupe, d’un théâtre d’ensemble. Je ne sais pas si j’aime aller voir ça, mais j’aime l’avoir traversé. Je ne suis pas arrivée par la performance, je suis quand-même arrivée par le texte, ça fait partie de moi. Je vénère des choses qui ont existé, et qui ont permis de se détacher. Ce qui m'ennuierait, c’est qu’on n’essaie pas de bouger le cadre. Le cadre, il faut le questionner sans cesse.
Ce que je reconnais dans ton travail, c’est presque une politesse du texte, mais avec des façons parfois détournées. Le jeu c’est une façon de parler à d’autres publics, qui n’ont pas forcément les codes des textes, mais qui comprennent immédiatement la force des images.
Depuis le début de tes travaux, est-ce que tu sens une évolution dans la façon de représenter, de dire, d’incarner les histoires, les corps, les sensibilités ?
Je vois autour de moi des personnes qui sont prêtes et disponibles pour revisiter tous les codes et pour faire venir d’autres récits, d’autres corps, écrire différemment, chercher. Ça bouge mais ça bouge doucement. Je vois surtout des personnes qui restent dans le paysage, avec toujours plus de pouvoir. Si Carte Noire nommée Désir ça marche,
c’est aussi parce que pour le moment, on n’est pas nombreux à avoir eu les réseaux et l'expérience pour le faire. Mais il y a des tonnes de performeurs qui rêveraient de ne pas travailler tout seul dans leur chambre. Des tonnes de compagnies qui rêveraient d’un plateau pour se raconter.
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“Le cadre, il faut le questionner sans cesse.”
Quelle énergie guide ton travail en général ?
À chaque fois que je fais un truc, je me dis que c’est le dernier, que je veux arrêter, que c’est fini. Mais j’y retourne toujours. Il y a quelque chose de l’ordre d’une énergie qui me dépasse, un sujet qui me donne trop envie. Je n’ai pas le choix, il faut que j’y aille. C’est un gros désir. La colère chez moi n’est pas instantanée, je veux que ça bouge en profondeur. Il y a de la colère mais je ne suis pas rageuse. L’autre énergie qui domine, c’est la peur. Je me demande souvent pourquoi je fais ça. Parce que c’est de la pression et des responsabilités d’emmener des gens performer et raconter leur vie.
Qu’est-ce que le jeu rend possible que l’écriture ne suffit pas à dire ?
Au sens vraiment de jouer, de s’amuser. Quand tu connais très bien ta partition, tu peux dépasser le cadre, encore une fois. C’est là que le jeu peut te permettre d’accéder au ici et maintenant de ce que tu es venu·e créer. Le jeu permet d’accéder à une vérité très intense. Je crois que je ne maîtrise pas bien l’enjeu des répétitions, mon rôle est plutôt de créer des espaces de jeu pour les comédien nes. Le jeu pur permet de livrer des émotions inédites.
à une vérité très intense.”
Est-ce que le jeu permet d'accéder à des vérités personnelles, est-ce que tu comprends des choses sur toi en jouant ?
Oui, bien sûr. Notamment sur le regard qui est porté. On parle de processus de racialisation, de manière de genrer les gens. Quand tu es exposé e sur un plateau, tu prends ces choses-là de manière plus directe. Et puis quand tu commences à écrire, avec ta propre vie, avec tes propres expériences, tu vas fouiller. Je me suis retrouvée à mener des petites enquêtes pour réactiver des souvenirs de l’enfance, de voyages, de relations amoureuses. Comme mon matériau c’est moi, j’apprends beaucoup de choses. Tu sais quand je fais une recherche de mots sur Word et que je vois que j’ai employé 50 fois le mot “corps” ou “puissant”, ça renseigne.
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“Le jeu d’accéderpermet
du 2 au 5 mai nest-theatre.fr Davide Enia Alexandra Tobelaim ABYSSES Design graphique : www.kollebolle.com Photo : © Matthieu Edet 15 route de Manom - 57100 Thionville réservation : nest-theatre.fr - 03 82 82 14 92 Tarif < 26 ans : 8€
TRAVAILLER MOINS, PROFITER PLUS
En 1998, Thierry Roland commentait la finale de la Coupe du Monde et s’exclamait “après avoir vu ça, on peut mourir tranquille”. 25 ans plus tard, “mourir tranquille” sonne comme un privilège. La mobilisation massive contre la réforme des retraites témoigne d’une réalité urgente : face aux blessures physiques et mentales1 qu’il provoque, il est nécessaire de repenser l’impact du travail sur nos vies. Passer à la semaine de 4 jours, est-ce une première solution viable ?
- Se former à d’autres compétences : pour remplacer les absent·es, il faut pourvoir plusieurs postes. Plus de responsabilités pour chacun·e, plus de collectif et moins de répétitivité des tâches.
- Réduire l’empreinte écologique : baisse estimée au Royaume-Uni à 127 millions de tonnes d’équivalent CO2 par an4
En France, dès 1993, l’idée de réduire le temps de travail par la semaine de 4 jours se propage. Notamment avec la méthode de Pierre Larrouturou, qu’il défend encore aujourd’hui. Elle consiste à financer le passage en 4 jours-32 heures, sans baisse de salaire, par une exonération de certaines cotisations sociales patronales 2. Il note des bienfaits multiples :
- Lutter contre le chômage de masse : estimation d’1,5 à 2 millions d’emplois créés3
- Donner du temps pour vivre aux salarié·es. Du temps pour la famille, la vie sociale hors travail, le sport, la culture, l’engagement associatif ou politique, le tourisme, le repos, etc.
- Flexibilité sans précariser les salarié·es : flexibilité interne (réorganiser les effectifs selon les besoins) plutôt que flexibilité externe (licenciements et CDD).
Ces 5 points répondent à des problématiques urgentes du monde du travail. Et l’on possède des retours d’expérience pour en juger l’efficacité. La loi de Robien en 1996 a permis à plus de 400 entreprises françaises de passer aux 4 jours, certaines y sont restées. En 2000, c’est les 35h, et depuis la réduction du temps de travail est taboue chez nous.
L’Islande, le Royaume-Uni et l’Espagne ont sauté le pas, en testant à petite échelle. Premiers bilans très prometteurs : moins de stress et de fatigue, équilibre vie privée-vie pro retrouvé, productivité stable, etc. En Islande, 86% de la population
active a depuis obtenu une réduction du temps de travail. Au R-U, 92% des entreprises l’ayant testée adoptent les 4 jours définitivement5
Mais attention. Toutes les semaines de 4 jours ne se valent pas. La Belgique, par exemple, donne la possibilité depuis septembre 2022 de travailler 4 jours, mais sans réduire le temps de travail. La mesure perd donc son sens. La semaine de 4 jours ne doit ni rallonger les journées, ni baisser les salaires, ni imposer une flexibilité trop grande aux salarié·es. Elle ne doit pas devenir le fer de lance d’un “chillwashing”, manière pour les entreprises de se faire bien voir alors que le bien-être reste inchangé.
Passer à 4 jours, c’est avant tout pour soulager celles et ceux ayant les emplois les plus pénibles. Cela ne suffira pas à inverser le rapport de force mais c’est un premier pas. Pour redonner du choix, pour redonner du temps. Un temps qu’on appelle libre car on sait pertinemment que le temps passé au travail n’est pas une liberté. Travailler 43 ans sur 82, 47 semaines sur 52, 5 jours sur 7, 7 heures sur 24, pour ne s’arrêter qu’une fois que le corps s’est usé à la tâche, ce n’est plus acceptable.
1 : 604 565 accidents du travail recensés en 2021 par l’Assurance Maladie, 645 mortels dont 38 suicides / 34% des salarié·es s’estiment en burn-out (sondage Empreinte Humaine & opinionway en juin 2022)
2 : -6,4% Unédic (caisse chômage) & -1,6% Sécurité sociale (compensée par l’État). Einstein avait raison, il faut réduire le temps de travail, de Pierre Larrouturou et Dominique Méda, 2016
3 : Estimation de l’ANDESE (docteurs en sciences économiques) en 1995
4 : Étude Stop the Clock de 4 Day Week et Platform London (mai 2021)
5 : Étude en Islande par Autonomy et Alda (juin 2021) / Étude au R-U par Autonomy (février 2023)
“ Mourir tranquille ”, cela devrait être un droit. La retraite ne suffit pas à l’accorder. Travaillons moins. Profitons plus.
Article en version longue à retrouver sur premierepluie.com en avril
Passer à 4 jours, c’est avant tout pour soulager celles et ceux ayant les emplois les plus pénibles.
Texte par Josh Graphisme par Noélie Dessalle Photo par Diego Zébina
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Bizarre
Beaux-Arts
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Série photo
Photos par Diego Zébina Graphisme par Mathilde Petit et Diego Zébina
Arsenal – ven 31 mars
Anne Teresa
De Keersmaeker, Amandine Beyer
Mystery Sonatas/for Rosa danse contemporaine
BAM – ven 28 avril
ÉTIENNE DE CRÉCY
carte postale spéciale
citemusicale-metz.fr
« Des fois quand je bois je me sens triste Mais pourtant je ne pense plus à toi je crois
J’avoue j’ai pas changé d’adresse Mais pourtant tu ne viens plus chez moi je crois »
JEANNETO N ’ 1
©
belleville 2023
Anne Van Aerschot, Allo Floride
Alcool Triste , sur l’ep Pochette Surprise 1/3
Yo la mif c’est JeanneTo j’espère que vous allez bien. Moi ça va tip top. Écoutez je suis super contente parce que j’ai sorti mon premier EP en français récemment, il s’appelle Pochette Surprise 1/3 , et c’est le premier volet d’une série de trois EPs qui seront publiés dans les prochains mois.
Depuis cet été, j’ai fait un tas de concerts, (Cabaret Vert, Sziget Festival, première partie d’Orelsan, etc.) et ça m’a permis de me connecter avec mon public et de ressentir l’énergie de la foule. Donc cette série d’EPs reflète vraiment cet enthousiasme et cet esprit de fête.
« Pochette Surprise 1/3 » est dispo sur toutes les plateformes de streaming depuis le 18 décembre. Vos retours m’ont fait trop plaisir, continuez à streamer comme ça ça donne grave de la force. Le prochain devrait sortir courant avril et je crois que vous êtes pas prêts, j’ai tellement hâte. Pour celleux qui ne me connaissent pas trop encore, ça va faire bientôt deux ans que j’ai lancé le projet JeanneTo avec Cadillac Prod, qui produit les morceaux et m’accompagne aussi sur scène depuis le début. Et ensemble on fait une musique qui peut s’inscrire dans le mouvement hyperpop.
C’est quoi l’hyperpop ?
En fait c’est de la pop mais sans barrière de genre. On est pas inscrits dans un genre musical très précis mais plutôt dans une dynamique. On peut partir sur des directions artistiques éloignées sans trop se mettre de limite en fait. L’hyperpop ça permet de mélanger de la pop , de l ’ électro , du rap , de l’eurodance . Tout ça, ça fait quelquechose d’absurde et de beau à la fois, et c’est toujours très dansant et coloré.
Sinon qu’est-ce que je raconte dans mes chansons ?
C’est assez paradoxal mais j’aime bien mélanger deux ambiances complètement différentes en écrivant des textes pas toujours joyeux sur une musique qui fait boum boum. Pleurer et faire la fête en même temps c’est ma spécialité. Par exemple dans le morceau Alcool triste issu de l’EP Pochette surprise 1/3 je parle clairement d’une rupture (mais promis ça va mieux !) alors que la musique donne envie de danser.
Le thème de l’alcool revient aussi assez souvent, comme dans FOMO « faut que j’écrive des paroles mais je préfère me mettre des caisses » ou « la nuit me séduit surtout quand y’a du bruit ». J’aime bien parler d’alcool et de fête de manière complètement décomplexée parce que ce serait hypocrite de dire que ça ne fait pas partie de ma vie. En vrai de vrai j’aime trop sortir, c’est comme ça. D’ailleurs FOMO en anglais ça veut dire « fear of missing out », la « peur de rater quelquechose », je pense que c’est une sorte d’anxiété sociale dont je souffre pas mal, comme beaucoup d’entre vous j’en suis sûre. Si y’a une fête quelque-part c’est quand mieux d’y aller que de rester chez soi non ?
Cette philosophie elle va bien avec ma musique je trouve. Je veux que chaque morceau soit différent, il faut que ça bouge, il faut que ça aille vite. C’est les codes de la fast life . C’est pas pour rien que je sors jamais de chez moi sans mes lunettes de vitesse . D’ailleurs j’en porte tellement tout le temps qu’il m’est déjà arrivé plusieurs fois de les oublier le soir et de m’endormir avec. Tout schuss.
Allez la mif je vous laisse on se retrouve dans le prochain numéro dans 3 mois pour faire le point, d’ici là j’aurais sorti Pochette surprise 2/3 et de nouveaux clips. J’espère que le suite vous plaira autant qu’à moi.
Des bisous
Jea NN eTo
Carte postale de JeanneTo Graphisme par Valentine Poulet Photos par Romain Vadala
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Tournée générale
Sur Instagram, en janvier, nous avons donné quelques heures à nos abonné•es pour nous donner un mot à glisser dans la nouvelle du magazine. Cet appel devait en recueillir 50, comme on en a reçu plus que prévu, en voici 75, prenez un stylo ou un surligneur et retrouvez-les dans le texte :
Coléoptère
Filigrane
Paillettes
Fantasme
Mixologie
Nuance
Transgression
Territoire
Éphémère
Haïku
Résilience
Bouillant
Simplicité
Rétrécissement
Hublot
Orchidoclaste
Conserver
Nouille
Communauté
Brouillon
Volupté
Émotif
Osmose
Pulsations
Chatoyant
Tabouret
Tourbillon
Tatouage
Croûte
Beyoncé
Aqueduc
Bidou
Cailloux
After
Gracile
Héros
Dingue
Fariboles
Ombellifère
Toxique
Éclipse
Canapé
Opéra
Torpeur
Choix
En été, tous les jours c’est la même chose, je rentre avec la nuit en traversant le territoire entier sous le bourdonnement des coléoptères. Mes écouteurs sont foutus donc la ville et ses mouvements sont la seule distraction sur le chemin. Au centreville, les guinguettes avec les rires collectifs et les saccades des tireuses à bière qu’on devine de l’œil sous les pulsations de disco et de funk. Puis je passe devant l’Opéra, où j’étais en stage avant l’été, grand aqueduc intérieur, point de deal de tourbillons. La nuit semble pourrir doucement comme un fruit, quand les nuages oranges draguent
Carotte
Oiseaux
Cucurbitacé
Guinguette
Fleur
Risotto
Funk
Incertitude
Solastalgie
Artichaut
Mousse
Optimisme
Alunir
Nuage
Éveillé
Vivant
Enivrant
Stégosaure
Couette
Silhouette
Disco Stage
Rouflaquette
Tumulte
Abracadabra
Solitude
Sauvage
Frauduleuse
Rhinopharyngite
les monstres électriques qui trônent sur les immeubles. Je prends le temps de savourer la clope de la simplicité pure avant que ma solitude éphémère se brise sur l’appartement silencieux, habité par mes frères et ma mère.
Depuis que je travaille au bar, je termine à l’heure où toute la communauté commence à s’inquiéter de trouver un after. La torpeur collante est partout, la mousse des bières est un souvenir et les silhouettes sont toutes graciles et se confondent dans une osmose sans lumière. Le tumulte enivrant a
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Peinture par Jules Boillot / @sad_useer et Clément Morlé / @egreume
changé tout le monde en grands oiseaux qui piaillent en fariboles, à l’affût d’une éclipse. À l’heure de la fermeture et des choix, les corps bouillants sont sponsorisés par les fantasmes en brouillon, les déclarations frauduleuses et les pensées sauvages.
Serveuse c’est comme matelot. Ils veulent tous rester sur le bateau après la fin du service. Je comprends pas trop. Le patron est un grand maigre diplômé de mixologie, ex-corbillard qui porte des rouflaquettes. Il me dit tout le temps — Tu bosses bien mais en dehors tu dois être une sinistre orchidoclaste, avec tes haïkus. C’est pour rappeler que dans son ancien travail, il apprenait des mots du dictionnaire pendant les heures creuses. Quand je pars je traverse la foule encore dense devant le bar, des grands types aux allures de stégosaures tiennent des verres en plastique, les émotifs assis par terre tiennent leurs cheveux chatoyants pendant qu’ils rendent à la rue des risottos liquides ou des nouilles, des carottes oubliées, des cailloux qui font mal au bide et quelques incertitudes.
La porte de mon immeuble ferme mal, et l’escalier résonne souvent de fêtards perdus qui errent devant le miroir comme s’ils s’étaient trompés de fjords. Dans l’appartement sauvage, je jette mes habits imbibés de bière et dans mon canapé-lit, je me serre contre la couette, le corps à l’air, la nuit est pleine de paillettes, que j’aperçois par le hublot du salon. Quand le gros fromage des contes, la pièce de monnaie blanche sans croûte passe dans mon champ de vision, j’ai comme envie d’alunir. Éveillée pour rien, optimisme en rab, sport de dingue, j’enclenche ma bouilloire sans rien en attendre et me pose sur mon tabouret pour écrire.
Je repense à ma mère quelques mois plus tôt. J’avais ramené des fleurs fraîches, qui parfumaient la cuisine d’une odeur quasi toxique. Elle fixait un artichaut avant de dire — Le deuil de quelque chose c’est le
rétrécissement de tout le reste. Quand elle est comme ça, j’enregistre la conversation avec mon téléphone. Mes mémos sont le musée de ses angoisses et de sa colère. — La tristesse est un luxe, il faut avoir le temps de l’être. Nous on trimballe pas nos misères, ça coûte trop cher en soute, on voyage léger. On se console, on se fait des tatouages, on cherche à conserver des bijoux premiers prix ou des filigranes et on vend le reste aux brocantes. Le mémo tourne dans mes écouteurs.
À la maison, la résilience n’a jamais été un concept d’émission de radio. Les douleurs sont océaniques et ma mère est cheffe d’orchestre. Parfois elle dansait en écoutant Beyoncé à fond dans la cuisine, parfois elle aiguisait sa solastaglie en pleurant près des plantes ombellifères. Elle dit qu’être vivant c’est déjà cool. Pas de nuances, pas de dégradé.
Depuis, tout a changé pour elle. Le fils d’une de ses amies a beaucoup d’abonnés sur TikTok et a montré ses peintures sur coquilles d’œuf à sa communauté. Héros des réseaux. Abracadabra, maman re-sta. Quand elle revient à la maison, dans la torpeur de l’été, elle annonce qu’elle est célèbre au Japon et que donc elle ne peut pas trop nous voir en ce moment. Bientôt viendra la saison des rhinopharyngites et des cucurbitacés, où tout le monde part en désintox des transgressions. Elle, elle vit sa vie de star des réseaux, buveuse d’éphémère. À la maison, on est tous jaloux, alors on veut tenter des trucs pour qu’elle nous calcule. Elle débarque parfois dans mon bar pour payer une tournée générale. Et ça m’énerve.
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Texte par Arthur Guiomo Graphisme par Mathilde Petit
Désir. D-é-s-i-r. 5 lettres qui rythment à peu près 8 milliards de vies sur terre. Tu peux par exemple désirer un gros domac en lendemain de soirée. Tu peux désirer vivre mieux. Tu peux désirer mettre des claques à ce mec qui boycotte le déodorant le lundi matin dans le bus en heure de pointe. Tu peux désirer quelqu’un ou même désirer qu’on te désire toi.
Ce qui est fou avec le désir, c’est qu’il appartient à un autre bout de toi, un bout presque tangible, que tu ne contrôles pas, qui est presque indépendant. Un bout de toi auquel tu aimerais mettre des claques de temps à autre. Même si sans lui on s’ennuierait trop. Alors on le laisse cohabiter avec cette pseudo sagesse à laquelle on aspire toutes et tous.
Dans la pièce d’Arthur Miller, Les Sorcières de Salem, Abigail, par désir, va devenir la maîtresse de John. Lui pourtant a sa femme et sa ferme, enfin bref, tout ce qu’il faut pour être heureux quand on s’appelle John et qu’on vit dans le Massachusetts en 1600. Pourtant, le désir le fait céder. Et quand Abigail et John se font surprendre par la femme de ce dernier, il accuse sa maîtresse d’avoir fait entrer le démon dans la maison. Leur désir mutuel s’est transformé en “démon d’Abigail”. Ce qui est encore plus fou avec ce démon du quotidien, c’est qu’après ça, Abigail va aller jusqu’à détruire des villages et tuer des centaines de femmes, par désir de se venger. Par désir, on peut tout faire.
Si je vous raconte cette histoire, c’est qu’il y a peu, j’ai été cette Abigail. Un vendredi soir de bitures entre troubadours, entre beaucoup trop de clopes et encore plus de verres, ce démon s’est emparé de mes lèvres et de celles du John de notre temps. J’ai fait entrer le démon dans leur maison. Je pense qu’en chacun de nous sommeille une Abigail. Et sincèrement ce démon me va plutôt bien. On déguise toutes et tous nos désirs, mais prenez un instant pour réfléchir à ce que vous avez fait de plus fou par désir.
Moi j’ai pris des trains, des avions, des verres, j’ai couru, j’ai embrassé, j’ai regardé, j’ai écrit des lettres et j’ai pleuré par désir. Au diable les regrets, que Dieu bénisse les remords. Je pense que la vie serait un long fleuve tranquille sans ce démon. Mais notre vie ressemblerait aussi à une quarantaine en temps de pandémie. Alors merde.
Et puis moi j’ai peur. J’ai peur parce que je ne comprends pas comment on peut arriver un jour à être un adulte, un vrai, sans avoir à chasser ce démon. Moi je veux qu’il fasse battre les derniers battements de mon cœur ce démon. Je veux que ça soit lui qui m’emporte. Je refuse d’arriver à 45 ans avec des choses fixes et rassurantes, des piliers, des fondations. Très peu pour moi les fondations, je serai éternellement en chantier. D’ailleurs, quand on croit le démon disparu, on l’invoque à nouveau, en plantant tout le monde, en trompant, en partant. Et moi je ne veux pas ça, je veux qu’il reste tout le temps à mes côtés sans avoir besoin de le chercher.
Après cette soirée où j’ai songé à toute la part démoniaque qui vit en moi en transgressant toute morale avec ce John, je suis rentrée, à pieds, sous la pluie. Une pluie qui a réussi à éteindre le feu sous lequel on essaie de me couvrir. Déjà une petite victoire pour l’enfer.
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Texte par Emma Bojan Graphisme par Mathilde Petit Illustration par Elise Weber
ALLEZ OÙ Y’A
NANCY C’EST COOL. C’EST MÊME LA MEILLEURE VILLE POUR FÊTER L’ARRIVÉE DU PRINTEMPS. MAIS PARFOIS, IL FAUT PARTIR POUR MIEUX REVENIR. ALORS ON MET LES VOILES AU NORD ET ON POSE L’ANCRE À THIONVILLE.
Thionville c’est un peu Winterfell. Le dernier grand bastion français traversé par la Moselle. Plus au nord c’est pas le Mur mais la ville de Schengen, où la rivière s’en va séparer le Luxembourg et l’Allemagne.
Ville-frontière, Thionville accueille plus de 40 000 personnes entre ses murs, 136 000 si on compte toute l’agglomération, on peut parler d’attractivité. Et aussi d’histoire. Successivement lotharingienne, luxembourgeoise, française, allemande, refrançaise, reallemande et enfin rerefrançaise, faut savoir s’adapter si on est Thionvillois•e. La ville est vieille d’au moins l’année 753, elle a vu passer Charlemagne, Charles Quint, Churchill et la sidérurgie.
De nos jours, on peut faire les touristes sans crainte d’être annexé•es. Ne zappez pas le pont-écluse de Yutz, édifice marin digne de la Loire. Ni la mairie, ancien couvent qui donne envie de diriger la ville.
Niveau culture, la ville n’est pas en reste. Regardez la prog du Nest, le plus cool des théâtres transfrontaliers. On s’y retrouve du 18 au 24 mars pour leur festival Semaine Extra, et sur toute la fin de saison. Il faut tester le théâtre en bois au moins une fois dans sa vie.
Pour y aller depuis NANCY
Par la route :
Environ 1 h30 pour 83 km
Carburant : 9,62 €
En blablacar :
Environ 1 h10
Entre 5 et 15 €
Par les rails :
Environ 1 h20
8,90 € (avec carte Fluo)
Par bicycle :
Environ 5 h pour 97 km
Prix du vélo et sueur
Thionville
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Texte parJosh Illustration par Enora Bouchez Graphisme par Valentine Poulet
15 min
INGRÉDIENTS
(pour 2 personnes)
125g de penne
100g de spaghetti
Eau du bain
Ketchup
125g de penne
LES PÂTES AU KETCHUP
100g de spaghetti
Noisette de beurre (optionnel)
Emmental râpé (optionnel)
PRÉPARATION
1 - Faire bouillir l’eau du bain dans une casserole
2 - Y déposer les pâtes en respectant leur temps de cuisson
Eau du bain
3 - Égoutter, servir
4 - Laisser les convives doser le ketchup à leur guise, parce qu’on est jamais mieux servi que par soi-même
Ketchup
Recette idéale lors des fins de mois difficiles, mais également pour recevoir votre belle famille « à la bonne franquette ».
À consommer de préférence devant une vidéo YouTube de Squeezie.
Kofi Bae, jeune et charismatique enfant de son siècle.
Après des années passées à Saint-Dié puis Nancy, il a pris son envol pour la capitale où le tout Paris se l’arrache. Producteur de génie, il a travaillé sur les projets de Jäde et Nelick notamment, auquel il s’associe régulièrement.
patoketchup, single issu du projet Supplément Chantilly de Nelick, sorti le 20 janvier 2023. Attention à la boulimie auditive.
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Recette par Kofi Bae Graphisme par Hugo Aouragh Illustrations par Mathilde Petit
Noisette de beurre Emmental râpé
JEUX
Les meilleurs jeux, à faire pendant les céréales comme à l’époque
Les croisés : Désormais un classique
Vertical :
1 - Prénom de berger et jardin de Toul
2 - Fêtes et jambon
5 - Nouvelle dent et Shaquille O’Neal
7 - Peuple, Odéon ou Manufacture
Sudoku : Pour les pros seulement
Horizontal :
3 - Ouvre la scène et la fenêtre
4 - Ami vieux et regroupement de légumes
6 - Mobilise les Français•es mais démobilise les armées
7 - Objet d’art et punition
9 - Moment préféré des artistes et des bières
10 - Sujet de philo, qui fut noir en rock
Solutions :
Parce qu’on vous aime
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1 : MICHEL 2 : BAYONNE 3 : RIDEAU 4 : POTAGER 5 : PIVOT 6 : RETRAITE 7 : TABLEAU 7 : THÉÂTRE 9 : TOURNÉE 10 : DÉSIR 6 6 6 6 4 9 9 9 9 2 2 2 2 2 7 7 7 7 7 7 8 8 8 8 3 3 3 5 5 5 5 1 1 1 1 6 6 6 6 6 6 6 6 6 4 4 4 4 4 4 4 4 4 9 9 9 9 9 9 9 9 9 2 2 2 2 2 2 2 2 2 7 7 7 7 7 7 7 7 7 8 8 8 8 8 8 8 8 8 3 3 3 3 3 3 3 3 3 5 5 5 5 5 5 5 5 5 1 1 1 1 1 1 1 1 1
On a infiltré les ruches des abeilles pollinisatrices pour vous prédire le futur : c’est sur cette page que vous saurez comment se passera votre printemps, que vous soyez Bélier ou berger. Aucune fleur n’a été blessée durant la fabrication de cet horoscope.
TAUREAU
VIERGE
À 18 ans vous avez signé un papier en cédant vos droits à l’image. Une marque utilisera votre tête sur ses porte-clés sans que vous ne puissiez rien y faire.
Alors que vous êtes perdu en mer depuis 3 jours sans réseau, un appel de votre opérateur téléphonique vous sauvera de la dérive. En échange, vous opterez pour le plus gros forfait. Vous serez muté dans la première filiale sous-marine de votre entreprise. Un peu perdu, vous ne saurez pas si vous devez le partager sur LinkedIn.
Vous serez tiré au sort comme juré dans une histoire de vol d’huîtres. L’anecdote vous fera l’année.
BÉLIER
Votre entraînement pour les JO 2024 commencera par un claquage à la cuisse. Le journal L’Équipe n’a pas souhaité en faire un article.
LION
En recherche de sensations, vous testerez l’herbe à chat sur les conseils d’un dealer de Snapchat. Vous deviendrez plus productif et globalement plus propre.
VERSEAU
Vous soutiendrez la corrida. Karma, des centaines de taureaux déferleront sur vous et raseront votre maison.
GÉMEAUX
La perte de votre agenda 2023 vous plongera dans une profonde crise existentielle. Que faire, où aller ?
Pôle emploi vous trouvera un nouveau job : programmateur musical de raves party illégales dans la forêt.
BALANCE
Vous devrez choisir entre gagner 1 million d’euros et annuler la réforme des retraites. L’occasion de tester votre philanthropie.
Cette année, les tomates-cerises seront remplacées par des tomates-fraises. Vous aurez beaucoup de mal à vous y faire.
Parce que vous avez réussi le jeu au dos de votre boîte de céréales, vous serez envoyé en expédition dans l’hyperespace.
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Texte par Arthur Bouvier et Romain Guillaumot Illustrations par Anaïs Tazibt Graphisme par Hugo Aouragh Photo par Diego Zébina
Le prochain numéro sort en juin.
basket ou dans la rue.
Merci à celles et ceux qui le complimentent quand on se croise au
un magazine gratuit c’est dur mais si vous le lisez ça vaut le coup.
Merci à vous d’avoir lu ce numéro et/ou les quatre premiers. Faire
Première Pluie est un média collectif, ouvert à toutes les formes de collaboration. Vous avez envie d’écrire, de prendre des photos, de faire des dessins, de discuter, de poser des questions sur nos activités, de prendre part au prochain numéro ?
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(Toul), JEEdeLeBOY.
Scène Nationale de Vandœuvre-lès-Nancy, le Jardin du Michel
Metz, l’Opéra National de Lorraine, le Centre Culturel André Malraux
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CDN transfrontalier de Thionville-Grand Est, la Cité musicale-
L’EcclesiaCité Patrimoine de Luxeuil-les-Bains, le NEST
Théâtre
La Ville de Nancy & le dispositif Ma Ville, mon Projet , L’Autre
Canal,
Nos partenaires, pour ce numéro :
Zébina, LeBron James, la forêt de Charmoilles et nos familles.
Lièvre, Claire Bouffaron, Alice Chatard, Marie Schaaff, Yves, Siméon
Noé Scheer, Laure Habert, Marie Tissot, Eloise Dave, Marie-Fleur
Hugo Aouragh, Noélie Dessalle, Mathilde Petit, Ismael Azmi Dahmani,
Malvoisin, Valentine Poulet, Enora Bouchez, Clément Regazzoni,
Héreau, Sarah Junker Yasmin, Juliette Arrojo, Elise Weber, Guillaume
April Tacchini, Clara Weiss, Noémie Waldt, Elise Limacher, Chloé
Arisa Pechin, Léonie Levallois, Océane Muller, Chloé Popovic,
Wilhelm, Soline Pin, Mathilde Olry, Inès Aourdache, Listen
Tattoo,
Pierre-Olivier Bobo, Olivier Donnadieu, Guillaume
Vrignaud, Erwan
Clémentine Taupin, Jules Boillot, Clément Morlé, Joane Guiheux,
Juliette Jeannin, Adèle Dumas, Blanche Alroy, Pamela Mansour,
Paquer, Jeanne Idatte, Pierre Mang, Marie Sauvannet, Alice Tremeau,
Marcolina, Romain Vadala, Pauline Gauer, Laure Gaurois, Marie
Nathan Roux, Anthony Gaborit, Ben Pi, Sam&Max Photo, Léa Didier
Verhaeghe, Valentin Regazzoni, Emma Tuellion, Sabrina Benmokhtar,
Scali, Camille Tinon, Loic Zimmermann, Marianne Thiry, Léo
Bojan, Mélina Rard, Anaïs Tazibt, Eric Gauthier Amoussou, Camille
Nicolas Petit, Florentine Colliat, Eloïse Remy, Coralie Epin, Emma
participé à la vie du média :
Celles et ceux qui composent Première Pluie ou participent / ont
Merci à :
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