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O r d r e

DÉRAPAGE

Lettre n a t i o n a l

Le président de l’Ordre de l’Oise victime d’un lapsus médiatique

d e s

c h i r u r g i e n s - d e n t i s t e s

CONTRATS

SÉCURITÉ SOCIALE

SEL, collaboration libérale : deux nouvelles mesures

m e n s u e l

m a i

L’UE veut sauvegarder son modèle de protection

2 0 0 5

n ° 3 7


sommaire

éditorial

l’événement

page 05 page 06

page 10 page 11 page 11 page 12 page 13 page 14 page 14 page 15 page 18

SEL et collaboration libérale : deux nouvelles mesures adoptées Associés de SCP et étudiants : les chantiers en cours Infections virales – Prévention Un vaccin contre le zona est en cours de développement Radioprotection La fin du cliché à visée non thérapeutique Parution David Jacotot signe un livre pratique de droit dentaire Une initiative du vice-président de l’Ordre de l’Orne Un chirurgien-dentiste en campagne pour l’exercice au vert Information judiciaire Commission rogatoire : l’obligation de levée du secret Sécurité sociale Cotation TO 15 +5 pour les soins ODF réalisés sur les adultes Droit de réponse Exercice 2004 Une nette diminution des dépenses du Conseil national Risques sanitaires Déchets piquants : un communiqué du ministère

Le chantier du dossier médical personnel

Responsabilité civile médicale Contrats Au « Journal officiel »

Un régime d’irresponsabilité pour le collaborateur salarié ! Le praticien remplaçant n’est pas un salarié… mais jusqu’à quand ?

europe

page 32

Réunion de la CODE à Madrid

page 33

Sommet des chefs d'Etat et de gouvernements

Quel accès au DMP ?

juridique

page 28 page 30 page 31

Contrats

dossier

page 19

Un droit de réponse à la demande de santéclair Un président de l’Ordre victime d’un invraisemblable lapsus médiatique

l’actualité

page 08

Quand la presse véhicule une information erronée

Les Britanniques participent à la conférence des Ordres européens La sécurité sociale, pierre angulaire du modèle européen

parcours

page 35

Vive l’art dentaire décloisonné

la

Lettre n° 37 Mai 2005

Directeur de la publication : Pierre-Yves Mahé Ordre national des chirurgiens-dentistes – BP 2016 – 75761 Paris Cedex 16 Tél. : 01 44 34 78 80 – Fax : 01 47 04 36 55 Internet : www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr – Intranet : www.oncd.org Conception et réalisation : Texto Editions – contact@texto-editions.com Rédaction : Christophe Brunet, Sébastien Nardot Maquette : DavSav – Secrétariat de rédaction : Corinne Albert Illustration de couverture : Ewa Biéjat – Illustrations intérieures : Grégoire Vallancien Photos : S. Nardot, pp. 3, 21, 22, 26, 28,35 Imprimerie : SIEP Tous les articles signés sont publiés sous la seule responsabilité de leurs auteurs Dépôt légal à parution ISSN n° 12876844


éditorial

O

n lira dans cette dernière livraison de La Lettre un état de l’actualité du dossier médical personnel (DMP), créé par la loi réformant l’assurance maladie (1). Deux aspects essentiels de ce DMP doivent particulièrement retenir notre attention car ils touchent au cœur de notre mission ordinale : la garantie du respect des données à caractère personnel, d’une part, l’accès des praticiens de l’art dentaire à une information la plus complète possible, d’autre part. Sur le premier point, l’Ordre – associé au groupement d’intérêt public (GIP) qui s’est constitué en avril dernier pour mettre en musique la phase de mise en place du DMP (2) – restera vigilant sur les garanties apportées quant au respect des données de nos patients. L’enjeu : un verrouillage parfaitement étanche des données à caractère personnel qui transiteront dans le cadre des échanges entre les professionnels de santé. Tout le monde est d’ailleurs parfaitement d’accord : cette confidentialité, liée à notre obligation du secret médical, devra être solidement garantie. Sur le second point, qui concerne l’accès des professionnels de santé aux données médicales, nous avons eu l’occasion de sensibiliser notre ministre, Philippe Douste-Blazy, à l’importance que représente, pour le chirurgien-dentiste, la faculté de disposer d’un accès étendu aux données médicales de nos patients. Un exemple tiré de notre pratique quotidienne convaincra : comment assumer les conséquences d’une simple anesthésie locale si nous ignorons les antécédents médicaux et les incompatibilités médicamenteuses de nos patients?

DMP : la chirurgie dentaire est une profession médicale!

Seul un libre accès au DMP pourra garantir la sécurité des soins, que nous devons à nos patients. Car la profession dentaire n’appartient pas uniquement à la catégorie générique des «professionnels de santé». Elle est aujourd’hui une profession médicale à part entière – et s’est d’ailleurs battue pour le devenir.

Cela lui donne des devoirs, auxquels elle ne se dérobe pas. Cela lui donne également des droits, comme celui d’avoir à sa disposition les moyens de garantir à ses patients la sécurité des soins. C’est exactement de quoi il retourne sur cette question de l’accès du praticien aux données médicales, dans le cadre du DMP.

(1) Loi portant réforme de l’assurance maladie du 13 août 2004. (2) Arrêté du 11 avril 2005 «portant approbation de la convention constitutive d’un groupement d’intérêt public» dont l’appellation officielle est «groupement de préfiguration du dossier médical personnel».

Pierre-Yves Mahé Président du Conseil national Mai 2005

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Lettre 3


brèves

> RADIOPROTECTION : LES PREMIERS CONTRÔLES DE CABINETS Le Conseil national a été informé que l’Inspection du travail entreprenait des visites de contrôle dans des cabinets employant du personnel. Elles concernent plus particulièrement le respect des obligations en matière de radioprotection du personnel, la conformité des installations électriques, la présence et la maintenance des extincteurs, etc. Nous reviendrons sur ce sujet dans un prochain numéro de La Lettre.

Norme de stérilisateurs à chaleur sèche : précision Dans La Lettre n° 35, un article (p. 20) consacré à la norme européenne EN 13060 relative aux petits stérilisateurs à vapeur d’eau faisait référence aux stérilisateurs « à vapeur sèche ». Il s’agissait bien entendu,

de stérilisateurs à « chaleur sèche ». Cet article ne visait que les stérilisateurs décrits par la norme et en particulier ceux de type B, qui permettent le traitement des dispositifs emballés,

seuls dispositifs pouvant être considérés comme stériles. Précisons qu’en ce qui concerne les stérilisateurs à vapeur chimique type « Chemiclave », l’AFSSAPS étudie actuellement leur activité sur le prion.

CNFCO : accréditation des organismes de formation continue Le conseil d’administration du Conseil national de la formation continue odontologique (CNFCO) a accrédité, le 16 décembre 2004, une première liste d’organismes de formation continue. Le conseil d’administration du CNFCO

se réunira à nouveau le 16 juin afin d’étudier de nouvelles demandes. Les organismes désireux d’être accrédités doivent communiquer toutes les pièces nécessaires à l’étude de leur dossier avant le 20 mai 2005.

CARNET NAISSANCE Gabriel, fils de Valérie et Pierre-Olivier Mahé, petit-fils de Pierre-Yves Mahé, président de l’ONCD, et de Madame. DÉCÈS Pierre Gisclard. C’est avec beaucoup d’émotion que nous apprenons le décès de Pierre Gisclard, le 9 février dernier. Inscrit au tableau du Tarn en 1956, Pierre Gisclard a mené la majorité de son exercice dans ce département dont il fut le président du conseil de l’Ordre de 1982 à 1990. Pierre Gisclard qui fut également l’un des membres fondateurs des associations de gestion agréées du Tarn était retraité depuis 1989. Anne-Sophie Girollet. Nous venons d’apprendre avec affliction le décès tragique d’Anne-Sophie Girollet, fille de nos confrères Dominique et Patrick Girollet exerçant tous deux dans le département de l’Ain. La disparition de Georges Vergnes. C’est avec une grande tristesse que les confrères de la région Midi-Pyrénées ont appris la disparition de notre ami Georges Vergnes. Né en 1930 à Toulouse, il y suivit ses études en dentaire pour installer son cabinet dans la Ville Rose. Elu au conseil départemental de l’Ordre de la Haute-Garonne

4 la Lettre no 37 Mai 2005

en 1964, Georges Vergnes y siégera jusqu’en 1994 où il occupa les fonctions de vice-président de 1990 à 1994. En 1968, il sera également élu au conseil régional, dont il sera le président de 1979 à 2003. Sa connaissance très étendue de la profession, sa rigueur et son impartialité, son attachement constant aux règles de la confraternité feront du président Vergnes une figure respectée et appréciée par les praticiens. Il se sera vu remettre, des mains de Philippe Douste-Blazy, la distinction de chevalier de l’ordre national du Mérite. Sa disparition laisse un grand vide dans la profession.

Serge Fournier Président du CRCO Midi-Pyrénées Le Conseil national de l’Ordre s’associe aux conseils départementaux et régionaux pour présenter ses condoléances émues aux familles. DISTINCTION HONORIFIQUE Ordre national du Mérite Par décret du président de la République en date du 6 mai 2004, a été nommé et promu – Service de Santé des Armées – au grade de chevalier, Philippe-Yvon Manfredi, docteur en chirurgie dentaire. Le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes lui adresse ses félicitations les plus vives.


l’événement

Un droit de réponse à la demande de Santéclair Considérant que la présentation associée des deux articles « Un arrêt du Conseil d’Etat : l’Ordre confor té dans son rôle de garant déontologique des protocoles » et « Protocole Santéclair : une succession de dérives déontologiques » dans la parution de La Lettre n° 33 de décembre 2004 est de nature à fausser le jugement du lecteur, la société Santéclair souhaite por ter à la connaissance des lecteurs les faits suivants : Le titre du premier article est particulièrement trompeur quand il affirme que l’Ordre est conforté dans son rôle de garant déontologique des protocoles. En effet, le Conseil d’Etat dans sa décision du 25 octobre 2004 a por té un jugement uniquement sur la forme de la requête. L’avis demandé au CNOCD par la société Santéclair relève d’une demande d’information et de conseil et non d’une obligation ordinale. C’est pourquoi le Conseil d’Etat a considéré que la demande de recours n’était pas recevable. Sur les soi-disant « dérives déontologiques » énoncées dans ces articles, nous souhaitons rappeler aux lecteurs les modalités de fonctionnement du partenariat :

• La communication à l’assuré des coordonnées des chirurgiens-dentistes du réseau Santéclair se fait exclusivement par téléphone sur demande expresse de l’assuré et cela depuis la création du réseau dentaire, il y a quatre ans. Santéclair n’a jamais fait circuler une liste de noms et n’a jamais communiqué à quiconque non assuré auprès des partenaires assureurs les noms des chirurgiens-dentistes. • Conformément au Code de déontologie, la procédure de dispense d’avance des frais n’est pas obligatoire. Seul le refus systématique aux assurés qui en font expressément la demande est susceptible de donner lieu à une résiliation du contrat. • Les chirurgiens-dentistes par tenaires ne font l’objet d’aucun démarchage commercial. Santéclair s’efforce d’informer par courrier ses par tenaires de ser vices/formation continue proposés par des organismes reconnus par la profession et des tarifs auxquels ses services/formations sont négociés. Chaque praticien est libre d’y souscrire et de bénéficier des tarifs proposés. Les services et formations proposés par Santéclair à ses partenaires rentrent dans le cadre de l’art dentaire et de

l’obligation qui est faite par le Code de déontologie d’entretenir et de perfectionner ses connaissances. • Aucun contrôle n’a lieu au cabinet des chirurgiens-dentistes par tenaires. L’Ordre fait état d’une convocation d’un patient par un praticien choisi par Santéclair. Ceci a effectivement eu lieu une fois dans le cadre d’une suspicion de fraude à l’assurance extrêmement grave. Nous nous étonnons que l’Ordre se soit attaché au papier à lettres de la convocation et non au fond du dossier accablant pour le praticien et resté sans suite malgré nos nombreuses relances. Santéclair sert 4 millions de clients relevant de diverses mutuelles, compagnies d’assurances, institutions de prévoyance et cour tiers. Bon nombre de réseaux de soins souhaiteraient se prévaloir d’un fonctionnement aussi constant après quatre années d’existence. L’accord signé par près de 3 000 chirurgiensdentistes est inchangé par rapport à la version de 2001 pour laquelle le CNOCD avait émis un avis favorable. Cet accord ne présente donc aucune clause contraire à la déontologie de la profession. Affirmer le contraire relèverait de l’entrave au libre exercice des activités de chacun.

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Lettre 5


l’événement Quand la presse véhicule une information erronée

Un président de l’Ordre victime d’un invraisemblable lapsus médiatique Daniel Mirisch, président du conseil départemental de l’Oise, à l’origine d’une enquête sur un praticien peu scrupuleux, s’est retrouvé bien malgré lui au rang d’accusé principal. Récit.

L’affaire dont a été victime Daniel Mirisch, président du conseil de l’Ordre de l’Oise, constitue un cas d’école en matière de dérapage médiatique comme on en voit, hélas, se produire régulièrement. Elle pourrait se résumer comme suit : un journaliste diffuse une information erronée mettant en cause le président de l’Oise, aussitôt reprise par ses confrères dans la presse locale, puis nationale. On ignore si ces contre-exemples de la bonne pratique journalistique (consistant, entre autres, à vérifier ses informations et à recouper ses sources) sont présentés dans les écoles de journalisme. Ce que l’on sait en revanche, c’est que la question d’un Code de déontologie de la presse, dont il est question à chaque dérapage médiatique, n’a jamais vu le jour. Il est vrai que, contrairement à nos professions où le risque, en termes de santé des personnes, nécessite précisément le respect d’une déontologie, les victimes des bourdes journalistiques ne risquent quant à elles, « que » leur réputation, voire parfois leur honneur… Un dispositif enrayé par une erreur de coordination Que s’est-il passé dans l’Oise ? Au terme d’une enquête réalisée conjointement par l’Ordre et la DDASS de l’Oise portant sur les pratiques d’un praticien peu scrupuleux en matière d’hygiène et d’asepsie (lire l’encadré p. 7) et devant le risque de contamination à l’hépatite B et C et au VIH 6 la Lettre no 37 Mai 2005

que ce praticien incompétent fait courir à ses patients, une filière de prise en charge est mise en place par la DDASS et le conseil de l’Ordre. Dans un temps record, une cellule de crise est installée. Plus de 350 courriers sont préparés afin d’inviter les patients du praticien mis en cause à réaliser des tests sérologiques. Las ! Un problème de coordination enraye la bonne marche du dispositif. «Nous avions prévu d’envoyer dans un premier temps les courriers personnalisés, puis dans un second temps de diffuser un communiqué de presse pour informer les patients que nous n’avions pu joindre. Malheureusement, la préfecture a envoyé ce communiqué le même jour que les courriers personnalisés » explique Daniel Mirisch. La réaction ne se fait pas attendre. Première sur les rangs, l’Agence France Presse (AFP) téléphone au président du conseil de l’Ordre de l’Oise afin

d’obtenir des informations. Quelques heures plus tard, le ballet des journalistes commence : Europe1 et le Courrier picard se déplacent au conseil départemental.

Un contresens médiatique lourd de conséquences « Cer taines questions étaient effarantes ! Des journalistes cherchaient à s’en prendre à notre institution, accusée plus ou moins ouvertement d’avoir dissimulé l’affaire » déplore Daniel Mirisch. Bref, au nom de la défense des patients, certains journalistes redresseurs de torts s’attaquent à l’institution ordinale dentaire, alors même que cette dernière a tout mis en œuvre en collaboration avec les services de l’Etat pour mettre fin aux pratiques scandaleuses du praticien. Fort logiquement, le lendemain, alors que l’AFP a pris soin de communiquer son nom et sa fonction, les rédactions


se succèdent dans le cabinet de Daniel Mirisch : LCI, Le Parisien, France 2 et France 3 en particulier. Le premier véritable coup de tonnerre, pour Daniel Mirisch, survient sur les ondes de RTL 2, où l’on annonce que c’est lui, Daniel Mirisch, qui est « suspendu par le préfet de l’Oise pour des problèmes d’hygiène et d’asepsie » ! L’information erronée sera scrupuleusement relayée par la presse ! Dans l’édition de la mi-journée des actualités de France 3 NordPas-de-Calais–Picardie, Daniel Mirisch est donc présenté comme le praticien de l’Oise suspendu ! Par hasard, (peut-on ici parler de chance ?), au moment de la diffusion de l’information une équipe de la chaîne se trouve chez le praticien. La méprise commise par le présentateur et rédacteur en chef, Cédric Faiche,

est vite relevée et la régie d’antenne en est immédiatement informée. Dans l’édition du 13 heures, un démenti est diffusé. Trop tard : le mal est fait ! Plusieurs patients appellent Daniel Mirisch pour lui demander des comptes. « Quand vous travaillez et que vous vivez dans une ville depuis 30 ans, une histoire comme celle-ci vous fait beaucoup de mal. Dès que l’on croise des gens que l’on connaît, un sentiment de paranoïa prend le dessus » confie Daniel Mirisch. Comme si la coupe n’était pas assez pleine, le Courrier picard commet le lendemain une maladresse de débutant. Il rend certes au praticien incriminé ce qui lui appartient, c’est-à-dire son incompétence. Mais, à côté de l’article, c’est la photo de Daniel Mirisch qui est diffusée ! Bien que la

légende précise qu’il s’agit du président du conseil départemental à l’origine du contrôle, l’association entre le titre, « Le dentiste travaillait mal », et le portrait de Daniel Mirisch porte plus qu’à confusion. Mais au point où on en est… Résultat : le président du conseil départemental de l’Oise a récolté un salaire bien ingrat pour avoir assuré avec diligence et rigueur sa mission de santé publique. Il a ainsi découvert à ses frais le «pouvoir de nuisance » que peut constituer la presse quand elle fait mal son travail. Daniel Mirisch envisage de por ter plainte contre les journalistes négligents au motif de l’atteinte « à son honneur et à sa probité personnelle et professionnelle ». Il a par ailleurs exigé un droit de réponse sur l’antenne de France 3, qu’il n’a pas obtenu…

L’Ordre et la DDASS donnent l’alerte Les patients du praticien fautif ont été informés des risques encourus. Premier semestre 2004. Le conseil départemental de l’Oise et la CPAM de Beauvais reçoivent plusieurs courriers de patients du chirurgiendentiste Freddy Berrih. Ce dernier – qui a déjà un passif en matière de problèmes de qualité des soins – est accusé de ne pas respecter les règles professionnelles d’hygiène et d’asepsie à son cabinet installé à Beauvais. Juillet 2004. La Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) diligente une visite d’inspection. Le constat est sans appel. Le praticien néglige les conditions d’hygiène et de stérilisation : il ne dispose ni de produits désinfectants ni de gants et utilise un vieux stérilisateur de type Poupinel sans même en connaître les règles d’utilisation. Le praticien ignore les procédures réglementaires d’élimination des déchets piquants-coupants et d’activité de soins. Une contre-visite réalisée fin août et l’examen de ses factures de fournitures ne font que confirmer les manquements constatés lors de la première visite.

Le 20 septembre, le préfet de l’Oise prononce logiquement un arrêté de suspension d’exercice immédiate du praticien d’une durée de cinq mois et de fermeture du cabinet. Concomitamment et avec le conseil départemental de l’Oise il porte plainte devant le conseil régional. Le conseil départemental et la DDASS adressent conjointement un courrier à 353 patients de Freddy Berrih, accompagné d’une ordonnance les invitant à réaliser un bilan sanguin. Un numéro de téléphone Azur et une cellule de crise sont mis en place afin de répondre aux questions et d’informer les autres patients qui n’ont pu être identifiés d’un risque infectieux. Freddy Berrih, pour l’heure introuvable, est suspendu d’exercice pour trois ans et radié à vie pour une affaire précédente… Il a fait appel des deux décisions. Par ailleurs, n’ayant pas répondu à une convocation du tribunal pénal de Beauvais pour « mise en danger de la vie d’autrui », un mandat d’arrêt international a été délivré à son encontre.

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Lettre 7


l’actualité Contrats

SEL et collaboration libérale : deux nouvelles mesures adoptées Les dispositions du Conseil national concernent l’insertion d’une période d’essai dans le contrat de collaboration libérale et l’extension de l’assistanat aux SEL comportant plusieurs associés exerçants.

Sur proposition de la commission des contrats lors de la dernière session du Conseil national en date du 18 mars 2005, deux nouvelles mesures ont été adoptées. Ces décisions concernent l’insertion d’une période d’essai dans le contrat de collaboration libérale, d’une part, et l’extension de l’assistanat aux SEL comportant plusieurs associés exerçants, d’autre part. Nous détaillons ci-dessous ces mesures. • Assistanat dans les SEL comportant plusieurs associés exerçants Il s’agit ici d’harmonisation des règles légales et déontologiques des sociétés civiles professionnelles (SCP) avec celles des sociétés d’exercice libéral (SEL). La mesure adoptée par le Conseil national rend désormais possible, pour les SEL, le recours à l’assistanat, quel que soit le nombre d’associés en exercice au sein de la société. Dans une précédente circulaire datée du mois de juin 2001, le Conseil national admettait la possibilité d’assistanat uniquement dans la SEL unipersonnelle (un seul associé exerçant) ou encore dans la SEL constituée d’un associé majoritaire en exercice et d’un associé professionnel extérieur uniquement détenteur en capital (non exerçant). Pour les SCP, selon un décret de juillet 2004, il n’y a pas de limitation du nombre d’associés (1). De plus, l’assistanat est autorisé pour les SCP, quel que soit le nombre des associés. Or, dans un souci de simplification et d’harmonisation de l’exercice pour les associés en SEL, le Conseil national a décidé d’étendre cette possibilité 8 la Lettre no 37 Mai 2005

d’assistanat aux SEL comportant plusieurs associés exerçants. Rappelons cependant que c’est la SEL, et donc la société exerçant la profession, qui peut s’adjoindre un praticien diplômé ou un étudiant, et non chacun des associés. Par conséquent, quel que soit le nombre de praticiens exerçant au sein de la SEL, il ne pourra y avoir qu’un seul assistant. Le contrat qui pourra être de nature libérale ou salariée sera obligatoirement conclu entre la société d’une part et l’assistant d’autre part. • Insertion d’une période d’essai d’une durée d’un mois dans le contrat de collaboration libérale Dans le souci d’établir un parallèle avec le contrat de louage de services (contrat de travail), mais également

en vue de permettre au titulaire du cabinet et au collaborateur de disposer de suffisamment de temps pour s’apprécier mutuellement, le Conseil national a décidé de l’adjonction d’une période d’essai dans le contrat type de collaboration libérale. Cette période d’essai aura pour avantage de permettre à chacune des deux parties de rompre le contrat sans motif particulier. Le Conseil national fixe la durée de cette période d’essai insérée dans le contrat de collaboration libérale à un mois. André Micouleau Président de la commission des contrats (1) Décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004 portant codification de la partie réglementaire du Code de la santé publique.

Associés de SCP et étudiants : La commission des contrats propose que les étudiants soutiennent leur thèse avant la validation de la sixième année d’étude.

La commission des contrats poursuit son travail visant à faciliter et à améliorer l’exercice des confrères. Deux réflexions sont désormais à l’étude, consistant à : • envisager la possibilité, pour un associé d’une SCP, de mener une activité annexe libérale ; • faire en sorte que les étudiants en chirurgie dentaire de soutenir leur thèse avant la validation de la 6e année d’étude. S’agissant du premier point, la commission des contrats a engagé une réflexion quant à l’interdiction pour


: les chantiers en cours un associé d’une SCP de s’engager dans une activité annexe libérale, alors que les textes réglementant les SEL ne l’interdisent pas. Dans un souci d’harmonisation entre les SEL et les SCP, le Conseil national entend supprimer cette interdiction et va saisir le ministère des Solidarités, de la Santé et de la Protection sociale en vue d’obtenir la modification de l’ar ticle L. 4113-72 du Code de la santé publique consistant à permettre au chirurgien-dentiste exerçant en SCP de mener une activité annexe libérale.

Réduire le temps d’exercice salarié de l’étudiant Concernant la réflexion de la commission des contrats quant aux étudiants, en pratique, la soutenance de thèse se déroule au mieux dans le courant de l’année civile qui suit la fin de la 6e année. En d’autres termes, entre le moment où les étudiants ont validé leur 5e année et celui où ils soutiennent leur thèse, il peut s’écouler un délai dont la durée est susceptible de s’étendre de 18 mois à 30 mois. Cette pratique dérogatoire trouve sa

justification dans les dispositions d’un décret (1). Or, force est de constater que les jeunes ont des difficultés à intégrer la vie professionnelle libérale après avoir fait l’expérience d’un exercice de 18 mois ou davantage en qualité de salariés. Il apparaît donc oppor tun de leur laisser le choix le plus tôt possible entre l’exercice libéral et l’exercice salarié. Au cours de la session de décembre 2004 il apparaissait, selon les propos du Pr Claude Séverin, président de la Conférence des doyens, que dans le cadre de la réforme LMD (licence, master, doctorat), l’étudiant sortirait diplômé dès la fin du master (donc dès la fin de la 6e année de son cursus). Sur proposition de la commission des contrats, le Conseil national suggère donc d’engager une réflexion sur la réduction du temps d’exercice salarié de l’étudiant à partir d’une démarche organisée autour des deux thèmes suivants : • mener une étude conjointe avec la commission de l’enseignement et la commission des contrats afin d’évaluer les incidences d’une telle mesure ; • établir une concertation entre les différents acteurs (étudiants, enseignants, syndicats de la commission pédagogique nationale des études odontologiques…) afin d’évaluer au mieux leurs attentes sur la question. André Micouleau Président de la Commission des contrats

(1) Décret n° 94-120 du 4 février 1994, modifié par le décret n° 99-852 du 1er octobre 1999 et désormais codifié dans le Code de la santé publique aux articles R. 4141-1 à R. 4141-3. Mai 2005

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l’actualité Infections virales – Prévention

Un vaccin contre le zona est en cours de développement Le vaccin serait disponible d’ici à trois ans, selon une étude du LEEM. S’agissant des vaccins contre les hépatites C et E, l’herpès et le VIH, il n’est pas prévu de mise sur le marché avant dix ans.

Selon les auteurs d’une étude prospective du LEEM («Les Entreprises du médicament »), un certain nombre de vaccins en cours de développement, dont certains intéressant de très près la pratique dentaire, seraient à disposition d’ici à quelques années. Ainsi, le vaccin contre l’infection au VIH pourrait être mis sur le marché dans une dizaine d’années. Au rang des autres avancées pressenties, les auteurs tablent sur le développement de vaccins thérapeutiques pour le contrôle des infections virales (hépatite B, herpès). Mais l’accès à ces vaccins reste envisagé sur le long terme, c’est-à-dire en dizaines d’années. En revanche, selon les auteurs, la mise à disposition d’un certain nombre de vaccins de prévention pourrait inter venir dans un délai beaucoup plus court. Plusieurs des affections visées par ces vaccins en développement touchent à la pratique dentaire : hépatite C et E, herpès, zona et, bien sûr, VIH. Les auteurs estiment que les premiers vaccins pourraient être disponibles dans trois ans

LES PRATICIENS FRANÇAIS, PEU PRESCRIPTEURS DE VACCINS Avec une perception très positive des vaccins (87 %), les Français se situent dans la moyenne européenne (Allemagne : 86 %, Espagne : 91 %, Italie : 81 %, Grande-Bretagne : 91 %). Mais les praticiens français se réfèrent moins souvent aux recommandations officielles en la matière que leurs homologues européens. La France connaît en effet le pourcentage le plus faible d’Europe de médecins déclarant se conformer au calendrier vaccinal préconisé par les autorités de santé : 13 % contre 37 % en moyenne dans les autres pays étudiés. De fait, l’étude rapporte que les patients perçoivent peu le rôle préventif de la vaccination et qu’ils s’informent sur les vaccins via les médias.

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(pour le zona), ou dans un délai de trois ans à dix ans (pour les autres maladies). On relèvera que l’étude, réalisée en France, en Allemagne en Espagne, en Grande-Bretagne et en Italie par le comité Vaccin du groupe « Les Entreprises du médicament », compor te une grande enquête sur la perception de la vaccination par le grand public et les professionnels de santé. Ses résultats font état d’une forte adhésion des patients et des professionnels des cinq pays européens à la vaccination. On y apprend que depuis la Seconde Guerre mondiale, plus de 22 nouveaux vaccins ont été introduits. Ce qui permet, aujourd’hui de prévenir 26 maladies infectieuses. « Les programmes de vaccination ont profondément transformé le visage de la médecine préventive dans le monde entier » écrivent les auteurs qui estiment toutefois que des avancées sont encore possibles en la matière : « Avec 24 % du chiffre d’affaires consacré à la recherche et au développement, l’activité Vaccin des Entreprises du médicament est l’une des plus dynamiques en terme d’innovation. » Robert Regard Vice-président du Conseil national


Radioprotection

La fin du cliché à visée non thérapeutique Une décision importante attendue par la profession

Un arrêté relatif à la prise de clichés radiographiques vient de paraître. Attendu par la profession depuis longtemps, ce texte supprime l’obligation pour les praticiens d’effectuer une radiographie après reconstitution du moignon coronaire, avant la pose d’une couronne. Il a été publié dans le Journal officiel du 1er avril (lire le texte intégral de l’arrêté p. 31). En ce qui concerne la réalisation d’obturations dentaires définitives, les cli-

chés radiographiques préopératoires et postopératoires restent obligatoires (article 1er), conformément aux références et recommandations de l’ANAES. Ces clichés sont conservés dans le dossier du patient. En revanche, s’agissant de la réalisation d’une couronne dentaire faisant intervenir la mise en place d’une reconstitution coronoradiculaire (quelle que soit la technique utilisée), la mention « un cliché radiographique pris après reconstitution du

moignon coronaire […] est obligatoire» est remplacée par « le ou les clichés radiographiques préopératoires dont la nécessité médicale est validée scientifiquement sont conservés dans le dossier du patient». Par conséquent, la décision de réaliser un cliché radiographique pour la reconstitution coronoradiculaire est confiée à la responsabilité du praticien. Robert Regard Vice-président du Conseil national

Parution

David Jacotot signe un guide pratique de droit dentaire L’ouvrage délivre des réponses sur mesure aux situations à risques auxquelles sont exposés les praticiens.

Collaborateur de La Lettre, David Jacotot, docteur en droit, vient de signer un ouvrage consacré au droit dentaire, intitulé Prévenir et gérer le conflit au cabinet dentaire. Le livre répertorie l’ensemble des situations à risque juridique auxquelles sont exposés les praticiens, du contrôle médical au paiement des honoraires en passant par les relations avec les patients, le bailleur, l’assureur, le régime complémentaire du patient ou encore les collaborateurs, les associés et les personnels. L’originalité du livre consiste, comme son titre l’indique, à délivrer des conseils afin que le pra-

ticien se protège des risques de litige et, lorsque le contentieux est né, à conseiller le chirurgien-dentiste pour mieux assurer sa défense. Un outil de référence à se procurer pour sécuriser l’exercice du chirurgien-dentiste ! L’ouvrage est préfacé par le président du Conseil national, Pierre-Yves Mahé. Texto Editions 192 pages – 35 euros www.texto-editions.com Paiement sécurisé par carte bancaire ou par chèque. Renseignements par fax au : 01 58 30 63 22 Mai 2005

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Lettre 11


l’actualité Une initiative du vice-président de l’Ordre de l’Orne

Un chirurgien-dentiste en campagne pour l’exercice au vert Georges Dahan tord le cou aux idées reçues sur l’exercice en milieu rural, chiffres à l’appui, lors de rencontres avec les étudiants en odontologie.

A l’heure où le déséquilibre en matière de démographie professionnelle entre ville et campagne reste préoccupant, Georges Dahan, vice-président du conseil dépar temental de l’Orne, prend son bâton de pèlerin pour lancer une opération de promotion de l’exercice en milieu rural inédite à ce jour. Son objectif : inciter les étudiants à s’installer en zone rurale, notamment dans son département. Pour ce faire, Georges Dahan se rend dans les facultés dentaires (Montrouge et Rennes l’ont déjà accueilli) afin de briser le cou aux idées préconçues sur l’exercice de l’art dentaire en milieu rural. Par une présentation objective des conditions d’exercice dans la campagne normande, Georges Dahan, luimême installé dans un petit village de 900 habitants, entend renverser la tendance qui conduit les étudiants à préférer une installation en ville (lire l’encadré ci-dessous). Premier préjugé auquel il s’attaque : une supposée diversité des actes

moins élevée à la campagne qu’en ville. Selon Georges Dahan, l’emplacement du cabinet ne joue pas sur la nature des actes, qui restent sensiblement identiques. « En milieu rural comme en milieu urbain, les principaux actes réalisés sont les soins conser vateurs (entre 45 et 50 %), puis les actes de radiologie (environ 6 %), les soins prothétiques, et enfin les consultations et les actes côtés en DC (plus ou moins 10 %)» préciset-il à la lueur des chiffres communiqués par l’Union régionale des caisses d’assurance maladie de Normandie (URCAM).

Un retour sur investissement plus rapide Deuxième idée reçue : une installation à la campagne ne serait pas rentable. «Au cours de l’année 2002, les chirurgiens-dentistes exerçant en milieu rural ont réalisé plus d’actes que ceux exerçant en milieu urbain (3 480 pour les premiers, 3 081 actes pour les seconds) » relève-t-il,

BASSE-NORMANDIE : LES ZONES RURALES PARTICULIÈREMENT DÉFICITAIRES Si le nombre de praticiens est à peu près stable sur l’ensemble du département de l’Orne, les zones rurales sont victimes du déficit de remplacement des chirurgiens-dentistes qui partent à la retraite. Ainsi, depuis 1996, si 153 chirurgiens-dentistes ont cessé leur activité en Basse-Normandie, 156 installations ont été enregistrées. En revanche, on compte 51 praticiens ayant exercé en zone rurale à avoir pris leur retraite (33,3 % des praticiens de la région) contre seulement 39 chirurgiens-dentistes à y avoir établi leur cabinet (25 % des nouvelles installations de la région).

12 la Lettre no 37 Mai 2005

s’agissant de la Basse-Normandie. A l’inverse, selon lui, une installation à la campagne permettrait un « retour sur investissement plus rapide », notamment en raison de la « faiblesse des prix de l’immobilier privé et professionnel». Elle offre également «l’opportunité de se constituer une clientèle fidèle et demandeuse de soins », précisément en raison du manque de professionnels de santé dans la zone rurale en question.

Des problématiques décisives en termes de santé publique A quoi s’ajoute «une situation géographique attractive au cœur d’un réseau de communications, un niveau de qualité de vie appréciable, la possibilité de poursuivre des études dans le département, une économie diversifiée », et Georges Dahan débarrasse l’installation en Basse-Normandie ou, plus généralement, à la campagne de ses clichés tenaces. Le Conseil national salue cette initiative du vice-président de l’Orne, impliqué tant sur le plan personnel qu’à l’échelon ordinal dans les problématiques de la démographie professionnelle. Des problématiques décisives dans la mission de santé publique qui incombe à la profession. Reste à souhaiter que ce type d’initiative trouve un écho favorable auprès d’autres confrères ou d’autres départements et, surtout, que l’appel de la campagne sera entendu par les jeunes chirurgiens-dentistes au moment du choix de leur première installation.


Information judiciaire

Commission rogatoire : l’obligation de levée du secret La réquisition par la justice d’informations médicales constitue une exception à l’obligation de secret professionnel du praticien.

Dans le cadre d’une information judiciaire, un officier de la police nationale demande à une consœur de lui communiquer les dates de rendez-vous de plusieurs de ses patients soupçonnés d’escroquerie et de falsification de chèques. En vertu de la commission rogatoire délivrée par le juge d’instruction, la consœur ne peut invoquer le secret professionnel et se dérober à la réquisition. Elle est tenue de se soumettre aux exigences de la justice, quand bien même il lui semble contrevenir à la déontologie professionnelle. Certes, la communication des renseignements demandés est couverte par les dispositions du Code pénal, qui punit d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende «toute personne qui révèle une information à caractère secret dont elle est dépositaire, soit par état ou profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire » (1). Toutefois, le même

Code prévoit que ces sanctions ne sont pas applicables dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret (2).

Une dérogation exceptionnelle et inaliénable Par ailleurs, la loi du 9 mars 2004 (3) portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité a créé un article dans le Code de procédure pénale (4), lequel prévoit une obligation de se soumettre aux réquisitions de l’officier de police judiciaire sous peine de sanctions pénales. Ce même article prévoit cependant que, lorsque les réquisitions concernent notamment des médecins, la remise des informations requises ne peut se faire qu’avec leur accord. Il ne s’agit donc plus, pour le médecin, d’une obligation, mais d’une autorisation à pouvoir violer le secret professionnel. La question peut se poser de savoir si

une telle disposition du Code de procédure pénale, qui mentionne les médecins et non les chirurgiens-dentistes, est transposable à notre profession (5). Bien que rare en la matière, la jurisprudence inciterait à le penser. Compte tenu de cette autorisation, on ne peut pas, stricto sensu, parler de violation du secret professionnel par la consœur, obligée de répondre aux réquisitions de la police nationale, mais plutôt d’une forme de dérogation exceptionnelle et inaliénable. Gardons à l’esprit que les prérogatives judiciaires prévalent toujours sur la déontologie professionnelle. Jacques Cherpion Secrétaire général (1) Article 226-13 du Code pénal. (2) Article 226-14 du Code pénal. (3) Article 80 de la loi du 9 mars 2004. (4) Article 60-1 du Code de procédure pénale. (5) Disposition découlant de l’article 56-3 du Code de procédure pénale. Mai 2005

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Lettre 13


l’actualité Sécurité sociale

Cotation TO 15 + 5 pour les soins ODF réalisés sur les adultes Le Conseil national est régulièrement sollicité par des praticiens auxquels les caisses d’assurance maladie refusent les cotations en TO 15 + 5 des actes ODF réalisés aux bénéficiaires âgés de plus de 16 ans. Pour ces caisses, tous les soins en ODF effectués sur cette catégorie de patientèle doivent être cotés hors nomenclature. Faute de quoi, elles exigent du chirurgien-dentiste le remboursement des sommes versées aux patients. Mais, l’assurance maladie ne tient pas compte d’un arrêt de la Cour de cassation. Dans cet arrêt rendu en

avril 2004 (1), une caisse avait commis une erreur en versant à une patiente âgée de 19 ans, la somme de 282 francs au titre de prise en charge des soins ODF reçus. La caisse avait agi devant le tribunal des affaires de sécurité sociale afin d’obtenir répétition de l’indu (remboursement de la somme versée) en arguant que le praticien aurait dû coter les soins hors nomenclature. Mais la Cour de Cassation a estimé que « la cotation retenue par le praticien correspondait bien au type et à la valeur des actes techniques pratiqués par lui. Il avait donc bien res-

pecté la NGAP. L’indication de l’âge de la patiente permettait à la caisse de refuser la prise en charge ». La caisse a été condamnée à payer 2 200 euros au chirurgien-dentiste injustement accusé de cotation erronée. Une somme autrement plus impor tante que le montant de la prise en charge contesté qui s’élevait à 282 francs au moment des faits… Jacques Cherpion Secrétaire général (1) Pourvoi n° N02-20.167, arrêt n° 473 F-D du 6 avril 2004.

Droit de réponse à la demande de Santéclair Le Conseil de l’Ordre met une nouvelle fois en cause Santéclair dans le n° 35 de mars 2005 [p. 31] en lui reprochant à nouveau « différentes dérives dans les modalités d’application de son accord de partenariat ». Santéclair tient à rappeler qu’elle a travaillé pendant deux années (2000 et 2001) en étroite coordination avec le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes pour mettre au point un accord de par tenariat avec les chirurgiens-dentistes qui recueille un avis déontologique favorable. Cet accord n’a pas changé; il reste donc conforme à la déontologie de la profession. Trois incidents ont été, depuis près de deux ans, « utilisés » par le Conseil de l’Ordre pour retirer son avis favorable. 14 la Lettre no 37 Mai 2005

Ces incidents, toujours les mêmes, sont répétés inlassablement et présentés comme une succession de dérives déontologiques. Or, deux de ces incidents ne sont pas imputables à Santéclair. Il s’agit en l’occurrence d’un tract publicitaire reproché à un courtier et d’un chirurgien-dentiste ayant utilisé à tor t le papier à lettres de Santé Conseil Service (ancien nom de Santéclair) pour convoquer un patient dans le cadre d’une suspicion de fraude grave à l’assurance. Le troisième reproche est présenté régulièrement comme un « démarchage commercial » vis-à-vis des chirurgiensdentistes, mais Santéclair nie inlassablement avoir effectué ce type de démarche.

De plus, il faut rappeler que l’arrêt du Conseil d’Etat en date du 25 octobre 2004 s’est borné à considérer que l’avis émis par l’Ordre sur le protocole Santéclair ne relevait pas de sa compétence, sans se prononcer sur le fond du litige. Santéclair s’étonne en conséquence de cette mise en cause permanente d’autant que le Conseil de l’Ordre n’a pas hésité à dresser une liste de compagnies d’assurances bénéficiant d’un avis déontologique favorable et d’autres ayant reçu un avis déontologique défavorable c’est-à-dire à inciter les praticiens à traiter avec cer taines compagnies d’assurances, au détriment d’autres sociétés, ce qui apparaît contraire à la liber té de la concurrence.


Exercice 2004

Une nette diminution des dépenses du Conseil national Une gestion rigoureuse aura permis d’enregistrer une baisse de 7,7 % des dépenses par rapport à l’année passée. A noter que des provisions ont été constituées afin de mener à bien le grand chantier de la refonte des systèmes informatiques de l’Ordre et de sa mise en réseau nationale et départementale.

Le bilan comptable 2004 du Conseil national présente une nette diminution des dépenses par rappor t à l’exercice précédent, c’est-à-dire une baisse de 7,7 % par rapport à 2003. Le bilan, dont nous publions les chiffres dans les pages suivantes, a été examiné par la commission des finances en séance plénière, en présence des membres de droit du Conseil national (président, secrétaires généraux et trésoriers), de l’expert-comptable du Conseil national ainsi que du service de la comptabilité. C’est grâce à un suivi trimestriel rigoureux que la commission des finances a pu formuler des observations et des propositions conduisant à l’approbation par le Conseil national de ce bilan financier pour l’année 2004. Une vigilance constante de la commission des finances, en coopération avec les trésoriers du Conseil national, qui aura donc notablement contribué à diminuer les dépenses par rapport au précédent bilan.

Une baisse sensible des Services extérieurs La diminution substantielle des dépenses des services extérieurs (22,77 %) a autorisé le Conseil national à privilégier les actions de communication dont la masse globale a plus que doublé. Le Conseil national répond ainsi au souhait émis par l’ensemble des

conseils départementaux de recevoir une formation administrative ou juridique et de participer à des stages d’expression orale ou écrite. Précisons par ailleurs que la politique financière du Conseil national qui repose sur l’harmonisation, la péréquation a été renforcée, de même que le soutien financier apporté à la formation continue. Les subventions aux départements ont été accordées selon les conditions habituelles. Notons cependant que, à l’exception de l’aide financière attribuée aux départements à faible démographie, l’ensemble des dépenses citées ci-dessus suppose, selon notre procédure, la présentation d’un dossier et, en ce qui concerne les subventions, la présentation d’un

bilan recettes-dépenses annuel. Les charges de fonctionnement regroupant les charges du personnel administratif, les charges inhérentes à la participation des élus aux différentes instances ainsi que les charges relatives à la gestion du patrimoine immobilier sont globalement en diminution. Par ailleurs des provisions ont été constituées afin de mener à bien le grand chantier que représente la refonte totale des systèmes informatiques de l’Ordre, avec la mise en place d’un réseau efficient entre le Conseil national et les conseils départementaux. Jean-Martin Vadella Président de la commission des finances Mai 2005

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Lettre 15


l’actualité

LES COMPTES DU CONSEIL NATIONAL AU 31-12-2004 RECETTES Cotisations ordinales (année 2004 + années antérieures) Autres produits de gestion courante + transfert de charges (dons, intérêts, remboursements divers) Produits exceptionnels et financiers Reprises sur provisions litiges Total des recettes DEPENSES Charges spécifiques Harmonisation – Péréquation (aide aux conseils départementaux et régionaux) Statut des élus (versements aux conseils départementaux et régionaux pour leurs élus) Solidarité (secours envers les confrères âgés ou malades, les veuves et orphelins de confrères, les cas exceptionnels, etc.) Aide à la régionalisation (CRCO) CNFCO Comité national de formation professionnelle odontologique Provision pour investissements et risques Actions de communication Subventions Académie nationale de chirurgie dentaire Bus social dentaire (action humanitaire) AOI AFIO CNHSBD UFSBD UNECD Divers (dont prix de l’Académie de chirurgie dentaire) Formations diverses (conseillers et secrétaires conseils départementaux) Charges de fonctionnement Charges de salaires Appointements Primes de transport Primes de vacances aux enfants du personnel Provision congés payés Charges sociales URSSAF Retraite UGRR (cadres et non-cadres) Retraite MEDERIC (cadres) ASSEDIC (GARP) Mutuelle Tickets restaurant Médecine du travail, pharmacie, Chèques Lire Provision charges sociales congés payés Impôts et taxes Taxes sur les salaires Autres impôts et taxes (taxes foncières, autres impôts locaux, taxe de formation continue, redevance TV, effort construction, contribution pour emploi handicapés, etc.)

16 la Lettre no 37 Mai 2005

6 856 934,44 97 314,02 1 618,27 28 890,00 6 984 756,73 1 487 348,86 139 756,00 471 800,00 62 995,00 163 300,00 5 500,00 73 500,00 205 054,59 277 029,67 87 995,00 9 910,00 8 371,00 7 000,00 9 100,00 7 500,00 37 114,00 7 500,00 1 500,00 418,60 3 092 567,56 1 248 895,36 1 229 563,25 18 199,08 2 023,03 -890,00 660 924,28 381 319,25 87 567,12 61 849,35 49 182,61 41 445,60 36 445,53 3 559,82 -445,00 198 320,47 127 132,59 71 187,88


LES COMPTES DU CONSEIL NATIONAL AU 31-12-2004 Charges des immeubles (Emile-Ménier et Spontini) Eau EDF-GDF Fournitures d’entretien Assurances multirisques Transports et remboursements de frais (Sessions et intersessions du Conseil national, réunions des conseils départementaux, régionaux & CRCO, réunions et audiences de la Section disciplinaire, réunions et audiences de la Section des Assurances Sociales, commissions du CNFPO, commissions diverses [enseignement, contrats, interorganismes, pharmacovigilance, communication, ODF, ADF, etc.]) Frais de réunion et de séjour Frais de déplacement Frais d’intendance Transports de biens

35 770,44 779,89 19 131,28 9 935,02 5 924,25 948 657,01

638 625,74 232 993,19 76 328,39 709,69

Services extérieurs Services administratifs Fournitures de bureau Location de matériel Entretien et réparation du matériel de bureau Maintenances diverses Lettre du CNO et frais de télécommunication La Lettre mensuelle du Conseil national Brochures & autres publications OR. ED. (guides d’exercice professionnel, etc.) Affranchissement (dont affranchissement de La Lettre du CNO) Téléphone Internet Frais divers de gestion Documentation Honoraires divers Assurances risques d’exploitation Cadeaux, décorations, fleurs pour obsèques, etc. Frais de banque Lutte contre l’exercice illégal Frais d’actes et de contentieux Cotisations diverses, pourboires et dons Concours de déontologie Frais d’archivage Cartes professionnelles Charges exceptionnelles

1 083 219,10 115 982,32 64 690,29 38 641,23 668,98 11 981,82 697 113,65 375 582,21 1 847,22 1 085,40 251 865,46 50 757,31 15 976,05 270 123,13 29 253,06 141 249,07 23 439,61 9 311,57 877,07 22 569,58 6 613,52 4 255,10 12 261,20 6 191,80 13 005,43 1 096,12

Résultat de l’exercice

1 321 621,21

Total des dépenses

6 984 756,73

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Lettre 17


l’actualité Risques sanitaires

Déchets piquants : un communiqué du ministère Un arrêté relatif à l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés et des pièces anatomiques va paraître incessamment.

Afin de limiter les risques sanitaires liés à l’utilisation des emballages, notamment dans la récupération des déchets piquants, coupants ou tranchants le ministère de l’Emploi, du Travail et de la Cohésion sociale diffuse la circulaire publiée ci-dessous. «[…] L’attention de nos services a été appelée à la suite de plusieurs incidents survenus lors de l’utilisation des boîtes destinées à la collecte des dispositifs médicaux piquants tranchants souillés après leur utilisation.

Recommandations d’utilisation Les incidents recensés se caractérisent généralement par une per foration de la paroi de la boîte et ont conduit à des blessures ou piqûres des utilisateurs. L’origine de ces incidents est multiple et révèle, soit une faiblesse des matériaux utilisés dans la fabrication de ces boîtes, soit une utilisation inappropriée. Dans le cadre du décret n° 97-1048 du 6 novembre 1997 relatif à l’élimination des déchets d’activités de soins à risques infectieux et assimilés et des pièces anatomiques, un arrêté précisera les caractéristiques techniques auxquelles devront satisfaire ces boîtes. Dans l’attente de la publication de cet arrêté, compte tenu du risque de blessure pour les utilisateurs, nous demandons dès à présent : • aux utilisateurs de por ter une attention par ticulière lors du remplissage de ces boîtes et au moment de leur manipulation ; 18 la Lettre no 37 Mai 2005

• de respecter les instructions des fabricants sur les conditions d’utilisation ; • de n’utiliser ces boîtes que pour la seule collecte des dispositifs médicaux piquants ou tranchants à l’exclusion de tout autre objet ; • d’utiliser des boîtes dont le volume est adapté au flux d’objets à éliminer tout en garantissant une évacuation fréquente ; • de procéder à l’évacuation de ces boîtes dès lors que le niveau de remplissage autorisé par le fabricant est atteint ; • d’assurer la formation et l’information des personnels sur les conditions d’utilisation des boîtes mises à leur disposition afin de garantir

DES COLLECTEURS POUR LES PRATICIENS LIBÉRAUX Des collecteurs de petite taille et des boîtiers de recueil d’aiguilles usagées dits « de poche » adaptés à l’exercice libéral en raison de leur faible encombrement sont disponibles. Ce type de dispositif nécessite en général lors de l’élimination l’usage de la main controlatérale (pour tenir soit une partie du mécanisme de désadaptation de l’aiguille, soit le haut du collecteur), qui se trouve ainsi exposée à la piqûre de l’aiguille à évacuer.

une sécurité optimale selon les instructions données par les fabricants. Le groupe d’étude sur le risque d’exposition au sang (GERES) a défini des critères de sécurité sur les boîtes destinées à la collecte d’objets tranchants, piquants ou souillés. […] Par ailleurs, l’utilisation de boîtes constituées d’un matériau (car ton, par exemple) n’offrant pas une résistance mécanique suffisante est à proscrire.

Que faire en cas d’accident ? En cas de blessure d’un agent par un dispositif médical souillé contenu dans un collecteur, il convient : • de suivre les recommandations de la note d’information DGS/DH/DRT n° 666 du 28 octobre 1996 relative à la conduite à tenir après accident d’exposition au sang ; • en cas d’exposition au risque de transmission du VIH, de suivre les recommandations de mise en œuvre d’un traitement antirétroviral prévues par la circulaire DGS/DH/DRT/DSS n° 98-228 du 9 avril 1998; • de faire une déclaration d’accident du travail ; • de signaler l’incident auprès du ministère de l’Emploi […], Direction des hôpitaux, bureau SI/2 de la Sous-direction des systèmes d’information et des investissements immobiliers (tél. : 01 40 56 52 87, télécopie : 01 40 56 50 45) auprès duquel tout renseignement complémentaire pourra être obtenu. […] »


dossier

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Lettre 19


dossier Instauration du DMP

Pourquoi privilégier le plus large accès aux données de santé des patients Lors de la conférence du MEDEC, l’Ordre des chirurgiens-dentistes a réaffirmé sa position sur l’importance d’un accès élargi des praticiens aux informations relatives à la santé des patients.

On relève chaque année 128000 hospitalisations consécutives à de mauvaises interactions entre médicaments conduisant au décès de 8000 personnes. Pierre angulaire de la réforme de l’assurance maladie, le dossier médical personnel (DMP) fait office de porte-drapeau de l’ambition du ministère de la Santé d’éviter la réalisation d’«actes médicaux redondants ou inutiles». Un outil pour favoriser la coordination, la qualité et la continuité des soins qui, s’il est bien utilisé, devrait permettre «d’économiser, (à terme), 3, 5 milliards d’euros par an» nous annonce-t-on. Dossier individuel, informatisé, obligatoire pour tous les assurés de plus de 16 ans et regroupant toutes les informations médicales disponibles et nécessaires concernant le patient : telles sont les caractéristiques du DMP. Il comportera toutes les données de santé consignées par les praticiens de ville et hospitaliers. Le niveau de remboursement pris en charge par l’assurance maladie sera subordonné à

l’autorisation donnée au professionnel de santé d’accéder au dossier. Mais cet avenir qui se construit aujourd’hui passe pour la profession dentaire par la réponse à une question centrale : à quelles informations médicales concernant son patient le chirurgien-dentiste aura-t-il accès?

Une division en trois zones d’accessibilité Relevons que la loi du 13 août 2004 ne donne pas un accès exclusif à une seule profession de santé. L’article L. 161-36-4 du Code de la sécurité sociale dispose en effet que la parution d’un décret en Conseil d’Etat, après avis de la CNIL et des Conseils nationaux de l’Ordre des professions de santé, fixera « les conditions d’application […] et notamment les conditions d’accès aux différentes catégories d’informations qui figurent au dossier médical personnel ». Cependant, il semble acquis que tous les professionnels de santé ne pourront

LE CALENDRIER SERA-T-IL TENU ? La date de mise en application du dispositif du DMP est prévue au 1er janvier 2007. Au préalable, à partir de septembre 2005, six sites pilotes serviront l’expérimentation du dispositif. Dans un second temps, début 2007, les patients atteints d’affections de longue durée devraient bénéficier d’un dossier «opérationnel». Les expériences régionales seront alors intégrées afin que le dossier soit étendu à la totalité des assurés à la fin du premier semestre 2007. 20 la Lettre no 37 Mai 2005

accéder au même contenu : des niveaux différents de consultation des données en fonction de la qualité et du rôle du professionnel seront prévus (lire La Lettre n° 35, p. 23). Les données pourraient ainsi être divisées en trois zones : une zone verte pour les informations accessibles en lecture, une zone orange pour les informations dont l’existence est connue mais qui ne pourront être consultées sans l’autorisation du patient, une zone rouge pour les informations dont l’existence même sera inconnue. Pour le Conseil national, le DMP doit être le support d’une relation de confiance entre le praticien et son patient, mais aussi entre les différents acteurs professionnels qui participent à son élaboration. Ce dossier reflétant l’histoire sanitaire du patient doit constituer un document efficace de traçabilité, véritable outil d’amélioration de la qualité des soins et de la sécurité des patients. Mais il ne pourra en être ainsi qu’à la condition que chaque professionnel de santé puisse accéder rapidement et directement, après avoir obtenu l’accord de son patient, à l’ensemble des données médicales qu’il jugera utiles à la mise en œuvre d’un traitement sécurisé et efficace. En pratique, pour les chirurgiens-dentistes qui réalisent un grand nombre d’actes invasifs, et de plus en plus souvent chez des patients porteurs de pathologies lourdes et multiples, il semble évident que l’accès aux données


médicales doit être large. Et cela afin d’éviter, par exemple, de réaliser des soins qui puissent s’avérer dangereux ou contre-indiqués pour le patient. Le chirurgien-dentiste a donc besoin de savoir s’il existe des contre-indications à son intervention, notamment s’agissant des actes sanglants ou effectués en milieu infecté…Il doit également être informé, par exemple, des pathologies cardiaques et rénales de son patient.En ce qui concerne les médicaments qu’il prescrit, particulièrement les antibiotiques, le praticien ne peut ignorer si son patient supportera le traitement, s’il est victime d’une allergie ou si d’autres médicaments lui ont été prescrits.

A l’occasion de la conférence inaugurale du MEDEC, Robert Regard a réaffirmé avec fermeté la volonté de la profession de disposer d’un accès le plus large possible aux informations contenues dans le DMP.

Permettre le dépistage de pathologies dérivées En conséquence, le Conseil national estime que le chirurgien-dentiste doit bénéficier d’un accès total aux traitements prescrits à son patient par les autres professionnels de santé. Les chirurgiens-dentistes sont également en droit d’attendre du DMP des informations relatives au comportement psychologique du patient (la prise d’antidépresseurs étant susceptible de constituer une contre-indication à certains actes) ou à l’existence d’un risque éventuel de crises d’épilepsie ou de syncopes. Autant d’informations décisives pour la qualité des soins dispensés. Il appartient donc à notre seule profession, en collaboration avec les autorités sanitaires compétentes, de fixer le champ des informations dont tout chirurgien-dentiste pourra disposer, en appuyant notre démarche sur un argumentaire documenté et raisonné. En contrepartie, les chirurgiens-dentistes, habitués à réaliser des dossiers nourris quant aux soins dispensés, ont le devoir d’informer les dossiers de leurs patients avec la plus grande rigueur possible. L’ar ticle L. 161-36-2 du Code de la sécurité sociale stipule ainsi que

«chaque professionnel de santé, quel que soit son mode d’exercice, reporte dans le dossier médical personnel, à l’occasion de chaque acte ou consultation, les éléments diagnostiques et thérapeutiques nécessaires à la coordination des soins de la personne prise en charge ». Le chirurgien-dentiste pourra être à l’origine d’un certain nombre d’informations déterminantes pour l’état de santé générale du patient : • Les complications qu’il a pu observer au cours des actes qu’il a effectués (réactions anormales, infections, réactions imprévues et disproportionnées aux soins); • Les prescriptions médicamenteuses formulées dans le cadre de son exercice; La nature des matériaux mis en • bouche, certains d’entre eux pouvant, par exemple, être à l’origine de réactions allergiques; • Par ailleurs, le chirurgien-dentiste se

situe à un poste observatoire du développement de foyers infectieux d’origine dentaire qui peuvent entraîner des troubles à distance. Par conséquent, les informations dont il dispose pourront permettre de dépister chez le patient, outre des manifestations infectieuses, d’autres pathologies telles que : troubles oculaires, problèmes de surdité ou, plus grave, cancers buccaux. Cette implication nécessaire du chirurgien-dentiste dans la réussite du dispositif du DMP passe par la mise en place d’une méthodologie réaliste d’élaboration du dossier, mais aussi d’une formation des praticiens et d’une éducation des patients à ce nouvel outil de santé. Le Conseil national revendique le droit légitime de participer aux travaux de mise en place du DMP, au sein du comité d’orientation du GIP dont c’est la mission.. Robert Regard Vice-président du Conseil national Mai 2005

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Lettre 21


dossier Conférence inaugurale du MEDEC

Ethique et confidentialité : la garantie des pouvoirs publics Le Conseil national participera au comité d’orientation du GIP, chargé de rédiger un cahier des charges destiné aux prestataires informatiques.

La réflexion liminaire et les travaux d’approche du dossier médical personnel avancent. Toutefois, le dispositif devra faire montre à la fois de cohérence, de sécurité et de simplicité d’utilisation, avec pour objectif de ne pas ébrécher la relation de confiance qui gouverne au par tage actuel des informations entre les patients et les professionnels de santé. Dans son intervention lors de la conférence inaugurale des Ordres au salon du MEDEC 2005, Xavier Bertrand, secrétaire d’Etat à l’Assurance maladie, a assuré que le DMP «devrait présenter toutes les garanties en matière d’éthique et de confidentialité afin de ne pas être utilisé dans un contexte qui sortirait de la relation soignantsoigné ». Pour autant, la question de la protection des informations qui figureront dans le dossier médical personnel reste au cœur de la mise en

œuvre du dispositif. Cette question qui avait fait l’objet d’un séminaire préparatoire en octobre dernier organisé par l’ANAES, à Roissy, a occupé le centre du débat lors de la conférence inaugurale du MEDEC.

Premier enjeu : la gestion des droits d’accès du DMP. Une fois définitivement établis les principes d’accès aux informations, des systèmes de protection et de masquage des données «sensibles» devront impérativement être intégrés.

Des outils informatiques fiables et d’utilisation simple

Le DMP suscite encore beaucoup d’interrogations auprès des professionnels de santé, comme en témoigne le public nombreux venu assister à la conférence.

S’agissant de la confidentialité même des informations, Xavier Bertrand a fait état des dispositions particulières prévues dans la loi excluant l’accès aux données personnelles de certaines catégories d’acteurs de la santé. Ainsi, il a affirmé que « l’accès [au DMP] est interdit lors de la signature d’un contrat de protection complémentaire ou lors de la conclusion de tout autre contrat exigeant l’évaluation de l’état de santé ». Etanche au système d’information de l’assurance maladie, le DMP ne sera

L’EUROPE DES DOSSIERS MÉDICAUX INFORMATISÉS Au Danemark, en Suède ou en Finlande, un certain nombre de patients disposent déjà d’un dossier médical informatisé. En Finlande, un système de données informatiques permet à chaque médecin de consulter sur son ordinateur les radiographies ou les électrocardiogrammes réalisés sur un patient. Au Danemark, un dossier électronique a également été mis en place, mais la moitié des cabinets de praticiens spécialistes n’ont

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toujours pas accès au réseau d’informations. La Grande-Bretagne a commencé l’informatisation des dossiers médicaux en 2003. Prévu pour permettre à tous médecins ou infirmiers d’avoir accès aux informations médicales d’un patient, le système connaît certaines difficultés en matière de protection des données et en termes de coût. Ce qui pourrait finalement limiter le dossier informatisé à un dispositif de gestion électronique des rendez-vous en milieu hospitalier.


par ailleurs «pas accessible dans le cadre de la médecine du travail » a-t-il précisé. Toutefois, Alain Coulomb, directeur de la nouvelle Haute Autorité de santé, a estimé qu’une procédure « bris de glace » serait également insérée dans le dispositif afin de lever exceptionnellement la confidentialité d’un dossier. Reste à l’ensemble des professionnels de santé à s’équiper de matériel informatique et aux prestataires informatiques à concevoir des outils fiables et simples d’utilisation. Des modalités d’«interfaçage» avec les logiciels professionnels seront évidemment à prévoir. S’agissant des pharmaciens, Isabelle Adenot, présidente de la section A, a rappelé que les officines étaient d’ores et déjà équipées sur le plan informatique et disposaient pour la plupar t d’un « historique des médicaments délivrés » par leur intermédiaire. Pour Alain Coulomb, on peut envisager qu’à partir d’une donnée saisie par le professionnel de santé, le logiciel de gestion du DMP renvoie à des liens directs avec les référentiels de santé ad hoc édités par l’ANAES ou par la HAS, les fiches médicaments ou d’autres informations de référence concernant la pathologie et le traitement du patient.

Prendre en considération les expériences européennes similaires La maîtrise d’œuvre du dispositif est confiée à un groupement d’intérêt public (GIP), dont l’arrêté constitutif est en cours de publication. Les différents Ordres de santé, des représentants de l’hospitalisation, des associations de patients ainsi que des régimes d’assurance maladie obligatoires et complémentaires seront invités à participer au comité d’orientation de ce GIP, a précisé Xavier Bertrand. L’occasion pour le Conseil national

QUEL CONTENU POUR LE DMP ? Malgré l’évolution probable du contenu du DMP en fonction de l’expérimentation menée sur les sites pilotes, les pièces constituant le noyau du DMP seront les suivantes : • La fiche de consultation, la prescription médicamenteuse et la prescription d’examens complémentaires (biologie, radiologie…) établies par le médecin de ville. Ces informations constituent le cœur du DMP ; • La lettre de sortie de l’hôpital qui dresse un résumé du passage du patient. Chaque structure hospitalière privée ou publique devra donc disposer d’un serveur permettant d’accéder au DMP et de l’alimenter ; • La prescription médicamenteuse ; • La prescription d’examens complémentaires ; • Les résultats d’analyses biologiques ; • Le compte rendu des examens radiologiques ; • Le cas échéant, l’indication d’ALD et le PIRES associé. Ces derniers documents seraient véhiculés par des flux informatiques standardisés via le réseau Sesam Vitale. de faire valoir ses positions sur l’impérieuse nécessité du plus large accès possible de la profession dentaire au DMP. Le GIP devrait rédiger un cahier des charges à destination des prestataires informatiques prenant en considération les attentes de chacun. Prévu pour le début d’année, un premier appel d’offres destiné à choisir les opérateurs des sites pilotes qui seront opérationnels sera finalement lancé « dans les mois qui viennent » a précisé Xavier Bertrand. Mais les repor ts de calendrier laissent les usagers dubitatifs, à l’image de Jean-Luc Bernard, le président du CISS (Collectif interassociatif sur la santé représentant les usagers), qui estime «intenable» l’échéance annoncée de la mise en place du DMP pour 2007.

Selon Michel Ducloux, président de l’Ordre national des médecins, la « dimension européenne de la santé » et « les expériences similaires déjà entreprises en Europe» (comme dans les pays scandinaves) doivent être prises en considération. L’expérience de la mise en réseau du dossier pharmaceutique dans les officines de France constitue également, comme l’a souligné Robert Regard, une « base de travail intéressante » qui pourra favoriser la réussite de l’entreprise du DMP. Une réussite qui reposera, selon Alain Coulomb, sur trois fondements : la « confiance entre professionnels et patients, l’utilité [alliée à] la simplicité d’utilisation du DMP et le pragmatisme de son déploiement ». Robert Regard Vice-président du Conseil national Mai 2005

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dossier

Organisation des soins

Le statut de médecin traitant suscite des interrogations Pour les soins dentaires, bien entendu, les patients n’auront pas à consulter au préalable leur médecin traitant.

E lément clef, avec le DMP, de la réforme de l’assurance maladie, la création d’un statut de médecin traitant soulève encore un certain nombre d’interrogations. Introduit par les articles 7 et 8 de la loi du 13 août 2004, le médecin traitant doit être choisi par tout bénéficiaire de l’assurance maladie âgé de plus de 16 ans. Il doit permettre de coordonner le suivi médical du patient et pourra, en fonction de l’état de santé du patient et avec son accord, adresser ce dernier au professionnel de santé le plus apte à traiter sa situation spécifique. Le médecin traitant jouera donc un rôle de médecin pivot selon les besoins et l’historique de chacun des patients dont il aura la responsabilité. Si le patient ne désigne pas de méde-

cin traitant, s’il consulte un spécialiste sans recourir à son médecin traitant ou s’il s’adresse à un autre médecin traitant, le ticket modérateur sera majoré, sauf dans des cas qui devront être précisés par décret. Toutefois, il est d’ores et déjà défini que les patients n’auront pas à recourir à leur médecin traitant avant de s’adresser à un ophtalmologiste, à un chirurgien-dentiste ou à un gynécologue pour leur suivi. Les patients devront déclarer leur choix à la caisse dont ils relèvent avant le 1er juillet 2005. A partir de cette date, les actes médicaux qui ne seront pas réalisés ou recommandés par le médecin traitant pourraient être moins bien remboursés. Deux arrêtés du 20 décembre 2004 ont précisé les modèles de formulaires de déclaration de

choix du médecin traitant. Mais un recours en annulation a été formé devant le Conseil d’Etat par des médecins généralistes, pour non-conformité de ces formulaires au principe du libre choix du praticien par le patient. Par ailleurs, la question de la place du médecin traitant dans le dispositif du DMP continue à susciter des interrogations. Sera-t-il le seul professionnel à accéder à l’ensemble des informations contenues dans le dossier ? Si, comme la loi le prévoit, le médecin traitant gère la tenue du dossier médical, existera-t-il une compensation financière à son travail de synthèse ? Quelles seront aussi les relations du praticien traitant avec les autres professionnels de santé à propos du partage des informations de santé ?

MÉDECIN RÉFÉRENT – MÉDECIN TRAITANT : DEUX RÉGIMES DISTINCTS Le principe de médecin référent, déjà existant, fonctionne sur le mode du volontariat. A l’inverse, en ce qui concerne le médecin traitant, le patient devra choisir le praticien avec l’accord de ce dernier. Le médecin référent est obligatoirement un généraliste, alors que le médecin traitant peut être un généraliste ou un spécialiste, notamment pour les patients souffrant d’affections de longue durée (ALD) ou de maladies chroniques. Le médecin référent doit respecter certaines règles définies par la loi ou par la convention. Il doit par exemple faire bénéficier les patients adhérents des tarifs conventionnels et de la procédure 24 la Lettre no 37 Mai 2005

de dispense d’avance des frais, tout en respectant un seuil maximal d’activité fixé à 7 500 actes de consultation annuels. Pour le médecin traitant, la loi ne fixe pas d’obligations. Il reviendra néanmoins aux partenaires conventionnels de déterminer s’il est nécessaire de fixer des règles de pratique. Le patient peut désigner son médecin référent afin qu’il devienne également son médecin traitant. En revanche, dans le cas où le patient ne choisit pas son médecin référent comme médecin traitant, il perd les avantages prévus dans le cadre de ce dispositif, tout comme son médecin référent.


Loi du 13 août 2004

Réforme de l’assurance maladie : le point sur la parution des décrets DMP et médecin traitant constituent certes les idées maîtresses du projet de réforme de l’assurance maladie. Les autres articles du texte n’en méritent pas moins d’être mieux connus.

Introduite par la loi du 4 août 2002, l’idée d’un patient actif de sa santé et véritablement intégré dans le parcours de soins fait son chemin. Mais la volonté affichée par le législateur de « responsabilisation » des acteurs de santé concerne également les professionnels de santé et les financeurs des soins. De fait, plusieurs articles de la loi du 13 août 2004 por tant réforme de l’assurance maladie modifient en substance l’organisation des relations médicales entre patients, praticiens et caisses d’assurance maladie. Afin de faciliter la compréhension des évolutions du système, La Lettre propose ci-dessous d’examiner le texte de loi et de reprendre un à un les articles concernant la profession dentaire, en précisant leur signification concrète et leur applicabilité. Secret professionnel Le secret professionnel, ainsi que tous ses attributs, est désormais ré-

glementé par le Code de la sécurité sociale (1), et toutes les situations relevant des dispositions de ce Code sont concernées par le secret. La garantie de la confidentialité des informations médicales, leur conservation sur suppor t informatique et leur transmission par voie électronique entre professionnels sont soumises à des règles qui devront être définies par un décret en Conseil d’Etat après que la CNIL aura donné son avis.

Affections de longue durée L’article 6 de la loi porte création d’un protocole de soins pour les affections de longue durée et les soins de plus de six mois (2). Ce protocole devra mettre en place une procédure de prescription des traitements conjointe entre le médecin traitant et le médecin-conseil. Signé par le patient, ce protocole devra être communiqué à tout praticien consulté qui sera tenu de certifier en avoir pris connaissance.

La présentation du protocole conditionne l’exonération totale ou partielle du ticket modérateur. Les décrets d’application sont d’ores et déjà parus le 4 octobre dernier (décrets nos 2004-1049 et 2004-1050).

Accords interprofessionnels En plus des conventions régissant les rapports entre les professionnels de santé et les caisses d’assurance maladie, l’article 11 de la loi de réforme (3) rend possible la conclusion d’accords interprofessionnels intéressant plusieurs professions de santé, pour une durée de cinq ans au plus. Ces accords sont passés entre l’Union nationale des caisses de l’assurance maladie (UNCAM) – nouvel organisme créé par le projet de loi – et les organisations représentatives signataires des conventions nationales de chacune des professions concernées. Ces accords sont soumis, pour avis, aux conseils de l’Ordre des professions concernées. Mai 2005

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dossier

Maisons médicales Ces structures regroupant différents professionnels de santé sont désormais reconnues comme entités à part entière par l’article 12 de la loi (4).

Participation des mutuelles aux réseaux de professionnels de santé L’article 13 (5) donne aux mutuelles la possibilité de participer aux contrats actuellement passés entre les Unions régionales de caisses d’assurance maladie (URCAM) et les réseaux de santé conventionnés exerçant à titre libéral. L’approbation desdits contrats se fait désormais par le directeur général de l’UNCAM. Des accords-cadres pourront également être passés entre les ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale, l’UNCAM et les fédérations nationales représentatives des établissements de santé, dans le but de favoriser l’amélioration des pratiques hospitalières. Un décret est paru le 23 décembre dernier (décret n° 2004-1399), mais les conseils nationaux des différents Ordres seront consultés sur les dis-

Enjeu de la circulation des informations médicales, le DMP intéresse les différents Ordres de santé.

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positions des accords relatives à la déontologie.

Evaluation des pratiques professionnelles L’article 14 porte obligation pour les médecins libéraux, salariés non hospitaliers, les biologistes, odontologistes et pharmaciens exerçant dans les établissement publics de santé ainsi que les médecins exerçant dans les centres de santé privés d’évaluer individuellement leurs pratiques professionnelles. Des sanctions sont prévues. Les décrets d’application les précisant sont à paraître.

Contrôle médical L’article 19 donne aux caisses d’assurance maladie par le biais des services du contrôle médical une prérogative de vérification, au moment de la liquidation, du respect, par l’assuré et par le professionnel de santé, des dispositions relatives aux bonnes pratiques cliniques, des références professionnelles, des engagements conventionnels ou de règlement arbitral, etc.

Les assurés sociaux ou les professionnels de santé devront fournir tous les éléments nécessaires à cette vérification sous peine de sanctions, notamment sous la forme d’une pénalité administrative. En revanche, l’article 26 (6) introduit le respect des droits de la défense dans la procédure d’analyse de l’activité du professionnel de santé.

Participation forfaitaire à charge de l’assuré Une participation forfaitaire est prévue pour chaque acte ou consultation pris en charge par l’assurance maladie, à l’exclusion des actes réalisés au cours d’une hospitalisation. Elle ne sera pas exigée pour les ayants droit mineurs ou les bénéficiaires de la CMUC. Le décret est paru (décret n° 2004-1453 du 23 décembre). Il fixe la participation forfaitaire à 1 euro par acte ou consultation sans pouvoir dépasser 50 par ticipations au cours d’une année civile.

Carte vitale La carte délivrée gratuitement est valable sur l’ensemble du territoire français


tout au long de la vie du bénéficiaire. En cas de vol, perte ou dysfonctionnement, elle est remplacée par l’organisme d’affiliation. Le professionnel de santé a accès, avec l’autorisation du patient, aux données de remboursement ou de prise en charge détenues par l’assurance maladie (7). Il lui est également permis de demander au por teur de la Carte vitale d’attester de son identité. La photographie est intégrée à la Carte vitale. Par ailleurs, le professionnel de santé est tenu par un devoir d’information quant à la charge que l’acte, la prestation ou la spécialité fournie représente pour l’assurance maladie. Le décret d’application de cette disposition est paru (décret n° 2004-1281 du 26 novembre 2004).

Pénalité administrative Un système de pénalité administrative à l’encontre d’un professionnel de santé, d’un assuré ou d’un établissement de santé est mis en place (8). La pénalité est prononcée par le directeur de l’organisme local d’assurance maladie en cas d’inobservation des règles du Code de la sécurité sociale ayant conduit à un remboursement ou une prise en charge indus. Après avis d’une commission composée et constituée au sein du conseil dudit organisme local (si la pénalité doit être prononcée contre un professionnel de santé, cette commission comprend des professionnels de santé de la même profession), la mesure prononcée doit être motivée. La personne en cause doit pouvoir présenter ses obser vations écrites ou orales dans un délai d’un mois après notification des faits reprochés. La mesure peut être contestée devant le tribunal administratif.

Télémédecine La notion de télémédecine est définie. Elle est intégrée dans les schémas régionaux d’organisation sanitai-

re (SROS). Par ailleurs, les conditions de validité des ordonnances par courrier électronique sont précisées (9).

Dispositif conventionnel Un cadre facilitant la négociation et la signature des conventions entre les professionnels de santé et l’assurance maladie est défini (10). Il porte création d’un droit d’opposition majoritaire. Il met en place une procédure d’arbitrage en cas d’absence d’accord ou d’opposition de la profession à un accord. Par ailleurs, la procédure d’approbation des conventions par le ministère est allégée : les motifs d’opposition à la non-conformité aux lois et règlements et à la présence de dispositions contraires à la politique de santé publique sont limités. Un principe d’adhésion explicite aux conventions et accords par les professionnels de santé est instauré. Le champ d’intervention conventionnel en matière de gestion des soins de ville est étendu puisque la convention définit désormais les modalités d’organisation du dispositif d’aide à l’installation. Elle fixe les éléments de la participation des caisses d’assuran-

ce maladie au financement des cotisations sociales dues par les professionnels de santé au titre de leurs honoraires. De plus, les URCAM se voient attribuer la compétence de conclure des contrats avec des professionnels de santé libéraux afin de les inciter à un exercice regroupé, notamment dans les zones rurales ou urbaines déficitaires.

(1) L’article 2 de la loi du 13 août 2004 introduit l’article L. 161-36-1 A dans le Code de la sécurité sociale (CSS). (2) Articles L. 322-3 et L. 324-1 du CSS. (3) Article L. 162-14-1 du CSS. (4) Article L. 162-3 du CSS. (5) Articles L. 183-1-1, L. 6113-12 et L. 6114-3 du CSS. (6) Art. L. 315-1 du CSS. (7) Les articles 21 et 22 de la loi introduisent les articles L. 161-31, L. 162-4-3 et 162-21 dans le CSS. (8) Article. L. 162-1-14 du CSS. (9) Articles 32 à 34 de la loi. (10) Articles 48 à 52 de la loi. Mai 2005

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juridique Responsabilité civile médicale

Un régime d’irresponsabilité pour le collaborateur salarié ! Pour la Cour de cassation, seul l’employeur est responsable de la maladresse, de l’imprudence et de la négligence commises à l’occasion de traitements dispensés par le praticien salarié… Praticiens employeurs, vérifiez votre assurance RCP!

Par David Jacotot docteur en droit, maître de conférences à la faculté de droit de Dijon

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Le droit de la responsabilité médicale abrite mille difficultés qu’un praticien de l’art dentaire ne soupçonne pas. Difficile de l’en blâmer dès lors que les règles de droit apparaissent fort complexes et très évolutives, comme le montre la notion de « responsabilité de l’employeur du fait des fautes commises par ses salariés ». Illustrons, à partir d’un cas concret, cette notion juridique. Un collaborateur salarié, réalise des soins sur un patient : il extrait, par exemple, une dent. Malheureusement, son geste manque de précision. Il cause un dommage (lésion d’un ner f) au patient en raison de cette maladresse. Ce patient saisit les tribunaux pour obtenir des dommages-intérêts. Il actionne donc les règles de la responsabilité civile médicale. A l’évidence, tout laisse à penser que le juge lui allouera une indemnisation. Les trois conditions classiques et nécessaires pour engager la responsabilité civile médicale sont réunies. Une faute a été commise, la maladresse, actuellement qualifiée de « comportement fautif » par la Cour de cassation, et il existe un lien de cause à effet entre la faute et le dommage. Une question reste néanmoins en suspens : qui est responsable et qui, du collaborateur salarié ou du chirurgien-dentiste employeur, doit indemniser la victime ? Intuitivement, l’on serait tenté de répondre : celui qui a commis la faute, c’est-à-dire le collaborateur salarié ! L’intuition s’efface devant la « logique juridique ». Ce sera au chirurgien-dentiste employeur d’indemniser le patient… C’est la leçon qu’il faut tirer d’un arrêt du 9 novembre 2004 rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation à propos d’un médecin salarié d’une clinique. Certes, cette décision ne concerne pas directement un chirurgien-dentiste, mais cet arrêt, indiscutablement, dégage un rayonnement très large et s’appliquera aux collaborateurs salariés des chirurgiens-dentistes, des avocats, des experts-comptables ou encore des architectes (1).


salariés). La Cour de cassation retint cette analyse dans Expliquons la solution de cet arrêt. La Cour de casun arrêt du 9 avril 2002. sation décide que « le médecin salarié d’une clinique qui Revirement de jurisprudence, donc, et changement agit sans excéder les limites de la mission qui lui est d’orientation de la Cour de cassation avec l’arrêt du 9 noimpartie par la clinique n’engage pas sa responsabilité vembre 2004. Elle penche maintenant en faveur de l’apà l’égard du patient ». Des termes de cet arrêt se dégaplication du principe d’égalité de traitement des indivigent non seulement un principe d’irresponsabilité du pradus placés dans une situation de salariat. Elle consacre ticien salarié, mais aussi une exception de responsabile principe d’irresponsabilité du professionnel de santé lité du praticien salarié. salarié et retient celui de responsabilité de l’employeur Le principe d’irresponsabilité du médecin salarié du fait des fautes commises par le praticien salarié. Ne cingle. La Cour de cassation emploie des mots dénués croyons pas être seulement responsable de notre fait d’équivoque : « Le médecin salarié […] n’engage pas sa personnel : nous sommes par fois responsable du fait responsabilité à l’égard du patient. » Doit-on pour autant d’autrui (les salariés). en conclure que l’employeur de ce médecin est responUne exception de responsabilité du praticien salarié sable ? Indiscutablement oui, dès lors qu’une faute, ressort de la décision de 2004. Rappelons les termes de cause d’un dommage subi par le patient, existe. Depuis l’arrêt : « Le médecin salarié l’arrêt « Costedoat » rendu le d’une clinique qui agit sans 25 février 2000 par la formaexcéder les limites de la mistion la plus solennelle de la Une certaine logique voulait admettre sion qui lui est impartie par Cour de cassation (l’assemque les professionnels de santé ne sont pas la clinique n’engage pas sa blée plénière), c’est à l’emdes salariés comme les autres. Mais l’application responsabilité à l’égard du ployeur de répondre, et de rédu principe d’égalité de traitement patient. » Une lecture attentipondre seul, des dommages est désormais retenue. ve révèle que les juges prérésultant d’une activité dévevoient une exception au prinloppée à son profit. Il assucipe d’irresponsabilité. Ainsi le professionnel de santé me les risques de cette activité au nombre desquels se salarié engage-t-il sa responsabilité personnelle s’il « extrouvent les dommages causés par les fautes d’imprucède les limites de la mission qui lui est impartie ». dence et de maladresse de ses salariés. Que faut-il entendre par cette expression ? Dans quelLes juristes ont dans un premier temps pensé que le le(s) situation(s) le praticien salarié reste responsable milieu médical échapperait à la solution de l’arrêt « Cosdes fautes commises sur les patients? Sans aucun doute, tedoat ». En raison de « l’indépendance professionnelle le professionnel de santé salarié à qui l’on reprocherait intangible » dont bénéficient les professionnels de santé, une faute pénale intentionnelle engagerait sa responsaune certaine logique voulait que le praticien salarié contibilité civile médicale (et pénale d’ailleurs) personnelle (2). nue d’engager sa responsabilité envers les patients qu’il En revanche, seul l’employeur (et non le praticien salarié) soigne. C’est admettre que les professionnels de santé est responsable des fautes de maladresse, d’imprune sont pas des salariés comme les autres, et qu’à l’imdence et de négligence commises à l’occasion des soins munité des premiers (ouvriers par exemple) répond la dispensés. Nous tiendrons informés les lecteurs de La responsabilité personnelle des seconds (les praticiens Mai 2005

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Lettre 29


juridique

Lettre à l’avenir des hypothèses, retenues par les juges, de responsabilité personnelle des praticiens salariés. En pratique, cet arrêt de 2004 soulève deux interrogations. Primo, le praticien salarié jouit-il alors d’une véritable immunité ? Le praticien employeur trouvera dans le droit du travail le moyen de sanctionner son salarié. Il pourra lui infliger une sanction disciplinaire sur le fondement des articles L. 122-40 et suivants du Code du travail. Secundo, il convient de vérifier si le praticien employeur est assuré dans cette hypothèse. Supposons que l’employeur doive verser 5 000 euros à un patient victime d’une faute commise par un praticien salarié. Si l’employeur n’est pas assuré, il payera de ses deniers personnels… Si l’article L. 1142-2, alinéa 5, du Code de la santé publique dispose que « l’assurance des établis-

sements, services et organismes couvre leurs salariés dans la limite de la mission qui leur a été impartie, même si ceux-ci jouissent d’une indépendance dans l’exercice de l’art médical », il reste muet dans l’hypothèse de la responsabilité du praticien libéral employeur du fait des fautes commises par le collaborateur salarié. Il nous semble utile de questionner son assureur RCP. Responsabilité et assurance… la représentation du Janus hante notre esprit !

(1) En ce sens, Maud Asselain, in la revue Responsabilité civile et Assurances, mars 2005, p. 9. (2) En ce sens, un arrêt de l’assemblée plénière de la Cour de cassation du 14 décembre 2001 (arrêt « Cousin »).

Contrats

Le praticien remplaçant n’est pas un salarié, mais jusqu’à quand? Pour l’heure, la Cour de cassation ne retient pas les arguments de la cour d’appel de Paris requalifiant un contrat entre une SCP et un remplaçant en contrat de travail.

Chacun sait que le Code de déontologie réglemente le remplacement du chirurgien-dentiste (1). Mais quelle est la nature du contrat qui unit le praticien remplaçant au chirurgiendentiste remplacé ? Est-ce un contrat de travail? C’est à cette question que répond, au moins par tiellement, la Cour de cassation, dans un arrêt du 2 mars 2004. Le contentieux est né d’une décision de l’URSSAF de l’Yonne. Elle réintègre dans l’assiette des cotisations sociales la rémunération versée par une SCP à un praticien remplaçant. L’URSSAF conclut donc à l’existence d’un contrat de travail. Elle exige en conséquence du praticien remplacé le paiement des cotisations sociales sur les sommes versées à son remplaçant ! La cour d’appel de Paris, tout en re30 la Lettre no 37 Mai 2005

connaissant l’indépendance technique et déontologique, retient également l’existence d’un lien de subordination (élément caractéristique du contrat de travail). Elle justifie sa conclusion par la démonstration suivante : le remplaçant « travaille non pas pour son compte, mais pour celui de la SCP ». Sa rémunération est calculée « selon un forfait en reversant à la SCP une partie du chiffre d’affaires réalisé au titre de la location du matériel, des frais de personnels et de fonctionnement divers ». Le remplaçant, « s’il supporte les risques de son exploitation personnelle, ne prend pas en charge le risque économique, dans la mesure où il ne par ticipe pas aux per tes éventuelles de la SCP ». La Cour de cassation casse cet arrêt au motif que les éléments retenus

par la cour d’appel ne caractérisent pas l’existence d’un lien de subordination. Pour la Cour de cassation en effet, eu égard aux critères mis en avant par la cour d’appel, il n’existe aucun contrat de travail entre le remplacé et le remplaçant. Comprenons bien la solution adoptée par la Cour de cassation. Elle ne chasse pas définitivement la qualification de contrat de travail dans les rapports remplacé/remplaçant. Elle se contente d’énoncer que les éléments sur lesquels se fonde la cour d’appel ne convainquent pas. Retiendra-t-elle l’existence d’un contrat de travail si une autre cour d’appel s’appuie sur d’autres arguments ? La question reste ouverte. (1) Voir notamment l’article R. 4127-275 du Code de la santé publique.


AU « JOURNAL OFFICIEL »

Moignon coronaire

Cliché radiographique et justification médicale Nous publions ci-dessous l’arrêté du 18 mars 2005, paru au JO le 1er avril 2005, supprimant l’obligation d’effectuer un cliché radiographique après reconstitution du moignon coronaire avant la pose d’une prothèse. • Arrêté du 18 mars 2005 modifiant la Nomenclature générale des actes professionnels des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et des auxiliaires médicaux Le ministre des Solidarités, de la Santé et de la Famille et le ministre de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche et de la Ruralité, […] Arrêtent : Article 1 Au titre III (Actes portant sur la tête) de la deuxième partie de la Nomenclature générale des actes professionnels, chapitre VII «Dents-gencives» : «Section I «Soins conservateurs «Art. 1er. Obturations dentaires définitives : «Au dernier alinéa, après les termes : “Pour les actes mentionnés au 4 ci-dessus”, la mention “une radiographie préopératoire et une radiographie postopératoire sont obligatoires” est remplacée par “les clichés radiographiques, préopératoire et postopératoire, dont la nécessité médicale est validée scientifiquement, sont conservés dans le dossier du patient”.» Article 2 Au titre III de la deuxième partie de la Nomenclature

générale des actes professionnels, chapitre VII «Dentsgencives» : «Section III «Prothèse dentaire «Art. 2. Prothèse dentaire conjointe : «Au libellé “couronne dentaire faisant intervenir une technique de coulée métallique, quand la dent ne peut être reconstituée de façon durable par une obturation : 50”, la mention “un cliché radiographique pris après reconstitution du moignon coronaire, quelle que soit la technique utilisée et avant pose de la couronne, est obligatoire” est remplacée par “le ou les clichés radiographiques préopératoires, dont la nécessité médicale est validée scientifiquement, sont conservés dans le dossier du patient”.» Article 3 Le directeur général de la Santé et le directeur de la Sécurité sociale au ministère des Solidarités, de la Santé et de la Famille et le directeur général de la Forêt et des Affaires rurales au ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche et de la Ruralité sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent arrêté, qui sera publié au Journal officiel de la République française.

Les autres textes, consultables in extenso sur « legifrance.gouv.fr » • Arrêté du 28 janvier 2005 portant nomination au comité stratégique du programme national Nutrition Santé. • Arrêté du 7 février 2005 fixant la liste des diplômes compatibles avec l’exercice des missions de la personne spécialisée en radiophysique médicale

et permettant l’inscription à la formation spécialisée prévue à l’article 4 de l’arrêté du 19 novembre 2004. • Arrêté du 9 février 2005 portant nomination au Conseil national de l’Ordre des pharmaciens. • Décision du 31 janvier 2005 portant nomination des directeurs des missions régionales de santé.

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europe Réunion de la CODE à Madrid

Les Britanniques participent à la conférence des Ordres européens Avec la présence notable d’un représentant du General Dental Council (RoyaumeUni), la CODE a débattu du contrôle des praticiens migrants.

La dernière conférence des Ordres et organismes assimilés des praticiens de l’art dentaire (CODE), qui s’est tenue à Madrid les 11 et 12 mars derniers, a rassemblé ses membres autour du vote des statuts et du règlement intérieur de la CODE (lire l’encadré cidessous). Mais, outre l’adoption à l’unanimité en réunion administrative de ce texte fondateur rédigé dans l’esprit qui a gouverné à la déclaration de Rome, il faut relever la présence des représentants britanniques du General Dental Council, invités à participer en réunion plénière aux travaux de la CODE à Madrid, qui ont manifesté un vif intérêt pour cette structure de représentation ordinale européenne. Les représentants de la profession

dentaire espagnols, français, italiens, monégasques et britanniques donc, ont, à l’occasion de cette rencontre, évoqué un certain nombre de questions européennes.

Pas de frontières pour les sanctions S’agissant du contrôle de la migration intracommunautaire des praticiens de l’art dentaire, ils ont exprimé leur volonté de maintenir dans le pays d’accueil les sanctions prononcées dans le pays d’établissement. Ainsi, un chirurgien-dentiste, français par exemple, objet d’une sanction disciplinaire de suspension d’exercice devenue définitive ne peut pas exercer dans un autre Etat membre, quels que soient les faits retenus contre lui.

L’amélioration de la communication des données relatives aux sanctions ainsi que l’adoption d’un numéro d’identification professionnel européen ont également été évoquées afin d’optimiser le contrôle des praticiens migrants. Les par ticipants à la CODE ont par ailleurs souligné la nécessité d’une formation des praticiens migrants à la déontologie du pays d’accueil, ainsi qu’une information sur le fonctionnement des juridictions professionnelles. En termes de qualité des soins dispensés, au-delà des différences relevées en matière de codification et de tarification des actes, à savoir l’opposabilité (partielle ou totale) et la liberté tarifaire, les participants à la

EXTRAITS DES STATUTS DE LA CODE La CODE, dont nous publions des extraits des statuts, est domiciliée à Paris et soumise aux dispositions juridiques françaises applicables aux associations d’intérêt général. «Art. 1er : L’association est régie par la loi française du 1er juillet 1901. […] Art. 3 : La CODE a pour objet la promotion et la convergence des valeurs de la profession. L’institution de relations permanentes entre ces organismes autonomes, acteurs majeurs dans leur pays respectif de l’éthique, de la réglementation et de l’organisation de la profession exercée à titre indépendant ou salarié : • s’inscrit sur les fondements de promotion de la santé et de protection des patients, de circulation des personnes et des services, en respectant les dispositions légales, nationales et internationales, applicables dans chaque pays; 32 la Lettre no 37 Mai 2005

• vise au suivi et au développement des facteurs participant à la dispensation de soins de haute qualité, dans l’esprit déontologique qui régit la profession, ainsi [qu’à] l’écoute et [à] l’information des patients; • vise, dans le cadre de leur mission de service public et en relation avec les pouvoirs publics nationaux, à faciliter des échanges de vues et d’informations ainsi que des actions coordonnées et communes, dans les domaines relevant de leurs compétences, et notamment l’enregistrement des praticiens. Art. 4 : Le siège social est fixé à l’adresse du Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de France. Art. 5 : La durée de la CODE est illimitée. […] Art. 12 : Le secrétariat permanent est assuré par le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes de France.»


conférence ont relevé des convergences quant à l’obligation de formation continue et aux recommandations de bonnes pratiques. La certification du plateau technique, généralement très coûteuse, n’a en revanche pas recueilli l’adhésion. Néanmoins, le contrôle de la qualité des actes a été retenu, en privilégiant le développement de l’aspect pédagogique qui doit primer sur l’aspect répressif. Enfin, la question de la dimension «mécaniste» (et non pas médicale) des professions auxiliaires (telles celles des

hygiénistes et des denturologues) a été évoquée.

Vers une harmonisation de la déontologie Face à la diversité des politiques de santé publique nationales, les participants de la CODE ont rappelé leur volonté de tendre vers une harmonisation de la déontologie en Europe et des conditions d’accès à l’exercice pour les ressor tissants européens diplômés de pays tiers. A ce titre, il a été demandé à la France de dresser une étude comparative des Codes

de déontologie européens dans le but de mettre en évidence de grands principes déontologiques communs. L’Italie à été chargée d’étudier la reconnaissance des diplômes des pays tiers tandis que l’Espagne s’occupera de la question des auxiliaires. La prochaine réunion de la CODE se tiendra à Paris, le 25 novembre prochain, et sera dirigée par le président de l’Ilustre Consejo General de Colegios de Odontólogos y Estomatólogos de España. Henri Michelet Président de la commission Europe

Sommet des chefs d’Etat et de gouvernements

La sécurité sociale, pierre angulaire du modèle européen Si, pour le Conseil de l’Europe, l’idée d’un modèle européen unique de la sécurité sociale doit être écartée, cette protection constitue cependant un élément essentiel de la cohésion sociale sur notre continent.

Sur proposition de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, la question de la sécurité sociale et de la lutte contre la pauvreté sera inscrite à l’ordre du jour du troisième sommet des chefs d’Etats et de gouvernements du Conseil de l’Europe, qui se tiendra à Varsovie (Pologne) les 16 et 17 mai 2005. Les positions récentes de l’Assemblée parlementaire sur la question confirment une réflexion très avancée quant à l’avenir de la sécurité sociale en Europe. Comité des ministres et Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe défendent en effet le même point de

vue selon lequel, «du fait de la modification de l’environnement économique européen au cours de ces 30 dernières années, la compétitivité des économies européennes se joue aujourd’hui en par tie sur la per formance des systèmes de sécurité sociale qui garantissent une “ sécurité du lendemain”. De ce fait, l’adaptation à ce nouveau contexte suppose donc de nouvelles normes pour la protection sociale ». De même, le Comité des ministres confirme que les droits sociaux, effectivement garantis, sont un facteur de cohésion sociale et de stabilité démocratique. Mai 2005

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europe

« La persistance d’un chômage de masse, l’avenir des systèmes de retraite ainsi que les politiques sociales favorables à la famille représentent des défis majeurs dont il impor te de tenir compte » écrit le Comité des ministres à ce propos. Chargé de rendre un avis sur la question, le Comité européen pour la cohésion sociale (CDCS) a pour sa part manifesté à plusieurs reprises l’importance qu’il attache à la sécurité sociale, « facteur essentiel de cohésion sociale ». Il a tenu à exprimer sa « grande satisfaction de voir l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe continuer à s’engager pour l’amélioration de la protection sociale et déterminée à œuvrer en faveur du respect des principes inscrits dans les instruments juridiques du Conseil de l’Europe relatifs à la sécurité sociale ». Dès le début de ses travaux en 2000, le CDCS soulignait que toute stratégie de cohésion sociale doit faire du renforcement des systèmes de sécurité sociale l’un de ses objectifs majeurs : « L’approche développée par les Etats européens au XXe siècle a souvent été désignée comme correspondant au “ modèle

social européen”. Cette approche est aujourd’hui confrontée à de nombreuses interrogations et tensions, et […] le défi que l’Europe doit relever au XXIe siècle est de trouver des moyens lui permettant d’adapter ces réalisations en matière de politique sociale à l’évolution des besoins et des conjonctures sans dénaturer leur essence. »

Répartition des richesses et mécanismes de solidarité S’agissant plus particulièrement de la sécurité sociale, dans un document présentant sa « stratégie de cohésion sociale » (paragraphe 20), le CDCS considère que : « l’Etat restaure un niveau suffisant d’équité dans la répartition des richesses par des mécanismes de solidarité tels que la redistribution de l’impôt et la sécurité sociale. Les systèmes de sécurité sociale sont en effet l’une des expressions institutionnelles les plus fortes de la solidarité sociale. […] Un système de sécurité sociale bien développé, fondé sur la solidarité, est considéré comme l’un des principaux moyens [susceptibles de] favoriser la cohésion sociale. Une stratégie de cohésion sociale doit

LE CONSEIL DE L’EUROPE ENGAGÉ DANS LA DÉFENSE DES DROITS DE L’HOMME Le Conseil de l’Europe a été créé, le 5 mai 1949, par le traité de Londres. Il a pour objectif de défendre les droits de l’homme, la démocratie parlementaire et la primauté du droit, essentiellement par la conclusion de conventions qui ont force de loi lorsqu’elles sont intégrées dans le droit interne des Etats (beaucoup de ces conventions sont ouvertes aux Etats non membres). Le Conseil de l’Europe regroupe actuellement 46 pays adhérents dont 21 Etats d’Europe centrale et orientale et siège à Strasbourg. 4/11/1950 : signature à Rome de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales; 18/9/1959 : création à Strasbourg de la Cour européenne des droits de l’homme ; 18/10/1961 : signature à Turin de la Charte sociale européenne ; 4/4/1997 : signature de la Convention européenne sur les droits de l’homme et la biomédecine.

donc avoir pour objectif premier de renforcer les systèmes durables de sécurité sociale, en particulier à une époque où de nombreuses questions se posent sur leur développement et leur financement à venir. » Le Comité des ministres soutient également l’opinion de l’Assemblée parlementaire selon laquelle les instruments juridiques du Conseil de l’Europe dans le domaine social (tels que la Charte sociale européenne et la Char te sociale européenne révisée, le Code européen de sécurité sociale et son Protocole ou le Code européen de sécurité sociale révisé et la stratégie révisée de la cohésion sociale) ont défini une véritable « norme européenne en la matière et ont fait de la protection sociale un droit fondamental, avec un système de contrôle international ». A ce titre, le Comité des ministres encourage les Etats membres à signer et à ratifier ces différents dispositifs. Pour autant, le Comité des ministres et l’assemblée parlementaire repoussent l’idée d’un modèle de sécurité sociale européen : « Il ne peut y avoir de modèle unique compte tenu des traditions nationales et des objectifs poursuivis qui peuvent différer d’un pays à l’autre. Il convient de respecter des principes communs afin que les réformes présentes et futures continuent de s’inspirer du modèle social européen sur lequel ont été bâtis les systèmes de protection sociale. » La conjugaison des positions du Conseil de l’Europe (conventions et chartes précitées) et des normes de l’Union européenne en matière de subsidiarité (1) conser ve à l’imperium de chaque Etat membre l’organisation de son système de santé. Henri Michelet Président de la commission Europe

(1) Article 152 du traité d’Amsterdam.

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parcours

Vive l’art dentaire décloisonné! « Ma principale contribution au service d’odontologie a été de mettre en place une collaboration gériatrique avec les maisons de retraite et les centres de santé du ODF, pédodontie, gériatrie, prévention, hygiène, département. » Chef du service d’odontologie de l’hôpiprise en charge des soins, Marysette Folliguet prône tal Louis-Mourier, à Colombes, depuis près de deux ans, une odontologie ouverte. Marysette Folliguet a imaginé un protocole de convention entre les structures municipales de soins et d’hébergement des personnes âgées et une fiche de liaison cupations évoluent. Après 20 ans d’exercice « sur le teraccessible aux différents professionnels de santé. Une rain», elle devient praticien-conseil pour une banque. Son sorte de DMP avant l’heure dont l’objectif est de lever nouveau dada : la question de la prise en charge des un obstacle majeur dans l’organisation des soins pour soins. Une expérience d’expertise de dossiers dentaires, les personnes âgées : la communication entre les équide suivi de protocoles de prévention, lui permet de prenpes médicales. dre de la distance avec « le regard du praticien sur son C’est cette vision «décloisonnée», l’idée d’une profession exercice quotidien ». médicale « ouverte », que cette enseignante de 53 ans, Elle comprend que « pour faire avancer concrètement la maître de conférences des universités, transmet quotiprofession, il faut être à l’origine des programmes ». Dès diennement aux 70 étudiants lors, elle est de tous les groude son service. Loin du profil de l’hospitalo-universitaire pes d’études : Société françaiMar ysette Folliguet est une se de gérodontologie, Centre chercheur spécialisé dans un domaine collectionneuse intarissable : d’études et de recherche en épipointu, Marysette Folliguet revendique porcelaines antiques, céramidémiologie, Collège national la transversalité. ques Iznik, verroteries rouges des enseignants odontologisde Bavière ou objets d’art afrites en santé publique, Acadécain, elle fait preuve d’un engouement exclusif et d’une mie nationale, Agence française de sécurité sanitaire des passion de néophyte pour chaque domaine nouveau produits de santé, etc. qu’elle découvre avant de le délaisser dès qu’elle consiLoin du profil de l’hospitalo-universitaire chercheur spédère… en avoir fait le tour. cialisé dans un domaine pointu, Mar ysette Folliguet Boulimique de savoir, curieuse de tout, Marysette Follirevendique la transversalité. Une largeur d’esprit qui lui guet donne l’impression d’explorer une à une toutes les vaudra d’être associée depuis plus d’un an à la prépadimensions de la profession. ration du Plan de santé bucco-dentaire annoncé récemAprès avoir obtenu sa thèse de doctorat en 1975, Mament par Philippe Douste-Blazy. « Ce plan a la qualité de rysette Folliguet consacre les cinq premières années de proposer une vision globale de la profession, mais ce son exercice (1975-1980) aux soins en orthodontie et en n’est que le début» estime Marysette Folliguet. Pour elle, pédodontie. Elle réalise des dépistages dans les écoles l’heure est à la mise en musique des réseaux de soins de la ville de Paris et exerce dans un dispensaire. Mais ville-hôpital et à la participation des chirurgiens-dentistes la pédodontie lui ouvre les portes de la prévention, et la aux réseaux médicaux. « Nous devons aider les étudiants prévention la conduit à s’intéresser aux problématiques à concevoir la chirurgie dentaire comme une profession d’hygiène. En 1981, elle devient membre du Comité natiode santé à part entière» souligne-t-elle. Une façon de rapnal d’hygiène et de santé bucco-dentaire. peler qu’en assumant sa place dans l’ensemble que «Je n’ai pas abandonné les enfants, j’ai abandonné la disconstitue « la santé publique », la chirurgie dentaire n’est cipline » se défend-elle, mais, au fil du temps, ses préocpas une pièce de musée… Mai 2005

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