La_Lettre_47

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EUROPE Une actualité roborative

COMPÉTENCES

DÉMOGRAPHIE

Ouverture du chantier de la reconnaissance

Entre surpopulation et désertification


sommaire

éditorial

l’événement

page 5

Titres et diplômes

Le Conseil national ouvre le chantier de la reconnaissance des compétences

l’actualité

page 13

Vie ordinale Rayonnements ionisants Hygiène et asepsie Soins à domicile Informatique Tableau professionnel Un nouveau train de réformes

page 16

Démographie

page 8 page 9 page 10 page 11 page 12 page 12

■ page 18

page 27 page 29

Recommandations de l’ANAES : une valeur juridique à la hausse 50 000 euros pour « négligences » du praticien Les élections des chambres administratives fixées au 20 juillet

La recherche en odontologie : combien de divisions ?

Bonnes nouvelles sur le front de l’Europe !

revue de presse

page 42

Responsabilité médicale Cour d’appel de Paris Réforme des Ordres

europe

page 34

PIERCING BUCCAL RÉDUIRE LES RISQUES, PROTÉGER LE CONSOMMATEUR

point de vue

page 32

dossier

juridique

page 24

Le bureau du Conseil national à Reims Assouplir le délai de formation des praticiens à la radioprotection Stérilisateurs à vapeur d’eau : les recommandations de l’AFSSAPS Personnes âgées : hors les murs du cabinet, pas de soins ? Intranet : une réactualisation régulière Le CV d’inscription bientôt en ligne Contrats : des mesures d’équité entre exercice individuel et exercice en groupe Surpopulation à la ville, déficit à la campagne

Le plan Démographie de Xavier Bertrand

Des mesures prêtes à la fin d’avril

parcours

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Alter égaux

la

Lettre n° 47 Mai 2006

Directeur de la publication : Pierre-Yves Mahé Ordre national des chirurgiens-dentistes – BP 2016 – 75761 Paris Cedex 16 Tél. : 01 44 34 78 80 – Fax : 01 47 04 36 55 Internet : www.ordre-chirurgiens-dentistes.fr – Intranet : www.oncd.org Conception et réalisation : Texto Editions – Tél. : 01 58 30 70 15 Rédaction : Christophe Brunet, Sébastien Nardot Maquette : David Savatier – Secrétariat de rédaction : Corinne Albert Illustration de couverture : Ewa Biéjat – Illustrations intérieures : Grégoire Vallancien Photos : DR : pp. 8, 32, 38, 43 - S. Nardot : pp. 3, 4, 6, 17, 24 - F. Tobelem : p. 20. Imprimerie : SIEP Tous les articles signés sont publiés sous la seule responsabilité de leurs auteurs Dépôt légal à parution ISSN n° 12876844


éditorial

Dans l’échelle des risques liés au piercing en général, le piercing buccal occupe, si l’on peut dire, une place « privilégiée », avec une mention spéciale pour le perçage de la langue. De plus en plus de praticiens reçoivent en consultation des jeunes patients souffrant de fractures, de déchaussement de la gencive, d’infections ou encore d’infections focales, consécutifs à un piercing buccal. Il s’agit là d’un véritable problème de santé publique. Pour l’Ordre, il paraît superflu d’interdire aux praticiens de recourir à de tels actes : ils se l’interdisent eux-mêmes. Comment, en effet, peut-on imaginer un professionnel de la médecine buccale saper les fondements mêmes de sa pratique en agressant la sphère oro-buccale ? Considérer le piercing comme un acte médical constitue en ce sens une véritable aberration. Alors, quelle réponse apporter ? La première, réglementaire, consiste à imposer des normes pour les officines de piercing. Cette solution semble faire l’objet d’un mouvement d’accélération puisque le ministère de la Santé pourrait sortir des décrets avant la fin de l’année. Mais cette réponse, et à supposer que ce calendrier soit tenu, ne doit pas exonérer la profession de ses responsabilités en termes d’information au public. Le chirurgien-dentiste constitue un relais naturel permettant aux jeunes patients et à leurs parents de connaître les risques graves afférents à ces pratiques. Et pour ceux qui désirent malgré tout se faire poser un piercing, il nous revient, dans une logique de réduction des risques, d’informer les « consommateurs » sur les précautions à exiger en termes d’hygiène et de sécurité.

Piercing : notre devoir d’informer

C’est la raison pour laquelle le Conseil national reproduit, en pages centrales de La Lettre, un document réalisé par la Société odontologique de Paris (SOP) qui pourra être affiché dans les salles d’attente des cabinets. Que la SOP, dont nous voulons souligner la qualité du travail, en soit ici vivement remerciée.

Pierre-Yves Mahé Président du Conseil national Mai 2006

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brèves

Jean-Marc Preynat, président de l’UJCD Le conseil d’administration de l’Union des jeunes chirurgiens-dentistes (UJCD) vient de procéder au renouvellement de son bureau national. Ancien secrétaire général du syndicat,

Jean-Marc Preynat en devient le président. Les autres membres du bureau sont : • Philippe Denoyelle, secrétaire général ; • Guy Sola, trésorier ;

• Eric Verdier, directeur de la communication ; • Jean-Pierre Brenas, Stéphane Diaz, Gilles Drain, Jacques Leroyer et Jean-Denis Roche, vice-présidents.

L’odontologie médico-légale dans le règlement intérieur

> XAVIER BERTRAND REMET LA LÉGION D’HONNEUR À PIERRE-YVES MAHÉ Le 22 mars dernier, au ministère de la Santé, à Paris, Pierre-Yves Mahé, président du Conseil national de l’Ordre, s’est vu remettre sa médaille de chevalier de la Légion d’honneur par Xavier Bertrand, ministre de la Santé et des Solidarités. Même si, au cours de son allocution, le président Pierre-Yves Mahé n’a pas omis d’évoquer les dossiers dentaires d’actualité, la cérémonie s’est déroulée dans un climat familial et amical des plus chaleureux.

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Présidée par le vice-président du Conseil national, Joseph Maccotta, la commission d’odontologie médico-légale a été intégrée dans le règlement intérieur du Conseil national. Rappelons que cette commission, créée en 1987, est notamment

à l’origine de la création de l’Unité d’identification odontologique (UIO) du Conseil national. Mentionnée dans tous les documents officiels relatifs aux commissions du Conseil national, la commission figure donc désormais dans le règlement intérieur.

Journée annuelle de gérodontologie à Lille La Société française de gérodontologie tiendra sa journée annuelle le jeudi 15 juin à la faculté de chirurgie dentaire de Lille. Cette journée scientifique aura

pour thème « L’abord thérapeutique de la personne âgée », au cours de laquelle toutes les disciplines liées à la prise en charge de la personne

âgée seront abordées. Faculté d’odontologie de Lille : 03 20 16 79 27 Fax : 03 20 16 79 65 E-mail : f.cathala@wanadoo.fr ou jdeclercq@univ-lille2.fr

CARNET DÉCÈS • La disparition d’Amédée Corre C’est avec une grande tristesse que je viens d’apprendre le départ de mon ami Amédée. Excellent praticien, homme droit et intègre, il a marqué de son empreinte son département des Côtes d’Armor. Membre du conseil départemental, président du syndicat – il fut également, au niveau national, un

trésorier de la CNSD très apprécié -, il a été notre modèle, mon modèle, dans notre région. Qu’Hélène, son épouse, ainsi que ses enfants, reçoivent ici le témoignage de notre reconnaissance pour son action au service de la profession, et de ma sympathie. Pierre-Yves Mahé Président du Conseil national


l’événement Titres et diplômes

Le Conseil national ouvre le chantier de la reconnaissance des compétences

L’interdiction de mentionner les DU sur les imprimés professionnels ne doit pas être regardée comme une fin de non-recevoir, mais comme l’occasion d’ouvrir le grand chantier de la reconnaissance des compétences professionnelles.

Corollaire de sa décision sur les DU, le Conseil national a ouvert, fin 2005, le grand chantier de la reconnaissance des compétences. Cette initiative constitue en effet le prolongement de l’interdiction de mention des DU. Pour le Conseil national, ce choix sur les DU ne doit pas être lu comme une décision «fermée», mais comme l’ouverture d’un processus plus large sur la reconnaissance des compétences. Cer tes, le Conseil national est parfaitement conscient que sa décision a provoqué de vives réactions. Sur la forme, certains en ont même dénoncé le caractère supposé abrupt. Il est bon de rappeler que le Conseil national s’était rapproché à plusieurs reprises de toutes les parties concernées par ce dossier, au premier rang desquelles les facultés de chirurgie dentaire. Il ne lui a malheureusement pas été possible d’accéder à l’ensemble des informations sur le conte-

nu pédagogique des DU. Dans ces conditions comment garantir aux patients une information fiable et vérifiable ? Or, selon les vérifications réalisées par le Conseil national, mais sur une partie seulement de l’ensemble de ces diplômes universitaires, sous le même intitulé figuraient des formations for t différentes, avec par fois l’absence de toute expérience clinique, ou encore des modules théoriques plus ou moins suivis.

Sortir par le haut Il convient de sor tir désormais de cette situation par le haut. C’est la raison pour laquelle le Conseil national ouvre ce chantier de la reconnaissance des compétences professionnelles. En pratique, un comité scientifique va être installé par le Conseil national. Son rôle : établir un cahier des Mai 2006

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l’événement

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charges précis pour permettre cette reconnaissance des compétences. Dans quels domaines de notre exercice ? Quels seront les critères d’évaluation d’une compétence? Quel titre lui donner ? Quelle sera la durée de la reconnaissance d’une compétence? Composé de membres extérieurs au Conseil national, ce comité sera chargé de répondre à ces questions. Au terme de ce travail préalable, une commission ad hoc sera créée au sein du Conseil national, regroupant des personnalités extérieures. Mais d’ores et déjà, les grandes étapes de la procédure de reconnaissance sont déterminées (lire l’article p. 7) Rappelons qu’en vertu du Code de la santé publique, l’Ordre des chirurgiens-dentistes « veille aux principes de compétence indispensables à l’exercice de la profession dentaire » (1). C’est dans ce cadre qu’il reconnaît

les titres et fonctions que le chirurgien-dentiste est autorisé à mentionner sur ses imprimés professionnels.

Exclure tout «saucissonnage» Un rappor t de l’Union européenne définit par ailleurs la compétence comme l’ensemble des « caractéristiques individuelles (connaissances, aptitudes et attitudes) qui permettent à une personne d’exercer son activité de manière autonome, de perfectionner sans cesse sa pratique et de s’adapter à un environnement en mutation rapide » (2). La compétence constitue donc la reconnaissance de l’acquisition d’une connaissance d’une part, la pratique particulière et approfondie d’une discipline donnée d’autre part. Pour autant, il ne s’agit pas de confondre compétence et spécialité.

Pour l’heure, seule l’orthopédie dento-faciale constitue une spécialité de la chirurgie dentaire. L’ODF ne devrait donc vraisemblablement pas faire l’objet d’une compétence afin de ne pas entretenir la confusion dans l’esprit des patients. Car on l’aura compris l’objectif de la reconnaissance des compétences ne consiste pas à «saucissonner» notre exercice en plusieurs spécialités, mais bien d’apporter une information claire et fiable aux patients.

(1) Article L. 4121-2. (2) Comité consultatif pour la formation des praticiens de l’art dentaire : rapport et recommandation sur les compétences cliniques nécessaires à l’exercice de l’art dentaire dans l’Union européenne.

Trois questions à Hervé Parfait, secrétaire général En pratique, comment le praticien se verra-t-il accepter ou refuser une compétence ? Parlons d’abord de l’architecture générale et des étapes de la reconnaissance. Il s’agit d’abord de constituer un comité scientifique qui établira un cahier des charges portant sur les critères de reconnaissance et les domaines concernés. Puis, le Conseil national va installer une « commission de reconnaissance de compétence » à proprement parler. Composée, entre autres, de membres extérieurs au Conseil national afin d’en garantir l’impartialité, elle étudiera les dossiers individuels présentés par les praticiens et rendra un avis. C’est sur la base de cet avis que le Conseil national reconnaîtra ou

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cipes de probité, d’indépendance et de compétence. En prenant position sur cette question, le Conseil national affirme par ailleurs qu’il représente la seule institution à qui il incombe de se prononcer sur la compétence professionnelle des confrères. Ce n’est ni le rôle des compagnies d’assurances, ni celui des sociétés savantes, ni celui des syndicats.

non une compétence à un chirurgiendentiste. La reconnaissance des compétences fait-elle partie des compétences de l’Ordre ? C’est une des missions de l’Ordre, confortée par la loi du 4 mars 2002, que de veiller au maintien des prin-

Quels seront les critères de reconnaissance d’une compétence ? Il reviendra au comité scientifique d’en décider. Mais la qualité du plateau technique, l’expérience clinique, le suivi de formations ou encore l’obtention de diplômes universitaires constituent des critères évidents et objectifs qui pourraient être retenus.


Reconnaissance, mode d’emploi Lors de sa session de mars, le Conseil national a adopté une procédure de reconnaissance des compétences. Plusieurs étapes seront nécessaires au praticien afin d’obtenir cette reconnaissance. Le schéma publié ci-dessous détaille le dispositif qui est en cours d’édification. Dans un premier temps, le praticien devra remplir un dossier et le déposer auprès du conseil départemental

dont il dépend. Celui-ci le transmettra à une commission «de compétence» consultée pour avis sur le dossier. Précisons que la composition de cette commission de première instance à laquelle siégeront des membres extérieurs au Conseil national sera définie dès que le comité scientifique chargé de déterminer les critères et les domaines de reconnaissance aura soumis son travail au Conseil

national. Après examen du dossier individuel, la commission rendra un avis. Mais c’est le Conseil national qui rendra la décision finale de reconnaissance ou non de la compétence à partir de cet avis. Si la décision est défavorable, le praticien disposera d’une possibilité de recours gracieux où il pourra être entendu par le Conseil national sur convocation. ■

UN DOSSIER (dont le contenu reste à définir) est déposé par le praticien auprès du CD dont il dépend

➜ LA COMMISSION DE PREMIÈRE INSTANCE (dont la composition reste à définir) délivre un avis (favorable ou non) sur le dossier du praticien

➜ Le Conseil national examine le dossier Il prend une décision en s’appuyant sur l’avis de la commission de première instance

Une décision défavorable est rendue

Une décision favorable est rendue

Le praticien peut faire appel Le conseil départemental peut faire appel EN RECOURS GRACIEUX auprès du Conseil national

➜ Le Conseil national rééxamine le dossier et prend une décision

Décision défavorable

Décision favorable

➜ Le praticien peut faire appel devant LE CONSEIL D’ETAT qui rend une décision définitive

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l’actualité Vie ordinale

Le bureau du Conseil national à Reims Diplômes universitaires, démographie professionnelle… Aucun des sujets sensibles de l’actualité professionnelle n’aura été occulté lors du déplacement du bureau en région champenoise.

Dans le cadre de ses déplacements en régions, le bureau du Conseil national s’est rendu à Reims, les 5 et 6 avril dernier. « Nous avions au préalable collecté les thèmes de réflexion auprès des élus départementaux » explique Philippe Humbert, président du conseil départemental de la Marne et instigateur de cette réunion. 19 élus des départements des Ardennes, de l’Aube, de la Marne, de la Haute-Marne et du conseil régional de ChampagneArdenne avaient fait le déplacement portant avec eux les interrogations des confrères. Représenté par son président, PierreYves Mahé, ses deux vice-présidents Joseph Maccotta et Gilbert Bouteille ainsi que ses secrétaires généraux, Jacques Cherpion et Hervé Parfait, le Conseil national a tenté d’apporter les éléments de réponse les plus pertinents aux thèmes professionnels abordés. Le Conseil national a également pu faire apprécier ses méthodes de travail. La question de la désertification « Le 5 avril, le bureau du Conseil national a tenu sa réunion à Reims. L’occasion de constater que les dossiers sont aussi minutieusement préparés que suivis et que l’ensemble des décisions est pris de manière collégiale » explique Philippe Humbert. Le lendemain, plusieurs grandes questions ont fait l’objet de débats entre 8 la Lettre no 47 Mai 2006

De gauche à droite : Joseph Maccotta, Gilbert Bouteille, Philippe Humbert, président du conseil départemental de la Marne, Jacques Cherpion et Hervé Parfait. Ne figure pas sur la photographie : Pierre-Yves Mahé. les élus nationaux et les conseillers départementaux et régionaux. La première portait sur la valeur juridique des recommandations en termes de pratiques professionnelles établies par les agences nationales (AFSSAPS, ANAES, etc.) : ces recommandations sont-elles opposables au chirurgiendentiste ? Les conseils départementaux doivent-ils organiser des visites de cabinets afin de vérifier qu’elles sont appliquées ? Les conseillers nationaux estiment que si ces recommandations ne constituent pas à proprement parler des obligations pour le praticien, ce dernier sera cependant, en cas de litige avec un patient (ou une caisse), moins exposé aux sanctions s’il les a effectivement respectées (lire également la chronique juridique pp. 24-26). La décision du Conseil national de ne plus reconnaître les diplômes univer-

sitaires (DU) a également fait l’objet « d’échanges vifs mais courtois » a relevé Philippe Humbert : « Au terme de ce débat, nous avons compris la décision du Conseil national. Nous attendons désormais beaucoup de la commission de reconnaissance des compétences. » Dans cette région où la désertification de certaines zones rurales est une réalité, la question de la démographie professionnelle a naturellement été largement commentée. Des pistes ont été explorées, comme la mise en place d’autocars de ramassage dans les campagnes pour acheminer les patients vers les cabinets.

Evaluation de la patientèle Le nouveau statut du collaborateur libéral a par ailleurs été abordé, notamment sous l’angle de l’épineuse question de l’inventaire de la patientèle. Des moyens d’évaluation ont été évoqués, sans toutefois qu’aucune « méthode » spécifique ait pu être déterminée. « Quand le Conseil national dispose des réponses à nos questions, il nous les communique. Sinon, il nous informe de l’avancée des dossiers » souligne Philippe Humbert. Sur les questions relatives à la charte du praticien contrôlé, à la mise en place des chambres arbitrales ou encore à la formation continue obligatoire, les conseillers nationaux ont indiqué que les négociations avec les tutelles concernées se poursuivaient.


Rayonnements ionisants

Assouplir le délai de formation des praticiens à la radioprotection Trois ans avant le terme de l’échéancier de formation prévu par la loi, 35 000 praticiens ne sont toujours pas formés. Pour le Conseil national, l’objectif sera difficile à tenir.

Le Conseil national est inter venu auprès de la Direction générale de la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) afin d’assouplir le calendrier de formation des chirurgiens-dentistes à la radioprotection des personnes. La loi prévoit la date couperet du 18 juin 2009 au terme de laquelle tous les praticiens devront être formés. Optimiser l’utilisation des rayonnements ionisants La formation à la radioprotection a pour objet de permettre aux praticiens d’optimiser l’utilisation des rayonnements ionisants dans leur pratique professionnelle. Cette formation doit être reconduite tous les dix ans. Contrairement à la formation de la personne compétente en radioprotection (PCR), qui ne s’applique qu’à chaque cabinet, tous les chirurgiensdentistes sont concernés de manière individuelle par cette obligation. Comment raisonnablement envisager de former 35 000 chirurgiensdentistes en moins de trois ans ? D’autant qu’à cet impératif s’ajoute l’obligation de formation d’une personne compétente en radioprotection (PCR) dans le cabinet…

Confusion des genres Autre problème : l’on constate une cer taine confusion chez les confrères entre ces deux obligations. Dans un courrier adressé au Conseil natio-

nal, Daniel Mirish, président du conseil départemental de l’Oise, rappor te que la Direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement (DRIRE) de Châlons-enChampagne exige, à l’occasion de la déclaration des installations en radiographie des cabinets dentaires, l’attestation de formation de la PCR ou, à défaut, l’engagement à suivre cette formation. Mais « certains confrères confondent les différentes formations et adressent une attestation de formation en radioprotection des personnes » relève-t-il. Ce qui leur vaut évidemment un refus de leur déclaration d’installation. Rappelons que la PCR est chargée d’assurer la protection des travailleurs du cabinet et de tous ceux qui sont susceptibles d’y inter venir. A cet effet, elle évalue notamment la dosimétrie des actes réalisés ainsi que les mesures générales de radioprotection. La durée de la formation de la PCR (2 modules de 30 heures au minimum) pose évidemment des dif ficultés d’organisation à nos confrères. « Sans vouloir discréditer le programme de cette formation, il faut convenir qu’il existe un fort décalage avec la réalité de l’activité radiologique d’un chirurgien-dentiste, écrit Daniel Mirish. Peut-on imaginer que nous fermions notre cabinet pendant deux semaines pour des raisons purement administratives ? »

C’est pourquoi, sans bien sûr remettre en question la nécessaire formation des chirurgiens-dentistes à la radioprotection, le Conseil national a saisi les ministères de tutelle de ces difficultés afin que des dispositions spécifiques soient aménagées pour notre profession.

75 SALARIÉS SUREXPOSÉS EN 2004 Selon l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), en 2004, 75 salariés de cabinets dentaires sur 23773 ont reçu des doses de rayonnements ionisants supérieures à 1 mSv par an (limite de dose fixée pour le public). Rappelons que le personnel salarié du cabinet dentaire doit sortir de la salle de soins dite «zone surveillée» lors de la prise de radiographies.

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l’actualité Hygiène et asepsie

Stérilisateurs à vapeur d’eau : les recommandations de l’AFSSAPS L’installation et l’utilisation de ce type de matériel répondent à des normes françaises et européennes précises. Décryptage.

L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a réalisé une étude portant sur les performances des petits stérilisateurs à vapeur d’eau. L’objectif de cette étude : informer les utilisateurs sur les règles de maintenance de leurs appareils, en particulier en ce qui concerne le traitement des agents transmissibles non conventionnels (ATNC). A la lueur de cette étude, l’AFSSAPS a établi les recommandations suivantes : • les professionnels de santé doivent acquérir un petit stérilisateur à la vapeur d’eau marqué CE selon la directive 93/42/CEE et permettant la validation du procédé de stérilisation en conformité avec la norme NF EN 554 ; • l’appareil choisi doit être conforme à la norme européenne NF EN 13060 (novembre 2004) ou doit avoir satisfait à une série de 11 contrôles définis par l’AFSSAPS ; • le cycle de stérilisation choisi doit être adapté à notre exercice professionnel : type B défini dans la norme NF EN 13060 ; • les conditions de maintenance proposées doivent faire l’objet d’un contrat.

Avant l’utilisation de routine L’utilisateur devra procéder à la validation de l’appareil selon la norme NF EN 554. Cette validation peut être assurée par le fournisseur de l’appareil 10 la Lettre no 47 Mai 2006

lui-même ou par une société spécialisée. Un rapport de validation concluant à la conformité ou à la non-conformité de l’installation doit être remis à l’utilisateur. Les opérations de maintenance préventives et curatives doivent être réalisées en tenant compte des recommandations du fabricant. Par ailleurs, elles doivent faire l’objet d’un contrat précisant leur fréquence, les types d’intervention, les pièces détachées, etc. Ces opérations peuvent être réalisées par le fabricant, le fournisseur ou une

société spécialisée. Si des interventions techniques ont été effectuées, il faut procéder à la réévaluation de l’appareil. Il est impératif d’assurer la traçabilité de ces opérations.

Pour les appareils déjà installés Il faut organiser et faire réaliser les opérations de maintenance préventives et curatives en tenant compte des recommandations du fabricant. Ces opérations doivent faire l’objet d’un contrat précisant leur fréquence,


les types d’interventions, les pièces détachées, etc. Par ailleurs, la personne (ou la société) chargée de la maintenance doit vérifier que les prérequis favorables à la validation de l’appareil selon la norme NF EN 554 sont obtenus (charge textile stérile, essais de Bowie Dick, d’étanchéité et de saturation à la vapeur d’eau satisfaisants). Un rapport de validation concluant à la conformité ou à la non-conformité de l’appareil par rapport à la norme NF EN 554 doit, là encore, être remis à l’utilisateur. Dans le cas où les prérequis ne sont pas et ne peuvent pas être obtenus après modification de l’appareil, l’utilisateur devra envisager de le remplacer dès que possible.

Il est indispensable de contrôler en routine et de tracer le procédé de stérilisation. Si des opérations techniques ont été réalisées, il faut procéder à la réévaluation de l’appareil. La maintenance doit être réalisée selon les conditions du contrat et sa traçabilité doit être assurée.

Les futurs appareils Les futurs modèles d’appareil de stérilisation devront être conformes à la norme NF EN 13060 ou à un référentiel équivalent et prendre en compte les exigences de la conformité à la norme NF EN 554 dès leur conception. Les fabricants et les distributeurs devront assurer l’information des utilisateurs concernant la concep-

tion et l’utilisation de ces appareils. En outre, les opérations de maintenance préventives et curatives devront être réalisées en tenant compte des recommandations du fabricant. Elles pourront être effectuées par le fabricant, le fournisseur ou une société spécialisée. Le détail des recommandations et des normes citées ci-avant est consultable sur le site de l’AFSSAPS, à l’adresse « www.afssaps.sante.fr ». Précisons par ailleurs qu’un arrêté ministériel est actuellement en préparation en vue d’interdire l’utilisation de la stérilisation à la vapeur sèche en dehors des établissements de soins, dans lesquels elle est déjà proscrite. Robert Regard

Soins à domicile

Personnes âgées : hors les murs du cabinet, pas de soins? Dans certains départements, les mallettes de soins portatives sont sous-utilisées par les confrères.

Le conseil dépar temental de Paris est régulièrement sollicité par des patients âgés (voire très âgés) dont l’état de santé ou la mobilité ne permet pas d’accéder à un cabinet dentaire. Ceux-ci dressent le constat sans équivoque d’une carence des soins bucco-dentaires à domicile. Cer tes, notre Code de déontologie proscrit l’exercice ambulatoire, mais il précise que « le chirurgien-dentiste doit soigner avec la même conscience tous ses patients, quels que soient leur origine, leurs mœurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déter-

minée, leur handicap ou leur état de santé […] » (1). En vertu dudit Code, le praticien est également tenu d’« agir toujours avec correction et aménité envers le patient et [de] se montrer compatissant envers lui » (2). Or, quand le suivi des soins est frappé d’arrêt parce que le patient âgé ne peut se rendre chez le praticien qui le traite depuis des années, n’est-ce pas un devoir d’humanité des plus élémentaires pour le professionnel de santé que de venir à son patient pour lui prodiguer les soins dont il a besoin ? Rappelons que chaque conseil départemental tient à la disposition de ses

ressortissants une mallette de soins portative prévue à cet usage. Celleci permet au praticien de l’ar t dentaire de réaliser des soins d’urgence et de remplir ainsi sa mission de santé publique. Pierre-Charles Lansade

(1) Article R. 4127-211 du Code de santé publique (anciennement article 8 du Code de déontologie). (2) Article R. 4127-233 du CSP (anciennement article 27 du Code de déontologie). Mai 2006

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l’actualité Informatique

Intranet de l’Ordre : une réactualisation régulière Recommandations pratiques, réglementations, contrats, toutes les informations professionnelles sont disponibles sur le «www.oncd.org».

Quelle est la dangerosité du mercure dans les amalgames dentaires? Comment obtenir le guide d’exercice professionnel ? Quelles sont les règles en matière de gestion des déchets d’activité ? Où se procurer une fiche d’évaluation et de prévention des risques professionnels ?

Des nouveautés sur le Net La foire aux questions (FAQ) du site Intranet du Conseil national constitue un lieu privilégié pour obtenir des informations sur les sujets professionnels les plus divers. Et, dans le souci d’informer au mieux les confrères sur les évolutions de l’environnement professionnel, le Conseil national réactualise régulièrement son site Intranet. Au rang des informations récemment mises en ligne, plusieurs nouveautés sont à signaler. S’agissant des amal-

games dentaires, par exemple, une synthèse du rapport de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) est diffusée sur le site (au format PDF). En ce qui concerne la gestion des déchets, le rappel des réglementations et les formulaires ad hoc (ainsi que des liens pour les télécharger) sont désor-

mais disponibles. Toujours en matière d’hygiène et d’asepsie, on pourra trouver dans la FAQ les dernières normes à appliquer en matière de stérilisateurs. S’agissant de la radioprotection, des liens permettent d’accéder aux textes légaux. Le formulaire de déclaration des installations est également, bien entendu, en ligne. Des informations sur la capacité professionnelle font aussi l’objet d’une permanente actualisation. On relèvera enfin une intéressante mise au point sur le droit de prescription du chirurgien-dentiste et les démarches à accomplir afin de recevoir sa carte de professionnel de santé. Rappelons par ailleurs que l’ensemble des contrats d’exercice est téléchargeable sur l’Intranet sous la rubrique « Centre de publications » (www.oncd.org).

Tableau professionnel

Le CV d’inscription bientôt en ligne Le nouveau curriculum vitae d’inscription est arrivé. A disposition dans le guide d’accueil du chirurgien-dentiste, ce document constitue la première étape dans l’inscription du praticien thésé au tableau professionnel. Dûment rempli par le praticien, il doit être adressé au conseil départemen12 la Lettre no 47 Mai 2006

tal qui, après l’avoir validé, le transmet au Conseil national. A la signature de ce curriculum, le praticien s’engage à souscrire une assurance garantissant sa responsabilité civile professionnelle et à veiller à son renouvellement périodique. Au verso de ce document de quatre pages sont précisées les disposi-

tions déontologiques concernant les plaques et les imprimés professionnels (1). Il sera prochainement accessible depuis le site Intranet de l’Ordre. (1) Articles R. 4127-216 et 218 du Code de la santé publique, anciennement articles 13 et 14 du Code de déontologie.


Un nouveau train de réformes

Contrats : des mesures d’équité entre exercice individuel et exercice en groupe Quatre nouvelles dispositions tendent à placer sur un pied d’égalité les différentes formes d’exercice. Le Conseil national a par ailleurs adopté une importante mesure touchant au nouveau statut du collaborateur libéral.

Un collaborateur libéral quittant un cabinet ne pourra exiger du titulaire l’impossibilité de recruter un collaborateur pendant une période de deux ans. C’est l’une des décisions que vient d’adopter le Conseil national sur proposition de la commission des contrats. D’autres mesures importantes, présentées par la commission des contrats au Conseil national, auront été également entérinées. Elles ont été élaborées à l’aune de la politique de la commission des contrats consistant à simplifier et à harmoniser l’exercice des confrères. Au total, pas moins de cinq mesures ont été adoptées par le Conseil national : • L’impossibilité, pour le collaborateur libéral, d’interdire au titulaire du cabinet qu’il quitte, l’installation d’un collaborateur pendant une période de deux ans ; • L’assouplissement des clauses d’exercice pour les SCM ; • L’extension de l’exercice simultané aux chirurgiens-dentistes exerçant au sein d’une SEL ou d’une SCP ; • L’impossibilité de recourir à l’assistanat dans une SEL ou une SCP lorsque l’un des associés exerce une activité annexe ; • L’impossibilité de recourir à l’assistanat dans une SEL ou une SCP lorsque l’un des associés fait l’objet d’une sanction disciplinaire. Avant d’entrer dans le détail de ces nouvelles dispositions, on relèvera que les quatre dernières mesures ont été élaborées sur un principe d’équité entre les chirurgiens-dentistes exerçant à titre individuel et les chirur-

giens-dentistes exerçant en groupe ou au sein d’une société.

Collaboration libérale S’agissant du premier point concernant le nouveau statut de collaborateur libéral et ses implications, rappelons que les dispositions de notre Code de déontologie prévoient deux interdictions applicables aux chirurgiensdentistes et aux sociétés d’exercice en commun. En vertu de son article 71 (désormais ar ticle R. 4127-278 du Code de la santé publique), il est interdit de s’installer dans un immeuble où exerce un confrère sans l’agrément de celui-ci ou, à défaut, sans l’autorisation du conseil départemental. En outre, il est interdit de s’installer dans un local ou un immeuble auparavant occupé par un confrère, et ce pendant une période de deux ans après son départ, sauf accord intervenu entre les praticiens concernés ou, à défaut, autorisation du conseil départemental. En matière d’application de cette disposition, le Conseil national a toujours considéré qu’un collaborateur ne s’installait pas, au sens dudit article. Dès lors, le praticien titulaire pouvait se faire assister par un collaborateur libéral ou salarié. Or, la création du nouveau statut du collaborateur libéral permet désormais au collaborateur libéral de se constituer sa clientèle personnelle (1). Ces nouvelles dispositions ont conduit la commission des contrats à mener une réflexion sur la question de savoir si le collaborateur libéral Mai 2006

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l’actualité

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peut demander ou non l’application des dispositions précitées. Après étude, le Conseil national a estimé que, bien que le collaborateur libéral puisse se constituer sa propre clientèle, il ne s’installe pas pour autant puisqu’il n’est pas titulaire d’un droit au bail (2). Par conséquent, le collaborateur libéral ne peut opposer au titulaire du cabinet les dispositions de l’article R. 4127-278 du Code de la santé publique.

SCM : un assouplissement des clauses d’exercice Rappelons qu’une clause d’exercice consiste en une obligation contractuelle ayant un rapport direct avec l’exercice de la profession. Une telle clause remet en cause l’indépendance professionnelle des praticiens et porte atteinte à leur liberté individuelle d’action. Il en résulte une perte de la faculté de se faire assister (article R. 4127-276 du Code de la santé publique, anciennement article 69 du Code de déontologie), voire, par analogie, de la faculté de se faire remplacer partiellement. Dans le but d’assouplir et de simplifier l’exercice des confrères, le Conseil national a décidé de ne plus maintenir comme clause d’exercice : • Le choix du collaborateur et/ou du remplaçant ; 14 la Lettre no 47 Mai 2006

• L’aménagement des horaires de travail ; • La répar tition de toutes les dépenses communes au prorata du chiffre d’affaires. Attention ! La décision de prendre un collaborateur et/ou un remplaçant ainsi que la clause de « garantie de recette » sont, en revanche, toujours qualifiées de clauses d’exercice. Précisons que l’on rencontre principalement les clauses de garantie de recette dans les actes de cession ou d’intégration. L’ensemble de ces mesures s’applique également aux chirurgiens-dentistes liés par un contrat d’exercice à frais commun. Enfin, rappelons que l’absence de communication de la liste de toutes les dépenses communes, intégrant une clé de répartition, empêchera les praticiens de recourir à l’assistanat.

L’exercice simultané dérogatoire étendu aux praticiens d’une SEL ou d’une SCP De plus en plus de confrères rencontrent des difficultés pour trouver un acquéreur de leur cabinet. C’est la raison pour laquelle le Conseil national permet à un chirurgien-dentiste exerçant à titre individuel d’exercer simultanément dans son cabinet dentaire et dans le cabinet dentaire qu’il

envisage d’acquérir. Cette dérogation, limitée à six mois (soit trois mois renouvelables une fois), est délivrée sous réserve que le praticien concerné justifie la mise en vente de son cabinet dentaire. Jusqu’à aujourd’hui, cette dérogation n’était ouverte qu’au praticien exerçant individuellement ainsi qu’au praticien exerçant au sein d’une SCM ou lié par un contrat d’exercice professionnel à frais communs (EPFC). Elle ne s’appliquait pas à l’exercice de la profession dans le cadre d’une société telle que la SEL ou la SCP. Compte tenu du nombre croissant de créations de sociétés d’exercice (SEL ou SCP) et par souci tant d’équité que d’harmonisation, le Conseil national, sur proposition de la commission des contrats, a pris la décision d’étendre cette possibilité : • Au chirurgien-dentiste exerçant à titre individuel et souhaitant intégrer une SEL ou une SCP ; • Au chirurgien-dentiste exerçant dans une SEL ou une SCP et qui envisage de créer ou de racheter un cabinet dentaire pour se retirer de la société d’exercice dans un délai défini à l’avance. Ainsi, il est désormais possible, pour ces praticiens, de bénéficier de cette dérogation dans les mêmes conditions que les chirurgiens-dentistes exerçant à titre individuel. Outre le justificatif de mise en vente du cabinet dentaire concerné, le dossier devra comporter les pièces suivantes : • La demande motivée du praticien, impérativement accompagnée de l’avis du ou des présidents des conseils départementaux concernés ainsi que l’avis des associés de la SEL ou de la SCP ; • Le justificatif d’inscription du praticien au tableau de l’Ordre départemental d’inscription de la SEL ou de la SCP ; • L’engagement du praticien, à l’issue des six mois, de fermer son


cabinet dentaire, de le vendre ou de le mettre en location. Il appartiendra aux conseils départementaux de vérifier que cet engagement est bien respecté par les praticiens concernés.

SEL et SCP : assistanat interdit si l’un des associés exerce une activité annexe En application des dispositions de l’article R. 4127-276 du Code de la santé publique, un chirurgien-dentiste exerçant à titre individuel et ayant une activité annexe ne peut se faire assister. On parle d’activité annexe lorsque le praticien cumule son activité principale et une activité professionnelle complémentaire en tant que collaborateur (libéral ou salarié) ou en tant que remplaçant pour une durée supérieure à trois mois (libéral ou salarié). Le problème s’est posé de savoir si cette interdiction s’appliquait égale-

ment au chirurgien-dentiste exerçant son activité au sein d’une SEL, dans la mesure où c’est la société qui exerce la profession par l’intermédiaire de ses membres. Ainsi, afin d’éviter que l’exercice en SEL ou en SCP ne constitue le moyen de contourner les dispositions du Code de la santé publique, le Conseil national a décidé d’adopter une application stricte de cet article. Il est donc désormais interdit à une SEL ou à une SCP de s’adjoindre un collaborateur lorsque l’un des associés exerce une activité annexe, en dehors des exceptions prévues audit article.

rateur pendant toute la durée de la sanction disciplinaire. Mais dans le cas d’une SEL comportant plusieurs associés, si l’un des associés fait l’objet de cette interdiction, quid de la possibilité, pour cette SEL, de se faire assister ? Pour le Conseil national, la SEL ne peut recourir à l’assistanat pendant la durée de la sanction d’interdiction d’exercer frappant l’un de ses associés. Cette décision est également applicable aux SCP dont l’un des associés fait l’objet d’une sanction d’interdiction d’exercer la profession. André Micouleau

SEL et SCP : assistanat interdit si l’un des associés fait l’objet d’une sanction disciplinaire Le chirurgien-dentiste frappé d’une interdiction d’exercer en application d’une sanction disciplinaire dûment notifiée ne peut recruter un collabo-

(1) Nouveau statut créé par l’article 18 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005. (2) Par application de l’article R. 4127-269 du Code de la santé publique.

Indépendance et fonction juridictionnelle La loi du 4 mars 2002 a décidé de confier à des magistrats administratifs la présidence des chambres disciplinaires de première instance des professions médicales. Ainsi que La Lettre l’a indiqué dans sa livraison d’avril 2006, les quatre Ordres ont fait savoir au ministre de la Santé et des Solidarités que la prise en charge financière des indemnités de fonction de ces magistrats devait incomber à l’Etat. Les Ordres ont sans doute d’excellentes raisons de refuser cette charge. Mais, il ne serait pas sérieux de leur part d’invoquer à ce sujet la créa-

tion d’un prétendu « lien de subordination » à leur égard, incompatible avec l’indépendance du juge. Un tel argument, s’il était fondé, vaudrait d’ailleurs tout autant pour les indemnités versées aux conseillers ordinaux membres des chambres disciplinaires : eux aussi doivent assurer leur fonction juridictionnelle en toute indépendance, y compris vis-àvis des instances administratives de leur Ordre. Car l’indépendance est la caractéristique nécessaire de ceux qui exercent une telle fonction, à quelque titre que ce soit. Elle n’a rien à voir avec la manière dont ces person-

nes sont indemnisées (laquelle, dans le cas des juridictions ordinales, ne revêtirait nullement la forme d’un salaire). L’indépendance du juge est une attitude personnelle, une armature intérieure, psychologique et morale, qui lui permet – dans la confrontation de la collégialité – d’apprécier, en fonction uniquement de sa science et de sa conscience, les situations qui lui sont soumises. Sans cette indépendance des juges – de tous les juges –, les juridictions ordinales seraient dépour vues de crédibilité. Pierre Rivière Mai 2006

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l’actualité Démographie

Surpopulation à la ville, déficit à la campagne Dans le Var, à Saint-Tropez, on compte un chirurgien-dentiste pour 681 habitants. Dans le Haut-Var, plusieurs cantons sont complètement dépourvus de praticiens.

«Dans les prochaines années, on risque d’atteindre la limite des mesures incitatives à l’installation. Pour rétablir l’équilibre démographique, il faudra peut-être envisager des mesures coercitives.» A l’occasion de la conférence organisée sur le thème par la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), le 17 mars dernier, Christian Couzinou, conseiller national, a dressé le tableau d’une situation démographique contrastée dans notre pays. Avec une population totale de 44187 praticiens inscrits, dont 40 687 en exercice, le nombre de chirurgiensdentistes en activité est constant depuis l’an 2000, mais la population générale n’a cessé de croître. Certes, avec un âge moyen des praticiens qui se situe aux alentours de 47 ans, la

Le Tarn constitue un exemple frappant des disparités démographiques, sur fond de stagnation des effectifs professionnels.

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CARCD estime que les praticiens en exercice seront 36 000 en 2016 et moins de 30 000 en 2026, à condition que le numerus clausus soit porté à 1 000…

21 % des confrères en Ile-de-France Cependant, ce n’est pas, pour l’heure, le nombre de praticiens en exercice dans notre pays qui inquiète le plus. «La moyenne nationale est d’un chirurgien-dentiste en exercice pour 1 504 habitants. Cela nous place dans la moyenne européenne, a précisé Christian Couzinou (lire l’encadré p. 17). En revanche, il existe de fortes disparités entre les régions. » Depuis quelques années, la démographie professionnelle suit en effet une double tendance. D’un côté, les

zones rurales se désertifient, de l’autre, on assiste à une densification professionnelle des centres urbains. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : la densité record est atteinte dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur avec un praticien en exercice pour 958 habitants, alors que, en Normandie et en Picardie, l’on ne compte en moyenne qu’un chirurgien-dentiste pour 2 230 habitants. « Globalement, les praticiens sont attirés par les zones urbaines. 21 % de nos confrères exercent en Ile-deFrance, 11 % en PACA et 10 % en région Rhône-Alpes. Le reste du territoire national se partage inégalement les 58 % des praticiens restants. Au sein d’une même région, on constate d’importantes inégalités de répartition des professionnels, a-t-il souli-


gné. Prenons le Tarn comme exemple. Depuis plus de 20 ans, le département connaît une évolution de sa démographie professionnelle parallèle à la courbe nationale. Mais, alors qu’en 1982 les professionnels étaient répartis sur l’ensemble du département, les sept cantons les plus ruraux du département sont aujourd’hui totalement dépourvus de chirurgiensdentistes. »

Déménager malgré les aides Autre illustration de la prédilection des confrères pour l’installation urbaine, le département du Var. «Traditionnellement très bien doté en chirurgiens-dentistes, on constate désormais dans ce département un clivage profond entre le haut pays, vidé de ses praticiens, alors que ce n’était pas le cas il y a encore quelques années, et les villes côtières, particulièrement prisées » a-t-il ajouté. Tandis que le canton de Saint-Tropez dénombre le ratio extraordinaire d’un chirurgiendentiste pour 681 habitants, le canton de Tavernes ne compte qu’un praticien pour 3 436 habitants, celui de Comps-sur-Artuby, aucun… Ce n’est certainement pas la migration des praticiens étrangers vers la France qui permettra de rétablir ce déséquilibre puisque, depuis 1994, leur nombre est stable (942). On constate en revanche que le nombre de praticiens étrangers issus de l’Union européenne – actuellement de 456 – va croissant. Dans ce cas, comment envisager l’avenir ? L’ampleur de la crise est telle que, pour Christian Couzinou, les remèdes « incitatifs » comme l’installation de maisons médicales ou la mise en place de mesures fiscales et sociales en milieu rural dans les zones urbaines sensibles pourraient ne plus s’avérer suffisantes dans les prochaines années : «L’exemple des avantages fiscaux accordés aux confrères exerçant en zones franches est significatif : beaucoup d’entre eux préfè-

Christian Couzinou, lors de son intervention au Sénat dans le cadre du colloque de la CNSD sur la démographie.

rent désormais déménager malgré les aides. »

Des mesures imposées ? Evoquant la douloureuse option d’un conventionnement sélectif des jeunes chirurgiens-dentistes au moment de leur installation, Christian Couzinou a estimé qu’elle comptait « au rang des pistes qui risquent de nous être imposées, que cela plaise ou non ». Il a également évoqué la possibilité d’un numerus clausus d’installation sur le modèle des pharmaciens, mê-

me si cette solution paraît difficilement applicable à notre profession. « Il est du devoir de tout chirurgiendentiste de prêter son concours aux mesures prises en vue d’assurer la permanence des soins et la protection de la santé. Il paraît difficile de prétendre à l’installation d’un cabinet disposant d’un plateau technique de qualité dans chaque canton. En revanche, que chaque personne dispose d’un praticien à moins de 35 minutes de transport de chez elle constitue un besoin de santé publique, a-t-il rappelé. Il nous faut donc nous mobiliser aujourd’hui afin d’influer sur les décisions qui ne manqueront pas d’être prises par les décideurs politiques. Faute de quoi, elles nous seront imposées ». Le ministre de la Santé et des Solidarités refuse pour l’heure de recourir aux mesures coercitives afin d’éviter une « crise de vocation ». Il devrait toutefois en septembre prochain proposer à la profession un certain nombre d’incitations sur le modèle de ce qu’il avait proposé aux médecins en janvier dernier : définition de zones prioritaires, soutien à l’exercice en cabinet de groupe, encouragement financier à l’installation des jeunes praticiens en zone à faible densité médicale, etc. (lire également la revue de presse p. 42). Seront-elles suffisantes ?

LA GRÈCE, PAYS EUROPÉEN LE PLUS DOTÉ EN PRATICIENS DE L’ART DENTAIRE Alors que chez nos voisins allemands, le ratio est de un praticien pour 1 281, il atteint un pour 2 105 au Royaume-Uni et un pour 2 667 en Espagne. Mais le grand écart a lieu entre la Grèce, pays le plus peuplé en chirurgiens-dentistes (un praticien pour 908 habitants), et Malte qui doit se contenter d’un praticien pour 2 780. Au rang des autres pays « désertés », la Hongrie (un pour 2 017) et l’Irlande (un pour 2 053), qui arrive juste derrière le Portugal (un pour 2 245). Parmi les mieux dotés en professionnels de l’art dentaire, citons les pays scandinaves : Danemark (un pour 1 032) et Finlande (un pour 1 101), mais aussi Chypre (un pour 1 109) ou encore la Lituanie (un pour 1 133). Mai 2006

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dossier

Réduire les risques, pro Parallèlement à une série de décrets réglementant les officines de piercings, annoncée d’ici à la fin de l’année, la profession a le devoir d’informer les jeunes patients et leurs parents des risques du piercing buccal. Pour ce faire, le Conseil national publie, sur une double page, un document de la Société odontologique de Paris (SOP), et invite les praticiens à l’afficher dans les salles d’attente.

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téger le consommateur Piercing buccal

Une campagne d’information au public via les praticiens La DGS annonce une réglementation des officines de piercing avant la fin de l’année. En attendant, l’Ordre s’associe à la SOP pour lancer une campagne via les cabinets dentaires.

C’est peu dire que le piercing est devenu en quelques années un véritable phénomène de société. Les officines de tatouage et de piercing se sont multipliées dans les grands centres urbains, de même que les installations ambulantes proposant leurs ser vices sur les marchés, dans les stations balnéaires, les boîtes de nuit, à l’occasion de rave parties, etc. Ce qui inquiète aujourd’hui, c’est le nombre et par fois la gravité des complications liées aux piercing. Cette pratique constitue un véritable problème de santé publique. S’agissant du piercing buccal, outre le risque infectieux commun à toutes les formes de piercing (VIH, hépatites, tétanos, etc.), les conséquences au niveau de la bouche sont multiples : dents fêlées ou fracturées, récessions gingivales, œdèmes, hémorragies, allergies, etc. Quel peut être le rôle de la profession? Pour le Conseil national de l’Ordre, il n’est évidemment pas question de revenir sur la position qu’il soutient depuis plusieurs années : il ne revient certainement pas au chirurgien-dentiste de pratiquer de tels actes. Une position évidente d’un point de vue

déontologique puisque le piercing n’est pas un acte de soins, mais bien plutôt un acte d’agression de la sphère oro-buccale. Deux leviers peuvent aujourd’hui être actionnés pour réduire les risques : l’information du public et la réglementation des pratiques. Notre profession a le devoir d’informer la jeune patientèle et leurs parents. C’est pourquoi le Conseil national salue l’initiative de la Société odontologique de Paris (SOP) qui a réalisé et distribué à la profession un dépliant sur la question (lire l’encadré ci-dessous). Avec l’aimable autorisation de la SOP, le Conseil national publie une adaptation de ce dé-

pliant, sous la forme d’une double page, que les praticiens pourront afficher dans leur salle d’attente. L’enjeu est important : notre profession doit diffuser l’information sur les risques, c’est une évidence, mais elle doit également, pour les publics désirant se faire poser un piercing, aider à susciter, de la part des jeunes et de leurs parents, une exigence d’hygiène et de sécurité auprès des officines pratiquant le piercing. Le second levier ne relève évidemment pas du champ de compétences de la profession, mais bien de celui des pouvoirs publics. Depuis quelques années, plusieurs Etats euro-

INFORMER POUR PROTÉGER En 2003, la SOP a réalisé un dépliant sur les dangers et les précautions à prendre s’agissant du piercing buccal. Ce dépliant a été distribué aux chirurgiens-dentistes via le Journal de la SOP. Il reste aujourd’hui à la disposition des praticiens, sur demande, à la SOP (6, rue Jean-Hugues – 75016 Paris) et peut également être téléchargé sur son site (www.sop.asso.fr). Deux ans après, l’excellent travail réalisé par la SOP reste d’actualité, et c’est pourquoi le Conseil national a demandé et obtenu l’autorisation de l’adapter sous la forme d’une affiche. Qu’elle en soit ici remerciée.

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dossier

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péens réfléchissent à une réglementation de la pratique du piercing. L’Espagne, la Grèce, les Pays-Bas songent à un arsenal de mesures destinées à encadrer la pratique. Le projet de la communauté autonome cantabrique, en Espagne, est aujourd’hui le plus avancé. Il a ainsi été soumis à l’ensemble des Etats de l’Union européenne, selon la procédure d’information dans le domaine des normes et des règles techniques (1). Au rang des dispositions les plus importantes contenues dans ce projet encadrant les pratiques dans les officines de piercing : l’instauration de normes relatives aux locaux, aux équipements, aux matériels ainsi qu’à la formation des personnels. Où en est-on en France? Une série de décrets en Conseil d’Etat (qui nécessiteront donc des arrêtés d’application pour leur mise en œuvre) est actuellement en préparation. Ces décrets portent sur la pratique des tatouages et piercings, mais également sur les produits utilisés. Le cabinet du ministre semble vouloir avancer rapidement

sur la question puisque, à la Direction générale de la santé (DGS), on évoque l’échéance de la fin de l’année pour voir paraître ces textes (lire l’article infra). Une telle réglementation ne résoudra pas tous les problèmes d’un coup. A côté des officines ayant pignon sur rue, dont on peut penser qu’elles auront un intérêt à appliquer les textes,

les pratiques ambulantes plus ou moins « sauvages » ne disparaîtront pas du jour au lendemain. Cette réalité ne rend que plus nécessaire l’information du public. (1) Selon les dispositions de la directive 98/CE du 22 juin modifiée par la directive 98/48/CE du 20 juillet 1998.

Une réglementation avant la fin 2006 ? Le ministère appréhende piercings et tatouages selon une approche globale.

Une série de décrets serait en cours de finalisation à la Direction générale de la santé, portant sur une réglementation des produits et des pratiques liés aux tatouages et aux piercings. Sensiblement différents des projets émanant des autres pays européens, ces textes adopteraient en effet une approche globale de la question : ils prévoient un ensemble de dispositions touchant non seulement aux pratiques, mais également aux produits, notamment pour les tatouages. S’agissant des piercings, ces 20 la Lettre ● no 47 ● Mai 2006

textes créent des normes d’hygiène et d’installation. Les actes proprement dits de pose de piercings, l’organisation des locaux (notamment avec une séparation distincte entre l’espace recevant le public et l’espace privé où les actes sont effectués), la stérilisation des matériels ou le traitement des déchets feront l’objet de normes précises. En outre, une formation obligatoire aux règles d’hygiène serait mise en place. La responsabilité des « praticiens » réalisant des tatouages et

des piercings sera clairement engagée, et des sanctions pénales seront donc prévues en cas de non-respect des dispositions contenues dans les décrets. Il semble que le cabinet du ministre veuille aller vite puisque la notification de ce texte aux Etats de l’Union européenne (obligatoire dès lors qu’un Etat souhaite édicter des normes techniques) se ferait selon une procédure d’urgence afin de réduire les délais et de pouvoir publier ces décrets avant la fin de l’année.


Interview

« Une démarche de réduction des risques » Entretien avec Philippe Safar, président d’honneur de la Société odontologique de Paris (SOP).

Vous avez présidé, au sein de la SOP, un groupe de travail sur le piercing. Un dépliant destiné au grand public, via les salles d’attentes des chirurgiens-dentistes, a été élaboré. C’est ce même dépliant qui est aujourd’hui publié dans les pages de La Lettre, sous la forme d’une affiche. Qu’est-ce qui a motivé votre démarche ? À la suite du décès tragique d’une jeune fille, qui succomba à une infection consécutive à un piercing, j’ai signé un éditorial sur les conditions dans lesquelles étaient pratiqués les piercings. J’en appelais à une véritable mobilisation de la profession. Or, tout à fait par hasard, les parents de cette jeune fille sont tombés sur cet éditorial. Ils nous ont encouragés à sensibiliser la profession et le grand public sur cette question. Il nous aura fallu un an pour réaliser ce dépliant, notamment avec le concours du Dr Francis Tobelem. Il faut dire que les études scientifiques sur le piercing, phénomène relativement récent, restent malheureusement peu nombreuses.

Les risques sont pourtant relativement bien identifiés… Certes, mais dans la littérature scientifique, en tout cas en 2003, vous ne trouviez aucune étude épidémiologique ou clinique permettant de quantifier ou de qualifier précisément les risques. Je doute qu’une telle étude ait été réalisée depuis lors. En réali-

nières étant soit fêlées, soit fracturées. On le sait, ces microtraumatismes répétés peuvent avoir comme conséquences des microfêlures, des fractures dentaires, voire des résorptions osseuses.

Dans votre dépliant, vous vous situez dans une démarche de «précaution» puisque vous donnez des conseils pour les personnes désirant un piercing… Notre démarche est effectivement fondée sur le principe de la réduction des risques : plutôt que d’en appeler d’une manière incantatoire à la disparition du piercing, ce qui ne serait pas très réaliste, ce vers quoi nous voulons aller, c’est vers une exigence d’hygiène et de sécurité des consommateurs et de leurs parents. En face, les officines doivent pouvoir offrir de meilleures garanties.

té, même si nous sommes parfaitement capables d’identifier et d’évaluer ces risques, nous avons finalement assez peu de visibilité.

Quels sont les retours d’information qui parviennent jusqu’à la SOP, s’agissant de jeunes patients consultant à la suite d’un piercing buccal ? Ce qui frappe avant tout, c’est le nombre de patients venant consulter pour cause de séquelles de traumatismes au niveau des dents, ces der-

Quelle peut être la place du chirurgien-dentiste dans une politique d’information et de réduction des risques ? Notre rôle est central. Le chirurgiendentiste doit devenir un relais auprès du grand public. C’est d’ailleurs en ce sens que nous avons publié le dépliant. Outre le risque infectieux, notamment s’agissant du piercing de la langue, c’est le capital dentaire de la personne qui est en cause, avec une véritable agression sur ses dents. Il reste que nous ne pouvons pas tout faire et que nous attendons des réponses du côté des pouvoirs publics. Mai 2006

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juridique Responsabilité médicale

Recommandations de l’ANAES : une valeur juridique à la hausse Auparavant dotées d’une force contraignante réduite, les recommandations de l’ANAES – et désormais de la Haute Autorité de santé (HAS) – ont aujourd’hui un réel pouvoir d’influence auprès des juges. Elles pourraient bien devenir, dans un proche avenir, de véritables obligations…

A priori, la qualité des soins est érigée au rang d’objectif

Par David Jacotot docteur en droit, maître de conférences à la faculté de droit de Dijon

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vers lequel toute pratique doit tendre. Il suffit pour s’en convaincre de lire la loi du 4 mars 2002, dite loi « Kouchner ». Néanmoins, pour le Code de déontologie, la qualité des soins apparaît davantage comme une obligation que comme un objectif à atteindre. Alors ? La qualité des soins constitue-t-elle un objectif ou une obligation ? Si elle constitue une obligation, s’agit-il d’une obligation de moyens ou de résultat ? Doit-on exiger une qualité absolue («le zéro défaut») ou une qualité optimale? Questions ô combien impor tantes parce que, de leur réponse, dépendra la sanction encourue par le praticien. Actuellement, bien que l’hésitation demeure, il semblerait que la qualité reçoive la qualification d’obligation. A notre connaissance, aucune décision de justice ne soumet le praticien à une exigence de qualité absolue. La problématique se complique dès lors qu’il faut à la fois maîtriser les dépenses de santé et réaliser des soins de qualité. Les deux s’articulent-ils toujours aisément ? Les meilleurs soins au plus bas coût : défi redoutable à la charge des praticiens ! Les recommandations, qu’elles émanent de l’ANAES ou de la nouvelle HAS (Haute Autorité de santé), s’ancrent dans cette double logique de soins de qualité et de maîtrise médicale des dépenses de santé. La valeur juridique de telles recommandations est discutée. Ont-elles une force contraignante ? Créent-elles des obligations à la charge des praticiens ? Autrement dit, un chirurgien-dentiste qui les méconnaîtrait risque-t-il une sanction ? Si oui de quelle nature ? Peu de certitudes juridiques existent en la matière. C’est bien pourquoi, loin d’aboutir à des


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acte qualifié d’inutile par les RMO qui, de surcroît, est la conclusions tranchées, proposerons-nous ici une anacause d’un dommage subi par le patient) engage sa reslyse prudente teintée d’une dimension intuitive. ponsabilité civile et peut donc être condamné à verser Selon nous, si les recommandations possédaient initiades dommages-intérêts à son patient (5). Actuellement lement une force contraignante réduite (le praticien non le risque de sanction est faible car aucun avenant à la respectueux était peu sanctionné), actuellement, elles convention nationale des chirurgiens-dentistes ne fixe influencent beaucoup plus fortement les juges, non seude RMO. lement dans le cadre du contentieux soumis à la SAS Qu’en est-il des recommandations de l’ANAES et des (section des assurances sociales du conseil de l’Ordre), futures recommandations de la nouvelle HAS ? Elles tramais également dans le cadre du contentieux de resduisent des « méthodes de suivi médical et des théraponsabilité médicale. Avant d’argumenter cette problématique, apportons une peutiques à privilégier dans chaque spécialité » ; elles précision terminologique. Les recommandations doivent accompagnent les RMO (6). Ces recommandations être distinguées des référenconstituent donc des «aides ces médicales opposables à la décision ». La loi ne préLes recommandations possèdent une valeur (RMO). Ces dernières identivoit aucune sanction en cas fient « les soins et prescripde non-respect de telles rejuridique et donc une force contraignante commandations, ce qui appations médicalement inutiles par l’intermédiaire des données acquises raît logique dès lors qu’elles et dangereux» (1). La convende la science. ne sont que des « aides à la tion nationale des chirurgiensdentistes en rappelle l’exisdécision ». Aussi pouvait-on tence (2). Les RMO trouvent douter de leur force contraileur source dans la loi, qui renvoie aux par tenaires gnante ou, pour le moins, pouvait-on croire à leur valeur conventionnels le soin de les déterminer. juridique réduite. Si la loi ne prévoit aucune sanction pour les chirurgiensNéanmoins, il nous semble qu’elles influencent de plus dentistes non respectueux des RMO (3), il semble néanen plus les juges, aussi bien la SAS que les magistrats moins que le Conseil d’Etat ne s’oppose pas à ce que statuant en matière de responsabilité médicale. Dans les instances conventionnelles prononcent une sanction ces deux types de contentieux, les juges se réfèrent direcconventionnelle (4). De plus, un haut magistrat de la Cour tement aux « données acquises de la science » sans se de cassation écrivait qu’un praticien qui méconnaît les fonder sur les recommandations. Mais récemment, le RMO« en tant que données acquises de la science » et Conseil d’Etat, dans l’arrêt Kerkerian du 12 janvier 2005, a considéré que les recommandations s’intégraient dans qui cause un dommage à son patient (par exemple un Mai 2006

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juridique AU « JOURNAL OFFICIEL » ■■■

les « données acquises de la science » (7). Autrement dit, les recommandations possèdent une valeur juridique et donc une force contraignante par l’intermédiaire des données acquises de la science. En bref, les données acquises de la science regroupent notamment les recommandations et les autres publications nationales et internationales non mentionnées dans lesdites recommandations. Elles constituent l’une des données, mais n’en représentent pas l’intégralité. Un tel raisonnement a conduit le Conseil d’Etat à permettre à une SAS de condamner un praticien à une sanction disciplinaire. En matière de responsabilité médicale, selon un haut magistrat de la Cour de cassation, les « recommandations sont la simple traduction des données acquises de la science ». On retrouve donc un raisonnement proche de celui adopté par le Conseil d’Etat. Aussi un chirurgiendentiste qui méconnaîtrait une recommandation pourraitil être condamné à indemniser un patient victime d’un dommage. Il appartiendra donc à l’expert judiciaire nommé de mentionner dans son rapport les recommandations existantes et de vérifier si le respect des recommandations aurait permis d’éviter le dommage. Si notre intuition se révèle exacte, la définition des recommandations devra évoluer : elles ne seront plus seulement des « aides à la décision », mais elles deviendront des obligations pour les praticiens. Qu’adviendra-t-il alors des principes d’indépendance des professionnels de santé et de liberté de prescription ? Attendons d’autres décisions avant de répondre à de telles interrogations.

(1) Selon l’article L. 162-12-15 du Code de la sécurité sociale (CSS). (2) L’article L. 162-9 du CSS dispose : «Les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les chirurgiens-dentistes […] sont définis par des conventions nationales conclues entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie et une ou plusieurs des organisations syndicales nationales les plus représentatives de chacune de ces professions. Ces conventions déterminent […] les mesures que les partenaires conventionnels jugent appropriées pour garantir la qualité des soins dispensés aux assurés sociaux par les chirurgiens-dentistes […] et notamment la sélection des thèmes des références professionnelles, l’opposabilité de ces références et ses conditions d’application.» (3) Ce n’est pas le cas des médecins puisque l’article L. 162-5-2 du CSS met à la charge du médecin qui les méconnaît une «contribution assise sur les revenus professionnels servant de base au calcul de la cotisation personnelle d’allocations familiales». (4) CE 10/11/1999, Revue de jurisprudence sociale, 2000, n° 315. (5) P. SARGOS, «RMO et responsabilité des médecins», revue Médecine et Droit, 1998, n° 28, p. 9; voir également A. LAUDE, «La force juridique des RMO», même revue, p. 1. (6) Article L. 162-12-15 du CSS. (7) Voir D. CRISTOL, in Revue de droit sanitaire et social, 2006, n° 1, p. 53; J-P MARKUS, «La faute du médecin et les bonnes pratiques médicales», revue Actualité juridique – Droit administratif, 2005, p. 1008.

26 la Lettre no 47 Mai 2006

• Arrêté du 16 mars 2006 fixant la composition des commissions compétentes pour l’examen des demandes présentées par les personnes mentionnées au II de l’article L. 4111-2 et à l’article L. 4221-14-2 du Code de la santé publique en vue de l’exercice en France des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien.

« Article 1 Les commissions compétentes pour l’examen des demandes présentées par les personnes mentionnées au II de l’article L. 4111-2 et à l’article L. 4221-14-2 du Code de la santé publique en vue de l’exercice en France des professions de médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme et pharmacien sont composées ainsi qu’il suit : – le directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins ou son représentant; – le directeur général de la santé ou son représentant; – le directeur de l’enseignement supérieur ou son représentant. Sont adjoints : […] 2° Pour l’examen des demandes d’autorisation d’exercice de la profession de chirurgien-dentiste : Patrick Girard, professeur des universités-praticien hospitalier ; Robert Garcia, professeur des universités-praticien hospitalier ; André Micouleau, représentant le Conseil national de l’Ordre des chirurgiens-dentistes. […] » • Arrêté du 7 février 2006 fixant la composition du comité d’agrément des hébergeurs de données de santé à caractère personnel. • Arrêté du 16 février 2006 organisant la procédure d’admission en première année de deuxième cycle des études médicales, odontologiques et pharmaceutiques des candidats n’ayant pas effectué le premier cycle correspondant. • Décret n° 2006-269 du 7 mars 2006 relatif à la composition et aux modalités d’élection des conseils de l’Ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes et de leurs chambres disciplinaires et modifiant le Code de la santé publique (dispositions réglementaires). Les textes sont consultables in extenso sur « legifrance.gouv.fr »


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Cour d’appel de Paris

50 000 euros pour « négligences » du praticien L’absence de faute technique ne dispense pas d’être attentif à la douleur du patient. Celle-ci aurait dû, selon le juge, inciter le chirurgien-dentiste à recommander le recours à un spécialiste. En cause : une dent ingérée accidentellement.

L’arrêt rendu par la cour d’appel de Paris le 10 mars 2006 intéresse la responsabilité civile d’un chirurgiendentiste (1). Cette décision de justice attire l’attention en ce qu’elle explicite les préjudices indemnisables et leur évaluation. Néanmoins, tel n’est pas l’intérêt majeur de l’arrêt : loin de reprocher au chirurgien-dentiste une faute technique (un geste mal exécuté par exemple), les juges le condamnent pour « négligences », celles de n’avoir pas

confié sa patiente à un spécialiste et de n’avoir pas « demandé d’examen complémentaire ». Avant d’aborder successivement ces deux points, rappelons les circonstances, dramatiques, de l’arrêt.

Les faits Il ressort de la décision la nécessité de remplacer un bridge fracturé. L’arrêt livre peu de données expliquant la démarche médicale du chirurgien-dentiste. On apprend seulement que le Mai 2006

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praticien procède à la « dévitalisation d’une dent puis rescelle l’élément métallique prothétique avec du ciment provisoire ». Les juges apportent peu de précisions sur ce point car l’important semble ailleurs. En effet, la patiente avale la dent scellée; elle se plaint alors à son praticien de vives douleurs abdominales. Selon les magistrats, le chirurgien-dentiste conseille seulement à sa patiente de « boire beaucoup d’eau et de manger du pain». Remède incontestablement insuffisant puisque, postérieurement, une échographie abdominale révèle la présence d’une masse de cinq centimètres d’origine digestive située dans la fosse iliaque droite. Une deuxième échographie montre un épaississement inflammatoire de la paroi cæcale. Un chirurgien procède alors à « l’exérèse d’un syndrome tumoral de la fosse iliaque droite » et réalise « une colectomie droite et une anastomose iléo-transversale». L’état sanitaire de la patiente imposa ensuite « une plastie abdominale avec pose d’une plaque de Goretex en raison de l’éventration médiane sousombilicale ».

Les préjudices indemnisés Les juges parisiens condamnent le praticien à indemniser la patiente. Ils déclinent les préjudices subis de la manière suivante : • Concernant le préjudice corporel (c’est-à-dire l’atteinte à l’intégrité physique de la personne) de cette patiente âgée de 50 ans, le taux d’IPP (incapacité permanente partielle) est fixé à 7 % en raison d’une paroi abdominale fragile et d’une « gêne douloureuse à la mobilisation ». La somme allouée par le juge est égale à 10 500 euros ; • Le pretium doloris (le prix de la douleur) est mesuré à 4 sur 7 et le préjudice esthétique à 2 sur 7. Rappelons que le droit de la responsabilité repose sur le principe de la réparation de tous les préjudices subis par 28 la Lettre no 47 Mai 2006

le patient. Comment, pratiquement, indemniser tous les préjudices ? Il existe des barèmes pour ces préjudices, barème qui prévoit un chiffrage de 1 à 7. Les juges demandent aux experts de les guider dans la détermination de ce chiffrage. En l’espèce, le juge alloue à la patiente la somme de 3 000 euros de dommages-intérêts. Il existe, avouons-le, une par t d’approximation. • Le préjudice d’agrément s’élève à 2 000 euros. • Le préjudice personnel de la patiente est évalué à 13 000 euros (sans plus de précision). • Le préjudice par ricochet, c’est-àdire le préjudice subi par l’époux de la patiente, qui prend la nature de préjudices à la fois moral et sexuel, est fixé à 10 000 euros. • En raison d’une ITT (incapacité temporaire totale) de trois mois, le juge lui accorde 1 500 euros. Il faut ajouter les frais médicaux remboursés par l’assurance maladie à la patiente. La sécurité sociale récupère auprès du praticien fautif les sommes remboursées à la victime (en l’espèce 27 961 euros). Au total, le praticien est donc condamné à verser plus de 60000 euros! On s’aperçoit immédiatement de l’utilité d’être garanti par un assureur RCP (2). En effet, c’est l’assureur qui payera. A défaut d’assureur, situation que l’on ne devrait plus rencontrer en pratique depuis que la loi du 4 mars 2002 oblige tous les professionnels à s’assurer, ce sera au chirurgiendentiste d’en assumer le coût !

La « faute » commise par le praticien Il est impor tant de relever que les juges ne reprochent aucune faute technique au chirurgien-dentiste. Ni le diagnostic, ni le traitement dentaire réalisé ne sont remis en cause. Quelle faute a donc commis ce chirurgien-dentiste ? Des « négligences », répondent les juges. Lesquelles ? Il

aurait dû inciter la patiente à recourir à l’avis d’un spécialiste, enseigne l’arrêt. Il aurait dû « agir » pour que des examens complémentaires soient pratiqués. Laissons le soin aux lecteurs d’apprécier ce point. Cela étant, deux questions méritent d’être soulevées. D’abord, le dommage dont se plaint la patiente est-il bien dû à la « dent avalée » ? Autrement dit, la dent avalée est-elle la cause du « drame » ? Oui, répondent les juges. Ils s’appuient pour l’affirmer sur le rapport de l’expert. Et ajoutent que, de la «chronologie des faits» et du rapport d’expert, il ressort «des présomptions suffisamment graves, précises et concordantes pour admettre que l’abcès et l’éventration sont dus à l’ingestion de la dent ». Dans le jargon juridique, le juge applique le mécanisme de la « preuve par présomptions ». Aussi le juge se contente-t-il d’une vraisemblance à défaut de certitude. Ensuite, les « négligences » apparaissent-elles vraiment comme la cause du dommage ? En effet, rien ne permet d’affirmer que la patiente n’aurait pas subi de préjudices si le praticien l’avait confiée à un spécialiste. Or, s’il n’existe pas un lien de causalité entre le dommage et la faute, la victime ne saurait obtenir une indemnisation. La cour d’appel considère que la négligence du chirurgien-dentiste provoque une per te de chance pour la patiente d’avoir été traitée à temps. La perte de chance est évaluée à 70 %. En d’autres termes, il y avait, selon les juges, 7 chances sur 10 pour que la patiente n’ait à déplorer aucun préjudice en l’absence de «négligences» du praticien… David Jacotot (1) Cour d’appel de Paris, chambre 1, section B, 10 mars 2006, Juris-data n° 2006-295552. (2) Mais également de bien décrypter son contrat d’assurance afin d’être certain que l’assureur prenne la totalité des frais en charge.


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Réforme des Ordres

Les élections des chambres administratives fixées au 20 juillet Le scrutin des chambres disciplinaires régionales de première instance ne sera organisé au mieux qu’en octobre 2006.

La première élection des conseils régionaux et interrégionaux de l’Ordre des chirurgiens-dentistes se tiendra le 20 juillet 2006, au siège du Conseil national. A la date de proclamation des résultats de ces élections, les conseils régionaux et interrégionaux «nouvelle formule » seront officiellement créés. L’ordonnance du 26 août a institué l’obligation pour les autorités ordinales de se doter d’une structure à l’échelon régional, dotée de compétences administratives, d’une part, et d’un rôle juridictionnel, d’autre part. Un décret paru le 7 mars dernier a défini les modalités d’organisation de ces élections, précisant que les conseils régionaux devront être opérationnels

six mois après la parution du texte, soit le 8 septembre. La date des élections des conseils régionaux a donc été fixée au 20 juillet 2006. Les élections des chambres disciplinaires régionales de première instance seront, quant à elles, organisées au mois d’octobre 2006, sous réserve de la parution du décret relatif au fonctionnement et à la procédure disciplinaire.

Nouveau recours hiérarchique Les membres des chambres disciplinaires de première instance seront issus pour partie des membres des conseils régionaux nouvellement élus, et des membres et anciens membres des Conseils de l’Ordre pour le reste.

Il est à souligner que ces nouveaux conseils régionaux (ou interrégionaux) constitueront désormais le recours hiérarchique en matière d’inscription des professionnels et se prononceront sur les suspensions d’exercice des praticiens en cas d’infirmité ou d’état pathologique rendant la pratique de l’art dentaire dangereuse. Afin de comprendre le déroulement de ces élections, qui constitue à présent la règle en la matière, le Conseil national propose pp. 30-31 deux schémas. Le premier décrypte l’organisation des élections des conseils régionaux, le second, celle des élections des chambres disciplinaires de première instance.

Trois questions à Armand Volpelière, conseiller national Où en est-on de l’élection des nouveaux conseils régionaux ? Un décret est paru en mars dernier. Il fixe le mode d’élection des conseillers régionaux, qui n’a rien de révolutionnaire puisque ce sont toujours les conseillers départementaux qui éliront leurs représentants au conseil régional. Le décret précise également que la répartition des conseillers régionaux se fera en fonction de la population dentaire par département. Ce qui, là encore, était plus ou moins le cas. Et pour les chambres disciplinaires

de première instance ? Les électeurs des chambres disciplinaires sont les membres des conseils régionaux. Il faut donc attendre que ceux-ci soient élus pour procéder aux élections des membres des chambres disciplinaires. Par ailleurs, la loi du 4 mars 2002 prévoyait un décret d’application. Mais celui qui est paru en mars dernier ne précise pas le fonctionnement ni la procédure des chambres disciplinaires. Il faudra donc également attendre la parution d’un second décret. Les nouveaux conseils régionaux ne seront donc pas opérationnels

à l’annonce du résultat des élections ? Non. Tant que les chambres disciplinaires ne sont pas élues, il paraît difficile d’enlever aux anciens conseils régionaux – qui continueront de fonctionner – leur mission administrative. Nous entrons donc dans une phase de transition. On espère que le décret qui permettra de procéder à l’élection des membres des chambres disciplinaires paraîtra cet été de manière à organiser leurs élections dans le courant du second semestre 2006. Dans ce cas, on peut envisager qu’au 1er janvier 2007, l’ensemble du dispositif soit opérationnel.

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juridique Elections des conseils régionaux et interrégionaux ANNONCE DES ELECTIONS

2 mois au moins avant la date prévue pour l’élection. Date et nombre de sièges à pourvoir annoncés par le CR ou le CIR dans : – un journal professionnel à diffusion nationale ; – un journal à diffusion régionale (1).

DECLARATION DE CANDIDATURE

Après cette annonce et 30 jours au moins avant le jour de l’élection. Candidature expédiée par lettre recommandée avec accusé de réception au président du CR ou du CIR. – La liste des candidats est paraphée par le président (1).

ENVOI DU ➜ MATERIEL DE VOTE

15 jours au moins avant la date de l’élection. Matériel expédié par le président du CR ou du CIR (1).

VOTES PAR CORRESPONDANCE

Après l’envoi du matériel de vote et jusqu’à la clôture du scrutin. Adressés ou déposés obligatoirement au siège du CR ou du CIR (1). – Conservés dans une boîte, scellée en présence du bureau du conseil. – Enregistrement des nom, prénoms ainsi que de l’adresse du votant par correspondance et par ordre d’arrivée.

(1) Par le Conseil national de l’Ordre pour les premières élections. (2) L’effectif ne peut excéder les 2/5 du nombre total de ces membres lorsque ce nombre est supérieur à 8 avec au minimum un vice-président et un trésorier.

DEPOUILLEMENT

Jour de l’élection. – Doit avoir lieu sans désemparer en séance publique. – Constitution des bureaux de dépouillement (3 membres désignés par le bureau de l’assemblée). – Les assesseurs comptent le nombre de voix. – Le bureau statue sur la validité des bulletins. – Rédaction du procès-verbal de l’élection. – Signature du PV. – Proclamation des résultats dès l’établissement du PV.

Elections des chambres disciplinaires de première instance COMPOSITION

Membres titulaires et membres suppléants élus par le conseil régional ou interrégional parmi ses membres (membres du CR). Membres titulaires et membres suppléants élus par le conseil régional ou interrégional parmi les membres et anciens membres titulaires et suppléants des conseils de l’ordre (membres des conseils de l’Ordre).

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➜ ANNONCE DES ELECTIONS EN MEME TEMPS QUE LES ELECTIONS DES CR ET CIR

DECLARATION DE CANDIDATURE

Soit 2 mois au moins avant la date prévue pour l’élection des membres des conseils de l’Ordre (1). Date de l’élection et nombre de sièges à pourvoir annoncés par les soins du CR ou du CIR par voie de presse dans : – au moins un journal professionnel à diffusion nationale ; – un journal à diffusion régionale.

Après l’envoi des convocations et 30 jours au moins avant le jour de l’élection des membres des conseils de l’Ordre. – Envoyée par LRAR au siège du CR ou du CIR ou faite au siège du CR ou du CIR (récépissé). – Le dernier jour de réception des candidatures, l’heure de fermeture des bureaux est fixée à 18 heures.


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ENVOI DU PV ET PUBLICATION DES RESULTATS

– Copie du PV est adressée aux conseils départementaux intéressés, aux préfets du ressort du conseil régional ou interrégional, au préfet de région, au Conseil national et au ministre chargé de la Santé. – Publication des résultats des élections sans délai par les soins du préfet de la région concernée ou de la région dans laquelle est situé le siège du conseil interrégional.

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ELECTION DU PRESIDENT

A la première réunion qui suit le renouvellement par tiers. – Réunion du CR ou du CIR en séance plénière. – Election du président parmi les membres titulaires (nécessité d’un quorum, pas de vote par procuration), à bulletin secret, au scrutin uninominal majoritaire à 2 tours. – Au premier tour : la majorité absolue des suffrages exprimés est requise. – Au second tour : l’élection a lieu à la majorité relative.

A la première réunion qui suit chaque renouvellement des membres du CR et des membres des conseils de l’Ordre. – Le CR ou le CIR procède en même temps à l’élection de l’ensemble des membres titulaires et suppléants de la chambre disciplinaire de première instance. – Vote à bulletin secret, au siège du CR ou du CIR. Dépouillement public. – Election acquise à la majorité simple des membres présents ayant voix délibérative.

ELECTIONS DU BUREAU ET DES MEMBRES QUI CONSTITUENT LA FORMATION RESTREINTE

A la première réunion qui suit le renouvellement par tiers. Le CR ou le CRI en séance plénière procède parmi les membres titulaires à l’élection du bureau (2). Pour chacune de ces fonctions : élection à bulletin secret, au scrutin uninominal majoritaire à deux tours. Conditions de majorité : – Majorité absolue requise au premier tour. – Au second tour, l’élection a lieu à la majorité relative.

DELAI DE RECOURS CONTRE LES ELECTIONS Ce délai, de 15 jours, court : – pour les praticiens, à compter du jour de l’élection ; – pour les préfets et le ministre chargé de la Santé, à compter du jour de réception de la notification du PV de l’élection.

Elections des membres qui constituent la formation restreinte : – Ne peut valablement siéger qu’en présence d’au moins 3 membres pour les conseils dont le nombre de membres est inférieur ou égal à 6, et d’au moins 5 membres pour les conseils dont le nombre de membres est supérieur à 6. – Intervient pour la suspension temporaire du droit d’exercer en cas d’infirmité du professionnel ou d’état pathologique rendant dangereux l’exercice de sa profession.

ETABLISSEMENT DU PV, ENVOI DU PV ET PUBLICATION DES RESULTATS

Sans délai après l’élection. – Rédaction du procès-verbal de l’élection. Signature du PV. Proclamation des résultats dès l’établissement du PV ; – Copie du PV est adressée aux conseils départementaux intéressés, aux préfets du ressort du conseil régional ou interrégional, au préfet de région, au Conseil national et au ministre chargé de la Santé ; – Publication sans délai du résultat par les soins du préfet de région.

DELAI DE RECOURS CONTRE LES ELECTIONS Ce délai, de 15 jours, court : – pour les praticiens, à compter du jour de l’élection ; – pour les préfets et le ministre chargé de la Santé, à compter du jour de réception de la notification du PV de l’élection.

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point de vue

La recherche en odontologie : combien de divisions? En France, quels sont les points forts et les fragilités de la recherche? La réponse de deux chercheurs et les défis auxquels la recherche devra répondre pour consolider sa place.

Comme tout domaine biomédical, l’odon-

■ Henry Magloire, PU-PH odontologie, Lyon ■ Ariane Berdal, PU-PH odontologie, Paris 7

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tologie se trouve confrontée à une accélération du progrès scientifique. Nos chercheurs sont-ils prêts ? Quelles sont les forces en présence ? Quels sont nos points forts, nos fragilités ? Ces interrogations ont conduit à l’organisation des premières Journées françaises de la recherche en odontologie, à Toulouse, en octobre 2005, sous l’impulsion du ministère de la Santé. Le bilan de notre recherche est paradoxal. D’un côté, on déplore que toutes les UFR ne soient pas dotées de structures. Mais de l’autre, la recherche en odontologie n’a jamais occupé la place qui est aujourd’hui la sienne à l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale). Notre discipline est présente dans trois champs thématiques : biologie cellulaire (CSS6), sciences de l’ingénieur (CSS7) et neurosciences (CSS8). Cette situation reflète une dynamique et un niveau d’excellence. L’odontologie française publie dans les meilleures revues de spécialité (J Dent Res, J Bone Min Res, Bone, J Biomed Mater Res, Biomaterials, etc.) et accède de surcroît à des revues de niveau plus général, scientifique ou médical (Lancet, J Biol Chem, PNAS, Am J Pathol, FASEB, Brain, etc.). Toutefois, ce bilan ne doit pas masquer les efforts qu’il reste aujourd’hui à accomplir. L’objectif, en France, consiste à regrouper les chercheurs en pôles visibles. Pour l’atteindre, il leur faudra faire montre d’une capacité à s’adapter et à s’adosser à ces macrostructures scien-

tifiques fortes. Cela nécessitera également que les recherches spécialisées ne soient plus considérées comme un impératif en soi. Sans cette révolution copernicienne, les efforts accomplis jusqu’ici pourraient s’avérer inutiles. En attendant, quel est le panorama de la recherche aujourd’hui, en 2006, en France ? La physiopathologie oro-faciale constitue l’un des thèmes originaux de notre recherche. L’équipe INSERM E216 traite de la physiologie de la douleur et dirige un réseau pluridisciplinaire au niveau national. Le groupe ESPRI INSERM EA1892 montre une maîtrise unique du transcriptome de l’odontoblaste dans une dimension physiologique. La physiologie, avec notamment des modèles originaux de maladies parodontales, est représentée par l’équipe d’accueil EA2496 de l’université Paris 5. L’unité INSERM U714 traite de la biologie moléculaire dento-maxillo-faciale. Le groupe d’excellence en biologie du développement dentaire (équipe 3 INSERM U595) a récemment reconstitué des dents à partir de cellules épithéliales et mésenchymateuses isolées, ouvrant le chemin de l’ingénierie tissulaire dans notre discipline. Deuxième thème, l’interface « Sciences de l’ingénieur – Thérapeutique» est la plus importante en nombre de chercheurs : une réalité qui reflète la préoccupation majeure de l’odontologie pour la réhabilitation orale. Ce thème est représenté par les deux unités INSERM fondatrices et d’autres, plus récentes et de taille variable. Dans les équipes 1 et 2 de l’unité


INSERM U595, une compétence généraliste en physico-chimie a permis la mise en œuvre de systèmes innovants et originaux de multicouches polyélectrolytiques. A Nantes, le champ de conception et d’application des phosphates de calcium est décliné selon une approche pluridisciplinaire et transversale par ticulièrement riche. A Reims, l’unité ERM203 a su fédérer des acteurs d’horizons différents – odontologistes, médecins, scientifiques – pour la compréhension détaillée du compor tement cellulaire en présence de biomatériaux. L’UMR CNRS 6511 de Rennes développe une thématique sur l’évaluation de substituts osseux. L’équipe EA637 de Lyon analyse les réponses cellulaires sur le titane et les alliages. Une association entre un partenaire industriel et la recherche académique guide la démarche menée sur la régénération pulpaire dans l’ERT30. Dernière-née de l’odontologie, la recherche clinique constitue le troisième thème dans notre pays. Elle mériterait toutefois un développement plus important. Elle accompagne la recherche expérimentale avec un degré variable de professionnalisation et d’intégration dans les dimensions économique et sociétale. Des équipes technologiques incluses dans les deux unités INSERM fondatrices illustrent une interface réfléchie entre industrie et recherche institutionnelle. Concernant la dimension même des pathologies, le paysage de la recherche clinique apparaît plus fragmentaire. Toutes les facultés montrent un dynamisme for t. Selon le récent recensement des programmes de recherche, notamment clinique, du livre blanc de la recherche – rédigé par le professeur Youssef Haïkel –, il existe aujourd’hui une cinquantaine de projets hospitaliers, de dimension régionale pour une majorité. Dans ce domaine particulier, l’équipe EA3847 est exemplaire. Elle développe une recherche transversale sur les patients à haut risque de pathologie bucco-dentaire. Des réseaux natio-

naux sont en place avec le soutien de l’INSERM et des structures hospitalières, axés sur des sujets à l’inter face entre médecine et odontologie (antibioprophylaxie, paramètres sociaux, accouchement prématuré, sédation, dysmorphologie, etc.). Les premières journées de la recherche en odontologie auront constitué un événement déterminant au cours duquel les chercheurs ont pu tisser des liens, non seulement scientifiques, mais également amicaux. Certaines convergences sont apparues, qui témoignent d’un vrai potentiel de réseaux thématiques. Mieux encore, des possibilités concrètes de développement thématique peuvent s’envisager aujourd’hui avec un certain optimisme (santé publique, immuno-infectiologie, etc.). L’un des enjeux de nos prochaines assises consistera dans notre capacité de rebond face à nos tutelles académiques et de recherche. Savoir s’intégrer à l’excellence, accéder à une visibilité, conduire des choix stratégiques pertinents avec des objectifs accessibles et innovants, concevoir des carrières compatibles avec ces exigen-

Le bilan actuel ne doit pas masquer les efforts qu’il reste aujourd’hui à accomplir. L’objectif, en France, consiste à regrouper les chercheurs en pôles visibles. ces, s’ouvrir aux collaborateurs naturels (agences, chercheurs institutionnels, industrie, instances de santé publique, Europe), tels sont les autres enjeux auxquels la recherche en odontologie devra répondre. L’habilité chirurgicale, l’imagination esthétique et la rigueur ne sontils pas l’apanage des odontologistes ? Alors, donnons le pouvoir à l’imagination de nos jeunes talents… La deuxième édition des assises de la recherche en odontologie se tiendra les 20 et 21 octobre 2006 au centre biomédical des Cordeliers, à Paris. Espérons que ce couvent constituera le lieu propice à un séminaire studieux, amical et structurant. Les passionnés de la recherche y sont cordialement invités. ■ Mai 2006

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Lettre 33


europe

Bonnes nouvelles sur le fro Reconnaissance des qualifications, directive Bolkestein, entrée de la Grande-Bretagne dans la Conférence des Ordres : même si l’heure reste à la vigilance et à la consolidation de nos liens en Europe, des dossiers importants connaissent une issue favorable.

C’est une victoire pour le Conseil national et les autres organisations professionnelles. Au terme d’un long processus, la directive relative à la reconnaissance des qualifications maintient finalement le système qui prévalait jusqu’à aujourd’hui pour les chirurgiens-dentistes, et qui s’en satisfaisaient pleinement. On pouvait craindre que ce régime dit « sectoriel », basé sur une exigence de formation minimale, ne soit abandonné. Ce ne sera pas le cas. L’art dentaire est reconnu au niveau européen comme une profession à part entière. Tout chirurgien-dentiste européen exerçant dans un autre Etat que le sien sera soumis aux règles professionnelles du pays d’accueil. Après l’exclusion de la santé de la directive dite « Bolkestein » sur le marché intérieur des services, ce maintien de l’actuel système de reconnaissance constitue 34 la Lettre no 47 Mai 2006

un véritable motif de satisfaction. Preuve que la voix de l’Ordre porte jusqu’à Bruxelles et que les dossiers peuvent y être défendus efficacement. Mais il faut croire qu’une bonne nouvelle n’arrive jamais seule, même en matière européenne ! Le Conseil national, à l’origine de la création de la CODE (autrement dit la Conférence des Ordres et organismes assimilés de l’art dentaire), se félicite sincèrement de l’entrée officielle de la Grande-Bretagne dans cette structure.


nt de l’Europe !

L’ORDRE OUVRE UNE REPRÉSENTATION À BRUXELLES Désireux d’établir une présence permanente auprès des instances européennes, le Conseil national sera représenté à Bruxelles par Julie-Jeanne Régnault, chargée de mission pour les affaires européennes et internationales. Elle aura pour fonction de suivre en temps réel l’évolution des textes et de défendre les dossiers de notre profession.

Un rapprochement auquel aura contribué Henri Michelet lorsqu’il présidait la commission Europe du Conseil national. Le General Dental Council (structure de régulation en charge, entre autres, de l’inscription des chirurgiensdentistes outre-Manche) vient en effet de signer les statuts de la CODE. Jusqu’à présent, la CODE penchait géographiquement du côté des pays latins (Espagne, Italie, Portugal et France). Avec l’entrée

de la Grande-Bretagne, un rééquilibrage s’opère avec une vraie perspective vers le nord et l’est de notre continent. L’enjeu est important : il s’agit de peser ensemble et de parler d’une seule voix à Bruxelles. Il faudra avancer sur la question brûlante du contrôle du suivi des sanctions disciplinaires, autour de laquelle les Ordres et les organismes assimilés se mobilisent. Des pistes ont été explorées dans le cadre de l’accord d’Edimbourg

sur la mobilité des professionnels de santé. Un enjeu d’autant plus important que 2006 est l’année européenne de la mobilité des professionnels. C’est dans ce contexte que la Commission européenne a placé en tête de son agenda politique la question de la mobilité des patients et des professionnels ainsi que le remboursement des soins transfrontaliers. « A Bruxelles plus qu’ailleurs, l’unité doit prévaloir. L’action de chaque Ordre ne peut s’envisager indépendamment de celles engagées par les autres professions de santé françaises d’une part, et de celles menées par les homologues des pays européens d’autre part » déclarait le président du Conseil national, Pierre-Yves Mahé, à l’occasion de la conférence inaugurale du Medec. La défense d’un niveau élevé de santé publique et de sécurité des patients, qui reste un objectif prioritaire, est à ce prix. Gilbert Bouteille Président de la commission Europe Mai 2006

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europe Bruxelles

Mobilité, soins transfrontaliers, blanchiment : un agenda roboratif Dans un contexte orienté autour de la « mobilité », la Commission européenne prépare une série de textes qui concerneront directement l’art dentaire.

L’Europe de la santé est en marche. Qualifications professionnelles, blanchiment, mobilité des professionnels… en 2006, l’agenda communautaire est particulièrement chargé. Beaucoup de dossiers vont toucher de près ou de loin l’art dentaire. Si la Commission européenne a accepté d’exclure la santé du champ d’application de la directive Services, elle a confirmé qu’elle souhaitait se pencher sur la question de la mobilité des patients et du remboursement des soins transfrontaliers. Le contenu de ce texte à venir reste encore largement à déterminer. Une consultation publique devrait être lancée après la pause estivale afin de recueillir l’avis des parties intéressées. Il s’agit là, n’en doutons pas, de l’ouverture d’un long processus. Le Conseil national suivra évidemment de près ce nouveau dossier européen, et des contacts seront pris avec les ser vices de la Direction générale SANCO afin de faire entendre la voix des praticiens le plus en amont possible.

L’échange d’information La transposition et la mise en œuvre de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles, adoptée en septembre 2005, constituent un autre enjeu de taille pour les chirurgiens-dentistes. Rappelons que ce texte vise à consolider en un seul acte législatif 15 directives, parmi lesquelles 12 sectorielles, dont celle qui s’applique à la profession den36 la Lettre no 47 Mai 2006

taire. Il définit les mécanismes de reconnaissance des diplômes d’un Etat membre par un autre. La transposition de ce texte devra s’accompagner de la mise en place d’outils de communication entre les différentes autorités compétentes. A cet effet, la Commission européenne travaille à la mise en place d’un système informatique visant à facili-

ter l’échange et la traduction d’informations relatives aux professionnels migrants entre les autorités compétentes sur le plan européen (lire article p.38). La Commission européenne s’intéresse également à la question des produits de blanchiment. Elle devrait publier prochainement un nouveau texte (modifiant la directive 76/768/CEE sur les cosmétiques) afin d’autoriser à la vente libre les produits de blanchiment contenant jusqu’à 6 % de peroxyde d’oxygène. Outre le suivi étroit des évolutions réglementaires et les rencontres régulières avec les décideurs européens, le Conseil national pourra s’appuyer à l’avenir sur une Conférence des Ordres et organismes assimilés (CODE) désormais renforcée par l’arrivée récente de la Grande-Bretagne pour porter les intérêts de la profession. Julie-Jeanne Régnault

BOLKESTEIN, SUITE ET FIN La Commission européenne a tenu ses promesses. Elle suivra donc le Parlement européen qui, le 16 février dernier, avait demandé l’exclusion de la santé du champ d’application de la proposition de directive sur les services, plus connue sous le nom de directive « Bolkestein ». Le commissaire McCreevy en a donné une confirmation officielle le 4 avril dernier. La deuxième mouture de la proposition de directive sur les services prévoit notamment que « l’exclusion des soins de santé couvre les services de soins de santé et pharmaceutiques fournis par des professionnels de la santé aux patients pour évaluer, maintenir ou rétablir leur état de santé lorsque ces activités sont réservées à une profession de santé réglementée dans l’Etat membre dans lequel les services sont fournis ».


Reconnaissance des diplômes

Qualifications : Bruxelles réaffirme la spécificité de l’art dentaire Outre le maintien du principe actuel de reconnaissance des qualifications pour notre profession, le rôle de contrôle des Ordres est clairement établi par la Commission européenne.

L’Ordre n’a jamais varié sa position en faveur du maintien des directives «sectorielles» de reconnaissance des qualifications. C’est donc avec satisfaction qu’il a accueilli la directive « relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles» adoptée en septembre dernier. Celle-ci maintient en effet le principe de reconnaissance automatique des titres de formation, sur la base d’une coordination des conditions minimales de formation pour les professions spécifiques de médecin, infirmier, vétérinaire, pharmacien, architecte et la nôtre.

Les procédures d’inscription et d’installation conservées Cette directive n’entraînera donc pas d’incidence notable par rapport aux procédures établies par l’Ordre des chirurgiens-dentistes pour ce qui a trait à l’inscription et à l’installation, notamment en ce qui concerne les documents, procédures de reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles, ports du titre professionnel et du titre de formation. En revanche, le texte va dans le sens de la mobilité des professionnels de santé et de la garantie du respect strict tant de la santé que de la sécurité publiques et de la protection des consommateurs. Soulignons que l’abolition des obstacles à la libre circulation des personnes et des ser vices entre les Etats membres a toujours constitué l’un des objectifs majeurs de l’Union. De-

puis les années 1970, des mécanismes de reconnaissance des qualifications professionnelles ont été mis en place dans le but de faciliter cette libre circulation des citoyens européens désireux d’exercer leur profession dans un autre Etat membre. Pour cer taines professions spécifiques (notamment la nôtre), la reconnaissance des diplômes était fondée sur l’harmonisation d’exigences minimales de formation (1). Mais la Commission européenne souhaitait une rénovation et une simplification de ces systèmes. L’inquiétude était grande de voir disparaître les avantages du système sectoriel par la fusion avec le régime général s’appliquant à l’art dentaire de la même manière qu’à n’importe quelle autre profession.

Le pays d’accueil fixe les règles En substance, le texte institue que tous les Etats membres devront reconnaître la profession de l’art dentaire en tant que profession spécifique et distincte de celle du médecin, qu’il soit spécialisé ou non en odontostomatologie (2). Elle définit l’art dentaire comme «l’ensemble des activités de prévention, de diagnostic et de traitement concernant les anomalies et maladies des dents, de la bouche, des mâchoires et des tissus attenants ». La directive définit par ailleurs un cadre juridique clair pour les modalités de l’exercice en libre prestation de services.

Elle prévoit que, « s’il se déplace, un prestataire est soumis aux règles de conduite de caractère professionnel, réglementaire ou administratif en rapport direct avec les qualifications professionnelles telles que la définition de la profession, l’usage des titres et les fautes professionnelles graves qui ont un lien direct et spécifique avec la protection et la sécurité des consommateurs, ainsi qu’aux dispositions disciplinaires applicables dans l’Etat membre d’accueil aux professionnels qui y exercent la même profession » (article 5, 3e alinéa).

Etablissement définitif ou prestation temporaire? Le texte établit toutefois une distinction entre l’établissement à caractère pérenne et la prestation de services transfrontalière temporaire et occasionnelle. Cette dernière sera appréciée « au cas par cas, notamment en fonction de la durée de la prestation, de sa fréquence, de sa périodicité et de sa continuité » (titre II). Le professionnel migrant devra soumettre son déplacement à une déclaration préalable : « Les Etats membres peuvent exiger que, lorsque le prestataire se déplace d’un Etat membre à l’autre pour la première fois pour fournir des services, il en informe préalablement l’autorité compétente de l’Etat membre d’accueil par une déclaration écrite comprenant les informations relatives aux couvertures d’assurance ou autres moyens de protection personnelle ou collecMai 2006

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europe

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tive concernant la responsabilité professionnelle » (article 7). Les Etats membres pourront exiger que cette déclaration soit accompagnée, lors de la première prestation, d’une « preuve de la nationalité du prestataire de services», d’une attestation que ce dernier est «légalement établi dans un Etat membre » et qu’il n’est pas soumis à une « interdiction même temporaire d’exercer » ainsi que d’une preuve de ses qualifications professionnelles.

Confidentialité des échanges Par ailleurs et c’est un autre motif de satisfaction pour l’Ordre, la directive insiste sur le rôle de veille des autorités compétentes et leur nécessité de coopération et d’assistance mu-

tuelle : « Les autorités compétentes de l’Etat membre d’accueil peuvent demander aux autorités compétentes de l’Etat membre d’établissement, pour chaque prestation de services, toute information pertinente concernant la légalité de l’établissement et la bonne conduite du prestataire ainsi que l’absence de sanction disciplinaire ou pénale à caractère professionnel » (article 8). Lors de l’échange des informations, leur confidentialité devra être assurée : « Les autorités compétentes de l’Etat membre d’accueil et de l’Etat membre d’origine échangent des informations sur les sanctions disciplinaires ou pénales qui ont été prises ou sur des faits graves et précis susceptibles d’avoir des conséquen-

ces sur l’exercice des activités au titre de la présente directive, dans le respect de la législation sur la protection des données à caractère personnel… » (article 53-2). Les autorités compétentes sont déjà à pied d’œuvre pour développer des outils d’échange d’informations rapides et fiables.

(1) Directive sectorielles pour la reconnaissance mutuelle des diplômes des praticiens de l’art dentaire et directives du système général 78/686/687 CEE, 89/48 et suivantes. (2) Considérant 22.

Diplômes et suivi des sanctions

À Edimbourg, s’invente le contrôle de la mobilité professionnelle La Commission européenne et les structures représentatives de la santé travaillent de concert à un meilleur contrôle des professionnels migrants.

Pour une profession réglementée comme la nôtre, le contrôle du niveau de qualification d’un chirurgien-dentiste migrant d’un pays à un autre n’est pas qu’une simple formalité administrative. C’est un enjeu de santé publique. Faute d’un contrôle intransigeant de la capacité professionnelle du migrant, le pire serait à craindre… Deux dispositifs d’échange d’informations entre autorités compétentes (dont les Ordres) sont en phase de développement. Ils s’inscrivent dans le cadre de la directive sur la reconnaissance des qualifications professionnelles. Le premier est un projet 38 la Lettre no 47 Mai 2006

institutionnel porté par la Direction générale du marché intérieur. Il vise la mise en place d’une base de données informatique d’authentification et de vérification des diplômes européens.

Un certificat européen Le second, développé à l’initiative des professions de santé, porte sur l’échange d’informations concernant les sanctions disciplinaires des praticiens migrants. Il est matérialisé par un « cer tificat de statut du professionnel de santé ». Car établir des normes quant au niveau de formation d’un praticien migrant est une chose, mais pouvoir

vérifier qu’il ne fait pas l’objet d’une suspension d’exercice (voire d’une interdiction) dans son pays d’origine en est une autre. Certes, on pourrait objecter que les mécanismes de reconnaissance des qualifications ont été mis en œuvre depuis longtemps sans l’aide d’un quelconque système d’information. Cependant, le contexte a changé au point que la question d’un « contact unique » entre les autorités compétentes (comme les Ordres ou les organismes assimilés chargés entre autres de l’enregistrement des professionnels) est devenue d’une impor tance cruciale. Les autorités


compétentes font ainsi actuellement face au défi de respecter les délais stricts d’autorisation d’exercice des praticiens migrants imposés par la directive (un à deux mois) et de traiter des questions techniques dans 20 langues différentes. Elles rencontrent également des difficultés à identifier leurs homologues dans les Etats membres concernés. La migration de professionnels a par ailleurs augmenté depuis l’entrée des dix nouveaux Etats membres dans la Communauté. Dans une Union à 25, le besoin d’échanges entre les Etats membres s’est accru considérablement. Ce qui semble justifier pleinement la mise en place de dispositifs de surveillance et de vérification des informations professionnelles. Réunies en octobre dernier à Edimbourg, 137 autorités compétentes ont donc établi une série de recommandations relatives à la mobilité des professionnels. Elles ont notamment travaillé à la création d’un « certificat européen de statut professionnel ». L’idée est de faciliter le déplacement des professionnels de santé d’une par t, mais sur tout de garantir aux patients une bonne qualité des soins d’autre part.

Trois mois seulement de validité Défini comme un standard d’échange des informations entre les autorités compétentes, ce certificat constitue un modèle de formulaire électronique pour l’enregistrement d’un professionnel de santé migrant. Il permettra au pays d’accueil d’obtenir des informations relatives à la régularité du professionnel désireux de s’y installer avec la législation de son pays d’origine. Le certificat contiendra une date et une signature originale (ou électronique) afin de déjouer les reproductions frauduleuses. Il ne sera valable que pour une durée de trois mois. Il s’inscrit dans la perspective d’un

VERS UNE CARTE EUROPÉENNE DE PROFESSIONNEL DE SANTÉ La directive relative aux qualifications professionnelles évoque la création, au niveau européen, de cartes professionnelles afin de faciliter la mobilité des professionnels et de permettre l’échange d’informations. La carte professionnelle européenne aurait vocation de passeport pour le professionnel de santé. Elle pourrait être issue de la fusion de la carte professionnelle de santé (CPS) avec la carte ordinale, à condition toutefois que les données relatives à l’assurance maladie (DAM) utilisées pour les feuilles de soins électroniques en soient exclues. L’Ordre des chirurgiens-dentistes participera aux travaux préparatoires afin de mettre au point des procédures communes.

échange des informations lorsque le droit d’exercer d’un professionnel de santé est limité en raison d’un acte ou d’une conduite grave, d’un problème criminel ou sanitaire. Ce certificat se révélera également utile lorsque l’autorité compétente aura des raisons objectives de croire qu’une fausse identité ou un document frauduleux ont été utilisés dans le passé ou pourraient être utilisés dans le futur par un individu donné, soit pour éviter les restrictions, soit pour s’enregistrer frauduleusement.

Des formulaires dans toutes les langues Dans le cas d’une restriction d’exercice comprenant des mesures provisoires (comme la suspension), l’autorité compétente du pays d’accueil pourra communiquer les faits reprochés et la nature de la sanction. La prochaine étape consistera à mettre en application ce cer tificat. L’Ordre des médecins de GrandeBretagne installera un groupe de pilotage ad hoc. De son côté, la Direction du marché intérieur soutient le projet d’une plateforme informatique d’échanges

d’informations entre autorités compétentes (intitulé système IMI). Fluide et efficace ce dispositif devrait, là encore, faciliter la libre circulation des professionnels mais également – et c’est là tout son intérêt – favoriser leur sur veillance par les autorités compétentes. Dès lors, il sera plus facile pour l’Etat membre d’accueil de vérifier si le migrant n’a pas été rayé du registre de son Etat membre d’origine ou d’en contacter les autorités en cas de doute sur le diplôme ou l’identité du professionnel. Ce système, qui sera également expérimenté auprès des médecins, devrait être opérationnel avant octobre 2007, date à laquelle la période de transposition de la directive sur les qualifications professionnelles touchera à son terme.

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europe Interview

Pourquoi la Grande-Bretagne rallie les Ordres européens Entretien avec Hew Mathewson, président du General Dental Council, désormais membre de la CODE.

Qu’est-ce qui a motivé l’entrée

tes au niveau européen. Il ne s’agira pas seulement de vérifier les diplômes d’un praticien au moment de son inscription dans un pays d’accueil, mais également d’échanger des informations de manière proactive si celui-ci s’est rendu coupable d’un comportement professionnel répréhensible dans son pays d’origine. C’est la sécurité du patient qui est en jeu tout autant que la confiance accordée à la profession dentaire.

de la Grande-Bretagne dans la CODE, structure réunissant les Ordres dentaires et les organismes assimilés au niveau européen ? Je crois qu’il est extrêmement important pour le General Dental Council, les autorités compétentes dentaires et les Ordres européens de collaborer de manière à promouvoir une pratique dentaire de haut niveau et d’assurer parallèlement aux patients des soins de qualité. A ce titre, nous sommes ravis que l’Ordre français ait pris l’initiative d’installer la CODE, et c’est un honneur pour nous d’avoir été invités à la rejoindre.

Justement, qu’attendez-vous de la collaboration avec les autorités compétentes qui y siègent ? Sur de nombreux points, les responsabilités du General Dental Council s’apparentent à celles de ses homologues européens. Nous pouvons apprendre les uns des autres afin d’améliorer la manière d’appréhender les grandes questions professionnelles. Plus impor tant encore, nous avons la faculté de prendre des décisions pragmatiques pour promouvoir une pratique et un comportement professionnels de haut niveau. La définition d’un éventail de principes déontologiques et éthiques applicables à la chirurgie dentaire à travers toute l’Europe constituerait un pas en avant significatif. 40 la Lettre no 47 Mai 2006

Estimez-vous que la mobilité des professionnels de santé augmentera de manière significative dans les prochaines années ?

Il est également crucial pour nous d’assurer une veille auprès de la Commission européenne sur tous les dossiers qui concernent la profession afin d’être capable, si besoin est, d’y réagir rapidement.

En octobre dernier, vous avez participé à l’adoption de l’accord d’Edimbourg. Que va-t-il changer en termes de mobilité des professionnels de santé ? Cet accord a pour but de faciliter la mobilité des professionnels de santé tout en garantissant aux patients la sécurité des soins. Il prévoit, pour ce faire, un dispositif efficace d’échange d’informations sur la pratique et la compétence des praticiens entre les autorités compéten-

Environ 1,5 % des citoyens européens habitent et travaillent dans un Etat membre autre que leur pays d’origine. Ce chiffre a très peu évolué durant les 30 dernières années. Bien que ce pourcentage soit infime, il représente tout de même un nombre d’individus considérable. Personnellement, je crois qu’il est vraisemblable de penser que la mobilité des professionnels de santé va augmenter, d’autant que la Commission européenne est engagée dans ce sens. Le General Dental Council que je représente est également favorable à la liberté de circulation et d’exercice pour les professionnels de santé, mais celle-ci doit impérativement s’appuyer sur des mesures de protection du patient. Un séminaire sur la mobilité des professionnels de santé sera organisé en ce sens courant mai à Maastricht.


MEDEC

L’irrésistible emprise de Bruxelles sur les politiques de santé Peut-on continuer à parler de politiques nationales de santé ou sommes-nous d’ores et déjà entrés dans l’ère de la santé communautaire ?

Notre politique de santé se décidet-elle à Paris où à Bruxelles ? Cette question aux allures de provocation a fait l’objet de la conférence inaugurale du salon du MEDEC, qui réunissait, le 14 mars dernier, les représentants des Ordres des professions de santé. Car si les ser vices de santé n’échappent pas au phénomène de transposition des directives européennes en droit national, il semble toutefois que la responsabilité des systèmes de santé incombe toujours aux Etats membres. Le « credo » européen «Absente du traité de Rome de 1957, la santé a fait son entrée dans les textes communautaires avec le traité de Maastricht en 1993, pour devenir, peu à peu, une politique à vocation européenne» commente Francis Montané, vice-président de l’Ordre des médecins. Un déplacement du centre de gravité des politiques de santé qui justifie, pour Pierre-Yves Mahé, une implication des Ordres dans les travaux de la Commission européenne : «Depuis plusieurs années, les Ordres ont pris la mesure des enjeux européens. Ils ont affirmé leur présence et renforcé leurs actions auprès de la Commission européenne. Bruxelles est loin de constituer une tour d’ivoire coupée des préoccupations des citoyens. Par une bonne compréhension du fonctionnement du labyrinthe communautaire, il est possible de faire passer nos messages et de relayer nos préoccupations. » Et de citer le

travail efficace réalisé par les Ordres sur la directive dite « Bolkestein », relative à la libre circulation des services, qui a abouti à un amendement excluant les soins de santé du champ d’application de la directive (lire l’encadré p. 36). Pour Francis Montané, le « credo » européen consiste avant tout à soutenir et coordonner l’action des Etats membres en la matière. Il doit ainsi avoir pour objet « l’amélioration des pratiques, de la qualité des soins et de l’évaluation des technologies médicales à travers l’échange des informations ». Selon lui, la dimension désormais communautaire des politiques de santé repose également sur un contenu éminemment concret impulsé par la Communauté européenne : «mobilité des professionnels et des patients,

[…] développement de programmes d’actions contre le cancer, le sida, la toxicomanie, etc. ». La lutte contre les contrefaçons de médicaments, les menaces pandémiques ou encore le bioterrorisme constituent autant de dossiers sur lesquels la collaboration des Etats membres est également essentielle, estime quant à lui le président de l’Ordre des pharmaciens Jean Parrot : «Nous ne pouvons pas agir seuls. Parce que les maladies ne s’arrêtent pas aux frontières de la France, ni d’ailleurs à celles de l’Europe, nous avons besoin de pouvoir échanger des informations, des expériences, de nous entraider… »

Annoncer le cap Pierre-Yves Mahé a confirmé la nécessité d’une voix commune pour les professions de santé et s’est félicité que la profession dentaire puisse appuyer ses travaux sur une «fédération européenne forte » représentée par la Conférence des Ordres et organismes assimilés des praticiens de l’art dentaire (CODE). Un lieu idoine pour annoncer le cap que s’est fixé l’Ordre des chirurgiensdentistes de Paris à Bruxelles, en passant par Strasbourg : « Eviter la marchandisation de la santé et maintenir un haut niveau de formation des praticiens et de l’équipe soignante en vue d’une protection optimale de la santé publique et des patients… En un mot : mettre tout simplement l’Europe au ser vice de la santé de ses citoyens. » Mai 2006

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revue de presse

Le Quotidien du médecin, 29 mars 2006

Le plan Démographie de Xavier Bertrand

Des mesures prêtes à la fin d’avril Rendu public il y a deux mois, le plan Démographie de Xavier Ber trand contient un cer tain nombre de dispositions nécessitant un décret ou un accord pour entrer en vigueur. Selon le ministère de la Santé, la grande majorité des textes sera appliquée d’ici à la fin du mois d’avril. L’annonce du plan Démographie médicale de Xavier Bertrand avait soulevé un certain nombre de réactions plutôt positives chez les médecins qui jugeaient que, d’une façon générale, il allait dans la bonne direction. Mais des mois sont passés et une bonne par tie des mesures du plan n’ont pas encore pu entrer en vigueur, faute d’accords d’application. Inventaire des dispositions en attente. La majoration de 20 % de la valeur des actes des généralistes libéraux exerçant en cabinet de groupe dans des zones définies comme sous-médicalisées par les missions régionales de santé (MRS). La même majoration est promise pour les médecins de ces mêmes zones, qu’ils exercent ou non en groupe, lorsqu’ils utilisent les services d’un remplaçant. Un accord conventionnel est nécessaire à l’entrée en vigueur de cette mesure. A la CSMF (Confédération des syndicats médicaux français), le président Michel Chassang précise qu’une réunion des syndicats signataires de la convention aura lieu sur ce thème mercredi prochain à la CNAM (Caisse nationale d’assurance maladie). Quant à savoir si les caisses accepteront le taux de 20 % pour ces majorations d’honoraires, Michel Chassang s’exclame : « 20 %, c’est vraiment le minimum que les caisses puissent faire.» Le président de la CSMF estime par ailleurs que cet accord conventionnel peut être bouclé en une seule réunion, ce qui signifie que son entrée en vigueur pourrait être rapide. […] L’élargissement au samedi après-midi des horaires rémunérés de la permanence des soins (PDS). Il s’agit là d’une demande récurrente des médecins libéraux qui

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font valoir que le samedi après-midi constitue un des pics d’activité de la PDS, tout au moins en maisons médicales de garde (MMG). Pour autoriser ces nouveaux horaires, il faut que Xavier Bertrand signe un décret. Au ministère de la Santé, un de ses proches collaborateurs précise que le décret ne sera envoyé en Conseil d’Etat qu’après une nouvelle réunion des parties concernées par la PDS, réunion qui devrait se tenir dans les 15 jours. Le Conseil d’Etat aura besoin d’un bon mois pour valider le texte ou non. L’augmentation d’un tiers du plafond cumul emploiretraite (qui passerait ainsi de 30192 euros à 40000 euros). Il s’agit par cette mesure de favoriser le maintien en activité d’un cer tain nombre de médecins libéraux dans les zones sous-médicalisées, le temps que la hausse du numerus clausus produise ses effets sur l’installation des libéraux. Le ministère de la Santé précise que, contrairement aux autres décrets, celui qui autorise l’augmentation d’un tiers du plafond cumul emploi-retraite n’a pas à être envoyé au Conseil d’Etat. Ce décret doit encore « être techniquement bouclé » et pourrait entrer en vigueur dès la fin du mois d’avril. Le congé maternité pour les femmes médecins. Jusqu’à présent, les droits des femmes en la matière étaient inférieurs à ceux de n’importe quelle salariée. Actuellement, une femme médecin enceinte n’a droit qu’à 8 semaines de congé maternité. Le projet de Xavier Bertrand est de porter ce congé à 16 semaines pour les deux premiers enfants, et à 26 pour le troisième. La rédaction du décret modifiant ces durées est quasiment bouclée, indiquet-on au ministère. Mais son achèvement bute sur une disposition relative aux femmes médecins en cours de congé de maternité au moment de la parution du décret. Au ministère, on assure que le décret paraîtra avant la fin du mois d’avril. ■ Henri de Saint Roman


parcours

Alter égaux « Je suis un praticien de base » explique avec le plus grand sérieux Patrick Gaubert, 58 ans, chirurgien-dentiste à Paris… accessoirement président de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA) et député européen. Homme de principes et d’action, Patrick Gaubert, 58 ans, Issu d’une lignée de chirurgiens-dentistes, Patrick préside la LICRA et dispose d’un siège au Parlement Gaubert reprend tout naturellement le cabinet de son européen. C’est à son activité libérale qu’il doit, selon lui, père au milieu des années 1970, tout en exerçant paralson esprit d’indépendance et sa liberté de ton. lèlement en qualité d’attaché des hôpitaux, à l’hôpital Tenon. « A 63 francs la vacation, l’argent n’était vraiment pas ma source de motivation » se souvient-il. La En 1999, Patrick Gaubert est élu à la présidence de rencontre avec un chef de ser vice exceptionnel, un clila LICRA. Depuis, il est systématiquement réélu, mais mat de camaraderie à nul autre pareil, des cas cliniques reste finalement assez peu connu du grand public. uniques : voilà pourquoi Patrick Gaubert exercera pen« L’expression médiatique, ce n’est pas le meilleur outil dant quinze ans, à raison de trois matinées par semaide la lutte contre le racisme et l’antisémitisme » expline, dans cet hôpital du 20e arrondissement de Paris. que-t-il. Et de poursuivre : « Je préfère de loin les renLe parcours de Patrick Gauber t doit beaucoup à la contres déterminantes, efficaces mais discrètes, au magie de rencontres décisives qui balisent un destin. fracas souvent stérile de l’exposition médiatique. » Sollicité par « l’immense Jean Pierre-Bloch », à l’époque Patrick Gaubert n’a aujourd’hui plus aucune fonction président de la LICRA, Patrick Gaubert s’engage contre élective locale car « on y sent trop certaines odeurs d’arle racisme et l’antisémitisme au sein de l’association. rière-cuisine ». En revanche, son travail au Parlement A la même époque, simple conseiller municipal RPR européen le passionne. Il concède d’ailleurs que la préde Courbevoie, fonction qu’il occupera de 1982 à 1986, sidence de la LICRA donne un certain poids au député il est repéré par le « patron » du département, Charles qu’il est : « Mon rapport sur l’immigration a été adopté Pasqua. Homme de fidélité, Patrick Gaubert accompapar une large majorité, de la droite à la gauche, alors gnera le ténor du RPR lors de même que cette question est ses deux passages place Beauminée par les postures idéo« Je préfère de loin les rencontres vau, au ministère de l’Intélogiques. » Surtout, il arpente déterminantes, efficaces mais discrètes, rieur, de 1986 à 1988 puis de le terrain, en Europe comme ailau fracas souvent stérile 1993 à 1995, en tant que charleurs. Ainsi, les centres de réde l’exposition médiatique. » gé de mission dans la lutte tention des immigrés, et plus contre le racisme. largement les questions de Au cœur de ce centre de décisions, il actionne des sécurité, de justice ou encore d’affaires étrangères en leviers, modifie la portée de certains textes, et va parEurope ont peu de secret pour lui. Son credo ? « S’il le fois jusqu’à s’élever publiquement contre certains profaut, je vais sur place, j’observe et j’argumente, je vois jets alors même qu’ils émanent du cabinet dont il est et je parle ; je fais avancer les dossiers. » le représentant ! Patrick Gauber t use d’une indépenC’est un peu grâce à l’Europe qu’il connaîtra l’un de dance et d’une liber té rares dans un monde où les ses « bonheurs professionnels les plus intenses » : en enjeux de carrière pèsent souvent plus que les prin2004, bombardé en tête de la liste UMP d’Ile-de-Francipes. Désigné comme atypique dans le landernau police aux élections européennes, il doit abandonner son tique, Patrick Gaubert n’est pas un homme de sérail : exercice. Nombre de ses patients s’en alarment, mais leur inquiétude est injustifiée : Patrick Gauber t conti« Mon indépendance prend sa source dans mon activinue aujourd’hui à exercer un métier qui lui procure « une té de praticien libéral ; c’est de là que je puise ma force, ma liberté de ton et d’action. » joie sincère »… ainsi que les moyens de sa liberté. Mai 2006

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