Indonésie note pays- Perspectives economiques de l'OCDE, juin 2023

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Indonésie

La croissance du PIB va ralentir pour s’établir à 4.7 % en 2023, avant de remonter à 5.1 % en 2024, une fois que l’impact du resserrement monétaire se sera estompé et que les incertitudes autour des élections de 2024 seront levées. L’économie a bénéficié des prix soutenus des matières premières et elle sera sensible à l’intensification des difficultés à l’échelle mondiale, notamment aux tensions géopolitiques, au ralentissement de la croissance des échanges et à l’instabilité financière. Les hausses modestes des salaires réels et l’atonie du marché du travail freinent la consommation des ménages.

La politique monétaire est plus restrictive depuis la mi-2022, le taux directeur ayant été porté de 3.5 % à 5.75 %. La croissance du crédit a fléchi. La politique budgétaire deviendra moins accommodante après le rétablissement du plafonnement à 3 % du PIB du déficit budgétaire. Le nouveau gouvernement qui sortira des urnes en février 2024 devrait donner la priorité aux réformes structurelles de façon à accroître la productivité et la compétitivité internationale tout en surveillant l’impact des politiques industrielles et commerciales et en les ajustant au cas où les résultats en seraient décevants.

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Source : Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 113 ; et CEIC.

StatLink2 https://stat.link/g3a4fh

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Indonésie : Demande, production et prix

Pourcentage de variation, en volume (prix de 2010)

StatLink2 https://stat.link/ul51pd

1 Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la première colonne

Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 113

Les perturbations provoquées par les mesures antérieures de confinement en lien avec la pandémie n’ont toujours pas disparu

La croissance de la production s’est redressée au quatrième trimestre de 2022, s’établissant à un niveau supérieur de 5.0 % à celui de la même période de l’année précédente, mais s’est à nouveau modérée au premier trimestre de 2023. La levée de toutes les restrictions de déplacement encore en place à compter du 1er janvier 2023 favorise la reprise dans le secteur des services, mais la consommation est toujours bien inférieure à ses niveaux d’avant la pandémie. La demande de biens de consommation durables a été atone en 2022. Ainsi, les ventes de véhicules à deux roues ont été inférieures de 10 % à la moyenne des ventes sur les sept années antérieures à la pandémie, même si elles se sont redressées au début de 2023. La prudence des consommateurs reflète en partie la croissance anémique des salaires réels. Les indicateurs avancés comme les achats de ciment et les importations d’équipements industriels laissent penser que la contribution de l’investissement à la croissance du PIB reste limitée, malgré l’élargissement du programme public d’infrastructures. Les tensions sur les prix ont continué de s’estomper et la hausse modeste des prix des produits alimentaires et des transports publics enregistrée cette année à l’occasion de l’Aïd-el-Fitr a contribué au recul de l’inflation, revenue à 4.3 % en glissement annuel en avril. Un autre signal positif est venu des introductions en bourse, dont le nombre a atteint un record historique en 2022 et qui ont généré au premier trimestre de cette année des produits dont le montant n’avait jamais été aussi élevé.

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2019 2020 2021 2022 2023 2024 Indonésie Prix courants trillions de IDR PIB aux prix du marché 15 832.7 -2.1 3.7 5.3 4.7 5.1 Consommation privée 9 171.9 -2.7 2.0 4.9 4.9 5.8 Consommation publique 1 394.6 2.1 4.2 -4.5 3.1 5.2 Formation brute de capital fixe 5 121.4 -5.0 3.8 3.9 2.3 4.3 Demande intérieure finale 15 687.9 -3.1 2.8 3.8 3.9 5.3 Variation des stocks¹ 215.2 -0.7 1.5 1.0 0.0 0.0 Demande intérieure totale 15 903.1 -3.7 4.3 4.6 3.7 5.1 Exportations de biens et services 2 943.5 -8.4 18.0 16.3 7.4 6.8 Importations de biens et services 3 013.9 -17.6 24.9 14.7 3.6 6.9 Exportations nettes¹ - 70.4 1.5 -0.4 0.8 1.0 0.3 Pour mémoire Déflateur du PIB _ -0.4 6.0 9.6 3.0 2.0 Indice des prix à la consommation _ 1.9 1.6 4.2 4.2 3.5 Déflateur de la consommation privée _ 1.9 1.7 4.8 4.1 3.7 Solde financier des administrations publiques (% du PIB) _ -5.7 -4.8 -3.4 -2.5 -2.1 Balance des opérations courantes (% du PIB) _ -0.4 0.3 1.0 0.6 0.5

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1.Les coefficients de pondération utilisés pour agréger les indices de prix relatifs aux différentes matières premières (huile de palme, charbon, minerai de fer, or et nickel) correspondent à la part de chacune d’elles dans le total des exportations de ces matières premières en 2021.

Source : Office central des statistiques (Badan Pusat Statistik) d’Indonésie ; ministère de l’Énergie et des Ressources minérales ; Banque mondiale, Commodity Markets Outlook ; et CEIC.

StatLink2 https://stat.link/6bncsq

La guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine a des répercussions contrastées en Indonésie, dont les échanges directs avec la Russie et l’Ukraine sont relativement restreints. Néanmoins, le remplacement d’une partie des importations de pétrole brut par des achats, à la Russie, de pétrole brut de l’Oural à prix réduit contribue à juguler les tensions inflationnistes. En revanche, les perturbations des chaînes de valeur mondiales et les restrictions d’exploitation sur les marchés de l’énergie se sont répercutées sur les prix intérieurs, notamment ceux des produits alimentaires, des engrais et des carburants. Parallèlement, l’Indonésie étant grande productrice de denrées agricoles, minerais et métaux divers, elle a bénéficié des fortes hausses de prix de certains d’entre eux à l’échelle mondiale. Les termes de l’échange se sont nettement améliorés en 2022 et les échanges nets ont soutenu la croissance, malgré l’existence de mesures visant à limiter les exportations d’huile de palme et à les subordonner à des obligations d’approvisionnement prioritaire du marché intérieur.

Après avoir été accommodantes, les politiques monétaire et budgétaire sont devenues plus neutres

La Banque d’Indonésie a relevé son taux directeur de 200 points de base au cours du second semestre 2022 et on pose l’hypothèse qu’elle le relèvera légèrement de nouveau en 2023 pour le porter à 6 %, reportant la première baisse au second semestre 2024. L’offre de crédit semble abondante, mais l’augmentation des coûts d’emprunt pèse sur l’investissement des entreprises et sur la consommation de biens durables des ménages. En raison de la part accrue des réserves des banques commerciales devant être investie dans des bons du Trésor, il est important d’étudier dans quelle mesure les décisions des autorités monétaires affectent les marges d’intérêts nettes des banques et la stabilité financière globale. Parallèlement à l’arrêt des achats de titres de dette publique sur le marché primaire par la banque centrale, il faudrait reprendre des enquêtes plus poussées sur les anticipations d’inflation afin d’aider à orienter les décisions publiques. Le vote récent de la loi omnibus du secteur financier qui, entre autres choses, habilite la banque centrale à acheter des obligations directement auprès de l’État si le président déclare une situation de crise, peut soulever des dilemmes en matière d’action publique et affaiblir la crédibilité des autorités monétaires.

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La projection de l’OCDE repose sur l’hypothèse qu’aucune aide budgétaire supplémentaire ne sera instaurée sous la forme d’allègements et de reports de paiement des impôts. La nouvelle loi relative à l’harmonisation fiscale va probablement améliorer le recouvrement de l’impôt et les autorités se sont engagées à respecter la loi budgétaire de 2003, qui plafonne le déficit budgétaire à 3 % du PIB et dont l’application avait été suspendue sur la période 2020-22 en raison de la pandémie. Grâce à une politique macroéconomique saine, la dette publique (dans sa définition étroite) est inférieure à 40 % du PIB, un niveau gérable compte tenu de sa composition en termes de maturité et de créanciers. Par conséquent, les marges de manœuvre sont suffisantes pour faire face à de futurs chocs, par exemple en augmentant les dépenses d’investissement. Les dépenses au titre des aides versées aux ménages et aux entreprises, principalement dans le domaine de l’énergie, s’élèvent à 3 % environ du PIB, soit plus du quart des recettes fiscales. Ces aides ne sont pas assez ciblées et pas suffisamment alignées sur les objectifs de réduction des émissions, mais il serait extrêmement difficile de les réduire à court terme.

La croissance de l’activité va se poursuivre, mais à un rythme légèrement plus modéré

Au cours de l’année 2023, la croissance du PIB va petit à petit se rapprocher du taux de 5 % observé au cours des 15 dernières années. L’investissement public sera encouragé par la reprise des activités de construction dans la nouvelle capitale Nusantara. La réouverture des frontières chinoises devrait stimuler les exportations dans le secteur du tourisme, sous réserve que des mesures soient mises en œuvre pour améliorer la planification et la coordination à tous les niveaux de l’administration et dans tous les domaines de l’action publique concernés, comme la santé et la sécurité, le développement des compétences ou encore la gestion des destinations touristiques. Une prévisibilité accrue de l’approvisionnement en énergie et en céréales, favorisée par l’amélioration des sites de stockage, aidera à stabiliser l’inflation globale dans la fourchette retenue comme objectif par la Banque d’Indonésie (3±1 %) à compter du second semestre 2023.

La dépendance de l’Indonésie à l’égard des matières premières, des marchés de capitaux internationaux et des envois de fonds personnels rend le pays très vulnérable aux évolutions sur la scène internationale. Malgré l’amélioration des fondamentaux, une ruée vers les marchés émergents pourrait profondément bouleverser l’économie, comme cela fut le cas lors de précédentes crises similaires. Au plan intérieur, les risques politiques pourraient s’intensifier pendant la période précédant les élections en cas d’apparition de signes de revirement quant à la concrétisation des réformes essentielles, ce qui pourrait mettre un coup d’arrêt aux avancées obtenues en matière de responsabilité et de transparence.

Des politiques publiques proactives peuvent aider à renforcer la compétitivité, mais la prudence reste de mise

Accroître la participation de l’Indonésie dans les chaînes de valeur mondiales (CVM) tout en encourageant la valeur ajoutée nationale et en accélérant le développement durable est l’une des priorités majeures des autorités publiques. Des politiques industrielles et commerciales proactives sont mises en œuvre, à l’image de l’interdiction touchant les exportations de minerai de nickel non transformé et des incitations visant à attirer les producteurs mondiaux de batteries destinées aux véhicules électriques. Il est nécessaire d’assurer un suivi constant de cette stratégie afin d’éviter de commettre des erreurs qui pourraient s’avérer coûteuses et de poursuivre des objectifs potentiellement contradictoires. Améliorer le climat de l’investissement, en se concentrant sur les domaines où les indicateurs de réglementation des marchés de produits établis par l’OCDE révèlent un retard de l’Indonésie par rapport aux pays comparables, pourrait constituer de la part des pouvoirs publics une initiative plus efficace, notamment en cette période où les entreprises mondiales cherchent à réduire leur exposition à la Chine. Cette approche horizontale de

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l’amélioration du climat de l’investissement est également plus susceptible de créer des emplois, notamment pour les femmes, qu’une approche axée sur les secteurs à forte intensité de capital. Le secteur des entreprises tirerait également parti d’un accroissement de l’offre de main-d’œuvre au moyen de nouvelles réformes visant à encourager l’emploi formel parmi les femmes, ainsi que de l’élargissement des services d’accueil des jeunes enfants et d’une plus grande flexibilité des horaires de travail. Les réformes devraient aussi permettre de créer un environnement propice aux investissements à grande échelle en faveur des énergies renouvelables. Cela permettrait de diversifier le mix énergétique, qui fait aujourd’hui la part belle au charbon, et contribuerait ainsi à la réalisation des objectifs de réduction des émissions.

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