Études économiques de l’OCDE : Viet Nam 2025
ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : VIET NAM 2025 © OCDE 2025

ÉTUDES ÉCONOMIQUES DE L’OCDE : VIET NAM 2025 © OCDE 2025
La présente Étude économique a été préparée par Randall S. Jones, Patrick Lenain and Ken Nibayashi, sous la supervision de Jens Arnold. Sophie Jenkins a apporté son concours pour les tâches administratives et la mise en forme du document, et François Iglesias pour la communication.
Cette Étude est publiée sous la responsabilité du Comité d’examen des situations économiques et des problèmes de développement de l’OCDE. Le projet d’Étude a été examiné par le Comité le 29 Avril 2025. Les données utilisées dans l’Étude ont été collectées jusqu’au mai 2025.
Le soutien du gouvernement du Japon est reconnu avec gratitude.
Des informations relatives à cette Étude et aux éditions précédentes ainsi qu’à la manière dont les Études sont préparées peuvent être consultées ici : https://www.oecd.org/fr/themes/etudes-economiques.html
GRAPHIQUES
Graphique 1. La croissance du Viet Nam a été supérieure à celle de pays voisins 7
Graphique 2. L’abaissement du niveau élevé des cotisations de sécurité sociale encouragerait l’emploi formel 11
Graphique 3. Les émissions de carbone des centrales à charbon augmentent en même temps que la demande d’électricité 12
Graphique 4. La part du Viet Nam dans les échanges mondiaux de biens a augmenté 13
Statistiques de base du Viet Nam, 2023
Les nombres entre parenthèses correspondent à la moyenne de l’OCDE.
ET CYCLE ÉLECTORAL
Nombre moyen d’heures travaillées par semaine 42 (37.0)
Approvisionnements totaux en énergie primaire par habitant (tep, 2022, OCDE : 2023)
Énergies renouvelables (%, 2022, OCDE : 2023)
Exposition à la pollution atmosphérique (% de la population exposé à une concentration en PM2.5 > 10 μg/m³, 2020)
Inégalités de revenu (coefficient de Gini, 2022, OCDE : dernières données disponibles)
Écart de pauvreté au seuil de 3.65 USD par jour (PPA de 2017, %, 2022)
publiques et privées (% du PIB)
Taux de diplômés de l’enseignement supérieur (25-64 ans, %)²
Émissions de CO₂ par habitant dues à la combustion d’énergie (tonnes, 2022, OCDE : 2023)
(12.5) Ressources internes renouvelables en eau douce par habitant (milliers de m3, 2020)
Enseignement (dépenses publiques, % du RNB, 2021) 4.6 (4.4) Proportion de femmes au parlement (%) 30.3 (32.8)
Note : Si l’année à laquelle se rapportent les données diffère de celle indiquée dans le titre de ce tableau, elle est indiquée entre parenthèses. Lorsque l’agrégat OCDE n’est pas disponible dans la base de données utilisée comme source, une moyenne simple des dernières données disponibles sur les pays de l’OCDE est calculée lorsqu’elles existent pour au moins 80 % des pays membres.
1. Pour le Viet Nam, les données se rapportent aux personnes âgées de 25 ans et plus.
Source : Calculs effectués à partir d’informations extraites des bases de données des organisations suivantes : OCDE, Agence internationale de l’énergie, Organisation internationale du travail, Fonds monétaire international, Organisation des Nations Unies et Banque mondiale.
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Le Viet Nam a accompli des progrès économiques remarquables au cours des dernières décennies, maintenant un niveau de croissance économique élevé. Cette réussite économique est notamment attribuable à la mise en œuvre continue de réformes de grande ampleur depuis la fin des années 1980. Toutefois, compte tenu des enjeux majeurs qui se profilent, le Viet Nam doit engager des réformes structurelles qui renforceront encore les forces du marché, amélioreront la protection sociale dans un contexte de vieillissement de la population et rendront la croissance plus durable.
• Le renforcement de l’indépendance opérationnelle de la banque centrale, l’adoption d’une politique monétaire fondée sur les prix, la mobilisation de recettes supplémentaires pour répondre aux besoins de dépenses croissants et une plus grande transparence des comptes nationaux et budgétaires permettraient d’améliorer les politiques macroéconomiques.
• L’accès aux prestations sociales, notamment aux pensions de vieillesse, demeure lacunaire en raison de l’ampleur de l’emploi informel. Afin de rendre la croissance plus inclusive, il convient de mettre en œuvre des réformes bien coordonnées pour étendre les prestations d’aide sociale non contributives tout en maintenant de fortes incitations à la création d’emplois formels.
• Le Viet Nam est fortement touché par le changement climatique et s’est engagé à atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Pour asseoir une croissance plus durable, il sera primordial de réduire les émissions imputables à la production d’électricité en abandonnant progressivement les centrales à charbon et en accélérant le déploiement des renouvelables.
• Bien que les entreprises à capitaux étrangers aient été l’un des moteurs de la croissance, elles n’ont guère établi de liens avec les fournisseurs locaux. Accroître l’investissement dans l’enseignement supérieur, renforcer la concurrence dans les secteurs de services et harmoniser les règles du jeu entre les entreprises privées et publiques sont autant de mesures qui pourraient stimuler la croissance de la productivité.
Le Viet Nam est devenu un centre manufacturier de premier plan
En 1985, le Viet Nam était l’un des pays les plus pauvres du monde. Les réformes Doi Moi de 1986 ont jeté les bases d’une croissance rapide, transformant le Viet Nam d’une économie agraire pratiquement fermée, soumise à une planification centralisée, en un grand exportateur et une destination de choix pour l’investissement direct étranger. Le pays a des ambitions élevées pour l’avenir, notamment un objectif officiel de croissance de 8 % en 2025 et une croissance à deux chiffres pour la période 2026-2030, ainsi que l’objectif d’atteindre le statut de pays à revenu élevé d’ici à 2045. Toutefois, pour que le Viet Nam atteigne ces objectifs, des gains de productivité accrus seront nécessaires pour soutenir la croissance économique alors que les tendances démographiques deviennent moins favorables.
La croissance vigoureuse enregistrée depuis 1990 repose principalement sur l’accumulation de capital, les gains de productivité jouant un rôle plus modeste. Grâce à une croissance fulgurante supérieure à celle de nombreux pays de la région, le revenu par habitant a été multiplié par 5.7 entre 1990 et 2023, et le Viet Nam est devenu un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure en 2011 (Graphique 1). La pauvreté a fortement reculé et l’espérance de vie est passée de 69 à 75 ans.
La productivité pourrait être stimulée en modernisant le système éducatif, notamment l’enseignement supérieur, par une action coordonnée avec le secteur des entreprises. Dynamiser la concurrence, en particulier dans les secteurs de services, contribuerait aussi à rehausser la productivité, notamment en assouplissant les restrictions à l’entrée et à l’investissement étranger et en instaurant des règles du jeu plus équitables entre les entreprises publiques et les entreprises privées.
Avec la hausse des revenus, les demandes de plus en plus pressantes en faveur d’une amélioration des services publics nécessitent des politiques
différentes de celles qui ont été menées avec succès dans le passé. Le secteur public devra obtenir davantage de résultats et gagner en efficacité, ce qui implique d’améliorer la gouvernance économique. Une réforme en cours du secteur public, qui prévoit la fusion de ministères, de provinces et de régions administratives, devrait favoriser ces améliorations institutionnelles. Pour combler les lacunes substantielles dans le système actuel de protection sociale, il faudra accroître les dépenses et améliorer leur efficience.
L’engagement du Viet Nam d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 représente une contribution ambitieuse à l’atténuation du changement climatique. Aussi, la croissance future devra avoir une empreinte carbone plus faible que par le passé. Les besoins énergétiques croissants d’un secteur manufacturier en expansion ont été en grande partie couverts par la production d’électricité à partir du charbon, qui devra être remplacée par des alternatives bas carbone, ce qui exige des investissements importants.
Source : Banque mondiale, base de données des Indicateurs du développement dans le monde. StatLink 2 https://stat.link/tsol34
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La croissance fera face à des vents contraires
La croissance économique devrait faire face à des vents contraires en 2025 et 2026, les exportations ralentissant sur fond d’augmentation des obstacles aux échanges, même si la demande intérieure reste solide. L’inflation est tombée en deçà de 3 %, mais les autorités monétaires devraient rester vigilantes face aux risques d’inflation compte tenu de la forte croissance du crédit. Les améliorations des cadres de politique monétaire et budgétaire pourraient stimuler la croissance et favoriser la transparence et la prévisibilité de l’action publique.
L’économie s’est redressée après les chocs extérieurs et intérieurs négatifs de 2023. Le ralentissement du commerce mondial a réduit les exportations et les importations de respectivement 9 et 12 points de pourcentage du PIB. L’activité économique intérieure a été pénalisée par les turbulences dans le secteur financier à la suite de la faillite de la cinquième plus grande banque du pays fin 2022 et par les difficultés du secteur immobilier. Le typhon Yagi, le cyclone le plus puissant qui ait frappé le pays depuis 30 ans, a provoqué des inondations et des glissements de terrain dévastateurs dans les provinces du nord, cruciales pour l’économie du pays. Malgré cela, le PIB a progressé de 7.1 % en 2024, dépassant à la fois le taux de croissance de l’année précédente et l’objectif de croissance fixé par le gouvernement.
Les exportations sont un moteur essentiel de la croissance économique. À 15.5 % en 2024, la croissance des exportations a largement contribué à l’augmentation de la production industrielle (Tableau 1). Toutefois, les importations ont progressé encore plus vite, ce qui s’est traduit par une contribution négative des échanges à la croissance du PIB.
L’inflation globale mesurée par les prix à la consommation est repartie à la hausse temporairement en 2024, mais les autorités monétaires ont compris que ces tensions inflationnistes étaient liées à des composantes volatiles. La hausse de l’inflation à la mi-2024 a été
alimentée en partie par les prix des produits alimentaires, les services de santé, les coûts du logement, la dépréciation du taux de change au premier semestre de l’année, puis par l’augmentation des coûts de production après le typhon Yagi. Ces effets se sont dissipés et l’inflation est passée en dessous de 3 % au dernier trimestre de 2024. L’inflation sous-jacente, qui avait culminé à plus de 5 % en 2023, est restée inférieure à 3 % tout au long de 2024, et s’est établie à 3.1 % en avril 2025.
Le PIB devrait augmenter de 6.2 % en 2025 et de 6.0 % en 2026, tiré par la demande intérieure, tandis que la demande d’exportations fléchira. La consommation privée sera soutenue par la poursuite de la hausse des salaires réels et de l’emploi. Le relèvement des droits de douane sur les exportations vers les États-Unis, qui concerne environ un tiers des exportations vietnamiennes, pèsera sur les perspectives d’exportation à l’avenir, même si les répercussions plus larges de ces évolutions, notamment sur les entrées d’investissement, demeurent très incertaines.
L’orientation accommodante de la politique monétaire et l’amélioration des bilans des banques aideront la consommation et l’investissement à croître régulièrement en 2025 et 2026. Sous l’effet de la vigueur de la demande intérieure, l’inflation devrait se hisser à 3.7 % en 2025, soit toujours légèrement en dessous de l’objectif de 4.5-5 %, tandis que le taux de chômage restera faible.
Tableau 1. La croissance a bien résisté
Taux de croissance annuelle, en %, sauf indication contraire
Source : Base de données des Perspectives économiques de l’OCDE, n° 117 ; et prévisions de l’OCDE.
La politique budgétaire continuera de soutenir la croissance par l’augmentation de l’investissement public, alors que le gouvernement s’efforce de remédier aux échecs des plans d’investissement passés. Compte tenu de la vigueur de la croissance, la nécessité d’une relance budgétaire pourrait être réexaminée, même si les récentes hausses des droits de douane devraient peser sur les résultats en matière de croissance, ces projections étant entourées de risques à la baisse considérables. Aussi, la politique budgétaire devrait rester flexible et se tenir prête à soutenir la croissance si nécessaire. Les nouveaux besoins de dépenses dans le domaine de la protection sociale et de la transition écologique nécessiteront de réformer le système fiscal afin de mobiliser des recettes supplémentaires, y compris au moyen des taxes sur la valeur ajoutée, tout en améliorant la gouvernance budgétaire et la transparence des comptes budgétaires.
En tant qu’économie tributaire des échanges, le Viet Nam demeure très exposé aux évolutions du commerce mondial. Compte tenu de la hausse des droits de douane, la contribution des exportations nettes à la croissance sera négative en 2025 et 2026, mais leur effet global sur les échanges et sur l’activité pourrait être beaucoup plus important, surtout si l’augmentation des obstacles aux échanges entraîne une forte contraction des entrées d’investissements étrangers. De nouvelles pressions à la baisse sur le taux de change pourraient faire grimper l’inflation,
nécessitant un resserrement de la politique monétaire.
Dans le secteur financier, les risques sont liés à la dette des entreprises et à un encours élevé de prêts non performants. Ils ont atteint leur plus haut niveau depuis dix ans, en partie à cause des turbulences dans le secteur immobilier et de la faillite de la cinquième banque commerciale en 2022. Le renforcement des règles relatives au recouvrement des créances et à l’insolvabilité pourrait contribuer à réduire le nombre de prêts non performants.
Le Viet Nam pourrait améliorer sa résilience en révisant son cadre de politique monétaire. Le renforcement de l’indépendance opérationnelle de la banque centrale et l’adoption d’une approche de la politique monétaire davantage fondée sur les prix permettraient d’améliorer l’efficacité et la transparence de la politique monétaire. Cela passe par la suppression progressive des objectifs de croissance du crédit imposés aux banques pour renforcer la concurrence et l’allocation efficace du capital via le vaste système bancaire afin de limiter les risques pour la stabilité financière. Une plus grande flexibilité du taux de change permettrait d’amortir l’impact des chocs externes. La publication des comptes nationaux et des données budgétaires conformément aux méthodologies actualisées reconnues au niveau international contribuerait à renforcerait la transparence de l’action publique.
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Vers une croissance plus inclusive
Au Viet Nam, l’expansion économique rapide a été très bénéfique à une grande proportion de la population. Une classe moyenne est en train d’émerger, les inégalités de revenu ont diminué et l’extrême pauvreté a été quasiment éradiquée. Bien que l’activité informelle ait été contenue, les deux tiers des travailleurs continuent d’occuper des emplois informels et n’ont pas accès aux prestations de protection sociale. Les récentes réformes visant à améliorer l’accès aux retraites et aux soins de santé aideront ces travailleurs et il conviendrait qu’elles soient effectivement mises en œuvre. L’allègement de la charge fiscale qui pèse sur les revenus du travail favoriserait la régularisation des activités économiques informelles et atténuerait les effets généralisés que celles-ci peuvent avoir.
La croissance économique soutenue et les politiques de protection sociale engagées au Viet Nam ont permis la quasi-éradication de l’extrême pauvreté. Les progrès se ressentent sur les revenus, l’emploi, la nutrition, les soins de santé et l’éducation. Il est prévu de déployer des régimes de retraite de base non contributifs afin de parvenir à une couverture de retraite universelle ; la couverture santé est quant à elle presque universelle.
Les inégalités de revenu ont été endiguées. Mesurées à l’aide du coefficient de Gini, les inégalités sont moins prononcées qu’en Malaisie et aux Philippines, et comparables à celles observées en Indonésie, en RDP lao et en Thaïlande. Le recul récent des inégalités de revenu s’explique en grande partie par les mesures, en matière de prélèvements fiscaux et de transferts, mises en place pendant la pandémie de COVID-19, ainsi que par la flambée des prix mondiaux de l’énergie. Certaines de ces mesures sont temporaires et il conviendrait donc que des réformes s’inscrivant davantage dans la durée prennent le relais. Pour les ménages à faible revenu, des transferts monétaires ciblés contribueraient à améliorer l’accès à l’enseignement secondaire et à réduire le poids des dépenses de santé restant à la charge des patients, ainsi que la hausse des prix de l’énergie. Au sommet de la distribution des revenus, la suppression de certaines des nombreuses dépenses fiscales au titre de l’impôt sur le revenu rendrait le système fiscal plus progressif.
Faire reculer l’économie informelle au moyen d’incitations financières conjuguées à une application plus stricte de la législation est la voie qui conduira à une croissance plus inclusive. L’emploi dans l’économie informelle est une pratique très répandue parmi les jeunes et les travailleurs âgés, mais elle concerne également les classes d’âge à forte activité. Les travailleurs employés dans le secteur informel perçoivent des revenus plus faibles, effectuent un plus grand nombre d’heures de travail, n’ont pas droit à
l’assurance chômage et n’accumulent pas de droits à pension. La réforme récente du système de retraite, dans le cadre de la loi modifiée sur l’assurance sociale, vise à instaurer un régime de retraite de base non contributif pour tous les travailleurs. Il s’agit d’une mesure bienvenue pour élargir la couverture du système de retraite, car les travailleurs qui peuvent actuellement prétendre au bénéfice d’une retraite sont peu nombreux en raison de l’ampleur de l’emploi informel. Ces réformes doivent toutefois être mises en œuvre dans une optique de cohérence des politiques à l’échelle de l’ensemble du système de protection sociale afin d’éviter d’affaiblir les incitations à la régularisation des activités informelles. Les effets cumulés de l’application des cotisations de sécurité sociale (Graphique 2), de l’impôt sur le revenu et du salaire minimum peuvent rendre prohibitif le coût de la création d’emplois formels dans le cas de travailleurs peu qualifiés ayant une faible productivité, et contribuer ainsi à alimenter l’économie informelle. Une réduction des cotisations de sécurité sociale pour les travailleurs faiblement rémunérés, conjuguée au développement d’autres sources de recettes publiques, encouragerait la régularisation des activités informelles.
Les femmes participent activement au marché du travail, mais occupent rarement des postes à responsabilités. Les femmes sont moins nombreuses aux postes de direction dans le secteur des entreprises, les ministères et les institutions politiques. L’augmentation des droits à congé pour les parents de jeunes enfants, avec un minimum réservé aux pères, favoriserait une répartition plus équitable de la charge de la garde des enfants entre les hommes et les femmes. Le Viet Nam pourrait également envisager d’instaurer progressivement des quotas obligatoires de femmes au sein des conseils d’administration, comme l’ont fait avec succès d’autres pays.
Graphique 2. L’abaissement du niveau élevé des cotisations de sécurité sociale encouragerait l’emploi formel
Recettes publiques provenant des cotisations de sécurité sociale, 2022
Source : Tableaux comparatifs publiés par l’OCDE dans les Statistiques des recettes publiques en Asie et dans le Pacifique.
StatLink 2 https://stat.link/k9wd5e
Libérer le potentiel de croissance économique sobre en carbone
Le Viet Nam est très exposé aux effets du changement climatique. Les habitants des grandes zones urbaines de Hanoï et Hô Chi Minh-Ville doivent déjà faire face à des risques d’inondation et de canicule et à des phénomènes météorologiques extrêmes. Les pouvoirs publics ont mis en place des politiques ambitieuses d’atténuation du changement climatique, notamment des incitations à recourir à l’énergie solaire et éolienne, et ont adopté un objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050. Cependant, en raison de l’augmentation rapide de la demande d’énergie, la consommation de charbon demeure à des niveaux record.
Il sera essentiel d’assurer une meilleure préparation aux aléas climatiques, notamment via la mise en place de systèmes d’alerte précoce, la construction d’infrastructures résistant aux tempêtes, l’organisation de campagnes d’information et l’investissement de fonds publics dans des solutions collectives telles que des hébergements temporaires et des plans d’évacuation. Faciliter le relogement de migrants internes issus de quartiers urbains précaires leur assurerait également une protection en cas de typhon. En outre, les niveaux élevés de pollution atmosphérique locale dus aux particules fines sont à l’origine d’importants risques sanitaires. La création de zones à faibles émissions dans les villes, l’adoption de solutions de transports publics bas carbone et une accélération du passage aux
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véhicules électriques sont autant de moyens de concourir à la maîtrise de ces risques.
Les pouvoirs publics ont pris l’engagement de mener des actions ambitieuses en matière d’atténuation. Le Viet Nam se donne pour objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050 et applique à cet effet un cadre d’action à l’appui de la transition. Des investissements considérables ont été réalisés pour accroître la production d’électricité renouvelable, faisant du Viet Nam l’un des pays au monde qui se montrent les plus rapides pour l’adoption des énergies propres. Bien que l’État n’ait pas instauré de taxe carbone, divers combustibles fossiles sont soumis à des droits d’accise qui en majorent le prix. La taxe de protection de l’environnement et la TVA sur les produits
énergétiques ont été abaissées à la suite de chocs sur les prix mondiaux de l’énergie et pourraient maintenant être ramenées à leurs niveaux antérieurs afin d’envoyer des signaux-prix appropriés. Il faudrait accélérer la mise en place d’un système d’échange de quotas d’émission, qui fonctionnera en parallèle d’un marché des crédits d’émission de carbone à participation facultative. La tarification du carbone pourrait être associée à des mesures non tarifaires, reposant notamment sur la réglementation et l’investissement public.
La forte demande d’électricité fait grimper les émissions de carbone. Au cours des dix premiers mois de 2024, la demande record d’électricité a entraîné une hausse des émissions des centrales à charbon (Graphique 3). Pour inverser cette tendance, le Viet Nam devra développer encore les sources d’énergie renouvelables et renforcer le réseau. Le démantèlement des centrales à charbon aura des effets collatéraux sur les collectivités locales dans les régions minières, mais une transition équitable est possible moyennant des aides à la reconversion et à la réinstallation.
Graphique 3. Les émissions de carbone des centrales à charbon augmentent en même temps que la demande d’électricité
First 10 months of each year
Source : données Ember.
StatLink 2 https://stat.link/n3dlj7
Mobiliser l’investissement direct étranger et les échanges internationaux
Pour que le Viet Nam atteigne l’objectif qu’il s’est fixé d’être un pays à revenu élevé d’ici à 2045, des gains de productivité accrus seront nécessaires pour soutenir la croissance économique alors que les tendances démographiques deviennent moins favorables. L’une des grandes priorités est de maintenir et de mettre à profit les entrées d’investissement direct étranger (IDE) afin de stimuler la productivité grâce à de meilleures connexions avec les entreprises locales. Les nouveaux obstacles aux exportations vers les États-Unis vont rendre cet objectif plus difficile à atteindre.
Les entrées d’IDE ont contribué à la croissance de la part du Viet Nam dans les échanges mondiaux. Entre 2015 et 2023, celles-ci ont représenté 4.8 % du PIB, soit plus que dans d’autres pays de l’ASEAN, qu’en Chine et qu’en Inde. Elles ont apporté des avantages non négligeables à l’économie vietnamienne, notamment en termes de capital, de technologie et d’accès aux marchés, qu’il sera
important de préserver dans une économie mondiale en mutation. La part du Viet Nam dans les échanges mondiaux est passée de 0.1 % en 1996 à 1.5 % en 2023, ce qui en fait le 19e exportateur mondial (Graphique 4). Les nouveaux droits de douane imposés par les États-Unis vont probablement affaiblir cette bonne performance à l’avenir.
L’ouverture des marchés de services à la concurrence et à l’investissement direct étranger sera essentielle pour atteindre un niveau de valeur ajoutée plus élevé dans les chaînes de valeur mondiales. Des intrants de services plus concurrentiels peuvent avoir des effets positifs importants sur la productivité des entreprises manufacturières en aval, mais les obstacles à la concurrence et à l’investissement étranger restent élevés dans la plupart des secteurs de services.
L’IDE a moins réussi à développer des liens avec l’économie nationale. Les programmes de développement des fournisseurs, un meilleur échange d’informations entre les fournisseurs locaux potentiels et les filiales étrangères et une protection accrue des droits de propriété intellectuelle peuvent permettre à un plus grand nombre d’entreprises locales de bénéficier des externalités de productivité liées à l’IDE.
Améliorer l’enseignement et la formation pour accroître l’offre de travailleurs hautement qualifiés peut contribuer à renforcer les liens entre les entreprises bénéficiaires d’IDE et les entreprises
nationales. Seule la moitié environ des jeunes sont inscrits dans le deuxième cycle de l’enseignement secondaire. Les inscriptions dans l’enseignement supérieur restent parmi les plus faibles de la région et le niveau élevé des frais de scolarité entrave l’accès de nombreux élèves à l’enseignement supérieur, ce qui pourrait justifier un soutien financier public accru.
Pour améliorer l’affectation des ressources, il faudra intensifier la concurrence dans l’ensemble de l’économie. Sont notamment concernés les services financiers, qui jouent un rôle essentiel dans l’allocation des capitaux et qui offrent des possibilités d’expansion du financement par le marché, notamment pour les PME. Réduire le poids des entreprises publiques et faire en sorte que cellesci ne soient pas avantagées par rapport aux entreprises privées permettrait aux entreprises les plus productives de bénéficier de davantage de main-d’œuvre et de capitaux. Il conviendrait de poursuivre les efforts de lutte contre la corruption, qui ont permis des avancées.
Source : Banque mondiale, Indicateurs du développement dans le monde.
StatLink 2 https://stat.link/trswx8
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Principales conclusions
Principales recommandations Évolutions macroéconomiques et enjeux de l’action publique
La croissance économique a dépassé 7 % en 2024, stimulée par les mesures de relance budgétaire, mais les récentes hausses des droits de douane pourraient la freiner davantage que prévu.
Le taux normal de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) s’établit à 10 %, ce qui est bien inférieur à la moyenne de l’OCDE, qui est de 19 %. Un taux réduit de 5 % est également prévu pour les biens et services essentiels.
Les difficultés rencontrées par le secteur immobilier ont contribué à l’augmentation des prêts non performants des banques et accentué les risques pesant sur la stabilité financière. La lenteur des procédures d’insolvabilité tend à faire baisser la valeur des prêts non performants.
La Banque centrale du Viet Nam est une organisation ministérielle de l’administration centrale et son gouverneur est membre du gouvernement. L’indépendance de la Banque centrale du Viet Nam n’est pas explicitement définie.
Outre les taux d’intérêt, la Banque centrale du Viet Nam utilise divers outils pour atteindre ses objectifs, notamment des plafonds d’expansion du crédit qu’elle impose de manière individualisée aux banques, des plafonds de taux d’intérêt sur les dépôts et les prêts, et des interventions sur le marché des changes.
Viser une orientation neutre de la politique budgétaire, mais se tenir prêt à apporter un soutien à l’activité si la croissance faiblit.
Relever progressivement le taux de TVA et élargir son assiette pour répondre à l’augmentation des besoins de dépenses, tout en recourant à d’autres mesures pour compenser l’effet régressif de la TVA.
Renforcer l’efficacité des cadres de recouvrement des dettes et d’insolvabilité pour réduire les prêts non performants.
À moyen et long terme, envisager de renforcer l’indépendance opérationnelle de la banque centrale du Viet Nam pour atteindre les objectifs fixés par le gouvernement et créer un comité de politique monétaire.
Abandonner progressivement la politique monétaire actuelle fondée sur la quantité au profit d’une approche davantage fondée sur les prix, en supprimant progressivement les objectifs de croissance du crédit propres aux banques et en recourant davantage aux taux d’intérêt.
Vers une croissance plus inclusive
Peu de travailleurs peuvent prétendre à une pension publique lorsqu’ils partent en retraite en raison de l’ampleur de l’emploi informel.
Mettre en œuvre les plans visant à instaurer une couverture de retraite universelle en étendant les pensions de vieillesse de base non contributives tout en assurant la viabilité du système de retraite contributif.
Environ 6.7 % de la population n’a pas accès à une assurance maladie. Réduire les obstacles administratifs à l’accès aux cartes d’assurance maladie.
Le nombre moyen d’années de scolarité est faible, à 9.3 ans. Seuls 58 % des élèves achèvent leurs études secondaires.
Les prix de l’énergie augmenteront pendant la transition climatique, car la tarification du carbone et une réglementation plus stricte augmenteront les coûts de production.
L’emploi informel concerne 68.5 % des travailleurs. Cela les prive d’accès au système de sécurité sociale, tout en réduisant la productivité et les recettes fiscales.
Les lourdes charges qui pèsent sur le travail déclaré freinent la création d’emplois formels et contribuent à la persistance d’un taux d’emploi informel élevé, en particulier parmi les personnes faiblement rémunérées.
Favoriser l’accès au deuxième cycle de l’enseignement secondaire en rendant l’assiduité obligatoire et en améliorant sa qualité.
Recourir à des prestations d’aide sociale ciblées pour aider les personnes vulnérables touchées par la hausse des prix de l’énergie.
Mettre en place une stratégie globale pour favoriser la régularisation des activités informelles, notamment en réduisant les coûts non salariaux, en faisant mieux respecter le droit et en allégeant les formalités administratives liées à l’immatriculation d’une entreprise et à l’obtention d’autorisations.
Alléger la pression fiscale sur les revenus du travail en abaissant les cotisations de sécurité sociale pour les bas salaires et en réorientant le financement de la protection sociale de base vers la fiscalité générale.
Libérer le potentiel de croissance sobre en carbone
La taxe de protection de l’environnement a été réduite de moitié pendant la période de forte inflation qui a touché le pays, comme ailleurs, se traduisant par un faible prix des carburants.
La consommation d’énergie augmente plus vite que le PIB, ce qui illustre l’absence de signaux-prix.
Les émissions de GES imputables à l’énergie résultent en grande partie d’une forte dépendance à l’égard des énergies fossiles. La transformation bas carbone des secteurs de l’électricité, de l’industrie lourde et des transports fait face à des vents contraires d’ordre réglementaire.
Ramener les taux de la taxe de protection de l’environnement à leur niveau d’avant la crise et les définir en fonction du contenu en carbone. Amener la taxe sur le gazole au niveau de la taxe sur l’essence.
Augmenter progressivement la taxe sur le charbon afin de mieux tenir compte de son fort impact sur les émissions de carbone.
Accélérer le déploiement du système obligatoire d’échange de quotas d’émissions du Viet Nam.
Encourager davantage le développement des sources d’énergie renouvelables. Rationaliser les procédures d’autorisation des activités et infrastructures bas carbone, en particulier en ce qui concerne l’acquisition de terrains.
Mettre à profit les flux d’échanges et d’investissement pour stimuler la productivité
Le secteur des services, où les obstacles à l’IDE sont relativement élevés, est peu développé puisqu’il représente 45 % du PIB. Les marchés clés des télécommunications sont dominés par des entreprises publiques, tandis que les banques publiques représentent 40 % des actifs bancaires.
Favoriser le développement du secteur des services en réduisant les obstacles aux échanges de services et les restrictions aux participations étrangères dans les services, notamment les télécommunications.
La loi vietnamienne sur les droits de propriété intellectuelle est conforme Renforcer l’application des droits de propriété intellectuelle en réduisant les
aux normes internationales, mais les mécanismes d’application doivent être améliorés.
Les diplômés des universités et des établissements d’enseignement professionnel supérieur représentent respectivement 10 % et 3 % de la population active. Les dépenses publiques consacrées à l’enseignement supérieur sont tombées à environ 0.3 % du PIB.
Le financement par le marché est peu développé dans le système financier centré sur les banques. Le Viet Nam a mis en place des plateformes spécialement destinées au financement participatif en fonds propres et au financement entre pairs pour améliorer l’accès des PME au financement par capitaux propres.
Les entreprises publiques, qui représentent environ 40 % du PIB, entravent la concurrence sur de nombreux marchés de produits. Le champ du secteur des entreprises publiques au Viet Nam est très large selon l’indicateur de réglementation des marchés de produits de l’OCDE.
Des progrès significatifs ont été accomplis en matière d’intégrité dans le secteur public.
délais et les coûts des actions en justice et sensibiliser le public à l’importance de ces droits.
Augmenter les dépenses publiques consacrées à l’enseignement supérieur et renforcer la coordination avec le secteur des entreprises pour améliorer les programmes d’enseignement et réduire les problèmes d’inadéquation entre l’offre et la demande sur le marché du travail.
Adopter un cadre réglementaire approprié pour les nouvelles formes d’investissement en fonds propres afin d’assurer la transparence et d’empêcher les activités frauduleuses.
Réduire le rôle de l’État dans l’économie en accélérant la privatisation des entreprises publiques et en ne favorisant pas celles-ci par rapport aux entreprises privées.
Continuer de déployer des efforts soutenus en faveur de la lutte contre la corruption.
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