Finlande
La croissance économique devrait nettement ralentir à cause de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine : le PIB devrait reculer de 0.3 % en 2023 puis rebondir de 1.1 % en 2024. La consommation commencera par fléchir sous l’effet de la baisse des salaires réels pour ensuite se redresser parallèlement au ralentissement de l’inflation et à la progression des salaires. La croissance des exportations accusera un fort recul en raison du tassement de la demande sur les marchés d’exportation, mais elle s’améliorera à mesure que cette dernière s’affermira. Le taux de chômage se hissera à 7.9 % en 2023 et demeurera élevé en 2024. Quant à l’inflation, elle refluera à 3.1 % en 2024, une fois le choc énergétique dissipé.
Un assainissement budgétaire s’impose tant pour soutenir le durcissement de la politique monétaire que pour placer les finances publiques sur une trajectoire viable à moyen et long terme. Il faudrait procéder à un examen complet des dépenses afin de recenser les mesures d’assainissement envisageables. Il conviendrait également de réduire les aides publiques aux entreprises qui ne débouchent pas sur des gains de productivité. Enfin, la réglementation du marché du travail devrait être assouplie pour favoriser l’emploi et l’innovation.
Un repli de l’activité économique s’est amorcé
La croissance s’est accélérée au premier semestre de 2022, à la suite de la levée des mesures de restriction liées au COVID-19, mais elle a fortement ralenti depuis à cause de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Les prix de l’énergie ont flambé, faisant grimper l’inflation globale annuelle mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) à 8.2 % au troisième trimestre de 2022. L’inflation sous-jacente s’est hissée à 4.5 %, dans la mesure où le renchérissement de l’énergie et des produits alimentaires s’est répercuté sur d’autres composantes de l’indice IPCH. La progression de l’indice des salaires et traitements s’est accélérée, mais elle ne s’établit qu’à 2.6 %, soit un niveau bien inférieur à celui de la hausse des prix. Les ventes au détail en volume s’inscrivent en baisse et la confiance des consommateurs est tombée à un niveau historiquement faible. Le cycle de la construction de logements s’est retourné au deuxième trimestre de 2022 et le nombre de permis de construire délivrés diminue. L’investissement tout comme la confiance des entreprises ont également commencé à reculer. La croissance vigoureuse de l’emploi a brutalement marqué un coup d’arrêt au troisième trimestre de 2022, lorsque l’emploi est resté stationnaire et que le taux de chômage a bondi à 7.3 %.
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Finlande : Demande, production et prix
Finlande
PIB aux prix du marché
2019 2020 2021 2022 2023 2024
Prix courants milliards de EUR
Pourcentage de variation, en volume (prix de 2015)
239.9 -2.2 3.0 2.2 -0.3 1.1
Consommation privée 126.1 -4.0 3.7 2.3 -0.6 1.4
Consommation publique 55.6 0.3 2.9 2.8 -0.3 0.1
Formation brute de capital fixe 57.1 -0.9 1.5 3.0 -0.7 0.2
Demande intérieure finale 238.8 -2.3 2.9 2.6 -0.6 0.8
Variation des stocks¹,² 0.6 0.2 -0.1 3.7 0.0 0.0
Demande intérieure totale 239.5 -1.9 3.0 6.3 -0.6 0.7
Exportations de biens et services 95.7 -6.8 5.4 -0.5 1.9 3.1
Importations de biens et services 95.3 -6.0 6.0 9.0 1.2 2.3
Exportations nettes¹ 0.4 -0.3 -0.2 -3.7 0.3 0.3
Pour mémoire
Déflateur du PIB 1.5 2.5 6.0 4.7 3.1 Indice des prix à la consommation harmonisé _ 0.4 2.1 7.0 5.3 3.1
IPCH sous-jacent³ _ 0.5 1.2 3.6 4.3 3.1 Taux de chômage (% de la population active) _ 7.8 7.6 7.0 7.9 7.8 _ 4.7 2.0 -1.4 -1.2 -1.3
Taux d'épargne nette des ménages (% du revenu disponible)
Solde financier des administrations publiques (% du PIB) _ -5.5 -2.7 -2.5 -3.9 -3.6
Dette brute des administrations publiques (% du PIB) _ 90.8 85.0 84.9 87.2 88.8
Dette brute des administrations publiques, définition Maastricht⁴ (% du PIB)
Balance des opérations courantes (% du PIB)
_ 74.8 72.4 72.2 74.5 76.2
_ 0.7 0.6 -2.6 -2.2 -1.9
1 Contributions aux variations du PIB en volume, montant effectif pour la première colonne
2. Y compris la divergence statistique.
3 Indice des prix à la consommation harmonisé, hors produits alimentaires, énergie, alcool et tabac
4. Selon la définition de Maastricht, la dette des administrations publiques comprend uniquement les crédits, les titres de créance et les numéraires et dépôts, la dette étant exprimée en valeur nominale et non à sa valeur de marché
Source: Base de données des Perspectives économiques de l'OCDE, n° 112
StatLink2 https://stat.link/ut7dec
Après la demande d’adhésion de la Finlande à l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en mai 2022, la Russie a mis fin à ses exportations de gaz et d’électricité à destination du pays. La majeure partie du gaz naturel était importé de Russie, mais cet hydrocarbure ne représente que 5 % de la consommation totale d’énergie, et des projets devant permettre de satisfaire l’essentiel des approvisionnements, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL), sont bien avancés. Cette transition sera difficile pour certains secteurs, mais pas pour les ménages, car leur consommation de gaz est très faible. Un surcroît d’électricité produite localement ou dans les pays voisins a remplacé les importations d’électricité d’origine russe (qui couvraient 10 % de la consommation). Une nouvelle centrale nucléaire fournira à la Finlande 14 % de son électricité lorsqu’elle atteindra sa capacité de production normale cet hiver. Enfin, le pays n’importe plus de pétrole de Russie. Afin de limiter la hausse de prix de l’énergie, le taux de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) passera de 24 % à 10 % de décembre 2022 à avril 2023 (pour un coût de 209 millions EUR) et une aide ciblée sera versée aux ménages durant cette période (pour un coût de 600 millions EUR). Le gouvernement a également mis en place d’autres mesures ciblées dans le domaine des transports qui expireront à la fin de 2023 (900 millions EUR).
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L’orientation de la politique budgétaire est légèrement expansionniste, mais deviendra neutre en 2024
Malgré une large réduction des dépenses liées au COVID-19, l’orientation de la politique budgétaire était légèrement expansionniste en 2022 et le restera en 2023 (sachant que le déficit primaire sous-jacent devrait augmenter de 0.7 point de PIB en 2022 et en 2023) avant de devenir neutre en 2024. Les dépenses supplémentaires adoptées en réponse à la guerre en Ukraine creuseront le déficit budgétaire structurel de 0.8 point de PIB en 2022 et en 2023, mais auront un effet un peu moindre en 2024. Par rapport à 2022, l’essentiel de l’accroissement de ce déficit structurel en 2023 s’explique par le coût de mise en œuvre de la réforme des soins de santé et des services sociaux et par les mesures visant à freiner la montée des prix de l’énergie.
L’économie se dirige vers une récession de courte durée Bridée par la forte inflation et le resserrement des conditions monétaires, l’économie devrait marquer le pas en 2023 puis s’affermir en 2024 lorsque ces freins s’estomperont. La consommation fléchira sous l’effet de la baisse des salaires réels, mais rebondira ensuite sur fond de progression des salaires. L’investissement des entreprises diminuera en raison de l’atonie de la croissance de la demande et du durcissement des conditions monétaires, mais il commencera à se redresser à la fin de 2024 lorsque la conjoncture économique s’améliorera à l’échelle nationale et internationale. La croissance des exportations accusera un recul marqué en raison du tassement de la demande sur les marchés d’exportation de la Finlande, ceux-ci étant sévèrement touchés par la forte réduction des approvisionnements en gaz russe, mais elle se redressera à mesure que d’autres sources d’énergie suppléeront ces approvisionnements et que la demande extérieure repartira. Le taux de chômage devrait culminer à environ 8 % et ne décroître que légèrement d’ici la fin de 2024. L’inflation refluera à 3.1 % en 2024, une fois le choc énergétique dissipé. Les principaux risques intérieurs résident dans la possibilité que l’industrie ne parvienne pas à remplacer la totalité des importations de gaz russe par d’autres sources d’énergie, que la nouvelle centrale nucléaire n’atteigne pas sa capacité de production normale d’ici la fin de 2022, et que les importations d’électricité soient limitées au cours des prochains mois par une diminution de la production d’hydroélectricité en Norvège sous l’effet de la sécheresse. S’ils venaient à se matérialiser, ces risques entameraient la croissance économique.
De nouvelles mesures doivent être prises pour renforcer la viabilité budgétaire et la durabilité environnementale
En 2024, les autorités devraient reprendre leurs efforts d’assainissement budgétaire afin de reconstituer des marges de manœuvre et de placer les finances publiques sur une trajectoire plus viable. Ces efforts devraient viser à ramener le déficit budgétaire structurel à l’objectif à moyen terme, fixé à 0.5 % du PIB. De nouvelles réformes du marché du travail destinées à accroître les incitations au travail et la souplesse du marché du travail contribueraient non seulement à accroître l’emploi et la productivité, mais aussi à assainir les finances publiques. Par ailleurs, le quota obligatoire de biocarburants, qui se traduit par un coût de réduction des émissions très élevé, devrait être abaissé au niveau minimum requis par la réglementation européenne, et, à titre de compensation, il conviendrait d’aligner le prix du carbone utilisé pour calculer les taux de la taxe carbone frappant les combustibles de chauffage sur celui qui est utilisé pour les carburants de transport et, si nécessaire, de relever ce prix. Il serait également souhaitable de créer des instruments permettant d’orienter la culture des tourbières (qui représente 16 % des émissions) vers la paludiculture (c’est-à-dire la culture de tourbières réhumidifiées). Enfin, il faudrait renforcer les mesures visant à réduire la dépendance à l’égard de la voiture dans les grandes villes, tout en veillant à concentrer les aides relatives aux voitures à faibles émissions de carbone dans les zones où l’accès aux transports publics est limité.
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