Mayotte Hebdo n°887

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LE MOT DE LA RÉDACTION

UN PEU D'ESPOIR… Nous sommes entourés d'un océan. Un océan au sens strict, mais aussi un océan de misère. Et au-delà encore se trouvent des pays africains confrontés à l'instabilité, parfois aux guerres. Cette semaine nous l'a encore montré : plus de 60 demandeurs d'asile originaires des Grands Lacs ont débarqué à Mayotte, et une embarcation de Sri Lankais, cette fois, en a fait de même. Cette immigration vers Mayotte, de plus en plus diversifiée, interroge. Le contexte migratoire est déjà tendu et les peurs déjà nombreuses. L'agacement grimpe. Que faire ? Comment ? Existe-t-il seulement une solution ? Notre dossier de la semaine est consacré à cette "nouvelle immigration", essentiellement africaine, mais aussi seulement de passage puisque la plupart d'entre eux s'envolent ensuite vers la métropole. Tous les jours, on le voit sans forcément y faire attention. Le lagon, reconnu comme un des plus beaux au monde, chef d'œuvre de la nature, piste de développement privilégiée de Mayotte, mais pourtant encore sous-exploitée. Les choses pourraient-elles changer ? C'est en tout cas ce que pense Oissioun Bahedja, créateur et gérant de la base nautique Maore

Jet, que nous avons rencontré pour notre rubrique Mayotte et Moi. Après un séjour en métropole, et pourtant promis à des postes à responsabilités, l'homme a choisi de miser sur le développement du tourisme. Il nous raconte son parcours, ses espoirs, et surtout son amour et sa confiance en l'île. Une île qui recèle aussi d'autres trésors. Parmi eux, les fleurs et senteurs qui nous embaument au quotidien. Mais peut-être, là encore, ne le voyons-nous plus ? Pour s'en rappeler, nous consacrons nos pages magazines à cette tradition que sont les colliers et autres apparats en fleurs, une tradition encore bien présente à Mayotte et qui nous fait dire, malgré tout, que nous avons de la chance d'être ici. Enfin, notre entretien est consacré au sport. Nous avons interrogé Mohamed Abaine, le responsable de la Direction de la cohésion sociale, de la jeunesse et des sports au sein du Conseil départemental. Futures infrastructures, volonté politique, Jeux des îles 2027, etc. : il nous dit tout des projets en cours.

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COUP D’ŒIL DANS CE QUE J'EN PENSE

Laurent Canavate

Mayotte Hebdo n°398, vendredi 3 octobre 2008

Séparer le bon grain de l'ivraie 226 millions d'euros de subvention versés par l'Etat pour le fonctionnement des communes sur les cinq dernières années. Avec ces moyens que l'Etat nous a alloués, nous aurions au moins pu faire fonctionner correctement les services de nos municipalités. Au lieu de cela, le copinage, le gaspillage se sont développés. Les factures de téléphone honteuses, les tickets d'essence distribués aux amis, à la famille, les voitures de service adoptées à plein temps, le matériel du service amené à la maison, ont proliféré. De tels actes doivent être condamnés. D'abord par les électeurs, mais aussi par la justice. Ce n'est pas rendre service à Mayotte, à nos quartiers et villages, que de laisser perdurer des pratiques frauduleuses, de tels détournements de l'argent public. La qualité, le sérieux, les compétences ne sont pas visés, les services publics ne sont pas rendus, les jeunes diplômés ne trouveront pas de travail. Il sera occupé par des gens incapables de l'assurer, uniquement placés là par un élu le temps d'un mandat et nuiront ensuite longtemps au fonctionnement de l'institution. Ils bloqueront les projets, les dossiers par leurs incompétences. Ils seront indexés, montrés du doigt, dénigrés, à cause de l'élu qui aura cédé au clientélisme. Tout le monde en souffrira. En fait cela fait des années que ça dure. Il faut refuser de céder à la tentation, à la facilité. Il faut du courage, mais aussi des soutiens. Le Service du transport maritime (les barges) compte du personnel navigant, des capitaines, des agents administratifs… et 81 agents non navigants ! Une très forte augmentation du personnel qui ne s'est absolument pas traduite par une amélioration du service, bien au contraire. Dans ce service comme dans d'autres, un directeur tente de reprendre la boutique en main, mais il lui faut un fort soutien politique. Des services entiers ne fonctionnent pas, ne servent à rien, ne produisent rien en terme de projets, de réalisations concrètes. Des agents, des cadres refusent de faire le travail demandé par leur supérieur hiérarchique, pour des raisons de couleur de peau, d'origine villageoise, de relations familiales, ou parfois parce que le supérieur est bien "inférieur" en termes de compétences, de vision, de connaissance du dossier. Mais il est en place et s'y accroche désespérément, bloquant toute avancée des dossiers…

Le président du conseil général a annoncé qu'il (re)mettrait l'institution en marche, que la culture administrative, le sens du service public seraient mis en avant. Il dispose d'une large majorité. Ce serait tout à leur honneur que d'y parvenir. Beaucoup, en interne comme à l'extérieur l'attendent, l'espèrent. Mais il faut taper du poing sur la table. Il faut licencier ceux qui ne méritent pas d'être payés avec l'argent de nos impôts, avec l'argent des taxes que chacun paye sur sa nourriture, sur tous les biens que nous achetons, chers, parce que les taxes sont lourdes, et portent aussi sur le prix du transport. Beaucoup se plaignent de la cherté de la vie à Mayotte, avec raison, mais les taxes prélevées servent au fonctionnement de la Collectivité et des communes. À payer des centaines de salariés qui ne travaillent pas. Et ceux qui le mériteraient, ceux qui seraient motivés ne sont pas embauchés, ceux qui le mériteraient ne sont pas augmentés. Ils ne sont pas encouragés en voyant certains collègues qui sont payés alors que certains jours ils ne viennent même pas au travail. À cause de ça, des projets ambitieux, indispensables n'arrivent pas à voir le jour. L'État n'est absolument pas exempt de reproches face à cette situation. Il a laissé et laisse faire. Il sait et laisse certaines de nos institutions plonger, sombrer dans l'inefficacité. Il ne dénonce pas, ne condamne pas. L'impunité se répand. L'État ne paye pas ses dettes malgré l'indigence des finances locales et son impact dramatique sur l'économie locale. Il laisse déraper le coût de chantiers importants, laisse traîner des années des dossiers essentiels comme l'état civil. Les communes qui ont peu de moyens les gaspillent allègrement, au vu et au su de tout le monde. C'est la fatalité qui prévaut lorsque certaines pratiques sont connues ou dénoncées. Heureusement, évidemment, il y a dans ces institutions des gens qui travaillent, qui s'investissent, qui ne comptent pas leurs heures. Ils se connaissent, se reconnaîtront aisément. C'est grâce à eux que Mayotte avance malgré tout. Ils sont de plus en plus nombreux, mais leurs efforts pour réussir à faire avancer le mammouth sont colossaux. Ils s'épuisent. On perd beaucoup de temps, d'énergie et de compétences, inutilement. À un moment donné, il faut séparer le bon grain de l'ivraie. Il faut libérer les freins du développement pour que Mayotte puisse avancer. C'est à ce prix là que nous pourrons franchir les prochaines étapes.

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Dans les coulisses de l'aéroport

IL Y A 10 ANS

SANS Z RENDE S U O V

Reportage sur les coulisses de l'aéroport dans le Mayotte Hebdo d'il y a 10 ans. Au menu du voyage : visite du Service local des bases aériennes (SLBA), de la station Météo France, du service de sauvetage et de lutte contre les incendies d'aéronefs (SSLIA) des pompiers, des services de sécurité et de la brigade de gendarmerie des lieux, de la société Mayotte Air Service, de la tour de contrôle, des douanes, etc. Un tour complet de ce lieu emblématique de Mayotte : "La majorité des personnes qui arrivent le font par l'intermédiaire de l'aéroport de Dzaoudzi-Pamandzi. Porte d'entrée de notre île, il est donc la vitrine de Mayotte, ce que les voyageurs voient en premier, mais aussi en dernier quand il la quitte. Tout le monde connaît ce qui se déroule dans la zone publique, les mamans habillées de leurs plus beaux salouvas accueillant chaque gros porteur avec leurs mbiwis et leurs colliers de fleurs, la cohue pour les départs des étudiants et des hadjs ou le chassé-croisé des fonctionnaires entre juillet et août."

MAYOTTE

PARE-BRISE

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Mayotte Hebdo n°430, vendredi 29 mai 2009.

specialiste@mayotte-parebrise.com

"La majorité de la population de Mayotte est jeune. Au dernier recensement de l’Insee effectué en 2012, 60 % de la population avait moins de 25 ans. Cette jeunesse qui est donc une des principales caractéristiques de notre île se sent pourtant délaissée. Mayotte Hebdo a décidé d’aller à la rencontre de jeunes de 13 à 25 ans pour leur donner la parole", entamions-nous ce dossier. Constat : "Ce qui nous a frappés dans notre enquête, c’est qu’elle a une vision pessimiste du présent et surtout du futur. Et une jeunesse qui ne rêve pas, qui ne voit pas l’ombre d’un espoir, qui voit l’avenir en noir, c’est plus qu’inquiétant pour notre île." Autre conclusion : "La classe politique mahoraise est très largement déconsidérée par les jeunes. Accusés de ne s’intéresser qu’à leurs intérêts personnels et de ne pas entendre les besoins exprimés par la jeunesse, les politiciens trouvent très peu grâce auprès des personnes que nous avons interviewées." Et certains tiennent, d'ailleurs des propos très durs.

IL Y A 5 ANS

Parole à la jeunesse mahoraise

Mayotte Hebdo n°661, vendredi 30 mai 2014.

GRAND CHOIX DE LEURRES

LA PHOTO D'ARCHIVE Une baleine bleue à Mayotte

Mars 2007 : petit évènement dans le lagon avec l'observation d'une baleine bleue, le plus gros animal de la planète. Si Mayotte a l'habitude de voir des baleines à bosse, cette espèce en revanche est plus rare dans nos eaux : "Les baleines bleues de l'océan Indien vivent plutôt vers le nord, au niveau des Maldives, du Sri Lanka ou de la mer d'Oman. Celle observée ce lundi devait sûrement monter vers le nord. C'était une petite baleine, elle ne mesurait que… 15 à 17 mètres, l'adulte mesure en moyenne 25 mètres."

PALMES AQUAGYM

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TCHAKS

LA PHRASE

L'ACTION Des élèves formés aux gestes de premiers secours Des élèves de 4ème et de 3ème du collège Zakia Madi, à Dembéni, vont recevoir ce mardi à 16h30 leur diplôme de secourisme PSC1 après une année de formation dispensée dans le cadre de l’Union nationale du sport scolaire. Cette expérience s’est achevée par une immersion chez les pompiers de Mayotte, précise l’équipe de direction du collège Zakia Madi.

"Que tous les regards soient fixés sur l’autorité suprême de l’islam" Younoussa Abaine, directeur de la médiation et de la cohésion sociale au Conseil départemental a résumé en ces termes l'arrivée de l'Aïd el-Fitr qui marquera la fin du mois de ramadan. Mardi 4 juin, le grand cadi par intérim et son "staff" se réuniront dans son bureau central sis à la rue du Collège à Mamoudzou afin de déterminer la fin du jeûne le mercredi 5 ou le jeudi 6 juin en fonction de la vision ou non de la lune. L'objectif est également de centraliser les informations pour mettre au diapason toutes les communes de l’île afin de cesser simultanément le jeûne. Chose qui posait problème les années précédentes.

LE CHIFFRE 9 597 C'est le nombre d'électeurs qui ont voté pour le Rassemblement national (RN) lors des élections européennes, soit 45,56 % des voix.Au total, seuls 22 509 des 78 603 électeurs inscrits sur les listes se sont déplacés, donnant un taux d'abstention de 71,36 %. Du côté des partis traditionnels, c'est le blues : "Coup de massue" pour le vice-président du Conseil départemental sous majorité Les Républicains (LR), Issa Issa Abdou ; "On savait tous qu’avec un discours simpliste et populiste, les habitants en difficulté seraient sensibles [aux arguments du RN, ndlr]", pour le sénateur Thani Mohamed Soilihi,de La république en marche ; ou encore "rejet de la politique conduite dans nos territoires depuis deux ans", pour le député LR Mansour Kamardine. L'Union de la droite et du centre est arrivée deuxième à Mayotte avec 16,76 % des suffrages, suivie de La France insoumise et ses 9,17 %, puis du parti présidentiel avec 8,87 % des votes. Europe Écologie, liste arrivée troisième à l'échelle nationale est chez nous cinquième avec 4,52 %.

LA PHOTO DE LA SEMAINE L'apprentissage pour les élèves en difficultés

Le premier forum de l'apprentissage s'est tenu mardi 28 mai sur la place de la République, à Mamoudzou. Les lycéens mahorais ont pu aller à la rencontre des différents centres de formation, mais aussi des entrepreneurs, pour échanger sur ces cursus professionnels, encore en développement sur le territoire et qui présentent des résultats encourageants.

INSOLITE Un zébu au fond d'un puits

Une intervention peu banale pour les pompiers : vendredi 24 mai, un zébu tombe au fond d'un puits large de trois mètres sur trois et profond d'environ six mètres, situé à deux kilomètres de la route nationale. Les six pompiers appelés ont d'abord tenté d'extirper l'animal à bout de bras, avant de se résoudre à appeler des renforts. Bâché, l'animal a pu être remonté à la surface avec une crode. Il s'agissait d'une femelle en gestation de neuf mois à quelques jours de vêler et pesant quelques 420 kilos. Une belle bête donc, qui aura nécessité l'intervention d'une douzaine d'hommes pendant plus d'une heure.

BE R E V O R P LE Dzitso la munyaho kalihuwa L'œil de ton camarade ne te tue pas 6•

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LE FLOP LE TOP Quinze élèves du lycée de Sada distingués Une première pour le lycée de Sada. Une quinzaine d’élèves de terminale générale de l'établissement – choisis sur dossier – ont été félicités, lundi dernier, pour leur investissement dans le parcours d’excellence de leur établissement. "Seulement quatre élèves ont abandonné durant l’année scolaire. Ce parcours d’excellence vient valider leur investissement au sein de l’atelier Prépa sup, le parcours d’excellence du lycée. Il sert à préparer les élèves aux concours d’entrée dans de grandes écoles ou même aux études supérieures", explique Damien Gautreau, professeur d’Histoire-Géographie au lycée de Sada. Depuis le début de l’année scolaire, ces élèves volontaires ont suivi des conférences, des séances de méthodologie et ont réalisé un dossier de presse qu’ils ont soutenu à l’oral : "Une belle préparation pour les études supérieures !" Ce parcours d’excellence, fort de son bilan, sera reconduit et élargi à des disciplines scientifiques l’année scolaire prochaine.

Le braconnier était le gardien des tortues

Surpris en plein dépeçage de deux tortues vertes, deux hommes ont été interpellés jeudi 23 mai sur la plage de Papani, en PetiteTerre, après avoir tenté de prendre la fuite à bord de deux pirogues chargées de quelque 70 kilos de viande de tortue. Jugés en comparution immédiate devant le tribunal correctionnel de Mamoudzou lundi 27, ils ont écopé d'un an de prison ferme pour l'un et de six mois avec sursis assortis d'une obligation d'effectuer 180 heures de travaux d'intérêt général pour son complice. Ironie du sort : le premier était un employé contractuel du Conseil départemental… en charge… de la protection des tortues sur la plage voisine de Moya. Et ce n'est pas tout : l'association Les naturalistes relève que l'homme avait "déjà été condamné à deux reprises pour des faits similaires" en 2009, pour lesquels il avait été condamné à six mois de prison, et en 2017, où il avait écopé de cinq mois avec sursis commués en travaux d'intérêt général, "qu'il n'avait jamais effectués." Et, comme on n'en est plus à une incohérence prêt : l'agent, laissé libre entre la nuit des faits et le jour de sa comparution lundi, a, de fait, pu "reprendre son travail […] à Moya pendant le weekend." Éloquent.

ILS FONT L'ACTU Ali Ahmed Combo Des parents d'élèves, de l'association L'espoir des enfants de la commune de Ouangani ont déposé plainte contre Ali Ahmed Combo, maire de Ouangani. Ils dénoncent dans un communiqué les rythmes scolaires non appliqués notamment sur les activités périscolaires "alors que les dotations financières sont versées à la commune chaque année", la restauration beaucoup trop sucrée, "les conditions de sécurité et d'hygiène lamentables", la liste est encore longue. Le maire de la commune s'est défendu en criant au complot politique.

Mohamed Majani À la suite de sa condamnation en première instance, en novembre dernier, à un an de prison avec sursis et 12.000 euros d'amende pour délit de favoritisme dans l'attribution du marché public de la mairie annexe de Mamoudzou, le maire Mohamed Majani comparaissait à nouveau devant la justice le 23 mai, des réquisitions d'inéligibilité pour cinq ans, ayant encore une fois, été prises à son encontre. Son avocat a demandé la relaxe à la cour, reconnaissant des erreurs matérielles dans la gestion des dossiers de candidature, mais pas d'intention de nuire, ni trafic d'influence ou escroquerie d'aucune sorte.

AÉRIEN

SOCIÉTÉ

Plus de vols vers Moroni pour Ewa

Refondation du Collectif des citoyens

Suspension des vols vers la capitale de l'Union des Comores pour la compagnie Ewa Air depuis lundi 27 mai. En cause ? "La détérioration d'une antenne relais située à l'est de Moroni, rendant difficile voire impossible, le contact radio entre les équipages techniques de la compagnie mahoraise et les services du contrôle aérien de Moroni", explique la compagnie aérienne. Ses liaisons reprendront une fois "les conditions préalables à la sécurité des vols garanties".

Dans un communiqué de presse, le Collectif des citoyens de Mayotte explique : "Les jeunes leaders du mouvement du Collectif des Citoyens de Mayotte sont allés voir leurs ainé-es, un comité de notables (…).Ce comité de notables a travaillé à la refondation du [Collectif]." Du nouveau, donc, pour l'organisme qui entend faire évoluer l'île en tenant compte de ses habitants. Ainsi, "Une réunion est prévue ce samedi 1er juin 2019 à 7h00 à la MJC de Tsingoni pour l’élection du Bureau du Collectif des Citoyens de Mayotte et pour lancer officiellement le mouvement."

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MAYOTTE ET MOI

Geoffroy Vauthier

OISSIOUN BAHEDJA OBJECTIF LAGON

À 30 ANS, LE JEUNE GÉRANT DE MAORE JET, OISSIOUN BAHEDJA, A DE GRANDES AMBITIONS POUR SON ÎLE. ET POUR Y PARVENIR, C'EST SUR LE POTENTIEL DU LAGON QU'IL COMPTE SURFER. AMENER LES JOIES NAUTIQUES À MAYOTTE : VOILÀ LE DÉFI QU'IL EST EN TRAIN DE RÉALISER. Des deux choix qu'il avait alors, Oissioun Bahedja a fait celui de l'envie. Nous sommes en 2016, et le jeune homme rentrera bientôt à Mayotte, son île natale. Bien que prévu, ce retour lui pose un dilemme : sur place, il est assuré d'avoir un poste au sein d'une agence immobilière associative oeuvrant dans l'accès au logement. Normal : il travaille alors pour l'organisme en métropole, qui s'apprête à ouvrir une agence sur l'île aux parfums. Reconnu pour son professionnalisme, Oissioun est promis, à terme, à exercer des responsabilités au sein de la structure. Mais il a une autre envie : celle d'amener à Mayotte la joie des activités nautiques, découvertes lors de ses études. C'est ce second choix qu'il fera. Deux ans plus tard, son entreprise, première base nautique de Petite-Terre, Maore Jet, née. "Franchement, je ne me voyais pas rentrer ici pour enchaîner le métro-boulot-dodo", se souvient-il. Et puis, Mayotte, c'est son île et "ce sont à ses enfants de se retrousser les manches pour la développer." Un pari sur le lagon et le développement touristique de l'île. Ce n'était pourtant pas ses plans initiaux. Né à Mtsamboro, Oissioun suit en effet un cursus scolaire à Mayotte, puis enchaîne un BEP Technique de l'architecture de l'habitat avant de s'envoler vers Nancy en 2006 pour entamer – et obtenir – un bac pro Assistant en architecture. "J'aimais la conception, le dessin, l'idée de monter et de suivre un projet de A à Z", explique-t-il. Il reste dans cette ville jusqu'en 2011, avant de s'installer à Caen (14) pour "une année sabbatique", puis à Alençon (61) pour suivre une formation de dessinateur projeteur en IUT. Celle-ci achevée, il file ensuite à Paris ou il "enchaîne les boulots en intérim" jusqu'en 2014, avant d'intégrer l'agence immobilière qui lui proposera par la suite un poste à Mayotte. Oui, mais voilà, durant ces années en métropole, l'homme a fait des rencontres. Sociable et amateur de soirées, il sympathise avec des patrons de discothèques. "Un jour l'un d'eux m'a proposé

de lui ramener du monde en échange d'une réduction", rigole-t-il. Il se prend au jeu, et finit par créer son autoentreprise pour organiser des soirées, en parallèle de sa carrière : "ma première expérience de patron." Également, il se rend parfois dans le sud avec des amis et y découvre les joies du jet ski. "Pendant ces années-là, je suis revenu deux fois à Mayotte en vacances, et j'ai constaté qu'il n'y avait rien de tel pour les jeunes ici, alors que nous avons un lagon magnifique." L'idée commence alors à germer. Elle éclora grâce à une autre rencontre. Il raconte : "J'ai sympathisé avec le patron d'une base nautique à Ouistreham (14) et lui ai parlé de ce projet. Il m'a convaincu de le réaliser tout en me guidant dans les étapes, notamment en m'expliquant les diplômes qu'il fallait obtenir et me prenant pour un stage de découverte." Sa décision est prise, et durant un an il intègre l'École française de motonautisme à Arcachon (33). Il en ressort avec son diplôme en 2016, au même moment où né son petit Djaylan. Deux évènements pour une nouvelle vie.

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Photo : Geoffroy Vauthier

L'heure de rentrer a sonné. Dans la poche : un bébé, un projet et… "Seulement 200 euros en poche." Mais son projet de base nautique, il y croît. Installé chez ses parents le temps de le lancer, il passe un an et demi à effectuer les démarches : autorisations, mais aussi financements. "Il y a eu des hauts et des bas, mais j'ai pu compter sur l'énorme soutien de ma famille." Finalement Maore Jet ouvre en août 2018 et cartonne depuis. Une confiance dans le potentiel de l'île accompagnée d'une fierté : "Au-delà du business, je suis porté par l'amour de mon île. Il faut faire savoir à nos jeunes que les sorties en mer, ce n'est pas "qu'un truc de wazungu", comme ils pensent. Nous, on voit la beauté de ces paysages depuis qu'on est né, alors ça nous paraît naturel. Mais en voyageant ailleurs, on se rend compte de la chance énorme que cela représente. Plus qu'une base nautique, j'ai essayé de créer une vitrine du lagon." Pari réussi.. n

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MAYOTTE ET MOI

OISSIOUN BAHEDJA

MON ENDROIT FAVORI "J'aime tout Mayotte, mais la pointe de Mtsamboro est particulière pour moi. Parfois j'y vais en voiture, je me gare, et je regarde les îlots Choizil. Cela me ressource et m'inspire. J'y trouve une vision, des idées pour l'avenir… et de possibles projets."

MON MEILLEUR SOUVENIR À MAYOTTE "L'année dernière, lorsque j'ai grimpé le mont Choungi avec mon cousin, paraplégique, Docteur Léo. C'était la première fois que j'y montais, tout comme lui. On a découvert la vue de là-haut ensemble, tous les deux. C'était un beau défi."

MON ŒUVRE PRÉFÉRÉE "En musique, les morceaux de Rohff. Plus jeune, je me référais beaucoup à ses textes. Il y parle des proches disparus, de sincérité et de volonté. Ils m'ont donné beaucoup de motivation. J'aime aussi les artistes locaux, comme Baco, Komo ou Babadi. C'est mon oncle, j'en profite pour le saluer d'ailleurs (rires). Et puis, il y a aussi l'architecte Bernard Tschumi, qui a notamment dessiné le parc de la Villette, à Paris."

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MA PHOTO MARQUANTE "C'est une photo avec l'animateur de télévision Vincent Lagaf', qui faisait la formation de jet ski en même temps que moi. On était parti boire un café avec ma 307 de l'époque. Il m'avait dit : "Tout est accessible dans la vie, il faut juste s'en donner les moyens." C'est quelqu'un de très humble et de très accessible."

MA BONNE IDÉE POUR MAYOTTE

"Avoir de l'espoir. Il faut mettre le paquet sur le tourisme, laisser la peur et le négatif de côté pour voir le potentiel de l'île, tout ce qui est positif. Il est important de croire au potentiel de cette île, de la faire connaître en bien. Et puis, il ne faut pas se reposer que sur les politiques ou trop compter sur eux. Comme on dit : "Aidetoi, le ciel t'aidera." Ça commence par là."

MAORE JET, OÙ LES JOIES DU LAGON Lancée en août 2018, la base nautique Maore Jet, implantée sur la plage du Faré, en Petite-Terre, s'affirme désormais comme un spot incontournable. Bouée tractée, jet pack, flyboard, jet ski, mais aussi un nouveau modèle de bouée qui sera lancée cet été, l'opérateur cartonne auprès d'un public de plus en plus nombreux. Parmi les activités phares : les randonnées encadrées en Jet Ski sur le lagon : "Une autre façon de découvrir cette richesse." Maore Jet : plage du Faré, Dzaoudzi. Téléphone : 06 39 66 30 89. Site internet : maorejet.com. Page Facebook : Maore Jet.

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LE DOSSIER

LA NOUVEL


Plus de 60 : le nombre de ressortissants des pays de l'Afrique des Grands Lacs arrivés en une semaine fait parler. Si la proportion reste mesurée en comparaison avec les flux migratoires en provenance de l'Union des Comores, Mayotte commence à se demander si cette nouvelle immigration n'en est pas qu'à ses débuts. Dans un contexte migratoire déjà tendu, alors que les esprits demeurent méfiants sur cette question, l'île s'interroge. Pourtant, les circonstances expliquant la venue d'Africains sont différentes : victimes de pressions ou fuyant la plupart du temps des pays en guerre, ces continentaux viennent chercher l'asile. Un précieux sésame qu'ils obtiennent le plus souvent, et qui leur permet de s'envoler ensuite vers la métropole.

AFRIQUE

LLE IMMIGRATION 13

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LE DOSSIER

Solène Peillard

IMMIGRATION

MAYOTTE, LE NOUVEAU RÊVE AFRICAIN ? DEPUIS PLUSIEURS ANNÉES, LES FLUX MIGRATOIRES S'INTENSIFIENT ENTRE LA RÉGION DES GRANDS LACS, EN AFRIQUE, ET MAYOTTE. ILS SONT D'AILLEURS PLUS DE SOIXANTE ORIGINAIRES DE CETTE RÉGION À AVOIR REJOINT LE DÉPARTEMENT EN MOINS D'UNE SEMAINE. CONTRAIREMENT AUX COMORIENS, LES RESSORTISSANTS CONGOLAIS, RWANDAIS ET BURUNDAIS ONT DES CHANCES "ÉLEVÉES" D'OBTENIR LE STATUT DE RÉFUGIÉS, COMPTE TENU DE LA SITUATION DE LEURS PAYS D'ORIGINE. UNE FOIS L'ASILE OBTENU, LA PLUPART D'ENTRE EUX S'ENVOLERONT POUR LA MÉTROPOLE. Leur périple commence en Afrique de l'Est, d'où ils sont originaires. Ils partent du Rwanda, du Burundi ou de la République Démocratique du Congo (RDC). En somme : la région des Grands lacs. Le plus souvent, un avion au départ de Kinshasa, capitale de la RDC, les emmène jusqu'en Tanzanie, parfois au Kenya. De là, certains rejoignent Madagascar, d'autres Grande Comore ou Anjouan, où des kwassas les attendent. Les parcours divergent, pas la destination : cap sur Mayotte, où ils espèrent obtenir le droit d'asile. Une fois arrivés, les démarches administratives peuvent devenir un chemin de croix durant parfois deux ou trois ans, contre un en moyenne dans l'Hexagone. Quoi qu'il en soit, ce précieux sésame leur servira - dans 95 % des cas, selon l'association Solidarité Mayotte, unique structure d'aide et d'accompagnement des demandeurs d'asile sur le territoire - à rejoindre légalement la France métropolitaine. Ils n'ont pas à Mayotte "de dessein d'installation", certifiait il y a seulement quelques jours le procureur de la

République du 101ème département. Jeudi 23 mai, Camille Miansoni a en effet convoqué toute la presse locale pour annoncer la découverte d'un réseau international d'immigration congolaise à destination de Paris. Ce trafic inédit sur l'île serait en place "depuis au moins 2017" et aurait permis à "plusieurs dizaines de personnes" d'arriver en métropole. Des voyages "qui pouvaient coûter 4 000 euros", a encore détaillé le parquet. Au total, cinq têtes du trafic ont été interpellées : une à Mayotte, trois en région lyonnaise et une à Strasbourg. Elles sont mises en examen pour obtention indue de titres ou documents administratifs mais également association de malfaiteurs, faux et usage de faux ainsi qu'aide à l'entrée et au séjour d'étrangers en situation irrégulière en bande organisée

ÉCHAPPER AUX CONTRÔLES EUROPÉENS

"Il faut réagir vite", a prévenu le procureur de la République. Face à "ces territoires qui ont une population

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importante, il y a des risques que cela devienne un circuit ordinaire d'immigration." Si les migrants originaires d'Afrique continentale constituent moins de 2% des étrangers en situation irrégulière à Mayotte, le département représente de plus en plus une voie d'accès privilégiée, car moins contrôlée, pour accéder à la métropole depuis le continent africain. "Plus l'Europe protège le pourtour de la Méditerranée contre ces arrivées importantes (par les routes libyennes et turques, ndlr), plus les migrants vont essayer de trouver d'autres solutions pour accéder au territoire français", commente Romain Reille, directeur de l'association Solidarité Mayotte. "Les programmes de contrôle européens sur les pays de la bande sahelo-saharienne et la corne de l'Afrique bloquent toute cette migration traditionnelle", analyse cette fois Jean-François Cochéril, à la tête du groupe d'enquête et de lutte contre l'immigration clandestine (Gelic), une organisation installée à Mayotte et inédite en France, et qui confie "Ces nouvelles routes migratoires sont absolument astucieuses." En 2018, plus de 1 000 demandes d'asile ont été déposées à Mayotte, a dévoilé ce mois-ci le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, en réponse à une question écrite du député de Mayotte, Mansour Kamardine (LR). Dans le

détail, 55% de ces migrants viennent de la RDC, du Rwanda ou du Burundi, soit 219 personnes de plus que l'an passé. Depuis une dizaine d'années, "la demande d'asile (à Mayotte, ndlr) provient pour moitié de ressortissants de l'Afrique des Grands Lacs", a récemment révélé l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra). L'augmentation est telle que le nombre de demandeurs originaires de cette région d'Afrique aurait "doublé en trois ans", selon la préfecture. Et pour cause : "Les chances d'obtenir une protection de la France sont élevées" pour les Congolais, Burundais et Rwandais, expliquait il y a quelques mois Pascal Brice, alors directeur général de l'Ofpra. En effet à Mayotte, environ deux demandes d'asile sur trois concernant des migrants de l'Afrique continentale étaient acceptées en 2018, contre moins de deux demandes sur dix pour les Comoriens, bien moins nombreux à prétendre au statut.

MIGRANT N'EST PAS RÉFUGIÉ

"Les raisons économiques ne rentrent pas dans le cadre de l'asile", explique le directeur de Solidarité Mayotte. "C'est pour ça que beaucoup de Malgaches ou Comoriens sont déboutés à Mayotte." En 1951, la Convention de Genève fixe les conditions et limites de la protection internationale. Peut ainsi prétendre au statut de réfugié "Toute personne

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LE DOSSIER

qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner". En somme, tout citoyen dont la vie est ou peut être menacée pour des raisons politiques, religieuses, ethniques, sexuelles ou de mœurs, au sein de son pays. "Asile

DES CHIFFRES POUR RÉSUMER LA SITUATION Près de 1 000 demandes d'asile ont été formulées en 2018 depuis Mayotte, soit deux fois plus qu'en 2015. 55 % des demandeurs d'asile proviennent de la région des Grands lacs, majoritairement de la République Démocratique du Congo. À Mayotte, 85 % des demandeurs originaires de la région congolaise du Kivu obtiendraient l'asile, selon Solidarité Mayotte. 95 % des réfugiés des Grands lacs qui obtiennent l'asile à Mayotte partent pour la métropole, selon Solidarité Mayotte. Moins de 2 % des clandestins à Mayotte seraient originaires de l'Afrique continentale. 19 nationalités différentes ont sollicité l'accompagnement de Solidarité Mayotte en 2018, avec une majorité de Congolais. Ils représentent 35 % du public total (soit 269 personnes sur un total de plus de 760 personnes environ). Le nombre d'arrivées depuis la RDC a connu une hausse de 16 % par rapport à l'année précédente. Près de 170 Comoriens ont sollicité l'accompagnement de Solidarité Mayotte l'année dernière, ainsi que 140 Burundais, une petite centaine de Rwandais et cinq Yéménites. Actuellement, l'association Solidarité Mayotte accompagne 1803 demandeurs d'asile en file active, c'est-à-dire toute demandes déposées confondues, quelle que soit l'année.

politique, finalement, ça ne veut pas dire grand chose", clarifie Romain Reille. Dans le cas des Grands Lacs, "Il y a encore des conflits armés, des gens exterminés par des rebelles, une forme de génocide", particulièrement dans la région congolaise du Kivu, limitrophe avec le Rwanda et le Burundi. D'après les observateurs internationaux, les guerres successives qui ont marqué le territoire de 1998 à 2007 auraient fait plusieurs millions de morts – 5,4 selon l'ONG américaine International Rescue Committee, un chiffre contesté par plusieurs démographes. Aujourd'hui, 16 000 casques bleus et 1 300 policiers de la mission de l'Organisation des Nations Unis en République démocratique du Congo (Monusco) y sont encore déployés. En conséquence, le taux d'acceptation des demandes d'asile des ressortissants du Kivu "pourrait s'approcher des 85 %", estime l'association Solidarité Mayotte. Toutefois, tous les Congolais ne sont pas concernés. "Par exemple, ceux de Kinshasa, où il n'y a pas de conflits armés, sont moins susceptibles d'obtenir le statut", poursuit Romain Reille. "Cela dépend des conflits identifiés par le ministère des Affaires étrangères". Pour autant, les seuls natifs de la RDC constituent 35 % des arrivées prises en charge par Solidarité Mayotte en 2018 (soit 269 ressortissants), faisant d'eux le premier public accompagné par l'association, devant les Comoriens

LES COMORES, L'AFRIQUE, ET DÉSORMAIS, L'ASIE Dans son rapport d'activité, la structure note une augmentation annuelle de 16 % concernant les arrivées depuis la RDC, ainsi qu'une importante hausse du nombre de mineurs non accompagnés, là encore, majoritairement congolais et rwandais. Mais "depuis deux ans", ils sont de plus en plus nombreux à arriver seuls dans le 101ème département pour effectuer un "regroupement familial" : "Ces jeunes passent par Mayotte pour rejoindre

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leurs parents qui ont eux-mêmes été en demande d’asile (sur l'île, ndlr) et qui sont devenus refugiés et vivent en métropole", détaille le document. Au total l'année dernière, 19 mineurs dans cette situation ont été accompagnés par Solidarité Mayotte. "Mais il y a aussi des familles complètes qui arrivent et ces derniers temps des personnes âgées, soit parce qu'elles sont menacées, soit pour essayer d'avoir accès aux soins", ajoute le directeur de l'association. Encore très récemment, une embarcation accostait clandestinement sur la plage de Bambo avec à son bord onze adultes et quatre enfants, dont deux bébés, tous originaires de la RDC et du Rwanda. Seulement quelques heures plus tard, onze autres migrants africains débarquaient à Dapani, portant à plus de 60 le nombre d'arrivées de ressortissants des Grands Lacs entre le 22 et le 28 mai. Hasard ou pas, ce même jour, le ministère de l'Intérieur lançait un appel d'offre à quelque 12 millions d'euros concernant des "prestations de transport des étrangers en situation irrégulière par voie routière

MAYOTTE ÉCHAPPE AUX DISPOSITIFS D'ACCUEIL Durant la période d'instruction de sa demande d'asile, tout étranger dispose de plusieurs droits établis par les directives européennes. Mais beaucoup de ces conditions matérielles d'accueil ne s'appliquent pas à Mayotte : lesdites conditions comprennent d'abord une place en hébergement dans un lieu dédié, alors qu'aucun centre d'accueil pour demandeurs d'asile (ou Cada) n'existe dans le 101ème département. Si les Cada hexagonaux disposent de 42 500 places au total, Mayotte n'en propose que 55, à travers le dispositif d'hébergement d'urgence de demandeurs d'asile, ouvert en 2011 par Solidarité Mayotte et réservé aux plus vulnérables. Une solution très largement insuffisante, alors que plus de 1 000 demandes d'asile ont été formulées depuis l'île aux parfums en 2018. Par ailleurs, les demandeurs d'asile peuvent prétendre à une allocation mensuelle d'un montant journalier de 6,80 euros pour un individu seul... Sauf à Mayotte, où ce régime spécial n'existe pas, inscrivant les personnes accueillies "dans des stratégies de survie", regrette le directeur de Solidarité Mayotte. Enfin, l'aide médicale d'État ne s'applique pas dans le 101ème département alors qu'elle permet aux demandeurs d'asile de bénéficier notamment d'une couverture médicale universelle.

DEUX TYPES DE PROCÉDURE Chargé du traitement des demandes d'asile en France, l'Ofpra peut engager une procédure normale, ou une procédure dite accélérée. La principale différence se trouve dans les délais de traitement du dossier : en théorie, une procédure normale dure six mois (bien qu'à Mayotte elle nécessite parfois plusieurs années), alors qu'une procédure accélérée permet à l'Ofpra de statuer sous 15 jours, voire même 96 heures si le demandeur d'asile a été placé en rétention administrative. Ce type de procédure concerne exclusivement les ressortissants de pays considérés "sûrs" par l'Ofpra, au regard des garanties de protection que les autorités étatiques offrent contre les persécutions. Sont également assujettis à une procédure accélérée les ressortissants qui demandent le réexamen de leur demande suite à un premier rejet, ainsi que celles ayant utilisé de faux papiers notamment.

et maritime commerciale dans le cadre des procédures de reconduite aux frontières". Une autre arrivée a particulièrement interpellé les Mahorais. Lundi 27 mai, 18 Sri Lankais débarquaient à Bouéni. Du jamais vu sur l'île aux parfums, alors que La Réunion, elle, connaît une forte hausse des migrants originaires du Sri Lanka depuis plusieurs mois, l’Australie ayant considérablement durci les termes de sa politique migratoire. Au lendemain de leur arrivée, la petite vingtaine de clandestins avaient exprimé leur souhait de demander l'asile, les rendant de fait non-expulsables le temps de la procédure, bien que leur pays d'origine ne soit pas considéré comme "à risques". Autre phénomène moins médiatisé, l'arrivée de ressortissants yéménites. "Nous constatons une hausse du flux des personnes en provenance du Yémen, avec 23 arrivées en 2018, contre une seule en 2017. Le Yémen devient donc le cinquième pays d’origine des nouveaux arrivants", expose le dernier rapport d'activité de l'association Solidarité Mayotte. Ces clandestins ont eux, plus de chances de voir leur demande d'asile aboutir que les Sri Lankais, leur pays d'origine étant frappé par une guerre civile depuis 2015. En quatre ans, 10 000 personnes y auraient trouvé la mort, entre des épisodes successifs de famine et d'épidémies.

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Geoffroy Vauthier

TÉMOIGNAGES

LE DOSSIER

EDGAR, CONGOLAIS

"JE SUIS JUSTE PARTI SEUL, AVEC UN PEU D'ARGENT DE POCHE, EN FRANCHISSANT LES FRONTIÈRES" EDGAR* EST CONGOLAIS ET A VÉCU À MAYOTTE ENTRE 2016 ET 2018, JUSQU'À OBTENIR LE STATUT DE RÉFUGIÉ. IL A ENSUITE PU GAGNER LA MÉTROPOLE, OÙ IL MÈNE AUJOURD'HUI "UNE NOUVELLE VIE." Les évènements ont commencé pour moi en 2016. C'était alors la période des élections présidentielles au Congo et je faisais partie du mouvement associatif et politique de mon pays, pour revendiquer certains droits qui n'existent pas, notamment celui de la liberté d'expression et le droit du pays à changer de régime. Cette annéelà, il y a eu une répression des jeunes leaders d'opinion, qui se regroupaient pour faire des meetings contre le régime. J'en faisais partie et nous avons commencé à subir les pressions des milices privées du chef de l'État, qui mettait des jeunes en prison, voire même les tuait. J'ai moi-même été recherché. Un jour, ces milices privées, armées, sont venues me chercher chez moi, à 4h du matin, en tirant dans la maison. Heureusement, la population alentour a fait qu'ils sont partis, mais j'ai compris que ma lutte pour la démocratie commençait

à menacer mon clan familial. Il a fallu que j'aille me réfugier au sud de la ville, dans mon village. Là se trouvait un leader politique lui aussi opposé au président. Il y a donc eu des bombardements sur ce fief, des chars de guerre et des hélicoptères ravageant le village. J'ai vu des amis à moi décéder sur place, alors que nous menions une lutte politique pacifique. Nous étions à la miavril à peu près. C'est là que j'ai dû organiser ma fuite. J'ai traversé la République démocratique du Congo, puis la Zambie avant de gagner la Tanzanie. Nous étions plusieurs dans notre cas, à avoir quitté nos pays. J'étais alors malade. Je suis resté dans ce pays quelques mois, et puis on nous a alors dit que c'était dangereux pour nous en Tanzanie : que nous pourrions être suspectés de vendre des drogues, par exemple, et qu'il valait mieux partir et rallier Mayotte. C'est là que j'ai entendu parler de cette île, car lorsque je

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suis parti du Congo, mon objectif n'était pas d'y venir. Je cherchais un lieu sûr où attendre que les choses se calment pour revenir. Je ne suis d'ailleurs pas passé par une filière pour quitter mon pays, je suis juste parti comme tout le monde, seul, avec un peu d'argent de poche en franchissant les frontières. En revanche, c'est un réseau de passeurs au sud de la Tanzanie qui m'a permis de rejoindre Mayotte, un mois et demi après avoir fui le Congo. C'était assez cher : 1 000 euros parfois. Mais je me suis dit que Mayotte, c'était la France, les Droits de l'Homme. Nous avons mis deux ou trois jours à traverser. On arrive de nuit aux Comores, mais je ne sais pas où nous étions précisément. De là, ils embarquent d'autres passagers, et partent pour Mayotte. Une fois arrivé, on nous a dit qu'il fallait aller voir l'association Solidarité Mayotte, qu'elle pourrait nous aider et nous guider dans les démarches. D'abord, nous sommes restés en brousse, et puis nous y sommes allés. L'association m'a hébergé et nourrit durant un mois et demi, le temps que je fasse ma demande d'asile à la préfecture. J'avais aussi une petite aide matérielle et pécuniaire pour survivre. Tant qu'on n'a pas de papiers, on ne peut pas travailler, sauf en faisant de petits boulots au noir. Alors on se soutient, avec de petites mutuelles qu'on fait entre nous pour se dépanner. Il faut savoir qu'on doit être convoqué par l'Ofpra sous neuf mois, et si ce délai est dépassé, la préfecture fournit un papier qui nous permet d'aller à la Dieccte demander une autorisation de travail en attendant que la convocation arrive. Mais il faut aussi avoir une promesse d'embauche d'une entreprise, qui doit fournir tous les documents pour prouver son sérieux. Ce n'est donc pas une partie gagnée. Moi, je n'ai reçu ma convocation qu'au bout d'un an et demi, et j'ai eu cette autorisation de travailler parce que j'avais autour de moi des personnes qui m'appréciaient et qui m'ont fait confiance. J'ai donc pu faire de petits boulots légalement. Apparemment, en métropole, les demandeurs d'asile perçoivent une petite allocation en attendant qu'une décision soit prise à leur rencontre, mais ce n'est pas le cas à Mayotte. C'est d'ailleurs pour ça qu'il y a de la prostitution. Mayotte, c'est la galère. Et puis, je dois être objectif : je comprends leur exaspération face à l'immigration clandestine, qu'il n'y a pas de solution pour le moment. Mais il y a une grande xénophobie qui s'installe, et des tensions aussi. Je sentais que je n'étais pas très apprécié. Les Africains ne sont pas très bien vus. Il y a des rivalités. Moi j'ai eu la chance de rencontrer des personnes sympathiques, car j'ai essayé de m'intégrer. Elles m'ont permis d'aller à la plage, de boire des verres. Mais ce n'est pas le cas de tous : beaucoup restent entre eux, ce n'est pas simple. J'ai donc eu mon entretien avec l'Ofpra, durant lequel j'ai raconté mon histoire et pourquoi je pensais que j'étais en danger

dans mon pays. Il y aussi un entretien, après lequel il vérifie les faits. Quatre mois plus tard, on m'a dit que ma demande était acceptée. En suite, il m'a fallu sept mois pour obtenir un extrait d'acte de naissance permettant d'avoir un titre de séjour. Une fois obtenu, j'ai pu obtenir une carte de séjour de 10 ans en tant que réfugié politique, puis un passeport permettant de voyager. Aujourd'hui je suis en métropole. C'est ce que font la plupart des Africains à Mayotte. Il y a beaucoup plus de possibilités ici, les horizons sont plus nombreux. À Mayotte, on est sur île, c'est comme une prison physique en plus d'une prison psychologique, car on attend sans pouvoir bouger ni voyager. J'ai retrouvé ici un peu de liberté. *Le prénom a été changé

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LE DOSSIER

Hugo Coëff

GUILIN, CONGOLAIS

"LA SEULE IDENTITÉ QUE J'AI, C'EST UNE ATTESTATION DE DEMANDE D'ASILE EXPIRÉE DEPUIS LE 19 AOÛT 2018" GUILIN, DIT "COLONEL", EST UN CONGOLAIS DE 33 ANS QUI VIT SUR L'ÎLE AUX PARFUMS DEPUIS AOÛT 2017. ANCIEN PASTEUR EN RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO, IL A DÛ QUITTER SON PAYS POUR FUIR LES AFFRONTEMENTS ENTRE LE MOUVEMENT BUNDU DIA KONGO ET LE GOUVERNEMENT. SON ATTESTATION DE DEMANDE D'ASILE – EXPIRÉE DEPUIS LE MOIS AOÛT 2018 – COMME SEUL PAPIER D'IDENTITÉ, IL N'ASPIRE QU'À UNE SEULE CHOSE : RETROUVER SA FEMME ET SES FILLES. Je suis arrivé à Mayotte le 22 août 2017 pour demander l'asile politique. Je suis né en République démocratique du Congo (RDC). Jusqu'à mes 31 ans, je vivais là-bas. Mais en 2017, des problèmes impliquant politique et religion ont débuté dans mon pays et, au vu de mes croyances religieuses, je n'étais plus le bienvenu. J'étais affilié au chef du mouvement politicoreligieux Bundu dia Kongo (BDK), Ne Muanda Nsemi [opposant et ancien député en RDC, ndlr], dans la branche religieuse. Nous étions des opposants au président Joseph Kabila [en place du 17 janvier 2001 au 25 janvier 2019, ndlr]. Je luttais avec d'autres pour la défense et la protection des droits du peuple. Les combats, entre le gouvernement, donc la police congolaise, et les partisans du mouvement, se sont intensifiés au fur et à mesure de l'année 2017. Moi et les autres membres du mouvement étions tous poursuivis pour ne pas avoir les mêmes idées que le gouvernement en place. J'ai été arrêté assez rapidement en tant qu'opposant. Après un certain temps j'ai réussi, avec quelques autres personnes, à m'évader de prison, le 17 mai 2017 exactement. Je m'en souviendrai toute ma vie. Après cette évasion, mon but était de fuir mon pays et ces combats parce que s'ils m'arrêtaient à nouveau, ils allaient me tuer ! Je cherchais un endroit pour m'exiler politiquement. On m'a alors parlé de la Tanzanie où je me suis rendu quelque temps plus tard. Le problème, c'est que l'asile politique m'a été

refusé tout comme aux Comores plusieurs semaines après. À Moroni, j'ai rencontré un autre Africain qui était dans la même situation que moi. Il m'a décrit l'île de Mayotte, la vie et la possibilité d'obtenir un refuge là-bas. Depuis deux ans maintenant, j'essaye d'obtenir des papiers en règle. Sur l'île, j'ai l'impression que personne ne comprend notre cas. La seule identité que j'ai c'est une attestation de demande d'asile qui m'a été délivrée le 20 novembre 2017, mais qui est expirée depuis le 19 août 2018. On a déjà refusé deux fois mes demandes d'asile. C'est impossible de trouver du travail dans ces conditions. Aujourd'hui, je vis de la vente de légumes pour gagner quelques euros. Ma vie ici n'est vraiment pas facile, mais je m'accroche en pensant à ma femme et mes filles qui vivent encore en République démocratique du Congo. Je les retrouverai un jour, j'en suis sûr. Si j'arrive à régulariser ma situation, j'aimerais rester à Mayotte ou partir en métropole, je ne sais pas encore. Les Mahorais sont anti-Africains. Je pense qu'ils nous en veulent d'obtenir des papiers aussi facilement pour ensuite s'en servir pour voler et agresser. Pourtant, ce n'est pas du tout ce qu'il se passe, nous ne sommes pas ici par volonté, mais par obligation. Vis-à-vis des Mahorais, je reste très respectueux et en retrait pour ne pas les froisser. Je ne déroge jamais aux règles. Ce dont je suis certain, c'est que je resterai sur le territoire tant que ma situation n'évoluera pas.

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Ahmed Ibrahim

LA PEUR DE LA STIGMATISATION

ET AUSSI

NOUS SOMMES ALLÉS À LA RENCONTRE DE QUELQUES CONGOLAIS VIVANT À MAYOTTE POUR EN SAVOIR PLUS SUR CETTE COMMUNAUTÉ. ILS NOUS DONNENT LEUR VISION DE L'ÎLE ET DE LA SOCIÉTÉ MAHORAISE, LEUR PARCOURS EN TANT QU’ÉTRANGERS ICI, ET PARLENT DE LEUR INTÉGRATION. Depuis la découverte d’un réseau d’immigration clandestine concernant des migrants en provenance de la RDC, ces derniers appréhendent le fait d’être pointés du doigt. À Cavani se côtoient plusieurs communautés d’origine africaine. Adrien Mapassi est l'un d'eux. Originaire de Kinshasa, l'entrepreneur de 49 ans, en situation légale, est très proche de sa communauté : "Cela fait maintenant 10 ans que je suis à Mayotte. Je suis marié à une Mahoraise et j’ai donc des enfants mahorais." L'homme dénonce une stigmatisation des Congolais d'ici, arrivés non par choix, mais par la force des choses, la République démocratique du Congo (RDC) étant minée par les conflits. Une peur que les Congolais deviennent les nouveaux coupables de l'immigration clandestine qu'il détaille : "Beaucoup de gens accusent les Congolais, mais ce ne sont pas les Congolais qui ont les bateaux. Les passeurs ne sont pas non plus Congolais. Pour arriver à destination, nous, on paye. Les autorités se focalisent sur les mauvaises personnes. On n'est que des pauvres gens qui ont fui la guerre dans notre pays pour demander asile sur ce territoire français", recadre-t-il. À côté de lui, un compatriote, cette fois en attente d'un retour de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), détaille les difficultés auxquelles il a à faire face. "La régularisation est l’étape la plus difficile, surtout au niveau de la préfecture", explique-til en poursuivant : "Il faut attendre parfois un an pour avoir un retour sur les demandes. Pendant ce délai, on peut se faire arrêter lors des contrôles d’identité, à chaque instant, tous les jours." Et c'est sans compter sur les difficultés pour survivre. En effet, l'association Solidarité Mayotte, la seule à prendre en charge les demandeurs d'asile, ne peut offrir qu'une maigre ressource pécuniaire chaque mois – "30 euros"

– pour leur permettre de s'en sortir. Conclusion de notre interlocuteur : "Il faut plus de structures d’accueil, car c’est insuffisant." "Je n'en veux pas aux Mahorais" Autre quartier, autre rencontre. Dans les rues de Mamoudzou, il est difficile de passer sans remarquer ces nombreux vendeurs à la sauvette d’origine africaine ou, devant la préfecture, ceux qui vont à des rendez-vous administratifs. Gaël en fait partie. Congolais de 30 ans, il roule sa bosse dans les rues du chef-lieu. "De 2010 à 2015, j’ai vécu en Afrique du Sud, où j’ai exercé différents métiers, avec les mêmes problèmes de rejet de l’étranger là-bas qu’ici", racontet-il, qualifiant les Mahorais de "doux" en clamant haut et fort un statut d’artiste. Pour lui, l'exaspération des Mahorais est légitime. "Contrairement à mes compatriotes africains, je n’en veux pas aux Mahorais, car ils sont chez eux", explique-t-il. Il reprend : "En Afrique, c’est pire entre pays voisins. Des gens du Rwanda, lorsqu’ils viennent au Congo, se le font bien remarquer. C'est aussi visible en politique : lorsqu’on nomme un ministre de telle ethnie, les Congolais issus des autres ethnies vont rechercher ses origines dans un pays voisin comme le Rwanda. Alors qu’il est né au Congo." Retour à Cavani, pour laisser Adrien conclure. "Il y a des communautés de la RDC Kinshasa qui sont ici, mais aussi des Rwandais, des Ougandais, des Tanzaniens, des peuples du Maghreb, du Kenya, du Népal, et depuis peu des Srilankais. Alors, je ne vois pas pourquoi on devrait se focaliser sur les Congolais de Kinshasa", défend-il. Et de rappeler : "Nous nous en sortons avec notre propre intelligence" pour, malgré tout, une cohabitation qui se passe bien avec les Mahorais ainsi que les autres communautés, car "vous ne verrez pas un Congolais aller voler ou se retrouver à Majicavo."

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LE DOSSIER

Houdah Madjid

LA COHABITATION FORCÉE D'UN CÔTÉ UNE IMMIGRATION MASSIVE DES COMORES, DES MIGRANTS MALGACHES, DE L'AUTRE UNE IMMIGRATION RÉCENTE DE PLUS EN PLUS RÉGULIÈRE ET ORIGINAIRE DE L'AFRIQUE DES GRANDS LACS. EN PARALLÈLE, CEUX ET CELLES D'ORIGINES ETHNIQUES DIVERSES, MAIS BIEN INTÉGRÉS À MAYOTTE. QU'EN EST-IL DE LA COHABITATION SUR UN TERRITOIRE AUSSI PETIT ? QU'EN EST-IL DES ÉCUEILS DE LA VIE AUJOURD'HUI ET DES ESPOIRS DE LA MIXITÉ DE DEMAIN ? " Je me sens chez moi ici", justifie d'emblée Hamada. Né en Grande Comore, le père de famille est arrivé à Mayotte en début d'année 2000 en quête d'une vie meilleure. D'abord hébergé chez sa famille, Hamada passe de bidonvilles en bidonvilles avant de parvenir à stabiliser sa situation avec un emploi dans le bâtiment. Depuis peu, l'ouvrier demeure dans sa propre maison sise en plein cœur de Mamoudzou. Une réussite sociale pour celui qui a "galéré" et été rejeté à son arrivée à Mayotte."Au début, dans les bidonvilles il n'y avait que des Comoriens. De toutes les îles", se remémore-t-il en poursuivant : "C'est bien plus tard que j'ai vu pour la première fois des Congolais à proximité de la maison de ma cousine à Koungou [où je logeais]. Mais ils n'étaient pas nombreux". Plus en retrait, les nouveaux arrivants se font discrets, mais ne passent pas inaperçus au sein de la communauté comorienne. "Je me rappelle de Bobby*, je l'avais tout de suite repéré. Il est plus grand, plus fort et plus foncé, détaille Hamada. Il n'a pas les mêmes manières que nous non plus". Au début, par altruisme les Comoriens accueillent les arrivants du Continent et les aident à hauteur des faibles moyens de la communauté. Le temps passant, ces derniers se sont adaptés tant

bien que mal à la vie à Mayotte "en allant vendre des oignons par exemple", raconte Hamada. "Ils prennent vite leurs marques et trouvent toujours quelque chose à faire. Des petits boulots dans le coin. Ils sont très débrouillards en dépit des difficultés ici", fait remarquer Hamada. Les années passent et se ressemblent. D'autres Congolais arrivent plus nombreux, ils forment leur propre communauté. Hamada lui, n'a plus revu Bobby depuis des années. "Je ne comprends pas pourquoi les Africains viennent à Mayotte", s'interroge pour sa part Asna Amedi, Mahoraise de 29 ans. La jeune entrepreneuse a vécu en métropole où elle a côtoyé bon nombre d'Africains originaires de plusieurs pays différents, se familiarisant ainsi à de nouvelles cultures. "On se retrouvait dans la culture, la nourriture, on cuisinait ensemble. Il n'y a pas vraiment de grandes différences avec nous". Amoureuse de l'Afrique et assumant ses "origines ancestrales africaines", la jeune mahoraise rêve de poser ses bagages un jour sur le Continent. Mais cette cohabitation, aussi palpitante soit-elle en métropole, ne résonne pas de la même manière à Mayotte pour l'entrepreneuse qui déplore un manque d'intégration. "[L'immigration des Africains] elle est

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là, on la voit. Quand on sort dans la rue, on la voit. C'est une immigration de masse qui arrive d'un coup et qui fait qu'on la voit", explique Asna. "Moi, aujourd'hui, ce qui me dérange c'est qu'ils ne sont pas discrets. Autant les Comoriens viennent et s'intègrent, mais les Africains ne sont pas discrets. Devant mon restaurant, ils parlent beaucoup trop fort, les clients les entendent. Je suis obligée d'aller leur demander de parler moins fort". Idem à son domicile où la jeune femme est voisine avec eux. "Je ne dirai pas que c'est du "tapage", mais c'est presque ça. C'est désagréable." Asna pointe également du doigt un phénomène déjà bien connu à Mayotte : l'entre-soi. Ce microcosme social, elle l'a déjà vu chez "les métropolitains qui viennent ici et qui ne font pas d'efforts pour s'intégrer. C'est la même chose [avec les Africains ] qui restent entre eux." Ses longues locks et sa physionomie, "avec des formes de femme africaine", comme on aime à lui rappeler, lui ont valu à plusieurs reprises d'être prise pour une Sénégalaise ou une Congolaise. Piégeant par moments ses interlocuteurs, qui déballent les avantages de leurs statuts à Mayotte à leur "sœur" avant d'être surpris en pleine conversation de leur entretien avec une Mahoraise. "Ils restent bouche bée d'apprendre que je suis Mahoraise". Des anecdotes aussi drôles qu'embarrassantes pour Asna qui en recense déjà plusieurs. A contrario, la jeune femme ne cache pas sa meilleure entente avec les Comoriens de Mayotte. "J'ai des amis comoriens, je ne ressens pas la différence avec les Mahorais. Ils ne restent pas entre eux. Ils auraient pu être de n'importe quelle origine d'ailleurs, mais ils s'intègrent. Ce qui est dérangeant c'est l'effet de masse et la non-intégration". Et d'ajouter : "Aujourd'hui on est sur une île, pas si riche que ça, si en plus on doit la partager avec des gens qui ne veulent pas partager, c'est un problème. C'est pour ça qu'avec le temps, certains Mahorais éprouvent des

ressentiments envers eux, alors qu'il n y a pas de quoi". Une solution ? "S'il ya des efforts à faire, ils doivent être faits dans les deux sens. La réciprocité est obligatoire sinon ça ne fonctionnera pas" préconise Asna qui redoute d'autres formes d'immigrations massives à Mayotte.

"C'EST TROP, MAYOTTE VA SE PERDRE" "Il y a quelques jours ce sont des Sri Lankais qui sont arrivés clandestinement à Mayotte, dans quelques années ce sera qui d'autres ?", questionne Raquib* chef d'entreprise dans le sud de l'île. Aider les plus démunis oui, les accueillir à Mayotte oui, mais de manière contrôlée préconise ce dernier. "Quand tu demandes une immigration maîtrisée, on te fait passer pour un facho. Mayotte ne peut pas accueillir toute la misère du monde". Une phrase qui fait souvent écho à Mayotte, notamment lors de manifestations. Pour le trentenaire, immigration massive rime avec perte d'identité culturelle. "Mayotte est déjà le fruit d'un métissage important. Nous subissons l'immigration venue des Comores, d'un point de vue culturel ce n'est pas la pire, car nous avons de grandes similitudes avec les îles voisines de l'archipel. Pareil pour Madagascar. Mayotte est très proche de Madagascar. Avec ces iles-là, nous parlons quasiment la même langue, nous mangeons la même chose et nous nous habillons presque pareil", reconnaît Raquib avant de souligner un autre point : "Il y a également le métissage plus récent, qu'apporte la France". Autant de cultures qui se superposent sur ce territoire de 376 km2. Et si d'autres, plus récentes, venaient à s'implanter durablement comme c'est le cas avec les voisins du Continent ? "C'est trop. Mayotte va se perdre". n * Noms d'emprunt

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Houdah Madjid

Photo : Houdah Madjid

ENTRETIEN

"LA FABRIQUE DU CHAMPION EST POUR NOUS UN OBJECTIF IMPORTANT"

MOHAMED ABAINE, RESPONSABLE DE LA DIRECTION DE LA COHÉSION SOCIALE, DE LA JEUNESSE ET DES SPORTS AU SEIN DU CONSEIL DÉPARTEMENTAL 24•

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À la tête de la Direction de la cohésion sociale, de la jeunesse et des sports (DCSJS) au sein du Conseil départemental depuis le mois d'avril 2018, Mohamed Abaine tente de rectifier le tir quant aux anomalies liées au sport à Mayotte. Les espoirs, les futurs projets et surtout les nouvelles infrastructures dédiées aux Jeux des îles de l'océan Indien 2027, auxquels l'île a candidaté pour son organisation.

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Mayotte Hebdo : Quelles sont vos missions au sein de la Direction de la cohésion sociale, de la jeunesse et des sports (DCSJS) ? Mohamed Abaine : Mes missions relèvent du Département dans les champs de la jeunesse et des sports et, depuis avril 2018, de la cohésion sociale. Concrètement, il s'agit d'accompagner le mouvement sportif et associatif dans son évolution. C'est faire en sorte qu'on puisse, au niveau territorial, faire émerger l'excellence sportive avec un accompagnement qui peut être individualisé. Nous avons également une mission de régulation au niveau du territoire en termes d'équipements. Les collectivités ne sont pas toutes dotées de matériel, il y a un déficit abyssal. Il y a un réel besoin de maillage territorial et de régulation afin que les collectivités accompagnent le mouvement sportif. C'est beaucoup plus orienté "local", ce qui est tout à fait normal, alors que nous, nous avons une vision extraterritoriale. Le sport et la jeunesse sont des compétences partagées. La loi NOTRe définit les compétences, mais a délaissé le sport, la jeunesse, le champ de l'éducation populaire et de la vie associative et encore d'autres domaines. Chaque échelle d'institutions, de collectivités peut intervenir. Nous essayons de pallier le déficit sur le territoire. Tout ça n'est pas venu comme ça : depuis longtemps des actions sont menées, mais elles sont structurées seulement depuis 2016. MH : Quelles sont les nouvelles initiatives prises ? MA : Pour la première fois, le Département s'est doté d'une mission d'orientation. Elle est fondée sur quatre axes : le premier est le développement du sport pour tous, qui comprend quatre leviers. Nous avons mis en place un dispositif Sport-santé, dans le cadre d'un appel à projets géré avec l'ARS (Agence régionale de la santé, ndlr), la préfecture, la Direction de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale (DJSCS, service de l'État) et d'autres partenaires. Il s'agit de la traduction de nos orientations. Nous avons également lancé un dispositif Sport et le handicap, un appel à projets lancé conjointement avec la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées de Mayotte, ndlr). Ensuite, nous allons proposer, en juin prochain, un dispositif Sport et femmes,

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"MISER SUR L'EXCELLENCE SPORTIVE" ainsi que Sport et inclusion. Nous avons souhaité lancer des appels à projets pour faire émerger des initiatives associatives. Le deuxième axe porte sur la massification. Nous allons directement intervenir sur le développement du sport à Mayotte. Aider les écoles sportives par exemple. C'est un dispositif que nous avons mis en place depuis novembre 2017. Chacune bénéficie d'un soutien financier en fonction de son nombre de licenciés. Pendant longtemps les clubs – quand ils étaient champions – ne bénéficiaient pas directement des subventions, car elles revenaient aux ligues. Le mois de novembre 2017 a été un point fort avec l'aide aux écoles, la formation des dirigeants et l'aide au fonctionnement. À côté, nous avons mis en place un programme d'échange. Pour la première fois en janvier, le Conseil départemental a adopté le programme des échanges sportifs au niveau régional, mais aussi pour les championnats de France. Avant, cela ne se passait pas comme ça. Aujourd'hui, les crédits sont attribués directement aux clubs et aux bénéficiaires. C'est une bouffée d'oxygène pour ces clubs qui gagnent un temps énorme en termes de crédit et de logistique. Le troisième axe, lui, porte sur l'excellence sportive. Nous accompagnons des jeunes talents depuis 2016 et nous ne comptons pas nous arrêter là. Nous voulons aller beaucoup plus loin. Nous intervenons déjà au niveau des sections sportives et nous allons sous peu élargir le soutien du Département pour les classes à horaires aménagés (CHA, ndlr) tout en renforçant notre soutien aux jeunes talents. Depuis novembre 2017, ils bénéficient d'une aide versée au CREPS (Centre de ressources, d'expertise, et de performance sportive, ndlr). Nous avons également prévu une bourse individuelle, fixée selon un barème, pour amortir leurs frais de déplacement, etc. Accompagner les jeunes en détection, les talents surclassés, dans leur déménagement ou installation dans un club ou dans un centre de formation, accompagner ceux qui sont dans les pôles Espoir et ceux en insertion au haut niveau et surtout, penser à leur reconversion. La fabrique du champion est pour nous un objectif important. On ne fabrique pas un champion en deux jours. Toutes les perspectives citées sont sur dix ans.

Nous avons des réflexions qui sont étalées jusqu'en 2027, sur trois olympiades. MH : Qu'en est-il des équipements sportifs ? MA: Il s'agit du quatrième axe. Le Conseil départemental, dans ses orientations, veut placer les équipements sportifs au premier plan. Ils représentent les conditions de réussite. Notre objectif est d'offrir à nos athlètes les conditions réelles des épreuves sportives de façon continue et permanente. Nous avons souhaité une organisation dédiée, qui est la traduction des orientations citées précédemment, avec bien évidemment des services : un service des sports pour favoriser la pratique sportive, un service pour la promotion de la jeunesse, un service de ressources internes et de compétences, un service de stratégie et politique publique et un dernier lié au soutien fédéral et la gouvernance. Des stratégies vont être mises en place. C'est ce qui a toujours manqué. MH : Quelles sont les stratégies adoptées ? MA : Une première stratégie est le schéma directeur des équipements sportifs, mais ce dernier ne vient pas seul. Il faut un projet sportif territorial. C'est la raison pour laquelle nous avons organisé les Assises du sport (l'année dernière, ndlr) afin de favoriser la concertation. Nous devons tout d'abord réaliser un diagnostic avant de mettre en place des stratégies. Nous avions besoin des Assises pour organiser tout simplement cette grande concertation et nous appuyer avec des outils modernes pour irriguer la réflexion ainsi que les démarches à mener. Les Assises comprennent une AEMO (Action éducative en milieu ouvert, ndlr) que nous avons confiée au Cros (Comité régional, olympique et sportif, ndlr). Afin de rendre les échanges encore plus féconds, nous avons souhaité poursuivre ces échanges de manière permanente. Nous avons donc mis en place, autour de l'AEMO, une plateforme dynamique à l'issue de tables rondes, afin de toucher l'ensemble des acteurs et que tout l'écosystème du sport puisse être impliqué. S'ajoute à cela le plan pour le développement du sport qui est différent du schéma directeur des équipements sportifs. Il porte, lui, sur le développement des pratiques. La deuxième stratégie que nous allons adopter est un plan pour le développement de la jeunesse et de la vie associative. Nous avons une proportion forte de jeunes à Mayotte, estimée entre 55% et 60% sur le territoire. On prévoit d'ici 2050 à peu près 500 000 habitants, les jeunes seraient à peu près 300 000. Si nous n'anticipons pas, nous serons toujours dépassés.

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Nous ne nous sommes pas contentés de dupliquer le Plan national jeunes lancé en 2017. Notre contexte est différent avec une triple insularité : d'abord notre éloignement géographique qui nous éloigne aussi de la dynamique nationale. Nos jeunes ne peuvent pas rencontrer d'autres jeunes d'un niveau supérieur aussi facilement. Il faut dépenser beaucoup plus, faire des démarches, c'est compliqué. Ils sont donc condamnés à tourner dans la région. Une double peine sportivement parlant. Puis, nous sommes en pleine transition institutionnelle. Nous ne savons pas encore quel sera vraiment notre cadre dans cinq ou dix ans, or nous raisonnons en termes d'olympiades. Nous sommes dans un contexte de transition olympique qui est amené à évoluer. Il y a aussi cette insularité sur le plan managérial. Nous ne sommes pas liés aux grandes plateformes, aux grands réseaux de gouvernance nationale. MH : Où se positionne le "champion mahorais" ? MA : Lorsque vous avez de grands champions [chez vous], ils ont des voix, ils sont des référents et sont des vitrines au niveau national. Je prends par exemple le cas de l'Union des Comores. Ils ont des champions dans l'ensemble des disciplines, au niveau national et international. La dernière fois, nous avons accueilli ici l'athlète international Arnaud Assoumani. Les champions sont des ambassadeurs, ils ont des échos chez eux. Nous à Mayotte, en ce qui concerne les Jeux des îles par exemple, nous n'avons eu que 19 médailles au total. Même l'Union des Comores qui était absente en 2015 a plus que nous, avec plus de 24 médailles. Mayotte est en queue de peloton. La Réunion est première avec plus de 650 médailles, suivie de Maurice puis de Madagascar. La gouvernance du sport à Mayotte peine à se développer du fait du manque d'ambassadeur. MH : Qu'en est-il des subventions ? MA : En termes de subventions, les mouvements associatifs n'ont jamais été autant accompagnés. Les subventions ont même été multipliées par deux voire trois. Au-delà de la subvention générale, il y a la subvention sur les échanges qui ont été consolidés par des appels à projets. Depuis janvier 2019, nous avons décidé de renforcer les capacités des comités en mettant à leur disposition des éducateurs avec un financement dédié : 45 000 € par éducateur. MH : Mayotte manque cruellement d'infrastructures sportives, êtes-vous confiant quant à l'organisation des Jeux des îles de l'océan Indien en 2027 ?

MA : Les gens regardent ce [qu'il y a]. Ils se disent qu'il n'y a aucune infrastructure et que nous avons fourni un stade en cinq ans. Avec la réorganisation territoriale et du troisième pôle d'Excellence, nous avons voulu impliquer les politiques publiques afin qu'elles considèrent que le sport est un levier de développement territorial. Des projets sont en cours : la construction à Miréréni, dans le sud, d'un futur centre de formation – le futur CREPS –, un stade et un gymnase olympiques. Au centre, à Ouangani, une salle polyvalente. Au nord, entre Tsingoni et Mtsangamouji, nous avons prévu un gymnase et un stade olympiques. Tous ces éléments seront livrés avant 2027. Ces perspectives vont être reprises dans le schéma directeur. En parallèle, il y a le contrat de convergence qui va être signé avec l'État en juin prochain. Nous avons déjà prévu tous les équipements directement liés aux Jeux : une piscine olympique et le réaménagement des pistes d'athlétisme. Ce sont les deux disciplines antiques et obligatoires. Le plan pluriel d'investissement (PPI, ndlr) du Conseil départemental, comprend un investissement sportif énorme. On parle même d'urbanisation sportive, avec un budget de plus de 100 millions d'euros. Des constructions sont prévues, mais aussi beaucoup de réhabilitation. En 2024, vous ne reconnaîtrez plus le stade de Cavani. Tout autour, réhabilitation et revalorisation architecturale vont être mis en place. MH : Qu'en est-il des supporters, des accompagnateurs, etc., qui sont de potentiels touristes. L'île est-elle parée à accueillir autant de monde d'un coup ? MA : En termes d'équipement structurant, il y a un schéma pour le transport collectif. Quand on accueille 3 000 personnes en même temps c'est compliqué, c'est sûr. Nous sommes en train d'étudier l'hébergement qui ne figure pas dans le contrat de convergence. Le schéma directeur nous le dira. Nous avons imaginé un village d'accueil avec le foncier à Miréréni, qui est à côté du centre de formation. À voir si le schéma va retenir cette hypothèse ou pas. En dehors de cela, nous n'avons pas de structure d'accueil, c'est sûr et certain, mais lorsqu'il y a de grands évènements il y a de grands investissements qui les accompagnent. On peut penser que d'ici là, le schéma de développement du tourisme – qui est en décollage – va prendre en compte l'évènement. À travers ce dernier, nous voulons impliquer l'ensemble des stratégies au niveau territorial. Ce n'est pas encore gagné, c'est un défi. Toute l'intelligence collective est d'articuler et d'harmoniser ces stratégies. C'est l'attractivité de Mayotte qui est en jeu. n

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MAGAZINE

Laureline Pinjon

CULTURE

MONTRE-MOI TES FLEURS, JE TE DIRAI QUI TU ES MAYOTTE, L’ÎLE AUX PARFUMS. CE SURNOM, ELLE LE DOIT À LA FLEUR D’YLANG-YLANG, AUX PÉTALES JAUNES, QUI ORNE LES ARMOIRIES DE L’ÎLE ET PARFUME LE TERRITOIRE DE SES CÔTES À SES SOMMETS. JUSQU’AU DÉBUT DES ANNÉES 2000, MAYOTTE EN FOURNISSAIT AUX GRANDS PARFUMEURS. MALHEUREUSEMENT, PEU RENTABLE, LE BUSINESS S'EN EST FINALEMENT ALLÉ SOUS D'AUTRES CIEUX. MAIS LES FLEURS, ELLES, DEMEURENT OMNIPRÉSENTES SUR L’ÎLE. JASMIN, FRANGIPANIER ET BOUGAINVILLIER COLORENT LES MURS DES MAISONS. SOUS FORME DE BROCHES OU DE COLLIERS, ELLES DÉCORENT LES COIFFURES DES MAHORAISES OU LE COU DES TOURISTES ET DES POLITICIENS EN VISITE SUR L’ÎLE. POUR LES MANZARAKAS, LES MARIAGES, ELLES SONT RÉCOLTÉES PAR MILLIERS AFIN D'HABILLER LES CONVIVES. PLONGEZ DANS UNE DÉCOUVERTE OLFACTIVE DE MAYOTTE POUR COMPRENDRE LA SYMBOLIQUE DES FLEURS QUI NOUS EMBAUMENT.

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À peine a-t-on posé le pied à Mayotte, que le voyageur est accueilli à coups de "caribou !" Un collier de fleurs multicolores se retrouvant rapidement autour de son cou. Ces colliers fleuris sont "un signe de bienvenue et d'accueil", explique Taambati Moussa, considérée comme une des gardiennes du patrimoine culturel et traditionnel de l'île. Mais, au-delà du traditionnel accueil mahorais, les colliers et broches de jasmin sont également omniprésents lors des nombreuses manifestations religieuses qui rythment la vie de la société mahoraise. En tête de liste : les manzarakas. Chaque personne invitée à ces grands mariages a droit à son collier. Autant dire qu'on peut alors les compter par centaines. Mais attention, une certaine hiérarchie s'impose à travers cet art des fleurs. Jasmin, bougainvillier, fleurs de frangipanier : s'il n'y a pas de règles spécifiques pour les simples convives – tant que les colliers sont décorés, colorés et parfumés et, traditionnellement, composés d'au moins quatre boules de jasmin –, il n'en est pas de même pour la famille et les mariés. Ainsi, les parents de l'heureux élu et les hommes importants, eux, ont un collier uniquement confectionné de jasmin blanc qui témoigne d'un statut particulier. Sa mère, quant à elle, et éventuellement ses sœurs, peut également bénéficier du port d'un collier blanc. Généralement, la future belle-mère est aussi revêtue d'une écharpe recouverte de différentes fleurs, et ses filles de grands colliers à double rangs fleuris. Le marié et ses accompagnants ont pour leur part droit à des parures bien spécifiques : les dhouah boina harousse, qui sont des colliers réalisés à partir de jeunes feuilles de cocotier, éventuellement remplacées par une variété de feuilles de palmier. La mariée, elle, est souvent couronnée d'un cerceau de fleurs très parfumées dans sa coiffure. En plus des colliers, les convives peuvent agrémenter leurs toilettes de mariage de kilabou, des broches parfumées où les fleurs sont enfilées sur une épingle à nourrice. Les hommes les portent exclusivement blanches, et des feuilles de basilic se mélangent parfois au jasmin. Celles

des femmes sont plus colorées et faites à partir de roses, de bougainvilliers ou de mimosa local. Les fleurs sont également mises à l'honneur lors d'autres évènements festifs et religieux à Mayotte. "Pour tous les évènements positifs, la fleur de jasmin est présente", explique ainsi une Mahoraise qui passe ces week-ends à tresser des colliers, avant d'ajouter "qu'elle est synonyme de joie et de beauté". On la retrouve donc lors des naissances, pour le maoulida (la naissance du prophète) ou encore lors des danses traditionnelles religieuses mahoraises. Par exemple, la fundi, maîtresse du debaa, est parée d'un collier fait de jasmin et ses danseuses-chanteuses ajoutent à leur salouva un kilabou. Du côté des hommes, le fundi du moulidi est lui aussi décoré d'un collier de fleurs, exclusivement blanches, et ses compagnons de chants de colliers colorés. De nos jours, certaines femmes se préparent également de simples broches pour se rendre au travail, pour le plaisir de parfumer les bureaux.

LA TRADUCTION DU SON STATUT SOCIAL Mais tous ces ornements ne servent pas seulement à décorer : ils ont en effet une symbolique bien précise. C'est particulièrement vrai pour la fleur de jasmin. En Orient, elle est considérée comme le symbole de la beauté et de la tentation féminine. On la retrouve comme fleur emblématique de Tunisie, dans la mythologie hindoue ou encore dans l'Égypte ancienne. À Mayotte, elle est synonyme d'élégance et de séduction. Si les femmes bénéficient davantage de colliers colorés, c'est justement pour séduire. Composés majoritairement de jasmin, les colliers féminins sont enjolivés de plusieurs variétés de fleurs afin d'être le plus odorants possible. "Plus on est parfumée, plus on est séduisante" explique l'une des membre de Jasmine's Flower : senteurs et beauté. Cette association familiale, basée en Petite-Terre, s'est spécialisée dans la réalisation des colliers de fleurs et kilabou pour les manzarakas et autres évènements de l'île. Porter une broche de jasmin fait partie du charme à la Mahoraise, "c'est pour être belle, sentir bon et séduire son homme", continue la confectionneuse de colliers.

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MAGAZINE

Isabelle Bonillo

Jonny Chaduli

Ce n'est pas pour rien que le nom de l'association fait le lien entre senteur et beauté. Mais attention, outre son embaumement sensuel, la fleur de jasmin donne aussi des indices sur la situation amoureuse et/ou conjugale de celui ou celle qui la porte. "Un kilabou de jasmin positionné à droite de la coiffure d'une femme signifie qu'elle est mariée. À gauche, qu'elle est célibataire", explique la jeune femme avant d'ajouter "qu'il en est de même pour les hommes, qui positionnent souvent les kilabous sur leurs épaules." L o r s d u ch i g o m a , d a n s e traditionnelle masculine mahoraise, une fois les pas de danse terminés, les femmes vont à la rencontre de leurs maris pour les décorer d'un collier de fleurs. "Mettre un collier autour du cou de son mari lors d'un chigoma, c'est montrer qu'on est en couple. C'est un peu dire : "lui, c'est mon homme." Si la femme d'un homme qui danse n'est pas présente, on peut se poser des questions sur la situation de leur couple", explique la représentante de Jasmine's flower. À Mayotte, les fleurs traduisent donc le statut social de celui qui les porte. Comme vu précédemment, lors des manzarakas, une véritable hiérarchie se dessine à travers leur port. Le collier prestigieux du marié sert à le différencier des autres convives. Il l'élève à un certain rang et, à partir de ce jour, il pourra "porter des colliers de jasmin blanc, signifiant qu'il est un homme établi dans la société", poursuit l'intervenante. "Le blanc est une couleur valorisante", précise également Taambati Moussa. Un collier de jasmin blanc sert à honorer une personne, montrer son importance, témoigner de son statut particulier. Le nombre compte également. "Plus on a de colliers, plus c'est valorisant. C'est un signe de décoration", commente Taambati. Il nous vient alors immédiatement

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en tête l'image des politiciens, enguirlandés de colliers de fleurs dès leur arrivée ici.

UN BUSINESS FLORISSANT La réalisation de ces décorations requiert un savoirfaire bien particulier, souvent transmis de génération en génération. Chaque collier est ainsi composé de plusieurs boules de jasmin, et une autre est formée à partir d'un assemblage de fleurs enfilées, une à une, autour d'une épingle. "Il faut compter de 10 à 15 minutes par aiguilles pour la réalisation d'une boule de jasmin. D'une à deux heures pour la confection d'un coller de jasmin blanc", atteste-t-on du côté de Jasmine's Flower, où l'on a tout appris de "ses sœurs, mère, tantes et femmes du voisinage." L'activité demande "beaucoup trop de temps, elle n'est pas rentable" pour les professionnels des fleurs, confie Mayotte Pépinières, qui se contente de réaliser des commandes de bouquets et décorations florales. De nombreuses associations ont alors fleuri pour s'occuper de la tâche, comme Jasmine's Flower, qui enregistre des commandes week-ends après week-ends tant la demande est forte. En témoigne le planning de l'association, déjà bouclé jusqu'en septembre, mais aussi des commandes pour l'été 2021 déjà passées ! Elle assure même des demandes pour des mariages hors territoire, comme à La Réunion, par exemple. Mais l'association reste réaliste. Elle n'accepte pas les commandes qui excèdent plus de 30 pièces. En cause : le manque de fleurs. Le petit groupe de femmes compte principalement sur sa plantation personnelle pour la réalisation des produits proposés. Si la matière première manque, elles complètent alors avec des fleurs provenant de chez les autres confectionneuses de colliers, ou se partagent la commande. "On complète en achetant des fleurs ailleurs. Dix euros la boîte de lait pour enfant remplie de pousses de jasmin." Entre ces "mini-entreprises" de tressage de fleurs, pas de concurrence directe : "Si on n'a pas assez de fleurs, ce n'est pas grave, c'est la nature. Dans ce cas, on fait avec ce qu'on peut et on se répartit la commande et les ventes entre nous." Selon l'association, il existerait quatre autres groupes homologues sur l'île. Chez Jasmine's Flower, en PetiteTerre, il faut compter dix euros pour un collier standard et entre 30 et 50 euros pour un collier plus travaillé. Les colliers spécifiques, eux, peuvent avoisiner les 100 euros. Au sud de l'île, à Bouéni, chez Taambati et son association Ouzouri Wa M'troumché (la beauté de la femme, ndlr.) les colliers basiques sont accessibles dès 5 euros, entre 30 et 35 euros pour un collier de marié, et 28 euros pour les parures de jasmin blanc. De manière générale, les familles comptent entre 2 000 et 3 000 euros de "budget fleurs" pour leurs manzarakas. Mais les commandes proviennent également des collectivités

locales. Au Comité du tourisme de Mayotte, par exemple, on passe des commandes à hauteur de centaines d'euros afin d'habiller les officiels. Côté aéroport, enfin, les prix spéculent en fonction du nombre de vols prévus à la journée. Il faut se compter entre 5 et 15 euros pour un collier de bienvenue. Les fleurs ont un rôle socioculturel important à Mayotte. Elles sont soumises à des codes traditionnels précis auquel il ne vaut mieux pas déroger. De la séduction à la mahoraise, à la représentation d'un statut social, elles font le gagne-pain de certaines, tout en embaumant l'île de leur parfums. " n

"L'ÎLE AUX PARFUMS", UN SURNOM VENDEUR Le surnom "île aux parfums" est aujourd'hui utilisée de manière assez récurrente. Mais avant de finir dans les discours touristiques, elle trouve ses racines dans les discours historiques, notamment dans la littérature coloniale. Une analyse qui a été portée par Christophe Cosker, docteur en lettres et sciences humaines, à l'occasion du colloque international sur "Les représentations sociales des îles dans les discours littéraires francophones" organisé au Centre Universitaire de Formation et de Recherche de Mayotte (CUFR) en 2017. Le docteur y expliquait que c'est à l'arrivée des Français que le cliché exotique de Mayotte – l'île aux parfums" – apparaît. Il s'allie rapidement aux représentations esthétiques et érotiques qu'on accorde aux îles dans la littérature, où les senteurs ont une place importante. Pour ne citer qu'un exemple : "Poème exotique" de Charles Baudelaire, où l'auteur décrit une rêverie exotique à travers le parfum d'une femme. Ce cliché sera confirmé avec l'arrivée de Jean-Paul Guerlain à Mayotte, qui créera deux parfums à base de fleurs locales : Mahora et Mayotte. Pour le parfumeur, l'île embaume et se résume à la fleur d'ylang-ylang. Pour les métropolitains, Mayotte sera donc réduite plus généralement à "l'île aux parfums". Aujourd'hui repris en abondance pour vendre Mayotte, l'expression se "relie [à] l’expression 'vitrine de l’océan Indien'", précise Christophe Cosker. "À la manière dont la vitrine d’un magasin cherche à attirer le client pour qu’il entre", l'expression est utilisée pour que les touristes viennent. "Un parfait résumé de l’exotisme de l’océan Indien", selon l'auteur.

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OFFRES D'EMPLOI OFFRES DE FORMATIONS FICHES MÉTIERS TÉMOIGNAGES CONSEILS


LE MÉTIER DE LA SEMAINE

JARDINIER

LE JARDINIER AMÉNAGE ET ENTRETIENT DES ESPACES VERTS (PARCS, JARDINS, TERRAINS DE SPORT, ETC.) ET DES DÉCORS VÉGÉTAUX D'INTÉRIEUR OU D'EXTÉRIEUR (BUREAUX, COMMERCES, HALLS D'ACCUEIL, MURS VÉGÉTAUX, ETC.) SELON LES RÈGLES DE SÉCURITÉ ET LA RÉGLEMENTATION ENVIRONNEMENTALE. IL PEUT AUSSI AMÉNAGER DES OUVRAGES PAYSAGERS, DES OUVRAGES MAÇONNÉS ET INSTALLER DU MOBILIER URBAIN ET COORDONNER UNE ÉQUIPE.

ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL

- Agence et syndic immobilier - Bureau d'études et d'ingénierie - Collectivité territoriale - Entreprise d'insertion - Entreprise du paysage - Infrastructure sportive

COMPÉTENCES

- Sécuriser le chantier et son environnement (signalisation, etc.) - Préparer les sols et les plantations (épandage, semis, récolte, etc.) - Entretenir un élément de décoration - Entretenir un espace extérieur - Tailler les arbres selon l'orientation de croissance ou la forme recherchée et supprimer les branches indésirables - Assurer une maintenance de premier niveau - Entretenir des équipements

ACCÈS AU MÉTIER

Cet emploi/métier est accessible avec un CAP/BEP Agricole en horticulture, travaux paysagers, etc. Il est également accessible avec une expérience professionnelle dans le secteur sans diplôme particulier ou avec un diplôme d'un autre secteur. Un Bac professionnel ou un BTS Agricole en horticulture, travaux paysagers, etc., peut être demandé pour les fonctions d'encadrement. Les recrutements peuvent être ouverts sur contrat de travail saisonnier, à durée déterminée ou sur vacation. Un ou plusieurs Certificat(s) d'Aptitude à la Conduite en Sécurité – CACES – conditionné(s) par une aptitude médicale à renouveler périodiquement peu(ven)t être exigé(s). Les permis BE, C, C1 (précédemment EB et C) peuvent être requis.

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FIAN

JUSTICE CE

Sous l’autorité des responsables des services d’animation, l’animateur d’accueil périscolaire en service civique apportent une aide à la prise en charge des enfants, assistent dans la logistique, la mise en place des activités et la sensibilisation auprès des enfants sur des questions éducative dans les écoles communales, au sein des services animations ou dans les quartiers ou peuvent avoir lieu les activités de loisirs périscolaires. Principales missions : Durant les temps périscolaires : - Accueillir et animer, en toute sécurité, les enfants dans le cadre des accueils de loisirs, - Prendre part aux activités éducatives mises en place par les animateurs pour aider au bon déroulement des activités (jeux de société, activités manuelles, atelier manuelles, atelier d’initiation au sport, etc), - Collecter les repas à l’accueil des enfants dans les établissements scolaires, - Accompagnés les enfants à la prise de repas, les sensibiliser à la lutte contre le gaspillage alimentaire, à la qualité de temps de restauration (discuter, échanger, bien, etc), - Participer aux activités de soutien scolaire en fin de journée par petit groupe d’enfants, Durant les vacances scolaires : - Participer aux animations et activités éducatives des services communaux (Bibliothèque Municipale, Service des sports, Centre de loisirs), Profil : - Jeunes de 16 à 25 ans - Prérequis : aisance à l’oral et à l’écrit minimum - Assidu, organiser, responsable, pédagogue et qualité relationnelle - CAP petit enfance, BAFA ou équivalent souhaité Temps de travail : 24 heures/semaine pour une durée de 10 mois. Rémunération : 107,58 € par mois versée par la collectivité + 470.14 € d’indemnité versée par l’Agence de Services de Paiement(ASP). 14 postes à pourvoir dès le 1er septembre 2019, adresser CV et lettre de motivation à : drh@dzaoudzi-labattoir.fr Date limite des dépôts de candidature le 24 juin 2019.

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OFFRES D'EMPLOI CHARGE DE SURVEILLANCE ET D'URGENCES SANITAIRE (FP2AFS11) (H/F)

CHEF DE PROJET CENTRE BOURG (H/F)

DIRECTEUR D'OFFICE DE TOURISME DE LA 3CO (H/F)

JURISTE

TECHNICIEN PL/TP (H/F)

DELEGATION TERRITORIALE - 976 - MAMOUDZOU L'agent participe à l'ensemble des activités de la cellule de veille , d'alerte et de gestion sanitaires. - Réception et gestion des signaux sanitaires dont ceux issus des maladies à la déclaration

MAIRIE - 976 - BANDRABOUA

Sous la responsabilité et supervision du DGS, appui à la définition des orientations stratégiques, participation à l'élaboration du projet de développement local, et la production d'outils

L OFFICE DE TOURISME DE LA COMMUNAUT D 976 - TSINGONI

Vous possédez un diplôme de niveau supérieur dans le domaine du tourisme et doté(e) de solides connaissances dans la gouvernance d'établissement de type Office de Tourisme

ACFAV FRANCE VICTIMES MAYOTTE - 976 - MAMOUDZOU Le juriste assurera l'aide juridique consistant à donner des informations sur les droits des victimes et le monde judiciaire,les soutenir et les accompagner tout au long de leurs démarches

976 - MAMOUDZOU Recherche: TECHNICIEN PL/TP (H/F) Vous intégrez une société de prestation de services spécialisée dans la maintenance et la réparation mais aussi dans la vente et la location de matériel industriels

INFIRMIER ANESTHESISTE (H/F), MAYOTTE (H/F)

OUTREMER D'ADECCO MEDICAL - 976 - MAMOUDZOU Adecco Medical La division Outremer d'Adecco Medical recrute pour son client, structure hospitalière située à Mayotte un Infirmier Anesthésiste (H/F). Vous intervenez sur le bloc opératoire

INFIRMIER PUERICULTURE (H/F), MAYOTTE (H/F)

OUTREMER D'ADECCO MEDICAL - 976 - MAMOUDZOU Adecco Medical La division Outremer d'Adecco Medical recrute pour son client un centre hospitalier à Mayotte, des IDE puéricultrices ou IDE expérimentées en néonatologie (h/f) pour un CDD de 3 mois

* voir site Pôle emploi


Fiche de poste : Directeur(trice) pôle LVA Missions principales : - Mise en œuvre du projet d’établissement - Gestion et animation des ressources humaines - Gestion économique, financière et logistique - Représentation et promotion Compétences : - Gestion administrative et financière du pôle - Management d’équipe - Conduite du changement - Connaissance de l’environnement et des dispositifs médico-sociaux - Connaissance de la réglementation du champ couvert par l’établissement - Connaissance des problématiques liées au public accueilli - Capacité à développer et entretenir des partenariats - Maitrise des procédés d’évaluation des activités et de la qualité des prestations d’une structure sociale et médico-sociale

Aptitudes professionnelles : - Sens de l’organisation - Capacités d’analyse et d’anticipation - Capacités de décision - Aisance relationnelle - Fortes aptitudes à la négociation - Sens de l’éthique Diplômes requis : - Le CAFDES - Le CAFERUIS : Certificat d’aptitude aux fonctions d’encadrement et de responsable d’unité d’intervention sociale ou DEIS (M2 économie sociale et solidaire) - Master 2 en intervention sociale avec expérience de 3 ans et plus - Justifier d’une expérience significative dans le secteur - Permis B exigé

Le directeur du pôle travaille sous la responsabilité directe de la direction de la structure Ce poste implique des déplacements réguliers sur l’ensemble du département - CDI - Rémunération selon le profil - Début du contrat : dès que possible

Association Messo 85 route nationale de M’Tsapéré , 97600 Mamoudzou Inscriptions : 02 69 62 18 23 – secretariat.direction@messo.fr - MESSO

Fiche de poste :

Directeur(trice) pôle développement économique et social Missions principales : - Mise en œuvre du projet de la structure - Gestion et animation des ressources humaines - Conception, attractivité, développement technique et opérationnel - Gestion économique, financière et logistique - Représentation et promotion

Aptitudes professionnelles : - Sens de l’organisation - Capacités d’analyse et d’anticipation - Capacités de décision - Aisance relationnelle - Fortes aptitudes à la négociation - Sens de l’éthique

Compétences : - Gestion administrative et financière du pôle - Management d’équipe - Conduite du changement - Connaissance de l’environnement et des dispositifs structurants - Capacité à développer et entretenir des partenariats

Diplômes requis : - Master 2 en stratégie de développement/politiques sociales et territoriales - Master 2 en développement économique et social ou équivalent - Justifier d’une expérience significative dans le secteur - Permis B exigé

Le directeur du pôle travaille sous la responsabilité directe de la direction de la structure. Ce poste implique des déplacements réguliers sur l’ensemble du département - CDI - Rémunération selon le profil - Début du contrat : dès que possible

Association Messo 85 route nationale de M’Tsapéré , 97600 Mamoudzou Inscriptions : 02 69 62 18 23 – secretariat.direction@messo.fr - MESSO

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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros 7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 contact@mayotte.hebdo.com Directeur de la publication Laurent Canavate canavate.laurent@mayottehebdo.com Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com Rédacteur en chef Geoffroy Vauthier Rédactrice en chef adjointe Houdah Madjid

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Couverture :

Immigration africaine : point de situation Journalistes Ichirac Mahafidhou Lyse Le Runigo Hugo Coeff Romain Guille Solène Peillard Ornella Lamberti Correspondants HZK - (Moroni) Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan, Thomas Lévy Comptabilité Catherine Chiggiato compta@mayottehebdo.com Secretariat Annabelle Mouhamadi Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0121 I 92960 Site internet www.mayottehebdo.com


le cahier

mploi & formation MINISTERE DE LA TRANSITION ECOLOGIQUE ET SOLIDAIRE AVIS DE RECRUTEMENT SANS CONCOURS FEMME-HOMME ADJOINT(E) ADMINISTRATIF(VE) 1ERE CLASSE DE L’ETAT spécialité comptabilité AU TITRE DE 2019 La Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement de Mayotte recrute, sans concours, un(e) adjoint(e) administratif(ve) 1ère classe – spécialité comptabilité pour le service infrastructures, sécurité, transports à la subdivision territoriale de Kawéni. I – Calendrier :

VI – Constitution du dossier :

Date limite de clôture des inscriptions : le 12 juin 2019

Le dossier devra comprendre obligatoirement : aUne adresse postale, aUne lettre manuscrite motivant leur candidature, aUn curriculum vitae (CV) détaillé indiquant le niveau d’études, le contenu et la durée des formations suivies, les emplois occupés. aun numéro de portable aune adresse courriel.

Date de l’entretien oral et des épreuves pratiques des candidats sélectionnés : les 17 et 18 juillet 2019 à la DEAL Résultats : le 19 juillet 2019 à midi Aucune information ne sera délivrée ni par téléphone, ni sur place. Pour toute information, veuillez utiliser l’adresse de messagerie suivante : ufc.sg.arlcompta.deal-mayotte@developpement-durable.gouv.fr

VII – Date et lieu du dépôt de votre dossier : Votre dossier est à envoyer au plus tard, uniquement par mail, le :

II – Fonctions : 12 juin 2019, à midi, date de clôture des inscriptions à l’adresse suivante : • Organiser la polyvalence entre les 3 comptables du pôle route. • assurer la comptabilité de la subdivision et la continuité de la comptabilité au sein du pôle route (subdivision, parc et ingénierie). • Veiller au suivi de la conformité aux règles de comptabilité publiques. • Saisir et suivre les engagements et mandatements via chorus formulaire. • Saisir et suivre les marchés via les logiciels PLACE et GEMME ; CHORUS • participer au suivi des tableaux de bord financier et de marchés des unités du pôle route.

ufc.sg.arlcompta.deal-mayotte@developpement-durable.gouv.fr Les dossiers incomplets et les dossiers parvenus après la date de clôture des inscriptions ne pourront pas être pris en compte. Un accusé de réception vous sera adressé par retour de mail vous indiquant que votre dossier a bien été pris en compte et sa complétude. VIII – Sélection des candidatures :

III – Qualités requises pour l’emploi et contraintes du poste : • Sérieux, autonomie, sens de l’organisation, disponibilité, capacité d’analyse, savoir développer et mettre en œuvre ses connaissances rédactionnelles techniques et administratives • Connaissance de la comptabilité publique et de l’organisation comptable du MTES/DGITM • Connaissance de la gestion financière des marchés publiques • Connaissance de l’utilisation d’OPEN OFFICE (texte et calcul) • Obligation de présence durant la clôture budgétaire.

Une commission procédera à la sélection des candidatures. La liste des candidats devant être auditionnés sera affichée dans les locaux du siège de la DEAL le vendredi 21 juin à 12h00 Les convocations des candidats retenus à participer à l’épreuve pratique et à un entretien oral avec le Jury, seront envoyées par mail et pourront être également retirées au Bureau des Concours de la DEAL, dès parution de la liste. L’audition des candidats se déroulera de la manière suivante :

I V – Rémunération et statut : Pendant l’année de stage, votre rémunération brute mensuelle sera d’environ 2579 € incluant les primes mensuelles. Vous êtes nommé(e) adjoint(e) administratif(ve) stagiaire, pour une année, au terme de laquelle, si vous donnez satisfaction, vous êtes titularisé(e). V – Conditions générales requises : Pour vous présenter aux épreuves, vous devez remplir les conditions générales d’accès à la Fonction Publique : aavoir la nationalité française ou être ressortissant de l’Union Européenne ajouir de vos droits civiques aavoir un casier judiciaire sans mention incompatible avec l’exercice des fonctions aêtre en situation régulière au regard du code du service national aêtre physiquement apte à l’exercice des fonctions

1 - Entretien oral (durée : 30 minutes maximum) L’entretien oral avec le jury portera sur les expériences personnelles et éventuellement professionnelles du candidat ainsi que sur sa motivation et sa capacité d’adaptation à l’emploi offert. La commission, pendant cet entretien, vérifiera également l’aptitude du candidat à accomplir les missions qui lui seront confiées. 2 – Épreuve pratique (durée : 1 heure) Suite à l’entretien oral, les candidats admissibles passeront une épreuve pratique portant sur les connaissances de l’outil informatique et permettant d’évaluer les qualités comptables du candidat. À l’issue des entretiens, la commission arrêtera le nom du candidat sélectionné (sous réserve de la vérification des pièces justificatives ). Ce dernier sera informé par courrier et par mail. IX – Date de nomination et prise de poste : La prise de poste interviendra à compter du 1er septembre 2019.


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