Mayotte Hebdo n°1074

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LE MOT DE LA RÉDACTION

MAYOTTE LA MAL-AIMÉE ? Des routes bloquées et des manifestants qui défendent leurs intérêts. Ces scènes se déroulent à Mayotte en ce moment, et en parallèle dans l’hexagone. Mais alors que les situations semblent similaires (du moins c’est ce que pensent les « Forces vives de Mayotte »), l’Etat ne les traite pas de la même façon. Le ministre de l’intérieur et des Outremer, Gérald Darmanin, a indiqué qu’il n’utilisera pas la force contre les agriculteurs qui manifestent en France, alors que le préfet Thierry Suquet a tenté de lever de force les barrages. Une confrontation qui a d’ailleurs fait des blessés. Les Mahorais se demandent donc, et à juste titre, s’ils sont considérés comme des citoyens français. Pourquoi le traitement est différent dans le 101ème département ? Mayotte serait-elle la mal-aimée de la République ? Bien évidemment, personne ne répondra clairement à ces questions, mais après les crises consécutives que traverse l’île, c’est l’impression qu’ont les habitants de l’île. Bonne lecture à tous.

Raïnat Aliloiffa

TOUTE L’ACTUALITÉ DE MAYOTTE AU QUOTIDIEN Le premier quotidien de Mayotte Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île. Lu par plus de 12.000 personnes chaque jour, Flash infos vous permet de suivre l’actualité mahoraise (politique, société, culture, sport, économie, etc.) et vous offre en plus un aperçu de l’actualité de l’Océan Indien et des Outremers.

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La soLution aux pénuries d’eau

Le Lagon au patrimoine mondiaL de L'unesCo ?

le sTade de Tsoundzou 1, une pierre pour l’avenir

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Les juridictions renforcées par sept nouveLLes arrivées

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première parution : juillet 1999 — siret 02406197000018 — édition somapresse — n° Cppap : 0921 y 93207 — dir. publication : Laurent Canavate — red. chef : romain Guille — http://flash-infos.somapresse.com

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Économie

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Les appeLs à projets de L'europe

Couvre-feu pour Les mineurs

Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - APE 5813Z - Édité par la Somapresse - Directeur de publication : Laurent Canavate - http://flash-infos.somapresse.com

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Agression à TsimkourA

FesTivAl sAnAA

Trois jeunes condamnés, donT un cousin de la mariée

Quinze arTisTes aTTendus sur scène pendanT Trois jours

première parution : juillet 1999 — siret 02406197000018 — édition somapresse — n° Cppap : 0921 y 93207 — dir. publication : Laurent Canavate — red. chef : romain Guille — http://flash-infos.somapresse.com

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Justice

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Rien à déclaReR pouR cet habitant de chiRongui

les 82 chambRes de l’hôtel ibis style livRées

première parution : juillet 1999 — siret 02406197000018 — édition somapresse — n° Cppap : 0921 y 93207 — dir. publication : Laurent Canavate — red. chef : romain Guille — http://flash-infos.somapresse.com

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tchaks Athlétisme : Alain Guicharousse titré à La Réunion Licencié au club d’athlétisme de Mamoudzou (CAM), Alain Guicharrousse a participé aux championnats régionaux d’athlétisme de lancers longs à Saint-Denis de La Réunion, samedi dernier. Le lanceur de javelot y a remporté le titre masters en catégorie plus de 60 ans (M 60) avec 55m64. Il s’agit du nouveau record national de sa catégorie, puisqu’il améliore de deux mètres celui qu’il détenait depuis avril 2023 (53 m14). « La saison ne fait que commencer et Alain compte bien faire progresser cette marque qui le situe à la troisième place du bilan mondial de sa catégorie pour le moment. Un podium aux prochains championnats du monde masters de cet été à Göteborg (Suède) pourrait même être envisagé. Courage à lui ! », félicite son club.

Le Mahorais Anis Chebani coiffe la concurrence aux poteaux Coiffeur talentueux de Majicavo-Koropa, Anis Chebani vient de remporter le concours Afro Hair Comb, une nouvelle compétition artistique organisée par Afrodya World à Paris. Il s’agit d’une étape de plus dans le parcours du jeune homme de 28 ans qui met toute sa détermination au service de sa création. Portrait. « J’ai vraiment galéré pour participer et quand j’ai réussi, j’ai pleuré. C’était difficile, mais j’y suis arriver. Je voulais juste montrer que Mayotte existe », témoigne Anis Chebani. La première édition, d’Afro Hair Comb, organisée par Afrodya World, offre aux participants l'opportunité de présenter leurs créations artistiques, mettant en valeur l'art capillaire à travers des thèmes liés à la culture africaine et aux tendances contemporaines. Sur 43 participants, il est arrivé à la première place du classement.

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Aurélien Diouf est le nouveau directeur de cabinet du préfet Partie au 1er janvier pour devenir chef de cabinet du ministre Christophe Béchu (Transition écologique et Cohésion des territoires), Marie Grosgeorge laisse sa place à Aurélien Diouf au poste de directeur de cabinet du préfet de Mayotte. Énarque, comme sa prédécesseuse, il était auparavant sous-préfet en Seine-Maritime, en charge de la politique de la ville. Estce qu’il travaillera longuement avec Thierry Suquet ? Rien n’est moins sûr, le préfet de Mayotte depuis 2021 est annoncé partant dans les semaines à venir. Fi – Diouf Préfecture

Bandrélé instaure un couvre-feu à partir du 5 février A partir du 5 février, la circulation sera interdite à Bandrélé entre 22h et 4h du matin. Le maire Ali Moussa Moussa Ben a pris un arrêté dans ce sens, afin « d’éradiquer les nombreux faits de vol et de dégradations commis sur les villages de Bandrélé et de Nyambadao », explique la commune. Les secteurs géographiques faisant l’objet d’une interdiction de circuler prévue à l’article 1 du présent arrêté sont les suivants : -Village de Bandrélé : Au sud du village depuis la descente vers Musicale plage au niveau de l’intersection avec la ruelle Tao Taoujou et au nord du village à la sortie au niveau de l’intersection de la rue Kouyouni. -Village de Nyambadao : depuis l’entrée nord jusqu’à l’entrée sud du village et l’ensemble des rues du village. Pour les particuliers, seuls les déplacements liés à des motifs impérieux de santé, d’urgence médicale, ou d’assistance à personne vulnérable ou de force majeure seront tolérés.

Football : le FC M’tsapéré conserve son titre en Régionale 1 Les Rouges demeurent les champions de Régionale 1 pour une saison de plus. Dans leur duel à distance avec l’AS Rosador de Passamaïnty, ils se sont imposés au terme de l’ultime journée, dimanche dernier. Sur le terrain de foot de Sada, le FC M’tsapéré a effet battu le rival de l’ASC Kawéni (qui termine quatrième), trois buts à deux. Les hommes de Mohamed « Glassman » El Habibou finissent donc à la première place du classement avec 46 points, devant le Rosador (42 points) et l’AS Jumeaux de M’zouazia (36 points). Le promu, l’AS Kavani, finit à une très belle cinquième place (35 points), juste devant le FC Bandrélé (35 points). En bas de classement, les Abeilles de M’tsamboro et le Antéou Poroani descendent à l’étage inférieur.


LU DANS LA PRESSE

Chaque semaine, découvrez le regard porté sur l’actualité locale à travers la presse nationale ou régionale

MAYOTTE : L’ÎLE SOMBRE DANS LE CHAOS Publié le 31 janvier sur Imaz Press.

Délinquance, barricades, routes barrées, violences urbaines… depuis des semaines et des mois, Mayotte s'enfonce toujours plus dans le chaos. Excédée par l'insécurité croissante et le sentiment d'être abandonnée par le pouvoir centrale, la population a décidé de réagir. Parfois violemment ce qui aggrave une situation déjà extrêmement tendue. La députée Estelle Youssouffa a fini par appeler au départ du préfet Thierry Suquet. Ce mercredi 31 janvier 2024, un important rassemblement a lieu à Mamoudzou, la principale ville de la Grande terre. L'objectif étant de rallier le plus grand nombre d'habitants pour hausser le ton face à l'immigration clandestine et à l'insécurité installée dans l'île depuis des années. C'est place de la République que les manifestants se sont rassemblés, peu de temps après avoir érigé des barrages sur plusieurs axes routiers de l'île. La veille, le 30 janvier, une mobilisation forte avait déjà eu lieu à Mayotte où la population avait érigé des barricades sur les routes. Des blocages ont perturbé les services de santé. "Le Centre hospitalier de Mayotte déplore même que 50% de son personnel soit absent, que certaines entreprises ferment jusqu'à nouvel ordre", indique France Mayotte. La population, exaspérée par ces incidents récurrents, demande des mesures concrètes pour restaurer l'ordre public.

La manifestation comme porte-voix Les Mahorais disent n'avoir trouvé que ce moyen pour essayer de se faire entendre des autorités, dénonçant, de fait, l'échec de l'État à assurer leur sécurité. Les habitants sont également excédés du "deux poids, deux mesures" qui existe entre l'Hexagone et Mayotte. En France hexagonale les agriculteurs ont pu, jusquelà, protester sans actions des forces de l'ordre à leur encontre, "alors que les forces de l'ordre s'attaquent à nous" a lancé le collectif Mayotte Forces Vives. Et pourtant, il y a presque six mois, l'opération Wuambushu – visant à lutter contre l'immigration illégale, à décaser et

à lutter contre les violences –, était mise en place. Force est de constater que cette opération – malgré ce qu'exprime le ministère de l'Intérieur – est un véritable échec. Le sentiment que rien ne changera est ancré dans les esprits. Et pourtant, la préfecture se félicite de respecter les engagements pris du gouvernement.

L'association des maires tire la sonnette d’alarme L’Association des Maires de Mayotte a elle aussi pris la parole pour exiger des solutions immédiates afin d'éviter le basculement dans le chaos. Dans un courrier adressé au Préfet de Mayotte, l'Association des Maires exprime son profond mécontentement face à la gravité de la situation dans l'île. La lettre, datée du 24 janvier 2024, souligne le non-aboutissement des demandes formulées précédemment et met en exergue deux préoccupations majeures : la lutte contre l'immigration clandestine et la recrudescence de l'insécurité. L'Association des Maires appelle à un dialogue renoué pour trouver rapidement une issue à la crise qui secoue Mayotte. La députée (LIOT) Estelle Youssouffa a également demandé au Préfet Thierry Suquet de quitter son poste. "Il s'est autofélicité la gestion de la crise à Mayotte, à saluer son propre travail en parlant de la levée des barrages" assure la députée. La députée de rajouter envoyer "les forces de l'ordre contre la population, c'est scandaleux. On aurait voulu que le préfet Suquet ait la même fermeté face aux délinquants et aux criminels qui

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sèment la terreur quotidiennement à Mayotte. Ce n'est pas ce qu'on observe. Il a failli, il est temps qu'il quitte notre île."

Mayotte dans le chaos Des violences perpétuelles, c'est ce que vivent les habitants de Mayotte au quotidien. À Koungou, les journées et les nuits sont rythmées par des affrontements entre forces de l'ordre et individus.

Si les autorités arrivent à endiguer ces violences, elles se déplacent rapidement vers d'autres lieux comme à Majicavo, provoquant des échauffourées à proximité des établissements scolaires. Gabriel Attal, Premier ministre a lui déclaré lors de son discours solennel du 30 janvier 2024, déposer un projet de loi sur Mayotte afin de "faire face aux enjeux exceptionnels auxquels ce territoire est confronté".

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DOSSIER

Blocages à Mayotte :

ça passe ou ça casse CELA FAIT DEUX SEMAINES QUE LE 101ÈME DÉPARTEMENT EST QUASIMENT PARALYSÉ PAR LES NOMBREUX BARRAGES ÉRIGÉS SUR LES AXES ROUTIERS DE MAYOTTE. ET LES FEMMES SONT SOUVENT CELLES QUI SONT AU FRONT, COMME À CHAQUE SITUATION DE CRISE DANS LE TERRITOIRE. L’INITIATIVE A ÉTÉ PRISE PAR CEUX QUI SE FONT APPELER « LES FORCES VIVES DE MAYOTTE ». ALORS QUE LES ÉLUS ET LES REPRÉSENTANTS DE L’ETAT ESPÈRENT UN DÉBLOCAGE RAPIDE, LES MANIFESTANTS RENFORCENT LE MOUVEMENT CHAQUE JOUR. LES NÉGOCIATIONS SONT AU POINT MORT ET CETTE SITUATION COMMENCE À PESER SUR LE QUOTIDIEN DES HABITANTS DE L’ÎLE. MÊME SI UNE GRANDE MAJORITÉ SOUTIENT LE MOUVEMENT, D’AUTRES DÉSESPÈRENT CAR LES PERTES ÉCONOMIQUES SONT IMPORTANTES.

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DOSSIER

Audrey Margerie

REPORTAGE

« LE PRÉFET DEVRAIT ÊTRE UN PÈRE, MAIS IL N’EST PAS UN PÈRE DIGNE »

PASSAMAÏNTY, DEUXIÈME JOUR DE BLOCAGE. UNE DIZAINE D’HABITANTS, ESSENTIELLEMENT DES FEMMES, COUPENT LA ROUTE PRINCIPALE DE LA VILLE, À L’IMAGE DES AUTRES BARRAGES SUR L’ÎLE. ELLES EXPLIQUENT LEUR COMBAT.

« Non, non vous pouvez passer », indiquent un passant et une femme assise sur un banc avec son bébé. Ici, à Passamaïnty, scooters, urgentistes et même quelques voitures passent le barrage filtrant érigé mardi soir malgré l’appel du préfet, vendredi, à lever les barrages. Il est maintenu par une dizaine d’habitants, en soutien avec le mouvement populaire de Mayotte. D’un côté, des poubelles renversées n’entravent pas totalement la route. De l’autre, vers le rond-point de la Poste, une dame au chapeau s’occupe de discuter avec les conducteurs bloqués qui ont quand même choisi de traverser le tronçon. « Tout ce qui est en rapport à la santé, on laisse passer », renseigne une « mama », côté trottoir, assise sur sa chaise de camping, pieds nus sur un tapis, alors qu’une dame qui voulait amener son enfant à un rendez-vous médical est autorisée à circuler. Quelques minutes plus tard, le frigo et ce qui ressemble à une porte vitrée couchés sur le sol sont à nouveau rapidement dégagés pour laisser passer un camion de pompiers. Avant d’être vite replacer sur la route.

« LES MAISONS SONT BARRICADÉES »

« On n’est pas tous là. Une partie est allée à la manifestation à Mamoudzou », informe cette manifestante qui, comme ses camarades, attend les consignes des forces vives pour

connaître la suite du mouvement. C’est son troisième jour de barrage. Avant Passamaïnty, elle bloquait la route de Coconi. « C’est la seule issue pour être écoutés », déclare celle qui présente les « mamas », majoritaires ici, comme des « femmes responsables ». « On ne veut plus des propositions du préfet. Il devrait être un père pour ses enfants, les écouter, mais il n’est pas un père digne. » Elle souhaite des mesures concrètes contre l’insécurité et retrouver son île d’autant. « Il y a vingt ans, on laissait la porte ouverte. Maintenant, à 18 heures, tout le monde s’enferme. Les maisons sont barricadées. Ça fait plusieurs années que nous ne sommes pas allés à la plage pour éviter de se faire agresser. Nos jeunes n’osent même pas faire du sport dehors, on les accompagne. » La raison à tout cela : d’autres jeunes qu’elle rechigne néanmoins à appeler des délinquants. « Si on les appelle autrement, peut-être que ça changera quelque chose », avance-t-elle.

« ON VA FINIR PAR S’ENTRETUER »

« On se sent envahi », abonde une autre manifestante. « Je ne peux plus rester dans la cour de ma maison le soir et suis obligée de tout rentrer, même les chaussures sales pour éviter qu’elles soient volées », lance-t-elle avant de partir chercher son fils à l’école. « On étouffe », reprend une « mama » également assise sur une chaise de camping, une cannette de soda à la main. « 12.000 naissances par an et

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Dans la rue principale de Passamaïnty, un barrage a été érigé mardi soir.

De l’autre côté, près du rond-point de la poste, les manifestants font le tri des personnes qui peuvent passer.

Les barragistes ouvrent le passage pour un camion de pompiers.

l’immigration qui s’ajoute. Comment allons-nous vivre ? On va finir par s’entretuer. » En 2022, l’Institut national de la statistique et des études économiques a fait état de 10 770 naissances, une augmentation de 1,5 % par rapport à 2021. Selon cette barragiste, il faudrait arrêter de délivrer des cartes de séjour et renforcer des contrôles en bateau pour stopper l’immigration. « L’état peut le faire, s’il le veut. » Plus loin, une enceinte diffuse de la musique mahoraise et des jeunes hommes jouent à des jeux de société sur des tables. L’un se dit contre les barrages : « Ce n’est pas bien, nos jeunes ne vont plus à l’école. Et les autres jeunes qui traînent se mettent en hauteur pour instaurer des péages. » Tandis qu’un autre, rentré de métropole il y a un mois

pour des vacances, surveille depuis sa chaise si tout se passe bien. « Mais les mamans font en sorte que ça ne dégénère pas », rassure ce manifestant. D’après lui, la stratégie du barrage est la bonne car elle restreint l’accès à Mamoudzou « où se situe toute l’économie ». Lui aussi pense que le démantèlement du camp de Cavani n’est pas suffisant. « Envoyer des migrants (N.D.L.R : avec le statut de réfugié donc protégés par la France) en métropole montre que Mayotte est une porte ouverte. » Son regret : que les élus ne descendent pas sur les barrages pour discuter directement avec la population. Pour l’heure, aucune autre réunion n’est prévue entre les forces vives et la préfecture.

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DOSSIER

Raïnat Aliloiffa

REPORTAGE

LES MAHORAISES, LES PREMIÈRES AU FRONT

MAYOTTE A CONNU PLUSIEURS CRISES ET PAR LA MÊME OCCASION PLUSIEURS COMBATS. À CHAQUE FOIS, LES FEMMES ONT ÉTÉ LES PREMIÈRES À SE SOULEVER POUR DÉFENDRE LES INTÉRÊTS DE LA POPULATION OU DEMANDER DES COMPTES À L’ETAT. CELA A ÉTÉ LE CAS DEPUIS L’ÉPOQUE DES CHATOUILLEUSES ET C’EST ENCORE LA RÉALITÉ D’AUJOURD’HUI. PREUVE EN EST, LES BARRAGES ÉRIGÉS DANS LES QUATRE COINS DE L’ÎLE SONT ESSENTIELLEMENT TENUS PAR DES FEMMES.

« LES FEMMES ONT TOUJOURS ÉTÉ CELLES QUI MÈNENT LES COMBATS » Elles ne passent pas inaperçues. Souvent vêtues de leurs salouva (tenue traditionnelle mahoraise) et de leurs chapeaux pour se protéger du soleil, les femmes sont à la tête des barrages installés sur les axes routiers de Mayotte. Ce sont elles qui campent également devant la préfecture, matin, midi, et soir, depuis des jours. Certaines dorment même sur place. Leur détermination est sans faille, comme celle de leurs aînées qui ont défendu Mayotte, parfois au péril de leur vie, à l’image de Zakia Madi, une chatouilleuse tuée par balle lors de la séparation entre Mayotte et les Comores. Cette fibre de combattante est restée dans l’ADN des Mahoraises, comme le souligne Anchya Bamana ancienne maire de Sada. « Les femmes ont toujours été celles qui mènent les combats. C’est l’histoire de Mayotte. Si on est français aujourd’hui c’est grâce aux femmes qui se sont soulevées avec Zena M’déré à la tête. » Celle qui n’était qu’une enfant à cette période se souvient que son père Younoussa Bamana, s’est également battu

pour que Mayotte reste française, mais il a été initié par les Chatouilleuses. « Papa me disait tout le temps que c’est Zena M’déré qui est allée le chercher quand le mouvement des femmes a commencé ici dans les années 1950. À l’époque il était affecté aux Comores en tant qu’instituteur », raconte-t-elle. Le combat politique de Mayotte des années 1970 a donc été mené par ces femmes qui utilisaient les chatouilles comme seul arme pour repousser « l’ennemi ». Cependant, elles n’avaient pas été à l’école laïque, et ne maitrisaient pas la langue française. Elles ont donc dû faire appel aux hommes. Aujourd’hui la situation est différente, les femmes sont instruites. Non seulement elles sont en tête de file dans les manifestations et sur les barrages, mais elles ont également leurs places autour de la table lors des négociations avec les représentants de l’Etat ou les élus locaux. À l’instar de Safina Soula, la présidente du Collectif des citoyens de Mayotte (2018). En quelques années, elle a su porter la voix d’une population qui se bat pour vivre dans de meilleures conditions au même titre que les autres Français.

« LES FEMMES MÈNENT LES HOMMES AU POUVOIR » Être sur tous les fronts est une chose, mais faire partie de ceux qui prennent les décisions en est une autre. Force est de constater que

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« QUAND LES FEMMES SONT AU POUVOIR, ELLES ADMINISTRENT LA COMMUNE COMME SI C’ÉTAIT LEUR PROPRE FOYER » les femmes qui sont sur le terrain ne font pas partie des décideurs car elles ne sont pas élues. Un constat amer que partage Anchya Bamana. « Malgré l’instruction des femmes d'aujourd’hui, elles n’ont pas confiance en elles-mêmes. Et si elles n’ont pas confiance en elles-mêmes, comment voulezvous qu’elles aient confiance en d’autres femmes ? », affirmet-elle en dénonçant le fait que la gent féminine ne vote pas pour les candidates lors des différentes élections. « Aujourd’hui s’il y a des élues femmes dans les mairies et au conseil départemental, c’est uniquement parce que la loi exige la parité », ajoute-t-elle. Pourtant, elles seraient derrière chaque campagne électorale. « Les femmes mènent les hommes au pouvoir, en préparant tous les meetings, elles font tout. Le poids des ces messieurs est encore très fort dans les partis politiques », explique-t-elle. Pourtant, elle a été élue en 2014 en tant que maire de la commune de Sada. C’était la première fois qu’une femme accédait à un tel poste à Mayotte. Mais là encore, ce sont les femmes

qui l’ont poussée sur le devant de la scène, selon elle. « Une délégation 100% féminine est venue chez moi pour que je sois candidate à la mairie de Sada. Je ne m’étais pas préparée psychologiquement ni financièrement et en quelques mois elles ont fait campagne pour moi. » Anchya Bamana remporte ces élections mais lorsqu’elle se présente à nouveau en 2020, elle n’est pas réélue. Une déception qu’elle accepte aujourd’hui, mais elle est persuadée que les femmes sont plus aptes à gouverner ou administrer une collectivité. « Quand les femmes sont au pouvoir, elles administrent la commune comme si c’était leur propre foyer. Étant donné que ce sont elles qui font tout dans leurs foyers, alors elles prennent à bras le corps la gestion de la collectivité », selon la fille de feu Younoussa Bamana. Elle souhaite que la situation s’inverse car « les décisions ne se prennent pas dans les barrages. C’est quand on est à la tête des instituions que l’on peut changer réellement les choses. » Et lorsqu’on lui demande si le département se porterait mieux s’il était dirigé par les femmes, Anchya Bamana répond sans hésitation : « Absolument ! Mais les femmes n’ont pas encore compris cela ».

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DOSSIER

Marine Gachet

TÉMOIGNAGES

« AVEC LES BARRAGES, LES SALARIÉS NE PEUVENT PAS VENIR TRAVAILLER » L’IMPOSSIBILITÉ DE PRATIQUER LES ROUTES MET À MAL LES ENTREPRISES MAHORAISES. DEPUIS LE DÉBUT DES BLOCAGES, L’ACTIVITÉ ÉCONOMIQUE EST EN SUSPENS. UNE SITUATION QUI N’A PAS TARDÉ À SE TRADUIRE DANS LES TRÉSORERIES DES SOCIÉTÉS. EXPLOITANT AGRICOLE, COMMERÇANTE ET GÉRANT D’UNE SOCIÉTÉ DE TRANSPORT NOUS RACONTENT. « On ne peut pas se permettre de ne pas travailler. Si on ne travaille pas, on n'a pas de salaire. » Ce cri du cœur, c’est le président de la coopérative laitière Uzuri Wa Dzia, Abdillah Boinaïdi, qui le pousse. Basé à Combani, ce regroupement d’agriculteurs estime ses pertes à 10.000 euros par semaine depuis le début des blocages. Si, au début du mouvement, les collectifs s’étaient engagés dans leur charte à laisser passer le ravitaillement agricole, depuis la recrudescence des blocages et l’arrivée de barrages tenus par des délinquants, cet acheminement est désormais impossible. Les aliments donnés habituellement aux vaches ne pouvant plus être fournis, la production de lait en pâtit. « Ne pas donner aux animaux la ration adaptée engendre une perte qu’on ne peut pas rattraper », déplore celui qui est lui-même exploitant agricole. Si pour le bétail, utiliser du fourrage en guise de nourriture est possible, pour les volailles, ce manque d’approvisionnement met les éleveurs dos au mur. « Certaines vont devoir aller à l’abattoir », confie le président de la coopérative. Mais les dommages ne s’arrêtent pas là selon lui : « Avec les barrages, les salariés ne peuvent

pas venir travailler, donc on ne peut pas collecter, transformer et vendre le lait. Sans cette activité, on est condamné. » Une peur sincère dans ce secteur qui a déjà été fortement impacté par la crise de l’eau. Actuellement, la coopérative qui emploie sept salariés et regroupe neuf éleveurs n’a pas la trésorerie nécessaire pour payer tout le monde à la fin du mois. « C’est tout le secteur qui est en danger. Les entreprises vont fermer à la pelle », alerte Abdillah Boinaïdi, qui rappelle à plusieurs reprises que derrière chaque entreprise, il y a des salariés et leur famille. Loin d’être contre le mouvement qui secoue l’île depuis bientôt deux semaines, il souhaiterait que la situation se débloque pour l’agriculture : « Les revendications sont légitimes, mais cette désorganisation à un réel impact sur nous. »

« ON VA DEVOIR DEMANDER À REPOUSSER LE LOYER » Loin du secteur agricole et de Combani, l’activité économique d’Ylanga Ecoshop est aussi fortement bouleversée par le blocage de l’île. « On n’a fait aucune vente depuis le début du mouvement », explique une de celles qui tient la boutique que la marque

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La coopérative laitière Uzuri Wa Dzia réunit neuf éleveurs et emploie sept salariés.

En raison des blocages, les salariés ne peuvent plus venir sur les exploitations pour transformer le lait.

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DOSSIER

En ce moment, il est compliqué d’acheminer la nourriture nécessaire aux vaches et à la production laitière.

de produits naturels et zéro-déchet vient d’ouvrir, à Chirongui. À peine ouvert en janvier, l’Ylanga Concept Store n’a pas eu le temps de savourer son lancement. « On va devoir demander à repousser le loyer ou à le payer au prorata des jours d’activités », appréhende notre interlocutrice, qui a préféré garder l’anonymat. L’exemple d’Ylanga Ecoshop montre la réaction en chaîne que provoque la cessation des activités d’une seule boutique. L’enseigne qui propose également à la vente des créations d’artisans locaux et un espace salon de thé a dû annuler ses commandes auprès de ses fournisseurs mahorais, ces dernières ne pouvant être acheminées. « Et si nous on annule auprès d’eux, les particuliers, bloqués comme nous, le font sûrement aussi. Donc pour eux aussi c’est compliqué », constate la représentante de la marque. Pour certains, heureusement qu’il y a eu l’activité du mois de décembre. C’est le cas de Transport Citoyen Mayotte, qui propose essentiellement des trajets aux passagers

qui souhaitent rejoindre l’aéroport. Autant dire que depuis le début du mouvement, les véhicules sont restés à l’arrêt et l’activité au point mort. « C’est compliqué parce que c’est notre première année. Mais on a de la chance que cela arrive maintenant, après la période des vacances scolaires durant laquelle on a pu faire pas mal de trajets pour ceux qui partaient en vacances », tempère Soiyiff Mze, dirigeant de l’entreprise. La jeunesse et la taille de cette dernière font que le patron n’a pas encore beaucoup de charge. « On tient bon, il faut se serrer les coudes », appuie celui qui soutient les contestations. Si l’économie de sa société est impactée en ce moment, elle l’est aussi tout au long de l’année par l’insécurité à Mayotte. « Quand il fait nuit le soir ou tôt le matin, c’est compliqué de transporter des passagers en dehors de Mamoudzou à cause de la délinquance. J’ai déjà dû refuser des courses entre l’aéroport et Majicavo par exemple », raconte celui qui espère que les protestations bloquant l’activité actuellement permettront, par la suite, à l’économie mahoraise de se prolonger audelà de 18 heures.

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Avant d’ouvrir son concept store à Chirongui, les produits d’Ylanga Ecoshop pouvaient se retrouver sur les marchés

L’ACTIVITÉ DES TAXIS BATEAUX EN PLEIN ESSOR Les blocages routiers ont permis à une activité de prendre de l’essor : celle des taxis bateaux. Plusieurs prestataires de sorties en mer proposent de faire taxi par le lagon depuis le début du mouvement. “Nous sommes aussi taxi bateau pour vous déplacer par la mer. Tarifs sur demande en fonction des distances. Escales: Mtsamoudou, Sakouli, Iloni, Mamoudzou, Petite Terre”, écrit l’entreprise Lagon Aventure sur son mur Facebook. Et cette proposition a dû prendre, ces derniers n’ayant finalement pas eu le temps de répondre à nos questions, étant sur-sollicités. Pour un taxi bateau à Mayotte depuis le début des barrages, d’après les différents avis de partage de courses sur les réseaux sociaux, il faut compter entre 50 et 100 euros, selon le nombre de personnes à bord. Si certains considèrent que ceux proposant ces services profitent de cette crise pour faire des bénéfices, d’autres y voient une solution bien utile, notamment quand ils doivent rejoindre Petite-Terre pour prendre un vol. À chaque demande son offre.

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DOSSIER

Marine Gachet

DÉCRYPTAGE

QUEL IMPACT ONT LES BARRAGES SUR L’ENVIRONNEMENT ? DEPUIS LE DÉBUT DU MOUVEMENT DE PROTESTATION QUI SECOUE MAYOTTE, PLUSIEURS DÉNONCENT L'ABATTAGE D’ARBRES DANS LE BUT DE CONSTITUER DES BARRAGES ROUTIERS. CETTE ACTION A DE LOURDES CONSÉQUENCES SUR L’ENVIRONNEMENT, MAIS ELLE N’EST PAS LA SEULE ATTEINTE PORTÉE À CE DERNIER EN RAISON DES BLOCAGES. Les arbres abattus ornent une grande partie des barrages qui ont été érigés sur l’île. Cela n’a pas manqué d’en faire réagir certains, dénonçant cette attaque à l’environnement. “J’ai vu un barrage à Chirongui fait avec des arbres. J’ai aussi constaté que plusieurs avaient été abattus tout le long de la route dans le Sud. Déjà qu’on suffoque avec la chaleur et en plus de ça, on coupe les arbres qui peuvent nous oxygéner”, déplore Toihir*, un habitant. Dans le Nord, même constat. “Mon village, M’tsangadoua, à M’tsamboro, a été barré sur une de ses sorties par des arbres. J’en ai également vu qui avaient été coupés sur plusieurs trajets que j'ai eu l'occasion de faire à une quinzaine de minutes de mon domicile”, regrette Quentin*, qui s’évertue à sensibiliser ses élèves à la nature et à sa préservation. Ce dernier a souhaité diffuser des informations sur l’importance des arbres sous les publications concernant les barrages sur Facebook. “Je mets des commentaires un peu partout dans l'objectif de faire pousser quelques graines dans certaines têtes et surtout d'expliquer pourquoi il ne faut pas couper les arbres”, indique-t-il. “Les arbres sont indispensables pour la ressource en eau” À cause de la déforestation, il est interdit de couper des arbres à Mayotte sans autorisation. Car ces derniers ont un réel intérêt dans la préservation de l’environnement. Leurs racines, par exemple, aident l’eau à s'infiltrer dans le sol et à être retenue. Moins il y a d'arbres, plus l’eau douce de la pluie se déverse directement dans le lagon, où elle n’a plus l’utilité qu’on lui confère et pour nous, et pour le reste de la biodiversité. “Les arbres sont indispensables

pour la ressource en eau, mais aussi pour la ressource en nourriture”, indique Madi Ali, le président de la Fédération Mahoraise des Associations Environnementales (FMAE), qui ne supporte pas de voir des manguiers coupés pour bloquer les routes. Il dénonce fermement cette pratique et demande à ce qu’elle cesse. Pour la nature, mais aussi pour la population. “Les arbres préservent les sols et freinent l’érosion. En plus, ce sont surtout des arbres coupés directement au bord des routes. Il y a un risque de glissement de terrain”, soulignet-il comme danger. De lourdes conséquences qui n’en valent pas la peine pour Quentin : “Je ne trouve pas nécessaire de couper un arbre qui a poussé pendant cent ans pour une semaine de manifestation, sachant qu'il y a d'autres moyens de bloquer les routes.” D’autres moyens, il y en a. Les conteneurs par exemple. Mais là aussi, leur utilisation pour les barrages a démontré qu’avec une gestion inadaptée, l’environnement pouvait être atteint. Ce mardi, une vidéo montrant des conteneurs être mis à l’eau dans le lagon à Bandraboua a circulé sur les réseaux sociaux. Ces conteneurs avaient été utilisés pour former un barrage, et c’est après le démantèlement de celui-ci que des agents de la direction de l’Environnement, de l’Aménagement, du Logement et de la Mer de Mayotte (DEALM) les auraient poussés à la mer. « Mayotte n’est le dépotoir de personne. Quel exemple montre-t-on ? », s’indigne le président de la FMAE, qui rappelle que le lagon nourrit la population et le tourisme. Contactée sans succès mardi en début de soirée et mercredi matin, la DEALM, n’a pas

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L’utilisation d’arbres pour les barrages est dénoncée par plusieurs habitants de l’île.

« JE NE TROUVE PAS NÉCESSAIRE DE COUPER UN ARBRE QUI A POUSSÉ PENDANT CENT ANS POUR UNE SEMAINE DE MANIFESTATION »

souhaité s’exprimer sur le sujet par manque de temps : « Allez voir un peu la situation des agents… », nous dit-on avant de raccrocher. Certains de ces derniers auraient été pris pour cible depuis le début du mouvement de contestation alors qu’ils s’occupaient de nettoyer les points de barrages. Du côté de l’adjoint à la sécurité de Bandraboua, Daoud Soudjaye, pas beaucoup plus d’informations. On nous confirme néanmoins que les conteneurs vont être retirés du lagon. “Et s’il y avait eu des hydrocarbures ou des métaux lourds dans ces conteneurs ?”, soulève Madi Ali, qui condamne fermement ce qu’il définit comme “un crime” envers la biodiversité du lagon. La collecte des déchets bloquée Les tensions que font peser les blocages sur l’environnement ne s’arrêtent pas là. Du côté du

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DOSSIER

Des conteneurs ayant servi aux barrages ont été jetés dans le lagon à Bandraboua par les services de l’Etat.

« MAYOTTE N’EST LE DÉPOTOIR DE PERSONNE » Syndicat intercommunal d'élimination et de valorisation des déchets de Mayotte (Sidevam), on nous indique qu’en dehors de Mamoudzou, le ramassage des déchets est bloqué. “Les camions de collecte et les camions de transit entre les quais de transfert et le centre d’enfouissement n’arrivent pas à se déployer”, constate le directeur du Sidevam, Chanoor Cassam. À Mayotte, après avoir été collectés dans les villages, les déchets sont acheminés vers des quais de transfert, où ils sont tous

rassemblés avant d’être envoyés vers le centre d’enfouissement, situé à Dzoumogné, dans la commune de Bandraboua. Sans ce circuit, les détritus vont stagner dans les points de collecte et les rues. Or, ces déchets non traités risquent de se retrouver dans la nature et le lagon, d’autant plus avec les pluies qui favorisent leur voyage. Si à Mamoudzou, les camions peuvent passer, la ville pourrait bien ne pas être épargnée par l’arrêt de la collecte des déchets. Les

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Andrian Toilibo, directeur général d’Enzo Recyclage, lors d’une visite du site de son entreprise qui collecte les déchets à Mamoudzou pour la Cadema. Image d’archive.

deux quais de transfert de la commune, celui d’Hamaha au nord et de Kahani au sud, vont bientôt arriver à saturation, les fruits des ramassages ne pouvant plus être évacués vers Dzoumogné. “On a des quais de transfert en sur-stockage”, indique Chanoor Cassam, qui ne veut pas non plus alerter trop rapidement, affirmant que les quais peuvent tenir encore quelques jours. Si ces derniers ne peuvent plus accueillir de nouveaux déchets, la collecte à Mamoudzou risque, elle aussi, d’être à l’arrêt. C’est ce que nous indique Andrian Toilibo, directeur général d’Enzo Recyclage, dont l’entreprise

collecte les déchets à Mamoudzou pour le compte de la Cadema. “Soit il va y avoir une zone tampon où on mettra les déchets en attendant, soit la collecte ne pourra pas se faire”, redoute-t-il face au constat d’un quai de transfert d’Hamaha surchargé. L’environnement ne ressortira pas indemne de ce mouvement de contestation. Au moins, la circulation entravée et la diminution des embouteillages aura peutêtre permis de diminuer le nombre de particules fines émises par les pots d’échappement.

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DOSSIER

Marine Gachet

TÉMOIGNAGES

« UNE MINORITÉ NE PEUT PAS DÉCIDER POUR LE RESTE DE LA POPULATION »

L’AVIS DE CEUX QUI NE SONT PAS SUR LES BARRAGES EST DIVISÉ. D’UN CÔTÉ, CEUX QUI SOUTIENNENT CE MODE DE CONTESTATION, ARGUANT QUE LA POPULATION NE SERA PAS ÉCOUTÉE SINON, DE L’AUTRE, CEUX QUI PENSENT QUE CETTE STRATÉGIE EST INEFFICACE VOIRE NÉFASTE POUR L’ÎLE.

« À Mayotte, on a tout essayé et on ne nous entend pas ! Nous sommes fatigués. Sortir de chez nous avec la boule au ventre tous les jours, c’est invivable. Si tout bloquer est le seul moyen de se faire entendre, je soutiens ce mouvement à cent pour cent », déclare Naira*. Bien que son travail se retrouve impacté par les blocages, les tâches étant rendues compliquées par le manque d’effectif, elle n’en démord pas : « Je continuerai à soutenir ce mouvement quoiqu’il en coûte ! » Même son de cloche du côté d’Ibrahim*, qui désespère que la voix des Mahorais résonne un jour aux oreilles de l’État. « Avec tout ce qu’il se passe à Mayotte, entre la délinquance et les arrivées de kwassa, on est obligé de soutenir les barrages pour montrer notre mécontentement », regrette-t-il. « Que ça soit Mahorais, Métropolitains, Comoriens en règle et autre nationalité, tout le monde en a marre de vivre dans cette merde », lâche Ismael*, à bout. Pour lui aussi, les barrages se présentent comme l’unique solution pour attirer l’attention des pouvoirs publics et que le problème de l’insécurité soit réglé. « On souffre à Mayotte, l'État français a abandonné la population à la vue de tous », poursuit-il. Une colère d’autant plus vive lorsqu’il voit comment les services de l’État gère les barrages : « Contre les vrais délinquants, l’État ne fait rien, mais contre une population

qui manifeste son ras-le-bol de vivre dans l’insécurité totale, voilà qu'il nous montre quels moyens militaires ils ont pour nous empêcher de manifester. »

« JE SUIS POUR QU’ON OUVRE LES BARRAGES » Mais tous les Mahorais ne soutiennent pas les blocages. Yousra* ne peut plus faire les trajets de Coconi à Iloni pour se rendre au travail. Mais plus important pour elle, son petit frère manque des cours, alors qu’il doit passer le brevet des collèges cette année. “Cela impacte son éducation. Je suis pour qu’on ouvre les barrages”, déclare-t-elle. Hadidja*, elle aussi, est bloquée chez elle, à Chiconi, aux dépens du stage auquel elle doit se rendre à Mamoudzou pour valider sa licence. “Je suis contre les blocages parce qu'au bout d'un moment ça va se retourner contre nous, et que les délinquants pourraient s'en prendre aux gens qui sont dans les barrages”, avance celle qui pense que le démantèlement de ces derniers par les forces de l’ordre est sûrement nécessaire. “Ce n'est jamais une bonne idée de répondre par la force mais si c'est la solution, pourquoi pas. J'aurais pensé qu'après une semaine de barrages ça se calmerait, mais les paroles du préfet n'ont rien arrangé…”

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La population mahoraise semble plus que jamais divisée concernant la méthode à utiliser pour se faire entendre. Photo d’illustration.

“LES MÉTHODES EMPLOYÉES PAR LES BARRAGISTES, JE DIS NON” Julie*, elle, n’a pour le coup pas vu sa vie changer avec les blocages, étant à la retraite. Si elle soutient les contestations, elle n’est pas pour bloquer les routes, jugeant cette stratégie inefficace. “Bloquer les routes à Mayotte fait juste du mal à l'économie locale et non à l’échelle nationale”, juge celle qui pense qu’il faudrait plutôt bloquer le port de commerce, l'aéroport, les zones industrielles, les grosses enseignes, les administrations et institutions. “Eux ne mettrons pas longtemps à attendre que l’Elysée leur réponde. Ils n'accepteront jamais de perdre des millions d’euros. Étant les plus gros payeurs de taxes et de charges, ils auront vite accès aux plus hauts dirigeants du pays”, développe-t-elle. “Je ne suis pas contre la lutte contre les violences, le terrorisme, l'immigration clandestine massive. Mais

les méthodes employées par les barragistes, je dis non”, affirme clair et net Raysate*. Pour elle, les barrages ne font que bloquer les Mahorais, qui essayent de survivre comme ils peuvent, et l’économie de l’île. “Mayotte souffre déjà assez comme ça”, regrette celle qui déplore aussi le danger que les barrages peuvent faire peser sur les personnes qui doivent recevoir des soins. Raysate pense qu’il serait plus pertinent de concentrer les blocages sur des lieux stratégiques qui touchent directement les immigrés clandestins, comme le bureau des étrangers. Mais dans la configuration actuelle du mouvement, elle craint pour la suite : “Une minorité ne peut pas décider pour le reste de la population. [..] À un moment, on va se monter les uns contre les autres.” Une division qu’elle dénonce, et qui transparaît à l’écoute des différents témoignages que nous avons recueillis. *Tous les noms ont été modifiés pour préserver l’anonymat des personnes.

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Propos recueillis par Audrey Margerie

MOUNDHIR HAD FOUNDI SE LANCE À L’ASSAUT DES DÉCHETS TEXTILES Le président de la nouvelle filière Mao Ré Cycle Textile Linge de maison et Chaussures (MRC-TLC), Moundhir Had Foundi, est diplômé en économie sociale et solidaire. Il a pour projet de transformer des déchets textiles à Mayotte pour les redistribuer sur le territoire. Mais pour cela, il appelle à plus de moyens. Mayotte Hebdo : D’où est parti le projet ? Moundhir Had Foundi : De l’envie d’apporter sa pierre à l’édifice face aux déchets présents sur le territoire de Mayotte. Avec des confrères chercheurs, on y réfléchit depuis 2019. Et puis en 2022, nous avons proposé le projet de construire cette filière Responsabilité Elargie du producteur (N.D.L.R. les acteurs économiques sont responsables de l’ensemble du cycle de vie du produit) à Mayotte en réponse à un appel à projet lancé par le Département et l’Ademe océan Indien (agence de transition écologique). Nous avons fini lauréat sous réserve d’avoir l’accord de Re-Fashion, un intermédiaire avec l’Etat spécialisé, pour nous accompagner. Implanté en métropole, nous avons fait le déplacement pour les convaincre. Une convention de ce genre ça n’existe pas à Mayotte. Nous sommes les premiers. Nous avons reçu l’agrément en 2023 et avons démarré les collectes en mai sur l’ensemble du territoire grâce à un hub à Tsingoni. M.H : Pouvez-vous expliquer comment vous comptez trier, transformer et distribuer les produits ? M.H.F. : L’idée, c’est de transformer le gisement sur le territoire. Lorsqu’on collecte, on fait le tri. Les déchets qui nécessitent des retouches peuvent être conduits à l’atelier couture et transformation. Selon l’état, on peut en faire d’autres produits comme des draps pour faire des sacs en coton. Et ceux en très mauvais état seront broyés pour devenir du rembourrage de coussins. Les chaussures en bon état sont

remises en circuit. Les autres peuvent être broyées afin d’obtenir une matière pouvant servir à couvrir les city-stades, les pistes, ou encore faire des tapis pour les crèches ou le sport. Les produits en bon état, voire encore étiquetés, seront, eux, distribués à des partenaires ou à des nécessiteux. On travaille avec cinq associations de Mayotte comme Dyama qui vient en aide aux orphelins. Si les gisements sont conséquents, on peut aussi ouvrir une à deux fois par mois le hub au public pour qu’il puisse acheter en moyenne trois à cinq euros le kilogrammes. M.H : Où en est le projet aujourd’hui ? M.H.F. : La structure tourne avec trois salariés dont deux chauffeurs collecteurs trieurs et une assistante de direction. On a un numéro spécial (06 39 69 70 69) pour nous appeler. Des communités se sont organisées dans des villages comme M’ronabéja, Moinatrindi, Hagnoundrou et M’tsamboro. On a initié des points de collecte. Le camion passe toutes les semaines directement. Pour le moment, nous ne transformons pas sur place. Nous collectons et envoyons notre gisement en brut en métropole et à La Réunion le temps où des partenaires s’occupent de les transformer le temps de nous équiper. 90 tonnes de déchets dans trois conteneurs attendent de partir. Ce seront nos premiers envois. M.H : Quelle est la suite ? M.H.F : Nous comptons mettre en place la collecte, le tri, la transformation et la distribution. Pour cela, on a besoin de bacs,

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de tables, de broyeurs, une presse hydraulique, des ballots, des machines à coupe-chiffons… Nous sommes en train de commander des bacs textiles en inox pour protéger les déchets des intempéries et espérons les recevoir au plus tard le dernier trimestre 2024. Nous voulons les placer à proximité des écoles et des crèches pour faciliter l’accès aux parents. On souhaite avoir cinq hubs sur les cinq établissements publics communaux et intercommunaux (EPCI). Mais pour le moment, nous n’avons reçu aucune subvention ou aide, ni du Département, ni de l’Ademe. Or, nous avons besoin de plus de moyens à injecter au début. Après, en tant qu’économie circulaire, sociale et solidaire, la filière se financera par elle-même. On a aussi formulé une demande auprès de la préfecture de Mayotte pour nous accompagner sur des agréments d’insertion afin de devenir une structure d’insertion par activité économique et ainsi accompagner un public très éloigné de l’emploi. On peut occuper des jeunes, les

Le président de la nouvelle filière Mao Ré Cycle Textile Linge de maison et Chaussures (MRC-TLC), Moundhir Had Foundi, à droite de son équipe, souhaite contribuer à éviter la pollution des déchets textiles.

sensibiliser, afin qu’ils fassent autre chose que caillasser. Travailler sur l’inclusion sociale pour éviter la délinquance. M.H : Quel message vous voulez-faire passer ? M.H.F. : À Mayotte, le déchet est partout et se retrouve dans la nature, les mangroves… L’île possède l’un des plus beaux lagons au monde. Si nous ne préservons pas ce joyau, jamais on ne pourra regarder l’avenir. Si on veut qu’il y ait des touristes, il faut que le territoire soit salubre pour ceux qui y vivent et avoir des endroits propres pour recevoir. L’environnement, c’est l’affaire de tous. On souhaite sensibiliser les services de l’État. Il n’y a pas que l’immigration clandestine et l’insécurité. On peut aussi voir le bon côté des petites structures qui essaient de relever le défi de lutter contre le fléau du gaspillage pour préparer le territoire aux générations futures. C’est le moment de les accompagner. n

Pour le moment, la filière a collecté environ 90 tonnes de déchets textiles, prêts à partir en métropole et à La Réunion. À l’avenir, ils pourraient être transformés directement sur l’île.

Plus de 3.000 tonnes de textile enfouies chaque année Le syndicat intercommunal d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte (Sidevam) informe que les déchets textiles représentent environ 4 % du gisement des déchets collectés par an. Sur un total de déchets ménagers de 70.000 tonnes, 3.000 tonnes de textiles sont ainsi collectées et enfouies, selon l’étude Modecom de 2018 financée par l’Ademe. Le Sidevam n’a pas encore consolidé ses chiffres pour 2023, mais il estime que 80.000 tonnes de déchets ont été enfouis.

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LITTÉRATURE

LISEZ MAYOTTE

CINQ FEMMES (3/6)

AGRÉGÉ DE LETTRES MODERNES ET DOCTEUR EN LITTÉRATURES FRANCOPHONES, CHRISTOPHE COSKER EST L’AUTEUR DE NOMBREUX OUVRAGES DE RÉFÉRENCE SUR LA LITTÉRATURE DE L’ÎLE AUX PARFUMS, NOTAMMENT UNE PETITE HISTOIRE DES LETTRES FRANCOPHONES À MAYOTTE (2015) DONT IL REPREND, APPROFONDIT ET ACTUALISE, DANS CETTE CHRONIQUE LITTÉRAIRE, LA MATIÈRE. La deuxième nouvelle des Cinq femmes (2006) d’Abdou Salam Baco s’intitule « La Femme qui naviguait dans les profondeurs de l’abîme ». Cette femme se prénomme Zayhatana, comme l’indique l’incipit de la nouvelle : « Mon vrai prénom est Zayhatana, ce serait donc logique qu’on m’appelle Zayha, et même, après tout Zayhatana, puisque c’est mon vrai prénom. Mais pas du tout, tout le monde m’appelle Zaï, et je suppose que c’est logique, d’une certaine manière. » (p. 22) Dans son article sur « Abdou Salam Baco romancier de la protestation ou la conscience du lectorat à venir », Nassuf Djailani indique ce que ce début emprunte à l’un des modèles de l’auteur, à savoir James Baldwin dans Si Beale Street pouvait parler (1974) : « Mon vrai prénom est Clémentine, ce serait donc logique qu’on m’appelle Clem, et même après tout, Clémentine, puisque c’est mon nom. Mais pas du tout. On m’appelle Tish. C’est peut-être logique aussi, en un sens. » (p. 25) Mais Zayhatana est moins la protagoniste de l’histoire que sa narratrice. Au centre de l’histoire, on trouve un personnage masculin : « Mon ami Da est en prison depuis un certain temps maintenant, pour une sombre histoire de viol et de détournement de mineure ; je passe lui rendre visite chaque fois que je peux. Je ne souhaite à personne d’être obligé d’aller en prison pour discuter avec un ami ou partager avec lui ces instants informels qui font que deux êtres deviennent des amis. » (p. 23) L’affaire est donc grave, mais la narration est surtout prétexte à méditation. Aussi l’accusatrice est-elle rapidement discréditée par son style de vie et ses connaissances. Elle finit assassinée. Nulle sororité entre Zayhatana et elle. Le propos que la nouvelle souhaite

approfondir est davantage celui des difficiles rapports entre ceux qui ont toujours vécu à Mayotte et ceux qui, partis étudier ailleurs, reviennent avec des idées neuves : « En fait, les ennuis de Da ont commencé depuis qu’il s’était mis en tête la mauvaise idée de créer une association pour la promotion des cadres indigènes. Il trouvait – à tort ou à raison – que les cadres indigènes étaient des acteurs lointains et passifs du développement socio-économique et culturel de leur île, et ce parce qu’ils étaient éloignés des centres de décisions. Il estimait que si la France avait donné des moyens aux indigènes de faire des études universitaires, ce n’était certainement pas pour les cantonner ensuite dans des responsabilités subalternes. À qui la faute ? » (p. 47) On retrouve ici l’un des mots-clefs du discours littéraire d’Abdou Salam Baco : « indigène ». Il se situe entre sujet et citoyen. L’indigène est celui qui, colonisé, a moins de droit que le colon, injustice qui ne cesse pas avec le passage à la postcolonie. Le lecteur remonte ensuite dans la vie de Zayhatana jusqu’à sa rencontre avec Da. On découvre alors le personnage de Mélissa, qui a eu une histoire avec Da et a dû renoncer à lui en raison de sa famille. Ici encore, la nouvelle pose davantage les problèmes qu’elle ne les résout. Elle expose l’injustice. Dans cette réécriture du procès de Kafka, on ne connaît pas l’issue du litige et Da est toujours en prison à la fin du texte. On se focalise davantage sur l’angoisse de la narratrice face à un monde étouffant : « Et nous quittâmes le bureau feutré de l’avocat, pleines de déception et d’interrogations. Mais tout de même, mon instinct me disait que la sortie du labyrinthe n’était plus très loin, et que bientôt la

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lumière éclabousserait de sa clarté les profondeurs de l’abîme. » (p. 74) On retrouve ici l’un des éléments du titre, à savoir l’abîme, qui désigne l’état psychologique de la jeune femme. On peut néanmoins se demander si, comme le titre le suggère, elle navigue en sachant où elle va ou si au contraire elle dérive, impuissante. La vérité se situe sans doute quelque part au milieu. Nous terminerons cette chronique en évoquant Monsieur Bouteille, l’avocat commis d’office pour défendre Da. Comme souvent lorsqu’il évoque un mzungu, Abdou Salam Baco décrit son cadre de vie : « Derrière lui, sur le mur, était accroché un portrait d’un homme blanc en tenue d’apparat. C’est la première chose que je vis en pénétrant dans la pièce, comme si ce tableau dérisoire avait un pouvoir magnétique qui attirait inéluctablement mon regard. Sur d’autres murs d’un blanc impeccable, étaient accrochés des tableaux qui représentaient des paysages de l’île : le bleu agressif du lagon ; différentes variétés de poissons tropicaux ; des cases de terre qu’on appelle banga et qu’on ex[h]

ibe fièrement partout comme si c’était le seul et unique trésor dont disposait l’île ; une forêt de cocotiers ; un sentier en terre, qui passe au milieu d’un champ de bananiers ; le visage décoré au msindzano d’une femme, une belle femme quelconque. » (p. 35) Que retenir de cette mise en scène ? Le bureau de l’avocat est de la même couleur que son propriétaire. Le décor fonctionne de la façon suivante : il ne laisse entrer de Mayotte que ce que l’avocat souhaite en voir : le lagon et ses poissons, la garçonnière, le cocotier et la femme exotiques. L’une des images fait penser à une carte postale coloniale et le portrait anonyme d’un « homme blanc en tenue d’apparat » est énigmatique. Il s’agit vraisemblablement d’un personnage officiel, sans doute le préfet plutôt que le président de la République. Mais ne pourrait-il pas s’agir aussi de l’avocat lui-même, même s’il n’est pas reconnu par la narratrice ? Et, à défaut d’être lui, est-ce l’autorité à laquelle il se soumet ou celle qu’il rêve d’incarner ? Christophe Cosker

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AVIS DE MARCHÉ - SERVICES

Section 1 - Acheteur 1.1 Acheteur Nom officiel : Ville de Koungou (976). Forme juridique de l’acheteur: Organisme de droit public Activité du pouvoir adjudicateur: Services généraux des administrations publiques. Section 2 - Procédure 2.1 Procédure Titre: Mission de maîtrise d’oeuvre urbaine VRD-urbaniste-paysagisteenvironnement-architecte pour le projet de renouvellement urbain du quartier Mavadzani Mouinajou à Koungou. Description : Mission de maîtrise d'oeuvre urbaine VRD-urbanistepaysagiste-environnementarchitecte pour le projet de renouvellement urbain du quartier Mavadzani Mouinajou à Koungou Identifiant interne: MOE-Mavadzani. Type de Procédure: Ouverte. Procédure accélérée: NON. 2.1.1 Objectif Nature du marché: services. Nomenclature principale (cpv): 71400000. 2.1.2 Lieu d’exécution Adresse postale: Quartier Mavadzani Mouinajou Quartier Mouinajou à Majicavo Koropa. Villages de Majicavo Koropa et de Majicavo Lamir. Ville: KOUNGOU. Code postal: 97610.

Code NUTS: FRY50. Pays: FRANCE. Informations complémentaires de la procédure : Voir RC. 2.1.3 Valeur 2.1.4 Informations générales Informations complémentaires de la procédure: Voir RC. Base juridique : Directive 2014/24/EU 2.1.5 Conditions de passation des marchés Le soumissionnaire doit présenter des offres pour tousLots. Nombre maximum de lots pour lesquels un soumissionnaire peut présenter une offre : . 2.1.6 Motifs d'exclusion Description: Voir RC. Section 5 - Lot 5.1 LOT N° : LOT-0001 Identifiant interne : MOE-Mavadzani. Titre: Mission de maîtrise d’oeuvre urbaine VRD-urbaniste-paysagisteenvironnement-architecte pour le projet de renouvellement urbain du quartier Mavadzani Mouinajou à Koungou. Description: Mission de maîtrise d’oeuvre urbaine VRD-urbanistepaysagiste-environnement-architecte pour le projet de renouvellement urbain du quartier Mavadzani Mouinajou à Koungou. 5.1.1 Objectif: Type de marché: services. Classification CPV: 71400000. Options : L’acheteur se réserve le droit d’effectuer des achats supplémentaires auprès de l’entrepreneur, comme décrit ici : oui. 5.1.2 Lieu d'exécution : Lieu d’exécution: Quartier Mavadzani Mouinajou Quartier Mouinajou à Majicavo Koropa. Villages de Majicavo Koropa et de Majicavo Lamir. Ville: KOUNGOU. Code Postal : 97610.

Pays: France. 5.1.3 Durée estimée : Date de début: 18/03/2024. Date de Fin: 18/08/2025. 5.1.4 Renouvellement : 5.1.5 Valeur 5.1.6 Information General Le marché est financé au moins partiellement par des fonds de l’Union européenne: Projet de passation de marchés non financé par des fonds de l’UE. 5.1.7 Achats stratégiques Approche de réduction des impacts environnementaux: none. 5.1.8 Critères d'accessibilité 5.1.9 Les critères de sélection Type : Autre. Nom: Voir RC. Nombre minimal de candidats à inviter pour la deuxième étape de la procédure: 5. 5.1.10 Critères d'attribution 5.1.11 Documents de marché Pas de restriction en matière d’accès aux documents. Langues dans lesquelles les documents de marché sont officiellement disponibles : français. 5.1.12 Conditions du marché public Date limite de réception des offres : 27/02/2024 à 16:40. Soumission électronique : Requise Catalogue électronique : Non autorisée Langues dans lesquelles les offres ou les demandes de participation peuvent être présentées : français. Soumission électronique : Non autorisée Conditions de présentation : Conditions du marché : Facturation électronique : Requise 5.1.15 Techniques Aucun Pas de système d’acquisition dynamique 5.1.16 Informations

complémentaires, médiation et révision Organisation chargée des procédures de médiation : Tribunal Administratif de Mayotte Organisation chargée des procédures de recours : Tribunal Administratif de Mayotte Organisation qui fournit des informations sur le cadre réglementaire général qui, en matière de fiscalité, est applicable au lieu où la prestation doit être réalisée : ORG0001 Organisation qui fournit des informations sur le cadre réglementaire général qui, en matière de protection de l’environnement, est applicable au lieu où la prestation doit être réalisée : ORG-0001 Organisation qui fournit des informations sur le cadre réglementaire général qui, en matière de protection du travail et de conditions de travail, est applicable au lieu où la prestation doit être réalisée : ORG-0001 Organisation qui fournit des informations complémentaires sur la procédure de passation de marché : ORG-0001 Organisation qui fournit un accès hors ligne aux documents de marché : ORG-0001 Organisation qui fournit des précisions concernant l’introduction des recours : Tribunal Administratif de Mayotte Organisation qui reçoit les demandes de participation : ORG-0001 Organisation qui traite les offres : ORG-0001 Section 8 - Organisations 8.1 ORG-0001 Nom officiel : Ville de Koungou (976). Numéro d’enregistrement (SIRET) : 20000881100016. Adresse postale : Place de la Mairie. Adresse postale : Place de la Mairie. Ville : Koungou

AVIS D'AVIS PUBLIC À LA CONCURRENCE - TRAVAUX

Section 1 : Identification de l'acheteur Nom complet de l'acheteur : Ville de MTsangamouji (976) Numéro national d'identification : Type : SIRET - N° : 20000882900018 Code postal / Ville : 97600 M'tsangamouji Groupement de commandes : Non Section 2 : Communication Moyens d'accès aux documents de la consultation Lien vers le profil d'acheteur : http:// www.marches-securises.fr

Identifiant interne de la consultation : 2024-01 L'intégralité des documents de la consultation se trouve sur le profil d'acheteur : Oui Utilisation de moyens de communication non communément disponibles : Non Nom du contact : François PERSEE Tél : +33 0639233412 Section 3 : Procédure Type de procédure : Procédure adaptée ouverte Conditions de participation : Capacité économique et financière : Indications concernant le chiffre d'affaires annuel général sur 3 ans. Capacités techniques et professionnelles : Références des principales fournitures ou des principaux services fournis sur 3 ans. Titres d'études et professionnels exigés du prestataire de services ou du contractant lui-même Technique d'achat : Sans objet Date et heure limite de réception

des plis : Lundi 04 mars 2024 - 12:00 Présentation des offres par catalogue électronique : Interdite Réduction du nombre de candidats : Non Possibilité d'attribution sans négociation : Oui L'acheteur exige la présentation de variantes : Non Critères d'attribution : Le classement des offres et le choix du/des attributaire(s) sont fondés sur le critère unique du prix le plus bas. Section 4 : Identification du marché Intitulé du marché : Achat de matériel pour les réféctoires de M'tsangamouji 2024 Classification CPV : 39315000 Type de marché : Travaux Description succinte du marché : Achat de matériel pour les réféctoires pour assurer la mise en place de vaisselle reutilisable Lieu principal d'exécution : Réféctoire de l'école primaire de M'tsangamouji 1, M'tsangamouji 2 et M'tsangamouji 3

Valeur estimée hors TVA : 140000 euros La consultation comporte des tranches : Non La consultation prévoit une réservation de tout ou partie du marché : Non Marché alloti : Oui Section 5 : Informations sur les lots LOT : Equipement de cuisine Classification CPV : 39315000 Lieu d'exécution du lot : Commune de M'tsangamouji LOT : Petit matériel Classification CPV : 39311000 Lieu d'exécution du lot : Commune de M'tsangamouji Section 6 : Informations complémentaires Visite obligatoire : Non Date d'envoi du présent avis 28 janvier 2024

2 8 • M ay o t t e H e b d o • N ° 1 0 7 4 • 0 1 / 0 2 / 2 0 2 4


AVIS D'APPEL PUBLIC À LA CONCURRENCE - SERVICES

Section 1 : Identification de l'acheteur Nom complet de l'acheteur : Ville de Bouéni (976) Numéro national d'identification : Type : SIRET - N° : 20000874600014 Code postal / Ville : 97620 Bouéni Groupement de commandes : Non Section 2 : Communication Moyens d'accès aux documents de la consultation Lien vers le profil d'acheteur : http:// www.marches-securises.fr

Identifiant interne de la consultation : CDE-2024-A001 L'intégralité des documents de la consultation se trouve sur le profil d'acheteur : Oui Ut i l is at i on d e moye ns d e communication non communément disponibles : Non Nom du contact : JOHN-PIERRE Michaël - Tél : +33 0639028267 - Mail : m.john-pierre@boueni.fr Section 3 : Procédure Type de procédure : Procédure adaptée ouverte Conditions de participation : Aptitude à exercer l'activité professionnelle : ETRE DANS L' ANIMATION Technique d'achat : Sans objet Date et heure limite de réception des

plis : Lundi 12 février 2024 - 12:00 Présentation des offres par catalogue électronique : Exigée Réduction du nombre de candidats : Non Possibilité d'attribution sans négociation : Oui L'acheteur exige la présentation de variantes : Non Critères d'attribution : LE PRIX 60% L'EXPERIENCE EN ANIMATION 40% Section 4 : Identification du marché Intitulé du marché : La mise en place d'ateliers durant la garderie, Pause Méridienne, Le périscolaire et Le plan Mercredi Classification CPV : 92331210 Type de marché : Services Description succinte du marché

: La mise en place d'ateliers durant la garderie, Pause Méridienne, Le périscolaire et Le plan Mercredi à M'Zouazia Lieu principal d'exécution : M'Zouazia Primaire et Maternelle Durée du marché (en mois) : 10 Valeur estimée hors TVA : Valeur minimale : 85000 - Valeur maximale : 100000 euros La consultation comporte des tranches : Non La consultation prévoit une réservation de tout ou partie du marché : Non Marché alloti : Non Section 6 : Informations complémentaires Visite obligatoire : Non Date d'envoi du présent avis 20 janvier 2024

ANNONCES LÉGALES AVIS DE CONSTITUTION Par ASSP, il a été constitué la SAS : IBRAZA INFOGERANCE Sigle : 2I Capital : 100.00 €. Objet : Commerce de détail de produits non réglementé ; Commerce de produits non réglementes sur internet ou par correspondance; Développement, conseils et ventes de solutions logicielles; Conseils en informatique et la réalisation de prestations de services associés; Le

Durée : 99 ans. Au RCS de MAMOUDZOU. Pour avis

développement et la commercialisation de sites Internets; Réparation de petits appareils électroniques; Installation de matériels électroniques et optiques ou d’autres matériels;. Siège : 1456 Route Départementale 97630 Mtsamboro. Président : AHAMADA Nidhoimi, 1456 Route Départementale 97630 Mtsamboro. Chaque actionnaire est convoqué aux Assemblées. Chaque action donne droit à une voix.Les actions sont librement cessibles entre actionnaires.

m AVIS DE CONSTITUTION Il a été constitué la SARL : MISS GLACON Capital : 1000.00 €. Objet : Commerce de détail de produits non réglementé : réfrigération, glaçons; Fabrication et vente de glaçons aux professionnels

et privées, location de matériel liés à la réfrigération de glaçon. Vente de charbons domestiques et gaz. Négociant en glaçon et boissons sans alcool Siège: LAZEREVOUNI BLOC 2 BOITE 6 Kaweni, 97600 Mamoudzou. G é r a n c e : S A I D O m a r, LAZEREVOUNI, 97600 Mamoudzou Durée : 99 ans. Immatriculation : Au RCS de MAMOUDZOU. Pour avis

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Lu par près de 20.000 personnes chaque semaine (enquête Ipsos juillet 2009), ce quotidien vous permet de suivre l’actualité mahoraise (politique, société, culture, sport, économie, etc.) et vous offre également un aperçu de l’actualité de l’Océan Indien et des Outremers.

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FI n°3839 Lundi 7 mars 2016 St Félicie

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Première parution : juillet 1999 - Siret 02406197000018 - Édition Somapresse - n° CPPAP : 0921 y 93207 - Dir. publication : Laurent Canavate - red. chef : Gauthier Dupraz - http://flash-infos.somapresse.com

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FI n°3997 mercredi 30 novembre 2016 St André

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Diffusé du lundi au vendredi, Flash Infos a été créé en 1999 et s’est depuis hissé au rang de 1er quotidien de l’île.

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MAGAZINE D’INFORMATION NUMÉRIQUE HEBDOMADAIRE Edité par la SARL Somapresse au capital de 20 000 euros 7, rue Salamani Cavani M’tsapéré BP 60 - 97600 Mamoudzou Tél. : 0269 61 20 04 redaction@somapresse.com Directeur de la publication Laurent Canavate canavate.laurent@somapresse.com Directeur de la rédaction Mohamed El Mounir dit “Soldat” 0639 69 13 38 soldat@mayottehebdo.com Rédactrice en cheffe Raïnat Aliloiffa

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Ça passe ou ça casse !

Journalistes Raïnat Aliloiffa Alexis Duclos Saïd Issouf Marine Gachet Audrey Margerie Direction artistique Franco di Sangro Graphistes/Maquettistes Olivier Baron, Franco di Sangro Commerciaux Cédric Denaud, Murielle Turlan Comptabilité Catherine Chiggiato comptabilite@somapresse.com Première parution Vendredi 31 mars 2000 ISSN : 1288 - 1716 RCS : n° 9757/2000 N° de Siret : 024 061 970 000 18 N°CPPAP : 0125 Y 95067 Site internet www.mayottehebdo.com

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