LM magazine 177 - juin 2022

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N°177

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JUIN

2022

ART & CULTURE

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GRATUIT

Hauts-de-France / Belgique




SOMMAIRE magazine

LM magazine 177 - juin 2022

NEWS - 10 Scie musicale, Souchon en famille au Louvre, Cocktails à gober, Cheezam, Bière et paix LITTÉRATURE -12 Guacamole Vaudou La tête dans l’occulte

STYLE - 16

Elvis Pompilio La vie de chapeau

© Domagoj Šokčević

Guacamole Vaudou © Céline Nieszawer

PORTFOLIO - 22 Domagoj Šokčević Arrêt sur image RENCONTRE - 104 Joana Vasconcelos Gonflée à bloc

LE MOT DE LA FIN - 130 Pablo Rochat Mème à la folie

Elvis Pompilio © Erik Anthierens



SOMMAIRE selection

LM magazine 177 - juin 2022

Paradise City © Thibault Feyaerts

DOSSIER SPÉCIAL FESTIVALS - 32

Rendez-vous de la BD d’Amiens, Gestival, Festival international de jardins Hortillonnages Amiens, Wazemmes l’accordéon, La Constellation imaginaire, Prise directe, OLT Rivierenhof, Extrema Outdoor, Latitudes contemporaines, Minuit avant la nuit, Lille Piano(s) Festival, Best Kept Secret, Graspop Metal Meeting, URBX, Didouda Arras Festival, Le Dragon de Calais, Refugee Food Festival, The Kings of Disco Funk, Solid’art, Retro C Trop, Couleur Café, TW Classic, La Bonne aventure, Les Rutilants, Main Square, Rock Werchter, Festival au Carré, Ukulele to Heaven, Paradisiac Field, Paradise City, Bruxelles fait son cinéma, Roots Reggae Festival, Jamacain Docks Day, Les Ardentes, Gent Jazz Festival, Pile au RDV, Les Nuits d’été, Cactus Festival, En Nord Beat, Dour Festival, Les Nuits secrètes, Rock en stock, Festival interculturel du conte de Chiny, Cabaret vert…

ÉCRANS - 94 Petite fleur, Boum Boum, Les Travaux et les jours, Hommes au bord de la crise de nerfs CHRONIQUES

Disques - 100 Yann Tiersen, Studio One Women Vol.2, Florent Marchet, Kevin Morby, Pusha T Livres - 102 Fanny Parise, Maya Gonzales & Jeanne Neton, Juliette Volcler, Émile Bravo, Nicolas Pegon

EXPOSITION - 104

Joana Vasconlecelos, Un Blob au musée !, Le Serpent cosmique, Les Vivants, Novacène, La Forêt magique, Vivian Maier, Beyrouth. Les Temps du design, Eugène Leroy, Bye Bye grise mine, Quand les murs parlent !, En Dilettante, Nøne Futbol Club



MAGAZINE LM magazine – France & Belgique 28 rue François de Badts 59110 LA MADELEINE - F tél : +33 (0)3 62 64 80 09

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Direction de la publication Rédaction en chef Nicolas Pattou nicolas.pattou@lastrolab.com Rédaction Julien Damien redaction@lm-magazine.com Florine Fauquembergue info@lm-magazine.com Publicité pub@lm-magazine.com

Direction artistique Cécile Fauré cecile.faure@lastrolab.com

Administration Laurent Desplat laurent.desplat@lastrolab.com

Graphisme Christophe Gentillon concepteur-graphic.fr

Réseaux sociaux Sophie Desplat

Couverture Domagoj Šokčević Una Brezza di Sentimenti - 2022 www.domagojsokcevic.com c @domagoj_sokcevic

Impression Tanghe Printing (Comines) Diffusion C*RED (France / Belgique) ; Zoom On Arts (Bruxelles / Hainaut)

Ont collaboré à ce n° : Thibaut Allemand, Rémi Boiteux, Madeleine Bourgois, Marine Durand, Grégory Marouzé, Maïssam Mezioud, Raphaël Nieuwjaer, Domagoj Šokčević et plus si affinités.

LM magazine France & Belgique est édité par la Sarl L’astrolab* - info@lastrolab.com L’astrolab* Sarl au capital de 5 000 euros - RCS Lille 538 422 973 Dépôt légal à parution - ISSN : en cours

L’éditeur décline toute responsabilité quant aux visuels, photos, libellé des annonces, fournis par ses annonceurs, omissions ou erreurs figurant dans cette publication. Tous droits d’auteur réservés pour tous pays. Toute reproduction, même partielle, par quelque procédé que ce soit, ainsi que l’enregistrement d’informations par système de traitement de données à des fins professionnelles, sont interdites et donnent lieu à des sanctions pénales. LM magazine est imprimé sur du papier certifié PEFC. Cette certification assure la chaîne de traçabilité de l’origine du papier et garantit qu'il provient de forêts gérées durablement. Ne pas jeter sur la voie publique.

PAPIER ISSU DE FORÊTS GÉRÉES DURABLEMENT



© The Weeknd & MSCHF

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Scie musicale

UN AIR DE FAMILLE Le Louvre-Lens a dix ans. Et qui d’autre qu’Alain Souchon pour fêter cet anniversaire ? Pour l’occasion, il invite ses deux fils. Pierre et Charles (aka "Ours") se produisent à la Scène samedi tandis que l’éternel dandy de la chanson française investit le parc pour interpréter des morceaux de son 15e album, Âmes fifties, et des tubes de son immense répertoire.

© Nathaniel Goldberg

L’industrie du vinyle ne tourne plus rond, c’est vrai. Mais qui se priverait d’écouter The Weeknd sur une scie circulaire ? Pas nous en tout cas. À l’ère de la musique dématérialisée, le chanteur canadien s’est associé au collectif d’artistes MSCHF pour sortir cette galette tranchante. Rendant grâce au bon vieux son analogique comme aux joies de la découpe (car oui, l’objet assume réellement cette double fonction), ce disque a été tiré à seulement 25 exemplaires, puis vendu aux enchères le 7 avril dernier - et ça nous met sur les dents. vinylblade.com

Lens, 04 & 05.06, Parc & Scène du Louvre-Lens, sam : 18h (Pierre Souchon) & 20h30 (Ours) • dim : 20h30 (Alain Souchon), gratuit, www.louvrelens.fr 10


Petit sommet de l’apéro disruptif, ce cocktail ne se sirote pas, non, il se gobe. Apparu aux États-Unis dans les années 1950, le jello shot s’invite à Bruxelles, plus précisément au Strof. Ici vodka, tequila ou bourbon s’acoquinent avec des saveurs fruitées et colorées, bien mariés par un mixologue averti, pour s’avaler d’une traite, mais sans excès.

© Le Strof

Bruxelles – 1 rue de Rollebeek c @le.strof

TOUT UN FROMAGE

© Cheezam

MYSTÈRE COCKTAIL

Vous connaissez bien sûr Shazam, l’application qui reconnaît des morceaux de musique. Eh bien voici Cheezam, capable d’identifier… les frometons ! Mise au point par deux start-ups françaises, Prevision.io et Isahit, cet outil indispensable pour faire son malin à table permet d’identifier n’importe quelle variété de fromage à partir d’une simple photo. Le petit plus ? Il propose le vin idéal pour l’accompagner. On dit "cheese". cheezam.fr

www.superfoodbeers.com

© Superfood Beer

Bière et paix On n’a pas tous les jours l’occasion de sauver la planète en levant le coude. C’est en tout cas ce que promet la Pealce, soit la contraction de "Pils" et "Peace", une bière conçue par la brasserie montoise Superfood Beers et qui dispense la paix dans le monde. Outre de subtiles notes de mandarine et de réglisse, cette blonde légère ne manque en effet pas de superpouvoirs : à chaque pack vendu, un arbre est planté. Yes we canette !

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littéra ture

GUACAMOLE VAUDOU Farce occulte

Leur rencontre tenait de l'évidence. L'auteur de BD, romancier et pape de l'absurde Fabcaro (Zaï Zaï Zaï Zaï, Le Discours) ne pouvait que s'associer au plus burlesque des clowns modernes, Éric Judor - qu'on ne présente plus. Le duo explore dans Guacamole Vaudou un genre tombé en désuétude mais bien plus riche qu'on ne le croit : le roman-photo. En attendant une improbable nouvelle saison de l'irrésistible Platane, on retrouve ici Éric Judor affublé d'une perruque, et dans son meilleur rôle : celui du loser candide, toujours à côté de la plaque. Employé d'une agence de pub à la créativité pas franchement débordante ("Mayonnaise Amoros, hmm, j'en applique sur la viande afin d'en accentuer le goût"), Stéphane Chabert est la cible des moqueries de ses collègues (quand ils ne lui jettent pas des chaises sur la tête). Kitsch à gogo Célibataire endurci, il est amoureux de Marie-Françoise (Alison Wheeler), la préposée aux photocopies, qu'il drague assez maladroitement ("ça sent le bourrage par ici"). Mais à la faveur d'un week-end vaudou, coaché par gourou Jean-Claude, notre

héros va recouvrer l'étoffe d'un "winner américain"… Au fil d'un récit pour le moins loufoque (dans la ligne droite des productions de Fabcaro), soutenu par un casting de "guests" tout aussi surréaliste (Elisabeth Quin, Arthur H, le prix Goncourt Hervé le Tellier…), le duo explore à merveille un genre peu gourmand en moyens techniques, mais aux possibilités immenses - pour peu qu'on ait le talent. Le tout est servi sans guacamole, mais dans une ambiance délicieusement kitsch (papiers peints psychédéliques, vestes à carreaux, minitels en guise d'ordinateurs), comme un clin d'œil à la fonction première du genre, qui trouve ici une nouvelle vie inattendue. Julien Damien Guacamole Vaudou, de Fabcaro & Éric Judor (Éditions du Seuil), 80 p., 18,50€ www.seuil.com

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QUAND SOUDAIN, À LA PHOTOCOPIEUSE… Sapristi, Marie-Françoise…

« Bravo, Stéphane, ta proposition est remarquable, tu es un élément essentiel à la dynamique de cette entreprise. Hourra, vive Stéphane. » CHAQUE FOIS QU’IL LA VOYAIT, STÉPHANE SENTAIT SON CŒUR S’ENFLAMMER COMME UNE CHAMADE.

IL SE DIT QU’APRÈS TOUT IL N’ALLAIT PAS RESTER PUCEAU TOUTE SA VIE. Hein ? Mais non, pas du tout, n’importe quoi, je me dis pas ça !

Qu’elle est belle, si seulement j’étais moins poltron et freluquet pour oser lui parler…

CEPENDANT QU’IL LA REGARDAIT, IL SE DÉCIDA À LUI ADRESSER LA PAROLE. Courage, mon brave Stéphane, qui ne tente rien n’obtient rien.

Hmm, ça sent le bourrage par ici.

… Le bourrage papier.

Oui, j’avais compris.

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Et sinon je me demandais, ça vous dirait de manger à la cantine avec moi ? Je crois que c’est œufs mimosa en entrée aujourd’hui.

Laissez-moi regarder ça, ce doit être un problème de microprocesseur analogique, c’est classique chez les Chinois.

Je n’ai pas encore appuyé sur le bouton « Start ».

Hmm, il est possible que ça vienne de là aussi.

Vous n’avez pas à me donner votre réponse tout de suite, j’ai conscience qu’une telle décision ne se prend à la légère. Je vous ai choquée, c’est ça ?

C’est gentil mais j’ai beaucoup de travail, je me suis préparé un Tupperware, je vais manger à mon bureau.

Je n’aurais pas dû parler d’œufs mimosa, c’est ça ? ça a remué en vous des souvenirs que vous vouliez peut-être occulter ?

Non non, pas du tout.

Pardon, c’est ma nature, je suis fougueux, je m’emporte facilement, il faut toujours que je fasse des projets.

Au collège, les garçons vous criaient dans la cour : « Eh ! Marie-Françoise, tes seins, c’est des œufs mimosa », c’est ça ?

Hein ? Non non.

Non, pas du tout.

Vous étiez complexée par vos seins trop petits, c’est ça ? Pardon, je suis si maladroit parfois.

Excusez-moi, je dois retourner travailler. À plus tard, Stéphane.

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© Julien Damien 16


Elvis & Priscilla © Andre Goldberg

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st

ELVIS POMPILIO Le chapelier fou

Il a vendu des couvre-chefs à Madonna, Mickey Rourke, Blondie, Harrison Ford et moult têtes couronnées. Il a aussi collaboré avec Chanel, Ann Demeulemeester, Thierry Mugler, ouvert des boutiques dans le monde entier… Bref, vous l'aurez compris, Elvis Pompilio est un chapelier très couru, sans nul doute le plus fameux du royaume. À Lille, Artchives, nouveau lieu mêlant gastronomie, cocktails et art contemporain, consacre à ce créateur belge une rétrospective baptisée Identité.s et... décoiffante, forcément. Ici des casquettes évoquant la porcelaine de Desvres, là un chapeau de cow-boy constitué d'éclats de miroir (idéal pour briller sur le dancefloor), plus loin un bonnet en forme de pull ou encore un bibi recouvert… de moules ? Eh oui. Depuis 35 ans, Elvis Pompilio se joue des codes de la mode, à travers des pièces uniques et pleines de fantaisie. Extravagantes ? « Je dirais originales mais pas trop, car toutes mes créations peuvent se porter, ce ne sont

pas des sculptures », insiste le Liégeois. Des couvre-chefs assez fous, en tout cas, pour séduire de prestigieux clients. Madonna bichonne son

« Toutes mes créations peuvent se porter » chapeau de cowboy en feutre à imprimés léopard, acheté durant la période Music, quand Amélie Nothomb s'affiche systématiquement avec son fameux haut-de-forme "diabolo". ••• 17


© Julien Damien

Amélie Nothomb © J-B. Mondino

Pourtant, la première production du Belge est plutôt sobre : une simple casquette. Celle-ci date de 1986, mais reste un classique. « À l'époque je travaillais chez une dame qui confectionnait des chapeaux pour le théâtre, se souvient l'artiste.

pour obtenir une forme unique... et j'ai réussi. Depuis, je procède toujours de cette façon ». Ainsi va Elvis Pompilio : sans tenir compte des formes préexistantes ("sinon c'est de la triche !"), toujours à l'avantgarde et à contre-courant.

« Combler un manque avec l’accessoire »

Retour à l'essentiel Ancien punk passé par l'Institut de la construction, des arts décoratifs et industriels de Liège, ce fils d'immigrés italiens venus en Belgique pour travailler dans les mines a débuté en même temps que les fameux "Six d'Anvers". •••

Un jour, je lui ait dit que je voulais façonner une casquette d'une seule pièce. Elle m'a répondu que c'était impossible, qu'il fallait réaliser le calot et la visière séparément. J'ai alors sculpté un moule en bois

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Axelle Red © DR


© Julien Damien

« La mode était alors omniprésente, mais il manquait quelque chose : l'accessoire ». Un vide qu'Elvis Pompilio s'emploiera à combler toute sa vie, ouvrant des boutiques un peu partout, du Japon aux États-Unis, vendant jusqu'à 30 000 chapeaux par an. En 2002, il décida de tout fermer pour se concentrer sur son showroom, à Bruxelles, et laisser libre cours à son imagination. À Lille, Artchives lui consacre sa toute première rétrospective. Au sein de ce bâtiment de 1 700 m2 (les anciens locaux des archives départementales) et sur trois niveaux sont exposées

plus de 200 œuvres, toutes à vendre, et pour beaucoup inédites. Enfin, presque... « Au moment de préparer l'exposition, j'ai réalisé qu’il ne me restait plus grand-chose en réserve... J'ai donc recréé pas mal de pièces à l’identique ! ». Chapeau bas. Julien Damien

IDENTITÉ.S Lille, jusqu'au 12.06, Artchives gratuit, artchives.eu ARTCHIVES Lille, 74 rue Jacquemars Giélée, mar & mer : 11h-01h • jeu, ven & sam: 11h-02h • dim : 14h-21h (+ restaurant : mar > sam : 12h-14h & 19h-21h) À visiter / www.elvispompilio.com 20


PLANS RAPPROCHÉS Œuvres commentées par Elvis Pompilio

© Julien Damien

« J'ai horreur de jeter. J'ai toujours recyclé, bien avant la mode de l'upycycling car j'ai débuté sans argent. Les belles matières étant trop chères j'achetais d'anciens vêtements que je découpais. Aujourd'hui, je travaille encore comme ça. Là, j'ai conçu des chapeaux à partir de vieux jeans récupérés chez des amis ou dans mon dressing. J'y ai ciselé des bandes, je les ai tricotées pour ici façonner une rose, là des oreilles de lapin... J'aime créer avec presque rien, même si ça m'a demandé pas mal de boulot ! Ces pièces sont uniques car imparfaites, on voit la main à l'œuvre derrière, dans les coutures, c'est un travail d'artisan ».

© Julien Damien

Chapeaux en jean

Chapeaux moules En déambulant dans les étages d'Artchives, on découvre quelques chapeaux melons "oversize", clin d'œil évident à un célèbre artiste belge : Magritte. Mais la série la plus audacieuse demeure peut-être cette quarantaine de couvre-chefs... en moules. « C'est mon hommage à Marcel Broodthaers et à son œuvre Surface de moules, mais aussi à la Belgique en général et aux gens qui aiment manger », sourit Elvis Pompilio. Ces canotiers, chapeaux haut de forme, de cowboy ou (bien sûr) de pêcheurs sont recouverts de véritables coquilles du fameux mollusque bivalve, qui ont ensuite été peintes en noir, à la bombe. À déguster… avec les yeux. 21


Is He the One - 2022


folio

po r t

DOMAGOJ ŠOKČEVIĆ Dans le rétro

Petit-fils de peintre, Domagoj Šokčević a toujours « baigné dans l'art », dit-il. Design textile, vidéo, photographie... le Croate s'est essayé à de nombreuses disciplines, avant d'opter pour l'illustration. « Probablement ma meilleure décision », assure ce jeune homme de 23 ans. On ne peut que lui donner raison. Minimalistes, « relevées d'une légère touche de style Art Déco », ses créations ne passent pas inaperçues. Celles-ci se caractérisent par des lignes épurées, un savant équilibre entre l'ombre et la lumière, une palette de couleurs douces et des cadrages très cinématographiques – ce « J'essaie de figer jeu de regards, ce visage qui se reflète dans l'instant présent » les lunettes de soleil de la fumeuse. « Mes images racontent toujours une histoire », confirme l'artiste - à chacun de se faire son propre film, donc. L'ensemble est formulé dans un esprit délicieusement vintage, soutenu par un aspect parfois granuleux, à l'instar de ces jeunes gens plongeant dans un lac, à l'orée d'un crépuscule chaud et rougeâtre. Il émane ainsi de ces compositions une certaine mélancolie, voire une nostalgie. « C'est vrai, j'ai toujours eu quelque chose de rétro en moi », confie l'illustrateur, qui ne cherche pas tant à magnifier un passé révolu. Plutôt à capturer l'instant présent, par essence éphémère, et mieux l'immortaliser. « Pour tout dire, durant mon parcours universitaire, j'ai mené une vie trépidante, jusqu'à oublier des petits moments suspendus. D'une certaine manière, c'est cela que j'essaie de figer à travers mes œuvres », explique Domagoj Šokčević, ajoutant, avec une indéniable sagesse : « parfois, nous devrions mieux accueillir ces parenthèses de l'existence, et prêter un peu plus d'attention aux personnes qui nous entourent ». Pas mieux. Julien Damien À visiter / www.domagojsokcevic.com c @domagoj_sokcevic À lire / L'interview de Domagoj Šokčević sur lm-magazine.com 23


Blue Vacation - 2021


Grace and Elegance - 2022


Otoño

Portofino - 2021


What Life Brings - 2022 27


Friends - 2021


Dare Yourself - 2021 29




DOSSIER

s l a v i t s e F

SPÉCIAL

Couleur Café © Vanessa Rasschaert

Juin 2022 - Part 1

festivals– 32


Wazemmes l’accordéon Jusqu’au 01.07, Lille, p.40

Didouda Arras Festival 17 > 21.06, Arras, p.54

Festival au Carré 01 > 10.07, Mons, p.72

Prise directe Jusqu’au 19.06, Hauts-deFrance, p.40

Refugee Food Festival 17 > 25.06, Lille & Calais, p.56

Bruxelles fait son cinéma 01 > 15.07, Bruxelles, p.80

Le Dragon de Calais - Solstice d'été 18 & 19.06, Calais, p.54

Jamaican Docks Day 02 & 03.07, Dunkerque, p.80

Festival international de jardins Jusqu’au 16.10, Amiens, p.38 La Constellation imaginaire Jusqu’au 04.06, Bassin minier du Pas-de-Calais, p.40

The Kings of Disco Funk 23.06, Lille, p.58 Les Rutilants 24 & 25.06, Oignies, p.68

Gestival 03 > 05.06, Arras, p.36

Solid’art 24 > 26.06, Lille, p.58

Extrema Outdoor 03 > 05.06, HouthalenHelchteren, p.42

Retro C Trop 24 > 26.06, Tilloloy, p.60

Rendez-vous de la bande dessinée d'Amiens 04 > 26.06, Amiens, p.34 OLT Rivierenhof 04 > 10.09, Deurne (Anvers), p.42 Latitudes contemporaines 08 > 28.06, Lille, p.44 Minuit avant la nuit 09 > 12.06, Amiens, p.46 Lille Piano(s) Festival 10 > 12.06, Lille, p.48 Best Kept Secret 10 > 12.06, Beeske Bergen, p.50 URBX Festival 15 > 26.06, Roubaix, p.52 Graspop Metal Meeting 16 > 19.06, Dessel, p.50

Couleur Café 24 > 26.06, Bruxelles, p.64 TW Classic 25.06, Werchter, p.64 La Bonne aventure 25 & 26.06, Dunkerque, p.66 Main Square Festival 30.06 > 03.07, Arras, p.70 Rock Werchter 30.06 > 03.07, Werchter, p.74 Roots Reggae Festival 01 > 03.07, Hensies, p.80 Paradisiac Field 01 > 3.07, Landrecies, p.78

Les Nuits d’été 07 & 08.07, Lille, p.86 Les Ardentes 07 > 10.07, Liège, p.82 Gent Jazz Festival 07 > 16.07, Gand, p.84 Cactus Festival 08 > 10.07, Bruges, p.88 En Nord Beat 08 > 10.07, Bailleul, p.88 Festival du conte de Chiny 08 > 10.07, Chiny, p.93 Pile au RDV 08 > 24.07, Roubaix, p.86 Dour Festival 13 > 17.07, Dour, p.90 Les Nuits secrètes 22 > 24.07, Auln.-Aymeries, p.92 Rock en stock 29 & 30.07, Étaples-sur-Mer, p.93 Cabaret Vert 17 > 21.08, Ch.-Mézières p.93

Paradise City 01 > 03.07, Perk, p.78 Ukulele to Heaven 01 > 03.07, St-André, p.76 festivals – 33


RENDEZ-VOUS DE LA BANDE DESSINÉE

' miens dA

Rendez-vous majeur des amoureux de la BD en France, le festival amiénois ne cesse de se réinventer. Désormais gratuite (mais sans proposer une affiche au rabais), cette 26e édition se déroule durant chaque samedi et dimanche de juin. La programmation est rythmée par deux temps forts : un week-end d’ouverture (les 4 et 5) et de fermeture (25 et 26) qui concentrent conférences, battles de dessin ou rencontres avec les auteurs. Des noms ? David Vandermeulen et Daniel Casanave (Sapiens), Lewis Trondheim ou encore Denis Bajram, l'homme qui a ressuscité Goldorak. La Maison de la Culture révèle en grand format les planches de cet album événement et leurs secrets de fabrication. Au rayon manga, on ne ratera pas non plus l'accrochage dédié à Sakamoto Days de Yuto Suzuki, nouveau phénomène littéraire au Japon. À la halle Freyssinet sont présentés les deux premiers tomes de ce shonen… dans un décor de supérette : celle qu'a rachetée l'assassin Sakamoto (le héros)… Après un plongeon dans La Fabrique de la bande dessinée, où l'on découvre les affres de la création, accompagnés par des scénaristes et dessinateurs, on perce littéralement l'esprit de Rob Guillory. Double lauréat du prix Eisner pour la série de comics Chew, l'Américain est l'objet d'une exposition immersive (L’École du crayon d’argent), soit six espaces thématiques reflétant les ambiances de ses récits, entre horreur et burlesque. Julien Damien miens, 04 > 26.06, Halle Freyssinet, Maison de la Culture, Safran et divers lieux A sam & dim : 10h-18h, gratuit, rdvbdamiens.com élection / Yuto Suzuki - Sakamoto Days, Jean-Christophe Chauzy - Le Reste du Monde, S Sciences & BD : les rencontres improbables, Rob Guillory - L’École du crayon d’argent, José-Luis Munuera - Z comme Munuera // 02.06 > 02.10 : De Goldorak à Goldorak, à la Maison de la Culture d'Amiens…

festivals – 34

Hardoc - Pascal Mériaux © DR

Virgile - Marius Beaufre © Laurent Stachowicz

Arts visuels



Pluridisciplinaire

Cie Propos © Julie Cherki

GESTIVAL

Ils sont deux naufragés, coincés dans les quatre m2 d’un ascenseur en panne. Une petite discussion ferait bien passer le temps, mais voilà, l’un n’entend pas, l’autre ne sait pas signer. Qu’à cela ne tienne, ces deux hommes, pareillement bavards, se lancent dans une joute burlesque où le français et la langue des signes composent deux one-man-shows parfaitement coordonnés. Présenté pour la soirée d’ouverture du Gestival, On ne parle pas avec des moufles, du comédien sourd Anthony Guyon et du « danseur entendant » Denis Plassard, incarne parfaitement l’esprit du rendez-vous : « révéler au grand public "le monde sourd" et permettre une accessibilité à la culture majoritaire pour la "communauté signante" », décrit Frédéric Flament, trésorier de l’association arrageoise Trèfle, qui orchestre la manifestation. Unique sur le territoire français, le Gestival invite tous les deux ans les publics sourds et entendants à se retrouver autour de conférences, d'ateliers et de propositions artistiques bilingues – en français et en langue des signes. Théâtre, courts-métrages et même concerts en chansigne, une discipline consistant à interpréter une chanson, en rythme, en langue des signes… Soit trois jours pour prendre conscience que "les sourds existent !", comme l’affirme le spectacle de la compagnie Rouge Vivier, qui ne demande qu’à se faire entendre. M. Durand Arras, 03 > 05.06, divers lieux, 1 spectacle : 22€ > gratuit, www.trefle.org Sélection / 03.06 : Joël Chalude - Faking a Living, Barbaque Compagnie - La princesse qui n’aimait pas…, Cie Propos - On ne parle pas avec des moufles // 04.06 : Simon Attia et Estelle Aubriot - Les sourds existent !, Cie La Bobêche - Du balai ! // 05.06 : Conférence de Victor Abbou - Une clé sur le monde, Simon Attia et Estelle Aubriot - Contes sur l’or, Théâtre des silences - Sedruos festivals – 36



K. F. Makouvia, A&J I HDF © Yann Monel

FESTIVAL INTERNATIONAL DE JARDINS

HORTILLONNAGES Arts & jardins

Amiens

Le festival international de jardins, ou le mariage réussi entre l'art et la nature. Formés il y a des siècles, les hortillonnages d'Amiens accueillent un événement pas tout à fait comme les autres. Pour cause, celui-ci réunit plasticiens, architectes et paysagistes au sein d'un site exceptionnel de 300 hectares, constitué de 65 km de canaux enserrant des îles, aux portes de la cité de Jules Verne. Depuis 2010, 182 œuvres ont ainsi pu y être admirées. Cette balade éminemment poétique peut s'exécuter à pied, mais le "must" reste la déambulation à bord d'une barque en bois. Cette 13e édition dévoile neuf nouvelles productions : quatre jardins et cinq installations. Glissant au fil de l'eau, on croise par exemple Laocoon, de Vincent Mauger, soit une sculpture flottante et d'aspect organique jouant avec les reflets aquatiques - et notre perception. Plus loin, on accoste sur l'île de La Fascinatrice des hortillonnages. L'association Vergers urbains y a façonné un espace mystérieux, habité d'une entité faite de saules tressés. Ici un bras semble longer la berge, là un pied émerge du sol... Vous avez dit "surnaturel" ? J.D. Amiens, jusqu'au 16.10, Hortillonnages, www.artetjardins-hdf.com À pied / Accès depuis le Pont de Beauvillé à l’Île aux Fagots mer > dim : 12h30 -19h (en juillet-août : lun > dim : 12h30-19h), gratuit n barque (parcours de 2h30) / Accueil au Port à fumier : mer, jeu & ven : 13h-19 h E sam & dim : 10h-19h (en juillet-août : lun > ven : 13h-19h • sam & dim : 10h-19h), 20€ (1/2 pers.) 25€ (3/4 pers.), 30€ (5/6 pers.), gratuit -3 ans, rens. : +33 6 78 53 55 92 festivals – 38



LA CONSTELLATION IMAGINAIRE

Ceci n'est pas un festival, plutôt un "festoche". La nuance tient à peu de choses : la chaleur humaine et la convivialité, ici symbolisées par un instrument qui se plisse de rire : l'accordéon ! Le temps d'un bal ou d'un barbecue, on nous invite ici à danser la java ou revisiter un répertoire de chansons culte en dansant jusqu'au bout de la nuit.

L'aventure est au coin de la rue, dit l'adage. Ce festival itinérant le confirme chaque année davantage. Durant cinq jours, une dizaine de compagnies réenchante le bassin minier du Pas-de-Calais. À l'instar du BlÖffique théâtre, qui révèle la ville de Lens à travers le regard d'un chat, équipé d'une petite caméra - pour une balade au poil.

ille & métropole, jusqu'au 01.07 L maison Folie Wazemmes, Le Grand Sud, Gare Saint-Sauveur & divers lieux gratuit, flonflons.eu

ouchin, Calonne-Ricouart, Haisnes et H Lens, 31.05 > 04.06, divers lieux, gratuit www.culturecommune.fr

élection / 04.06 : Le Bal des Zazous, S Karaoké Orchestar, La Bande à Paulo... 05.06 : Sidi Wacho, HK... // 14.06 : Récital pour l'Ukraine // 18.06 : Radio Loukoum 01.07 : Rest'la case

© Manuella Anckaert

PRISE DIRECTE

Cie Née d’un doute © Jérôme Raphose

Les Zazous © Spingler

WAZEMMES L'ACCORDÉON

Sélection / 31.05 > 04.06 : Cie Jusqu’ici tout va bien – Mascotte // 01.06 : Cie LuZ – Capuche // 03.06 : Cie Mycélium – Croûtes // 04.06 : BlÖffique théâtre - La Ville du chat obstiné, L’Amicale de production - Big Data Yoyo...

Tous les deux ans, ce festival itinérant se déploie dans la métropole pour proposer des lectures théâtralisées. Organisée dans le cadre d'Utopia, cette édition s'annonce singulière. Cette fois, les spectacles ont lieu en plein air. D'excursions littéraires en promenades poétiques, on vogue notamment dans les hortillonnages d'Amiens, lors d'une grande bouffée d'art. ille, Roncq, Amiens, Seclin, Villeneuve d'Ascq, Seclin L jusqu'au 19.06, divers lieux, gratuit (sauf hortillonnages d'Amiens : 10/7€), www.prisedirecte-festival.fr festivals – 40



Musique

OLT

EXTREMA

Le décor ? Une enluminure médiévale – châteaux, bois, étangs et petits oiseaux. Les agapes durent tout l’été mais dès juin se pressent quelques légendes, dont DJ Shadow, parrain de l’abstract hip-hop, Elvis Costello, teigne invraisemblable et chaînon manquant entre le punk-rock londonien et… Burt Bacharach ! Enfin, la gent féminine n’est pas oubliée, avec Lianne La Havas et l’immense Marisa Monte, dont le syncrétisme brésilien a séduit notamment Philip Glass et Gilberto Gil. Bref, une affiche royale. T.A.

Une centaine d’artistes, sept plateaux, et pourtant, le cousin belge de l’Extrema Outdoor hollandais est peut-être le plus bucolique des festivals techno. Trois jours de musique non-stop, les pieds dans l’eau – il y a même une scène sur la plage du lac ! Pas un hasard si un vieux de la vieille tel Manu le Malin, à la bonne humeur brutale, fait le déplacement. Un chouïa moins tapageurs, citons Jennifer Cardini, Art Department ou le dandy Todd Terje, sans oublier les têtes pensantes du précieux label Innervisions, Âme et Dixon. T.A.

Rivierenhof

Maceo Plex © Chin Photo

DJ Shadow © Derick Daily

Musique

Outdoor

eurne, 04.06 > 10.09, Domaine provincial D de Rivierenhof, 1 concert : 56,50€ > gratuit www.oltrivierenhof.be

H outhalen-Helchteren, 03 > 05.06 jeu : 16h • ven > dim : 12h, 1 jour : 72€ pass 3 jours : 147€, www.extrema.be

élection / 10.06 : DJ Shadow // 11.06 : S Chet Faker // 13.06 : Earl Sweatshirt 21.06 : Marisa Monte // 25.06 : Cat Power // 26 & 27.06 : Elvis Costello & The Imposters // 29.06 : Lianne La Havas…

S élection / 03.06 : Maceo Plex, DJ Tennis, Tale of Us… // 04.06 : Jennifer Cardini, Manu le Malin, Todd Terje… // 05.06 : Âme & Dixon, Amelie Lens, Art Department… festivals – 42



Alain Platel - C(h)oeurs © Filip-Van-Roe

Meg Stuart - Cascade © Martin Argyroglo festivals – 44


Danse

LATITUDES

s e n i a r o p m e t con

Des crises migratoires à la diversité dans la culture, peu de festivals épousent les pulsations de notre société comme les Latitudes contemporaines. Pluridisciplinaire et indiscipliné, le temps fort de la création artistique dans la métropole lilloise fête sa 20e édition. Happy birthday ? D’aucuns auraient sorti les cotillons pour célébrer deux décennies d’audace scénique. Pas Maria-Carmela Mini. La directrice des Latitudes observe toutefois le passé avec sérénité, assumant totalement la dimension politique, au sens premier, du festival. « Peu importe le médium, ce qui m’intéresse, c’est ce que l’on dit sur les plateaux ». Ça tombe bien, la vingtaine de compagnies programmées ce mois de juin ne manque pas de sujets. Premiers de cordée - Il est d'abord question de vivre-ensemble. La Croate Ivana Müller utilise par exemple l’image de la cordée (chère à vous-savezqui) pour décrypter notre besoin de collectif, interroger la force du groupe face à l’épreuve mais aussi en rire (Forces de la nature). Évidemment, on se préoccupe du péril écologique en cours. Tel un lanceur d’alerte, le metteur en scène François Gremaud déplace au théâtre le discours choc de l’astrophysicien Aurélien Barrau sur l’extermination du vivant (Auréliens). La performance Mount Average, de Julian Hetzel, ausculte enfin les rapports de domination. Le Néerlandais nous invite à mettre la main à la pâte, réduisant en poussière les statues de dictateurs pour leur donner un sens nouveau, nous incitant à ne pas rester spectateur devant les injustices de l'Histoire. Trois fils rouges, vingt bougies, et un festival plus contemporain que jamais. Marine Durand ille & Eurométropole, 08 > 28.06, divers lieux, 1 spectacle : 14 > 5€, pass Latitudes : 50€ L latitudescontemporaines.com élection / 08.06 : Meg Stuart - Cascade // 09.06 : Ivana Müller - Forces de la nature S 10.06 : Kubra Khademi - Les Héroïnes d'aujourd'hui // 10 > 12.06 : Kate McIntosh - Worktable 11.06 : François Chaignaud - Récital Isadora Duncan // 11, 13 & 14.06 : Alain Platel - C(h)oeurs 14 & 15.06 : François Gremaud - Auréliens // 15.06 : Ana Pi - Le Tour du monde des danses urbaines en 10 villes // 23 & 24.06 : Marco Berrettini, Jonathan Capdevielle, Jérôme Marin - Music All // 25 & 26.06 : Julian Hetzel - Mount Average… festivals – 45


Musique

Bagarre © Pierre Emmanuel Testard. Feu! Chatterton © Antoine Henault

MINUIT

t i u n a l t n a v a

Des concerts hors des sentiers battus, « entre herbe et eau ». Telle est la promesse de ce festival organisé par la Lune des Pirates, et qui se déploie dans le joli parc Saint-Pierre d'Amiens. Le spot idéal pour se poser, à la fraîche, devant quelques flibustiers de la scène hexagonale, à commencer par Feu! Chatterton. Emmené par Arthur Teboul et sa voix de prédicateur, le combo parisien a le chic pour offrir une dimension épique à chacun de ses morceaux, entre rock lettré et nappes électroniques. Tandis que Juliette Armanet se réincarne en diva disco, soufflant le chaud et le froid sur la variété française, les fous furieux de Bagarre mettent le feu à la soirée. Le quintette inaugure sa formule "club", soit un cocktail (molotov) de funk et d'electroclash, pour un grand moment de lâcher-prise à ciel ouvert. Et ce n'est pas tout… Pour sa troisième édition, Minuit avant la nuit part à l'abordage des hortillonnages ! En sus de balades musicales en barque, on attend ainsi sur l'île aux fagots, c'est-à-dire en plein cœur de ce dédale de jardins flottants, le duo belge le plus excitant du moment : Charlotte Adigéry et Bolis Pupul. Les Gantois étrennent (enfin !) leur premier album, Topical Dancer, mélange de house à la sauce Magritte (Ceci n'est pas un cliché) et de musiques caribéennes... entre autres pirateries. Julien Damien miens, 09 > 12.06, Parc Saint-Pierre, L'île aux fagots & hortillonnages, divers horaires A 1 jour : 30 > 15€ (gratuit le dimanche), balades en barque :10/7€ www.minuitavantlanuit.fr élection / 10.06 : Charlotte Adigéry & Bolis Pupul, Okala // 11.06 : Juliette Armanet, Selah S Sue, Bagarre (club), Feu! Chatterton, Squidji, Folly Group, Minuit Express… // 12.06 : Ottis Coeur, Kamelectric, La Chorale Rock… festivals – 46



Eesah Yasuke © Antoine Duchenne Hervé Billaut & Guillaume Coppola © DR

LILLE PIANO(S) Musique

Festival

On ne va pas citer Michel Berger, mais reconnaissons que Lille Piano(s) Festival se tient toujours debout et pour nous, ça veut dire beaucoup. Après une treizième édition qui, en 2016, faillit ne jamais voir le jour et deux années dans la tourmente du virus (où l’événement eut tout de même lieu !) on imagine ce festival insubmersible. Qui plus est lorsque l'invité d’honneur est l’illustre François-Xavier Roth. La particularité de son orchestre, Les Siècles ? Mettre en perspective des œuvres du xviie siècle à aujourd'hui en les jouant avec des instruments d'époque. Ainsi, en compagnie du pianiste Bertrand Chamayou, la partition de César Franck sera honorée lors d’une clôture d’ores et déjà anthologique. Mais avant cela, entre autres concerts d’orgue, de rap (Eesah Yasuke) ou d’electrojazz (Chamberlain), on aura savouré le prodige britannique Benjamin Grosvenor revisitant, lui aussi, Franck, mais également Ravel ou Albéniz. Enfin, ne négligeons pas les embellies vocales de la pétillante Camille Bertault, ici accompagnée de David Helbock ou les baguenaudes électroniques d’Acid Jazz Machine, preuve s’il en fallait de l’esprit d’ouverture d’un rendez-vous célébrant tous les claviers. T.A. ille, 10 > 12.06, Nouveau Siècle & divers lieux, 1 concert : 25€ > gratuit, pass : 10€ L www.lillepianosfestival.fr élection / 10.06 : Ouverture : Alice Sara Ott & Alexandre Bloch (Dir. ONL), Eesah Yasuke S & Youssef Swatt's… // 11.06 : Camille Bertault & David Helbock, Benjamin Grosvenor, François Chaignaud danse Isadora Duncan, Marie-Ange Nguci, Judith Jáuregui de Falla & Jean-Claude Casadesus (Dir. ONL), Chamberlain… // 12.06 : Acid Machine Jazz, Clôture : Bertrand Chamayou & François-Xavier Roth (Dir. Les Siècles)… festivals – 48



Musique

BEST KEPT

GRASPOP METAL

Bah ça alors, quel nom bien choisi ! On n’avait jamais entendu parler de ce festival. Quelle surprise ! Oui, bon… on a essayé de varier, d’aborder autrement le nom de ce rendezvous – et c’est assez laborieux. Ce qui ne l’est pas, en revanche, c’est cette affiche insensée : de la soul pour toutes les générations (Leon Bridges, Mavis Staples), une statue du Commandeur (Nick Cave), de l’electropop défiscalisée (Mura Masa), des familles dysfonctionnelles (The Strokes, Big Thief)… Un sans-faute qui fera du bruit. T.A.

Après deux ans d’absence, le Graspop a fait peau neuve (scènes déplacées et autres surprises) mais conserve l’essentiel : des orchestres qui jouent un tantinet fort. C’est donc avec les potards à dix, voire onze, que débarquent des légendes des roaring 80’s : citons Megadeth (rivaux de Metallica), Scorpions (en tournée d’adieu). Au rayon des étrangetés, on se demande à quoi ressemblent désormais les ados vieillissants Korn et, plus surprenant, Sepultura, dont le seul survivant est le bassiste. T.A.

Secret

H ilvarenbeek, 10 > 12.06, Safaripark Beekse Bergen, ven : 14h • sam & dim : 12h 1 jour : 109€, 3 jours : 230/215€ www.bestkeptsecret.nl S élection / 10.06 : Jamie XX, Leon Bridges, Jessie Ware, Altin Gün, Mavis Staples… 11.06 : The Strokes, Big Thief, Metronomy 12.06 : Nick Cave, Mura Masa, Soulwax…

Alice Cooper, Detroit Stories © earMUSIC © Jenny Risher

© Jokko Musique

Meeting

essel, 16 > 19.06, en ville, complet ! D www.graspop.be élection / 16.06 : Iron Maiden, Suicidal S Tendencies… // 17.06 : Megadeth, Scorpions, Whitesnake, Within Temptation… 18.06 : Judas Priest, Korn, Saxon… 19.06 : Alice Cooper, Deep Purple, Sepultura, The Offspring… festivals – 50



festivals – 52

IAM © Didier D Daarwin - Tous des K Model : Yattsukeru - Photo : Kuroh - Stylisme : Sirine Mehalli

Alonzo © Fifou


URBX tival Fes

Pluridiscipliniare

Exit Expériences urbaines, place à URBX. Roubaix offre plus d'ampleur à ce festival. D'ambition, aussi. Jadis capitale mondiale du textile, l'ancienne cité industrielle se rêve désormais en place forte internationale des cultures urbaines. Il faut dire que sa "street credibility" n'est plus à démontrer. Aux clichés réduisant encore Roubaix à une cité pauvre et désindustrialisée répond aujourd'hui une indéniable ferveur artistique. Street-art, danse, rap, sports urbains ou mode ont depuis belle lurette inscrit la ville du Nord sur la carte du monde. URBX s'en veut la rutilante vitrine. « Il s'agit de révéler tout ce que Roubaix a de beau », confirme Bénédicte Froidure, coordinatrice de l'association Cultures Urbaines, spécialement créée pour piloter le projet et rassemblant les acteurs locaux incontournables - comme la Cave aux Poètes, la Condition Publique ou le Gymnase, pour n'en citer que trois. Affiche aiguisée - Cette programmation s'article ainsi entre noms mondialement reconnus et roubaisiens… qui sont parfois les mêmes. À l'instar de Brahim Bouchelaghem, qui ouvre le festival en compagnie du Ballet du Nord, pour une déambulation chorégraphique et participative. Tandis que LEM (le graffeur qui recouvre les murs de la métropole de bonshommes tout ronds) nous convie à une fresque "participartive", l'ancienne Banque de France accueille la Banksy Humanity Collection, dotée de quelques chefs-d'œuvre du plus illustre des inconnus. Pendant ce tempslà, sur la Grand'Place, la Roubaisienne Eesah Yasuke en remontre à IAM ou Kob LaD, telle une samouraï du rap, bien décidée à retourner les clichés. Julien Damien Roubaix et métropole lilloise, 15 > 26.06, divers lieux, 1 spectacle : 59€ > grat, urbxfestival.com élection / 15.06 : Ballet du Nord CCN & Vous ! et la Cie Zahrbat, Fresque "participartive" S LEM... // 16 > 26.06 : Exposition Banksy - Humanity Collection // 16.06 : Ausgang, Loraine Dambermont - Toujours de ¾ face... // 17.06 : Art Point M - Foule Power… // 18.06 : Ousmane Sy - Queen Blood, - Défilé Anti_Fashion Project // 21.06 : Défilé ESMOD // 23.06 : Concerts gratuits : Hatik, Blaiz Fayah, James BKS, A2H // 24.06 : IAM, Alonzo, Leto, Tsew The Kid, Lefa, Vicky R, Bianca Costa, Cie Hervé Koubi - Boys Don’t Cry, Quatuor Debussy & Primat // 25.06 : Koba LaD, Luidji, Da Uzi, 47ter, Green Montana, Nemir, Edge, Isha, Eesah Yasuke… festivals – 53


Pluridisciplinaire

DIDOUDA ARRAS

LE DRAGON DE CALAIS :

Derrière cette onomatopée chère à Jane Birkin, on trouve des amoureux de la chanson française. Autrefois nommé Faites de la Chanson, ce festival fait la part belle à d'illustres ambassadeurs de la langue de Molière. Pas un hasard, donc, de retrouver ici Mathieu Boogaerts, qui marie comme peu d'autres beau verbe et sens du rythme. Enzo Enzo, inoubliable interprète de Juste quelqu'un de bien, présente son nouvel album, concentré de douceur et de classe, sous le regard avisé du poète rock CharlElie Couture. J.D.

À Calais, on célèbre l'arrivée de l'été comme il se doit : en musique et… à dos de dragon, bien sûr ! Samedi matin, la gigantesque créature inventée par François Delarozière est réveillée par un orchestre sous la baguette de Mino Malan, compositeur de la compagnie La Machine. Pas rancunière, la bête poursuit ses voyages toute la journée le long de la digue. Elle nous convie même à un grand barbecue, avant d'être bercée en soirée et de replonger dans son sommeil. Mais pour nous, la fête continue… J.D.

A rras, 17 > 21.06 Théâtre, Casino & cour de l'Hôtel de Guînes 1 concert : 30€ > gratuit, www.didouda.net

alais, 18 & 19.06 C Cité du Dragon concerts du réveil : sam : 10h & 14h • dim : 10h concert d'endormissement : sam : 19h, grat. 1 voyage : 9,50/6,50€ (gratuit -4 ans) www.compagniedudragon.com

© Stéphane Ribeiro Da Ascencao

Charlélie Couture © Shaan C.

Musique

Festival solstice d 'été

S élection / 17.06 : Enzo Enzo… // 18.06 : CharlElie Couture… // 19.06 : Mathieu Boogaerts… // 20.06 : Jef Kino, Mes Souliers sont rouges…

festivals – 54



L'Idéal, Abdelnasir Muhanna © Sébastien Jarry

REFUGEE FOOD Gastronomie

Festival

C'est un festival pas tout à fait comme les autres. Un rendez-vous gourmand et solidaire qui rend grâce au pouvoir fédérateur de la cuisine. Celui-ci a été créé en 2016 par Marine Mandrila et Louis Martin, deux globe-trotters amateurs de bonne chère. Ce couple en a eu l'idée après un tour du monde plutôt particulier, lors duquel il s'invitait à cuisiner et à manger chez l’habitant. Durant leurs voyages, disent-ils, « les moments les plus forts furent toujours ceux liés à la nourriture, aux rencontres autour des repas ». De cette expérience singulière naquit un livre, Very Food Trip, puis le Refugee Food festival. Le principe est aussi simple que noble : durant une semaine, des restaurateurs invitent des réfugiés (chefs professionnels ou non) à concocter le menu de leur choix. Il s'agit là de changer le regard sur ces populations, de favoriser leur insertion professionnelle tout en découvrant des cuisines du monde - du Surinam à la Syrie. D’abord cantonné à Paris et Strasbourg, cet événement s’est déployé partout en Europe. Pour cette 7e édition, 11 villes en France et en Suisse jouent le jeu, dont Lille et, pour la première fois, Calais - cité ô combien symbolique. Cette année, l'association Selo, qui soutient les réfugies ukrainiens, investit la Grande Scène, nouveau temple du streetfood lillois, et éphémère lieu de partage. J.D. ille & Calais, 17 > 25.06, Grande Scène, Les Grandes tablées, Aux éphérites, Le Verlaine, L Rés. étudiante du Crous, Le Channel de Calais et divers lieux, refugee-food.org festivals – 56



THE KINGS OF

disco funk

Ici, on replonge dans les seventies, en pleine ère du funk et du disco, guidés par trois légendes. Alors oui, ces formations ont un peu évolué. Kool & the Gang trace désormais sa route sans "Dee Tee" ou Ronald Bell, mais peut compter sur Robert "Kool" Bell pour assurer la bonne tenue de standards comme Fresh ou Celebration. Tito, Jermaine et les autres perpétuent l'héritage des Jackson Five tandis qu'Al McKay, fâché avec ses comparses pailletés d'Earth, Wind and Fire, la joue solo pour rendre grâce à un répertoire (lui) bien immortel. So... let's groove tonight ! J.D. L ille, 23.06, Zénith, 19h, 118 > 70€ www.zenithdelille.com

Arts visuels

Kelu Abstract © DR

Kool and the Gang © DR

Musique

SOLID'

art

Une œuvre achetée, un enfant qui part en vacances. Tel est le principe de cet événement organisé par le Secours populaire français. Durant trois jours, 120 artistes bien choisis (par un comité présidé par Bruno Gaudichon, le conservateur de La Piscine de Roubaix), exposent et vendent leurs créations inédites à l'Hôtel de Ville, sous le patronage de Speedy Graphito, parrain de cette 8e édition. Dans cet espace de 2 500 m2, on trouve ainsi des créations signées Gilles Defacque ou le street artiste Mimi The Clown. J.D. L ille, 24 > 26.06, Hôtel de ville ven : 14h • sam & dim : 10h, gratuit, solidart.fr

P rogramme / Kool & the Gang, The Jacksons, Earth, Wind & Fire Experience feat. Al Mckay festivals – 58



Musique

Madness © Martin Parr

RETRO C

Trop

Né en 2016, ce festival annonce la couleur : on n’est pas exactement là pour découvrir les talents de demain. En revanche, ceux d’hier et d’avanthier, qui prennent (et tiennent) encore la route, sont tous présents. Alors, musicalement, les grands écarts sont nombreux mais reconnaissons que l’affiche rétromaniaque fait envie. Au programme, le formidable Alice Cooper, chantre d’un shock-rock qui ne fait plus peur à personne, surtout lorsque l’on sait que Vincent Furnier (de son vrai nom) taquine davantage les clubs de golf que les cercles satanistes. Suggs et sa bande (Madness) restent eux injustement sous-estimés. Pourtant, cet honnête groupe de ska est surtout une formidable formation pop, dans la tradition des Kinks (si si!). Ce ne sont pas les seules gloires 80’s : OMD et sa valse de tubes post-kraftwerkiens, ou Simple Minds et son rock de stade. Ah, et pour le clin d’œil, citons From The Jam : un tribute band, forcément, l’élégant Paul Weller ayant toujours refusé une reformation. Sur ce, portez-vous bien, et à l’année dernière ! T.A. illoloy, 24 > 26.06, Château de Tilloloy T ven : 18h • sam & dim : 13h, ven : 44/15€ (enfant -12 ans), sam ou dim : 85/55/15€ (- 12 ans) pass 2 jours : 154/95/30€ (-12 ans), pass 3 jours : 199/130/45€ (-12 ans), www.retroctrop.fr élection / 24.06 : Tryo, La Rue Kétanou, Samarabalouf, Dirty Honey S 25.06 : Alice Cooper, Rival Sons, Status Quo, Seasick Steve 26.06 : Simple Minds, Madness, OMD, The Undertones, From The Jam festivals – 60





Musique

COULEUR

Café

Vitrine alléchante du cosmopolitisme bruxellois, Couleur café défend, depuis 30 ans, le métissage culturel en brassant tous styles de musique. Rap, soul, jazz, reggae, hip-hop, techno et dérivés se carambolent au pied de l’Atomium. Cette année, on citera quelques fidèles de cette institution – dont la légende Youssou N’Dour, le maître Carl Craig ou le passeur Gilles Peterson. Et l’on fera un grand écart entre la soul vintage de Lee Fields et les DJ-sets dubs inspirés de Stand High Patrol. T.A. B ruxelles, 24 > 26.06, Square de l'Atomium ven : 16h • sam & dim : 15h, 1 jour : 48€, pass 3 jours : 109/95€, www.couleurcafe.be S élection / 24.06 : Caballero & JeanJass, Zwangere Guy, Stand High Patrol... 25.06 : Youssou N'Dour, Lee Fields, Carl Craig... // 26.06 : Gilles Peterson, BCUC...

The Smile © Alex Lake, Two Short Days

Lee Fields & The Expressions © Vanessa Rasschaert

Musique

TW

Classic

Juste avant Rock Werchter, le Festivalpark vibre avec quelques légendes, au premier rang desquelles on trouve Nick Cave. Le pape gothique du blues-rock vient jouer des morceaux de Carnage, son dernier album, mais on attend toujours de lui son interprétation magistrale de The Mercy Seat. Au rayon des comebacks improbables, citons Placebo, jamais vraiment remis de sa crise d’ado ou The Smile, soit l’énième side-project de Thom Yorke, pas franchement plus souriant que d’habitude, mais toujours aussi hypnotique. J.D. erchter, 25.06, Festivalpark, 12h, 96€ W www.twclassic.be élection / Nick Cave & The Bad Seeds, S Placebo, Sleaford Mods, Whispering Sons, The Smile, Courtney Barnett festivals – 64



Clara Luciani © Alice Moitié

Roméo Elvis © Maxence Dedry

festivals – 66


LA BONNE

aventure

Musique

Besoin de prendre le large ? Alors cap sur Dunkerque et la Bonne aventure. Créé en 2017, le "petit frère des Nuits secrètes" fait souffler un air de vacances sur la côte - et dans la tête. Il faut dire que ce beach festival (gratuit) ne manque pas de sel. La preuve... De la bonne musique, face à la mer et les pieds dans le sable de Malo-lesBains - soit l'une des plus belles plages du pays... Voilà ce qui fait tout le charme de la Bonne aventure. « Oui, c'est une bonne façon de démarrer l'été », se réjouit Olivier Connan. Au programme ? Concerts, DJ sets, parcours secrets et, surtout, ce petit grain de folie si particulier, ici apporté (entre autres) par le génial Dom Whiting. Notre homme s'est révélé durant le confinement, en mixant de la drum & bass tout en pédalant dans les villes d’Angleterre sur son vélo cargo, équipé d’une enceinte et de platines. Dans la cité du carnaval, ses promenades devraient faire leur petit effet... « Cette année, on a d'ailleurs multiplié les projets déambulatoires », souligne le directeur du festival. Histoire de prendre une grande bouffée d'air. Nouveaux horizons Outre les arts de la plage et randonnées surprises, le gros du festival se déroule évidemment sur la grande scène, qui accueille des artistes ayant le vent en poupe. Citons Gaël Faye, Clara Luciani ou Roméo Elvis, venu étrenner son dernier album, le bien nommé Tout peut arriver. Au milieu de ce line-up tourneboulant, on découvre aussi des noms moins connus mais pareillement excitants, comme la Franco-Américaine Crystal Murray. Là aussi, ce cocktail lascif de funk, d'electro et de trap ne laissera pas grandmonde indifférent - on prend les paris. Julien Damien unkerque, 25 & 26.06, Plage de Malo-les-Bains, front de mer, Place du Centenaire et Kursaal D gratuit, www.labonneaventurefestival.com élection / 25.06 : Roméo Elvis, Thylacine, Lilly Wood and The Prick, Arnaud Rebotini, S The Murder Capital, Poupie, Johnny et Wallace // 26.06 : Clara Luciani, Gaël Faye, Crystal Murray, You Man, Johnny et Wallace + Parcours secrets & Arts de la plage festivals – 67


KermesZ à l'Est © DR

Les tilants Ru Pluridisciplinaire

C’est devenu une tradition. Avec les Rutilants, l’été commence en fanfare sur l’ancien site minier du 9-9 bis. Le temps d'une soirée et d’une fourmillante après-midi, saxos, trompettes et plus largement musiciens nomades surgissent au pied du terril de Oignies, dans le Pas-de-Calais. Le tout entièrement gratuit. En "before", le Métaphone accueille dès vendredi soir un concert singulier : Happy ends, la chanson fait son cinéma. Soit un medley de musiques et de dialogues de films qui composent une nouvelle histoire. Le lendemain, dès 15h, sept formations de cuivres se succèdent sur le parvis dans tous les styles : jazz, musique créole ou des Balkans (les fous furieux de KermesZ à l'Est), mais aussi... dance et house (!), à l'instar d'Electrochic. Cette fanfare donne du souffle aux hits de David Guetta, Calvin Harris ou Bob Sinclar. À la nuit tombante, les sonorités béninoises se mêlent à Nougaro le temps d’Une valse à Cotonou, puis c’est le beatbox qui croise les cuivres avec le brass band Bat Fat et le rappeur Napoleon Maddox. Et parce qu’à Oignies, le métissage n’a pas de limites, on se met à la "potato-dance", ou comment éplucher des patates et croquer une frite sur le beat de DJ FrietMachine. Alléchant, n'est-ce pas ? Madeleine Bourgois Oignies, 24 & 25.06, 9-9bis, ven : 20h30 • sam : 15h, gratuit, 9-9bis.com élection / 24.06 : Chloé Lacan, Thibaud Defever & l’Harmonie municipale de MontignyS en-Gohelle - Happy ends, la chanson fait son cinéma… // 25.06 : Radio Kaizman - Block Party, La Fanfare Eyo’nlé - Une Valse à Cotonou, Les Frères Scopitone - Caravane Juk'Box, Superhallo - DJ FrietMachine, Electrochic, KermesZ à l'Est, Bad Fat feat. Napoleon Maddox… festivals – 68



Angèle © Manuel Obadia-Wills // Vald © Libitum // Declan Mckenna © Steve Whittaker

© Jérôme Pouille / Live Nation France Festivals


Musique

MAIN SQUARE

Festival

Certes, c'est le plus gros festival des Hauts-de-France, mais la taille ne compte pas vraiment, n'est-ce pas ? En tout cas, le bébé de Live Nation a encore pris du poids, s'étalant désormais sur quatre jours (au lieu de trois) pour accueillir quelque 65 artistes. Pas les plus vilains... Jamais assiégée au cours de son histoire (d'où son surnom, "la belle inutile"), la Citadelle d'Arras voit déferler une palanquée de grands noms, avides d'en découdre avec la scène après deux années de disette. Quelques légendes d’hier (Black Eyed Peas, Sum 41), voire d’avant-hier (Sting, Pixies) partagent l’affiche avec des pointures bien d’aujourd’hui (la nouvelle sensation du rock anglais Declan Mckenna) et pour certaines déjà passées par Arras. Tenez, Twenty One Pilots. Programmés en 2014, les Américains ont depuis changé de statut, et passent de la petite à la grande scène pour y mettre le feu avec leur mythique Stressed Out. Parmi les autres habitués des lieux et "machines à tubes", Angèle est attendue pour renouveler ce moment de grâce de 2019, où l'on chantera avec elle notre amour pour Bruxelles. French flair - Tandis que La Femme et Feu ! Chatterton se disputent toujours le titre de meilleur groupe français (dans des styles différents mais avec un même sens de la fête), le rap francophone est aussi largement à l’honneur. À la trap-zouk de Niska répond ainsi le flow mitraillette de Vald (qui étrenne l’ébouriffant V) sous le regard avisé de DJ Snake. Le compositeur du Val d’Oise n’en finit plus d’élargir son spectre musical, entre EDM, hip-hop ou house, et débarque à Arras en taille patron. J. Damien rras, 30.06 > 03.07, La Citadelle, jeu & ven : 15h30 • sam : 13h30 • dim : 12h30 A 1 jour : 54€, pass 3 jours : 129€, www.mainsquarefestival.fr élection / 30.06 : Angèle, Dj Snake, Louane, SCH, Bekar… // 01.07 : Feu! Chatterton, S LP, Sting, Niska, Marcel et son orchestre… // 02.07 : Pixies, Vald, – M –, Black Eyed Peas, Declan Mckenna, La Femme, Madeon… // 03.07 : Skip the Use, George Ezra, Sum 41, Twenty One Pilots, Tones And I, Caballero VS Jeanjass, Purple Disco Machine… festivals – 71


© David Bormans

Festival au Carré Pluridisciplinaire

Après une pause légitime, le Festival au Carré revient dans une version augmentée. Le rendez-vous pluridisciplinaire de Mons Arts de la scène s'échappe du Carré des Arts pour investir le Théâtre le Manège, l'Arsonic, mais aussi les parcs, jardins et espaces publics dans toute la ville. Le sous-titre de cette édition, "la vie est une fête", donne le ton d'une programmation foisonnante. La fête justement, nous la ferons de bien des façons : en musique avec le duo culte de la pop africaine, Amadou et Mariam, et le maestro electro Arnaud Rebotini, ou devant des spectacles détonants. Par exemple en se tordant de rire devant les prouesses tout en blagues des acrobates de la compagnie Soif totale, qui explorent avec énergie (et une certaine dispersion), le Prologue à toute création. Vous en voulez encore ? Une "blind test party", une soirée seventies avec boule à facettes, vinyles et décoration rétro, une balade au Parc de la cascade d’Hyon en compagnie de marionnettes à taille humaine et de funambules... Soit plus d'une trentaine de propositions qui remettent enfin les choses dans le bon sens : à l'envers. Marine Durand Mons, 01 > 10.07, divers lieux en ville, 1 spectacle : 25€ > gratuit, surmars.be élection / 01.07 : Soirée d'ouverture, apéro avec La Drache, Kokoko ! // 02.07 : Tim Dup S Compagnie BVZK - Janis, Soirée About 70’s // 03.07 : Triggerfinger, Casimir Liberski 04.07 : René Laloux par Süb and The Fantastic Planet // 05.07 : Amadou & Mariam 06.07 : Arnaud Rebotini, La Jungle, Cie Soif totale - Prologue // 06 & 07.07 : Cie Okidok - In Petto // 08.07 : Blind Test Party // 08 & 09.07 : Cie Thor - Summertime // 09.07 : Soirée de clôture // 09 & 10.07 : Jean-Christophe Meurisse - Les Chiens de Navarre... festivals – 72



Musique

r e t h c r e W

On pourrait, comme à pas mal de festivals estivaux, reprocher beaucoup de choses à Rock Werchter : son gigantisme, la profusion de son affiche, qui conduit à des choix et donc à des renoncements… Mais ce dont on lui saura toujours gré, c’est son éclectisme et ses choix toujours justes. En témoigne ce petit échantillon. Thibaut Allemand

PHOEBE BRIDGERS Inclassable car plurielle, Phoebe Bridgers incarne, à 27 ans, l’avenir d’une certaine idée de la pop. À l’instar de Billie Eilish, cette Californienne manie les références sans se soucier de la bienséance, plaçant au même niveau My Chemical Romance ou Jeff Buckley. Complice de Conor Oberst, elle a signé deux albums importants

dont le dernier, Punisher, la voit mêler cordes, cuivres, samples et nappes avec le même bonheur. Le résultat ? Une pop lunaire, intense, naviguant à vue entre grandiloquence et intimisme. Sur scène, Bridgers donne vie à ses chansons cyclothymiques avec une passion qui fait tomber nos dernières (maigres) réserves.

© Olof Grind

ROCK


© Reto Schmid

© DR © Olivia Rose

JAMIE XX

HAIM

De The XX, on n’espère plus vraiment un album de la trempe de son tout premier, sommet intemporel dont la mélancolie évanescente fait toujours effet, près de quinze ans plus tard. Si on regrette ? Non, c’est ainsi. Après tout, son concepteur principal, Jamie Smith, alias Jamie xx, a changé. Dès son premier essai solo, In Colour (2015), il annonçait la… couleur et rompait avec son passé blafard. Depuis, entre remixes inspirés et DJ-sets enchantés, le Britannique s’est imposé comme un orfèvre électronique de premier ordre.

Légères et sans lendemain : telles semblent être les chansons de Haim. Nourris au folk du Laurel Canyon (ces harmonies vocales), à la pop, au funk, ces morceaux pourraient ne pas durer. Pourtant, voici bientôt dix ans que ces frangines traînent leurs guêtres dans les arcanes du cool californien, s'invitant chez Taylor Swift, frayant avec Calvin Harris, partant en tournée avec Phoenix… et jouant dans l’excellent Licorice Pizza (2021) de Paul Thomas Anderson. Un tel CV ne saurait mentir. Il y a un peu de profondeur au fond de cette légèreté...

MICHAEL KIWANUKA

Né en Ouganda mais grandi dans le quartier de Muswell Hill au nord de Londres (oui, le coin des Kinks), Michael Kiwanuka s’est imposé, en une décennie et trois réussites, comme un grand nom de la soul d’aujourd’hui. Son timbre et ses morceaux trempés dans la soul, le jazz et le blues, évoquent Bill Withers ou Terry Callier. Mais la production, signée Danger Mouse (qu’on ne présente plus) ou le Londonien Inflo (Adele, Little Simz…) propulse une soul millésimée, fruit de temps troublés, dans notre présent incertain.

Werchter, 30.06 > 03.07, Festivalpark, complet !, www.rockwerchter.be élection / 30.06 : Pearl Jam, The War On Drugs, Pixies, Rag’n’Bone Man, Haim, Fontaines S D.C., Beck, Lianne La Havas, Black Pumas, Altın Gün… // 01.07 : Metallica, Idles, Miles Kane, Moderat, Alt-J, Parcels… // 02.07 : Imagine Dragons, Twenty One Pilots, Jamie xx, Jorja Smith, LP, Phoebe Bridgers, Bicep, Leon Bridges, Clairo… // 03.07 : Red Hot Chili Peppers, The Killers, Sum 41, Disclosure, Michael Kiwanuka, Meute, Moses Sumney… festivals – 75


Musique

to Heaven

Ukuleleboboys © Aurélie De Parmentier

UKULELE

C'est un petit instrument aux notes rieuses. Un objet dont la taille est inversement proportionnelle à son capital sympathie : immense ! Arrivé à Hawaï avec les colons portugais à la fin du xixe siècle, le ukulélé fait depuis figure de star internationale - Billie Eilish l'adore. Pour sûr, il méritait bien son festival dans les Hauts-de-France. Celui-ci a vu le jour sous l'impulsion d'Alexandre Humbert, aka Sancho des Ukuleleboboys, duo connu pour ses reprises acoustiques et un brin décalées - de Dalida à Led Zeppelin ! Et le Lillois (parfois Mexicain) ne tarit pas d'éloge sur son compagnon de jeu à quatre cordes. « On peut l'emmener partout, il est accessible, ludique, modeste… c'est le meilleur instrument du monde ! ». De concerts en festivals, il a aussi découvert autre chose derrière cette pratique : une philosophie de vie, bâtie sur des valeurs comme la convivialité et le partage. C'est justement dans cet esprit qu'a été conçu Ukulele to Heaven, soit « une expérience collective où le public est partie prenante de l’événement », notamment grâce à des masterclass et des scènes ouvertes. Côté line-up, on découvre des ukulelistes venus du monde entier, et des potentialités insoupçonnés, du jazz swing années 1930 des Allemands de The Bad Mouse Orchestra au blues du Canadien Manitoba Hal, en passant par la pop rock des Polonais de PPNOU… Petit, mais costaud ! Julien Damien aint-André-lez-Lille, 01 > 03.07, Le Zeppelin, 10h, ven : 19h • sam : 16h • dim : 14h, ven : 10€ S sam ou dim : 20€, pass 3 jours : 30€ (gratuit -12 ans), www.ukuleletoheaven.com élection / 01.07 : The Bad Mouse Orchestra, Galapiat Cirque // 02.07 : Ukuleleboboys, S Dead Mans Uke, Manitoba Hal, Les Cousines Machines // 03.07 : Professor Peter and the Tubaman, Moon Berries, PPNOU, Ukulelezaza

festivals – 76



Musique

PARADISIAC

Field

Niché au cœur de l'Avesnois, ce festival prend des allures de paradis champêtre ET artistique. Pour cause, il accueille neuf troupes de théâtre et 24 groupes, aux noms parfois fleuris - précisons qu'on n'a rien contre UltraMoule, trio "punk à chatte" dézinguant le sexisme à coups de violons. Dans le genre éclectique, difficile de faire mieux, entre la fusion rock-rap d'Ausgang, la musique électronique de chambre de Chapelier fou Ensemb7e ou le reggae roots du (légendaire) Jamaïcain Jah Observer. J.D. andrecies, 01 > 03.07, La Gadelière, 17h L pass 1 jour : 25 > 17€ • pass 3 jours : 50 > 30€ (gratuit -12 ans), collectif-parasites.com élection / 01.07 : Ausgang… // 02.07 : S Eesah Yasuke, UltraMoule… // 03.07 : Chapelier fou Ensemb7e, La Jungle, l'Orchestre du Vetex… // 02 & 03.07 : TOF Théâtre, Madam'Kanibal, Cie Chamane…

Myd © Alice Moitié

© Anouchka

Musique

PARADISE

City

Né en 2015, au pied d’un château du xve siècle entre forêts et étangs, ce festival n’a rien d’une forteresse et sait se montrer accueillant. Jugez plutôt : une performance atomique du frappadingue Axel Boman (qui d’autres a composé avec des physiciens nucléaires ?!), le come-back de Kittin & The Hacker, tandem pourvoyeur d’une new wave aussi froide que pince-sans-rire depuis plus de 20 ans, les tracks lumineux de Myd, alias le « Benny Hill de l’electro ». Sans oublier un set forcément gagnant de DJ Tennis ! T.A. erk, 01 > 03.07, Château de Ribaucourt P ven : 14h • sam & dim : 12h, ven ou dim : 69€ sam : 74€, pass 3 jours : 159/139€ www.paradisecity.be Sélection / 01.07 : Dixon, DJ Tennis, John Talabot B2B Jane Fitz, Peach // 02.07 : Axel Boman, Kittin & The Hacker, Weval 03.07 : Kerri Chandler, Myd… festivals – 78



ROOTS REGGAE FESTIVAL

Chaque été depuis 22 ans, Bruxelles fait son cinéma. D'Anderlecht à Uccle, on se pose sur des transats, en plein air, pour profiter de séances très spéciales, façon "cinéma de quartier". Pas d'avant-premières ici. Il s'agit surtout de se rassembler devant un grand écran et des films fédérateurs. Si vous avez raté Adieu les cons de Dupontel, c'est l'occasion rêvée de vous rattraper.

À la ferme Bériot, l'herbe est forcément plus verte qu'ailleurs. En tout cas le temps de cet événement dédié à la musique de Jah, et pas exclusivement tourné vers le courant "roots" - il sera aussi question de dancehall ou d'afrobeat. Parmi tout ce beau monde à dreadlocks, on a repéré le vénérable Max Romeo, à qui l'on doit l'inusable War Ina Babylon.

ruxelles, 01 > 15.07, divers lieux, gratuit B bruxellesfaitsoncinema.be

Max'1 and the Rootsmaker © DR

élection / 01.07 : Presque de Bernard S Campan & Alexandre Jollien (Ganshoren) 06.07 : Adieu les cons d'Albert Dupontel (Anderlecht) // 12.07 : Nos plus belles années de Gabriele Muccino (Woluwe-Saint-Pierre)

Max Romeo © Valentin Campagnie

© Laureline Baron

BRUXELLES FAIT SON CINÉMA

ensies, 01 > 03.07, Ferme Bériot H ven : 16h • sam & dim : 10h, 1 jour : 30 / 20€ pass 3 jrs : 60 / 50€, rootsreggaefestival.be élection / 01.07 : General Lion I, Natty S Roots... // 02.07 : Al Campbell, Omar Perry & The Wah Wah Band... // 03.07 : Max Romeo, Marcus Gad...

De Dunkerque aux ruelles enfiévrées de Kingston, il n’y a qu’un pas. L’îlot des 4Ecluses accueille d’éminents ambassadeurs du reggae, mais aussi du ska ou du dub - tel le Britannique Dub Judah, auteur du légendaire Babylon is a Trap. Entre autres curiosités, les Espagnoles de Chalart58 & Woman Solider nous apprennent à rouler les "r" en dansant sur le rub-a-dub.

JAMAICAN DOCKS DAY

Dunkerque, 02 & 03.07, Les 4Ecluses, sam : 18h • dim : 11h 15/10€ (dim : gratuit), 4ecluses.com S élection / 02.07 : Dub Judah, Chalart58 & Woman Soldier, Two Tone Club, Max’1 & The Rootsmaker, Chalice Sound System, Rudy Roots, Tonton Addi … festivals – 80



Musique

En une vingtaine d’années, le rap est devenu le genre musical dominant sur… à peu près toute la planète. Ceci explique sans doute le parti pris quasi exclusivement hip-hop visé par les Ardentes - festival qui étrenne son nouveau lieu d'accueil à Rocourt, après avoir été délogé du parc Astrid. Où se succèdent, trois jours durant, tout ce que les USA ont fourni de meilleur en matière de rap, épaulés par quelques cadors francophones. La preuve par quatre. Thibaut Allemand

ANDERSON. PAAK Gueule d’ange et sourire XXL, Anderson. Paak cultive le goût du mélange entre hip-hop, soul seventies et basses girondes. Chez le Californien à la voix éraillée, tout est affaire de traits d’union : révélé par Dr. Dre (qui a décidément le nez creux) ses disques ont vu défiler les invités prestigieux, de la vieille école (Snoop Dogg, André 3000

ou… Smokey Robinson) comme de la nouvelle (Kendrick Lamar, l’immense Kadhja Bonet). Récemment, il s’est acoquiné avec Bruno Mars. On craignait le pire mais, à l’écoute de Love’s Train, soul suave et chromée évoquant la sophistication du Philly Sound, on dépose les armes. Anderson. Paak réussit un sans-faute.

© DR

Les ntes Arde


© DR

Il y a dix ans, encensés par à peu près tout le monde (jeunesse bouillonnante et critiques middle-age ne voulant surtout pas rater la "next big thing") le crew Odd Future et son leader, Tyler, The Creator, auraient pu exploser en vol, dévastés par la pression mise sur leurs épaules. Eh bien, pas du tout : ce Créateur là n’aura pas plié l’affaire en sept jours. Il a plutôt pris son temps, poursuivi son travail et signé six albums aussi personnels qu’étranges, poussant loin le hip-hop et l’introspection.

SCH

© Ojoz

© Luis ‘Panch’ Perez Columbia Records

TYLER, THE CREATOR

DAMSO

En une poignée d’années, quatre albums et des featurings en pagaille, Damso s’est imposé comme une valeur sûre du rap. Il a signé des incontournables (Débrouillard ou Bruxelles vie), fait le grand écart entre Booba et Angèle (il apparaît sur son dernier LP). Derrière les oripeaux trap et les saillies bravaches, le Belgo-Congolais ouvre parfois la porte à la mélodie et à la mélancolie. Une certaine froideur qui donne de la profondeur à l’ensemble. Ici, Damso joue à domicile, et a un rang à tenir. Soyez prévenus.

« S’lever pour 1 200 c’est insultant ». Cette punchline, on l’a vue sur les banderoles lors des manifestations contre la loi Travail, en 2016. Attention : SCH n’est pas un rappeur militant, "conscient", bref, fatigant. Membre des projets 13’Organisé et Le Classico organisé, initiés par Jul, le Marseillais a signé cinq albums contant des histoires de crimes, de pauvreté, de mafia… sur fond de trap et de cloud rap – on entend déjà les belles âmes crier au scandale. Mais n’est-ce pas ce que fait Martin Scorsese depuis 50 ans ?

Liège, 07 > 10.07, Rocourt, 12h30, 1 jour : 80/25€ ( -12 ans), 4 jours : 217/187€, www.lesardentes.be élection / 07.07 : Anderson. Paak & The Free Nationals, Green Montana, Ichon, Koba LaD, S Leto, Megan The Stallion, Niro, Ronisia, SCH, Sexion d'Assaut, Soso Maness… 08.07 : Damso, Hamza, Hatik, Kaaris x Kalash Criminel, Lujipeka, PLK, Todiefor, Tyler The Creator… // 09.07 : Bekar, Geeeko, Jok'Air, Naps, Ninho, PNL, Prince Waly, Zola… 10.07 : 47ter, ASAP Rocky, Da Uzi, Freeze Corleone, Gambi, Orelsan, Stromae… festivals – 83


Van Morrisson © Gérard Drouot Prod.

GENT JAZZ

Festival

Rendez-vous immanquable des amoureux de la note bleue comme des amateurs de Petite fleur et de vieilles pierres (ce festival émerge dans les jardins d’une ancienne abbaye du xiiie siècle), le Gent Jazz parvient à se renouveler chaque année. En conviant des chefs-d’œuvre absolument pas en péril – citons Archie Shepp, intime de John Coltrane et figure du Black Arts Movement, dont le saxophone traversa des décennies de jazz comme de rap. Ou le barde irlandais Van Morrison qui, non content d’avoir signé un standard avec Them (Gloria, évidemment) et une poignée de disques inusables (dont l’insurpassable Astral Weeks), a collaboré avec une palanquée de légendes. On ne manquera pas la rencontre au sommet entre le sax de Charles Lloyd et la six-cordes de Bill Frisell, et on se posera pour goûter aux douceurs de Melody Gardot et Agnes Obel, avant de se laisser emporter par les tornades poétiques de Kae Tempest… T.A. G and, 07.07 > 16.07, site de la Bijloke, 1 jour : 62 > 8€, pass 2 jours : 59 / 49€, pass 3 jours : 88/73€, pass 4 jours : 117/97€, www.gentjazz.com S élection / 07.07 : Ibrahim Maalouf… // 09.07 : Archie Shepp & Jason Moran feat. Marion Rampal, Charles Lloyd with Bill Frisell… // 10.07 : Van Morrison… // 12.07 : Melody Gardot, Gabriel Rios… // 13.07 : Sting… // 14.07 : Agnes Obel… // 15.07 : Kae Tempest… 16.07 : Avishai Cohen Trio, Youn Sun Nah... festivals – 84

Melody Gardot © DR

Musique



PILE AU

RDV

Créé avec les habitants du quartier du Pile, à Roubaix, ce festival rayonne cette année durant deux semaines. Après l'Afrique, il se met à l'heure du street art. Entre concerts et spectacles, on admire les créations in situ d'artistes découverts lors de l'exposition Urbain.es, à la Condition Publique. Les fresques psychédéliques de l'Américaine Maya Hayuk ou les poèmes muraux de l'Écossais Robert Montgomery (aka le "Banksy des mots") donnent aux bords du canal des allures de musée à ciel ouvert. J.D. R oubaix, 08 > 24.07 La Condition Publique Quartier du Pile & Canal de Roubaix gratuit, laconditionpublique.com

Musique

© Ugo Ponte - ONL

Maya Hayuk © Julien Pitinome

Pluridisciplinaire

LES NUITS

d'été

Après avoir conduit le Carnaval des animaux, l’an passé, Alex Vizorek se glisse à nouveau dans la peau du récitant. Bien accompagné par l’ONL, mais aussi quatre grands interprètes français et le Jeune Chœur des Hauts-de-France, le plus érudit des humoristes nous raconte une "petite histoire de l’opéra". Du Don Giovanni de Mozart au Candide de Bernstein, le compagnon de jeu de Charline Vanhœnacker se laisse aussi aller à quelques anecdotes sur chaque œuvre avec la verve qu’on lui connaît. J.D. ille, 07 & 08.07 L Nouveau Siècle, 20h, 55 > 6€ www.onlille.com

festivals – 86



CACTUS

festival

On retrouve ici des habitués de très grandes scènes (voire de stades) dans l’intimité du Minnewater Park. Franchement, auriez-vous osé espérer applaudir Robert Plant à l’ombre d'arbres centenaires ? En compagnie de la violoniste Alison Krauss, l’ex-leader de Led Zeppelin revisite la country et le bluegrass. Ailleurs, le Cactus a concocté un best-of de la scène britannique des 25 dernières années (Supergrass, Belle & Sebastian, Franz Ferdinand…). Le tout en famille, ou presque. T.A. B ruges, 08 > 10.07, Minnewater Park jeu : 16h • ven & sam : 14h, 1 jour : 75/62€ pass 2 jrs : 130/104€, pass 3 jrs : 160/135€ www.cactusfestival.be S élection / 08.07 : Robert Plant & Alison Krauss, Belle and Sebastian… // 09.07 : Franz Ferdinand, Ben Harper & The Innocent Criminals… // 10.07 : Balthazar, Richard Hawley, Supergrass…

Musique

Arnaud Rebotini © Jacob Khrist

Alison Krauss, Robert Plant © David McClister

Musique

EN NORD

Beat

Ce jeune festival (né en 2015) aurait pu disparaître pour les raisons sanitaires que l’on sait. Or, il a survécu et s’étale désormais sur trois journées ! Bigarré, mais pas égaré, le line-up démontre une rare cohérence. Ainsi, au niveau électronique, on retrouve le boss analogique Arnaud Rebotini, le génie des platines DJ Pone, la techno carrée de DDDXIE (ex-batteur de Gommm et de Cercueil) ou encore Carpenter Brut, entre synthwave, imagerie metal et films d’horreur. Quelle galaxie ! T.A. ailleul, 08 > 10.07, Parc Legrand-Grubbe B ven : 16h30 • sam & dim : 14h, 1 jour : 30 > 20€ pass 3 jours : 80/65€, www.ennordbeat.fr élection / 08.07 : Arnaud Rebotini, S Georgio… // 09.07 : Carpenter Brut, Sopico, DJ Pone, DDDXIE… // 10.07 : Chinese Man + Scratch Bandit Crew, L'Or du Commun… festivals – 88



DOUR Musique

© Faris Sher

Festival

De petite soirée créée en 1989 par quelques étudiants afin de donner un coup de fouet à leur coin, le festival de Dour s’est transformé en redoutable machine de guerre. Un rendez-vous à la programmation un peu folle, mais où le grand public comme les spécialistes trouvent leur bonheur. Ils ne verront pas plus de 5 % des noms à l’affiche, mais qu’importe ! Rassemblement majeur de la saison, Dour attire les sponsors. Manque tout de même un co-branding avec Le Robert, dont le dictionnaire des superlatifs est toujours utile lorsqu’on veut décrire cet événement, qui prévoit un warm-up de… trois jours, dès le 11 juillet (le Dour CampFest) ! Le line-up s'étend d’Angèle à Parcels, des remuants Charlotte Adigéry et Bolis Pupul au sensible Rone, du parrain Laurent Garnier à la jeune Lala &ce, sans oublier la pop gracile de Metronomy ou encore l’ingérable Booba – avec qui va-t-il se prendre la tête, ce p’tit bonhomme ? Bref, les survivants connaissent. Les néophytes découvriront. Cela relève autant du rite de passage que d'un sommet pour mélomane mais hé, depuis la fin des 60’s, c’est aussi ça, un festival, non ? T.A. our, 13 > 17.07, Parc éolien, mer : 19h • jeu& ven : 14h30 • sam & dim : 13h30 D 1 jour : 180/ 88€, 5 jours : 330 > 195€, www.dourfestival.eu + Dour CampFest : 11 > 13.07 élection / 13.07 : Carl Cox, Parcels, Caballero & JeanJass, Charlotte Adigéry & Bolis S Pupul, Monika Kruse… // 14.07 : Amelie Lens, Booba, OBOY, Sven Väth… // 15.07 : Ben Klock, Dinos, Laylow, Black Country New Road, Erika de Casier… // 16.07 : Angèle, The Blessed Madonna, Hamza, Laurent Garnier, Metronomy, Niska, Princess Nokia, Lala &ce, Yves Tumor, Benjamin Epps… // 17.07 : DJ Koze, Flume, GoldLink, Roméo Elvis, Rone, Vald, Josman, Loyle Carner, Mansfield.TYA, Mezerg, Sleaford Mods, Vladimir Cauchemar, Los Bitchos, Mad Professor, Warmduscher… festivals – 90



© Sarah Bastin

Suivre

À

Juillet - Août - Part 2

Juin donne le ton d'un été de festivals revigoré. Les mois de juillet et août s'annoncent de la même trempe. En attendant notre prochaine sélection de rendez-vous incontournables, voilà déjà quatre bonnes raisons de rester dans le coin, et de décaler vos vacances au mois de septembre. J.D.

LES NUITS SECRÈTES Voilà ce qu'on appelle un retour en force. Après deux années à toussoter, le festival célèbre ses 20 ans avec une programmation de circonstance (PNL, Damso, Orelsan, Charlotte de Witte, Vitalic… entre autres !) et agrandit son terrain de jeu pour s'étendre sur neuf hectares. À Aulnoye-Aymeries, entre ville et bocage, on découvre de nouvelles scènes comme l'Oasis ou la Plaine, les pieds dans l'herbe et la tête dans les étoiles. Autre nouveauté : les Par-

cours secrets sont programmés le week-end précédent, soit deux fois plus de raisons de s'échapper dans l'Avesnois ! Aulnoye-Aymeries, 22 > 24.07 En ville, 1 jour : 50 > 40€ pass 3 jours : 120 > 90€ (gratuit-10 ans) lesnuitssecretes.com élection / 22.07 : Damso, Charlotte de S Witte, Rone… // 23.07 : PNL, Jamie xx, Vitalic, Ibeyi, Rodrigo y Gabriela… 24.07 : Orelsan, Juliette Armanet, Oboy… (+ Parcours secrets : 16 & 17.07)


CONTE DE CHINY

Changement de cap à Étaples-surMer, où le rock laisse place à un line-up plus éclectique. L'esprit, lui, reste inchangé : un festival à taille humaine, un sens de la fête qui ne se dément pas et une programmation maousse. Sur les rives de la Canche, on attend le rappeur Roméo Elvis (qu'on présente désormais comme "le grand frère d'Angèle"), mais aussi La Femme, Odezenne, Balthazar ou les moustachus déjantés de Deluxe pour une affiche au poil, forcément.

Trente-troisième édition, déjà, pour ce festival qui compte peu d'équivalents. Jugez plutôt : à Chiny, petite ville médiévale, des conteurs investissent places verdoyantes ou chemins boisés, glissant à l'occasion en barque sur les eaux de la Semois. Des balades sauvages de Christian Schaubroeck aux détournements azimutés de Monsieur Mouch (qui dresse le procès du Grand Méchant Loup), ces magiciens du verbe ont le chic pour raviver notre appétit ancestral pour les histoires. Parole !

taples-sur-Mer, 29 & 30.07, Boulevard du É Valigot, 13h, 1 jr : 35/30€, pass 2 jrs : 57/50€ (gratuit -12 ans), www.rockenstock.fr

Little Simz © Nick Dale

élection / 29.07 : Roméo Elvis, Deluxe… S 30.07 : La Femme, Odezenne, Balthazar, Sopico…

© DR

© Yann Rabanier

ROCK EN STOCK

Chiny, 08 > 10.07, en ville, www.conte.be élection / Kyung Wilputte, Christian S Schaubroeck, Ummée Shah, Aline la Sardine, Monsieur Mouch Jacky Druaux, Bernadette Bidaude, Myriam Pellicane…

Dans la patrie de Rimbaud, l'échappée belle n'est pas une vaine expression. Au cœur des Ardennes, ce cabaret accompagne les derniers jours des grandes vacances avec cinq jours de musique au zénith. Mais ne parlez pas d'"oasis" de verdure, ça risquerait de fâcher Liam Gallagher, affranchi de son frangin mais toujours pas assagi - tant mieux ! Autre sensation venue de Manchester, le génial Working Men's Club réveillera-t-il la punk qui sommeille en Véronique Sanson ? C'est bien possible...

CABARET VERT

Charleville-Mézières, 17 > 21.08, Square Bayart, mer : 18h • jeu : 16h30 • ven & sam : 15h • dim : 14h, 1 jr : 55/49€ (dim : 19€, grat-12 ans) cabaretvert.com élection / 17.08 : Stromae, Vald, Working Men's Club… S 19.08 : Orelsan, SCH, Little Simz… // 20.08 : Fontaines D.C., Vitalic, Liam Gallagher… // 21.08 : Véronique Sanson…


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© Maneki Films


PETITE FLEUR

Petits meurtres entre amis Premier film réalisé en France par Santiago Mitre (El Presidente), Petite fleur est un objet filmique non identifié. Quelque part entre la comédie et le thriller surréaliste, le cinéaste argentin raconte l’histoire d’un meurtre qui se répète jusqu’à l'absurde, pour s'inscrire dans une routine infernale… Parés pour le décalage ? Santiago Mitre fait partie, avec son ami Mariano Llinás (La Flor) de la nouvelle vague du cinéma argentin. Ceux qui ont vu Paulina et El Presidente savent que le réalisateur aborde volontiers les sujets de société par le prisme du cinéma de genre. Petite fleur, adapté d’un roman de Iosi Havilio, ne déroge pas à la règle. Mitre signe une fable corrosive sur le couple, le déracinement et l’amitié, proche des œuvres surréalistes de Raoul Ruiz (Melvil Poupaud, acteur fétiche du cinéaste chilien, n’est pas là par hasard) et de Luis Buñuel. Jugez plutôt... En gore et en gore José (Daniel Hendler), un Argentin récemment installé en France, et sa compagne Lucie (Vimala Pons), parents d’un premier enfant, viennent d’emménager à Clermont-Ferrand. Un jour, le Sud-Américain rencontre son voisin (Melvil Poupaud), amateur de vin et de jazz (le titre Petite fleur fait référence au standard de Sidney Bechet). Sans raison, José assassine son nouvel ami à coups de pelle. Le lendemain, stupeur : la victime réapparaît, bien vivante. Il va falloir recommencer… Ne dévoilons pas davantage cette histoire pour laquelle il est prié d’abandonner tout esprit cartésien. À la fois comédie noire, film gore ou critique des mouvements sectaires (Sergi López est truculent en pseudo-gourou), Petite fleur pèche toutefois par un rythme assez lent. Pour autant, le film ne ressemble à aucun autre et mérite qu’on s’y intéresse - au moins une fois. Grégory Marouzé De Santiago Mitre, avec Daniel Hendler, Vimala Pons, Melvil Poupaud, Sergi López… Sortie le 08.06

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© JHR Films

BOUM BOUM Cœurs vaillants Dans la succession de films sur les Gilets jaunes, le premier long métrage de Laurie Lassalle s'affirme comme un objet résolument singulier. Nourri par la ferveur des manifestations parisiennes, Boum Boum porte la politique et l'intime à leur point de fusion. La valeur d'un documentaire peut se mesurer à la force des rencontres qu'il saisit ou encourage. En tournant Boum Boum, Laurie Lassalle s'est laissée déborder par un double événement : une révolte populaire ample et inventive… et un bouleversement amoureux. La rencontre avec Pierrot, relatée en voix-off par la cinéaste, est indissociable de l'intensité de ce moment où la rue bruisse de mille voix. La beauté de l'œuvre tient ainsi à la façon dont la relation s'épanouit au contact des autres. Les discussions et la fabrication du film lui-même renforcent le projet commun des amants. Boum Boum est traversé de dialogues proprement inouïs, témoignant autant de l'hétérogénéité idéologique du "mouvement" que de ce fait politique majeur. Un gauchiste, un royaliste complotiste ou un grand bourgeois du xvie arrondissement ont soudain pu confronter leurs visions des rapports sociaux. Avec un courage évident au regard de la répression policière, Lassalle s'emploie à réduire au maximum l'écart entre filmer et manifester, témoigner et agir. Attentive aux chairs meurtries, elle fait aussi place aux soins et à la solidarité. Là encore, Boum Boum est un grand moment sur la puissance des corps désirants. Raphaël Nieuwjaer Documentaire de Laurie Lassalle. Sortie le 15.06 96



Avec sa réalisation étalée sur dix ans et sa durée peu commune (8h38, découpées en trois parties), Les Travaux et les jours a l'allure d'un monument écrasant. C'est pourtant un film des plus accueillants. Héritiers du poète Virgile, C.W. Winter et Anders Edström racontent le quotidien d'une agricultrice dans un village de montagne. Ils montrent le travail de la terre, le quotidien et les rites. Cette vallée de la région de Kyoto n'est pas saisie comme un paysage, mais dans toute sa richesse organique. Le spectateur devient à la fois un proche de la famille de Tayoko Shiojiri, et un observateur attentif des transformations de l'environnement au fil des saisons. L’œuvre s'appréhende ainsi comme une vaste respiration. Raphaël Nieuwjaer

© Capricci Films

De C.W. Winter et Anders Edström. Avec Tayoko Shiojiri, Hiroharu Shikata, Ryô Kase… Sortie le 22.06

© Thibault Grabherr - Curiosa Films

LES TRAVAUX ET LES JOURS

HOMMES AU BORD DE LA CRISE DE NERFS On adore la comédienne Audrey Dana. Moins la réalisatrice. Ses deux premiers films, Sous les jupes des filles et Si j’étais un homme, s’abîmaient dans la vulgarité. Avec Hommes au bord de la crise de nerfs, elle corrige le tir. Cette comédie douce-amère suit sept hommes âgés de 17 à 70 ans, mais tous pareillement paumés. Les voici embarqués dans une thérapie de groupe menée par une coach énergique (Marina Hands), en pleine nature. Évitant (cette fois) l'écueil de la grivoiserie et plutôt bien écrit, le film est une déclaration d’amour à la gent masculine. Pour autant, il vaut surtout pour la performance de ses acteurs (Thierry Lhermitte, Ramzy Bedia, François-Xavier Demaison…). Un divertissement certes un peu trop calibré, mais qui ne laisse pas indifférent. Grégory Marouzé D'Audrey Dana, avec Thierry Lhermitte, Ramzy Bedia, François-Xavier Demaison… En salle 98


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disques Yann Tiersen 11 5 18 2 5 18 (Mute / PIAS)

Souvent, Yann Tiersen ronchonne lorsque lui sont rappelés ses débuts et, surtout, le matraquage des ritournelles d'Amélie Poulain. On le comprend : au vu de son parcours, sinueux et loin des foules, aux confins de la noise, de l’épure et de l’électronique depuis plus de dix ans déjà, il est fatigant d’être toujours ramené à cela. Cependant, à l’indépendance d’esprit, cette opportunité montmartroise a ajouté une indépendance financière lui permettant de creuser son sillon depuis sa base arrière d’Ouessant… et chez le prestigieux label Mute. Quelques mois seulement après Kerber (2021), Yann Tiersen publie un nouvel album – son 12e depuis 1995. Pour ce disque titré comme une donnée cartographique, Tiersen a échantillonné le précité Kerber et Dust Lane (2010). Des samples souvent méconnaissables : à peine repère-t-on une bribe kraftwerkienne d’Ar Maner Kozh ici, une nappe ailleurs. De ces prélèvements, le multi-instrumentiste, féru de synthés modulaires, extrait une matière sonore qu’il malaxe à souhait, transformant l’ensemble en une techno analogique et remuante, intransigeante et aux forts relents krautrock, quelque part entre Cluster, Eliane Radigue et Perc – pour le dire très vite. Thibaut Allemand

Compilation Studio One Women Vol.2 (Soul Jazz Records)

Dix-sept ans après un premier volume, Soul Jazz publie enfin ce deuxième florilège mettant en valeur les femmes qui firent les belles heures du reggae – et affiliés. Ces 18 morceaux, parus entre 1965 et 1999, balaient un large spectre musical, du ska au rocksteady, en passant par le roots reggae, le lovers rock… Les grands noms défilent comme à la parade (Marcia Griffiths, Rita Marley, Hortense Ellis…), mais on citera, entre autres, Buck Town Corner des Jay-Tees, le joyau soul Sleeping Trees par Nina Soul, ou la mirifique version rub-a-dub d’un tube des Byrds, Turn! Turn! Turn!, par Jennifer Lara. À l’arrière, on retrouve les cadors de la maison (des Skatalites à Brentford All Stars) tandis que Sir "Coxsone" Dodd appose son sceau sur chacune de ces pistes. Irréprochable. Thibaut Allemand 100


Florent Marchet Garden Party

Kevin Morby This is a Photograph

(Labréa Music)

Depuis presque 20 ans, Florent Marchet marie chanson française et littérature avec bonheur. De Gargilesse à Courchevel, en passant par Rio Baril et Bambi Galaxy, il creuse un sillon très personnel. Ici encore le soin accordé aux textes n'éclipse pas les mélodies - citons Loin Montréal, en duo avec PR2B, ou le conclusif Le Dakota. Fidèle à lui-même, le quadragénaire brasse des thèmes qui lui sont chers : les sentiments, le temps qui passe, la paternité, l’amitié et surtout, les chemins de vie qui se croisent ou se séparent. Ainsi du sommet Freddie Mercury, pièce importante, chronique amère et floue d’une destinée... soit une histoire pas si éloignée de celles du romancier Nicolas Mathieu. Thibaut Allemand

(Dead Oceans / Modulor)

Le temps passe, et la patine va bien au teint des chansons de Kevin Morby, surgi avec l’enchanteur Harlem River (2013). Entretemps, le natif de Kansas City (Missouri) a effectué quelques détours, dont le newyorkais pur jus City Music (2017), hommage inspiré à la Grosse Pomme, du Velvet aux Ramones. Il signe aujourd'hui un septième album très intime et peu porté sur la gaudriole : l'Américain y conte l’attaque cardiaque de son père, arpente les rives où mourut Buckley fils, visite Graceland… "Morbyde", le Kevin ? Pas du tout ! Ce baladin signe un disque obsédé par le passé et ses répercussions dans le présent mais aux arrangements lumineux : piano, guitare, banjo, saxo, harpe et flûte embellissent des compositions ancrées dans l’Americana. T. A.

Pusha T It’s Almost Dry

(G.O.O.D. Music/Def Jam)

Pusha T consacre un album entier à son passé de dealer. Soit une véritable recherche du temps perdu sur les trottoirs du Bronx - Dreaming of the Past, reconnaît d'ailleurs l’un des plus beaux titres de cet album. Sample lenonnien versant soul et la présence de Kanye West aux côtés du prodige : toute résistance est inutile. Si Ye signe ici quelques productions du meilleur cru (dans la lignée de son travail sur Daytona, le précédent Pusha T), c’est à Pharrell Williams qu’on doit l’essentiel de l’architecture du disque. Lui non plus n’avait pas atteint ce niveau depuis longtemps, et les étoiles se sont décidément alignées pour se pencher sur le berceau de la mauvaise graine. Le rappeur nous offre, sur un plateau d’argent, un pur classique instantané à s’envoyer sans paille. Rémi Boiteux 101


livres Fanny Parise Les Enfants gâtés (Payot)

Quel est le terrain de jeu de l’anthropologue ? La forêt amazonienne, au chevet d’une ethnie amérindienne ? Dans l’imaginaire collectif, du moins. L’étude de Fanny Parise débute elle dans le hall du Mama Shelter, chaîne d’hôtels-restaurants proclamée temple du cool, et les peuplades examinées portent des Stan Smith, travaillent dans la com’ ou sont à la tête de start-ups. Ce qui fait écrire à l’autrice, jamais avare d’un bon mot dans cet essai pointu de 300 pages, qu’elle est « la Jane Goodall non pas des bonobos mais des bobos ». Ces « nouveaux sauvages », premier groupe étudié dans l’ouvrage, ont pour point commun une volonté de changer leurs habitudes de consommation. Mais a-t-on vraiment besoin d’acheter une gourde en verre, quand on en possède déjà une en plastique ? En face, l’anthropologue définit le groupe des « enfants gâtés », qui préfère réclamer des mesures aux puissants plutôt que produire le moindre effort pour changer son mode de vie. Le capitalisme responsable reste un capitalisme, tacle Fanny Parise, qui déconstruit le mythe du "consommer mieux". Le reflet qu’elle nous tend n’est pas toujours flatteur, mais cette lecture choc devrait, lentement mais sûrement, trouver son chemin. 320 p., 19€. Marine Durand

Maya Gonzales & Jeanne Neton Logique du genre (Éditions Sans soleil)

Quel est l’impact du capitalisme sur nos vies privées, et plus particulièrement sur la notion de genre ? Cette vaste question a souvent été abordée en littérature : Beauvoir, Ernaux… Ici, deux contributrices de la précieuse revue anglo-américaine Endnotes voient pour la première fois leurs écrits traduits en français. S’appuyant sur les recherches des sociologues Mariarosa Dalla Costa et Leopoldina Fortunati, citant aussi Silvia Federici, le duo analyse la division du travail, les violences de genre et l’idée même de salariat. Ailleurs, ces féministes se penchent sur la notion de la valeur ajoutée chez Marx à l’aune des tâches domestiques – ce travail invisible et gratuit. Une lecture dense, pas toujours facile d’approche mais ô combien stimulante ! 112 p., 10€. Thibaut Allemand 102


Juliette Volcler L'orchestration du quotidien

Émile Bravo Spirou, l’espoir malgré tout, vol 4.

(La Découverte)

(Dupuis)

Le travail de Juliette Volcler est précieux car il interroge un champ de perception largement négligé. Les mots viennent en effet vite à manquer dès lors qu'il est question d'écoute. Dans L'orchestration du quotidien, elle propose une lecture historique et critique d'une notion souvent dévoyée : celle de notre environnement sonore. Dans sa version marketing, le design consiste par exemple à façonner le "ploc" d'un tube de mascara pour offrir une expérience incomparable aux consommateurs. Multipliant les approches (cinéma, urbanisme, art, industrie...), la chercheuse dépasse l'anecdote pour faire de l'écoute « une question écologique et politique ». C'est alors la fabrication de l'espace public qui est interrogée. De quoi évidemment tendre l'oreille. 184 p. 18€. Raphaël Nieuwjaer

Ainsi s’achève l’épopée (le mot n’est pas trop fort) initié en 2008 par Émile Bravo, avec Le Journal d’un ingénu, et contant les aventures de Spirou durant la Seconde Guerre mondiale. Tout simplement la plus belle des relectures récentes du groom. Un travail éminemment personnel, précis et documenté. Une œuvre respectueuse, aussi, de ce que fut le petit héros et de ce qu’il deviendra dans les années suivantes. Chaque personnage possède une âme – bien torturée, parfois. Cette fresque peut être lue pour le plaisir (des yeux, de l’esprit) comme confiée à un môme de dix ans, afin d’évoquer ce que fut le fascisme. Enfin, cette lecture à plusieurs niveaux n’est jamais ostentatoire. Aucune esbroufe. Juste l’amour d’un travail bien pesé, bien pensé, bien fait. Chapeau ! 48 p., 13,50€. Thibaut Allemand

Nicolas Pegon Hound Dog (Denoël)

Loser pas vraiment magnifique, César se réveille un matin affublé d'un chien, dont il ignore la provenance. Aidé par son voisin, ce quinquagénaire sans travail se met en tête de retrouver le propriétaire dudit canidé... pour découvrir qu'il est mort brutalement. Suicide ? Meurtre ? Débute alors une drôle d'enquête au sein de la petite ville américaine où il (sur)vit, entre ironie burlesque et apparitions improbables - le King himself s'invitant dans ses rêves. Au fil d'un découpage très cinématographique, les aplats bruns ou ocres restituent parfaitement l'atmosphère poisseuse du récit - celle d'un monde fatigué de lui-même. Les frères Cohen ne sont pas loin. David Lynch non plus. Nicolas Pegon, qui signe là son deuxième roman graphique, est assurément un nom à retenir. 196 p., 24,90€. Julien Damien 103


Simone © Nicolas Pattou 104


ition

expos

interview

JOANA VASCONCELOS Baroque en stock

Longue de plus de 40 mètres, majestueuse et tentaculaire, elle survole le hall de la gare Lille-Flandres, suscitant l’émerveillement comme les interrogations. Non, les Valkyries de Joana Vasconcelos ne laissent jamais indifférents. À l'occasion d'Utopia, "la plasticienne portugaise présente deux de ses fameuses sculptures gonflables (et gonflées)" : Simone, à la gare, et Martha. Cette dernière est un hommage à Martha Desrumaux, figure emblématique du monde ouvrier, et a été spécialement conçue pour la maison Folie Wazemmes, ici transformée en mirifique Jardin d’Eden. Entretien. Vous êtes connue pour vos fameuses Valkyries. Comment cette idée est-elle née ? Selon la mythologie du Nord de l'Europe, les Valkyries sont des déesses survolant les champs de bataille pour ramasser les guerriers tués au combat et ramener à la vie les plus courageux d’entre eux, afin qu’ils travaillent pour les dieux. Cette idée de rendre la vie à travers l'art est très importante pour moi. Ces pièces textiles, qui flottent au-dessus de nos têtes, comme les déesses, transforment les espaces publics et notre regard sur le quotidien. Elles le renouvellent.

Vos pièces semblent pourtant éloignées de l'idée que l'on se fait d'une guerrière... Oui, la description qu’en fait, par exemple, le compositeur Richard Wagner, est assez masculine. Pour lui, les Valkyries sont toujours des femmes très dures, militaires. Les miennes restent des combattantes, mais j'ai voulu leur injecter de la beauté, de la féminité. Ces œuvres sont réalisées sur-mesure, à la main, avec un soin apporté au détail. Il y a du tricot, du crochet, de la dentelle, de la broderie… ••• comme dans la haute couture. 105


Mes créations sont volumineuses et très sensuelles. Disons que c'est une vision plus ouverte, de la femme. Peut-on parler d'une démarche féministe ? Tout à fait. Les femmes n'ont toujours pas les mêmes droits que les hommes, et cela partout dans le monde. Liberté, égalité et fraternité forment la devise de la république française, mais celle-ci n'est pas respectée… Il faut donc continuer de se battre. C'est ce que j'essaie de concrétiser à travers mes œuvres monumentales dans l'espace public. Pourquoi avez-vous nommé cette Valkyrie installée à la gare LilleFlandres Simone ? C’est un hommage à toutes les Simone : Simone de Beauvoir, Simone Signoret, Simone Veil mais aussi… à la voix de la SNCF, portée par Simone Hérault ! Cette pièce représente toutes ces femmes françaises, et plus largement du monde, qui ont marqué leur époque grâce à l’art, la culture et la pensée. Comment concevez-vous vos Valkyries ? J'ai un atelier employant 57 personnes à Lisbonne. De nombreux artisans participent aussi aux projets. Généralement, je dessine la forme des pièces sur le lieu accueillant mes œuvres. Pour établir un dialogue avec l’architecture investie, car il ne s'agit pas d'une simple décoration.

Comment avez-vous conçu ce jardin d’Eden à Wazemmes ? On découvre d’abord un jardin composé de fleurs en plastique qui s’illuminent dans une pièce plongée dans l’obscurité. Celles-ci ont le pouvoir de nous emmener dans une autre dimension, un monde magique. Je l’ai imaginé comme un labyrinthe, inspiré des jardins français, en mêlant technologie et poésie. À l’étage, j’expose d’autres de mes créations, comme l’urinoir Purple Rain. Il est mauve et peut accueillir deux hommes en même temps. C’est une relecture LGBT de l’œuvre de Marcel Duchamp… Enfin on trouve Martha, votre seconde Valkyrie présentée à Lille… Oui, celle-ci a été réalisée spécialement pour Wazemmes. Elle est constituée d’une gigantesque fleur suspendue au plafond, renvoyant au jardin d’Eden. Elle intègre de nombreux éléments textiles recyclés, élaborés lors d’ateliers participatifs à Lille. Les habitants du quartier ont réalisé ces pièces au crochet et en tricot, qui sont la base de mon travail. L’installation est ponctuellement activée par une musique créée à Lille et une chorégraphie interprétée par des jeunes danseurs locaux (ndlr : des élèves du collège Makeba à Lille). Il s’agit de rassembler dans une même salle tous les arts : musique, danse, installation, sculpture, artisanat… C’est une œuvre totale, symbolisant l’esprit du festival de lille3000. Propos recueillis par Julien Damien 106


 Valkyrie Martha © Maxime Dufour photographies  Le Jardin d'Eden © Julien Damien

Simone Lille, jusqu’au 02.10, gare Lille-Flandres Jardin d’Eden Lille, jusqu’au 01.10, maison Folie Wazemmes, mer > dim : 14h-19h, gratuit, maisonsfolie.lille.fr

À visiter / www.joanavasconcelos.com À lire / La version longue de cette interview sur lm-magazine.com 107


The Growth Potential © Hadrien Tequi

UN BLOB AU MUSÉE ! Stranger Things Il est visqueux, rampant, souvent jaune et, disons-le, pas franchement sexy. Pourtant, il fascine les biologistes, jusqu’à s’inviter dans la Station spatiale internationale avec Thomas Pesquet. Le blob débarque au Musée d’histoire naturelle de Lille, qui ausculte cette créature mystérieuse sous toutes les coutures. C’est un objet vivant non identifié, sans équivalent dans la nature. « Le blob n’est pas un animal ni un végétal ou un champignon. Simplement une grosse cellule, explique Maryline Platevoet, chargée de programmation au Musée d'histoire naturelle. Il est apparu sur Terre il y a un milliard d’années, bien avant les dinosaures, et vit dans les forêts partout sur la planète. Vous l’avez peut-être croisé sans vous en rendre compte… ». À Lille, on ne peut pas le rater : une "Blob’mobile" a été conçue pour l’observer. Ce dispositif constitué d’une loupe binoculaire et d’un écran révèle les superpouvoirs de Physarum polycephalum, son vrai nom. On l’a nommé "blob" en référence au film d’horreur de 1958 avec Steve McQueen, où une masse extraterrestre et gluante dévore les humains… mais pas de panique ! Notre créature (qui peut mesurer jusqu’à dix mètres) se nourrit en réalité de bactéries ou de champignons. « Ici, on lui donne des flocons d’avoine, son plat favori ». Il faut dire que le blob a des journées chargées. Il n’a pas de membres ni de cerveau, mais est capable de se déplacer (d’un centimètre par heure), d’apprendre ou de se reproduire. Plutôt bien, car il dispose de… 720 sexes différents. Un surdoué, on vous dit ! Julien Damien Lille, jusqu’au 02.10, Musée d’histoire naturelle, lun, mer, jeu & ven : 9h30-17h • sam & dim : 10h-18h 5 > 2,60€ (gratuit -12 ans), mhn.lille.fr

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Cette fois ça y est. Utopia, la sixième édition thématique de lille3000, est lancée. Après une grande parade pleine de surprises, place à six mois de métamorphoses urbaines, de randonnées artistiques, de spectacles et, bien sûr, d'expositions. Voici déjà quatre rendez-vous incontournables.

Le Serpent cosmique, 2022

UTOPIA

J.D. - Photo : Maxime Dufour photographies

LE SERPENT COSMIQUE Inspirée par le livre de l'anthropologue canadien Jeremy Narby, dévoilant une vision chamanique du monde, cette exposition est un « voyage dans le vivant cosmique », pour citer le commissaire, Fabrice Bousteau. Plus concrètement, le parcours s'apparente à une déambulation hallucinée, psychédélique, présentant des œuvres croisant l'animal, le végétal, la nature et l'humain... Soit autant de créatures chimériques signées, entre autres, Jean-François Fourtou (ses personnages à tête de légume), Fabrice Hyber ou Ghyslain Bertholon. Le sol de la première grande salle de l'Hospice Comtesse est recouvert d'un immense miroir et vaut le coup d'œil à lui seul. Immanquable. Lille, jusqu'au 02.10, Musée de l'Hospice Comtesse mer > dim : 10h-18h • lun : 14h-18h, 7/ 5 € (gratuit -12 ans), www.lille.fr 110


NOVACÈNE

Les Vivants, 2022

LES VIVANTS Monté par la Fondation Cartier, ce parcours nous invite à décaler notre regard anthropocentré, et à réinventer une cohabitation avec la faune et la flore, à l’instar du Grand orchestre des animaux de Bernie Krause. Ce bioacousticien a passé 50 ans à enregistrer les sons de la nature. Cette installation nous immerge littéralement dans ce chant produit par des espèces, qui pour beaucoup ont disparu… À découvrir aussi, les œuvres d’artistes amérindiens (et un peu chamanes) encore jamais vues sous nos latitudes. Lille, jusqu'au 02.10, Tripostal mer > dim : 10h-19h, 11/9€ (gratuit -18ans)

Selon le scientifique anglais James Lovelock, le Novacène est une ère devant succéder à la nôtre, l’Anthropocène, marquée par les bouleversements environnementaux dus à l’activité humaine. La Gare Saint-Sauveur propose sa propre vision de cette utopie (voire dystopie) à travers des œuvres ludiques et propices à la réflexion. On y découvre des restes archéologiques de notre monde contemporain (soit des squelettes d'hommes bardés de puces électroniques) avant de faire ronronner des arbres en les câlinant. Lille, jusqu'au 02.10, Gare Saint-Sauveur mer > dim : 12h - 19h, gratuit, lille3000.eu

Novacène, 2022

© Julien damien

LA FORÊT MAGIQUE Cette exposition « militante » s'intéresse à la place des forêts « dans nos imaginaires comme dans la société », annonce Bruno Girveau, le directeur du Palais des beauxarts de Lille. Remarquablement scénographié, plongé dans une ambiance en clair-obscur, le parcours suggère une balade au milieu des arbres, ici représentés par des œuvres classiques (signées Camille Corot ou Gustave Doré) ou contemporaines - à l'instar de cette gigantesque souche arachnéenne de Cécile Beau. Lille, jusqu'au 19.09, Palais des beaux-arts lun : 14h-18h • mer > dim : 10h-18h, 10 > 7€ (gratuit -12 ans), pba.lille.fr 111


Self-Portrait, Chicago, IL, 1956 © Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY 112


ition

expos

VIVIAN MAIER

De l'ombre à la lumière De Vivian Maier (1926 - 2009), on sait peu de choses. Française par sa mère, Américaine par son père, cette artiste prolifique travailla toute sa vie comme nounou à Chicago, tout en documentant son quotidien, appareil photo en main. Bozar expose le pan intime d’une œuvre devenue culte, depuis sa découverte à la fin des années 2000. 120 000 négatifs, pour beaucoup jamais développés. Voilà l’ampleur des archives de Vivian Maier, achetées par hasard par le collectionneur John Maloof lors d’une vente aux enchères, puis soigneusement conservées et classées. C’est aussi dans ce fonds foisonnant que s’est plongée la commissaire Anne Morin pour l’exposition qui s’ouvre début juin au Palais des beaux-arts de Bruxelles. Avec un angle bien précis, l’autoportrait, « car aucun photographe ne s’est penché avec autant de constance et de ténacité sur la question de l’autoreprésentation », note la directrice du studio diChroma photography. À l’heure du selfie roi, cette thématique explique l’extraordinaire engouement suscité par l’artiste, depuis que ses images sont montrées autour du monde. Une invisible de l’Amérique Autoportrait frontal, silhouette en contre-jour, jeux de miroir… Les 93 clichés sélectionnés dessinent le parcours d’une fille d’immigrés au service des autres, qui saisit son Rolleiflex, et plus tard son Leica, comme un acte de résistance. « De l’ombre au portrait physiologique, il y a tout un vocabulaire que Vivian Maier déploie déjà dans l’enfance, lorsqu’elle s’amuse avec le Kodak Brownie de sa mère, dans la vallée du Champsaur », décrypte Anne Morin, qui a découpé l’espace en trois volets : "Ombre, Reflet, Miroir". À Bruxelles, six photos sont présentées pour la première fois au public. De quoi trouver l'inspiration pour "pimper" nos prochains selfies. M. Durand Bruxelles, 08.06 > 21.07, Bozar, mer > dim : 10h-18h, 10> 2€ (gratuit -6 ans), www.bozar.be

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PLANS RAPPROCHÉS

Œuvres commentées par Anne Morin, commissaire de l'exposition

« La typologie des autoportraits de Vivian Maier est très variée, et ici, avec cette projection de l’ombre, nous ne voyons plus tout à fait un portrait mais une empreinte. Il y a un morcellement, un éclatement. L’artiste sème des indices de sa présence. Cette photo rappelle le mythe de Dibutade, raconté par l’auteur romain Pline l’Ancien. Un potier de Corinthe découvrit l’art de modeler des portraits à l’argile en s’inspirant de sa fille qui, amoureuse d’un homme en partance pour l’étranger, dessina l’ombre de son visage projetée sur un mur, à la lumière de la bougie. Vivian Maier revisite cette idée de la trace ».

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY

Self-portrait, Chicago, IL, 1956

Self-portrait, New York, NY, May 5, 1955 « À l'opposé du jeu d'ombre, Vivian Maier dévoile aussi ses traits à l’image. On reconnaît régulièrement son visage dans des miroirs. Mais l’entreprise n’est pas du tout narcissique. L'Américaine est plutôt dans le registre du jeu. Elle s'amuse avec sa physionomie, presque comme une petite fille. On remarque son rapport à l’espace, au reflet et le rond qui peut rappeler l’obturateur de son appareil photo. Cependant, sans témoignage de sa part, on ne peut émettre que des suppositions. On sait qu’elle prenait environ 150 photos par an, mais qu’elle n’avait sans doute pas l’intention de faire œuvre ».

© Estate of Vivian Maier, Courtesy of Maloof Collection and Howard Greenberg Gallery, NY 114



Marc Baroud, Segments Bench 2019 © Marwam Harmouche

BEYROUTH. LES TEMPS DU DESIGN L'autre Liban

Beyrouth, ville de design ? Sans aucun doute. Et c’est bien sur l’effervescence créative de la capitale libanaise que le CID se penche. Cette grande première lève le voile sur une nouvelle scène dynamique, façonnée par l’histoire complexe d'un pays situé à la croisée de l'Orient et de l'Occident, du passé et du futur. Avant Marco Costantini, directeur adjoint du Mudac de Lausanne, qui coproduit cette exposition, personne ne s’était intéressé aux spécificités de la création de meubles et d’objets au Liban. Il a d’ailleurs fallu près de cinq ans d’enquête au conservateur suisse, attiré par quelques artistes (Marc Dibeh et sa fameuse lampe Love The Bird dissimulant un sextoy) pour remplir la page blanche et sortir de notre vision « eurocentrée ». Via les tapis, sièges, éléments de mobilier d’une trentaine de créateurs, la jeune histoire du design libanais se dessine. Ses prémices d’abord, avec l’ouverture au milieu du siècle à Beyrouth de cabinets d’architecture, dont celui de Michel Harmouche. Sur les cendres de la guerre civile (1975-1990), les projets d’urbanisme balayent le patrimoine existant. Mais des figures comme Marc Baroud se montrent soucieuses de proposer des formes conscientes des multiples héritages. Minjara Tripoli, un projet de revalorisation de la filière bois, incarne bien ce dialogue entre le savoir-faire des artisans traditionnels et l'approche contemporaine. Le creuset, sans doute, du monde de demain. Marine Durand Hornu, jusqu'au 14.08, Centre d'innovation et de design mar > dim : 10h-18h, 10 > 2€ (gratuit -6 ans), www.cid-grand-hornu.be 116



Sarkis, Pour Eugène, 2017, vidéo © Courtesy Sarkis et Galerie Nathalie Obadia, ParisBruxelles

EUGÈNE LEROY. À CONTRE-JOUR Une autre lumière

L’année 2022 sera peut-être celle d’Eugène Leroy. Alors que le Musée d’art moderne de Paris lui consacre une grande rétrospective, le MUba décrypte le travail du Tourquennois sous un angle inédit. À travers une riche sélection d’œuvres, À contre-jour explore les inspirations du peintre, tout en interrogeant son héritage. D’Eugène Leroy, on connaît bien les toiles sombres, denses et recouvertes de multiples couches de peinture d’où jaillit la lumière. Un peu moins ses œuvres plus douces, à l’image de L’Écluse, une aquarelle datant de 1956 et représentant un paysage de Flandres aux teintes pastel. « Nous voulions renouveler le regard porté sur cet artiste. On résume souvent son travail à des tableaux hyper-saturés de matière alors qu’il est beaucoup plus riche », explique Mélanie Lerat, directrice-conservatrice du MUba. L’exposition ausculte d’abord les liens entre Eugène Leroy et les artistes du Nord, tels Arthur Van Ecke ou Germaine Richier, mais son art ne ressemble à aucun autre. « On a du mal à le classer, ajoute Christelle Manfredi, directrice adjointe du MUba. Il cherchait à provoquer une émotion plutôt qu’à la représenter ». Et c’est peu dire que ses créations n’ont pas laissé indifférents. Dans un second temps, le parcours révèle ainsi l’héritage monumental laissé par Eugène Leroy aux artistes contemporains. Citons la Britannique Jessica Warboys et ses Sea Paintings nous invitant à plonger dans la couleur, ou encore les toiles abstraites et brumeuses de Claire Chesnier, entre autres disciples… Maïssam Mezioud Tourcoing, jusqu'au 02.10, MUba Eugène Leroy, tous les jours sf mar : 13h-18h, 5,50/3€ (grat -18 ans) 118



Amour, Ramzi

BYE BYE GRISE MINE Mémoire vive

C'était il y a pile dix ans. Le bassin minier du Nord-Pas de Calais était inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco. Le Valenciennois a largement participé à cette épopée que fut l’exploitation houillère. C'est d'ailleurs ici, à Fresnes-sur-Escaut en 1720, que furent donnés les premiers coups de pioche dans la région. Durant plus de deux siècles, la Compagnie des mines d’Anzin a façonné cette terre, qui conserve un important héritage. Aujourd'hui en pleine rénovation, fermé jusque fin 2023, le Musée des beaux-arts de Valenciennes ne manque toutefois pas cet anniversaire. Cette double exposition distingue ainsi 18 œuvres de ses collections. Rarement vues, celles-ci révèlent notamment des esquisses du "peintre des mineurs", Lucien Jonas, mais aussi des portraits de celles et ceux qui ont bâti cette histoire industrielle, de la hercheuse (qui pousse les wagonnets) aux grands patrons. Présentées en plein air, au Quai des mines de Valenciennes, mais aussi à la médiathèque d'Anzin, ces pièces côtoient les créations au fusain d'élèves du Valenciennois, plus que jamais dépositaires de ce patrimoine bien vivant. J.D. Valenciennes & Anzin, 15.06 > 31.08, Quai des mines (en plein air) & Médiathèque d’Anzin mar > ven : 14h-18h • sam: 10h-12h & 14h-18h, gratuit, musee.valenciennes.fr 120



QUAND LES MURS PARLENT ! Au xixe siècle, l’Europe est le premier continent industrialisé... et donc traversé de nombreuses manifestations ouvrières. C’est dans ce contexte tendu que naît l’affiche, soit le premier vecteur de communication et d'influence. De la propagande en temps de guerre à la construction de l'UE, en passant par les grands événements sportifs ou culturels, ce parcours raconte en 150 images une autre histoire politique du "vieux continent". Florine Fauquembergue Bruxelles, jusqu'au 13.11 Maison de l'histoire européenne, lun : 13h-18h mar > ven : 9h-18h, sam & dim : 10h-18h, gratuit historia-europa.ep.eu

Britons [Lord Kitchener] wants You. Join Your Country’s Army! Alfred Leete (1882–1933) UK, 1914 Replica Imperial War Museum, London, UK

Anonyme, ca 1919. Coll. Michel F. David

EN DILETTANTE La photographie amateur a pris son essor à la fin du xixe siècle grâce à l'Américain George Eastman. Le fondateur de la société Kodak développa en effet le tout premier appareil portable (en 1888), démocratisant cette pratique auprès du grand public. Dès lors, c’est le quotidien qui s’est peu à peu invité dans les images. Rassemblant 250 clichés s’étalant jusqu’au xxe siècle, cette exposition retrace une histoire de l'art parallèle. Ces photos de voyage, de vacances ou en famille privilégient l’émotion à la technique et témoignent de récits intimistes, bien souvent anonymes, où l’anodin confine à l’universel. F.F. Charleroi, 04.06 > 18.09 Musée de la photographie mar > dim : 10h-18h, 8 > 4€ (gratuit -12 ans) museephoto.be

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© None Futbol Club Hot Wheels

NØNE FUTBOL CLUB

French Cancan

Détournement de fond Lille compte un nouveau centre d'art contemporain. Situé à deux pas du Musée des beaux-arts, le 3Cinq promet de révéler « des artistes peu ou jamais vus en région Hauts-de-France », en phase avec les enjeux de notre monde. Pour sa première exposition, cet espace de 250 m2 accueille le Nøne Futbol Club. Ce duo parisien s'est fait une spécialité de parodier des sujets issus de la culture populaire. Il n'aime rien tant que détourner le nom ou la forme des objets pour leur donner une autre signification, avec un sens de l'ironie certain. À l'image de la série Hot Wheels. Ici, les artistes s'emparent de cette marque de jouets américaine, en l'occurrence des petites voitures (l'équivalent de la Majorette française), pour la réinterpréter de la façon la plus littérale : c'est-à-dire en brûlant des roues ou pneus… Certes ludiques, ces performances, sculptures et installations pointent le désastre écologique en cours, pour beaucoup imputable à l'industrie automobile. Vous avez dit grinçant ? J.D. Lille, 03.06 > 26.08, Centre d'art contemporain 3Cinq mer > ven : 14h-18h30 • sam : 11h -13h & 14h -19h, gratuit, www.troiscinq.com 124



Merci de déranger ! Pendant que certaines pièces du Musée de Picardie voyagent au Louvre-Lens, l’institution amiénoise (qui a rouvert ses portes après trois ans de travaux) accueille les céramiques contemporaines de la Piscine de Roubaix, pour un dialogue avec ses propres collections. Cela donne des rencontres humoristiques et incongrues au sein d’une même vitrine entre Astro Boy et des céramiques gallo-romaines, illustrant des thèmes comme l’alimentation ou la religion – qui, eux, traversent toutes les époques.

Orchestra (détail) 2021 © Kristien Daem

Amiens, jusqu'au 28.08, Musée de Picardie mar > ven : 9h30 - 18h • sam > dim : 11h - 18h 7 /4€ (gratuit -26 ans), amiens.fr

Créatures, bestiaires fantastiques de la bande dessinée

Lecoanet Hemant : les orientalistes de la haute couture

Le Musée des beaux-arts de Calais ouvre toujours plus ses portes à la culture pop. Après le street art, place à la bande dessinée. Montée en partenariat avec l’association On a Marché sur La Bulle (qui organise les Rendez-Vous de la BD d'Amiens voir p. 34), cette exposition célèbre le neuvième art à travers un sujet bien particulier : les créatures fantastiques. Où l’on croisera toutes sortes d’elfes, de lutins, centaures, krakens, licornes, animaux-robots, d’orques… et bien sûr de dragons !

Fondée en 1981, à Paris, par Didier Lecoanet et Hemant Sagar, la maison Lecoanet Hemant s'est rendue célèbre en mariant haute couture à la française et esprit oriental. C'est ainsi la seule marque de mode internationale à concevoir ses modèles en Inde. Robes du soir somptueuses, manteaux opulents, tailleurs structurés ou pièces créées à partir de plumes jalonnent cette exposition. Où l'on partira, entre autres, sur la route de la soie, à la découverte de l'India Pop ou des mystérieux jardins de Shalimar...

Calais, jusqu’au 06.11, Musée des beaux-arts mar > dim : 13h-18h, 4/3€ (gratuit -5 ans) www.mba.calais.f

Calais, 18.06 > 31.12, Cité de la dentelle et de la mode, ts ls jrs sauf mar : 10h-18h, 4/3€ (gratuit -5 ans), www.cite-dentelle.fr

Gaillard & Claude. A Certain Decade Depuis leur rencontre à l'aube des années 2000, les Français Gaillard et Claude produisent des pièces protéiformes, entre sculpture en plâtre, impression textile ou musique électronique. D'apparence hybride, ces créations s'apparentent à des accidents poétiques croisant tout et son contraire. Cette exposition rétrospective (la première en Belgique) célèbre une œuvre souvent drôle, curieuse et propice aux doubles sens et sous-entendus. Hornu, jusqu'au 18.09, MACS mar > dim : 10h-18h, 10 > 2€ (gratuit -6 ans)www.mac-s.be 126


Aline Bouvy n’a que faire du politiquement correct ni du "bon goût". Cette plasticienne s’attaque aux sujets de société (la sexualité, le genre, la violence…). Elle conteste toute forme d'entrave au désir, les normes qui empêchent les corps. Entre « vagabondage sexuel » et « batifolages queer », cette exposition intitulée Cruising Bye convoque matériaux dépréciés ou postures décadentes, défilé de policiers androgynes et sorcières pour mieux dézinguer le patriarcat et l’hétéronormativité. Hornu, jusqu'au 18.09, MACS, mar > dim : 10h-18h 10 > 2€ (gratuit -6 ans), www.mac-s.be

Vue de l'exposition, Aline Bouvy, Cruising Bye © Isabelle Arthuis

Aline Bouvy

Harmonie des sphères

Rome, la cité et l'empire

De l'immensité de l'espace aux confins de la création, tel est le voyage que propose cette exposition. Celleci met en relation la fascination d'artistes abstraits géométriques (citons Auguste Herbin ou Geneviève Claisse) pour le cercle... avec 32 photographies de Thomas Pesquet. Ces clichés de la Lune ou de la Terre, pris depuis la Station spatiale internationale, résonnent ainsi avec la vision des peintres nordistes, qui furent des férus de science exacte, et en perpétuelle quête d'une harmonie des sphères.

La dernière fois que les salles romaines du Louvre ont fermé pour travaux, c’était… pendant la Seconde Guerre mondiale ! Autant dire que l’occasion de délocaliser quelque 300 chefs-d'œuvre de l’Antiquité ne se représentera pas de sitôt. À Lens, cette exposition rassemble statues, reliefs, portraits, bijoux, tablettes ou objets d’art, et ausculte aussi bien la construction de la "ville éternelle" comme cité-État que la vie quotidienne de ses habitants. Un parcours inédit, balayant cinq siècles d'Histoire.

Le Cateau-Cambrésis, jusqu'au 06.11 Musée Matisse, ts ls jrs sauf mar : 10h-18h 6/4€ (gratuit -26 ans), museematisse.fr

Lens, jusqu'au 25.07, Louvre-Lens, ts les jours sauf mardi : 10h-18h, 11 > 6€ (gratuit -18 ans) louvrelens.fr

Metsä, contes des forêts nordiques Le jardin de l'Espace Minorelle prend des atours féériques. Pour cause, il accueille les fameux Moss People de Kim Simonsson, soit des sculptures représentant des enfants couverts de mousse verte, comme s'ils ne faisaient plus qu'un avec le monde végétal. Déployés sur la Rambla de Lille dans un format XXL, ces êtres merveilleux retrouvent ici leur taille originale. Ces statues en céramique et photographies signées Jefunne Gimpel dialoguent ici avec les œuvres de la Lilloise Ingrid Bouttaz, pour deux fois plus de magie. Marcq-en-Barœul, jusqu'au 03.07, Jardin Minorelle mer > ven : 11h-18h • sam & dim : 10h-18h gratuit, www.marcq-en-baroeul.org 127


La Chine au féminin Une femme sur cinq dans le monde serait chinoise. Sous-titrée "une aventure moderne", cette exposition rend pour la première fois hommage à ces dames à travers une fresque embrassant tout le xxe siècle. Entre guerres, révolutions et entrée dans le monde moderne, le parcours dessine le portrait d'une femme tour à tour travailleuse, combattante ou modèle. À travers des robes, bijoux, affiches de propagande ou héroïnes de cinéma émerge une figure aux antipodes des stéréotypes. Morlanwelz, jusqu'au 23.10, Musée royal de Mariemont, mar > dim : 10h-18h, grat., musee-mariemont.be

Urbain.es Vous avez aimé Street Generation(s) ? Alors vous adorerez Urbain.es. Après le succès d'une première exposition célébrant 40 ans d’art urbain, en 2017, la Condition Publique remet le couvert. Ce nouveau parcours interroge cette fois la place de la femme dans la ville, toujours sous le regard avisé de Magda Danysz. La célèbre galeriste réunit à Roubaix œuvres iconiques et créations in situ, signées d'une vingtaine de street artistes du monde entier, et pour qui l’engagement n’est pas un vain mot.

Icône, 2013. Fil de fer, filets noirs; 235 x 120 cm. Courtesy Marian Goodman Gallery, Paris, Londres, New York. Photo: Marc Damage.© Adagp, Paris, 2022

Roubaix, jusqu'au 24.07, La Condition Publique mer > dim : 13h30-19h, 8 > 3€ (gratuit -18 ans) laconditionpublique.com

Raffaella Crispino Open field Née à Naples, installée à Bruxelles, Raffaella Crispino a toujours exploré une multitude d'horizons culturels. À Tournai, elle s'inspire d'une œuvre étonnante du Musée des beauxarts : L'Abdication de Charles Quint, du peintre et graveur belge Louis Gallait. Au cours du xixe siècle, cette toile monumentale fit en effet le tour d’une partie de l’Europe, et surtout de l’Allemagne, en train. L'occasion pour la plasticienne italienne de proposer un parcours mêlant passé et présent, voyages et migrations. Tournai, jusqu'au 18.09, Musée des beauxarts, ts ls jrs sauf mar : 9h30-12h30 et 13h3017h30, 2,60/1€ (gratuit -6 ans), mba.tournai.be

Annette Messager. Comme si Figure majeure de l'art contemporain, Annette Messager investit le LaM de Villeneuve d'Ascq avec des pièces emblématiques (notamment Dessus-dessous) et surtout nombre d'œuvres réalisées durant la crise sanitaire. Intitulée Comme si, cette exposition rassemble dessins, installations ou sculptures. Elle témoigne aussi de son obsession pour le quotidien, dont elle a fait son principal matériau de réflexion, auquel elle ajoute une pincée d'humour noir et une bonne dose de fantastique. Villeneuve d'Ascq, jusqu'au 21.08, LaM mar > dim : 10h-18h, 10/7€ (gratuit -12 ans), musee-lam.fr 128



© Gaspar Uhas, Unsplash

HAUTS-DE-FRANCE & BELGIQUE

FESTIVALS

2022

2 éditions spéciales juin + juillet-août

CET ÉTÉ, LM magazine SERA DANS TOUTES LES POCHES !1




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