Magazine L'écran Janvier 2016

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L‘éCRAN

L'écran - Magazine -


Edito

ROnan DELBoS

Rédacteur en chef

Toi ! Oui, toi là ! Réjouis-toi ! Loues donc ce jour béni, ce véritable instant de grâce, cette minute miraculeuse où Michel Galabru – ou je ne sais quelle autre divinité perchée dans les cieux –, dans son infinie sagesse, vient de te placer sur ma route. Oui, réjouis-toi, car ce que tu as sous les yeux, lecteur, c’est la toute première apparition du magazine L’Écran. Le voilà « dans les bacs », comme on disait du temps où les vinyles n’étaient pas encore un truc de hipsters (et avant que l’expression ne devienne ringarde, aussi). Mais, s’il te plait, contiens un peu ta joie, ça devient presque indécent… Mais L’Écran, c’est quoi ? Un canard qui a de la gueule, déjà. Ensuite, c’est une association de joyeux étudiants et autres gais lurons qui ont pour point commun de partager la même passion pour les images animées projetées sur un support mural ou au moyen d’un dispositif d’affichage électronique. Oui voilà, c’est ça : le cinéma !


Enfin, pas seulement le cinéma, mais aussi les autres manifestations artistiques de l’audiovisuel, telle que la série TV ou le jeu vidéo, vers lesquelles nous vogueront parfois au gré de ces pages. Car, en effet, l’objectif de ce petit magazine est bien de permettre une expression libre de la jeunesse universitaire autour du monde du 7ème art et des créations audiovisuelles d’aujourd’hui et d’autrefois, d’ici et d’ailleurs. Critiques, chroniques, actu ciné, interviews…il y en aura pour tous les goûts ! Voilà un programme qui n’est pas piqué des hannetons (autre expression bien bien ringarde) ! Mais vous en voulez encore ? Comme je vous comprends ! Alors direction « les internets » et notre page Facebook L’Écran, où vous pourrez retrouver quelques articles et news en relation avec ce monde merveilleux des arts audiovisuels ! Sachez aussi que nous sommes avides de connaitre vos retours, voire même de lire et de publier vos propres écrits, alors n’hésitez pas à nous contacter (on sait jamais, une place peut se libérer à tout instant, par exemple avec la mort tragique et soudaine d’un de nos rédacteurs). Je vous laisse à votre lecture curieuse et amusée, en espérant que ces pages vous seront agréables. Cette aventure n’en est qu’à ses prémices, aussi j’espère qu’elle vous donnera envie de la suivre ! En attendant le prochain numéro, je vous souhaite de manger du film, du serial et du video game par dizaines (au moins cinq par jours, c’est la règle !). Allez, et soyez voraces !



SoMMAIRE

Edito

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Chronique Star Wars contre-attaque?

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Critique Box-office

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Critique Rétrospective Wrong Cops de Quentin Dupieux, 2013

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Le Ring

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Les Grands du Cinéma David Lynch

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Chronique J.J Abrams le starwalker

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Infos Ciné

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Macbeth de Justin Kurzel, 2015

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Chronique

STAR WARS

CONTRE-AtTAQuE? Ce qu’il faut savoir sur l’un des Films qui a le plus fait parler de lui cette année.

A l’heure où vous lisez ces lignes, le très attendu Star Wars VII : The Force Awakens est déjà sorti et il ne fait aucun doute qu’il est toujours en salle, comptabilisant probablement déjà plusieurs millions de dollars de recettes partout dans le monde. Parce que même si les mots Wookie et Ewok vous font penser à quelques fruits exotiques, vous être fatalement au courant du retour du sabre laser sur les écrans. Plusieurs bonnes et mauvaises nouvelles ayant accompagné la sortie du film et ces vidéos promotionnelles, voici un petit retour sur la préparation de la suite d’une des sagas les plus connues au monde. 6


Pour ce nouveau volet de la Guerre des Etoiles, on peut clairement déclarer que le changement était de mise. Nouveau réalisateur, nouveau scénariste (les « compléments » de George Lucas, acquis pour quelques (quatre) milliards de dollars, ayant finalement fini à la poubelle), nouvelle production et j’en passe… Pourtant, les fans n’avaient pas l’air inquiet. En effet, l’arrivée de J.J. Abrams aux commandes, seul successeur légitime de George Lucas et digne Padawan de Steven Spielberg, avait fait frémir d’enthousiasme les aficionados, soulagés du départ du créateur de la saga. Les fans en colère contre George Lucas ? Un oui massif résonne dans mes oreilles. Bien sûr qu’il est le père de Star Wars, bien sûr qu’il a bouleversé, à sa manière, l’univers de la science-fiction, bien sûr qu’il a créé des personnages aussi connus que la saga elle-même, mais même si l’envie était là au début, le réalisateur a troqué sa casquette d’artiste contre celle de banquier. Ce talentueux visionnaire (on ne peut pas lui enlever ça) l’a été un peu moins en exploitant sa franchise au maximum, en bien comme en mal. On se souvient (et si ce n’est pas le cas, tant mieux!) du film sur le noël des wookies, (si vous désirez le voir, sortez les lunettes de chantier parce que ça pique les yeux) ou encore les poupées Dark Vador dont les pitoyables bruitages faisaient

ressembler le grand méchant de la saga, celui qui a tué Obi-Wan Kenobi, celui qui a déchainé le côté obscur, et bien… à une fillette à qui on a volé les bonbons. Pas étonnant donc que lorsque son pote de Disney (Bob Iger, PDG de Disney, qui bossait avec lui sur ABC) lui a gentiment ($$$) proposé le rachat de Lucasfilm, celui-ci ait accepté sans verser de larme (il a d’ailleurs affiché son indifférence, à propos de la sortie de ce nouveau volet, dans toutes les interviews qu’il a pu donner) Côté acteurs, beaucoup de nouvelles têtes également (et peutêtre que ce n’est pas plus mal) même si J.J. Abrams n’a pas mis longtemps à conforter les fans de la première heure, rassurés par le « we’re home » réconfortant de Han Solo, de même que par le plan fixe de R2D2 subtilement accompagné d’une main ressemblant (beaucoup) à celle de Luke Skywalker… En revanche, la tête fossilisée de Dark Vador convainc étonnamment moins (nostalgie vs crédibilité du scénario?). Suite à la sortie du 7ème volet, la question qui se pose est donc évidente : Star Wars VII représente-til «un nouvel espoir» pour «le retour du Jedi» au cinéma ou une «menace fantôme» pour la célèbre franchise ? - Roxane Benetti

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Critique

CRITIQue BOX-oFFICE Macbeth de Justin Kurzel, 2015

« Life’s but a walking shadow, a poor player that struts and frets his hour upon the stage and is heard no more. It is a tale told by an idiot, full of sound and fury, signifying nothing. » - Macbeth, acte V scène 5 Si les adaptations de Shakespeare sont aussi vieilles que le cinéma (l’un des premiers films commerciaux fut une bobine de 15mn de pantomime sur Hamlet), seul des comédiens shakespeariens ont à ce jour réalisé ou écrit des films réussis : Laurence Olivier (Henry V en 1944, Hamlet en 1948 et Richard III en 1955), Orson Welles (Macbeth en 1948, Othello en 1952 et Falstaff , un montage de scènes tirées des pièces Henry IV et Les Joyeuses Commères de Windsor en 1965), Kenneth Brannagh (Henry V en 1989, Beaucoup de bruit pour rien en 1993, Hamlet en 1996, Peines d’amour perdues en 2000 et Comme il vous plaira en 2006), Al Pacino (Looking for Richard en 1996), Ralph Fiennes (Coriolanus/Ennemis Jurés en 2012) … Le Macbeth de Justin Kurzel ne changera probablement pas ce constat, malgré un film réussi lorsque l’on prend les éléments dans le détail mais qui peine à convaincre une fois mélangés. 9


D’un point de vue scénaristique, la fidélité à l’œuvre assure la qualité de l’intrigue. L’écueil principal à éviter était la « contemporisation » de l’intrigue, le choix de situer l’action dans le moyen âge historique écossais est heureux. Toutefois c’est dans ses libertés avec l’interprétation (le sens) des vers shakespearien que le film surprend agréablement : les scènes de combat sont filmés dans un mélange de caméra épaule (aspect documentaire/reportage) et de slow motion qui détonnent sans dénaturer l’ensemble. Les décors, naturels, et la lumière extrêmement travaillée donnent à l’image une beauté plastique digne d’un tableau de Rembrandt (particulièrement les scènes d’intérieur du palais et de la chapelle). L’aspect brumeux des extérieurs, passage obligé des tragédies shakespearienne, rappelle Valhala Rising/Le Guerrier silencieux de Nicolas Wending Refn. Le jeu des acteurs est aussi dans son ensemble de bonne facture. Michael Fassbender est un Macbeth victime de stress post traumatique au bord de la schizophrénie, fuyant la peine qu’il éprouve après la perte de son enfant dans la prophétie des Sœurs Fatales. Lady Macbeth, interprétée avec brio par Marion Cotillard, se réfugie dans la religion mais succombe aussi à la tentation du pouvoir. Elle sombre également dans la folie lorsqu’ elle

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découvre que l’homme qu’elle a connu et aimé a disparu. Bien que le texte original soit conservé, il n’est jamais « théâtralisé » : les acteurs ne le scande pas comme si ils étaient sur scène mais le murmure ou le joue en retenue ce qui est bien plus cohérent vis à vis des manipulations qui constituent l’essence des tragédies du Barde. La scène de clôture illustre plus que jamais l’expression anglaise « Game of Thrones » : la conquête du pouvoir et le clin d’œil était inévitable tant George R.R. Martin a puisé dans l’œuvre shakespearienne pour forger la sienne. Malgré tous ces bons points, le film parait lent : la réduction du texte (3h en version intégrale, 1h57 ici) réduit aussi la volubilité et la poésie des dialogues de la pièce et les passages contemplatifs illustrant ces textes coupés n’aident pas à échapper à l’ennui, comme lors d’une représentation de théâtre ou un concert trop mécanique qui peine à transmettre la vie exprimée dans le texte. Il est néanmoins recommandé de passer outre et d’encourager l’initiative. Pour l’anecdote, Justin Kurzel est en préproduction de l’adaptation du jeu vidéo Assassin’s Creed avec Michael Fassbender dans le rôle principal d’Altair. - The Watcher



Critique

CRITIQue

rétroSPECIVE Wrong Cops de Quentin Dupieux, 2013

Après notamment Steak, Rubber, Wrong et avant Réalité, sorti en début d’année, voici donc Wrong Cops, la cinquième réalisation de l’enfant terrible du cinéma français Quentin Dupieux, AKA Mr Oizo. Le plus américain de nos cinéastes, véritable OVNI dans le paysage cinématographique mondial adapte sur le grand écran son court­métrage du même nom et nous entraîne dans une plongée à la fois hilarante et cauchemardesque dans le quotidien étrange et irréel d’une bande de policiers corrompus, dépravés et immoraux qui occupent leurs journées à coups de combines sordides dans les ruelles mal famées d’un Los Angeles halluciné. 12


Cette mécanique bien huilée va se dérégler lorsqu’une victime collatérale laissée pour morte par l’un d’entre eux se réveille dans la voiture de celui­-ci. S’ensuit une succession de situations absurdes qui nous amènent à la rencontre d’une galerie géniale de personnages loufoques, cyniques et désabusés, parmi lesquels Duke, un minable dealer qui se plaît à terroriser ses clients et leur vendre de l’herbe cachée dans des cadavres de rats ou de poissons, De Luca, un pervers obsédé sexuel notoire tirant profit de son badge, Holmes, une maître­chanteuse qui tourmente un père de famille au passé trouble dans le porno gay, ou encore un borgne mélomane persuadé qu’il tient un hit techno qui lui ouvrira les portes de la gloire, et un adolescent introverti campé par un surprenant Marilyn Manson débarrassé de son emblématique maquillage. La grande force de Wrong Cops, c’est justement ces personnages, tous des névropathes en puissance, plus vicieux les uns que les autres, campés par un casting extraordinaire composé d’une joyeuse bande d’acteurs américains pour la plupart peu connus, en tête desquels l’immense Mark Burnham, Eric Wareheim, Arden Myrin, mais aussi quelques ajouts savoureux tels que notre Eric Judor national (le borgne mélomane), à l’accent anglais 13

approximatif, bien que nous ne saurions lui en tenir rigueur. Ils évoluent dans une réalité parallèle, privée de toute boussole morale et donc de repères pour le spectateur, qui est poussé par là à interroger son propre rapport au quotidien, au fil d’une suite de scénettes absurdes et surréalistes, traversées par un humour sombre, grinçant et ravageur d’influence anglo­ saxonne, et dont le non­ sens le plus total n’est pas sans rappeler l’univers des Monty Pythons, pour ne citer qu’eux. Certaines scènes confinent carrément au génie, comme par exemple celle du producteur, ou l’enterrement constituant l’improbable final. Le film dispose d’une identité propre, visuelle comme sonore, développant une esthétique du sale et du « what the fuck », comme en témoigne une photographie très travaillée, aux images jaunies et granuleuses dégageant une atmosphère unique et dérangeante, rythmées par les compositions nerveuses et entêtantes de Mr Oizo qui contribuent à la cohérence d’ensemble d’un assemblage abracadabrantesque, sans trame scénaristique à proprement parler et se refusant aux schémas narratifs conventionnels, rejetant par exemple les notions de situation initiale et de résolution, même si il est de facture plus classique et bien moins abstrait que les précédentes réalisations du bonhomme.


S’il est possible de rester hermétique à l’univers de Quentin Dupieux, force est de constater que le cinéaste ne laisse pas indifférent, on l’aime ou on le déteste. Il dispose bel et bien d’une « griffe », d’une patte reconnaissable entre mille qui fait que lorsque l’on se retrouve face à un Dupieux, on le sait instantanément. Il parvient ici à se renouveler sans pour autant se trahir, dans la lignée de la filmographie unique et éclectique que le réalisateur de 41 ans se constitue tranquillement, et ce malgré les quelques points faibles du film, à savoir le manque de rythme de certains passages, ou encore le fait que certaines situations auraient mérité d’être exploitées à fond. Wrong Cops fascine autant qu’il dérange, et laisse le spectateur hébété méditer sa sombre et cynique morale : l’enfer c’est le monde dans lequel nous vivons, « l’enfer c’est les autres ». - Gonzo Bob

LE SONDAGE Du MOIS Viens toi ausi participer à notre sondage du mois de Janvier en répondant à la question suivante sur notre page Facebook : Quel film a-t-il marqué le plus 2015 parmi les suivants - Mad Max : Fury Road / Star Wars VII / 007 Spectre / Fast and furious 7 / Jurassic World - ?


Critique

LE RING Dilectique autour de Knight of Cups Dans le coin rouge, affichant 600 films aux compteurs dont 500 en DVD, le visionneur de polar, l’amateur d’Hard Boiled, le survivant des nuits thématiques, le cinéphage du sud ouest : THE Watcher Dans le coin bleu, le vétéran du Mirail, cinéphile compulsif de l’extrême, aux plus de 500 Giga Octets de films éclectiques sur son disque dur : Gonzo Bob Aujourd’hui, l’objet de la lutte sera Knight of Cups, de Terrence Malick, sorti le 25 novembre 2015, 118 minutes.

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The Watcher : Knight of Cups est un film contemplatif, une espèce rare au cinéma (même d’auteur) qu’il nous faut protéger et par conséquent soutenir. Victime d’une promotion imbécile et mensongère assurée par des pubards ineptes...

Gonzo Bob : C’est le moins qu’on puisse dire, oui. La bande annonce ne le présente pas du tout pour ce qu’il est, à savoir un film expérimental. Les distributeurs ont presque honte de ce qu’est le film, un O.V.N.I. à ne pas mettre devant les yeux de tous. Il y a de quoi dégoûter le grand public du cinéma d’auteur !

The Watcher : Mais Knight of Cups est au delà du film d’auteur : il rejette en masse les codes du cinéma traditionnel : il n’y a ici aucune narration, les dialogues n’en sont pas vraiment : le film est plastique, les acteurs ne sont qu’intériorité, et le montage aussi erratique qu’une pensée méditative telle que semble la pratiquer Malick.

Gonzo Bob : Alors certes il essaie de provoquer des sensations chez le spectateur uniquement par la composition des plans et le montage, mais c’est inefficace : le résultat est un film hermétique, pseudo-intellectuel, une sorte de trip lyrico-narcissique exaspérant qui ne parvient jamais à poser des enjeux ou développer des personnages intéressants.

The Watcher : Mais les personnages n’ont justement pas à être intéressants : le sujet du film n’est pas le personnage, un Christian Bale minimaliste, ainsi que ses relations, mais nous spectateurs cibles du projectile film. C’est pour cela que toute identification est impossible.

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Gonzo Bob : Pourquoi pas, le film refuse la notion même de personnage, mais l’absence de dialogues, comblée par une voix off redondante et inintéressante au possible, qui enchaîne les banalités et les clichés pendant 2 très longues heures... J’ai carrément souffert pendant la projection, c’était trop pour l’humble spectateur que je suis.

The Watcher : Mais, ne vois tu pas, béotien que tu es, que la durée du film est aussi une forme d’exigence envers le public. Ne vous reposez plus en tant que spectateur mais soyez un « spect’acteur » de la pensée du film ! On est proche d’une expérience théâtrale comme les créations de Claude Régy. Le texte n’est rien d’autre qu’un mantra et la voix off, peu présente mais pourtant entêtante, est nôtre yogi.

Gonzo Bob : J’ai pas craché 6 Euros 90 pour un cours de yoga abscons ! Alors autant c’est une réussite indéniable visuellement et esthétiquement, c’est beau, la photographie est très travaillée et superbe, mais cela ne suffit pas à faire un film qui tienne la route...

The Watcher : Justement, non : tu ne peux pas réduire le cinéma à une route à suivre. On n’est pas dans Fast and Furious ou autres blockbusters burnés ni dans une des comédies potaches qui polluent nos écrans. Knights of Cups plane tellement haut qu’il semble ignorer le monde qui l’entoure : il est comme un cerf volant dans le ciel, un papillon dans notre jardin ; une incitation à la rêverie, au détachement des choses matérielles et une respiration au milieu du tumulte de notre existence urbaine 2.0.

Gonzo Bob : Le réalisateur brouille volontairement les pistes mais c’est vraiment too much. Au final le film est assez vain, extrêmement prétentieux, il ne raconte pas grand chose, et tourne rapidement en rond. Il est beaucoup trop long, et sa structure cyclique donne l’impression que les situations se répètent à l’infini. J’avais presque envie de sortir de la salle sur la fin, tellement j’en avais marre et l’impression que le film n’avait plus rien à proposer. J’ai vu pas mal de mauvais films, mais celui là m’a littéralement filé la migraine... Scandale !!!

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LGDC

LES GRANDS

Du CINéMA David Lynch par Simon Lesénéchal


« Un jour, je tombai sur un film pour le moins surprenant : Eraserhead (Labyrinth Man, 1977). Pour les connaisseurs, ce film expérimental constitue le premier long-métrage tourné par David Lynch. S’ensuit un choc : Eraserhead est complètement déstructuré, le travail sur le son ajouté à l’image font de ce film une oeuvre à part, dont on ne ressort pas indifférent. Sa composition surréaliste est en parfaite rupture avec les films que l’on peut voir aujourd’hui. La vie d’un pauvre homme en proie à la solitude, dont le nourrisson est le seul compagnon, fait véritablement penser à un cauchemar éveillé, dont on peine à s’extirper. Une fois ma curiosité touchée, je décidai de me pencher plus en profondeur sur le travail de ce réalisateur que je venais de découvrir. David Lynch est à l’origine un peintre, qui a compris au fil du temps qu’il manquait quelque chose à ses tableaux qu’il ne pouvait combler sans changer de voie. Il déclare dans une interview à Max, en 1990, à propos d’un tableau à peine terminé : « En regardant ce que j’avais fait, j’ai entendu du bruit. Comme le souffle du vent. Et c’est venu tout d’un coup. J’ai imaginé un monde dans lequel la peinture serait en perpétuel mouvement. J’étais très excité et j’ai commencé à faire des films d’animation qui ressemblaient ni plus ni moins à des tableaux mouvants ». Ainsi commence l’aventure cinématographique de Lynch. L’homme originaire du Montana, crée d’abord un film d’une minute, baptisé Six Figures (1966). Puis il réalise deux courts métrages, l’un de quatre minutes (Alphabet, 1968) et l’autre d’une trentaine de minutes (The Grandmother, 1970), dans lequel il pose les jalons d’un style reconnaissable entre mille. Il possède une patte qui permet de reconnaître sans difficulté ses œuvres : un cadre onirique, mystique, et un usage du son à part. Il se lance pleinement dans le bain à travers son premier long, que j’ai évoqué précédemment : Eraserhead. Toutefois, j’ai pris conscience du talent indiscutable de Lynch en visionnant son film le plus célèbre : Elephant Man (1980). Quelle claque en visionnant cette œuvre ! John Merrick, véritable instrument de foire, est pris en charge par le docteur Treves qui tente de l’arracher des griffes de son propriétaire. Le but de ce dernier est d’humilier un homme au visage complètement difforme (sa mère étant renversée par un éléphant avant son accouchement). Quel plaisir de voir le talent de Lynch nous conter une histoire aussi touchante, avec la singularité de sa mise en scène ! Suivent alors d’autres longs que je regarde avec tout autant d’intérêt. Parmi ceux-là, je visionne Lost Highway (1997), Blue Velvet (1986) ou encore Mulholland Drive (2001). Ces films se distinguent dans leurs scénarios, mais ils se ressemblent beaucoup ; je me concentre à chaque fois sur l’esthétique de ces films et sur leur scénario alambiqué. Et pourtant, je m’arrache toujours les

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cheveux lors du clap de fin, une fois le spectacle terminé ! Parce qu’il y a une chose qui agace ou qui stimule dans les oeuvres de Lynch : c’est l’explication extrêmement complexe du film, qu’il faut parfois visionner à de multiples reprises pour en récolter la substantifique moelle. Des vidéos entières y sont consacrées avec diverses interprétations (je pense spécialement à Mulholland Drive). Mais mon coup de cœur, le nec plus ultra de Lynch, c’est bel et bien Sailor & Lula (Wild at Heart, 1990) : l’histoire est prenante, et on prend un malin plaisir à suivre les péripéties de ces deux amants que tout empêche de vivre en paix. Lynch ne dépeint pas simplement les moments marquants de la vie de Sailor et Lula : ce film fait partie de ceux qui montrent la palette totale de l’existence.On observe le résultat avec stupéfaction, car Sailor & Lula n’est pas un film comme les autres. C’est pour une raison simple que l’on s’intéresse aux différentes œuvres de Lynch : s’évader, assister à une histoire singulière dont on n’est pas sûr de comprendre la signification à son terme. Ce qui me passionne dans ces films, c’est qu’ils ne constituent pas forcément à eux seuls une œuvre finie. Il est nécessaire d’y ajouter sa propre interprétation et de les revoir pour déceler les différents coups de génie de David Lynch. Je recommande ce réalisateur à tous les cinéphiles à la recherche d’un spectacle singulier et enivrant ; dans ce domaine, Lynch mérite toute notre attention. »

- Simon Lesénéchal Passionné par les vieux films, cet étudiant en licence d’histoire possède la compil’ des Hitchcock et passe ses semaines dans les grandes salles. Il prône une certaine éthique du cinéma, avec un point d’honneur pour le scénario. Ce qu’il dit moins, c’est qu’il voit tous les blockbusters dès leur sortie.


Chronique

J.J.Abrams le Starwalker Trekkies ou Jediistes? J.J. Abrams a probablement réussi à réunir les deux communautés les plus antagoniques de l’histoire de la science fiction : les Trekkies et les Jediistes. Mais si ces ennemis naturels se rassemblent, cela semble être pour agonir le réalisateur qui a relancé les franchises Star Trek et Star Wars. Dans les deux cas, les fans absolus des franchises sont, au mieux déçus, au pire se sentent trahis par la direction que prennent les sagas. Mais cela est-il avis de grincheux fanatiques adeptes du « c’était mieux avant » ou bien est-ce une critique réaliste sur la reprise en main par les studios de saga d’auteur ?

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Aux origines étaient deux hommes, Gene Roddenberry et George Lucas : le premier, fils de policier et pilote d’avion (dans l’armée pendant la seconde guerre mondiale puis dans le privé avec la PanAm ), utilisa sa série pour développer la tolérance et aborder les crises sociales des années 60 (première série avec une actrice noire dans les rôles principaux, premier baiser interraciale, un russe parmi les gentils en pleine guerre froide …) et imagina un futur utopique qui rassembla une communauté de fans qui perdure encore 60 ans après le premier épisode ; le second, étudiant à l’University of California Los Angeles (où il compte comme camarade de classe Francis Ford Coppola, Steven Spielberg, Brian De Palma et Jim Morrison), créa un univers de fiction mixant toutes ses passions par dépit de n’avoir pu obtenir les droits du sérial Flash Gordon et ressuscita un genre alors moribond tout en inventant un nouveau modèle économique que nous subissons encore aujourd’hui. Ainsi lorsque Abrams reprend Star Trek, il applique (il est également scénariste) la recette du Dark reboot origins (retour aux origines des personnages avec des récits plus sombre et violent) qui a permis à

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The Dark Knight de se classer en son temps 3e films le plus rentable de dollars de recette. Choix judicieux financièrement puisque le film atteint les 257 730 019 de dollars de recette et est à ce jour le plus rentable de la saga (86e au box office de tout les temps sur le territoire américain, 227 au rang mondial). Artistiquement, l’idée d’intégrer les lignes temporelles alternatives et donc justifier l’existence du reboot tout en confrontant son Spock/Zachary Quinto au Spock originel (le regretté Leonard Nimoy) afin de lier les épisodes est à mon avis brillante. Mais le film se repose trop sur les batailles spatiales entre gros vaisseaux. La suite Into the darkness est un peu plus intéressante d’un point de vue sociétal sur son interprétation du terrorisme dans cet univers. Mais l’on reste très très loin de la philosophie de Roddenberry. Et c’est justement cette « starwarsification » de Star Trek et ses excellentes relations avec les studios qui lui permirent de devenir le réalisateur/scénariste de Star War the force awakens. En prenant comme coscénariste Lawrence Kasdan (scénariste des épisodes V et VI avec Lucas), on s’attendait à une continuité de l’histoire : perdu !


On a droit à un remake de l’épisode IV (un hommage diront les exégètes) enrichi des meilleurs scène des épisodes V et VI. Et pour ce qui est du lien, le prégénrique est une insulte à l’intelligence humaine (en gros il s’est rien passé en 30 ans il y a que les noms qui ont changé). Là où Lucas cherchait à créer un univers cohérent et à traiter tous les sujets (la lutte du bien et du mal, la chute d’une république par la corruption et la guerre, l’apprentissage du héros...), là où il aurait été judicieux de nous montrer l’établissement d’une république utopique et de retourner les rôles (les forces impériales du « New Order » en clandestins traqués par l’armée régulière de la République), Abrams nous fait un film de vaisseaux, surjouant sur notre nostalgie. J J. Abrams a su chevaucher et traverser les étoiles mais il n’est pas un bâtisseur d’univers. Il peut être considéré comme un « conservateur » pour Star Wars et un « rénovateur » pour Star Trek. Mais l’on devra attendre le Star Trek Beyond écrit par Simon Pegg (véritable Trekkie pour le coup) et l’épisode VIII de Star Wars (toujours scénarisé par Abrams et Kasdan) pour espérer voire ces univers fascinant se développer, peut être redonner des lettres de noblesse à la Science Fiction et redevenir des « mythes fondateurs ». - The Watcher

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Infos Ciné

Hors Campus

INFOS -La cinémathèque -

- La Maison du Cinéma -

L’association La Maison du Cinéma organise des ciné-clubs tous les dimanches à 16h30, au Grenier Théâtre de Toulouse. Où : Grenier Théâtre de Toulouse – 14 impasse de Gramont 31200 Toulouse Plus d’informations et réservations sur : www.maison-ducinema.fr/ rubrique Ciné-club

-Le Cinéma Gaumont Pathé Jacques Weber jouera sur scène son spectacle inédit Eclats de vie, créé spécialement pour le cinéma, en direct et uniquement au cinéma Gaumont Wilson, le lundi 18 janvier à 20h. Où : Cinéma Gaumont Wilson – 3 Place du Président Thomas Wilson, 31000 Toulouse Plus d’informations et réservations sur : www. cinemasgaumontpathe. com/cinemas/cinemagaumont-wilson/ 24

Ciné-concerts à la cinémathèque de Toulouse. L’Inconnu (The Unknown) de Tod Browning (1927), projection en présence de Mathieu Regnault au piano le mercredi 27 janvier 2016 à 20h30. Où : Cinémathèque de Toulouse - 69 Rue du Taur, 31000 Toulouse

Plus d’informations sur ces événements et réservations sur : www.lacinemathequedetoulouse.com/


-L’Utopia (Toulouse) Dans le cadre du 9ème festival LGBT Des images aux mots qui aura lieu du 1er au 28 février 2016 à Toulouse, l’Utopia de Toulouse proposera cinq films programmés du 5 au 7 février. (Le profil Amina / All about E / Boy’s night / I feel like Disco / While you weren’t looking) Où : L’Utopia – 24 rue Montardy 31000 Toulouse

- Sorties en salles en janvier 2016 à ne pas louper -Les Nouveaux Loups du Web (Documentaire) de Cullen Hoback -Carol (Drame) de Todd Haynes - Spotlight (Drame) de Thomas McCarthy -Les chevaliers blancs (Drame) de Joachim Lafosse -The Boy (Fantastique, horreur) de William Brent Bell

Les pépites du 7ème art selon nos chroniqueur Gonzo Bob : Dr Strangelove or How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb - Stanley Kubrick, 1964 The Watcher : Network - Sydney Lumet, 1976 Adeline : Morse (Låt den rätte komma in) - Tomas Alfredson, 2008 Roxanne : Garden State - Zach Braff, 2004

CINé

Plus d’informations et réservations sur : www.cinemas-utopia. org/toulouse/

-Je m’appelle Malala (Documentaire) de Davis Guggenheim -Les délices de Tokyo (Drame) de Naomi Kawase 25

Simon : Du silence et des Ombres Robert Mulligan,1962

- Adeline Dekockelocre


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