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D’amour et d’eau… pas si fraîche

RIVIÈRE SAINT-CHARLES

D’AMOUR ET D’EAU PAS SI FRAÎCHE… POUR L’INSTANT !

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Serpentant à travers la ville sur une trentaine de kilomètres, la rivière Saint-Charles fait partie intégrante du paysage de Québec. Si les dernières décennies ont vu ses berges subir une véritable cure de jeunesse, force est d’admettre que la qualité de son eau laisse toujours grandement à désirer. Pourrons-nous un jour nous réapproprier pleinement ce cours d’eau?

«C’est le souhait de tous», soutient Nancy Dionne, directrice générale de l’Organisme des bassins versants (OBV) de la Capitale, concédant que la partie n’est pas gagnée et qu’il reste encore du travail à faire pour «diminuer les quantités de coliformes fécaux, qui limitent actuellement les activités de contact primaire [comme la baignade] et secondaire [comme le canotage ou la pêche]» à la hauteur des quartiers Saint-Sauveur et Saint-Roch. «C’est un secteur où le développement s’est fait avec les techniques de l’époque, soit la gestion des eaux usées et pluviales sur un système unitaire, poursuit celle qui est titulaire d’une maîtrise de l’Université Laval en biogéosciences de l’environnement. Lors de précipitations, toute l’eau d’une propriété [égout et eau pluviale] se retrouve dans le même système pour se diriger vers l’usine de traitement des eaux.»

Bassin versant

Un bassin versant est une partie de territoire dont les précipitations sont entraînées vers un même endroit. Celui de la rivière Saint-Charles, relativement petit avec ses 550 km2, est le plus urbanisé du Québec. Ce dernier se divise en six sous-bassins versants principaux, soit ceux des rivières des Hurons, Jaune, Nelson, du Berger, Lorette et, enfin, Saint-Charles.

Ce système devenant rapidement saturé, explique Mme Dionne, des surverses – ou troppleins – surviennent à différents points de déversement. C’est alors que l’eau usée, mélangée à l’eau de pluie, se retrouve di«La réouverture des vannes […] contribuera également à la "pérennisation des populations piscicoles" ». rectement dans les Nancy Dionne cours d’eau, sans traitement. S’ajoute à ces déversements réguliers le «lourd passif environnemental», comme l’appelle Mme Dionne, de la rivière SaintCharles. Passif avec lequel tous doivent composer pour espérer mener à bien cet ambitieux projet de réhabilitation entamé sous Jean-Paul Lallier au milieu des années 90.

UN BARRAGE, BEAUCOUP DE SÉDIMENTS RÉAPPROPRIATION

L’urbanisation qu’a connue la Vieille Capitale au cours du 20e siècle a laissé des traces dans la rivière. Des traces et des sédiments. À la hauteur du quartier SaintRoch, en amont du barrage Joseph-Samson, l’accumulation de ces dépôts dans le lit de la rivière forme une couche d’un peu plus de 75 centimètres – à peu près deux pieds et demi –, estime Nicol Tremblay, président et membre fondateur de la Société de la Rivière Saint-Charles et amoureux du cours d’eau. Construit dans les années 60, et actuellement à l’aube de trois belles années de travaux majeurs, le barrage Joseph-Samson représente en quelque sorte la planche de salut du cours d’eau en matière d’assainissement. À terme, au gré des marées et assisté par ordinateur, le barrage devrait permettre à la rivière de s’écouler – et à ses sédiments de se répandre – de manière plus constante vers le fleuve Saint-Laurent, nous dit M. Tremblay, attaquant ainsi de front le problème dont il est ironiquement la cause: la stagnation des eaux. Non seulement la réouverture des vannes de fond du barrage favorisera-t-elle le nettoyage de la rivière, mais, de par le maintien de la connectivité avec le fleuve, elle contribuera également à la «pérennisation des populations piscicoles», ajoute Nancy Dionne. «Avec la réfection du barrage, il est souhaité que ce secteur soit utilisé plus

abondamment par les espèces maritimes du Saint-Laurent.» Pour «pallier le manque de diversité de l’habitat», et ainsi favoriser cette réappropriation de la rivière par les poissons, un aménagement faunique a été réalisé par l’OBV de la Capitale en 2020. Puis un autre en 2021. Ce dernier, un projet pilote de plantation de végétaux aquatiques à proximité de la Marina Saint-Roch, «a également permis, par la bande, d’améliorer l’esthétisme de la rivière», souligne la directrice générale. S’il y a de l’espoir pour les poissons, qu’en est-il pour les humains? «Je ne pense pas qu’on puisse un jour se baigner dans la section urbaine de la rivière SaintCharles», lance Nicol Tremblay. Toutefois, il demeure très optimiste quant à la perspective de s’y adonner en toute sécurité à des activités comme le canotage ou le kayak. Pour ce faire, nous révèle-t-il à demi-mot, il n’est pas impossible «Je ne pense pas qu’on puisse un jour se baigner dans la section urbaine de la rivière Saint-Charles.» que la qualité des eaux de la rivière puisse prochainement être monitorée à l’aide du même modèle prédictif que celui développé par l’Université Laval pour la baignade à la Baie de Beauport.

Nicol Tremblay «C’est très intéressant, et ça va nous donner une très bonne idée de ce qu’il sera possible de faire.»

FRANÇOIS R. POULIOT

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