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Nuancer les stéréotypes

Donnez-moi un pays et je vous donne trois faits sur sa population. Qu’ils soient vrais, faux ou exagérés, nous nourrissons, parfois de façon automatique, des stéréotypes envers une culture ou un groupe d’individus. En majorité entretenues par les médias de masse, ces images préconçues qui dorment dans notre inconscient sont en quelque sorte une façon de hiérarchiser un tropplein d’informations concernant une communauté.

Les stéréotypes reposent sur une croyance partagée relative aux attributs physiques, moraux et/ou comportementaux, censés caractériser ce ou ces individus, rapporte Canopé, un réseau de création et d’accompagnements pédagogique du ministère de l’Éducation nationale français. Si la France est souvent résumée à ses baguettes chaudes et croustillantes, son goût distingué pour la mode, et ses vedettes hollywoodiennes prononçant leur fameux «J’adowe Paris», nous pourrions trouver différents attributs propres à un autre pays du globe.

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NOUS VERSUS LE RESTE DU MONDE

L’Université Laval n’accueille pas seulement près de 7700 étudiants

étrangers chaque année, elle ouvre également ses portes à un mélange de langues, de coutumes, et de saveurs venant d’ici et d’ailleurs. Des cultures qui se sont croisées pour la première fois dans les couloirs du pavillon Alphonse-Marie-Parent. Cyrielle, Robin, Kevin, Sanjit et Ramzi, originaires des quatre coins du globe, racontent comment ils ont déconstruit ou renforcé des stéréotypes qu’ils avaient à l’égard des autres nationalités.

Arrivés au Québec au début de l’année 2021, Robin et Ramzi, respectivement originaires de la France et de la Tunisie, s’accordent pour dire que la température glaciale et les accents «pas évidents à comprendre» étaient les seules choses auxquelles ils s’attendaient avant de poser leurs valises sur le sol québécois. Cyrielle, également Française, admets qu’elle connaissait à peine l’emplacement du Québec sur une carte, et soutient les propos des garçons tout en y apportant une nouvelle perception. «Finalement, je me rends compte que suivant la région en France, on a aussi des accents vraiment prononcés, c’est juste différent», confie-t-elle. Originaire de la ville de Metz, Robin admet que ses premiers avis sur les Québécois étaient basés sur des stéréotypes. «On s’en fait tous», dit-il avant de poursuivre sur sa première impression. «À ce qu’on disait, ils étaient tous très gentils et ça s’est confirmé avec le temps», témoigne l’étudiant en bio science de l’environnement. Il en est de même pour Kevin qui poursuit une maîtrise en gestion de projet. L’Abidjanais dit s’être renseigné auprès du site internet du

Bureau de la vie étudiante pour se mettre à jour sur les coutumes de la province. «D’après ce que j’ai lu, les Québécois sont assez individualistes et assez réservés», affirme-t-il. L’étudiant en gestion de projets assure plus tard avoir expérimenté tout l’inverse. Outre leurs premières expériences avec leur terre d’accueil, les cinq étudiants affirment s’être rapprochés d’autres cultures, des rencontres qui pour la plupart se sont faites dans les cuisines communes. C’est le cas de Ramzi, doctorant en science des aliments. Celui qui effectue sa première session à l’Université Laval déclare avoir été en contact pour la première fois avec des personnes venant de l'Inde, un pays dont il ne connaissait rien avant de venir au Canada, excepté le fait que sa population soit très peu nombreuse, et douée pour les études en général. «J’ai connu deux ou trois Indiens. Ils avaient l’air d’être passionnés et d’aimer leur domaine», se souvient-il.

DES VÉRITÉS NUANCÉES

Dans le journal en ligne Psychology Today, l’écrivain et psychologue britannique Satoshi Kanazawa soutient le fait qu’il existe des stéréotypes vrais qui émanent de généralisations empiriques faites par les scientifiques. «S’ils n’étaient pas vrais, ils ne seraient pas de stéréotypes.», avancet-il. Seulement, dénouer le vrai du faux peut s’avérer être une tâche compliquée, surtout lorsque cette généralisation omet le contexte qui va avec. Si Ramzi a une vision assez studieuse des Indiens, Sanjit, étudiant en sciences de l’administration, et ayant passé la majeure partie de sa vie en Inde, explique avec autodérision que cette idée ne s’applique pas du tout à son cas. Celui qui n’avait aucun avis sur le Québec, mis à part son amour pour Céline Dion, apporte une explication plus nuancée. «En Inde, les gens n’ont pas d’autre choix que de travailler dur pour pouvoir vivre. Vu sous cet angle, on peut dire que ce sont des personnes qui travaillent dur.»

En ce sens, les stéréotypes peuvent dans certains cas, se révéler vrais, bien que ces cases que nous construisons restent incomplètes face au fait de s’éduquer sur l’Autre et sa culture.

OCÉANE KOUASSI

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