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La veillée funèbre
La veillée funèbre du vieillard au boulet
Une veillée funèbre eut lieu dans la capitale de l’Amérique française; des passants venant se recueillir auprès d’un être malade. Le personnage avait acquis une notoriété qui transcendait la ville où il s’était enraciné sur la rue Saint-Louis, il y a plus d’un siècle déjà, s’étant épris d’une vieille bombe désamorcée elle-même vieille de plus d’un siècle qu’il gardait comme sa progéniture, ce boulet, son rejeton d’adoption, le trottoir, son nid. Au fil du temps, en grandissant, il finit par attirer de multiples regards devenant un emblème de la cité. Il apparaissait de plus en plus comme une de ses vieilles âmes épuisées par le temps qu’on observait d’un regard amusé sans vraiment chercher à l’aider. Mais, le vieillard avait fait son temps. On l’a abattu, devenu lui-même un boulet pour lui et son environnement disait-on. Cela fut non sans susciter une soudaine indignation, des concitoyens outrés se faisant voir en scarifiant des pancartes clouées sur l’être déjà cicatrisé par le temps et les mauvaises fréquentations. Des foules s’intéressaient désormais plus que jamais à cet aîné négligé. On promit que son compagnon pourrait continuer à se faire observer par la ville avec des cousins d’origine métallique. Certains venaient même soudainement porter à cet individu des présents, mais la plupart des gens allaient simplement lui rendre hommage, certains photographiant une dernière fois le vieillard comme souvenir. L’essentiel était de garder en mémoire puis de dire adieu à ce personnage qui avait marqué la capitale dont il était une figure familière, celui dont on se souviendrait toujours comme de l’Orme au boulet.
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PASCAL LÉVESQUES
: Benoit Gingras Illustration