

Changer les règles du jeu
La cuisine de la transition
Autres titres disponibles aux Éditions La Butineuse :
Hydrater la Terre. Le rôle oublié de l’eau dans la crise climatique, Ananda Fitzsimmons
Terre et climat. Éclairages sur le rapport spécial du GIEC, Patrick Love
Chroniques énergétiques. Clefs pour comprendre l’importance de l’énergie , Greg de Temmerman
Nourrir la terre. Manifeste pour une agriculture régénératrice, Daniel Baertschi
Les agriculteurs ont la Terre entre leurs mains, Paul Luu, avec Marie-Christine Bidault
Inventaire d’émotions transitoires, Tiphaine Gerondeau
Tous alchimistes : réinventons la boucle aliments-terre, Julie Lenormant
Abécédaire pour petits gourmands et grands curieux, Caroline Sanceau
Sur le champ. Carnet de voyage au cœur des vocations agricoles, Camille Fournier
Le Général Climat. Intensifier la lutte, Tom Middendorp, avec Antonie van Campen
Carnac, Guillevic. Un poète, un territoire, Lucie Albertini-Guillevic, Madeleine
Bernard
Mon assiette, miroir du monde, Axel de Martene
Couverture et maquette intérieure : © Agence Coam
Tous droits de reproduction, de traduction et d’adaptation, réservés pour tous pays.
ISBN : 978-2-493291-65-3
© 2024 Éditions La Butineuse
Atelier des Entreprises
Place de l’Europe – Porte Océane 3
56400 Auray – France
www.editions-labutineuse.com
Changer les règles du jeu
Axel de Martene
La cuisine de la transition
Table des matières
Deuxième Partie
– Les règles du jeu
Chapitre Sept – Dans « systèmes alimentaires », il y a « systèmes »
Chapitre Huit – Faire tourner la machine à nourrir
Chapitre Dix – Systèmes de croyance et de
Une nouvelle mission civilisationnelle pour l’agriculture
Le livre que vous tenez entre vos mains est le second opus d’un travail en trois temps qui vise à mener la transformation des systèmes alimentaires mondiaux.
Bien loin de leur poids très relatif dans le PIB ou la population active occidentale, l’agriculture et l’alimentation sont des enjeux civilisationnels qui ont façonné nos démographies, nos territoires, nos villes, l’organisation de nos sociétés et nos modèles de croissance.
Observer les systèmes alimentaires, c’est décrypter nos modes de vie et nos civilisations. C’est, aujourd’hui, discerner les failles du monde qui nous entoure. Pour bien comprendre cette crise des systèmes alimentaires et ce que cela révèle des fractures de nos sociétés au XXIe siècle, il faut sans doute revenir un instant en arrière pour comprendre comment a été forgé ce modèle actuel pour en faire saillir les ruptures environnementales, économiques et humaines.
Le modèle alimentaire thermo-industriel qui soutient nos sociétés aujourd’hui porte une très lourde responsabilité dans la trajectoire alarmante de nos civilisations modernes : empreinte environnementale, santé et avenir des populations, inégalités, pandémies, gaspillages. Mais la réciproque est tout aussi préoccupante : les bouleversements du climat, des cycles de l’eau, de l’azote ou du phosphore, la destruction de la biodiversité ou des sols vont impacter très durement nos capacités de productions agricoles et faire peser de grands périls sur des populations entières, nos économies et nos sociétés. Disparition des agriculteurs, conflits pour l’accès
aux ressources, migrations intra et inter-étatiques, pénuries, inflations… sont autant de menaces qui pèsent sur nous-mêmes dans le siècle de grands bouleversements que nous allons devoir affronter.
Le constat est alarmiste, certes ! Mais pas défaitiste. Car, dans les recoins de cette gargantuesque machinerie à nous nourrir, fleurissent des modes de pratiques, des réussites, des collaborations, des collectifs, des connaissances pour reconstruire un modèle de développement plus durable, voire régénératif. En repartant de l’agroécologie, de la bioéconomie et du développement des solutions fondées sur la nature, nous avons essayé de tracer les contours d’un modèle alimentaire et même de développement qui irait plus loin que la simple limitation des dommages à l’environnement, qui viserait à régénérer les ressources et les écosystèmes. Sur le terrain, ces innombrables initiatives montrent que l’agriculture et l’alimentation sont aux fondements des solutions qui pourraient nous permettre de reconstruire un nouveau narratif de progrès social, économique et humain, sans doute plus incitatif et plus stimulant, face aux grands défis de demain.
Tel était l’objet du premier ouvrage.
Ce second tome s’inscrit dans un raisonnement plus économique : on explorera tout d’abord un ensemble d’instruments financiers, technologiques et de gouvernance à destination de celles et ceux qui souhaitent agir.
Nous verrons surtout que nous savons non seulement ce qu’il faut faire sur le plan technique, mais que nous avons tous les outils en main pour porter ces transitions. J’irai même plus loin en étant un peu provocateur : ce n’est pas non plus une question d’argent ! La transition agroécologique est rentable et nous disposons largement des financements pour y investir. Cependant, pour efficaces qu’ils soient aujourd’hui sur le terrain, ces outils sont trop timides pour envisager une transformation systémique, à la hauteur de nos défis civilisationnels globaux. Pour construire ces nouvelles normalités autour de l’agroécologie, de la bioéconomie ou des solutions fondées sur la nature, il nous faudra nous attaquer plus frontalement aux « règles du jeu », c’est-à-dire aux dynamiques qui organisent aujourd’hui les
différents maillons des systèmes alimentaires, de la fourche à la fourchette ; producteurs, industriels, distributeurs et nous-mêmes, consommateurs, en passant bien entendu par le rôle des pouvoirs publics, de la science et de la société civile.
Pour celles et ceux qui souhaiteraient aller plus loin dans les réflexions, le dernier opus est à la fois plus macroéconomique et plus prospectif.
Il explore le rôle de la monnaie pour catalyser les transformations –comment construire « une solution pour les solutions », pour reprendre les termes de l’hydrologue Emma Haziza1 – qui permettrait à l’ensemble de ces outils de réaliser pleinement leurs transformations à grande échelle. Il avance quelques suggestions pour lancer le débat et – je l’espère –la révolte des consommateurs !
Notes
1 Haziza, Emma (2022, 20 janvier), Les crises de l’eau, [Émission avec Julien Devaureix], Sismique #79.
Première Partie
On a tous les outils
Il y a beaucoup de raisons pour se lancer dans la transformation de son activité et de ses pratiques. Pour les agriculteurs, les motivations sont très diverses : engagement personnel ou collectif, sens ou liberté retrouvée dans son travail, niches de marché, préservation de son outil de production, adaptation vis-à-vis du changement climatique, indépendance vis-à-vis des variations de prix. Chaque cas est individuel et mérite d’autant plus d’être salué que l’environnement stratégique pousse au contraire à la massification et la standardisation. Malgré quelques exceptions qui font la règle, l’alimentation est un secteur de gros volumes, de très faibles marges et qui comporte beaucoup d’aléas.
Cependant, si l’on souhaite voir ces transformations se généraliser, l’agroécologie et les services écosystémiques devenir le nouveau paradigme de nos systèmes alimentaires, il est indispensable de repenser les modes de rémunération, de créer de nouveaux incitatifs économiques pour tous les maillons de la chaîne, à commencer par les agriculteurs, qui sont à la fois les plus pénalisés et ceux qui portent les plus lourdes responsabilités sur leurs épaules.
La thèse que je défends ici est bel et bien que la transformation des systèmes alimentaires doit être nettement plus rémunératrice pour les agriculteurs. Cela n’exclut en rien les motivations personnelles qui font se lever chaque matin les acteurs du changement, mais leur fournira des moyens pour agir, témoignera de la reconnaissance de leur impact, entraînera la majorité encore piégée dans le modèle thermo-industriel, et engagera de nouvelles dynamiques pour l’attractivité du métier.
Étant donné la crise économique vécue par le monde agricole et la fragilité même de notre capacité à nous nourrir qui en découle, on ne peut pas penser les transitions sans un rééquilibrage massif − j’insiste ! − de la valeur et des investissements au bénéfice de ceux qui nous nourrissent et qui sont les premiers régénérateurs de nos écosystèmes.
Chapitre Un
Transformer les systèmes alimentaires, un agenda politique global
Tout à la fois coupable, victime et solution face aux défis de l’Anthropocène, l’agriculture et notre alimentation sont un sujet de préoccupation grandissant de nos sociétés. Ces questions pénètrent dans les enceintes de discussion internationales les plus médiatisées, comme les Conferences of Parties (les fameuses COP), les sommets de protection de la biodiversité de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le World Economic Forum de Davos ou les sommets de l’ONU. Des acteurs aussi divers que Mark Rutte, l’ancien Premier ministre des Pays-Bas, Wiebe Draijer, le CEO de Rabobank ou le pape François ont pris la plume pour s’engager et le Secrétaire général des Nations unies lui-même, Antonio Guterres, a organisé en 2021 un sommet international dédié aux systèmes alimentaires. Son ambition était claire, il s’agissait d’ :
« [...] éveiller le monde au fait que nous devons tous travailler ensemble pour transformer la façon dont le monde produit, consomme et pense à la nourriture. »1
De plus en plus, l’alimentation et les systèmes alimentaires sont considérés comme la pierre angulaire de la construction du monde d’après. La Commission européenne le reconnaissait pudiquement :
« Les systèmes alimentaires ne peuvent pas résister aux crises comme la pandémie de COVID-19 s’ils ne sont pas durables. Nous devons repenser nos systèmes
alimentaires qui représentent aujourd’hui près du tiers des émissions mondiales de GES, consomment de grandes quantités de ressources naturelles, entraînent une perte de biodiversité et des impacts négatifs sur la santé (en raison de la sous-nutrition et de la suralimentation) et ne permettent pas des revenus et des moyens de subsistance équitables pour tous les acteurs, en particulier pour les agriculteurs.»2
Elle en a fait un axe fort de sa stratégie globale du « Green deal » en leur reconnaissant plusieurs fonctions :
ʶ le lien inextricable entre la santé des hommes, la santé de la planète et la santé des sociétés (One Health) ;
ʶ le rôle fondamental des systèmes alimentaires dans l’adaptation et la lutte contre le réchauffement climatique ;
ʶ l’importance des systèmes alimentaires dans le rééquilibrage de la valeur et l’inclusion ;
ʶ le rôle essentiel des agriculteurs et le besoin d’une juste rémunération à la hauteur des efforts qui leur sont demandés.
On constate dans ces discours politiques un glissement sémantique qui revêt une importance majeure : on ne cible plus seulement les pratiques agricoles, mais c’est bel et bien l’ensemble des conditions de production, de transformation, distribution, consommation ou de gestion des déchets de notre alimentation qui doivent évoluer. Les politiques européennes ont même mené une révolution copernicienne sur l’un de leur plus vieux dogme : la concurrence des prix ! Dans la stratégie européenne « de la fourche à la fourchette », qui est la traduction alimentaire du Pacte vert européen, la Commission ouvre la porte à des réflexions sur les taxes carbone, en mentionnant notamment le fait que le prix de l’alimentation doit « refléter ses coûts réels en termes d’usage des ressources, de pollution, de gaz à effet de serre et d’autres externalités environnementales. »
Cette prise de conscience expose de plus en plus clairement le fait que les réponses aux grands défis de demain, pour l’ensemble de l’humanité comme pour le monde agricole ou agro-alimentaire, ne peuvent plus être trouvées
Chapitre Un - Transformer les systèmes alimentaires, un agenda politique global dans des silos étanches les uns des autres. On ne peut plus traiter les rapports de force dans les filières alimentaires indépendamment de l’eau ou de la biodiversité ; les émissions de gaz à effet de serre (GES) indépendamment de l’accès au foncier, du gaspillage ou de la santé publique ; les cycles de l’azote et du phosphore indépendamment de l’attractivité du métier ; les nouvelles aspirations indépendamment de l’exclusion alimentaire.
Ces réflexions exposent de nouvelles visions systémiques de l’agriculture qui se retrouve au carrefour des enjeux climatiques, alimentaires, géopolitiques, sociétaux ou de santé. Elles appellent des réponses globales intégrant les financements, les soutiens publics, les collaborations public-privé et de nouveaux modèles économiques. L’agriculture est à nouveau considérée comme stratégique pour la transition écologique, pour les agriculteurs, pour les sociétés et pour la paix.
Se nourrir est aux fondements de nos besoins individuels et collectifs les plus essentiels. Réinvestir financièrement et politiquement l’organisation collective de notre alimentation peut jouer un rôle modèle pour une transition à la fois créatrice de valeur et inclusive.
Les différentes formes d’agroécologie, la bioéconomie ou les solutions fondées sur la nature nous en ouvrent les portes. Il nous appartient désormais de les ériger en modèle dominant.
Combien coûte la transition ?
Malgré l’urgence des enjeux planétaires, mener les transformations des systèmes alimentaires pour régénérer les ressources et les écosystèmes ne se décrète pas. Nous devons poser des jalons un peu plus précis et surtout mobiliser des ressources qui soient à la hauteur de ces transformations majeures. Les nombreux sommets internationaux peuvent nous fournir des éléments pour baliser le terrain et les objectifs à atteindre. La plupart de ces défis ont été chiffrés à grands traits :
ʶ L’accord de Paris conclu lors de la COP21 en décembre 2015 fixe un objectif de neutralité carbone en 2050. Selon la Cour des Comptes européenne, cela nécessiterait des financements à hauteur de 1 115 milliards d’euros sur la période 2021-20303. En France, c’est la Stratégie Nationale Bas-Carbone qui porte cette ambition climatique. Ce cap implique désormais de diviser les émissions par un facteur 6 (de 458 MtCO 2éq à 80 MtCO2éq) et d’augmenter les puits de carbone d’un facteur 1,5 4 . La stratégie est révisée périodiquement pour tenir compte de la trajectoire et adapter les objectifs. Cela représenterait 50 à 54 milliards d’euros par an (soit 2,5 % du PIB)5.
ʶ En décembre 2022, la Convention sur la diversité biologique a conclu un accord prévoyant la protection de 30 % des espaces terrestres et 30 % des espaces maritimes d’ici 2030. Cet engagement prévoit la mobilisation de 200 milliards de dollars par an6, mais d’autres recherches tendent à montrer que les réels besoins de financements s’élèvent plutôt à une fourchette comprise entre 722 et 967 milliards de dollars par an7 sur la même période.
Nous en dépensons à peine 130 milliards de dollars actuellement.
ʶ Le défi de Bonn a été adopté en 2011 et visait à restaurer 150 millions d’hectares de terres dégradées d’ici 2020. Il a été complété par la déclaration de New-York (2014) qui ajoute 200 millions d’hectares, soit un total de 350 millions d’hectares à restaurer ou reboiser d’ici 2030. Pour porter cet effort sans précédent, les besoins sont estimés à 830 milliards de dollars8.
Bien d’autres engagements de la communauté internationale, comme le cadre de Sendai (prévention des catastrophes naturelles) ou le programme d’AddisAbeba (financement du développement), viennent compléter ce panorama et ils se recoupent pour beaucoup. Par exemple, la restauration des terres contribuera largement aux objectifs climatiques ou de biodiversité. Si ces exemples donnent des ordres de grandeur pour illustrer les efforts colossaux nécessaires pour mener les transitions, ils ne concernent pas exclusivement les conditions de notre alimentation. En concentrant nos efforts sur ces seuls besoins, la fourchette à retenir est de 300-350 milliards de dollars par an9, soit 3,5 % du chiffre d’affaires mondial du secteur.
De l’importance du collectif
La mobilisation des financements est un préalable nécessaire, mais il n’est pas suffisant pour mener la transition à bien. Encore faut-il savoir où et comment investir. On ne peut pas accomplir la transition dans le monde agricole de la même manière que la transition énergétique ou celle du bâtiment, par exemple. Chacune de ces activités économiques est confrontée à des enjeux différents, qui appellent une organisation et des réponses elles aussi différenciées :
ʶ Par essence, l’agriculture touche à l’ensemble des compartiments terrestres : l’atmosphère, la lithosphère (les sols), l’hydrosphère (le cycle de l’eau) et la biosphère (l’ensemble du vivant). Elle sera toujours consommatrice d’espaces, d’eau, en ayant une empreinte importante sur l’ensemble des limites planétaires. C’est une grande responsabilité, et aussi une grande complexité.
ʶ Pour la lutte contre le changement climatique, comme pour d’autres combats environnementaux, le principal enjeu en agriculture est de répondre aux « émissions diffuses ». Si les rejets de GES sont globalement massifs, ils reposent sur des centaines de milliers, millions, voire milliards de petites sources d’émissions individuelles selon l’échelle géographique considérée. Cela signifie que pour avoir un impact sur la trajectoire d’émissions globales, il est nécessaire d’engager une très large population. La démarche sera donc bien différente de celle d’un gros site industriel par exemple, qui nécessite des investissements importants, mais qui ne mobilise qu’un seul interlocuteur et pour lequel l’impact peut être très rapidement efficace. En somme, il vaut mieux 1 000 personnes qui font un pas, qu’une seule personne qui fait 1 000 pas.
ʶ L’activité agricole est une activité risquée : le capital investi (le foncier, les bâtiments, les équipements) a des périodes d’amortissement très longues, les prix d’achats suivent des tendances lourdes à la baisse, sans compter la volatilité des marchés, les aléas climatiques, économiques, réglementaires et géopolitiques. Ce secteur est mal financé, avec seulement 10 % des agriculteurs dans le monde qui ont accès au crédit et aux assurances
nécessaires pour développer leur activité. C’est aussi l’un des paradoxes rencontrés auprès des investisseurs engagés dans les transitions : les fonds disponibles ont atteint 8 milliards de dollars depuis le début des années 2010, mais 30 % n’ont pas encore trouvé de projets jugés suffisamment viables10.
La question de la transition dans l’agriculture n’est pas seulement une question économique. Elle est également politique et sociale. Si le changement ne peut être que lourdement accompagné par le secteur public, il a besoin de l’engagement de l’ensemble des acteurs avec des modalités de financements, de gouvernances, d’incitatifs et de représentations qui sont encore à créer collectivement11, 12 ,13 ,14, là où les instruments économiques conventionnels : marchés, concurrence, compétitivité-prix, crédit… se montrent largement déficients.
Notes
1. United Nations (2021, 17 avril), Food Systems Summit 2021, United Nations, https://www.un.org/en/ food-systems-summit/about
2. Commission européenne (2020, 5 mai), Communication from the Commission to the European Parliament, the Council, the European Economic and Social Committe of the regions - A Farm to Fork Strategy for a fair, healthy and environmentally-friendly food system, Brussels.
3. Grandjean, Alain et Dufrêne, Nicolas (2020), Une monnaie écologique pour sauver la planète, Odile Jacob, Paris.
4. Ministère de la Transition écologique (2020, mars), Stratégie Nationale Bas-Carbone, Paris.
5. Ledez, Maxime et Hainaut, Hadrien (2021), Panorama des financements climat, I4CE - institute for Climate Economics, Paris.
6. Convention sur la Diversité Biologique, Cadre Mondial de la biodiversité de Kunming à Montréal (2022, 18 déc.), Projet de décision proposé par le président
7. Tobin-de la Puentes, John et Mitchell, Andrew W. (2021), The Little Book of Investing in Nature, Global Canopy, Oxford.
8. FAO & Global Mechanism of the UNCCD (2015), Sustainable financing for forest and landscape restoration: Opportunities, challenges and the way forward, Rome.
9. The Food and Land Use Coalition (2019), Growing better: Ten Critical Transitions to Transform Food and Land Use.
10. Kois Invest (2018), In collaboration with the Business & Sustainable Development Commission and the Blended Finance TaskForce, Financing sustainable land use. Unlocking business opportunities in sustainable land use with blended finance, London.
11. Faber, Emmanuel et Naidoo, Jay (2014), Innover par la mobilisation des acteurs. 10 propositions pour une nouvelle approche de l’aide au développement, Secrétaire d’État chargé du développement et de la francophonie, Paris.
12. Reed, Mark S., et al., Nevill Crossman (éd.) (2022, 12 janvier), Integrating ecosystem markets to coordinate lanscape-scale public benefits from nature, University of Adelaide, Plos One, vol. 17.
13. Valiorgue, Bertrand (2020), Refonder l’Agriculture à l’heure de l’Anthropocène, Le bord de l’eau.
14. European Investment Bank (2021), Investing in nature: financing conservation and nature-based solutions. A practical guide for Europe, Luxembourg.
Chapitre Deux
La transition est-elle rentable ?
Si on doit mobiliser toutes les énergies et ces montants colossaux de financements, comment peut-on générer cette valeur ? Peut-on avancer que transformer notre alimentation serait rentable ?
Il y a deux manières complémentaires de répondre à cette question : en considérant les perspectives du modèle actuel d’un côté, et en évaluant celles de ce qui fait aujourd’hui consensus comme modèle alimentaire durable de l’autre.
Risques financiers systémiques
L’objectif de cet ouvrage n’est pas de faire un cours de finance internationale. Elle joue cependant un rôle prépondérant dans les orientations des entreprises, les décisions des dirigeants et, in fine, sur notre alimentation. Si elle vise à préserver le modèle actuel, ou au contraire à pousser vers des solutions alternatives, cela change radicalement la donne. Et l’évocation de la rentabilité des différents modèles fait naturellement appel à ces politiques d’investissements.
Cela peut sans doute paraître contre-intuitif, mais la finance commence à se préoccuper sérieusement de la soutenabilité de notre alimentation.
En effet, l’ensemble des investisseurs de la planète fait aujourd’hui face à un risque monumental, celui des actifs échoués (stranded assets) : si vous investissez dans des actions, une usine, une marque, une maison, c’est dans
l’espoir qu’ils produisent suffisamment de valeur pour rembourser votre investissement et même générer une plus-value. C’est ce après quoi court l’ensemble de la finance. Un actif échoué est un investissement qui devient incapable de produire la valeur considérée et qui vous fait perdre de l’argent.
Pour nous tous, ce serait par exemple une maison qui perd la moitié de sa valeur pour cause de retrait-gonflement des argiles menaçant ses fondations ; pour une entreprise, ce serait une usine qui ne peut plus fonctionner à cause des prix de l’énergie ou de ruptures d’approvisionnement ; pour la finance, ce serait une action qui ne vaut plus rien. En économie, ce type de situation survient régulièrement dans les cycles de destruction créatrice, en cas de rupture technologique par exemple, mais le changement climatique, les menaces sur les écosystèmes et les ressources placent ce sujet sur un plan radicalement différent.
Le constat est sans appel et il émane directement du département d’État de l’agriculture américain (USDA) :
« Les facteurs de risques environnementaux, tels que les catastrophes naturelles, le changement climatique et la rareté de l’eau, qui peuvent entraîner la dépréciation des actifs agricoles, sont mal compris dans le contexte des chaînes de valeur alimentaires. La valeur à risque (VaR) à l’échelle mondiale est importante dans l’agriculture en raison de la surexposition aux actifs échoués dans l’ensemble des systèmes économiques et financiers. »1
Ce que nous dit le département d’État américain, c’est que si vous investissez aujourd’hui dans le modèle alimentaire thermo-industriel, votre investissement ne sera sans doute pas aussi rentable qu’annoncé. Il sera surtout de plus en plus risqué. Les usines, les machines et même le capital immatériel comme les marques, les brevets ou les compétences, seront de moins en moins adaptés pour vous faire gagner de l’argent en Anthropocène. L’université d’Oxford a tenté une modélisation économique : selon leurs calculs, l’ensemble des mauvaises pratiques et les conséquences que nous allons subir coûte 2 400 milliards de dollars par an au stock actuel d’investissements (estimé à 13 800 milliards de dollars) : cela signifie une perte de 17 % de son argent en investissant aujourd’hui.2
Ce mode de raisonnement est tout aussi valable pour l’ensemble de l’économie et on est très loin d’en imaginer les proportions : certains experts considèrent que nous serions dans une « bulle de carbone », c’est-à-dire une bulle financière disproportionnée par rapport à une réalité physique et économique compatible avec un scénario à +2 °C. Cette bulle est estimée à 28 000 milliards de dollars3. À titre de comparaison, le renflouement du système financier lors de la crise de 2008 n’aura coûté « que » 1 000 milliards de dollars. Le réseau indépendant « Principles for Responsible Investments » (PRI), soutenu par les Nations unies, qui milite pour l’investissement responsable, a calculé que les grandes entreprises perdraient ainsi 62 % de leur valeur si les États mettaient réellement en œuvre les accords de Paris4.
Comme le soulignait Mark Carney, gouverneur de la Banque d’Angleterre dans un discours resté célèbre en 2015, « la tragédie des horizons », « Une fois que le changement climatique deviendra une réalité pour la stabilité financière, il sera vraisemblablement déjà trop tard ».
Si les chiffres restent un peu conceptuels à l’échelle de la finance mondiale, ce sujet a aussi des implications beaucoup plus concrètes : les agriculteurs qui se sont lourdement endettés pour investir dans des équipements très performants risquent eux aussi de se voir ruinés au moment de la cession de leur exploitation pour financer leur retraite5.
Ce à quoi le monde de la finance − et le monde économique en général − est très mal préparé, c’est que l’ensemble de l’environnement économique sera radicalement différent. Deux grandes catégories de risques pèsent désormais sur les acteurs : « les risques physiques » et « les risques de transition ».
Les risques physiques concernent les ruptures des conditions de production. L’université d’Oxford en relève six6 :
ʶ la baisse de la disponibilité en eau potable ;
ʶ la dégradation de la fertilité des sols et de la pollinisation des cultures ;
ʶ l’augmentation de la variabilité du climat ;
ʶ le changement des zones de production ;
ʶ l’augmentation des maladies et des virus ;
ʶ l’augmentation des ravageurs de culture.
Les risques de transition regroupent l’ensemble des conditions économiques, sociales ou politiques qui seront elles aussi profondément bouleversées par les dérèglements de notre environnement : changements radicaux de comportements des consommateurs, réglementation, fiscalité, fuite des talents, boycotts, procès, activisme actionnarial, tarification des émissions. L’engagement citoyen pour l’environnement et le climat investit tous les fronts, ce qui bouleverse profondément le cadre stratégique des dirigeants. PierreYves Gomez, professeur de management à l’EM Lyon résume très bien ces mutations historiques sur son blog :
« Les exigences écologiques ou sociales à l’égard des producteurs annoncent et contribuent à la transformation inévitable de la consommation, comparable à celle qui a débuté dans les années 1930. À l’époque, les revendications sociales et politiques concernant l’accroissement des revenus ou la sécurité sociale, que nombre de patrons considéraient déjà comme farfelues, préparaient la consommation de masse et la société de loisirs qui assurèrent la croissance jusqu’à aujourd’hui. Nous vivons un bouleversement socio-économique inverse, aussi lent mais aussi radical dont la “sociétalisation” est l’expression : celui de sociétés qui après l’exubérance économique de la deuxième partie du XXe siècle doivent trouver un chemin de prospérité dans la sobriété. »7
Sans prétendre à l’exhaustivité, un rapide tour d’horizon de signaux qui ne sont plus si faibles montre l’étendue des tensions qui vont contraindre l’activité des entreprises :
ʶ Le Flygskam, la honte de prendre l’avion, est issu de la patrie de Greta Thunberg, qui mène les marches de la jeunesse contre l’inaction des décideurs. Désormais les promotions des meilleures écoles d’ingénieur et business schools annoncent publiquement refuser de travailler chez les grands groupes trop émetteurs.
ʶ Le 20 décembre 2019, la Cour suprême des Pays-Bas condamnait définitivement l’État néerlandais à réduire de 25 % ses émissions des
GES par rapport à 1990. En France, l’« Affaire du Siècle » met la justice climatique sur le devant de la scène au nom de ses 2 millions de signatures de citoyens. En 2017, l’ONU recensait 900 procès climatiques à travers le monde8
ʶ En janvier 2020, Larry Fink, le CEO de BlackRock, le plus gros gestionnaire d’actifs du monde, prévenait les chefs d’entreprises de son immense portefeuille d’investissements :
« Les entreprises, les investisseurs et les gouvernements doivent se préparer à une réallocation significative des capitaux. [...] À l’avenir, une transparence accrue sur les questions de durabilité constituera un atout essentiel pour la capacité de chaque entreprise à attirer des capitaux. [...] Alors que de plus en plus d’investisseurs choisissent d’orienter leurs investissements vers des entreprises axées sur la durabilité, le changement tectonique que nous observons s’accélérera davantage. Et parce que cela aura un impact si dramatique sur la répartition du capital, chaque équipe de direction et chaque conseil d’administration devront examiner comment cela affectera les actions de leur entreprise. »
Semblant lui emboîter le pas, 518 des plus grands investisseurs internationaux ‒ 47 000 milliards de dollars d’actifs sous gestion tout de même ! ‒, se sont engagés à réduire les émissions des plus grosses compagnies émettrices mondiales9. Cette année-là, 25 % des résolutions portées à l’agenda des assemblées générales d’actionnaires portaient sur l’environnement et le risque climatique10.
ʶ La Banque centrale européenne elle-même commence à faire évoluer sa doctrine pour mieux y intégrer le risque climatique. Elle a conduit un stresstest à l’été 2021 qui semble montrer que les bénéfices de la transition seraient largement amortis sur le moyen-long terme pour la plupart des secteurs d’activité11. Elle a annoncé également que les critères climatiques seraient désormais plus largement intégrés aux exigences de transparence financière, de gestion des risques, de l’acceptation des collatéraux et des rachats d’actifs. Ce qui peut sembler technique à première lecture devient nettement moins anodin quand on regarde les sommes en jeu : 12 000 milliards d’euros d’actifs éligibles au collatéral, 1 752 milliards d’euros d’en-cours de prêts de
refinancements de long terme et 3 530 milliards d’euros de titres détenus avec la politique de rachats d’actifs depuis 201512.
Des modèles de production très rentables en apparence
Le monde bouge, à bas bruits, mais en matière économique, l’inaction n’est déjà plus une option. Transformer nos agricultures et nos systèmes alimentaires ne signifie pas pour autant un effondrement généralisé de toute une économie, loin de là. Il se pourrait même que cela s’avère particulièrement rentable sur le long terme.
La mobilisation des acteurs et des financements exigeant aussi une part de rêve, plusieurs travaux prospectifs internationaux laissent contemplatifs : sur les seuls systèmes alimentaires, l’ensemble des opportunités de marchés estimées s’élèvent à des niveaux stratosphériques, entre 3 600 et 4 500 milliards de dollars par an13, 14 à l’horizon 2030, voire 12 000 milliards de dollars d’économies nettes (c’est-à-dire une fois retranchés les investissements initiaux) à l’horizon 2050… Ces études évoquent par ailleurs la création de 191 millions d’emplois.
Parmi les pistes évoquées, il y a largement de quoi séduire n’importe quel investisseur : l’agriculture de conservation ? 57 fois la mise ; l’agriculture régénératrice ? 34 fois la mise ; la restauration des terres agricoles ? 19 fois la mise ; l’agroforesterie multistrates ? 27 fois la mise ; une meilleure gestion des pâturages ? 16 fois la mise15 ; la lutte contre le gaspillage alimentaire ? 14 fois la mise16… La Banque mondiale, qui s’est penchée sur la question agricole, estime quant à elle qu’investir dans l’agriculture a un effet quatre fois plus important en termes de développement économique et humain que dans n’importe quel autre secteur17. La Commission européenne va encore plus loin, en reprenant à son compte de la littérature scientifique qui estime que le rapport coûts-bénéfices de la transition écologique serait même de 100 pour 1.
Ces solutions, contrairement à de nombreuses craintes exprimées, sont loin de menacer la sécurité alimentaire mondiale : on sait, selon la FAO, que nous serions déjà en capacité de nourrir jusqu’à 9 milliards de personnes sur terre en rééquilibrant nos régimes alimentaires, la distribution mondiale, et en étant plus efficaces contre le gaspillage18, 19. Tous les experts qui ont travaillé sur ces solutions évoquent également les immenses gisements de production que représentent par exemple l’amélioration des techniques culturales sur le riz (+477 millions de tonnes) ou la restauration des terres agricoles dégradées (+9,5 milliards de tonnes de céréales). Ajoutons-y les millions d’hectares qui ne sont pas mis en culture aujourd’hui faute de rentabilité pour commencer à peine à embrasser l’immensité de ces potentiels. Huit millions d’hectares ne sont pas plantés chaque année aux États-Unis. En France, où l’on commence à peine à se réintéresser aux friches agricoles, certains recensements montrent que jusqu’à un tiers de la surface agricole n’est plus cultivée20.
Une rentabilité qui questionne nos modèles économiques
Il n’y a finalement rien de très étonnant à la lecture de ces chiffres un peu sensationnalistes, si on se rappelle que les services rendus – gratuitement – par la nature sont de même ordre de grandeur que le PIB mondial21.
Évidemment, clamer les bénéfices de la transition sur le long terme ne suffit pas à attirer des afflux massifs de capitaux pour financer les agriculteurs et les territoires… Les investisseurs s’y seraient rués depuis longtemps s’ils percevaient si facilement ces niveaux de retour sur investissements. Il faut se pencher un peu dans les détails pour mieux comprendre les dynamiques et les limites de l’exercice.
Les conclusions des économistes qui ont analysé les rapports coûts/bénéfices de la préservation des écosystèmes sont de plus en plus convaincantes. La plupart des retours de terrain22, 23, 24, 25, 26, 27 montrent que les avantages sont réels, mais ils mettent en relief le fait que le retour sur investissements n’est pas toujours directement profitable à celui qui en supporte les coûts.
Ces bénéfices sont largement partagés. Il y a l’environnement, en premier lieu, mais aussi les pouvoirs publics grâce au développement économique, à la baisse des dépenses de santé, d’infrastructures, de services publics ou de reconstruction. Les populations gagnent en sécurité, en disponibilité des ressources, en bien-être, en opportunités de développement. Bien entendu, les acteurs économiques bénéficient de la préservation de leurs actifs et des marchés, de la sécurisation des chaînes d’approvisionnement, de la baisse des primes d’assurances, de possibilités de diversification.
Une étude nationale a mesuré les effets économiques de la restauration des écosystèmes aux États-Unis. Elle y montre que pour 1 dollar investi :
ʶ 0,20 dollar revient au gouvernement fédéral sous forme d’impôt.
ʶ 2,40 dollars sont générés sous forme d’activité économique.
ʶ 1,50 dollar de PIB est nouvellement créé.
Sur le plan national, cette étude a calculé que le secteur de la restauration écologique employait 126 000 personnes et générait directement un chiffre d’affaires de 9,5 milliards de dollars. Ses effets d’entraînement dans d’autres filières s’élevaient à 15 milliards de dollars, pour 95 000 emplois supplémentaires.
À plus large échelle, le cabinet McKinsey a mené quelques estimations sur les rapports coûts-bénéfices de la protection des zones naturelles. Il a estimé que pour un coût annuel estimé à 140 milliards de dollars :
ʶ Le retour sur investissement global serait compris entre 290 et 470 milliards de dollars.
ʶ Entre 400 000 et 650 000 nouveaux emplois directs et 30 millions d’autres emplois dans le secteur de l’écotourisme et de la pêche durable seraient créés.
ʶ Cela réduirait les émissions de 0,9 à 2,6 milliards tCO2éq.
Le FMI s’est essayé à l’exercice de quantification et son verdict est sans appel : investir aujourd’hui dans la protection des écosystèmes rapporterait sept fois l’investissement initial quand les politiques actuelles de soutien à l’agriculture
conventionnelle ne couvrent même pas les fonds de départ28. La protection et la restauration des mangroves, des zones humides et de captage d’eau ou même celle des récifs coralliens démontrent des taux de rentabilité qui feraient frémir les investisseurs les plus avisés !
Malgré ces opportunités de marché et les retours d’expérience frappants sur des projets de terrain et dans la littérature économique, la difficulté à changer de modèle, et à passer à l’échelle l’ensemble de ces modes de production, tient donc surtout au partage de cette valeur commune.
Les bénéfices sont collectifs, sur le long terme, et parfois à de (trop) larges distances des investissements nécessaires. Ils sont difficilement monnayables directement pour les financeurs. On parle alors de financing gap (écart de financement).
Décaler le regard
Mettons en perspectives ces deux aspects de la question de la rentabilité des modèles : si on regarde derrière nous, les performances historiques et les études de marché auraient tendance à nous laisser croire qu’on pourrait continuer à gagner de l’argent avec le modèle actuel, puisque c’est ce que l’on constate aujourd’hui autour de nous. Mais si on fait un pas de côté pour regarder désormais devant nous, en y intégrant l’ensemble des bouleversements à venir, physiques et sociétaux, transformer nos systèmes alimentaires apparaît alors largement plus profitable dans un monde en ruptures multiples.
En revanche, nos modèles économiques conventionnels apparaissent bien désarmés pour aborder toute l’incertitude de cet avenir et pour résoudre l’équation « investissements privés – bénéfices sociabilisés ».
Il ne s’agit pas que d’une question académique : 200 000 milliards de dollars29 dorment dans les coffres-forts des banques du monde. Comment les mobiliser à bon escient pour notre avenir ?
Notes
1. Reddy, Vangimalla R. et Anbumozhi, Venkatachalam (2017), Managing Stranded Assets and Protecting Food Value Chains from Natural Disasters, United States Department of Agriculture.
2. Caldecott, Ben, Howarth, Nicholas et McSharry, Patrick (2013), Stranded Assets in Agriculture: protecting value from environment-related risks, Smith School of Enterprise and the Environment, University of Oxford.
3. Carbon Tracker & The Grantham Research Institute, London School of Economics (2015), Carbone non exploitable 2013 : capital gaspillé et actifs dévalorisés.
4. Principles for Responsible Investing (2020), PRI reporting framework.Overview and structure, UNEP Finance Initiative, United Nations Global Compact, London.
5. Bonvillain, Thomas, Rogissart, Lucile et Foucherot, Claudine (2023), Transition de l’élevage : gérer les investissements passés et à venir, Institute for Climate Economics, Paris.
6. Caldecott, Ben, Howarth, Nicholas et McSharry, Patrick, op. cit.
7. Gomez, Pierre-Yves (2023, 27 mars), « Ce que révèlent les “raisons d’être” pompeuses », Blog de PierreYves Gomez, https://pierre-yves-gomez.fr/ce-que-revelent-les-raisons-detre-pompeuses-la-societalisationepisode-5/
8. UNEP (2017), « L’état du contentieux climatique », Revue mondiale
9. Dimson, Elroy, Karakas, Oguzhan et Li, Xi (2021), « Coordinated engagements », Financial Working Paper, University of Cambridge, European corporate governance institute.
10. Garnier, Lionel (2021, 26 avril), « Les résolutions climat, stars des assemblées générales », Le Revenu.
11. Alogoskoufis, Spyros, et al. (2021), « ECB economy-wide climate stress test, Methodology and results », European Central Bank, Occasional Paper Series
12. Couppey-Soubeyran, Jézabel (2020), Le rôle de la politique monétaire dans la transition écologique : un tour d’horizon des différentes options de verdissement, Institut Veblen pour les réformes économiques.
13. WBCSD (2020), The circular bioeconomy: A business opportunity contributing to a sustainable world, World Business Council for Sustainable Development, Geneva.
14. The Food and Land Use Coalition (2019), Growing better: Ten Critical Transitions to Transform Food and Land Use
15. Hawken, Paul (2017), Drawdown. The Most Comprehensive Plan Ever Proposed To Reverse Global Warming, Penguin Books, New-York.
16. Hanson, Craig et Mitchell, Peter (2017), The business case for reducing food loss and waste, Champions 12.3, Washington D.C.
17. Townsend, Robert F (2015), Ending Poverty and Hunger by 2030. An agenda for the global food system, World Bank Group, Washington D.C.
18. D’Odorico, Paolo, et al. (2014, 12 août), « Feeding humanity through global food trade », Eart’s Future, pp. 458-469.
19. Gerten, Dieter, et al. (2020, 20 janvier), « Feeding ten billion people is possible within four terrestrial planetary boundaries », Nature Sustainability, pp. 200-208.
20. Bottero, Laurence (2020, 7 février), « Où en est Open Friche Map, l’appli qui sert l’aménagement du territoire ? », La Tribune Provence-Alpes-Côtes d’Azur.
21. IPCC (2019), Climate Change and Land. An IPCC Special report on climate change, desertification, land degradation, sustainable land management, food security, and greenhouse gas fluxes in terrestrial ecosystems, Summary for policymakers, Intergovernmental Panel on Climate change.
22. Lawrence, Deborah et Vandecar, Karen (2014, 18 december), « Effects of tropical deforestation on climate and agriculture », Nature Climate Change, pp. 27-36.
23. Global Commission on Adaptation (2019), Adapt now: a global call for leadership on climate resilience
24. McDonald, Robert et Shemie, Daniel (2014), Urban Water Blueprint: mapping conservation solutions to the global water challenge, The Nature Conservancy, Washington D.C.
25. BenDor, Todd, et al. (2015, 17 juin), « Estimating the Size and Impact of the Ecological Restoration Economy », PLOS ONE
26. Tobin-de la Puentes, John et Mitchell, Andrew W (2021), The Little Book of Investing in Nature, Global Canopy, Oxford.
27. IPBES (2019), Summary for policymakers of the global assessment report on biodiversity and ecosystem services, Bonn, IPBES Secretariat.
28. Batini, Nicoletta, et al. (2021, 19 mars), « Building Back Better: How Big Are Green Spending Multipliers? », International Monetary Fund, IMF Working Paper
29. Allianz Research (2021), Allianz Global Wealth Report 2021.