2015 karibu fr 159

Page 1

juillet, août, septembre 2015

N° 159

FONCABA

PB- PP

BELGIE(N) - BELGIQUE

Formation de cadres africains Rue du Progrès 333/03 B-1030 Bruxelles (Belgique) - Tél: 02/2010383 Fax: 02/2051739 e-mail: info@kba-foncaba.be www.kba-foncaba.be

KARIBU BURUNDI & CONGO: LE DIALOGUE POUR LA PAIX SOLIDARITE: QUE SIGNIFIE-T-ELLE POUR VOUS? Bureau de dépot Gent X – P602401 3e trimestre 2015


contenu 4 BURUNDI : UNE BOUTEILLE A LA MER - POUR LA VIE ET L’ESPOIR Un cri du cœur et un appel pour ne pas utiliser la violence, pour ne pas faire la guerre. Depuis l’indépendance, la population a déjà assez souffert. Elle veut la paix. « Amahoro », comme on dit en Kirundi. Seul le dialogue pourra résoudre la crise. 10 CONGO : LE PAYS BOUGE Il y aura des élections, c’est sûr. Mais lesquelles et quand ? La Commission électorale CENI a présenté le calendrier électoral, mais il n’y a pas de consensus pour l’accepter. Le président Kabila propose un dialogue avec toutes les parties concernées. Certains partis politiques refusent ce dialogue et veulent aller directement à l’élection d’un nouveau président en 2016. 17 LA CAMPAGNE 11.11.11 : LA PROTECTION SOCIALE 18 UN LEGS POUR LA FONCABA 20 LA SOLIDARITE : POUR VOUS ? Un mot que beaucoup de gens, d’associations, de partis politiques s’approprient. Mais est-ce qu’il est vécu par des actes qui concrétisent cette valeur humaine? 30 FONCABA – COMPTE DES RESULTATS 2014

2

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


editorial Chères amies, chers amis, Tous les jours, nous sommes confrontés aux images insoutenables de boat-people en Méditerranée qui naviguent au péril de leur vie en voulant rejoindre l’Europe. La guerre, l’insécurité, les menaces et l’extrême pauvreté les poussent à fuir leur pays. Ils abandonnent leur famille, leurs biens et leur milieu de vie. L’Europe fait des efforts pour essayer de les accueillir. Mais en même temps, elle renforce les murs de sa forteresse. Dans des pays du Sud, l’insécurité et la peur d’une instabilité politique poussent des milliers de personnes à fuir leurs pays vers des pays voisins ou des régions plus sûres. De milliers de réfugiés et de déplacés vivent parfois dans des conditions inhumaines des camps, malgré que le HCR (Haut Commissariat pour les Réfugiés) et d’autres organisations humanitaires essaient de leur donner le minimum vital. C’est aujourd’hui le cas du Burundi et du Congo, deux pays dans lesquels la FONCABA renforce des leaders des organisations partenaires en accompagnement de la population à la base, en agriculture familiale, en défense des droits et en empowerment des femmes. Tant de misère nous touche et nous interpelle. En même temps, nous restons impuissant-e-s. Pourtant, on parle tellement de solidarité ! Que signifie-t-elle aujourd’hui? Peut-être l’utilise-t-on à tort et à travers pour être ‘politiquement correct’? Peut-être ne le comprenons-nous pas différemment? Ou bien, devrions-nous la vivre de la même façon ? Dans ce KARIBU, la FONCABA laisse la parole à quelques personnes d’Afrique et d’ici pour témoigner. Nous vous remercions du fond du cœur de continuer à témoigner votre solidarité à la FONCABA pour réaliser ses projets en Afrique.

M.-Bernadette Zubatse, Directrice Luc Bonte, Président

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

3


BURUNDI UNE BOUTEILLE A LA MER Pour la Vie et l’Espoir Un cri du cœur et un appel de Mr.Angelo Barampama pour la paix et le développement durable, vers ses concitoyens. L’auteur suit l’évolution de son pays depuis le début des années 1960 et cherche à contribuer, par ses analyses et ses engagements, à l’avènement d’un Burundi paisible et prospère. Il est docteur en géographie humaine (Université de Lausanne) et diplômé en études du développement (Université de Genève). Il a été chargé de cours à l’Université de Genève, où il a enseigné la géographie politique et la géographie régionale de l’Afrique, de 1996 à 2013. Depuis octobre 2013, il est formateur dans un projet intitulé « Cercles de Paix et développement », basé à Gitega (Centre du Burundi), projet piloté par l’Association internationale « Femmes Artisans de Paix ».

Dr. Angelo Barampama

Chers Compatriotes, De grâce et pour rien au monde, Ne faites pas la guerre ! Car, Elle est semeuse de haines et de pleurs Car, Elle est synonyme de destructions humaines et matérielles, innombrables et inutiles. Car, rappelez-vous, on sait toujours comment on LA commence, mais jamais comment on LA finit. Et puis, de toute façon, ce n’est jamais beau, ni sur le moment, ni après. Et vous en savez toutes et tous quelque chose ! Les cadavres que vous enjamberez, si vous LA faites, ce sont Ceux de vos pères ou/et de vos mères, Ceux de vos frères et de vos sœurs Ceux de vos oncles et de vos tantes Ceux de vos grands-pères et vos grands-mères Ceux de vos cousins et de vos cousines Ceux de vos frères et de vos sœurs de cœur 4

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Qui vous auront dit, toutes et tous, à un moment ou un autre, avant de passer de vie à trépas : « De grâce, ne LA faites pas ! Car, nous l’avons déjà expérimentée maintes fois dans ce pays, Elle n’apporte que tristesse, angoisse, peur, haine, destruction Oui, nous le savons, et vous le savez aussi, Ses conséquences se nomment dissymétries et dysharmonies, sous-développement, pauvreté, misère. Alors mon fils, ma fille, mon frère, ma sœur, …, De grâce ne LA faites pas ! Sachez que, aujourd’hui il est encore possible de l’éviter. Mais demain ce sera trop tard !». Dites-vous que, le meilleur chef n’est pas forcément celui qui gagne des batailles. Car celles-ci sont toujours synonymes de mort d’hommes, de femmes et d’enfants innocents. Et qui dit mort, dit anéantissement de la Vie et de l’Espoir pour toujours. Non, le meilleur chef, c’est celui qui sait LA gagner sans LA faire. Celui qui sait ainsi préserver ses troupes, son pays et son peuple des horreurs de cette « Connerie de … » [J. Prévert dans « Barabara »].

LA GAGNER SANS LA FAIRE C’est ce qu’a réussi en 1847 le Genevois Guillaume–Henri Dufour, lors du conflit armé connu sous le nom de Sonderbund. Conflit qui opposait sept cantons catholiques au reste de la Suisse. Grâce à ses talents de stratège et de négociateur, G-H Dufour gagna la paix en 27 jours, avec un minimum de pertes en vies humaines du côté des deux parties en présence. Il ordonna par ailleurs à ses soldats d’épargner les blessés, les prisonniers et ceux qui sont sans défense1. La Suisse a pu ainsi préserver sa paix, son unité et son indépendance, conquise en 1291. Et en 1848, elle a opéré une révolution pacifique dont les bienfaits se nomment entre autres paix, cohésion 1

Sur le général Dufour et ses hauts faits militaires et civils, voir entre autres https:// fr.wikipedia.org/wiki/Guillaume-Henri_Dufour.

Monument du Général Dufour sur la Place de Neuve à Genève

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

5


‘Je ne veux pas perdre ma maman ’

nationale, richesse, stabilité, etc. Avec une devise à la clé : Un pour tous et tous pour un ! Aux côtés d’Henri Dunant, le général Dufour fut l’un des fondateurs et principaux animateurs de la Croix-Rouge, dont l’action humanitaire est connue dans le monde entier.

DE GRÂCE, NE LA FAITES PAS ! Trop de sang a déjà coulé dans notre pays. Car, depuis 1961, les corps et les cœurs de ce pays ont déjà trop saigné. Saigné des flots qui ne cessent de couler et de se transformer en torrents qui dévalent les mille et une pentes de nos hauts plateaux. Pour ensuite former des marres de boues et de sang gluantes dans lesquelles nous n’arrêtons pas de patauger et de nous noyer ! Mais jusqu’à quand continuerons-nous à nous saigner les uns les autres? A nous 6

tirer dessus les uns les autres? A nous couper la tête les uns les autres? Et à perpétuer ainsi le malheur de notre peuple, sous le prétexte de nous prémunir ou de nous venger ?

Elle n’apporte que tristesse, angoisse, peur, haine, destruction

Oui, nous venger ! Mais en oubliant que « qui fait le choix de la vengeance finit par détruire les siens » et, in fine, se détruire lui-même : « Nzihora yamaze umuryango ». En oubliant aussi qu’on ne résout rien au bout du compte si ce n’est créer de nouvelles dissymétries et de nouveaux drames dans notre tissus social.

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Cette bouteille à la mer est jetée depuis Genève, où nombre de conflits du monde entier finissent autour d’une table de dialogue et de négociation. Justement parce que, en 1847, le général Dufour et les autres acteurs de l’époque ont choisi de ne pas LA faire. Aujourd’hui, la Suisse et le monde entier leur en savent gré.

DE GRÂCE NE LA FAITES PAS ! Mais plutôt donnez la chance à la Paix et à l’Unité nationale, gages d’un développement sûr et durable pour tous. Ainsi, tous ensemble, nous pourrons redonner Espoir, Confiance et Dignité à notre peuple. Nous pourrons aussi trouver des réponses valables aux défis auxquels le pays doit faire face, dont celui de nourrir une population sans cesse croissante,

qui d’ici 2050 aura probablement atteint les 30 millions. 30 millions pour 27834 km2. Une quadrature du cercle, ou quasiment ! Pour cela, comme pour le développement du pays en général, la paix est l’unique chemin, le seul plausible. Car, il n’est pas possible de produire suffisamment à manger pour tous, de se développer pleinement, quand on est dans l’insécurité et la peur, quand on n’est même pas sûr d’être là le soir ou le lendemain matin. Paix, pain quotidien et développement à moyen et long termes, voilà des paramètres fondamentaux qui sont en interaction systémique, que nous pourrions résumer de la manière suivante.

Développement (P) Pas de paix sans pain et pas de pain sans paix. Pas de développement sans pain et sans paix

Pain (P)

Paix (P)

Approche systémique de la paix et du développement

‘Je ne veux pas être perpétuellement en fuite, je veux cultiver mes champs en paix’

C’est cette paix-là active que nous essayons de mettre en pratique et au quotidien dans le projet « Cercles de Paix et développement au Burundi», piloté par l’Association internationale Femmes Artisans de Paix, dans lequel les « activités novatrices de développement » sont une expression appropriée de paix mise en pratique. Un projet qui rime avec restauration des cœurs, des esprits,

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

7


prisonnier et, plus grave, on le passe aux générations qui nous suivent. Car, c’est bien connu, une blessure qui n’est pas transformée est transférée ! A tel point que, d’après une étude des experts de l’Université de Genève, les séquelles d’une violence subie par une génération peuvent se retrouver à la troisième génération si la victime n’a pas reçu un traitement adéquat.

‘Je veux continuer à travailler en paix pour ma famille’ des corps et des terres. Une restauration qui suppose que l’on ait le courage d’aborder son passé bien en face et s’en libérer progressivement. Sinon, autrement, on en reste

Un traitement qui implique aussi que l’on ait le courage de se dire la vérité, de reconnaître les erreurs du passé et de les réprouver. En 1978 déjà, nous relevions que, « comme le dit l’adage rundi :“qui veut guérir de sa maladie en parle au grand jour (uza gukira ingwara arayirata)”. Et nous ajoutions que « Hutu et Tutsi, désireux de mettre fin à l’engrenage de violence et de haine qui secouent périodiquement le Burundi, doivent démystifier le tribalisme et le régionalisme… ». Cela est encore plus vrai en 2015, pas seulement pour

‘Plus jamais de guerre qui a pris tous les miens ’ 8

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


l’ethnisme, le tribalisme et le régionalisme, mais également pour tous les autres grands problèmes du moment. Un peu à l’instar de ces Genevois calvinistes qui, en 1903, ont eu le courage de reconnaître l’erreur commise par leurs ancêtres en condamnant le catholique et docteur Michel Servet à la mort sur le bucher et qui ont érigé un monument expiatoire à l’endroit où le médecin fut immolé. Monument que tout un chacun peut visiter librement et méditer sur le message qui y est livré en grosses lettres et que voici :

Ensemble, redonner Espoir, Confiance et Dignité à notre peuple

‘Je ne veux pas être orphelin’

Au terme d’un colloque organisé en 1991 à Genève, une jeune Burundaise présente dans la salle résuma ses convictions et ses espoirs par rapport à son pays par cette phrase : « J’aimerais un pays où il fait bon vivre !». Cela reste probablement le rêve de tous les Burundais et toutes les Burundaises, mais aussi celui de tous les amis du Burundi et des Barundi. Pour que ce rêve devienne réalité, dans l’intérêt de tous, De grâce, ne LA faites pas ! Dr Angelo Barampama, Gitega, 22 août 2015

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

9


CONGO LE PAYS BOUGE A plus ou moins 16 mois de la fin des mandats présidentiel et législatif national, et plus ou moins trois mois de l’élection des Députés provinciaux, une réforme importante dans l’Administration du territoire est mise en place. Il s’agit du découpage du Congo en 26 provinces (Loi du 2 mars 2015). Avant cela, le calendrier électoral, pour les élections générales, urbaines, municipales et locales, a été publié par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) mais ne bénéficie pas du consensus de tous les acteurs impliqués dans le processus électoral en RDC. Fabien Mbayo Kumwimba, secrétaire exécutif du CAEDH (Comité Africain des Educateurs aux Droits Humains), partenaire de la FONCABA, trouve que le découpage et les élections sont Mr Fabien Mbayo Kumwimba deux projets titanesques. Il se demande si cet agenda est gérable.

Malgré les inquiétudes exprimées par l’opposition au sujet du manque de réa­ lisme du calendrier électoral, et ses menaces de boycott des élections provinciales, la CENI affirme, par la bouche de son Président, que le train est en marche et que les élections auront bel et bien lieu. Sur terrain, le 30 mai 2015, il s’est clôturé l’opération de réception des candidatures pour l’élection des Députés provinciaux. Une partie de l’opposition a tenu à sa parole et maintenu sa position de non- participation. La plateforme de l’opposition dénommée “Forces Acquises au Changement (FAC)”, dirigée par le Député national Martin Fayulu, a toujours appelé au boycott, exigeant de la CENI 10

Un processus électoral hypothétique

trois préalables avant de s’engager. Il s’agit de l’actualisation du fichier électoral et surtout l’intégration de nouveaux majeurs au fichier électoral, la modification du calendrier électoral, avec l’élimination des élections locales pour donner priorité aux élections présidentielles et législatives, et la neutralité de la CENI. Il a été rapporté au courant de la même période que la CENI aurait avoué n’avoir pas sup-

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


L’abbé Malumalu, Président de la CENI avec M-B.Zubatse, directrice de la FONCABA

primé les noms des électeurs décédés du fichier. Ce qui ravive davantage des suspicions de l’opposition.

UN CALENDRIER ÉLECTORAL DIFFICILE À RÉALISER C’est ce qu’a déclaré en mi-août le Ministre des postes, téléphone et nouvelles technologies de l’information et de communication, Kin-Kiey Mulumba, sur les antennes de la Radio France Internationale. Ce dernier est convaincu que la RDC n’aura pas de moyens de faire les élections, dont les échéances sont trop rapprochées, en respectant les délais. Sur la même longueur d’ondes on retrouve les propos de Mr. Jérôme Bonso, Secrétaire exécutif de la Ligue Nationale pour les Elections libres et transparentes (LINELIT), qui a déclaré être préoccupé et inquiet par le retard enregistré dans l’exécution de certaines opérations programmées qui risque de bouleverser ainsi toute la planification des opérations et

échéances électorales. Et le Député national Martin Fayulu de conclure: « la situation politique est délétère en République Démocratique du Congo et caractérisée par un processus électoral hypothétique et l’installation improvisée et dangereuse des nouvelles provinces ».

La reconduction de Joseph Kabila est synonyme de choix pour la paix

AVEC OU SANS KABILA Il faut rappeler que le débat sur les élections en République Démocratique du Congo se déroule dans un climat d’incertitude caractérisé par la polémique au sujet de la perspective de la reconduction du Président Joseph Kabila pour un troisième mandat à la tête de l’Etat.

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

11


Ce projet est soutenu par la majorité au pouvoir et farouchement contesté par l’opposition. Le Ministre Kin-Kiey Mulumba a même développé un concept : « Kabila désir », qui traduit, selon lui, le combat pour la reconnaissance de Kabila comme celui qui a fait la paix au Congo et rendu le pays prospère. Pour lui, « il faut expliquer aux Congolais que la paix est importante et que sans la paix on ne peut rien construire ». Logiquement, il faut reconduire Joseph Kabila. Cette reconduction est synonyme de choix pour la paix. Pour lui, « le glissement », ou le renvoie de l’élection présidentielle à une date ultérieure, au-delà du délai constitutionnel, est déjà consommé. « Le fait que l’opposition demande l’enrôlement des futurs majeurs, fait que nous sommes déjà dans le glissement », a-t-il estimé. En plus, le découpage amène aussi son lot des problèmes, de nature à ne pas faciliter le déroulement aisé du processus électoral. La réponse se trouve dans le dialogue, selon le pouvoir et une partie de l’opposition, car il y a des partis politiques

Le découpage s’accompagnera de la montée du tribalisme et de la xénophobie d’opposition qui refusent le dialogue et mettent le cap sur les élections présidentielle et législative de 2016. Pour Kin-Kiey Mulumba, pour parer au vide juridique consécutif au glissement, il faut un accord entre les protagonistes.

LE DÉCOUPAGE EN 26 PROVINCES Ce découpage territorial de la RDC est constitutionnel. Il procède de la décentralisation qui vise le rapprochement 12

Le 1er Ministre de la RDC, Augustin Matata Ponyo, n’ a pas la tâche facile avec le calendrier électoral des administrés et des administrants. Seulement, il semble que le processus a été précipité : le contexte politique et les moyens ne s’y prêtent pas. Rien qu’à considérer son incohérence avec le processus électoral, il y a de quoi se demander pourquoi les autorités s’acharnent sur la réalisation de ce projet à tout prix maintenant. Cependant nombre des politiciens y ont mordu et on comprend pourquoi : il y a des nouvelles perspectives et donc on cherche le repositionnement. En général les politiciens sont allés à la va vite, animés par un enthousiasme qui a frisé la rébellion et le désordre. Certaines Assemblées provinciales, issues du découpage, ont vite coupé le cordon ombilical les liant aux autorités des anciennes provinces ou ont procédé rapidement à la mise en place de leurs bureaux définitifs

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Est-ce que le mandat du Président Kabila sera prolongé?

sans respecter la procédure de vérification de la constitutionnalité de leurs règlements d’ordre intérieur par la Cour suprême de justice. Dans l’opinion, on redoute que le découpage s’accompagne de la montée du tribalisme et de la xénophobie. Globalement, le découpage demande beaucoup de moyens pour installer les nouvelles institutions provinciales dans le délai et les faire fonctionner.

Assurer une alternance apaisée au pouvoir

LE KATANGA : NON AU DÉCOUPAGE Du point du vue idéologique et pour se faire bonne conscience face à la revendication générale d’une « identité katangaise » défendue par bon nombre des Katangais, les leaders politiques affichent une position mitigée, ce qu’on a appelé le « oui, mais… ». C’est ainsi que dès le lendemain de l’annonce du démembrement du Katanga, le Président de l’Assemblée provinciale, Mr. Gabriel Kyungu Wa Kumwanza, a initié une pétition qui aurait déjà rassemblé plus d’un million de signatures pour demander le « regroupement » des quatre provinces issues du Katanga en une, comme avant. Moïse Katumbi, le Gouverneur de l’ex-Katanga, a aussi une idée, pour préserver l’identité katangaise. Il sou-

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

13


Moïse Katumbi, l’ex-gouverneur de l’ancien Katanga, veut garder l’identité Katangaise

haite qu’à l’instar du Kivu dont sont issus le Nord-Kivu et le Sud-Kivu, les quatre nouvelles entités soient dénommées «Katanga-Centre», «Katanga-Nord», «Katanga-Sud», etc. Ce qui va conduire nécessairement à la révision de la Constitution de 2006 qui consacre les dénominations des 26 provinces du pays.

UNE SITUATION POLITIQUE TENDUE A la base on trouve à la fois l’option, contestée par l’opposition, prise par la CENI d’apurer l’arriérée du cycle électoral de 2006 par l’organisation des élections urbaines, municipales et locales, ce qui alourdit le processus électoral à un moment délicat marqué par le débat sur un troisième mandat du Président KABILA 14

que la Constitution ne permet pas de se représenter en 2016. Il y a le manque de moyens pour faire les élections, la problématique de la crédibilisation du fichier électoral, préalable de l’opposition pour participer au processus électoral 2015-2016, et le manque de consensus autour du calendrier électoral. A retenir aussi, la problématique de la gestion des enjeux politiques autour du découpage du territoire. Ajoutons à cela la menace que fait peser sur le pays le M23 qui exige de bénéficier de la loi d’amnistie et d’une intégration en bloc dans les Forces armées de la RDC, revendications que les autorités congolaises rejettent compte tenu du fait que la loi d’amnistie, promulguée par le chef de l’Etat, exclut toutes les personnes impliquées dans

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Où est-ce qu’on va avec notre Congo ?

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

15


les crimes de guerre et crime contre l’humanité. Face à ce contexte, la société civile plaide pour une organisation consensuelle des élections pour garantir la crédibilité du processus électoral et assurer une alternance apaisée au pouvoir. Elle est convaincue que le dialogue est nécessaire, pourvue qu’il se tienne dans le respect de la Constitution et dans le souci d’apaiser le climat politique et de garantir l’alternance démocratique. Le Comité Africain des Educateurs aux Droits Humains (CAEDH), à travers son projet d’éducation à la citoyenneté et à la

paix à Lubumbashi, plaide pour que tout ce qui se fait, que ce soit les élections ou le découpage, se fonde sur l’exigence de la paix et de la cohésion nationale. Fabien Mbayo Kumwimba, Lubumbashi, 25 août 2015

Le projet du CAEDH Le Comité Africain des Educateurs aux Droits Humains (DH), (CAEDH), est une jeune association sans but lucratif basée à Lubumbashi, capitale de la Province du Katanga en RDC. Il existe depuis le 06 avril 2012. Il a été créé par un groupe de Katangais réunis sous l’initiative de Mr Fabien Mbayo, un ancien boursier de la FONCABA. Le CAEDH se donne pour mission de promouvoir l’éducation civique et des droits humains en RDC et en Afrique. Un projet pour jeunes d’apprentissage de la démocratie Ce projet d’une durée de deux ans s’inscrit dans les stratégies de l’ONG FONCABA (Formation de Cadres Africains) à travers l’appui d’un partenaire local dans la ville de Lubumbashi, au Katanga (RDC). Dans ce projet, le CAEDH travaillera avec 16 écoles secondaires. Le projet vise à donner des connaissances de bases à la jeunesse estudiantine du Katanga pour qu’elle comprenne que le métier de leaders responsables de demain demande beaucoup d’exigence et de sacrifices personnels. Les jeunes vont apprendre la culture du respect des droits humains, de la démocratie et de la citoyenneté responsable à travers des activités ludiques d’éducation civique en démocratie participative. Ce projet entend donner sa contribution dans la transformation durable de la jeunesse, en vue de la préparer à ses futures responsabilités de citoyen et de leader dans la société. Les principales stratégies consistent en formation et en sensibilisation aux droits humains, à la démocratie éco-citoyenne, à la prévention et à la gestion pacifique des conflits. Le nombre de bénéficiaires finaux avoisine 10.850 élèves dans les 16 établissements scolaires d’enseignement du 2ème niveau du secondaire. Pour réaliser ce projet, la FONCABA cherche un financement d’un total de **175.538,00** euros sur une période de deux ans.

16

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Campagne 11.11.11 La protection sociale pour tous 3 personnes sur 4 n’ont pas accès à la protection sociale La protection sociale est un droit mais dans les faits, 3/4 de la population mondiale ne bénéficie pas d’un système adéquat de protection sociale. Tomber malade et ne pas pouvoir s’acheter de médicaments ; travailler mais rester pauvre ; se retrouver sans emploi et n’avoir plus aucune source de revenus ; travailler toute sa vie et ne pas recevoir de pension… c’est une réalité pour plus de 5 milliards de personnes. Les inégalités sociales augmentent partout dans le monde. En Belgique aussi, la protection sociale a besoin d’être renforcée car plus de 1,5 million de personnes vivent dans la pauvreté. Grâce à la solidarité entre toutes et tous, chacun a droit à une protection sociale qui assure une couverture des soins de santé et un revenu décent. La protection sociale est un mécanisme accessible à tous les pays qui permet de lutter efficacement contre les inégalités sociales et constitue un levier puissant de développement. C’est pourquoi le CNCD-11.11.11, les ONG, les syndicats et les mutualités mènent cette campagne ensemble et soutiennent dans le monde des acteurs qui se battent pour la protection sociale.

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

17


Un legs pour la FONCABA Votre engagement pour l’Afrique continue après vous La FONCABA est ravie de recevoir une donation ou un legs pour ses projets d’Afrique. Comme dernières volontés, la plupart des personnes font un testament. C’est une occasion de traduire leurs pensées pour leur famille, mais également d’offrir une partie de leurs avoirs sous forme de legs ou de donation à une asbl qui travaille dans un pays en voie de développement. La FONCABA est une asbl habilitée à recevoir des legs et des donations qu’elle utilise pour ses projets de formation en Afrique. Il suffit d’insérer dans le document la formule suivante : « Je lègue à l’asbl FONCABA à 1030 Bruxelles, la somme de …………….,…….. euro ou …………………… (biens meubles et)………………(immeubles) à l’adresse…………………pour la formation de cadres africains ». Comme le droit de succession est une matière assez compliquée, il est recommandé de consulter un notaire qui fera un petit calcul et vous donnera un avis correspondant à vos souhaits. Pour des informations complémentaires à la FONCABA. Contact : M-Bernadette Zubatse, Directrice Tél.: 02 2010383 ou info@kba-foncaba.be

18

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Le legs en duo Aussi bien vos héritiers que la FONCABA y gagnent LE LEGS EN DUO Le legs en duo est une donation par testament de biens meubles et/ou immeubles à une ou plusieurs personnes et en même temps à une asbl reconnue comme la FONCABA. Cette technique prévoit qu’en l’occurrence la FONCABA peut prendre en charge les droits de succession de la personne qui reçoit la donation. Si celle-ci est destinée à un parent lointain ou à un ami, celui-ci devra payer normalement beaucoup de droits de succession (jusque 65%). La FONCABA comme asbl ne paiera que 7% (8,8% en Flandres et 12,5% en région bruxelloise).

3 CONDITIONS: • vous devez rédiger un testament. • vous léguez une partie de vos biens à une ou plusieurs personnes • vous léguez la partie restante à une institution agréée (comme la FONCABA) qui aura à sa charge le paiement de la totalité des droits de succession.

Tout le monde y gagne! GRÂCE À LA TECHNIQUE DU LEGS EN DUO, VOUS LAISSEREZ AUTANT (SINON PLUS) À VOTRE AMI OU À VOTRE NIÈCE, TOUT EN SOUTENANT LES PROJETS DE LA FONCABA. FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

19


Solidarité, pour vous?

Que signifie-t-elle aujourd’hui? Est-ce qu’on ne l’utilise pas à tort et à travers pour être ‘politiquement correct’? Est-ce que chacun-e ne l’interprète pas à sa manière ? Est-ce qu’on se rend compte de sa richesse ? Est-ce qu’on réalise ce qu’elle implique ? Souvent on l’utilise dans des discours, des programmes politiques, des manifestations ou évènements pour faire bonne figure. Et pourtant, elle nous interpelle dans notre manière d’être. Des femmes et des hommes d’Afrique et d’ici s’expriment et témoignent.

Solidarité: la promotion des droits humains Les conflits, les guerres, la pauvreté c’est le refrain de chaque jour. Ces situations dramatiques déchirent notre société et placent des milliers d’êtres humains dans la vulnérabilité. Face à ces monstruosités, il faut agir, faire siennes les inégalités, les injustices, bref les préoccupations des autres. Il faut développer la solidarité internationale. C’est important de donner et de recevoir, de vivre un engagement avec les autres nations et trouver des solutions communes aux problèmes qui se posent dans un environnement globalisé. Ainsi, la solidarité internationale s’explique dans la promotion et la défense des droits humains : droits à l’éducation, à l’alimentation, à l’emploi, l’accès à l’eau potable, à la santé, aux libertés d’expression, d’association… Pour matérialiser cette solidarité, il faut un partenariat, qui se comprend comme un rapprochement sur la façon de voir des acteurs engagés à défendre une même cause. Il consiste à collaborer dans l’esprit des stratégies de mise en œuvre élaborées ensemble. Et le levier pour induire le changement souhaité par la solidarité exige un processus à long terme : investissement de temps, des ressources et d’efforts à consentir pour la résolution des problèmes. Et l’action de la solidarité internationale pour être efficace, doit se fonder sur l’équité, c’est-à-dire les acteurs doivent militer pour des règles équitables dans les différents domaines de la vie (politique, économique, sociale, environnementale) sur l’échiquier international. 20

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Se mobiliser pour la justice et la paix

En filigrane, l’éducation doit être au centre de la solidarité internationale qui est un rendez-vous du donner et du recevoir. Une sensibilisation pour changer les mentalités des uns et des autres (pays du nord et du sud). A titre d’exemple, les problèmes d’immigrations sont devenus une préoccupation des pays du nord alors qu’il aurait suffis que les conditions de vie minimales soient assurées au sud pour protéger le Nord de ce problème. Ainsi la solidarité internationale est fondée sur les droits humains à travers un partenariat étalé dans le temps (le long terme) dont les béquilles sont l’équité et l’éducation. Dans le contexte de nos communautés à la base, la solidarité passe d’abord par la prise de conscience que chacun de nous peut apporter l’espoir aux autres. Pour ce, l’attention aux inégalités ou injustices, la communication avec les groupes ou les dynamiques à la base pour réfléchir et agir ensemble, serait le point de départ. Le changement viendra d’en bas et non d’en haut. Paul Kabeya Mukenge, Secrétaire permanent de RODHECIC, partenaire de la FONCABA, Kinshasa

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

21


Solidarité: « Quand tu souffres, j’ai mal » La solidarité peut évoquer une attitude personnelle toute intérieure. On peut voir l’autre avec une certaine indifférence ou, au contraire, apprendre à l’aimer passionnément avec une profonde empathie. Etre seulement reconnu, compris, aimé met aussi un peu de baume dans le cœur. Que de situations peuvent nous interpeller et nous ouvrir aux besoins des autres en nous rendant mieux capables de les comprendre. Peut-on vraiment ignorer la souffrance, le vécu, les problèmes de ceux qui attendent un regard, un geste, une aide, un partage sans ressentir comme l’Abbé Pierre le : «Quand tu souffres, j’ai mal ». Bien sûr on découvre très vite que nos moyens personnels sont limités. Mais l’actualité nous confronte maintenant à un problème de plus en plus difficile à maitriser. Le nombre de personnes à aider ne cesse de croître de manière inquiétante. Les uns sont obligés de s’expatrier pour raison politique, d’autres parce que leurs conditions de vie sur place sont devenues de plus en plus pénibles voire impossibles. Ces personnes cherchent une vie plus humaine. En peu de temps, les pays plus favorisés sont amenés à accueillir un flot de plus en plus grand de réfugiés, au risque de déstabiliser leur propre équilibre, et finalement de nuire aux intérêts tant des uns que des autres. Ne devrait-on pas inviter certains réfugiés à rester dans leur propre La solidarité, c’est l’écoute et la compassion pays ? Notre solidarité serait alors de s’engager à mieux les aider et créer de nouvelles structures qui offriraient non seulement à eux-mêmes mais aussi à leurs compatriotes de meilleures conditions de vie. Oserait-on rêver qu’un jour, partout dans le monde, la solidarité puisse ainsi devenir et rester contagieuse, qu’elle puisse ainsi rendre plus fraternelle notre vie sur terre ? Les préceptes et sages paroles qui auraient pu nous inspirer depuis si longtemps portaient vraiment leurs fruits ! Jean-Pierre Gosselin, ancien professeur coopérant au Burundi, Jambes 22

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Solidarité: une disposition du coeur

Ce qui me touche me met en action

La solidarité est d’abord une disposition du cœur ouvert à son entourage proche ou lointain. Si elle n’est pas innée, elle se travaille. Une disposition à être ému par les événements et les personnes, pour ensuitepartager, selon ses disponibilités, son temps, ses possessions, son argent. Voir ce que l’on peut faire pour aider, changer, faire avec. Aujourd’hui on se sentirait appelé à aller à Calais ou ailleurs et à lutter avec. Mais n’est-ce pas utopique ? Ce que font la FONCABA et d’autres ASBL ou associations, c’est très bien déjà, mais aujourd’hui nous ne pouvons plus nous contenter de donner un peu de temps pour tranquilliser notre conscience. Les petites gouttes d’eau, ce n’est pas rien, mais aujourd’hui l’océan est tellement asséché. Le défi reste toujours. Même si nous prenons en charge l’une ou l’autre famille et que nous arrivons à lui trouver du travail, qu’est cela tant les besoins actuels sont criants ? Alors que faut-il aujourd’hui ? Je ne sais pas! … ou plutôt si, l’union fait la force … et les charismes différents rendent beaucoup de choses possibles. Ce qu’il faudrait, c’est que nous soyons plus solidaires entre nous. Le 15 août, quelqu’un de la paroisse nous disait que des petits groupes s’organisent pour mieux se connaître entre soi et sans doute pour plus de solidarité entre prochains, proches et plus lointains. Vivons d’Espérance et essayons de nous réveiller car le temps presse et tous les humains, peu importe leur confession, doivent s’entraider ! Mais ce n’est jamais facile ! Marie-Rose Ludwig, ancienne volontaire professeur à Idjenda au Burundi, Jambes

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

23


Solidarité dans mon assiette quotidienne Que fait un peuple qui devient économiquement plus fort? Il consomme plus de viande et de produits laitiers. C’est ainsi que depuis les ‘golden sixties’, notre modèle de nourriture a fortement changé. En moyenne, les Belges mangent beaucoup de protéines animales sous différentes formes et préparations, même si les dernières années la consommation a diminué un peu. D’autres peuples, surtout en Asie, commencent aussi à copier notre modèle de consommation. 54% de la population mondiale habite dans ce continent très peuplé. S’ils changent de mode de vie, ce serait une catastrophe planétaire. Prenons les Chinois, ils sont près de 1,4 milliard, 20% de la population mondiale, mais ils ne disposent que de 6% des terres agricoles dans le monde et 6% de l’eau douce. Si la moitié de la consommation mondiale de viande de porc se trouve en Chine, ils doivent réclamer à d’autres continents les terres et les matières premières pour le fourrage, par exemple à l’Afrique. Et les Indiens? Il y a peu de temps ils étaient en général végétariens, à cause de leur religion. Mais eux aussi commencent à entrer dans le paradis des McDonalds. Et…dans dix ans il y aura plus d’Indiens que de Chinois . Pour la globalisation et la démocratisation de la consommation de protéines animales, nous avons besoin de trois ou quatre planètes. Or nous n’en avons qu’une ! Mais pourquoi les Indiens et les Chinois ne pourraient pas se le permettre si nous les Européens nous le pouvons?

LE SOJA COMME FOURRAGE Souvent le soja est un ingrédient essentiel du fourrage. A l’origine c’est une plante sacré de la Chine. Donc rien de mal. Mais le fait que 80% de tout le soja du monde est destiné au fourrage, est une forme ultime de gaspillage. Avec le maïs, le soja nous permet d’acheter bon marché la viande de porc, de poule, de dinde et de bœuf. Une grande partie du soja qui pénètre dans nos régions, vient de la savane brésilienne. Il s’agit de Cerrado, une région de 2 millions km2 au coeur du Brésil, où la biodiversité est aussi importante que la forêt d’Amazonie. Pourquoi le saumon norvégien dans une grande surface à Anvers est-il si bon marché? Parce qu’il provient de l’aquaculture expansive. Dans les fjords de Norvège il est cultivé dans des bacs avec beaucoup d’antibiotiques contre les maladies, avec du soja du Brésil et de la farine de poisson du Perou. Vous pouvez réfléchir un instant sur la solidarité auprès d’une assiette de saumon, sur les voyages que le fourrage doit parcourir du Perou, du Brésil,

24

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Luc Vankrunkelsven: “80% du soja dans le monde pour le fourrage…!” de l’Argentine, du Paraguay. En effet, des plaines immenses de monoculture de soja ne se trouvent pas seulement au Brésil, mais aussi dans les pays cités (sauf au Perou), ainsi qu’aux Etats Unis et de plus en plus sur le continent africain. Dans onze pays d’Afrique les Chinois et les Brésiliens sèment le soja en monoculture pour l’Europe et l’Asie. D’autres font également du ‘landgrapping’ (voler les terrains fertiles), pour fournir du fourrage en Europe et en Asie. C’est ainsi qu’il existe aujoud’hui le triangle Mozambique-BrésilJapon. Des ‘fazendeiros’ (des grands propriétaires) brésiliens sèment le soja au Nord du Mozambique, le Japon s’occupe de l’infrastructure (ports et routes) et le président du Mozambique appelle cela du ‘développement’ et donne son feu vert. La solidarité pour le consommateur européen pourrait être: dévoiler ces courants de fourrage invisibles, manger soi-même moins de viande (ou éventuellement devenir végétarien) et opter pour d’autres sources de protéines. Ainsi nous pourrons ensemble prévenir que l’on vole de plus en plus les terres agricoles des paysans africains (‘landgrabbing’) pour notre fourrage. Luc Vankrunkelsven, co-fondateur et collaborateur de Wervel (Groupe de travail pour une agriculture juste et équitable) et auteur de plusieurs livres sur ce thème. Son dernier livre s’appelle ‘Voeding verknipt’ (‘nourriture abîmée’), Wervel 2014, Bruxelles

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

25


Solidarité: avec d’autres, faire autrement «La solidarité est l’expression de la tendresse des peuples ” (Che Guevara) Comme teen-ager j’étais séduite par les personnes qui s’engageaient pour le “tiers monde”. Le virus a survécu, à travers mon engagement dans les magasins du monde, dans l’opération 11.11.11, dans la chorale ‘WOSHkoor’. Se sentir unis avec des personnes ailleurs dans le monde qui, souvent à travers des situations très difficiles, essaient de faire tourner la roue autrement. Ils ne restent pas inactifs, mais ils s’unissent et mettent en place un contrepouvoir. Faire entendre leur voix et leur engagement ici, et renforcer leurs revendications justifiées, c’est ce que je veux faire. C’est ma petite solidarité. May Dierickx, WOSHkoor, Groupe de travail Coopération au développement, Heist-opden-Berg

Solidarité:

être humain

La solidarité minimale c’est être a priori po- Faire entendre la voix de ceux qui essaient de faire tourner sitif et ouvert aux au- la roue autrement tres, peu importe leur origine, leurs qualités, leur sexe, leur âge…Malgré les trop nombreux récits, les trop nombreux problèmes, les besoins immenses,…ne pas fuir. La solidarité aujourd’hui n’est pas illimitée, n’est pas de porter toute la misère du monde. La solidarité c’est apporter sa petite pierre pour un monde meilleur, faire quelque chose de concret pour d’autres personnes et les appuyer directement (même si c’est limité : physiquement, financièrement, matériellement, psychiquement…) et aussi politiquement lutter pour un monde plus juste (et donc pas pour un monde dans lequel nous gardons le plus possible pour nous-mêmes). Etre solidaire, c’est être humain. Jan Grant, WOSHkoor, Groupe de travail Coopération au développement, Heist-op-den-Berg

26

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


Solidarité:

l’attention sur la vie des autres

La solidarité, c’est l’entraide mutuelle, l’assistance à ceux et celles qui sont en situation de détresse ou de vulnérabilité. C’est une dépendance mutuelle entre des personnes vivant dans un même milieu ou dans des milieux différents en vue de la réduction des proCoopérer pour une agriculture familiale, ici et là-bas blèmes rencontrés par les uns et les autres. Elle demande au préalable d’aimer l’autre, afin de partager avec ceux qui souffrent. Il est important d’avoir une attention particulière à la vie des autres afin de pouvoir les aider à surmonter les difficultés qu’ils rencontrent. Vivre la solidarité n’est possible que si chacun respecte les droits de l’autre. A ce moment, chacun, dans ses activités, posera des actes en cherchant la satisfaction des besoins de chaque membre de sa communauté. Le défi à relever est celui de la responsabilisation de tout un chacun de sorte que cette solidarité n’encourage ni la paresse des uns et ni l’esclavagisme des autres. Parce que dans notre milieu, nous voyons des gens qui considèrent des aides qu’ils doivent recevoir des autres comme des droits et transforment ces derniers en leurs esclaves. Ils ne travaillent pas et constituent une charge pour les autres. Certains refusent de travailler parce qu’une personne a beaucoup de moyens et a l’obligation (gratuite) de les supporter. En fait, il y a un défi de sensibilisation de la population sur l’auto prise en charge. Emérance Nsonga, secrétaire exécutive du mouvement féminin Bamamu Tabulukayi, Kananga (RDC)

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

27


Solidarité: responsabilité réciproque Il convient de dire que les humains sont interdépendants. Ils sont porteurs d’une dette les uns envers les autres, ainsi qu’envers les générations qui les ont précédés et envers celles qui leur succèderont. Tout ce que chaque personne possède n’est que don: la vie, la couleur de la peau, la famille, la tribu, la race, l’environnement…..Cela doit inciter l’homme à se conduire comme « Gestionnaire » au service des autres et non comme « Propriétaire » de tout ce qu’on possède. Si en plus on comprend que l’heureuse différence qui existe entre les hommes ne fait que les pousser à la complémentarité et à l’union, alors les liens peuvent permettre la solidarité. La solidarité est donc le sentiment de responsabilité et de dépendance réciproque au sein d’un groupe de personnes ayant des obligations morales les unes par rapport aux autres. Ainsi, les problèmes rencontrés par l’un ou plusieurs de ses membres concernent l’ensemble du groupe. La solidarité conduit l’homme à se comporter comme s’il était directement confronté au problème des autres, sans quoi, c’est l’avenir du groupe (donc le sien) qui pourrait être compromis. C’est ainsi que chaque société devrait mettre en œuvre des mécanismes de redistribution des dons, des revenus et des richesses pour la cohésion sociale et pour lutter contre la pauvreté. Cette solidarité peut prendre la forme d’une aide pécuniaire, d’un soutien moral, ou d’une aide en nature (nourriture, etc.), de l’accueil de réfugiés….. Il convient de dire que la solidarité dépasse la simple charité, car elle est une « conscience de devoir vis-à-vis de soi-même et des autres » nécessaire pour vivre, pour se protéger, pour se développer tout au long de la vie. Mais on doit faire attention au fait qu’il existe des « profiteurs » de la solidarité qui pensent qu’ils n’ont que des droits et non des devoirs. En effet, il y a des personnes qui par incompétence ou par irresponsabilité vivent comme des parasites sur le dos des autres au nom d’une « certaine solidarité » qui en réalité favorise leur paresse et leur sous-développement. Elle fait de ces personnes des consommateurs du développement ou des efforts des autres et non des producteurs du développement. On le remarque dans bon nombre de pays Africains où les gens attendent que la manne continue à tomber du ciel au lieu travailler pour partager avec les autres les « dons reçus ». La personne doit prendre conscience qu’il est un élément d’un organe plus large et qu’il a aussi des choses à apporter à la communauté. La solidarité nous oblige de penser toujours à notre relation à autrui, c’est-à-dire à la façon dont nous pouvons être utiles dans notre relation avec les autres membres

28

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015


S’impliquer au sein de groupe de la société. C’est ainsi que l’éducation devrait permettre à l’individu de se découvrir, de se connaître et de s’aimer pour s’ouvrir aux autres et être solidaire afin de favoriser la complémentarité et le mieux vivre ensemble. Emmanuel Burhama, Educateur à la Vie, Kinshasa

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

29


FONCABA Comptes des résultats 2014 Durant l’année 2014, la FONCABA a pu réaliser sa mission en Afrique grâce aux dons de ses sympathisants. Les chiffres et le graphique ci-dessous montrent l’utilisation des financements disponibles dont 94,50% pour les projets en Afrique. En 2014, à cause des restrictions budgétaires, nous n’avons pas pu recevoir de subsides de l’Etat pour certains projets. Pour cette raison, le bilan 2014 présente une perte de 59.753 euros. Les comptes de la FONCABA sont contrôlés par Mr. Baudouin Theunissen, Commissaire/Réviseur d’Entreprises du Bureau Crowe Horwath, Callens, Pirenne, Theunissen & C° n° 0427.897.088 – n° de membre : B00003.

FONCABA – CHARGES 2014

FONCABA – PRODUITS 2014

Frais de structure

e 8.708

Dons privés

e 97.228

Volet Nord *

e 15.121

Subsides

e 268.467

Volet Sud **

e 401.548

Produits divers

e 261

Charges exceptionnelles

e 333

TOTAL :

e 425.710

TOTAL

e 365.957

* Education au développement et collecte de fonds ** Projets au Congo et Burundi FONCABA – CHARGES 2014 Charges Frais de structure: exceptionnelles: 8.708 = 2% 333 = 0% Volet Nord: 15.121 = 3,50%

FONCABA – PRODUITS 2014

Volet Sud: 401.5487 = 94,50%

30

FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

Produits divers: 261 = 0% Dons privés: 97.228 = 27% Subsides: 268.467 = 73%


La FONCABA investit dans la formation de partenaires locaux autour de 5 thèmes : l’agriculture familiale et la sécurité alimentaire, la démocratie et les droits de l’homme, la prévention de conflits et la construction de la paix, l’éducation des jeunes et l’empowerment des femmes. La FONCABA développe une relation de partenariat honnête, ouverte et profonde, sur un pied d’égalité et basée sur le dialogue. La FONCABA choisit aussi une approche intégrale de l’homme et de sa communauté : les aspects économique, social, politique, culturel et spirituel s’y retrouvent.

ACTIONS DANS LE NORD

La FONCABA est une ONG de solidarité internationale, reconnue comme telle par les autorités belges, spécialisée dans le renforcement de la société civile en Afrique. Par des formations, les partenaires locaux et leurs groupes de base reçoivent la possibilité d’augmenter leurs compétences et de restituer leurs connaissances de manière efficace à d’autres. La FONCABA collabore directement et sur base de réciprocité avec des organisations africaines locales.

LES PROJETS

Tout sur la FONCABA su r www.kba-fon caba.be

Les projets: • sont adaptés à la spécificité culturelle de la population locale • stimulent la culture démocratique • créent l’autopromotion • renforcent l’empowerment de la femme • prennent soin du système écologique • ne sont pas imposés mais naissent au sein de la population locale

La FONCABA participe à l’éducation au développement concernant la problématique Nord-Sud et sensibilise les intéressés, les organisations sociales et les sympathisants autour de l’importance de renforcer de manière durable les individus et les groupes au Sud sur base d’un dialogue honnête. La FONCABA participe activement aux campagnes du mouvement Nord-Sud, 11.1111 et le CNCD, comme l’action sur les objectifs millénaires, donne des avis (principalement sur l’Afrique Centrale) et attire l’attention sur les thèmes dans la revue KARIBU et via le site web.

Et Vous? La FONCABA est soutenue par des dons pour une partie de son travail de formation avec des organisations partenaires en Afrique. C’est pourquoi la FONCABA vous remercie 1000 x ! FINTRO : BE 94 1430 6786 22 14 (Pour les dons de 40 euros ou plus, vous recevez une attestation fiscale) FONCABA I KARIBU 159 I JUILLET, AOÛT, SEPTEMBRE 2015

31


Karibu est la revue de l’asbl FONCABA et paraît quatre fois par an. Abonnement: La revue est envoyée gratuitement à tous les intéressés

La FONCABA est une ONG reconnue par les autorités, spécialisée dans le renforcement des capacités de la société civile en Afrique. En optant pour la collaboration directe avec des partenaires locaux, les projets obtiennent des résultats durables et un grand ancrage dans la communauté locale. La FONCABA donne des outils pour que les Africains puissent prendre leur propre processus de développement en mains.

Rédaction: M-Bernadette Zubatse Luc Bonte Erick-Bayard Rwantango Dries Fransen Jean Lefèbvre Joke Simons Nicole Denié Adresse: Rue du Progrès 333/03 B-1030 Bruxelles Tél. : 02 201 03 83 Fax : 02 205 17 39 e-mail : info@kba-foncaba.be www.kba-foncaba.be Editeur responsable: M-Bernadette Zubatse (Rue du Progrès 333/03 – 1030 Bruxelles) Photos: FONCABA, CAEDH, WOSH-koor, WERVEL, Angelo Barampama Layout et impression: De Riemaecker Printing bvba www.deriemaecker.be

Les articles n’expriment pas nécessairement l’opinion de la FONCABA. Cette revue est imprimée sur papier recyclé. Dit tijdschrift verschijnt ook in het Nederlands

OBJECTIFS DU MILLENAIRE

191 pays ont signé un accord pour réduire la pauvreté vers 2015. Aidez-nous de rappeler aux politiciens leur promesse et à relever le défi. La pauvreté doit disparaître de notre planète!


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.