
CAS CLINIQUES
1. Que suspectez-vous ?
2. Quel est votre diagnostic ?
INFECTIOLOGIE
1. La coqueluche
2. La rougeole
CAS CLINIQUES
1. Que suspectez-vous ?
2. Quel est votre diagnostic ?
1. La coqueluche
2. La rougeole
DocLili
Comment parler de la mort aux enfants ?
Dans ce numéro
Aurore Guyon, Attachée de recherche clinique
Amandine Rey, Maitre de conférence CRN / Lyon
Olivier Revol, Pédopsychiatre / Lyon
Laurence Véfour, Professeure des écoles
Ludovic Martin, Dermatopédiatre / CHU Angers
Auda Ameur, Service pédiatrie / Algérie
Emilie Roquand Wagner, Doc Lili
11ème Réunion d'Infectiologie Pédiatrique de l'Arc Alpin
Pédiatre / Directrice de la publication
Nous sommes tous très heureux de vous présenter la nouvelle formule de votre revue : nouveau nom, nouveau look, nouvelle présentation, nouvel éditeur, nouveau rythme !
Pourquoi changer de nom ?
D’abord pour continuer à se moderniser. Plusieurs propositions ont été faites et, après un vote auprès des membres du conseil d’administration et du comité de rédaction, votre revue « Le Pédiatre » est devenue « Pédiatrie ambulatoire » à une large majorité.
Ce nouveau nom nous semble mieux affirmer la filiation de la revue à l’AFPA (puisque l’abonnement numérique est maintenant automatique avec l’adhésion, comme la SFP le fait pour les Archives de Pédiatrie) et mieux définir son orientation principale vers la pédiatrie « de ville ». Ce nouveau nom nous apparaît aussi plus inclusif, à la fois parce que beaucoup de pédiatres sont maintenant des femmes mais aussi parce que l’exercice de la pédiatrie ambulatoire peut intéresser des non-pédiatres.
Un nouveau look, une nouvelle présentation
Avec un nouveau nom, il fallait un nouveau look.
À son départ en retraite, Bernard Mabille, l’éditeur du pédiatre de toujours, nous a présenté une jeune maison d’édition lyonnaise qui travaille déjà dans la création de contenus pédagogiques et ludiques notamment avec les Hospices civils de Lyon. Clémentine et Benoît Langue, Marion Filippi ont donc pris le relai de Bernard Mabille pour retravailler les pages de couverture et la présentation des articles. Ils ont fait, vous le verrez, un travail magnifique de présentation et d’illustration qui continuera à être peaufiné de numéro en numéro.
Résultats du questionnaire
Un nouveau rythme
Désormais nous allons passer du rythme bimestriel en rythme trimestriel pour des raisons essentiellement financières. Les annonceurs publicitaires traversent eux aussi des moments plus difficiles.
En revanche, entre 2 parutions, nous allons essayer de vous proposer un ou plusieurs mailings avec un cas clinique, un article de la future revue, une sélection d’articles de la presse nationale et internationale et si possible des podcasts ! Nous allons, dans tous les cas, faire de notre mieux…
Pensez à la revue !
Merci d’avance à ceux d’entre vous qui souhaiteraient nous envoyer des articles (cas cliniques résolus ou non, mises à jour, communications et mises à jour, thèses ou travaux de vos internes, rubriques sur des livres, des films, des pièces de théâtre à sensibilité pédiatrique, etc…).
Sachez enfin que nous avons décidé de proposer une rémunération aux rédacteurs d’articles car nous savons l’investissement en motivation, en énergie et en temps que demande la rédaction d’un article. La rémunération sera adaptée au contenu et à la longueur des sujets proposés.
Merci de votre soutien.
Merci de lire la revue et de la faire connaître. Merci de vos idées et suggestions.
Véronique Desvignes et le Comité de rédaction
Survey-Monkey de fin 2024
Nous avons reçu 162 réponses de 93% de pédiatres, exerçant pour la plupart en libéral. Près de ¾ des répondeurs reçoivent d’autres revues pédiatriques. 65% sont abonnés au Pédiatre. Le manque de temps est invoqué pour le non-abonnement par 54% des répondeurs, son prix par 33% et le manque d’intérêt par 9%. La version imprimée et numérique est préférée par 78% des répondeurs à la version numérique seule. Les rubriques préférées (« intéressant » et « très intéressant ») sont par ordre les dossiers thématiques (87%), les sujets paramédicaux (83%), les cas cliniques (82%), la rubrique lu, vu, entendu (83%), les actualités (congrès, journées régionales…) (78%), les actualités syndicales (71%) et les sujets de recherche (63%)… Les commentaires libres sont globalement très positifs et encourageants. Quelques suggestions nous ont été faites dont nous tiendrons compte (cold-cases, approche plus pratique ou plus holistique…).
La reproduction totale ou partielle des articles, études et informations publiés dans cette revue est interdite sauf autorisation préalable et écrite de la Société le Pédiatre. La responsabilité n’engage que les auteurs.
Revue de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire, du Syndicat National des Pédiatres Français et des Associations de Formation Continue en Pédiatrie.
Directrice de la Publication
Docteur Véronique Desvignes veronique.desvignes@hotmail.fr
Comité de rédaction
Docteur Roxane Desandes
Docteur Nellie Houeto
Docteur Sylvie Hubinois
Docteur Fabienne Kochert
Docteur Jean-Marie Muller
Docteur Marine Roulliaud
Docteur Jacques Giudicelli
Docteur Christiane Weisbecker
Editeur
Société le pédiatre, Sarl de presse 2a rue de la Paix – 67170 Brumath
Gérant : Docteur Jean-François Delobbe delobbejf@yahoo.fr
Comité de surveillance
Docteur Michel Navel
Docteur Roxane Desandes
Journaliste Médicale
Docteur Sylvie Sargueil Sargueilsylvie@gmail.com
Secrétaire de rédaction
Clémentine Langue clementine@dubourdon.fr
Illustrations couverture et intérieur
DUBOURDON & Cie Productions contact@dubourdon.fr www.dubourdon.fr
Commission paritaire
CPPAP n° 1128T81556 ISSN - 0397-9180
Composition
Atelier Marion Filippi marion@ateliermfg.fr
Impression Vassel graphique - 69500 Bron www.vasselgraphique.com
Association Française de Pédiatrie
Ambulatoire – AFPA Zone de la Fouquetière 155 rue Édouard Branly 44150 Ancenis Saint-Géréon pediatres@afpa.org
RÉDACTION
Pédiatrie Ambulatoire
Tél. 06 25 67 34 62
ABONNEMENT
Secrétariat administratif de l’AFPA
Emmanuèle Grassin 15, rue Maurice Berteaux – 33400 Talence pediatres@AFPA.org
Numéro papier à l'unité : 10 € TTC (frais de port non inclus)
Abonnement papier annuel (4 numéros) : 40 € TTC (frais de port inclus)
Adhésion AFPA et abonnement : www.afpa.org
N° 326 / Année 2025.1 janvier / février / mars
EDITO
SOMMAIRE
3 CAS CLINIQUE N°1
Que suspectez-vous ?
5
6
CAS CLINIQUE N°2
Quel est votre diagnostic ?
DOSSIER : Le Sommeil (partie 1)
1. Troubles du sommeil et troubles des apprentissages, des liens à l'étude
2. Quand l’école s’adapte au besoin de sommeil
11 Plagiocéphalies positionnelles, Les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
17
DOSSIER : Haut potentiel
1. Mythe ou réalité ?
2. Les élèves haut potentiel à l'école
23 Pas à pas urticaire chronique
28 Insuline DEGLUDEC, une innovation singulière à conjuguer au pluriel
32
INFECTIOLOGIE
1. La coqueluche en pleine résurgence depuis début 2024 La coqueluche : Foire aux questions
2. La rougeole, encore des épidémies
42 DocLili
Dis DocLili, comment parler de la mort aux enfants ?
44 Pédiatres du Monde
JANDIN LALOT Alizée - Docteur Junior en Réanimation Pédiatrique Spécialisée - CHRU Nancy
Henri a 13 ans, c’est le deuxième enfant d’une fratrie de 2. Il n’a aucun antécédent particulier, il ne prend pas de traitement et n’a pas d’allergie connue. Ses vaccins obligatoires sont à jour.
Depuis le mardi 10/12 dans la soirée, Henri se plaint de céphalées accompagnées de douleurs abdominales. Dès le lendemain il présente une fièvre, cédant au PARACETAMOL. Puis, le 12/12, le tableau s’accompagne de vomissements post-prandiaux et de diarrhée glairo-sanglante.
Il consulte chez son médecin le 12/12 qui diagnostique une grippe et une intolérance alimentaire pour lequel il prescrit un traitement symptomatique : anti-émétique, solution de réhydratation orale et anti-diarrhéique (SMECTA).
Devant la persistance des symptômes et l’impossibilité de maintenir une hydratation orale, les parents consultent le 13/12 aux urgences d’un centre de périphérie. Les constantes sont : Fc 48/min, TA 97/54 mmHg, SpO2 97% en air ambiant. À l’examen clinique l’enfant est cerné, la bouche est sèche et il est noté une éruption cutanée maculo-papuleuse du thorax et du front. La prise en charge consiste alors en Une hospitalisation en pédiatrie La mise à jeun et hydratation par BIONOLYTE G5% 2L/m2 Un traitement par PARACETAMOL,ONDANSETRON (ZOPHREN), AZITHROMYCINE pour une durée de 3 jours en attendant les résultats de la coproculture qui revient négative.
Le diagnostic retenu est celui d’une grippe A ( PCR positive pour la grippe A) avec gastro-entérite aigue compliquée de déshydratation.
Le lendemain, à l’hôpital, Henri se dégrade sur le plan neurologique avec somnolence, désorientation, pertes involontaires d’urines et selles. Le Glasgow est côté à 13 puis 11/15 (score anormal mais sans indication d’intubation).
Une encéphalie grippale *
Les examens complémentaires pratiqués sont :
● Une tomodensitométrie cérébrale sans injection normale.
● Une ponction lombaire sans particularité notable qui retrouve un liquide clair avec une protéinorachie normale (0,34 g/L), une glycorachie normale( 4,2 mmol/L), 7 leucocytes 7/mm3, 1020 hématies 1/mm3 . La PCR virale est envoyée au CHRU.
Les traitements sont débutés :
OSELTAMIVIR (TAMIFLU), CEFOTAXIME (CLAFORAN) (1gr x 3) et ACICLOVIR (ZOVIRAX) (20 mg/kg x 3 ou 500 mg/ m2 par jour) après un avis auprès des urgences du CHRU.
Les pédopsychiatres consultés diagnostiquent une catatonie etprescrivent du DIAZEPAM 10 mg IR et de l’HYDROXYZINE (ATARAX).
Quelle est la posologie à dose méningée du CEFOTAXIME et la dose maximale ?
300 mg/kg IVSE , maximum 24 gr/jour.
Le reste des examens biologiques est normal :
- Toxiques urinaires négatifs
- Hémoglobine 14,1 g/dl (normal), plaquettes 107 G/L (thrombopénie), leucocytes 3,1 G/L (leucopénie) dont PNN 1,88 G/L (neutropénie)
- CRP 11,6 mg/L
- CPK 414 UI/L (pas de rhabdomyolyse)
- Fonctions rénale et hépatique sans particularité
- En veineux : pH 7,44, pCO2 37 mmHg, bicarbonate 25,2 mmol/L, lactate 2 mmol/L (normal)
L’état d’Henri s’aggrave et il est transféré aux urgences pédiatriques du CHRU dans la nuit du 15 au 16/12.
A l’arrivée le Glasgow est côté à 4/15 avec des mouvements d’enroulement à la stimulation douloureuse, un Babinski
*Une encéphalie grippale
bilatéral, un strabisme divergent , une bradycardie à 50/ min, pas de réflexe de toux mais un réflexe photomoteur présent bilatéral.
Devant le score de Glasgow anormal, l’indication d’intubation orotrachéale est posée afin de protéger les voies aériennes supérieures et l’enfant est transféré en réanimation pédiatrique après induction séquence rapide par KETAMINE (anesthésique) et ROCURONIUM (ESMERON)2
Il est noté une labilité tensionnelle et cardiaque (passages de 60 à 160 battements par minute) et des troubles vasomoteurs. Une voie veineuse centrale (jugulaire gauche) et un cathéter radial gauche écho-guidés sont posés.
● Sur le plan hémodynamique : soutien hémodynamique par expansions volémiques puis introduction de NORADRENALINE.
● Sur le plan respiratoire : ventilation de soutien.
● Sur le plan neurologique : sous sédation adaptée, le doppler trans-crânien retrouve un index de pulsatilité normal dans l’artère cérébrale moyenne.
● Sur le plan infectieux : poursuite d’un traitement par OSELTAMIVIR (TAMIFLU), ACICLOVIR (ZOVIRAX) et CEFOTAXIME (CLAFORAN) à dose méningée dans l’attente des résultats définitifs.
Quelle est la posologie à dose méningée du CEFOTAXIME et la dose maximale ?
300 mg/kg IVSE, maximum 24 gr/jour.
En réanimation, la biologie retrouve :
- Hémoglobine 15,3 g/dl, plaquettes 156 G/L, leucocytes 8 G/L dont PNN 5,8 G/L et lymphocytes 1,48 G/L (normal)
- CRP 11,6 mg/L (subnormal)
- CPK 414 UI/L (normal)
1IVSE : intra-veineux seringue électrique2Kurdziel et al. Sleep spindles in midday naps enhance learning in preschool children; PNAS 2013 / 2Curare).
Cas clinique
- Créatinine 35 micromol/L, urée 3,4 mmol/L, natrémie 138 mmol/L, potassium 4,35 mmol/L, glucose 2,6 mmol/L (normal)
- ALAT 38 UI/L, ASAT 54 UI/L, bilirubine totale 13 micromol/L (normal)
- Lipase 31 UI/L (normal)
- En artériel pH 7,36, pCO2 36,1mmHg, pO2 116 mmHg, bicarbonate 21mmol/L, lactate 1,2 mmol/L (normal)
Donc toujours rien d’anormal.
Le 16/12, 6 jours après le début des symptomes,
- Un EEG sous sédation adaptée retrouve un tracé trop ample, trop lent et mal organisé comportant plusieurs états de vigilance évoquant une atteinte encéphalitique aigue. Aucune crise n’est mise en évidence sur le tracé.
À l’IRM cérébrale il est constaté par contre :
• Une souffrance et un œdème cérébral diffus sus et sous-tentoriel. L’atteinte sous-tentorielle prédomine au niveau du tronc cérébral (atteinte marquée du tegmentum mésencéphalique) et du cervelet . L’atteinte sus-tentorielle concerne l’ensemble du ruban cortical et les noyaux gris centraux (atteinte prédominant au niveau des claustrum et des pulvinar).
• Des signes d’hypertension intracrânienne diffuse majeure prédominant du niveau de l’étage sous-tentoriel avec engagement trans-tentoriel et amygdalien majeurs.
• Des signes de souffrance médullaire diffuse pluri-étagée avec atteinte semblant prédominer à l’étage cervical et en regard du cône médullaire terminal.
Une mydriase bilatérale aréactive est constatée au décours de l’IRM ainsi qu’un reverse flow au doppler trans-crânien et une absence de réflexes du tronc cérébral. Malgré l’administration de MANNITOL (1 gr/kg) pour réduire l’hypertension intra-crânienne, aucun signe de réveil, aucune ventilation spontanée ne sont constatés. L’arrêt des sédations est décidé le 16/12 au soir et Henri décède le soir du 17 décembre en présence de sa famille.
Le diagnostic retenu est celui d’encéphalite grippale avec rhombencéphalite(encéphalite du tronc cérébral) et mort encéphalique.
Discussion :
Les complications neurologiques des grippes sont très rares mais souvent sévères et responsables de séquelles voire de décès. Il peut s’agir de syndromes de Guillain-Barré, deReye, d’accidents vasculaires cérébraux, de myélites aiguësou d’encéphalites.
Les encéphalites grippales
Dans la littérature on ne retrouve que très peu de données, surtout en provenance du Japon où les observations sont nombreuses.
Les symptômes neurologiques d’une encéphalite, apparaissent environ deux jours après les symptômes systémiques (fièvre, myalgies, symptômes respiratoires) et peuvent être (1) :
- Des crises convulsives
- Des troubles du comportement
- Une altération de l’état de conscience
- Une diminution de la vitesse de traitement cognitif,
- Une paralysie motrice ou une perte sensorielle
Les atteintes à l’IRM d’une encéphalite grippale retrouvent souvent :
- Une nécrose thalamique bilatérale dans les cas graves
- Des lésions réversibles sur le splénium du corps calleux
Le traitement associe l’OSELTAMIVIR dans les 48 premières heures des symptômes, la corticothérapie 30mg/kg/jour (maximum 1 gr/jour pendant 5 jours) , les immunoglobulines
polyvalentes 1gr/kg/jour pendant 48 heures et parfois les échanges plasmatiques (5 à 10 séances).
La grippe peut aussi provoquer des manifestations et des atteintes d’organes variées telles que des myocardites, des myosites avec rhabdomyolyse, voire des défaillances multiviscérales avec une atteinte respiratoire ou insuffisance rénale aigue.
Indications et service médical rendu du traitement par OSELTAMIVIR (Tamiflu)
Selon l’ANSM, l’OSELTAMIVIR peut être utilisé à titre curatif et préventif.
● Traitement de la grippe Dans les 2 jours suivant le début des symptômes pour les enfants, y compris les nouveau-nés à terme, et les adultes présentant des signes cliniques typiques de la grippe en période de circulation virale. Le traitement est inutile après 2 jours.
● Prévention de la grippe.
L’indication en post-exposition est à déterminer au cas par cas selon les circonstances et la population à protéger quand il existe un facteur de risque.3
● Service médical rendu. Avis de l’HAS du 2 novembre 2011
Le service médical rendu par Tamiflu dans le traitement curatif de la grippe, lorsqu’il est débuté dans un délai de 48h après l’apparition des symptômes, en période d’épidémie ordinaire de grippe ou en période de pandémie, est faible chez :
- Les sujets ayant une forme clinique de grippe jugée sévère par le médecin ou compliquée d’emblée
- Les sujets ayant des facteurs de risque particuliers
Le service médical rendu dans le traitement curatif de la grippe est insuffisant dans les autres situations.
Un message clé : la vaccination est la meilleure des préventions
Dans une série chinoise (2), sur 71 enfants atteints d’une encéphalite à grippe, seul un enfant était vacciné. Son statut, vivant ou décédé, n’est en revanche pas précisé dans l’article.
D’autres études ont montré que la vaccination antigrippale réduit l'incidence de la grippe et peut réduire le risque de complications graves et de décès associés à la maladie grippale chez les enfants et les adultes(3,4).
En 2024, en France(5) les recommandations préconisent la vaccination annuelle des enfants de 2 à 17 ans révolus par l’un des 3 vaccins anti-grippaux qui ont l’AMM chez l’enfant et qui sont disponibles en France : FluarixTetra®, InfluvacTetra®, VaxigripTetra®. Le FluenzTetra®,vaccin vivant nasal ,n’est pas encore disponible en France.
À quel moment faut-il vacciner ?
► L'idéal est de ne pas vacciner trop tôt... mais pas trop tard non plus (pour ne pas être surpris par la "vague" épidémique)! Le mois de novembre est le plus propice. Il est toujours temps de vacciner un sujet à risque à partir de l’âge de 6 mois, qui n'a pas eu la grippe, même en pleine épidémie de grippe saisonnière, car il suffit d’environ 2 semaines pour développer une immunité protectrice.
La vaccination contre la grippe est-elle vraiment recommandée pendant la grossesse ?
► Oui, absolument, la vaccination est officiellement recommandée, en France depuis 2012 comme dans de très nombreux pays dans le Monde. Non seulement, ce vaccin protège la mère (plus à risque de formes graves), mais protège aussi l’enfant.La vaccination des futures mèresdans le dernier trimestre de grossesse protège leurs nourrissons au cours des 4 premiers mois de vie contre la grippe L’allaitement ne constitue pas une contre-indication à la vaccination antigrippale.
Faut-il vacciner les anciens prématurés sans pathologie pulmonaire ou cardiaque associée contre la grippe ?
► L’académie américaine de pédiatrie considère tous les prématurés comme étant à haut risque de complications et recommande la vaccination à partir de l’âge de 6 mois. Il en est de même en Suisse. En France, les recommandations officielles (2008) incluent les personnes ayant une affection broncho-pulmonaire (dont asthme,
dysplasie broncho-pulmonaire et mucoviscidose) ou cardiaque grave. La prématurité isolée n’est pas mentionnée, le calendrier vaccinal proposant la vaccination de l’entourage familial direct des enfants nésprématurément. Cela dit, toute personne voulant se protéger contre la grippe peut le faire... cela peut s’appliquer aussi aux enfants nésprématurément en France !
Combien de doses de vaccin antigrippal doivent recevoir les enfants ?
► Avant 9 ans, pour une meilleure immunogénicité, 2 doses en primovaccination, puis une seule les années suivantes pour rappel.
Après 9 ans : 1 seule dose en primovaccination. Les vaccins s’administrent en dose pleine (entière) quel que soit l’âge.
Pourquoi ne pas vacciner avant 6 mois les enfants à risque ?
Parce qu’il n’y a pas d’études démontrant l’immunogénicité, l’efficacité et la tolérance dans cette tranche d’âge. (On peut le regretter). Il est de ce fait indispensable de vacciner l’entourage immédiat.
Quelle est l’efficacité de la vaccination anti-grippale ?
► L’efficacité des vaccins est difficilement prévisible d'une année sur l'autre. Les meilleures années, quand les souches contenues dans le vaccin correspondent aux souches responsables de l'épidémie, le taux d'efficacité avoisine 70%. Les années les plus défavorables l’efficacité est beaucoup plus basse pouvant descendre à 20 à 30%. Mais même une protection incomplète sera toujours bonne à prendre et les enfants ont un rôle majeur dans la cinétique de l’épidémie et dans l’immunité de groupe.
Anne-Sophie Marchesseau, Charlotte Texier, Véronique Desvignes
Ce jeune garçon de 13 ans, né en Algérie, présente depuis très longtemps ces lésions pigmentées linéaires très étendues qui partent du milieu du dos et se terminent au niveau des poignets. Les lésions semblent stables d’après l’interrogatoire des parents. Aucune douleur et pas de prurit. Le reste de l’examen clinique est strictement normal
Quel est votre diagnostic ?
1.Lichen striatus. ► Non
Ce sont des papules érythémato-squameuses de disposition linéaire(suivant les lignes de Blaschko) qui apparaissent soudainement chez l’enfant d’âge scolaire et régressent en 1-2 ans avec hypopigmentation résiduelle. Le lichen striatus est acquis et non congénital.
2.Hyperpigmentation nævoïde linéaire selon les lignes de Blaschko. ► Oui
Il s’agit d’un mosaïcisme pigmentaire hyperpigmenté avec la coexistence de 2 populations de cellules génétiquement distinctes (la mutation génétique crée une population de cellules avec un potentiel pigmentaire plus important que celui de la peau normale). L’hyperpigmentation se développe selon les lignes de Blaschko (trajets de migration des cellules épidermiques embryonnaires à partir de la crête neurale).
● La disposition est linéaire, segmentaire ou spiralée. Sur le tronc, les lésions s’arrêtent sur la ligne médiane. Elles peuvent être plus visibles après exposition solaire
● Parfois remarquées dès la naissance, elles apparaissent le plus souvent dans la petite enfance (avant 1-2 ans).
● Le diagnostic est clinique.
● En l’absence d’autres malformations ou anomalies de développement, aucun examen complémentaire n’est nécessaire
● Le mosaïcisme pigmentaire hyperpigmenté est bénin et isolé.
● Il n’existe aucun traitement spécifique.
● L’orientation en consultation spécialisée n’est justifiée que quand le diagnostic est incertain.
3.Incontinentia pigmenti. ► Non L’incontinentia pigmenti, dominante liée à l’X, a une disposition linéaire possible. Il existe plusieurs stades successifs: papules et vésicules chez le nouveau-né (stade I) puis phase verruqueuse (stade III), hyperpigmentée (stade III) et hypopigmentée( stade IV). D’autres anomalies sont possibles (dentaires, ophtlamologiques, neurologiques…). Avis spécialisé en cas de doute.
Aurore Guyon, Attachée de recherche clinique
Des chercheurs lyonnais travaillent à mettre en évidence les liens entre troubles du sommeil et troubles des apprentissages et les mécanismes qui les sous-tendent.
La qualité de sommeil est altérée chez les enfants dys et TDAH, avec des différences selon le trouble. Le sommeil est globalement plus fractionné et le temps d’éveil nocturne est supérieur à celui des enfants sans troubles des apprentissages.
Les études, encore trop peu nombreuses, suggèrent qu’il existe un lien étroit entre troubles du sommeil et des apprentissages, dont la nature et les mécanismes sont encore à définir. L’équipe d’Aurore Guyon, cheffe de projet dans l’unité de sommeil pédiatrique de L’HFME des Hospices Civil de Lyon (HCL) présente ici les résultats préliminaires de ses travaux sur le sujet.
D’après une communication d’Aurore Guyon, docteur en neurosciences, cheffe de projet dans l’Unité de sommeil pédiatrique de l’HFME aux Hospices Civils de Lyon et des travaux de thèse de Julien LIORET doctorant en neurosciences, sous la direction du Pr Patricia FRANCO, neuropédiatre et d’Aurore Guyon avec le co-encadrement du Dr Daniel Gérard, pédopsychiatre.
Rédaction : Sylvie Sargueil
Mots-clés : Troubles Dys, TDAH
Troubles du sommeil et des apprentissages, arguments en faveur d’un lien
Une étude de 20161 s’est appuyée sur l’échelle d’évaluation des troubles du sommeil de l’enfant SDSC (Sleep Disturbance Scale for Children) pour comparer deux groupes d’enfants, un groupe d’enfants dyslexiques et un groupe d’enfants normolecteurs, tous âgés de dix ans.
La proportion d’enfants présentant un score pathologique au SDSC s’est avérée nettement plus importante parmi les enfants dyslexiques notamment concernant les insomnies, les troubles respiratoires nocturnes et les troubles de l’éveil.
Une autre étude de 20222 a proposé d’utiliser la même échelle chez trois groupes d’enfants : le premier concernait des enfants avec un trouble dys isolé, le second des enfants avec un TDAH isolé. Dans le dernier groupe une comorbidité Dys et TDAH avait été retrouvée. Les chercheurs ont ajouté au protocole, une évaluation des troubles émotionnels au moyen du questionnaire CBCL (Child Behavior Checklist).
Cette étude a mis en évidence le fait que :
● la co-occurrence des deux troubles, dys et TDAH, était associée à une plainte plus importante de troubles du sommeil.
● La présence de troubles émotionnels était plus importante en cas de TDAH, avec ou sans trouble dys.
Dès 1993, des enregistrements polysomnographiques ont mis en évidence des altérations de l’architecture du sommeil chez les enfants dyslexiques, matérialisées par une augmentation du temps de sommeil lent profond au détriment du stade 1 de sommeil lent et du sommeil paradoxal.
En 2022, L’équipe de Cainelli3 a évalué par un EEG de repos, la qualité de la veille chez les enfants dyslexiques. Les chercheurs ont mis en évidence une augmentation des fréquences lentes delta et thêta et une diminution des fréquences rapides alpha
et beta suggérant que la veille serait de moins bonne qualité chez les enfants dyslexiques que chez les enfants normo lecteurs.
Dys et TDAH, sommeil fractionné et longs éveils nocturnes
Les travaux de l’équipe lyonnaise visent à mieux comprendre les relations entre troubles spécifiques des apprentissages, vigilance et sommeil.
Une hypothèse sous-tend ces études : les troubles des apprentissages seraient associés à des troubles fonctionnels susceptibles d’induire une hyperfatigabilité et une sur-sollicitation des centres de l’éveil.
Ces troubles seraient à l’origine d’une moindre vigilance, d’une somnolence diurne et de plaintes concernant les capacités attentionnelles.
Par ailleurs, les troubles de l’apprentissage pourraient être associés à des modifications de la structure du sommeil, susceptibles d’avoir un impact négatif sur le fonctionnement cognitif en journée et réciproquement.
Une première étude rétrospective visait à déterminer les caractéristiques du sommeil des enfants dys au moyen de données de polysomnographies et de scores au questionnaire de somnolence ainsi qu’au questionnaire de Conners (dépistage des troubles de l’attention) dans trois centres. La cohorte comprenait 44 enfants diagnostiqués dys, 22 TDAH et 20 Dys et TDAH associés. La moyenne d’âge était de 9 ans. Les enfants souffrant d’un syndrome d’apnée du sommeil modéré à sévère étaient exclus de l’étude.Ils ont été comparés à un groupe contrôle de 17 enfants.
Résultats : les enfants dys, avec ou sans TDAH, rapportaient plus souvent une tendance à la somnolence (46% pour le groupe dys ; 29% pour le groupe dys-TDAH ; 17% pour le groupe TDAH et 6% pour le groupe contrôle).
Dossier : Le Sommeil
Le score d’hyperactivité (Conners) était important notamment chez les enfants TDAH 73% et dys-TDAH 64%. Il était de 41% dans le groupe dys et 12% dans le groupe contrôle.
La durée et les stades de sommeil n’étaient pas modifiés chez les enfants présentant un trouble du neurodéveloppement mais la qualité de leur sommeil s’est révélée être différente. Ils présentaient une augmentation des éveils intra-nuit et une moindre efficacité du sommeil en comparaison avec les enfants du groupe contrôle. Leurs éveils nocturnes étaient souvent de longue durée (17 à 33 minutes en moyenne) et chez certains enfants on identifiait des éveils de deux à trois heures dans la nuit, en fin ou en début de nuit.
Plus l’éveil intra-nuit était important et plus le sommeil lent profond était retardé.
Plus le sommeil lent profond était retardé, plus le score de somnolence diurne était important.
Le groupe des dys-TDAH comprenait plus de garçons ; la proportion d’enfants et d’adolescents en surpoids et obésité était élevée (environ 30%) ; 42% prenaient un traitement stimulant, mélatonine, anxiolytique et/ou antihistaminique. Les antécédents de prématurité étaient plus fréquents dans ce groupe (13% des dys-TDAH versus 1,3% des dys et 6% des TDAH). On retrouvait aussi une forte proportion de syndromes anxieux et de dépressions dans les trois groupes (22 à 26%).
Les plaintes d’insomnie étaient importantes dans tous les groupes mais plus forte pour les enfants avec TDAH. Les chercheurs notent une petite tendance à l’augmentation de plaintes d’insomnie chez les enfants traités par stimulant mais sans différence sur les variables objectives du sommeil mesurées en polysomnographie. Les enfants anxieux se plaignent davantage d’insomnie et rapportent une latence d’endormissement tendantiellement augmentée.
Amandine Rey, Maître de conférence CRN / Lyon
Les besoins de sommeil évoluent avec l’âge. La sieste est un besoin physiologique des jeunes enfants. Quel que soit l’âge, elle renforce la consolidation des apprentissages.L’éducation au sommeil et le décalage de l’horaire de début des cours réduisent la dette de sommeil des adolescents. L’école devrait tenir compte de ces données et adapter ses programmes et ses horaires.
D’après une communication d’Amandine Rey, maitre de conférences au Centre de Recherche en Neurosciences de l’Université
Claude Bernard à Lyon.
Présentation de travaux menés par Lucie Malevergne et Eve Reynaud.
Rédaction : Sylvie Sargueil
Mots-clés : sommeil ; Éducation Nationale ; Mémé Tonpyj ; sieste ; apprentissages
L‘école : de plus en plus de stratégies pour respecter les besoins de sommeil.
Les besoins en sommeil des élèves évoluent au fil de l’âge. L’école développe de plus en plus de stratégies et de programmes visant à améliorer le respect de ces besoins.
En Cycle 1 (maternelle), l’école doit s’adapter aux besoins de sommeil des jeunes enfants et respecter leurs rythmes.
En Cycle 2 (du CP au CE2), les enfants apprennent à reconnaître des comportements favorables à la santé et acquérir des gestes simples d’hygiène de sommeil. Des parcours éducatifs de santé permettent aux enseignants d’aborder ces thématiques.
En Cycle 3 (CM1-6ème), les élèves sont informés des modifications morphologiques, comportementales et physiologiques de la puberté et doivent être capables de citer des comportements favorables à la santé.
En Cycle 4 (5ème-3ème), les élèves doivent assimiler les responsabilités individuelles et collectives en matière de santé, savoir envisager les facteurs du bien-être physique, social et mental et découvrir l’intérêt et les logiques des politiques de santé publique.
Les opportunités pour parler de sommeil à l’école sont donc nombreuses. Cependant, tous les enseignants ne bénéficient pas d’une formation sur le sujet, et les politiques éducatives et de santé ne mettent pas toujours suffisamment l'accent sur l'importance du sommeil.
Mémé Tonpyj, un programme pédagogique pour les jeunes enfants.
Afin de proposer des ressources clés en main pour les enseignants souhaitant aborder la thématique du sommeil avec leurs élèves, des chercheurs et médecins spécialistes du sommeil lyonnais se sont associés à des enseignants et des dessinateurs pour créer un programme pédagogique visant à expliquer le sommeil aux jeunes enfants (6 à 9ans).
Une petite tortue d’un grand âge, sympathique et très expérimentée, répondant au nom de « Mémé Tonpyj1», guide au travers de dessins animés, bandes dessinées, exercices et enquêtes, enseignants et enfants dans l’apprentissage du sommeil. L’évaluation de ce programme a montré une augmentation de la durée de sommeil des élèves qui en
ont bénéficié ainsi qu’une amélioration de leurs capacités d’attention et de contrôle de soi.
Ce programme d’éducation du sommeil à l’école a été cité dans la feuille de route des Assises de pédiatrie comme un outil pouvant être utilisé par les enseignants.
La sieste renforce les apprentissages mnésiques des jeunes enfants.
Comme le sommeil de nuit, la sieste a un effet bénéfique sur la consolidation des apprentissages.
Une étude2 réalisée en 2013 auprès d’enfants âgés de 3 à 6 ans a proposé un apprentissage visuo-spatial (Memory)
suivi d’un premier test de rappel des cartes mémorisées. Les enfants étaient ensuite répartis de manière aléatoire en deux groupes, l’un devant faire la sieste, l’autre restant éveillé. Après cette période, un second test de rappel des paires de cartes mémorisées était réalisé immédiatement après la sieste ou la période d'éveil, puis le lendemain. Lors du premier test de rappel, les enfants réussissaient la tâche de manière équivalente avec 75% de bonnes réponses dans les deux groupes. Cependant, après une période de sieste ou d’éveil, les chercheurs observaient un maintien des apprentissages dans le groupe sieste et une perte d’informations dans le groupe éveil. La nuit suivante n’a pas permis aux enfants de rattraper les informations perdues.
Il est important de noter que certains enfants faisaient encore des siestes quotidiennes, tandis que d’autres n’en avaient plus besoin. Ainsi, les enfants qui perdaient le plus d’informations étaient ceux qui avaient encore besoin de faire la sieste quotidiennement.
La seconde étude3 s’est intéressée à l’apprentissage d’un nouveau vocabulaire chez des enfants de trois ans dans le cadre de lectures d’histoires. Les enfants étaient répartis en deux groupes : l’un confronté à trois fois la même histoire et l’autre à trois histoires différentes. Chaque histoire contenait de nouveaux mots de vocabulaire pour les enfants. Après un test de rappel immédiat pour s’assurer de la bonne compréhension de la tâche, la moitié des enfants faisait la sieste, tandis que l’autre restait éveillée. Un premier test a été effectué après la période de sieste ou d’éveil, un second vingt-quatre heures plus tard et un dernier sept jours plus tard. Les enfants qui ont été confrontés trois fois au même vocabulaire et qui avaient eu l’occasion de faire la sieste présentaient de meilleures performances que ceux qui n’avaient pas fait de sieste. Les enfants qui avaient entendu trois histoires différentes et fait la sieste performaient aussi bien que ceux qui avaient entendu trois fois la même histoire.
Les chercheurs en déduisent que le sommeil de sieste renforce les apprentissages mnésiques chez les jeunes enfants.
La sieste, un besoin physiologique des jeunes enfants.
Une étude4 menée sur 700 enfants suivis de l’âge de 18 mois à 6 ans a défini différents types de « siesteurs » selon l’âge des enfants.
À l’âge de trois ans, 80% des enfants font la sieste de façon régulière. À 4 ans, ils sont 60 % et à 5 ans 40% des enfants ont encore besoin de faire la sieste bien qu’elle ne soit plus proposée systématiquement à l’école.
Chez les enfants de cinq ans, les siestes sont plus courtes et l’activité des ondes lentes est moins intense, suggérant une plus grande résistance à la pression du sommeil. Une hypothèse avancée est que la maturation cérébrale leur permet de mieux réguler cette pression, réduisant ainsi leur besoin de sommeil diurne.
Depuis 2019 en France, l’instruction est obligatoire dès l’âge de trois ans. Les enseignants et les ATSEM doivent ainsi prendre en charge la sieste de tous les enfants au sein des écoles. Les études de terrain montrent que la mise en place de la sieste est hétérogène et de nombreuses difficultés persistent (une proposition de la sieste uniquement aux enfants de petite section, des horaires trop tardifs rythmés par les contraintes des horaires de repas, une durée de sieste trop longue …).
Un projet de recherche sur ces pratiques de sieste et l’interaction avec les apprentissages a été mis en place, ainsi qu’un programme de promotion au sommeil pour accompagner les équipes pédagogiques sur la thématique de la sieste au sein des écoles.
L’équipe lyonnaise a sollicité les parents de 1300 enfants de 3 à 5 ans pour compléter un questionnaire en ligne afin de caractériser des profils de sieste. Les questions portaient sur la fréquence des siestes à l’école et à la maison, les durées et horaires proposés à la maison, le niveau d’acceptation de la sieste par l’enfant.
Cinq profils ont été ainsi retenus : les enfants non-siesteurs (28%), les siesteurs quotidiens (25%), les siesteurs irréguliers « en transition » (17%) et les siesteurs uniquement à l’école ou à la maison.
Sans surprise, les siesteurs quotidiens sont les plus jeunes enfants et les non-siesteurs les plus âgés. Des analyses sont en cours afin de mieux caractériser les profils intermédiaires dans lesquels les enfants sont en transition vers l’arrêt de la sieste.
Dans le cadre du même projet, des données sur l’interaction entre sieste et sommeil nocturne ont été récoltées auprès de 85 enfants (moyenne d’âge : 3,8 ans) chez qui ont été pratiqués des enregistrements actimétriques (à l’aide d’un dispositif porté au poignet permettant d’enregistrer les rythmes veille-sommeil des enfants). Les résultats montrent une faible répercussion de la durée de la sieste sur l’heure d’endormissement le soir. La présence d’une sieste n’était pas dépendante de la durée du sommeil nocturne la veille, indiquant que la sieste n’est pas un phénomène de compensation mais un besoin physiologique des enfants.
● Dans tous les niveaux de maternelle, des enfants ont besoin de faire la sieste et d’autres non. Un enfant qui n’a plus besoin de faire la sieste n’a pas besoin d’être amené à la couchette. En revanche on lui propose un temps calme.
● La sieste de l’enfant en maternelle dure un cycle de sommeil soit environ 1h30. Il est important qu’elle ne dure pas plus longtemps et qu’elle soit proposée le plus tôt possible après le repas pour éviter de retarder l’endormissement du soir.
● Il est primordial aussi de faire comprendre aux enfants qui font la sieste qu’ils ne « ratent » rien pendant qu’ils dorment et de leur expliquer qu’elle va leur permettre de mieux mobiliser leurs ressources attentionnelles et leurs capacités d’apprentissage l’après-midi.
Des informations pratiques pour les écoles et les failles sont disponibles sur la plaquette sur conseil scientifique de l’éducation nationale.
https://www.reseau-canope.fr/fileadmin/user_upload/ Projets/conseil_scientifique_education_nationale/ dormir_apprendre/MEN_CSEN_Plaquette_sommeil_ WEB_01.pdf
Décalage des cours et éducation au sommeil réduisent la dette de sommeil des adolescents.
Les adolescents sont moins sensibles à la pression de sommeil et sont globalement en retard de phase, en raison de leur autonomie du coucher, de la pression scolaire, du temps d’écran et des réseaux sociaux qui retardent l’heure du coucher. Mais, ils sont soumis à la pression sociétale exercée par l’heure de début des cours. Ils sont donc fréquemment en manque de sommeil avec un retentissement sur l’impulsivité et la prise de risque, les accidents corporels, la consommation de stupéfiants et d’excitants ainsi que sur les performances académiques.
Retarder le début des cours serait susceptible d’atténuer le manque de sommeil et ses effets. Trente-huit études différentes ont été menées qui associaient retard du début des cours et éducation au sommeil. Résultats : l’heure de coucher des adolescents n’était pas plus tardive, leur durée de sommeil était augmentée et la tendance à la somnolence diminuait. Les résultats obtenus sur les performances cognitives étaient discordants, mais les études étaient parfois critiquables (pas toujours de groupe contrôle, peu de mesures objectives du sommeil, pas de randomisation...).
Un internat en France a accepté de travailler avec le laboratoire lyonnais sur le décalage des heures de cours. Quatre-vingtdix-huit adolescents scolarisés en 5e et 4e en internat la semaine ont participé à cette étude. En début d’année, tous les élèves commençaient les cours à huit heures. Après les vacances de la Toussaint, la moitié d’entre eux commençait les cours à neuf heures. Tous ont rempli des questionnaires et bénéficié de mesures actimétriques sur quinze jours en début d’année puis à l’issue de l’étude, au mois de mars.
Les résultats n’ont pas montré de différence sur l’heure d’endormissement, mais un décalage de l’heure de réveil et une durée de sommeil augmentée d’environ vingt minutes dans le groupe qui commençait à neuf heures par rapport au groupe qui continuait de commencer les cours à 8 heures.
De nombreuses pistes existent pour mieux adapter l’école aux besoins de sommeil des élèves. Une véritable dynamique d’accompagnement est déjà en place, portée notamment par le Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale, à travers des
● Les besoins de sommeil évoluent en fonction de l’âge.
L’opportunité de pouvoir se lever plus tard se traduit donc par :
● Une augmentation de la durée de sommeil.
● Un score de somnolence des élèves stable contrairement à celui du groupe commençant à huit heures qui a augmenté.
● Une diminution du score d’anxiété.
Ces résultats encouragent la réflexion sur le décalage des cours pour les adolescents afin de mieux respecter leur rythme.
« Trois semaines pour mieux dormir », un challenge pour adolescents.
Afin de répondre au déficit de sommeil des adolescents, un challenge en ligne « Trois semaines pour mieux dormir » a été élaboré. Il contient huit défis progressifs à effectuer sur une durée de trois semaines
Le but : adopter des comportements favorables au sommeil. Le premier défi consiste à placer un filtre à lumière bleue sur son écran et le dernier à laisser son téléphone hors de la chambre. Ces défis sont accompagnés d’un agenda et d’une courbe à compléter quotidiennement ainsi que d’informations scientifiques : vidéos, quiz, anecdotes et études étonnantes sur le sommeil. La dernière version a été testée sur une trentaine d’élèves volontaires de classe de 3ème.
Ils ont bénéficié d’un enregistrement actigraphique dix jours avant et dix jours après le challenge. Deux groupes se sont distingués, un groupe « actif » d’élèves qui ont joué le jeu, et un groupe « passif » d’élèves qui, en dépit de leur motivation initiale, n’ont pas adhéré au challenge.
L’heure de coucher a été avancée uniquement chez les élèves du groupe actif qui ont augmenté leur durée de sommeil d’environ trente minutes par rapport à l’autre groupe. Les chercheurs ont également noté une diminution du score d’impulsivité, une amélioration du contrôle inhibiteur et une corrélation entre une heure de coucher plus précoce et de meilleures performances cognitives. Un lien entre la durée de sommeil et le nombre de jours de connexion au site et l’implication dans le challenge a aussi été constaté.
actions telles que la formation des inspecteurs en maternelle et la diffusion de brochures destinées aux parents et aux enseignants pour mieux comprendre l’importance de la sieste.
● Certaines actions au sein des écoles telles que favoriser la sieste pour tous les enfants qui en ont besoin en maternelle, dédier du temps à l’éducation au sommeil, et décaler l’horaire de début des cours pour les adolescents montrent des effets positifs sur les rythmes et le développement des enfants et des adolescents.
● L’école peut et doit adopter ces stratégies efficaces d’adaptation aux besoins de sommeil.
Researchers in Lyon are working to identify the links between sleep disorders and learning disabilities and the mechanisms behind them.
The quality of sleep is impaired in dyslexic and ADHD children, with differences depending on the disorder. Overall, their sleep is more fragmented and their nightly wake time is longer than that of children without learning difficulties.
Sleep needs change with age. For young children, naps are a physiological necessity. It helps consolidate learning at any age. Sleep education and staggered school start times reduce the sleep debt of adolescents. Schools should take this into account and adjust their programs and schedules.
¡ Bibliographie
1https://memetonpyj.fr/ / 2Kurdziel et al. Sleep spindles in midday naps enhance learning in preschool children; PNAS 2013 3Williams et Horste en 2014 The Effect of Sleep on Children’s Word Retention and Generalization Front psychol 4Blanchard M. Conduite à tenir devant une plagiocéphalie positionnelle: revue systématisée de la littérature. Bordeaux; 2015. / 4Etude Kurth et al;Development of nap neurophysiology: preliminary insights into sleep regulation in early childhood; J sleep Res 2016
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
La plupart des plagiocéphalies sont en rapport avec une contrainte mécanique. Beaucoup plus rarement elles sont la conséquence d’une synostose prématurée d’une suture.
Leur fréquence a augmenté de façon spectaculaire depuis la recommandation du décubitus dorsal dans la prévention de la mort inattendue du nourrisson. Mais ce n’est pas le seul facteur à incriminer puisque tous les facteurs réduisant la motricité cervicale spontanée, tout particulièrement les torticolis mais aussi certains matériels de puériculture, peuvent générer des déformations crâniennes positionnelles. Il est important d’essayer de les prévenir avec des conseils simples. Les dépister tôt, dès les tous premiers mois de vie, permet d’obtenir de très bons résultats avec des conseils de positionnement et de stimulation de la motricité. Au-delà, la prise en charge nécessite une rééducation appropriée et les résultats peuvent être moins bons. Le port d’orthèse, dont l’intérêt est purement esthétique, doit être réservé à quelques cas particulièrement sévères et très peu nombreux.
Rédaction : Véronique Desvignes
Un grand merci au Dr Andres Coca, neurochirugien, pour sa relecture de l’article.
Mots-clés : plagiocéphalie, brachycéphalie, bradicéphalie, dolichocéphalie, scaphocéphalie, trigonocéphalie, déformation crânienne posturale, tête plate, craniosténose, torticolis, orthèse crânienne.
Le terme plagiocéphalie ou « syndrome de la tête plate » décrit une forme de crâne asymétique. Les déformations crâniennes positionnelles (DCP) ont augmenté de façon spectaculaire. Le décubitus dorsal recommandé en 1992 dans la prévention de la mort inattendue du nourrisson (MIN) a été incriminé. En réalité tous les facteurs réduisant la motricité spontanée, tout particulièrement les torticolis et certains matériels de puériculture, peuvent aussi générer des DCP Contrairement aux croyances qui lui sont attachées, les DCP n’ont pas de retentissement intellectuel et ne peuvent provoquer de troubles neuro-développementaux, ophtalmologiques, oculo-moteurs ou vestibulaires. Seuls des troubles de l’articulé dentaire et des troubles posturaux pourraient être retrouvés dans les formes très sévères, mais ce point est encore questionnable. Le préjudice reste essentiellement esthétique.
L’incidence des plagiocéphalies positionnelles est de 16 % à 6 semaines de vie et de 19,7 % à 4 mois. Elle s’atténue lentement sur une période de 2 ans (3,3 %). Seuls 1% des cas les plus sévères subsisteraient à l’adolescence et ce chiffre diminuerait encore à l’âge adulte¹
Pour autant, il ne faut banaliser ni l’inquiétude des parents ni le retentissement esthétique, parfois lourd de conséquences psychiques. Les parents sont généralement très inquiets et se contenter de leur dire que ce n’est pas grave risque de favoriser le nomadisme médical.
La prise en charge passe d’abord par la prévention, si possible précoce (avant 3 mois) notamment en évitant que l’appui au niveau de la tête de l’enfant ne soit toujours le même. Une fois que la déformation est installée, il faut la traiter (faciliter les mouvements de l’enfant, kinésithérapie…). Le recours aux orthèses crâniennes n’a que des indications rarissimes.
La première consultation pour plagiocéphalie en France reste cependant encore tardive car elle concerne des nourrissons âgés en moyenne de 4 et 6 mois. La sensibilisation des parents, via les professionnels médicaux et paramédicaux est donc très importante.
Principales déformations crâniennes positionnelles.
● La plagiocéphalie
La plagiocéphalie est un aplatissement du crâne au niveau occipital, droit ou gauche de sévérité variable. Elle est la conséquence d’un défaut de rotation de la tête de l’enfant en rapport avec une position préférentielle (torticolis postural) ou un torticolis congénital
● La brachycéphalie ou bradicéphalie
Elle se caractérise par un aplatissement de tout l’arrière du crâne. Elle due à une hypomobilité de la tête constatée lors de temps prolongés sur le dos, de manque de stimulation dans d’autres positions, d’hypotonie globale ou de tendance à l’hyperextension avec attitude en opistothonos.
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
● La dolichocéphalie ou dolicocéphalie
Le crâne est plus long que large² , soit au niveau du front soit dans la région occipitale. La dolichocéphalie est surtout observée chez les prématurés qui ont séjourné longtemps en néonatalogie. Avec des conseils positionnels, elle disparaît le plus souvent spontanément en quelques semaines.
Pourquoi observe-t-on des déformations crâniennes ?
Le crâne du bébé et du nourrisson est malléable. Si la déformation peut parfois être présente à la naissance, son absence ne préjuge pas d’une évolution ultérieure sans plagiocéphalie. La déformation devient généralement évidente vers 2 mois et peut s’aggraver progressivement tout au long de la première année en l’absence de prise en charge adaptée. En revanche il est admis usuellement qu’après 8 mois une DCP ne se développera plus³.
Si le principal facteur pourvoyeur de DCP est l’absence de mobilité complète de la tête, le couchage strict sur le dos pour la prévention de la MIN ne peut être le seul facteur incriminé. De nombreux facteurs de risque ont été identifiés depuis les années 90, certains non modifiables, d’autres sur lesquels il est possible d’agir.
Facteurs de risque non modifiables
● La primiparité : les hypothèses avancées sont un utérus de plus petite taille, un manque d’expérience pour manipuler leur bébé 4
● Le sexe masculin. La plagiocéphalie est plus fréquente chez les garçons (69%) 5
● La gémellité : elle est un facteur de risque majeur de plagiocéphalie car les bébés bougent l’un contre l’autre et créent des engrammes6 sensorimoteurs différents, avec un côté qui peut être dominant par rapport à l’autre.
● Un alitement prolongé (6 semaines et plus) de la mère renforce le risque d’avoir peu fait co-varier l’oreille interne du bébé avec ses propres sensations corporelles. La coordination oculo-vestibulaire de l’enfant à la naissance peut parfois être de moins bonne qualité. Les enfants présentent parfois un réflexe de Moro plus intense et souvent un « verrouillage postural » plus prononcé.
● La présentation céphalique. Dans 80% des cas les bébés préfèrent, dès la naissance, le côté droit au côté gauche et, de fait, on observe plus de méplats droits que gauches. Cette préférence est liée au fait que tête en bas in utero, l’enfant présente plus d’inclinaison gauche et de rotation droite (en rapport avec la torsion utérine normale) qui favorise le contact de la main droite avec la bouche. La sur-stimulation du muscle sterno-cléido-mastoïdien peut favoriser une dominance otolithique gauche avec un engramme asymétrique. Certains nouveau-nés peuvent ainsi avoir une préférence directionnelle dès la naissance et parfois des difficultés à la corriger.
Les bébés africains ont généralement aussi un muscle sterno-cléido-mastoïdien gauche dominant mais le portage dans le dos par la mère et la stimulation de l’oreille interne lors de la marche corrige l’asymétrie.
● Les situations contraignantes : présentations du siège ou transverse, oligoamnios, anomalies utérines, macrosomie fœtale
● La prématurité
● Le travail prolongé, les extractions instrumentales : risque d’hématome des sterno-cleïdo-mastoidiens et trapèzes
● Les hospitalisations prolongées : les nombreux branchements, le peu de temps d’éveil limitent la mobilité spontanée.
Facteurs de risque possiblement modifiables
● Le torticolis. Il associe une inclinaison latérale de la tête et une rotation du côté opposé. Le torticolis peut être :
- Postural avec une attitude préférentielle intermittente, sans limitation à la mobilisation passive controlatérale.
- Musculaire congénital avec une attitude préférentielle permanente et une limitation lors de la mobilisation passive controlatérale.
● L’allaitement artificiel. Neuf français sur 10 sont droitiers. Le biberon est donc dans la plupart des cas donné avec la main droite, l’enfant a toujours le même appui (région occipitopariétale droite) contre le bras gauche. De plus, les périodes de sommeil sont souvent plus longues que lors d’un allaitement au sein. Un allaitement maternel de plus de quatre mois diminue les plagiocéphalies car le bébé tête les 2 seins et modifie ses appuis.
● Le matériel de puériculture. Tous les auteurs s’accordent à dire que l’utilisation des dispositifs qui limitent la motricité spontanée doit être la plus limitée possible789 . C’est le cas des cale-tête, des coussins antitête plate, des cocons, des coussins de positionnement, des matelas à mémoire de forme, des réducteurs de lit, des siègescoque, des hamacs ou de certains transats qui verticalisent trop l’enfant petit. Les arches ou les mobiles peuvent aussi entraîner une fixation visuelle trop prolongée.
● Le manque d’interactions avec l’entourage.
Que faire au cabinet devant une suspicion de déformation crânienne positionnelle ?
Préciser la déformation crânienne
Observer le crâne de l’enfant par le dessus, l’arrière et l’avant pour répondre à ces différentes questions : Y a-t-il :
● Un aplatissement localisé ? Unilatéral ? Bilatéral ?
● Un déplacement de l’oreille homolatérale vers l’avant ?
● Un bombement frontal homolatéral ? Controlatéral ?
● Des pommettes asymétriques avec une joue plus grosse que l’autre ?
● Des yeux asymétriques ?
Source : info@plagiocephalie.com
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
On décrit trois grands types de déformations crâniennes positionnelles : les plagiocéphalies occipitales et fronto-occipitales asymétriques et les brachycéphalies postérieures symétriques (figure 1)10
Le périmètre crânien (PC) et la fontanelle sont normaux.
L’évolution du PC est régulière.
Le diagnostic est clinique et ne nécessite aucun examen complémentaire dans la très grande majorité des cas. Les examens radiologiques sont réservés aux cas où l’examen clinique est équivoque et notamment aux suspicions de craniosténoses.
Rechercher un torticolis
Demander aux parents s’ils ont observé une position préférentielle de la tête d’un côté ou de l’autre et s’il tourne la tête autant à gauche qu’à droite.
Observer la position de la tête de l’enfant couché sur le dos :
● La tête est-elle droite ou inclinée sur un côté ?
● Existe-t-il une position préférentielle (tête tournée du même côté pendant les trois quarts du temps de l’observation) ?
● Existe-il un alignement asymétrique de la tête, du tronc et du bassin ?
L’étude des mouvements généraux est aussi très intéressante mais demande une formation et du temps.
Vérifier la rotation de la tête :
● La rotation passive de la tête apprécie
- la rotation sur 180° (normale : 110°)
- l’inclinaison (30 à 40°).
- la flexion menton-poitrine.
Lorsqu’il existe une limitation de la rotation, de l’inclinaison et/ou de la flexion menton-poitrine, le risque de déformation crânienne est évalué autour de 90%.
● La rotation active doit être recherchée, même si la rotation passive est normale Elle se fait avec l’œil de bœuf. L’axe médian est parfois un peu difficile à franchir chez le petit nourrisson puis la poursuite oculaire s’effectue convenablement. Quand un enfant ne franchit pas ou très difficilement l’axe médian, les contacts main-bouche se font de façon privilégiée d’un côté et l’engramme va fixer cette utilisation unilatérale préférentielle.
Le test de la chaise après l’âge de 2 mois peut aussi aider au diagnostic de torticolis. Le médecin s’assoit sur une chaise ou un tabouret rotatif et tient l’enfant face aux parents. Tandis que les parents tentent d’intéresser l’enfant, il pivote avec l’enfant sur la chaise ou le tabouret d’un quart de tour, d’un côté puis de l’autre, et il observe les mouvements spontanés de la tête de l’enfant. En l’absence de torticolis, le nourrisson tourne la tête et garde un contact visuel avec son parent (HAS 2020).
Rechercher d’éventuelles rétractions musculo-tendineuses cervicales :
Il faut palper les trapèzes et les sterno-cléido-mastoïdiens (tête en rotation complète et inclinée sur le côté) à la recherche d’une olive ou d’une corde fibreuse évocatrices d’un hématome du SCM.
Toujours terminer par un examen général
Examiner les hanches, les pieds et tout élément en faveur d’une possible malposition anténatale. Les maladies luxantes sont plus fréquentes en cas de torticolis.
Évaluer le développement psychomoteur global.
En effet une plagiocéphalie peut être isolée mais elle peut aussi être un signe d’appel d’un trouble tonico-moteur sous-jacent.
Deux manœuvres sont intéressantes :
● La manœuvre du foulard permet d’évaluer le tonus passif des membres supérieurs. Après 2 mois, l’axe médian peut être franchi et la manœuvre est symétrique. Un enfant qui a une plagiocéphalie droite est souvent très souple à droite mais peut présenter une raideur à gauche en dehors de toute paralysie cérébrale (PC). Un enfant qui a une brachycéphalie et les deux bras en chandelier en permanence aura une raideur bilatérale.
● La manœuvre de supination permet le diagnostic différentiel d’avec la PC. L’avant-bras du bébé est maintenu, coude fléchi. Dans la PC la pronation est complète mais il existe une raideur en supination. Ce signe n’est jamais retrouvé dans les plagiocéphalies positionnelles.
La constatation à la naissance d’un aplatissement positionnel et/ou d’un côté préférentiel doit rendre vigilant et des conseils de repositionnement doivent être donnés sans retard aux parents.
Toute constatation d’un torticolis ou d’un alignement asymétrique de la tête, du tronc et du bassin doit nécessiter une prise en charge spécialisée précoce (kinésithérapique voire orthopédique).
Principal diagnostic différentiel : la craniosténose
Les craniosténoses sont provoquées par la fermeture précoce d’une ou de plusieurs sutures. En général présents dès la naissance et s’aggravant rapidement, les différents morphotypes sont souvent assez facilement identifiables. Très souvent, la suture touchée formera une crête.
● La plagiocéphalie synostotique (20 à 25 % des craniosténoses)
Le plus souvent, la fusion prématurée concerne l’une des sutures coronales et se traduit par une asymétrie du front (plat d’un côté et bombé de l’autre), des orbites, et une déviation de la pointe du nez. Plus rarement elle concerne la suture lambdoïde avec plagiocéphalie postérieure.
● La brachycéphalie (10-15% des craniosténoses. 1/20 000) Elle est causée par la fusion des 2 sutures coronales. La tête est plate, courte de l’avant vers l’arrière avec un front haut.
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
● La trigonocéphalie
(5 à 15 % des craniosténoses. 1/15 000 naissances).
En rapport avec une soudure prématurée de la métopique, elle est facilement repérable devant un front pointu ou triangulaire et hypotélorisme.
info@plagiocephalie
● La scaphocéphalie
Causée par la synostose de la suture saggitale, c’est la forme la plus fréquente de craniosténose (50%. 1/5000 naissances).
Le crâne est étroit et allongé, le front bombé et le chignon occipital très fréquent.
info@plagiocephalie
En cas de doute diagnostique, les radiographies du crâne qui retrouvent une hyperdensité ou l’échographie qui met en évidence une hyperéchogénicité et un bombement en regard de la suture sont presque toujours suffisantes pour établir un diagnostic définitif.
La tomodensitométrie est l’examen de référence, mais elle doit être utilisée avec parcimonie, en s’assurant toujours que l’avantage d’un diagnostic vaut l’exposition aux radiations.
L’IRM n’a aucune indication11
Prévention des plagiocéphalies positionnelles
La prévention doit associer à la fois des conseils pour favoriser la motricité libre et spontanée et notamment le décubitus ventral à l’éveil mais aussi des recommandations pour respecter les consignes de prévention de la MIN, tout particulièrement le décubitus dorsal pendant le sommeil.
Les mesures de prévention doivent être expliquées dès la période anténatale, lors du séjour en maternité et durant les premiers mois de vie.
Tous les professionnels intervenant auprès des nourrissons et leurs familles doivent désormais connaître ces mesures de prévention. Annexes 1 et 2.
Avant la naissance
● Les professionnels peuvent être amenés à donner des conseils sur le matériel de puériculture, comme nous l’avons vu plus haut : pas besoin d’acheter de cocon, de coussin anti-plagiocéphalie, de cale-bébé…
● L’allaitement maternel doit être encouragé.
Les premiers mois
Quand l’enfant est éveillé
Le principal facteur de risque des déformations crâniennes positionnelles (DCP) est la limitation de la motricité libre et spontanée du nourrisson par contrainte environnementale externe.
Lors des périodes d’éveil il faut donc réhabiliter le décubitus ventral qui accélère les acquisitions motrices et renforce la musculature cervicale postérieure et dorsale. Les muscles insérés sur l’occipital limitent aussi l’aplatissement par un phénomène de traction.
Quelques exemples :
● Avant 2-3 mois, à chaque change, le bébé peut rester quelques minutes à plat ventre. IL peut être porté dans l’écharpe ou le porte-bébé. Les transats ne doivent pas être verticalisés.
● A partir de 2-3 mois, l’enfant éveillé peut rester sur le ventre dans la journée sur un plan dur (matelas ferme, natte, tapis d’éveil…) pendant quelques minutes et bien sûr sous surveillance. Les positions lors des activités de jeu au sol doivent aussi varier.
● Des jouets disposés autour de lui (à adapter en fonction de l’âge et à varier), vont l’inciter à regarder sur les côtés (sollicitations sensorielles : tactiles, visuelles, auditives, olfactives…) et à découvrir son entourage, son environnement mais aussi son propre corps (mains, pieds…).
● Les arches peuvent être utilisées mais en les changeant de place et pas pendant trop longtemps.
● Progressivement l’enfant va augmenter spontanément son temps de jeu à plat ventre.
● Le siège-coque et la poussette doivent être réservés aux transports.Ils ne sont pas adaptés aux stations allongées ou assises prolongées.
Quand l’enfant dort
L’enfant doit être couché systématiquement sur le dos, bien à plat, sur un matelas ferme sans oreiller, cale-tête ou cale-bébé pour qu’il puisse bouger librement. Pas de cocon ni de coussin d’allaitement.
Pas de couverture ni de couette mais un sur-pyjama ou une gigoteuse.
Pas de tour de lit pour qu’il puisse regarder partout (et ne pas risquer l’enfouissement).
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
Il est intéressant d’encourager la rotation spontanée de la tête d’un côté à l’autre en attirant l’attention de l’enfant avec un mobile qu’on change de place, un lit qu’on bouge dans la pièce en veillant à ce que l’enfant puisse regarder la porte et pas le mur, en alternant les positions dans le lit, etc …
Prise en charge des plagiocéphalies constituées
Un enfant qui présente une asymétrie de position marquée entre 3 et 6 semaines avec plus de 75% du temps passé la tête toujours tournée du même côté et/ou qui a des rotations asymétriques, doit être pris en charge sans attendre.
Au-delà de 6 semaines le risque de verrouillage augmente.
Jusqu’à 9 semaines de simples « soins de développement » destinés à donner à l’enfant des entrées sensorielles, sociales et cognitives pour qu’il tourne la tête et la positionne différemment, suffiront à résoudre le problème.
Passée cette période, l’engramme sensori-moteur a plus de risques d’être installé et la rééducation pour « détricoter » les réseaux neuronaux sera plus longue et parfois incomplète.
Le principal critère de gravité dans les plagiocéphalies et les torticolis est le retard de prise en charge. Il a été montré que lorsque la prise en charge est précoce, on a 98% d’efficacité à deux mois et demi de traitement.
Les conseils de repositionnement et la kinésithérapie sont les interventions à proposer.
Les conseils de repositionnement
Quand l’enfant est éveillé
Outre les conseils déjà cités, il faut attirer l’attention du nourrisson du côté opposé à la plagiocéphalie par la parole, le regard, en lui proposant de regarder des objets de couleur vive, en stimulant son attention par la parole, les bruits ou la musique, en le plaçant pour qu’il voit ce qui se passe dans la pièce (mais ni devant un mur, mais pas devant la télévision…).
Quand l’enfant dort
L’endormissement avec la tête du côté opposé à la plagiocéphalie est favorisé (si possible).
Les coussins anti-tête plate sont à éviter car ils limitent la mobilité de la tête.
La kinésithérapie
La kinésithérapie doit être prescrite systématiquement en cas de défaut de mobilité cervicale, en complément des conseils de repositionnement. Il faut adresser rapidement l’enfant à un physiothérapeute spécialisé en pédiatrie pour donner à l’enfant le maximum de chances de profiter de « la fenêtre thérapeutique ».
Tout l’enjeu des plagiocéphalies consiste à les prévenir, les dépister, prodiguer des conseils précoces de repositionnement aux parents et si nécessaire, débuter une prise en charge dès les premiers mois.
Il faut écouter les parents qui repèrent souvent tôt le problème, favoriser le repositionnement de la tête, la motricité libre
Une ordonnance pour rééducation neuro-motrice d’une asymétrie posturale doit spécifier l’indication médicale, l’organe cible, la localisation et les objectifs des soins.
Par exemple « rééducation pour plagiocéphalie positionnelle. Travail sur la mobilité cervicale (rotation et inclinaison), particulièrement sur le SCM droit ».
Le nombre de séances ne doit pas être précisé. C’est le kinésithérapeute qui le fixera.
Actuellement les données scientifiques ne permettent pas de conclure à une efficacité de l’ostéopathie sur les déformations crâniennes positionnelles. Une approche ostéopathique à orientation pédiatrique peut toutefois être associée à la kinésithérapie en deuxième intention dans le cadre d’une prise en charge pluri-professionnelle. Au-delà de deux séances d’ostéopathie sans résultat sur la mobilité cervicale, il apparaît inutile de poursuivre.
Prise en charge des déformations crâniennes sévères sans craniosténose
L’orthèse crânienne
L’orthèse crânienne, à but purement esthétique, n’est recommandée que pour les déformations très sévères qui n’ont pas été améliorées ou l’ont été insuffisamment par le repositionnement et la kinésithérapie.
Le casque peut être prescrit à partir de 6 mois et jusqu’à 12 mois12
Sa tolérance est souvent très bonne sans trop de souffrance du cuir chevelu.
Il faut qu’il soit porté un minimum de 16 heures par jour et idéalement 23 heures sur 24.
La majorité des études de cohorte (1 prospective, 6 rétrospectives13) ont démontré que le port du casque permettait d’obtenir une correction plus importante en moins de temps que le repositionnement et la kinésithérapie.
Les preuves en faveur du port du casque doivent toutefois être tempérées par le manque de données concernant l’étendue de l’amélioration naturelle de la plagiocéphalie positionnelle et aussi les coûts associés au traitement par casque.
Les tarifs proposés sont aux alentours de 1500-2000 euros (design et suivi compris). Le remboursement reste très controversé.
Des possibilités de prise en charge seraient envisageables si la prescription vient d’un centre de neurochirurgie pédiatrique ou d’un centre de référence ou de compétence dans le réseau national « Craniost ». Voir annexe 3.
spontanée et prescrire, si nécessaire, une kinésithérapie adaptée.
La thérapie par casque est réservée aux déformations plus graves, en particulier chez les nourrissons plus âgés qui n’ont pas vu d’amélioration avec les mesures précédentes.
Plagiocéphalies positionnelles : les prévenir, les reconnaître et les prendre en charge
Most plagiocephalus is related to mechanical stress. Much more rarely, they are the consequence of premature synostosis of a suture.
The frequency of plagiocephaly has increased dramatically since the recommendation of the supine position to prevent unexpected infant death syndrome. But this is not the only factor to blame, as all factors that reduce spontaneous cervical motricity, especially torticollis but also certain childcare equipment, can generate positional cranial deformities. It is important to try and prevent them with some simple advice. Detecting them early, from the very first months of life, can yield very good results with advice on positioning and motor stimulation. Beyond that, treatment requires appropriate rehabilitation, and the results may not be as good. Orthoses, which are purely cosmetic in nature, should be reserved for a very small number of particularly severe cases.
● Les plagiocéphalies positionnelles occipitales, fronto-occipitales et les brachycéphalies sont de plus en plus fréquentes. La recommandation du décubitus dorsal en prévention de la MIN est très loin d’en être la cause principale.
● Le diagnostic est essentiellement clinique et le praticien doit : - préciser le type de plagiocéphalie, - rechercher un torticoli, - chercher un problème neuromoteur, une anomalie des hanches, des pieds...
● Le diagnostic différentiel principal est la craniosténose. La radiographie du crâne ou l’échographie ne doivent être pratiquées que dans les situations équivoques.
● Favoriser le décubitus ventral à l’éveil et la motricité libre spontanée peut suffire à prévenir la plagiocéphalie.
● Il est important de conseiller aux parents d’éviter tout matériel de puériculture susceptible de limiter les mouvements de l’enfant (cale-tête, cale-bébé …).
● Quand il existe une déformation crânienne constituée, les conseils de repositionnement sont importants.
● La kinésithérapie est impérative en cas de limitation de la mobilité cervicale ou de positionnement asymétrique de la tête, du tronc et du bassin.
● Les indications d’orthèses sont très rares. Elles doivent être réservées aux déformations très sévères non améliorées par les mesures précédentes.
¡ Bibliographie
1Renier D, Marchac D, Arnaud E, Catala M. Craniosténoses. Pédiatrie-Mal Infect. 2008;1-19.
2Diamètre bipariétal transverse maximal < 75% du diamètre antéropostérieur maximal.
3Claire Lesbre, épouse Pauline | Thèse d’exercice | Université de Limoges | 2022
4Blanchard M. Conduite à tenir devant une plagiocéphalie positionnelle: revue systématisée de la littérature. Bordeaux; 2015.
5Vlimmeren L, Graaf Y, Boere-Boonekamp M, L’Hoir M, Helders P, Engelbert R. Risk Factors for Deformational Plagiocephaly at Birth and at 7 Weeks of Age: A Prospective Cohort Study. Pediatrics. 1 févr 2007;119(2):e408-18.
6Engramme : trace laissée dans le cerveau par un événement du passé et qui constituerait le support de la mémoire (Larousse)
7Recommandations HAS 2020. Prévention des déformations crâniennes positionnelles et mort inattendue du nourrisson
8Unnithan AKA, De Jesus O. Plagiocephaly. In: StatPearls [Internet]. Treasure Island (FL): StatPearls Publishing; 2022 [cité 7 mai 2022]. Disponible sur: http://www.ncbi.nlm.nih. gov/books/NBK564334/
9Naître et vivre, Briand-Huchet E. La prévention de la MIN et la plagiocéphalie. 2017.
10Fiche Mémo – Prévention des déformations crâniennes positionnelles et mort inattendue du nourrisson. HAS 2020
11Joint Guidelines Committee of the American Association of Neurological Surgeons (AANS) and the Congress of Neurological Surgeons (CNS) and American Academy of Pediatrics (AAP). 2016
12Parfois quelques mois supplémentaires quand la fontanelle antérieure n’est pas encore fermée.
13Joint Guidelines Committee of the American Association of Neurological Surgeons (AANS) and the Congress of Neurological Surgeons (CNS) and American Academy of Pediatrics (AAP). 2016
Pr Olivier Revol, Pédopsychiatre / Lyon
À partir du webinaire organisé par l’association H3P le 27 septembre 2025
Pr Olivier Revol, pédopsychiatre. Lyon Rédaction : Véronique Desvignes
Dès l’Antiquité, les enfants à haut potentiel étaient confiés aux monastères. On les considérait souvent comme des sages d’inspiration divine.
En 1911, en France, Alfred Binet écrivait : « certains écoliers ne profitent pas de l’enseignement pour une raison qui est vraiment paradoxale : ils sont trop intelligents… », « ils ne travaillent que par caprice, n’apprennent leurs leçons qu’au dernier moment… ».
Il précisait aussi : « On leur en veut, on les punit mais ils se font toujours pardonner quand vient le jour des grands concours. C’est pour eux qu’on devrait former des classes de sur-normaux… ».
Entre 1921 et 1959, Lewis Terman en Californie avait suivi une cohorte d’enfants « surdoués ».
En France on commence à parler à la fin des années 70 des « enfants intellectuellement précoces ». Terrassier crée l’ANPES (Association Nationale Pour les Enfants Surdoués) en 1971. En 1981 il publie « Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante ».
Le concept de dyssynchronie fait son apparition avec la dyssynchronie interne qui correspond au décalage entre développements intellectuel, physique et affectif et la dyssynchronie externe qui fait référence au décalage entre le développement et « une approche pédagogique qui ne tient compte que de l’âge réel ».
La demande d’une prise en compte du haut potentiel (HP) pendant la scolarité qui soit équitable sans être élitiste est lancée.
Une définition tout en nuance
Pour aider les enfants, les adolescents et même les adultes HP, il faut d’abord les avoir identifiés.
La définition du HP est le QI > 130.
Cette définition est trop réductrice ; le haut potentiel intellectuel (HPI) désigne une intelligence, un fonctionnement cognitif quantitativement ET qualitativement DIFFERENTS.
Ellen Winner dans son livre, Gifted Chidren. Myths and Realities, en 1997 associait au QI >130 l’insistance à vouloir se débrouiller seul et la rage de vouloir maîtriser.
Les Québécois parlent de douance intellectuelle et précisent que c’est plus que l’intelligence et plus que la performance à un test d’intelligence. La douance tient compte de facteurs non cognitifs comme des facteurs comportementaux, sociaux, émotionnels et psychologiques.
Les profils des enfants testés peuvent se révéler très différents :
- Le Haut QI homogène, supérieur à 130 dans tous les domaines.
- Le Haut QI hétérogène avec une dyssynchronie cognitive (mais pas plus de 15 points de différence entre 2 subtests du QI).
Une dyslexie, une dyspraxie ou une dyscalculie, sont des comorbidités fréquentes chez les enfants HP. Elles peuvent impacter les résultats du bilan neuropsychologique en donnant des chiffres de QI inférieurs à ce qu’ils pourraient être. A contrario, un enfant HP avec un TDAH, peut arriver à bien se concentrer pendant le temps du test car il est en situation duelle et sans distracteur et le déficit attentionnel peut en être sous-estimé.
L’identification du HP ne peut donc pas se limiter à un chiffre. L’interprétation du bilan doit être nuancée et tenir compte de l’histoire de l’enfant, depuis qu’il est tout petit et dans les différents contextes familial, scolaire et extra-scolaire.
Une base neurophysiologique
Des IRM fonctionnelles ont été réalisées. A ces enfants HP il a été demandé différentes tâches et été observé comment leur cerveau traitait les informations.
L’enfant HP traite l’information de façon globale, recrutant de nombreuses régions cérébrales beaucoup plus largement que l’enfant normotypique.1
Il a aussi été constaté que :
● La myéline et donc la substance blanche pourrait être plus épaisse, améliorant la conduction nerveuse, la communication intra et inter-hémisphérique (compréhension rapide, flashs, intuitions…) et majorant la sensibilité sensorielle.
● La matière grise des aires frontales et pariétales peut aussi être augmentée ; le réseau fronto-pariétal est très efficace, expliquant de meilleures capacités d’abstraction, de déductions logiques et/ou de très bonnes compétences linguistiques.
● Un plus grand nombre de synapses augmenterait le réseau neuronal et améliorerait la mémoire et les capacités d’apprentissages.
● Une activation plus importante des aires pariétales et des aires associatives expliquerait la pensée en arborescence.
● L’excitabilité du système limbique et de l’amygdale serait une explication à l’hypersensibilité émotionnelle et l’empathie.
HPI mythe ou réalité ?
● Une durée de sommeil paradoxal plus élevée permettrait de réduire le besoin de sommeil et de consolider les apprentissages.
● La plasticité cérébrale enfin serait plus importante.
En 2018, la fréquence des maux de tête a été étudiée chez les enfants (34 enfants HP). Si la fréquence des céphalées est la même, les migraines épisodiques sont retrouvées chez 43,8% des enfants versus 7,7 à 9% chez les normotypiques.
Non, il n’y a pas plus d’enfants avec HPI qu’avant
La prévalence reste inchangée depuis des années. Elle est de 3% des enfants ce qui représente environ 300 000 enfants en France.
Dans chaque classe se trouvent très probablement 1 à 2 enfants avec HPI. Les statistiques sont de 2 garçons pour une fille mais la proportion de filles est certainement sous-évaluée.
Pourquoi ?
La souffrance est souvent plus visible chez les garçons (agitation, troubles du comportement, opposition, colères, échec scolaire, etc…) amenant les parents à consulter rapidement. Les filles, au contraire, intériorisent leurs problèmes, leurs particularités et leur mal-être. Comme elles s’adaptent plus facilement et sont souvent moins en échec scolaire, l’identification du HP est souvent plus tardive. Un moment clé est le passage au lycée où elles peuvent parfois s’effondrer lors des premières mauvaises notes alors que rien ne le laisser présager. Parfois elles sont diagnostiquées à l’âge adulte quand un de leur enfant est lui-même repéré HP…
Des enfants et des adolescents avec des singularités2
Il est fréquent de constater déjà chez le nourrisson un regard pénétrant, scrutateur, un très bon tonus voire une avance motrice. Le pointage est vite utilisé et reflète l’intérêt de l’enfant pour son entourage et son environnement.
Le langage peut être vite acquis mais pas toujours. Ce qui est souvent frappant est que le vocabulaire est d’emblée élaboré et la syntaxe correcte, même quand l’enfant se met à parler un peu tardivement.
Beaucoup d’enfants HP commencent leurs phrases par un « En fait… » qui traduit leur temps de réflexion avant de répondre à la question…
Les apprentissages comme la propreté sont rapidement intégrés.
Généralement ils ont des sens très affutés et une hypersensibilité.
Le revers de la médaille est qu’ils sont souvent exigeants voire opposants et/ou petits dormeurs…
Les enfants précoces plus âgés ont également des comportements souvent différents des normotypiques avec un peu plus de troubles somatiques, d’anxiété, de difficultés sociales, d’attention mais les différences ne sont pas réellement significatives. L‘agressivité est l’élément discriminant le plus significatif retrouvé dans l’enquête.3
Les enfants HP, des philocognitifs
Pour les enfants HP, penser est un besoin voire une compulsion.
Le fonctionnement cognitif de l’enfant HP associe généralement une hyper-spéculation, une hyper-acuité, une
hyper-latence et une hypersensibilité émotionnelle. L’enfant HP est souvent tout « TROP » mais ne le fait pas exprès…
L’hyper-spéculation, terme proposé par Fanny Nusbaum, c’est se poser mille questions, vouloir aller au bout des raisonnements, extrapoler, tout remettre en cause. Les enfants HP ne se satisfont pas d’un « c’est comme ça » ; ils vont toujours chercher une explication cohérente aux faits et aux actions, même si elle semble évidente à tous.
Ils sont en quête de sens.
S’ils ne le trouvent pas, ils peuvent être incapables de s’intéresser et/ou de mémoriser ce qu’on leur demande d’apprendre.
L’ennui est ainsi une des grandes difficultés rencontrées par les enfants HP.
Un exemple : retenir par cœur les tables de multiplication alors qu’ils peuvent retrouver facilement les résultats ne les motive souvent pas.
Tout l’enjeu va être pour les enseignants de leur faire comprendre l’intérêt de certains apprentissages du système scolaire…
De même ils sont souvent très attachés à la précision des mots et des termes employés. Par exemple un enfant à qui la maîtresse avait dit comme au reste de la classe « Prenez un crayon bleu », était resté sans rien faire parce qu’elle n’avait pas précisé qu’il s’agissait d’un stylo et pas d’un crayon de couleur ou d’un stylo-plume.
L’hyper-acuité est la capacité cognitive qui permet de percevoir, d’analyser et d’enregistrer de très nombreuses informations auxquelles les autres ne prêtent pas attention.
Elle est rendue possible par leur hypersensorialité qui leur permet de voir plus loin, comme à travers un télescope ou plus près comme avec un microscope. Elle leur permet des flashs, des intuitions voire des alertes par rapport à des dangers potentiels. Ce sont en quelque sorte des « sentinelles », qui ne sont pas toujours crues.
L’hyper-latence fait référence à la difficulté de se concentrer sur une tâche sans se laisser distraire. Elle peut exister en dehors de tout trouble attentionnel.
Elle aussi est en relation avec l’hypersensorialité (bruits, odeurs, vibrations…) qui bombarde l’enfant d’informations et l’empêche de se concentrer.
C’est la pensée arborescente qui peut être aussi invalidante que performante, surtout quand l’enfant s’ennuie.
En revanche, quand il est passionné, il est tout à fait capable de se concentrer longtemps (sauf en cas de TDAH associé…).
L’hypersensibilité émotionnelle font de ces enfants et adolescents des jeunes généralement très empathiques, avec un sens aigu de la justice.
« L’enfant HP pense d’abord avec son cœur » dit Olivier Revol.
Gustave Flaubert écrivait « je suis doué d’une sensibilité absurde. Ce qui érafle les autres me déchire ».
Des philocognitifs différents : les complexes et les laminaires
Parmi les enfants avec HP, on différencie les philocognitifs complexes et les laminaires.
On pourrait comparer le philocognitif complexe à un torrent turbulent et le laminaire à un grand fleuve tranquille.
18
HPI mythe ou réalité ?
Le philocognitif complexe est généralement imprévisible et tourmenté. Il est dynamique et souvent difficile à suivre. Sa pensée est fulgurante. Il est créatif et prend souvent des prises de position disruptives pouvant rendre son comportement rapidement excessif, avec des débordements émotionnels déconcertants et mal supportés par l’entourage.
A contrario le philocognitif laminaire est beaucoup plus prévisible, objectif, mesuré et cohérent. Ses compétences sont larges et variées et son adaptation sociale excellente. Quelles sont les conséquences du HP ?
L’enfant, l’adolescent et même l’adulte se sentent souvent très différents.
Ce décalage peut amener enfants et adolescents HP à s’isoler. D’autres peuvent avoir des débordements émotionnels avec des réactions excessives. Il peut leur arriver aussi d’être insolents ou opposants dans le cadre familial, scolaire ou social. Ils en sont ensuite malheureux car ils se rendent compte de « l’anormalité » de leurs réactions et souffrent du fait de ne pas pouvoir se contrôler.
Les enfants HP peuvent avoir de bons résultats scolaires mais ce n’est pas le cas pour tous, surtout quand il existe des troubles DYS associés. Par contre, compte-tenu de leur bon niveau cognitif, ils prennent vite conscience de leurs difficultés et de leurs différences. Même s’ils se savent capables de réaliser des choses compliquées, il se rendent compte qu’ils échouent à des exercices que les autres font sans problème. Et leurs passions n’intéressent souvent pas grand monde. Tout peut concourir à mettre à mal leur estime de soi et les faire se « sentir nuls ».
L’intelligence peut aussi fabriquer beaucoup d’anxiété. D’authentiques souffrances peuvent être observées comme dans le syndrome de l’imposteur, de Schopenhauer et de Damoclès. On décrit aussi l’«intranquillité ».
Le syndrome de l’imposteur se manifeste par un important sentiment de scepticisme permanent à l’égard de sa propre valeur. « Si je réussis, ce n’est pas grâce à mes qualités » mais parce que le hasard l’a voulu », « j’ai eu beaucoup de chance », « j’ai rencontré les bonnes personnes », « le temps a joué en ma faveur ». Plus grave : « ils me croient plus doué(e) que je ne suis. Ils ne se sont pas encore rendu compte que je suis « une fraude » ».
Les filles notamment qui ont compensé pendant longtemps leurs difficultés, qui ont jusque-là toujours eu de bons résultats, peuvent connaître aux premières mauvaises notes un effondrement anxieux voire un refus anxieux scolaire. La période fragile est souvent l’arrivée au lycée.
Le syndrome de Schopenhauer concerne davantage les adolescents et adultes très curieux, très empathiques qui se mettent à avoir des questionnements existentiels et des singularités qui peuvent venir compliquer leur existence ou les faire tomber dans le spleen ou le Taedium vitae (le dégoût de la vie) combattu par Sénèque.
Quand « les peurs semblent interdire l’insouciance », on parle du syndrome de Damoclès avec la chérophobie, cette curieuse terreur de goûter au bonheur par crainte de se le voir retirer ou cette impression de devoir se complaire dans l’inquiétude. Le jeune HP devient alors lui-même le forgeron de ses propres chaînes.
L’intranquillité enfin est observée chez certains jeunes HP. « Je n’ai jamais appris à exister » écrivait Fernando Pessoa dans le livre de l’Intranquillité en 1982. Une menace virtuelle et irrationnelle risque à tout moment de leur tomber sur la tête. Souvent deux pensées contradictoires s’affrontent avec des peurs irrationnelles et envahissantes que le jeune essaie de contrôler avec des rituels absurdes et gênants voire des TOC qui peuvent l’épuiser encore un peu plus.
Haut potentiel et Troubles du spectre autistique : des points communs, des différences et parfois des associations …
HP et TSA ont des particularités communes comme l’hypersensorialité, l’hyperémotivité, les passions et les intérêts restreints, le décalage et l’isolement d’avec les autres.
La grande différence entre HP et certains comportements autistiques est que le jeune HP sait qu’il a parfois des comportements particuliers. Il est capable de les expliquer, de les justifier même s’il ne réussit pas toujours à s’arrêter à temps. L’enfant avec TSA ne sait souvent pas pourquoi il a ses « comportements-problèmes » qui le dépassent et le font souffrir.
Quels conseils donner aux enfants et adolescents HP ?
Se comparer aux autres, c’est prendre le risque de se dévaluer. Se comparer à soi-même, c’est se donner le pouvoir de progresser… Ne regarde pas les autres.
« Sois une bonne personne mais ne perds pas ton temps à le prouver… Ne t’épuise pas inutilement. ».
¡ Bibliographie
1Hemispheric Differences in White Matter Microstructure between Two Profiles of Children with High Intelligence Quotient vs. Controls: A Tract-Based Spatial Statistics
Study. Nusbaum F et al. Front. Neurosci., 03 April 2017
Sec. Child and Adolescent Psychiatry
Volume 11 - 2017 | https://doi.org/10.3389/fnins.2017.00173
Study. Nusbaum F et al. Front. Neurosci., 03 April 2017 - Sec. Child and Adolescent Psychiatry - Volume 11 - 2017 | https://doi.org/10.3389/fnins.2017.00173
2VAIVRE-DOURET L et col. Étude des caractéristiques psychologiques et psychobiologiques des enfants à haut potentiel. Enfance n◦ 1/2010 | pp. 27-44
3Comparaison des comportements des enfants précoces d’après le questionnaire d’Achenbach diagramme. Revol O. Louis 2002
HPI mythe ou réalité ?
et l'école.
Laurence Véfour, Professeure des écoles
Les enfants qui rencontrent des problèmes à l’école ne sont pas tous des enfants HP…Toutefois repérer les enfants à haut potentiel est important et la relation qui se créée entre l’élève et l’enseignant est tout à fait fondamentale tant elle peut impacter sa scolarité, son estime de soi et son futur.
Toutefois identifier le haut potentiel d’un élève n’est pas toujours facile, surtout en cas de co-morbidité (TDAH, troubles dys).
Tout enfant a besoin d’un cadre sécure, mais ce cadre peut et doit être assoupli pour qu’il puisse trouver sa place à l’école et le plaisir d’y aller. Différents outils institutionnels (PPRE, PAP) et pédagogiques existent pour aider l’enfant HP mais beaucoup de solutions sont aussi individuelles et personnelles tant à l’enfant qu’à l’enseignant.
Des idées reçues qui résistent
Du côté enseignant :
« Si un enfant est HP, il devrait avoir des résultats scolaires excellents, des méthodes de travail solides, une maturité émotionnelle et un comportement qui ne soit pas perturbateur »
► Faux, nous avons vu pourquoi.
« L’enfant n’est pas HP. En réalité il est « trop nourri » par sa famille ».
► Si c’est parfois vrai, ce n’est pas forcément toujours le cas.
Du côté des familles :
« Si on va en parler aux enseignant.es, ils vont penser qu’on leur dit que notre enfant est plus intelligent que les autres » et ils vont croire « qu’on veut le pousser ».
« Il s’ennuie. Il nous le dit souvent. Comment le dire à la maîtresse sans la vexer ? ».
« Comment faire pour lui parler de notre enfant pour qu’elle le comprenne mieux sans qu’elle ait l’impression que nous remettons en question son professionnalisme ?
Savoir repérer et identifier un haut potentiel
Le HP n’est pas un diagnostic ni un trouble neurodéveloppemental. C’est un fonctionnement cognitif et émotionnel particulier. Il est préférable de parler d’identification.
Ce sont les différentes formations qui vont permettre aux enseignants de suspecter l’existence d’un éventuel HP. L’idéal serait que tous les enseignants soient formés en profondeur au HP dans leur formation initiale mais dans la réalité, la plupart des enseignants sensibilisés sont ceux qui sont euxmêmes concernés par le HP et qui se forment souvent sur leur temps personnel.
Pour autant l’enseignant(e) n’est pas habilité(e) à « poser un diagnostic ». C’est pourtant l’un des premiers professionnels susceptibles de se questionner puisqu’il observe au quotidien la manière de travailler de l’élève, sa capacité à aller au-delà des attendus, à vivre les émotions engendrées par les événements de la journée…
Pour aider à un meilleur repérage, il existe maintenant une grille d’aide institutionnelle dans le Vademecum 2019 (ressources et aménagements pédagogiques pour favoriser la scolarisation des élèves HP dans les premier et second degrés (Eduscol)).
Dans tous les cas la communication avec la famille pour une orientation vers des professionnels spécialisés (psychologues et neuropsychologues scolaires ou libéraux) est indispensable et essentielle. Les résultats du bilan doivent être interprétés par un médecin qui lui, identifiera ou non le HP.
Les principaux écueils rencontrés par les enseignants
Croire que parce que l’élève a du potentiel, il ou elle n’a pas besoin d’aide. Faux pour toutes les raisons exposées plus haut et d’autant plus faux quand l’enfant a sauté une ou plusieurs classes car l’élève HP a beaucoup de points forts mais aussi des fragilités cognitives.
Penser qu’il est insolent et remet en question l’autorité de l’adulte. C’est aussi très souvent faux : il cherche en réalité du sens aux affirmations, il est dans la justesse du mot ; il veut vraiment comprendre, proposer d’autres moyens pour trouver les mêmes solutions… il est alors important de lui donner une seconde chance dans sa manière de s’exprimer « j’ai entendu ce que tu m’as dit mais tu ne peux pas le dire de cette manière. Reformule avec d’autres mots.».
Être persuadé qu'il est fainéant parce qu’il refuse de faire des exercices ou qu’il donne l’impression de les bâcler parce qu’il n’a pas suivi de méthodologie académique doit faire s’interroger sur le pourquoi. Consignes insuffisamment précises ? Sait-il comment travailler ? A-t-il acquis une méthodologie de travail, lui/elle qui n’a jamais appris à apprendre ? Ennui ? Notions rabâchées de nombreuses fois pour le reste de la classe, etc…
Quelles clefs proposer ?
La relation qui se créée entre l’élève, la maîtresse ou le professeur est tout à fait fondamentale et peut impacter sa scolarité et son estime de soi.
Pour l’aider, il est important de lui donner un cadre plus souple et bannir le « C’est comme ça et pas autrement, un point c’est tout ». Écouter, s’attacher sur le fond du discours de l’élève sans se sentir remis en question, « rectifié » par un enfant, communiquer en dépassant parfois le statut
HPI mythe ou réalité ?
élève-professeur. L’élève HP est dans une relation d’humain à humain dans laquelle les exigences de l’un sont valables pour l’autre.
Avoir des pratiques de classes variées et inventives pour limiter la répétition et l’ennui est nécessaire mais peut être parfois compliqué à mettre en pratique... Cela oblige l’enseignant à faire évoluer ses pratiques mais les contraintes sont parfois modestes : commencer par la conclusion pour remonter aux hypothèses, accepter un exposé pour découvrir un thème hors programme scolaire, apprendre une leçon en créant une chanson, créer une leçon sous la forme d’une carte mentale…
Donner non pas du travail supplémentaire, mais plus complexe est une façon de mettre l’élève HP en situation réelle d’apprentissage, de réflexion, d’exploration de son potentiel et surtout de l’intéresser quand la répétition d’exercices devient trop lourde à supporter.
Pour autant l’enfant HP a aussi besoin de limites pour maîtriser son environnement et ainsi en respecter les règles ; le haut-potentiel n’est pas l’excuse à tout.
Mais la punition n’est souvent pas la solution. La réparation est certainement beaucoup plus pédagogique et intelligente qu’une copie bête de plusieurs lignes.
Tout enfant a besoin d’un cadre sécure mais ce cadre peut et doit certainement parfois être assoupli pour que l’enfant puisse trouver sa place à l’école avec l’aide d’un adulte ou /et d’un camarade référent. La seconde chance est essentielle.
● Un enfant HP arrive souvent à un résultat juste mais de façon intuitive, sans être capable d’expliquer quelle procédure il a mise en place. Lui expliquer l’intérêt pour lui d’appliquer une (ou plusieurs) méthodes est très important pour la suite de sa scolarité. Lui apprendre, dès l’école élémentaire, à expliciter, à structurer sa pensée est essentielle pour qu’il puisse justifier ses résultats et ainsi répondre aux attendus des professeurs notamment du secondaire.
● Lutter contre l’ennui ne consiste pas simplement à lui donner plus de travail mais un travail parfois différent ou plus difficile. Lutter contre l’ennui, c’est mettre l’élève HP en situation d’exploration de son potentiel c’est-à-dire développer une réflexion à la hauteur de ses capacités cognitives. Cela passe par des aménagements proposés par l’enseignant.
● Les réactions des enfants HP sont parfois surprenantes car l’enfant peut avoir besoin de consignes hyper-précises et explicites pour effectuer une tâche, faute de quoi il peut préférer ne pas faire l’activité plutôt que de faire « faux » alors qu’il sait la réaliser.
● Le rôle de l’enseignant est essentiel dans la mise en relation de l’enfant isolé. L’âge n’a que peu de sens dans le champ du HP. L’important est de partager des intérêts intellectuels communs, peu importe s’il est plus âgé.
Des outils institutionnels à la disposition des enseignants
Il peut s’agir notamment du :
● PPRE (Programme Personnalisé de Réussite Éducative) proposé par l’enseignant et validé par les parents pour des pratiques pédagogiques diversifiées, différenciées, et pour la mise en place d’aménagements qui répondent aux besoins de l’élève
● PAP (Plan d’Accompagnement Personnalisé) proposé par l’équipe pédagogique ou la famille mais validé uniquement par un médecin. Il concerne les élèves présentant un ou plusieurs troubles des apprentissage (comorbidité HP et trouble dys) et propose des aménagements répondant aux besoins de l’élèves
Pour des aménagements pédagogiques ponctuels, d’autres dispositifs existent :
● La différenciation pédagogique. Cette réflexion dépasse le simple cadre du Haut Potentiel
● La classe multi-niveaux : CP/CE1, CE1/CE2, etc…
● Le décloisonnement : l’élève assiste à des cours d’une classe supérieure, en mathématiques par exemple ou dans une autre matière. Il s’agit là d’une très bonne solution mais souvent difficile à mettre en pratique pour des raisons de planification.
● Des classes et des établissements spécialisés , généralement privés, peuvent convenir aux besoins de certains élèves, mais pas forcément à tous.
● Le passage anticipé peut également être une des solutions proposées. En primaire, la décision est prise par le conseil des maîtres souvent après une rencontre avec le/la psychologue de l’éducation nationale. Pour décider le passage anticipé, il faut que ce soit le souhait de l’enfant, que les compétences scolaires de la classe « sautée » soient acquises mais aussi que cela ne « chamboule » pas trop ses relations amicales, le tout dans un contexte de communication positive entre l’école et la famille. Parfois l’enfant refuse pour rester avec ses copains ou ses copines. Il est toujours possible de reproposer un passage anticipé les années suivantes si les problèmes perdurent. Le saut de classe est alors mieux accepté voire souhaité par l’enfant.
Autre élément indispensable à une bonne adaptation de l’enfant dans sa nouvelle classe : l’enseignant qui va l’accueillir doit être préparé par l’équipe enseignante qui le connaît.
HPI mythe ou réalité ?
Exemples de différenciations, de souplesse, de changements de posture que peut adopter l’enseignant
- H. fatiguée de poser des additions en colonnes même avec de grands nombres a retrouvé la motivation en posant les additions avec des chiffres romains.
► Si nous, en tant qu’enseignant, nous ne semblons plus avoir d’idées, eux en ont, faisons-leur confiance.
- L. a fini par mémoriser les tables de multiplication associées aux imageries mentales c’est-à-dire associer les multiplications qui lui posaient problème à des histoires.
► L’apprentissage par cœur n’a que peu de sens pour lui.
- G. a pris goût à l’écriture en recréant un alphabet de lettres majuscules dans une police d’écriture inédite et en l’utilisant dans ses cahiers alors même que ce style d’écriture n’est pas « officiel ».
► Laisser leur créativité s’exprimer.
- N., élève de CP, dans une classe double-niveaux CP/CE1, avance au rythme de l’avancée de ses compétences : lecture, étude de la langue, maths avec les CE1, graphisme, grande fragilité, avec les CP tout en restant dans la même classe.
► Trouver l’environnement idéal.
- M. orateur-né, grand bavard, a une image d’impoli car il est spécialiste de la coupe de parole tellement il a de choses à dire.
► Il a trouvé sa place en tant que tuteur.
- S., frustré par le manque de réactivité de ses camarades et fatigué par les innombrables répétitions, réalise des activités plus complexes d’un niveau de classe supérieur.
► Il explore ses compétences et retrouve de l’intérêt à la classe.
- T. frustré de ne pas toujours être interrogé par l’enseignant a retrouvé une sérénité en écrivant ses réponses sur son ardoise. L’enseignant, qui avait alors le temps d’écouter les autres élèves, lui avait fait la promesse de toujours regarder ce qu’il avait écrit sur son ardoise. ► Se sentir écouté et savoir que l’on a sa place dans la classe.
Pour tous, échanger les rôles : lorsque l’élève devenu enseignant est capable d’expliquer à l’enseignant devenu élève faillible pourquoi il se trompe, il se place réellement en situation d’apprentissage et de consolidation de ses connaissances. Et en plus, c’est une situation très drôle lorsque l’enseignant est un peu comédien !
Enfin quand apprendre n’est pas juste savoir, il est important de donner à l’élève HP des outils pour mémoriser à long terme.
Les aménagements pour les HP sont toujours favorables à tous les autres élèves qui s’en nourrissent tout autant à la hauteur de leurs compétences.
Not all children who are struggling in school are HP. However, identifying high potential children is important and the relationship that develops between the student and the teacher is fundamental as it can have a major impact on their schooling, self-esteem and future. However, it is not always easy to identify a student's high potential, especially in cases of co-morbidity (ADHD, Dys Disorders). Every child needs a secure framework, but this framework can and should sometimes be relaxed so that the child can find his place in school and enjoy going there. Various institutional (PPRE, PAP) and pedagogical tools exist to help HP children, but many solutions are also individual and personal for both child and teacher.
Pas à pas urticaire chronique
Ludovic Martin, Dermatopédiatre / CHU Angers
L’urticaire chronique n’est pas une affection allergique et se présente comme une entité distincte de l’urticaire aiguë. Elle peut se manifester par des lésions urticariennes quotidiennes et/ou la survenue d’angioœdèmes sporadiques, associés ou non aux lésions urticariennes. Elle n’entraîne pas d’œdème laryngé asphyxique.
Parfois invalidante par son retentissement sur la vie quotidienne, l’urticaire chronique doit être traitée au long cours par anti-H1 de deuxième génération et en cas de résistance, par omalizumab1 pour prévenir la survenue des crises.
D’après une communication du docteur Ludovic Martin dermato-pédiatre au CHU d’Angers
Congrès de la SFP
Nantes. 15-17 mai 2024
Rédaction : Sylvie Sargueil
Mots clefs : urticaire chronique, angioœdème, CAPS, oèdeme aigu hémorragique, mastocytose, angioœdèmebradykinique héréditaire,anti-histaminique, omalizumab
Contrairement à l’urticaire aiguë qui dure moins de 6 semaines et qui est fréquente, l’urticaire chronique (UC) dure plus de 6 semaines et est rare chez l’enfant. Il faut bien distinguer ces deux pathologies qui n’ont rien à voir en termes de handicap et d’évolution.
Une maladie inflammatoire mais pas une maladie allergique
Il est important de retenir que l’urticaire chronique n’est pas une maladie allergique.
C’est une maladie inflammatoire avec hyperactivité non spécifique des mastocytes2. Elle survient dans un contexte d’auto-immunité ou de dys-immunité, comme l’atopie notamment.
La prévalence chez l’enfant est mal connue en raison du peu d’études consacrées à cette pathologie. La littérature annonce des prévalences de 0,1 à 0,3 % chez l’enfant mais en regard de son caractère non exceptionnel en pratique clinique, ces chiffres semblent sous-estimés.
A l’instar de nombre d’autres maladies dermatologiques dysimmunitaires, l’urticaire chronique est en augmentation.
Le diagnostic
La démarche diagnostique en dermatologie se fonde sur l’analyse fine des lésions élémentaires, leur topographie et leur chronologie. Le diagnostic est fait à l’examen clinique et par l’interrogatoire.
On parle d’urticaire chronique devant des lésions d’urticaire et/ ou d’angioœdème, présentes pendant plus de 6 semaines de façon permanente ou récidivante.
Les lésions urticariennes sont généralement quotidiennes, sauf parfois au début de la maladie. Les lésions d’angioœdème sont plutôt sporadiques.
● Les lésions urticariennes sont des papules érythémateuses et œdémateuses (en relief et souples à la palpation) «ortiées», prurigineuses et fugaces. Le plus
souvent elles disparaissent en quelques dizaines de minutes à quelques heures et toujours dans les 24 heures suivant leur apparition. Il peut exister une ou plusieurs poussées par jour. Excepté chez le tout petit enfant chez lequel peut persister un aspect purpurique, il n’existe aucune lésion séquellaire.
● L’angioœdème atteint le plus souvent les paupières et les lèvres. Lorsque les manifestations œdémateuses concernent le visage et/ou la langue, elles peuvent être impressionnantes. Elles peuvent persister jusqu’à 72 heures puis disparaissent avec une restitution ad integrum.
Urticaire superficielle
L’angioœdème laryngé n’existe pas dans l’urticaire chronique. Il n’y a donc pas de risque asphyxique. La seule exception concerne l’urticaire au froid où quelques cas rarissimes d’angioœdèmes asphyxiques ont été décrits.
Les lésions urticariennes et l’angioœdème peuvent être isolées ou associées. Le diagnostic est affirmé après six semaines d’évolution. Durant la période d’incertitude diagnostique, il est possible d’hésiter entre une urticaire aiguë qui perdure (en général une urticaire duremoins d’une semaine) ou une urticaire chronique débutante.
Que l’urticaire chronique se manifeste par des lésions superficielles avec ou sans angioœdème ou par unangioœdème isolé, la démarche diagnostique et la prise en charge thérapeutique sont les mêmes.
Pas à pas urticaire chronique
Les principaux diagnostics différentiels
Une maladie auto-inflammatoire
L’urticaire chronique avant l’âge de deux ans est exceptionnelle. En cas d’urticaire sévère chez un jeune nourrisson, il faut évoquer une maladie auto-inflammatoire entrant dans le cadre d’un syndrome CAPS3 et rechercher des cas familiaux, des poussées urticariennes fébriles, des arthralgies, une surdité neurosensorielle…4
L’œdème aigu hémorragique (OAH)
Il touche les enfants jeunes (4 mois-3 ans) et se traduit par des lésions urticariennes sévères, ecchymotiques, souvent œdémateuses en particulier sur le visage, les mains et les pieds. Malgré sa présentation souvent impressionnante, l’OAH est de très bon pronostic.
Les mastocytoses
Les vascularites urticariennes
Rares et plus tardives (grand enfant, adolescent), le tableau est celui d’un purpura rhumatoïde avec lésions urticariennes d’évolution ecchymotique avec les signes d’accompagnement des vascularites leucocytoclasiques : arthralgies, douleurs abdominales.
L’angioœdème bradykinique héréditaire
Auparavant appelé œdème angioneurotique, il peut être cliniquement très similaire à l’angioedème histaminique d’une urticaire chronique.
Très rare, il provoque des gonflements œdémateux répétés de la peau (visage, extrémités), des muqueuses (laryngée avec gêne respiratoire qui en fait la gravité) et/ou douleurs abdominales. Il n’y a pas d’urticaire associée.
L’œdème bradykinique est causé par un déficit fonctionnel en inhibiteur de la fraction C1 du complément (C1inh). Il n’est pas médié par l’histamine mais par la bradykinine. Son mécanisme, sa prise en charge et son pronostic sont totalement différents de ceux de l’urticaire chronique. L’adrénaline, les anti-histaminiques et la corticothérapie sont inefficaces.5
Les urticaires chroniques spontanées et inductibles
A leur début, elles peuvent faire évoquer un diagnostic d’urticaire, notamment la mastocytose maculopapuleuse autrefois appelée urticaire pigmentaire. Elle touche les nourrissons ou les enfants. Les lésions initiales peuvent ressembler à des papules urticariennes qui persistent sous forme de taches pigmentées brunes. Le signe de Darier est positif (urtication à la friction). Une forte poussée de mastocytose peut entraîner la présence de lésions bulleuses qui écartent formellement l’urticaire chronique. L’évolution est généralement favorable après plusieurs années.
● L’urticaire chronique spontanée
L’UC spontanée est de très loin la plus fréquente des urticaires chroniques.
Elle est parfois associée à un dermographisme (réaction cutanée urticarienne immédiate au frottement, inhabituelle par son intensité).
10% des urticaires chroniques spontanées se présentent sous la forme d’un angioœdème isolé.
L’urticaire chronique spontanée survient typiquement chez un patient atopique ou dans le cadre d’une pathologie autoimmune isolée, notamment une thyroïdite.
Mais certains évènements courants dans la vie de l’enfant tels que des épisodes infectieux aigus, des vaccins ou encore des facteurs de stress (rentrée scolaire…) peuvent aussi déclencher l’UC ou entretenir les lésions.
Quelques médicaments sont des facteurs pharmacologiques aggravants de l’urticaire (AINS, morphiniques…).
Pas à pas urticaire chronique
On ne sait actuellement pas prédire la durée d’une urticaire chronique.
Elle est au minimum de quelques mois mais le plus souvent de plusieurs années avec 50% de résolution au bout de 5 ans.
Lorsqu’elle débute après l’âge de dix ans, elle se manifeste souvent d’emblée par une forme plus sévère : plusieurs poussées quotidiennes, lésions de grande taille très prurigineuses et angioœdèmes récidivants.
● Les urticaires chroniques inductibles
Autrefois appelés urticaires physiques, sont liées à un facteur physique déclenchant précis et reproductible. Il s’agit de maladies différentes les unes des autres en fonction des facteurs déclenchants. Les facteurs déclenchants les plus communs sont :
- La pression cutanée.
Le dermographisme survient le plus souvent rapidement après la pression et il est facile de le reproduire en consultation. Cependant, certaines urticaires à la pression surviennent de manière retardée de quelques dizaines de minutes à quelques heures après la pression. Cela explique, par exemple, les lésions urticariennes observées sur les épaules des enfants en rapport avec le port du cartable.
- L’effort. Il s’agit d’une urticaire cholinergique, rare chez l’enfant.
- L’exposition solaire : rougeur et prurit débutent pendant l’exposition ou dans la demi-heure qui suit, puis apparaissent les lésions urticariennes dans les zones exposées qui vont disparaître en quelques heures. Ces enfants ont souvent tendance à fuir l’exposition au soleil, ce qui est inhabituel à cet âge…
- Le contact avec l’eau. L’urticaire aquagénique est déclenchée par le contact avec l’eau froide, tiède ou chaude, salée ou non. L’intensité de la réaction est variable mais certains enfants peuvent se mètrent en danger lorsqu’ils se baignent (malaise par réaction anaphylactique).
- Le froid. L’urticaire au froid peut s’observer lors d’une exposition au froid extérieur mais parfois des lésions urticariennes labiales, orales et éventuellement de la sphère ORL peuvent aussi être déclenchées par le simple fait de manger une glace ou des aliments froids.
Quel bilan devant une urticaire chronique ?
Devant un tableau d’urticaire chronique, aucun examen complémentaire n’est nécessaire au diagnostic.
Le bilan allergologique est inutile. Il est une perte de temps et risque de donner aux parents le faux espoir que l’on puisse trouver un allergène dont l’éviction règlerait le problème.
Si l’interrogatoire permet de suspecter une urticaire inductible, il faut réaliser des tests physiques. Très standardisés, ces tests physiques (chaud, froid, pression, effort) doivent être faits par un dermatologue.
NFS et CRP sont prélevés au moindre doute diagnostique avec une maladie auto-inflammatoire.
Dans une perspective thérapeutique, devant une suspicion d’auto-immunité, il peut être utile de faire éventuellement
un dosage des anticorps anti-TPO, voire une TSH (habituellement normale) car il est possible que les enfants dans un contexte d’auto-immunité, à l’instar de ce qui est observé chez l’adulte, répondent moins bien au Xolair ®
La prise en charge
L’urticaire chronique est une maladie parfois hautement invalidante qui peut retentir de façon majeure sur la vie quotidienne de l’enfant et peut même mener à sa déscolarisation.
Il n’existe pas actuellement de recommandations de prise en charge spécifique chez l’enfant mais différentes sociétés savantes en ont émis chez l’adulte.
C’est à partir de ces recommandations qu’a été adapté le mode de prise en charge présenté ici.
● Aucun régime alimentaire.
● Élimination des facteurs d’aggravation et/ou d’entretien : médicaments(AINS, etc…) et les différents facteurs physiques incriminés.
● Traitement médicamenteux.
La qualité de vie de l’enfant est évaluée pour décider ou non la nécessité de traiter.
Dans la grande majorité des cas il est nécessaire de recourir à un traitement médicamenteux qui repose sur les anti-H1 de 2ème génération (non sédatifs) au long cours. La cétirizine6 et la desloratadine7 sont les molécules qui ont bénéficié du plus grand nombre d’études.
Il faut bien expliquer aux parents qu’il ne s’agit pas de traiter ponctuellement les poussées urticariennes mais de les prévenir.
Le traitement est un traitement au long cours, à adapter à la sévérité et à la fréquence de l’urticaire chronique.
Ce protocole est validé et bien toléré.
● Traitement de 1ère ligne : posologie usuelle de l’AMM adaptée au poids 1 fois/jour (le soir de préférence)
● Traitement de 2ème ligne : anti-H1 à dose augmentée : double, puis triple voire quadruple si nécessaire. La répartition de la dose en deux prises (matin et soir) est souvent privilégiée. Expliquer aux parents que le recours à ces doses est possible et que la tolérance est bonne. Stipuler sur l’ordonnance «selon la conférence de consensus de l’UCS» pour que le pharmacien ne pense pas qu’il s’agit d’une erreur. Réévaluation clinique toutes les 2 semaines.8
Il n’y a pas d’interaction médicamenteuse rapportée avec la cétirizine et la desloratadine.
● Traitement de 3° ligne : avis spécialisé si les symptômes persistent après 2 à 4 semaines d’anti-H1 dose quadruple.
Dans cette situation, il peut être prescrit de l’omalizumab9, un anticorps monoclonal anti-IgE ayant l’AMM dans l’urticaire chronique spontanée à partir de 12 ans (300 mg par voie souscutanée toutes les 4 semaines).
Le traitement est parfois proposé dès 6 ans selon les cas, dans les centres spécialisés (AMM dans l’asthme à partir de cet âge). La prescription initiale et le renouvellement sont réservés aux spécialistes en pneumologie, pédiatrie, dermatologie, médecine interne et allergologie.
● En dernier recours, dans les cas résistants à l’omalizumab, un traitement immunosuppresseur (ciclosporine notamment, méthotrexate) peut être proposé. Des thérapies ciblées commencent à être utilisées chez l’adulte.
Pas à pas urticaire chronique
Il n’y a pas de place pour la corticothérapie générale dans le traitement de l’urticaire chronique. Au contraire, outre les effets secondaires d’une utilisation prolongée, elle est un facteur de chronicisation de la maladie car, si elle améliore immédiatement les symptômes, l’arrêt du traitement s’accompagne d’un effet rebond.
Messages essentiels
L’Éducation Thérapeutique du Patient a toute sa place dans la prise en charge del’urticaire chronique. Elle permet aux enfants de verbaliser leur vécu, d’apaiser les parents notamment concernant leur peur de l’angioœdème asphyxique et souvent «remettre un peu d’ordre» dans l’alimentation des enfants qui arrivent pour beaucoup en consultation avec des régimes lourds et inutiles.
● Une urticaire chronique est définie par des lésions d’urticaire et/ou d’angioœdème présentes pendant plus de six semaines de façon permanente ou récidivante.
● Elle est rare chez l’enfant.
● Le plus souvent l’UC est spontanée et survient sur un terrain atopique ou dysimmun, parfois favorisée par une virose, un stress ou un médicament.
● Parfois l’UC est inductible par un facteur déclenchant physique précis (pression, soleil, chaud, froid, eau…) et est reproductible.
● Le bilan allergologique est inutile. Le bilan biologique est fonction du contexte dysimmunitaire (dysthyroïdie) ou auto-inflammatoire.
● Aucun régime alimentaire n’est utile.
● Le traitement repose sur les anti-H1. Les doses peuvent être augmentées en fonction des résultats cliniques. En cas d’échec l’omalizumab peut être proposé.
● Les indications d’orthèses sont très rares. Elles doivent être réservées aux déformations très sévères non améliorées par les mesures précédentes.
PAP SFP. Mise à jour 27/05/2024 A. Lasek Duriez1, L. Martin2, P. Cros3
1Hôpital Saint-Vincent-dePaul, Université catholique de Lille, Lille, France 2Service de dermatologie, CHU Angers, Angers, France 3Service de pédiatrie, CHU Morvan, Brest, France
Chronic urticaria is not an allergic condition and is a distinct entity from acute urticaria. It may be manifested by daily urticarial lesions and/or the occurrence of sporadic angioedema, which may or may not be associated with urticarial lesions. It does not cause asphyxial laryngeal oedema.
Chronic urticaria can be disabling because of its impact on daily life and requires long-term treatment with second-generation anti-H1 drugs and, in the event of resistance, omalizumab to prevent attacks.
¡ Bibliographie
1Xolair® / 2La libération dans la peau de médiateurs contenus dans les mastocytes (notamment l’histamine) en réponse à différents facteurs produit une réaction inflammatoire prurigineuse si la libération est superficielle et un œdème non prurigineux ou angio-œdème si elle a lieu en profondeur
3Syndromes CAPS (Cryoprine Associated Periodic Syndrome) en rapport avec des mutations du gène CIAS1 responsable de la synthèse de la cryopyrine, protéine impliquée dans la régulation de l’inflammation.
4L’urticaire familiale au froid, le Muckle-Welles et le CINCA (chronique, infantile, neurologique, cutané et articulaire) sont les 3 syndromes de sévérité croissante du CAPS.
5Traitement d’une crise modérée et grave : acide tranexamique (Exacyl) PO ou IVsi pas antécédent thrombotique. Crise grave (atteinte laryngée, face, douleur > 5) : Icatibant (Firazyr) en SC. / 6Cétirizine(Zyrtec®) / 7La desloratadine (Aérius®). Durée d’action plus prolongée que la cétirizine.
8Il existe un risque d’allongement de l’espace QT et de torsades de pointes, dose-dépendant, pour certaines molécules. Parmi les anti-H1 de 2° génération, il convient ainsi de ne pas prescrire l’ébastine, la bilastine et la mizolastine aux patients porteurs d’un QT long congénital ou acquis et ne pas les associer aux médicaments allongeant l’intervalle QT ou susceptibles d’induire des torsades de pointes (PAP SFP). / 9Xolair®
Création @jeannem.gauthier
DEGLUDEC
Une innovation singulière à conjuguer au pluriel.
Auda Ameur, Service pédiatrie / Algérie
L’insulinothérapie idéale devrait être l’exact reflet de la sécrétion physiologique d’insuline du sujet non diabétique. L’introduction d’analogue d’insuline à action prolongée (glargine, détemir) a révolutionné le paysage de diabétologie par rapport a l’insuline NPH [1]. Ils sont depuis devenus la référence des insulines basales dans le traitement du diabète. Le schéma basal-bolus, associant une insuline basale à une insuline d’action rapide, est l’une des meilleures options thérapeutiques pour atteindre un tel objectif. [2].L’insuline Degludec (IDeg) est une insuline basale à action ultra longue récemment commercialisée en Algérie. Elle est destinée aux patients souffrants de diabète de type 1 et de diabète de type 2. L’objectif de cette revue est de décrire la structure moléculaire de l’insuline Dégludec, ainsi que son mode d’action et son profil pharmacocinétique et pharmacodynamique. [2] [3].
Revue de littérature.
Auda AMEUR / Service de pédiatrie. Clinique Amilcar CABRAL, Centre Hospitalier Universitaire d’Oran. Algérie.
Mots clefs : insuline ultra-lente, insuline degludec
Une stratégie développée dans l’optimisation du profil d’absorption
La dénomination est purement extraite de sa structure moléculaire : DesB30-LysB29(Nε-γ gluhexadecandioyl) human insulin (figure 1). Cette nouvelle insuline basale a la propriété de former après injection sous-cutanée, des dépôts filamenteux multimériques à partir desquels les monomères
d’insuline sont progressivement libérés vers la circulation sanguine.[4]
Le profil d’action étalé et ultra-prolongé de la molécule avec une demi-vie de 25,4 heures (contre 12,5 Heures pour la glargine (IGlar) permet d’obtenir un effet circulant stable (même effet hypoglycémiant au cours des 12 premières et 12 dernières heures d’exposition), prolongé jusqu'à 42H après l’injection et sans pic sanguin d’insuline. [4] [5].
● Dans le DT1, Heise et al. ont montré des variations (intra) quotidiennes plus faibles qu’avec les autres insulines à action prolongée [2] [4].
● Des doses plus élevées d’insuline à action prolongée ont été nécessaires pour atteindre un même niveau glycémique dans certaines études [4]. Des résultats contradictoires ont
été rapportés dans le DT1 pour des doses de 0,4 U/kg/jour. Mais les différences ne sont plus constatées à 0,6 U/kg/jour. [6] [7] [8]
● Les particularités pharmacocinétiques d’IDeg sont maintenues chez les enfants comme en cas d’insuffisance hépatique ou rénale.
L'insuline DEGLUDEC
Intérêt dans le contrôle global de la glycémie
Beaucoup de diabétiques insulino-traités n’atteignent pas les objectifs glycémiques, à cause notamment de la survenue d’hypoglycémies. L’utilisation d’IDeg a été comparée à IGlar-U100 dans le cadre de 7 essais cliniques randomisés ou observationnels.
Dans l’étude BEGIN Basal-Bolus Type 1, les réductions d’HbA1c étaient identiques à 52 semaines de suivi sous IDeg ou IGlar-U100 avec une dose unique quotidienne.
Les pourcentages de patients à la cible glycémique (HbA1c <7.0%) en fin d’étude étaient également comparables avec les deux insulines (40 et 43 %, respectivement sous IDeg et IGlar-U100). Les hypoglycémies nocturnes à 1 an avaient plus diminuées (- 25% p=0.021,Tableau 1) sous IDeg vs. IGlar-U100. [9].
Des résultats similaires ont été rapportés dans BEGIN Flex T1 avec des injections d’IDeg variables (de 8 à 40 heures entre 2 doses). Dans cette étude, la Glycémie à jeun (GAJ) était légèrement plus basse dans le groupe IDeg (-19.3mg/dl, p=0.005, Tableau 1) pour le DT1. [10].
L’étude SWITCH 1 incluait des DT1 à risque élevé d’hypoglycémies, randomisés pour recevoir soit IDeg 1 fois/j pendant 32 semaines puis IGlar-U100 pendant autres 32 semaines soit IGlar-U100 puis IDeg. Le contrôle glycémique (HbA1c et GAJ) était comparable en fin d’étude, malgré des doses d’insuline inférieures sous IDeg [11].
Dans une population pédiatrique DT1, Young et al ont observé des taux d’HbA1c comparables et une GAJ inférieure sous IDeg vs. IDet (-29.2 mg/dl, p=0,0090).
La survenue d’hyperglycémies et de cétoses était réduite (p=0.0066) de même que le risque d’hypoglycémies nocturnes (- 33% sous IDeg vs. IDet).
Thalange et al. n’ont cependant pas observé une telle réduction pour IDeg vs. IDet dans une autre population pédiatrique [12].
Modalité d’administration et tolérance
Tresiba, insuline degludec est administréx d’une façon classique quotidienne une fois par jour par voie sous-cutanée. Une plus grande souplesse sur l'horaire de l'injection du soir est possible par rapport aux insulines basales.
Aucune différence entre IDeg et ses comparateurs n’a été signalée concernant des modifications pondérales dans le DT1. [13] [14] [15].
Un réel impact sur la qualité de vie
La qualité de vie (QdeV) a été analysée dans les études BEGIN, à l’aide du questionnaire abrégé SF-36.
Les réponses, recensées sur l’échelle EuroQol-5D, ont montré que l’administration d’IDeg était associée à une amélioration de l’état de santé [16].
En termes pharmaco-économiques, une analyse coût-efficacité a montré que dans le DT1, la transition d’insuline basale en insuline IDeg était associée à une diminution du coût global de santé, par le biais notamment de la réduction d’hospitalisations pour hypoglycémies et de l’amélioration des QALY (années de vie ajustées a la QdeV) [17] [18].
L'insuline DEGLUDEC
L’arrivée sur le marché algérien de l’insuline à action ultra longue Degludec (TresibaR) élargit de manière substantielle l’assortiment d’analogues insuliniques basaux destinés aux patients diabétiques.
Par sa plus grande souplesse d’utilisation et sa stabilité, cette molécule innovée représente un appoint important à l’arsenal thérapeutique actuel des insulines basales. Elle facilite l’atteinte de la GAJ-cible par sa titration sécure.
Conflits d’intérêt : aucun Références :
1. 1. H. Haarh, T. Heise. A review of the pharmacological properties of insulin degludec and their clinical relevance. Clin Pharmacokinet. 2014; 53(9): 787-800.
2 . T. Heiseet al. Insulin degludec: four time slower variability than insulin glargineunder steady-state conditions in type 1 diabetes. Diabetes Obes Metab. 2012; 14(9): 944-950.
3. T. Heiseet al. Insulin degludec: lower day-to-dayand within-day variability in pharmacodynamics response compared with insulin glargine 300 U/ml in type 1 diabetes. Diabetes Obes Metab. 2017;19(7): 1032-1039.
4. T. Heise, K. Kaplan, H.L. Haarh. Day-to-day and within-day variability in glucose-lowering effect between insulin degludec and insulin glargine (100 U/ml and 300 U/ml): a comparison across studies. J Diabetes Sci Technol. 2018; 12(2): 356-363.
5. T. Heiseet al. Ultra-longacting insulin degludec has aflat and stable glucose-lowering effect in type 2 diabetes. Diabetes Obes Metab. 2012; 14(10): 944-950.
6. T.S. Baileyet al. Morning administrationof 0.4 U/kg/day insulin glargine 300 U/ml provides less fluctuating 24-hour pharmacodynamics and more even pharmacokinetic profiles compared with insulin degludec 100 U/ml in type 1 diabetes.Diabetes Metab. 2018; 44(1): 15-21.
7. I. Kisset al. Insulin degludec: pharmacokinetics in patients with renal impairment.Clin Pharmacokinet. 2014; 53(2): 175-183.
8. V. Kupčovaet al . Insulin degludec: pharmacokinetic properties in subjects with hepatic impairment.Clin Drug Investig. 2014; 34(2): 127-133.
9. D. Russel-Joneset al. Insulin degludec results in lower rates of nocturnal hypoglycaemia and fasting glucose vs. insulin glargine: a meta-analysis of seven clinicaltrials. Nutr Metab Cardiovasc. Dis 2015; 25(10): 898-905.
À ce jour, la comparaison entre IDeg et IGlar-U300 montre des effets globalement comparables dans le DT2. D’autres études,de comparaison directe et d’observation, en particulier dans le DT1, devraient corroborer les données positives actuellement disponibles.
10. C. Mathieu, et al. Efficacy and safety of insulin degludec in a flexible dosing regimen vs. insulin glargine in patients with type 1 diabetes (BEGIN Flex T1): a 26-week randomized, treatto-target trial with a 26-week extension. J Clin Endocrinol Metab. 2013; 98(3): 1154-1162.
11. W. Laneet al. Effect of insulin degludec vs insulin glargine U100 on hypoglycemia in patients with type 1 diabetes. The SWITCH 1 randomized clinical trial. JAMA. 2017; 318(1): 33-44.
12. Thalange Net al. Insulin degludec incombination with bolus insulin aspart is safe and effective in children and adolescents with type 1 diabetes. Pediatric Diabetes. 2015; 16(3): 164-176.
13. C. Wyshamet al. Effect of insulin degludec vs insulin glargine U100 on hypoglycemia in patients with type 2 diabetes. The SWITCH 2 randomized clinical trial. JAMA. 2017; 318(1): 45-56.
14. S.P. Marsoet al. Efficacy and safety of degludec versus glargine in type 2 diabetes. N Engl J Med. 2017; 377(8): 723-732.
15. X.W. Zhang, X.L. Zhang, B. Xu, L.N. Kang. Comparative safety and efficacy of insulin degludec with insulin glargine in type 2 and type 1 diabetes: a meta-analysis of randomized controlledtrials. Acta Diabetol. 2018; 55(5): 429-441.
16. N. Freemantleet al. A comparison of health-related quality of life (health utility) between insulin degludec and insulin glargine: a meta-analysis of phase 3trials.Diabetes Obes Metab. 2013; 15(6): 564-571.
17. M. Okadaet al. Effect of switchingbasal insulin regimen to degludec on quality of life in Japanese patients with type 1 and type 2 diabetes mellitus. J Pharm Health Care Sci. 2015;1: 26
18. H.W. Rodbardet al. Health status and hypoglycaemia with insulin degludec wersus insulin glargine: a 2-year trial in insulin-naive patients with type 2 diabetes. Diabetes Obes Metab. 2014; 16(9): 869-872.
depuis début 2024.
La France et plusieurs états européens sont en état d'alerte.1 Durant le premier semestre de l'année, près de 7000 cas confirmés ont été recensés versus 518 cas pour toute l'année 2023.1 En Europe, plus de 32 000 cas ont été déclarés en 3 mois entre janvier et mars 2024 contre 25 000 cas sur toute l’année 2023.2
Les nourrissons de moins de 6 mois sont les plus touchés par les formes graves, les hospitalisations mais aussi les décès.
D’après les interventions de Nathalie GRANGERET : ARS / DD73 et Anne-Sophie
RONNAUX –BARON : ARS ARA, Julie Tubiana, Robert Cohen et Hervé Haas pédiatres infectiologues.
11ème Réunion d’Infectiologie Pédiatrique Ambulatoire Alpine. Aix les Bains. 31 janvier 2024
Rédaction : Véronique Desvignes. Merci à Georges Thiébault pour sa relecture.
et en Auvergne-Rhône-Alpes
● En France le réseau hospitalier de surveillance de la coqueluche, RENACOQ, rapporte pour la période du 1er janvier au 10 novembre 2024 un nombre cumulé de 305 nourrissons de moins de 12 mois hospitalisés (dont 80 % de moins de 6 mois) et 42 décès depuis début 2024. 23 étaient des enfants, 20 étaient âgés de moins de 1 an et 12 de moins de 1 mois. A titre de comparaison 37 décès chez des nourrissons de moins 6 mois avaient été rapportés en 16 ans !
● En Auvergne- Rhône-Alpes, en rapport avec la coqueluche, on a compté :
► 546 signalements (cas groupés et nosocomiaux) qui ont été faits entre février et décembre 2024.
► 8 994 actes SOS Médecins pour coqueluche depuis début 2024.
► 6538 passages aux urgences.
► 38 129 PCR positives dans 3 laboratoires de bactériologie.
La disparité du nombre de cas s’explique par le nombre d’habitants mais aussi la couverture vaccinale variable selon les départements.
Le nombre de cas diminue nettement depuis décembre 2024 même si l’épidémie reste active.
La coqueluche : brefs rappels
La coqueluche est une maladie infectieuse des voies respiratoires inférieures particulièrement contagieuse avec un R0 à 15. La
contamination est aérienne (toux, éternuements, parole) et nécessite des contacts directs avec des personnes infectées. La transmission se fait entre enfants dans les collectivités (crèches, écoles), aussi des adultes ou des adolescents vers les nourrissons. Les agents infectieux responsables sont Bordetella pertussis (86 à 95% des cas). Bordetella para pertussis (2 à 3% des cas), est à l'origine de tableaux moins graves et moins longs mais non couverte par la vaccination.
Trois phases cliniques
● La phase d’incubation (2 à 3 semaines) d’abord asymptomatique puis catarrhale (rhume, fébricule et petite toux).
● La phase paroxystique avec des quintes fréquentes, prolongées, fatigantes mais sans fièvre. Les quintes peuvent se terminer par une reprise inspiratoire difficile et bruyante (« le chant du coq ») et souvent des vomissements. Chez les adolescents et adultes, une recrudescence nocturne de la toux quasi-constante.
Chez les nourrissons la forme quinteuse asphyxiante s’accompagne de toux émétisante sans chant du coq et de cynaose. La forme apnéisante , surtout chez le moins de 3 mois, est responsable de désaturations sévères et de bradycardies. Une défaillance multiviscérale survient dans la forme maligne (30 à 80% de décès).
● La phase de convalescence de plusieurs semaines pendant laquelle la toux régresse lentement.
La coqueluche du nourrisson âgé de moins de 3 mois justifie une hospitalisation systématique. Après 3 mois, l’hospitalisation se discute en fonction de la tolérance clinique.
Contagiosité et immunité
La contagiosité est maximale au moment de la phase catarrhale. Elle diminue à la phase quinteuse mais peut se prolonger jusqu'à 3 semaines après le début de la période catarrhale en l'absence de traitement antibiotique.
La coqueluche n’est pas une maladie à déclaration obligatoire. Les cas groupés (≥ 2 cas) doivent toutefois être signalés aux ARS ainsi que les cas nosocomiaux.
La coqueluche
L’infection bactérienne, tout comme le vaccin, ne confère pas une immunité à vie. Il est possible de contracter la maladie plusieurs fois.
Diagnostic
Le diagnostic direct est fait à partir d’un prélèvement nasopharyngé profond par PCR-coqueluche (remboursée). La sensibilité décroit avec la durée de la toux mais l’agent pathogène peut être retrouvé jusqu’à 3 semaines après le début de la toux.
La PCR coqueluche à visée diagnostique peut être réalisée chez un membre de l’entourage (cas secondaire) qui commence à tousser plutôt que chez le cas index s’il tousse depuis plus de 3 semaines (HAS). Les tests PCR multiplex respiratoires sont moins sensibles et ne doivent pas être utilisés en première intention en cas de forte suspicion de coqueluche. Cependant, en cas de tableau non spécifique, ils sont utiles.
La sérologie coqueluche n’a plus sa place dans la stratégie diagnostique de la coqueluche en pratique courante et n’est plus recommandée ni remboursée. Elle n’a aucun intérêt pour apprécier l’immunité.
Coqueluche suspectée, confirmée ou documentée : antibiothérapie et éviction
L’antibiothérapie
L’antibiothérapie est recommandée pour réduire le portage et la contagiosité mais n’a aucun effet sur l’évolution de la maladie, d’autant plus que le diagnostic est tardif. Elle repose essentiellement sur les macrolides, la résistance en France restant exceptionnelle contrairement à l’Asie. Le traitement doit être donné dès que possible et dans les 3 premières semaines d’évolution.
● Azithromycine
► Enfant : 1 dose poids 1 fois par jour pendant 3 jours (soit 20 mg/kg/jour), sans dépasser la posologie adulte de 500 mg 1 fois par jour.
► Adulte : 500 mg/jour en une seule prise par jour, pendant 3 jours.
● Clarithromycine
► Enfant : 1 dose poids 2 fois par jour pendant 7 jours (soit 15 mg/kg/jour), sans dépasser la posologie adulte de 500 mg 2 fois/ jour.
► Adulte : 500 à 1000 mg/jour en 2 prises pendant 7 jours.
● En cas de contre-indication aux macrolides : Cotrimoxazole (sulfamethoxazole-trimethoprime) : 6 mg/kg/jour en 2 prises par jour (dose exprimée en triméthoprime) pendant 7 jours, sans dépasser la posologie adulte de 800/160 mg 2 fois par jour.
● En cas de rupture de stock : chez l’enfant à partir de 25 kg :
Erythromycine : 40 mg/kg/jour en 2 à 3 prises par jour pendant 14 jours sans dépasser la posologie adulte de 1g 3 fois par jour.
L’éviction
L’éviction des cas suspects en milieu scolaire est nécessaire tant que le diagnostic n'a pas été infirmé. Si le diagnostic est confirmé, pas de scolarisation avant 3 ou 5 jours de traitement antibiotique adapté (3 jours si azithromycine). Éviction
jusqu’à 3 semaines après le début de la toux en l’absence de traitement antibiotique.
Cas contacts : que faire ?
Le traitement préventif est identique au traitement curatif. Il doit débuter le plus tôt possible car son efficacité diminue après 14 jours.
Il est indiqué pour :
► Tous les nourrissons de moins de 6 mois même vaccinés.
► Les nourrissons de 7-11 mois non ou incomplètement vaccinés (ayant reçu moins de 2 doses de vaccin coqueluche) ; le dernier contact doit remonter à moins de 21 jours.
► Toutes les personnes de l’entourage proche du malade, même asymptomatiques, et quel que soit leur âge, si elles n’ont pas reçu de rappel vaccinal dans les cinq dernières années (sauf coqueluche avérée depuis moins de 10 ans).
Le dernier contact doit dater de moins de 14 jours.
La vaccination post-exposition chez une personne déjà contaminée n’a aucune efficacité.
Prévenir la coqueluche
Les 3 stratégies possibles sont la vaccination des femmes enceintes, de la population adulte et pédiatrique par des vaccins acellulaires et la stratégie du cocooning. L’immunité vaccinale s’atténue après 5 ans, 10 ans après la maladie.
La vaccination des femmes enceintes
Elle est pratiquée au 2 e trimestre de grossesse (entre 20 et 36 semaines d’aménorrhée).
Elle doit être répétée à chaque grossesse, quel que soit le délai entre chaque grossesse car il existe une baisse significative des anticorps un an après la vaccination. Aucun effet indésirable supplémentaire n’a été identifié.
La vaccination des femmes enceintes à partir du deuxième trimestre de grossesse et au plus tard un mois avant l’accouchement, est recommandée depuis 2022 en France. C’est la mesure la plus efficace pour protéger le nourrisson dès la naissance grâce au transfert transplacentaire des anticorps maternels boostés.
Mise en place depuis plus de 12 ans dans de nombreux pays dont le Royaume Uni et les États-Unis, de très nombreuses études démontrent son innocuité et son efficacité sur la prévention des coqueluches précoces3. L’efficacité vaccinale est ainsi de 84% à 91% si la mère a été vaccinée plus de 14 jours avant l’accouchement. Chez les moins de 3 mois l’incidence de la coqueluche est réduite de 78% (OR = 0,22 [IC 95 % : 0,14-0,33]) et la mortalité de 95% [IC 95 % : 79 ; 100]. En cas de coqueluche chez des enfants dont les mères ont été vaccinées, celle-ci est moins sévère et les enfants moins souvent hospitalisés. Aucun enfant hospitalisé n’a été intubé ni n’est décédé.
La vaccination de la population
► 3 doses chez le nourrisson : 2 - 4 mois et 11 mois.
► Rappels à 6 ans, entre 11 et 13 et 25 ans.
► Tous les 20 ans jusqu’à 65 ans.
► ous les 10 ans à partir de 65 ans.
La stratégie du cocooning
La stratégie du cocconing (vaccination de la mère avant la sortie de la maternité et des personnes de l'entourage proche du nouveau-né 4 dont la dernière injection date de plus de 5
coqueluche
ans) est maintenue si la mère n’a pas été vaccinée pendant la grossesse ou l’a été moins d’un mois avant l’accouchement.
La vaccination de l’entourage n’est en revanche plus nécessaire si la vaccination de la femme enceinte et l’accouchement sont espacés de plus d’un mois.
Professionnels en contact rapproché avec les nouveau-nés et les nourrissons de moins de 6 mois5
Pour mémoire, chez ces professionnels, les rappels sont recommandés tous les 20 ans. En période épidémique, une dose de rappel est fortement recommandée par l’HAS quand la dernière injection date de plus de 5 ans.
Une épidémie de coqueluche prévisible mais une intensité non anticipée : quelles explications ?
L’amélioration du diagnostic ne semble pas être une explication car les progrès dans le domaine sont modestes et beaucoup de cas testés étaient d’authentiques coqueluches.
Des épidémies cycliques
Le caractère « cyclique » naturel de la coqueluche (cycles de 3 à 5 ans) est connu (fig 1) et la persistance de la circulation de la bactérie chez les adolescents et les adultes en raison d’une couverture vaccinale insuffisante laissait supposer la survenue d’autres cycles.
La dette immunitaire
L’arrêt total de la circulation de Bordetella pendant la période Covid qui a diminué l’immunité de groupe laissait présager une dette immunitaire
Des modifications des souches
► La réapparition de souches productrices de pertactine ont été constatées. Une explication pourrait être le fait que certains vaccins mis sur le marché ces dernières années (Hexyon) ne contenaient plus l’antigène « pertactine », permettant la résurgence de ces souches.
► En 2024, en quelques mois 14 souches de Bp résistantes aux macrolides ont été identifiées sur une mutation du 23S-rRNA alors que pendant 20 ans une seule souche avait été identifiée. Cette mutation a flambé en Chine ces dernières années.
Une moins bonne protection induite par les vaccins acellulaires
Les vaccins acellulaires ont remplacé les vaccins à corps entier qui étaient trop réactogènes.Il était aussi beaucoup plus facile de les associer à d’autres valences (vaccins penta et hexavalents).
La protection induite par ces vaccins acellulaires, notamment en termes de durée de protection, s’est révélée par la suite avérée moins bonne, favorisant le retour de la bactérie par diminution de la pression de sélection.
● Les cellules T mémoire ne sont pas stimulées par les vaccins acellulaires qui protègent donc contre la maladie mais pas contre le portage ni la transmission.
● La protection conférée baisse de 10% par an et l’efficicité du vaccin est actuellement d’environ 5 ans.
● Les vaccins acellulaires protègent peu ou pas contre la circulation de B. pertussis.
● En 2024 survenue d’une nouvelle épidémie coqueluche, prévisible mais de très forte intensité avec une mortalité très importante.
● Les nourrissons sont les plus exposés aux formes malignes et aux complications les plus graves.
● La dette immunitaire, des modifications des souches et une moins bonne efficacité des vaccins acellulaires font partie des explications de l’importance de l’épidémie qui diminue tout en restant encore active.
● La vaccination de la mère, à chaque grossesse, au cours du 2ème trimestre est pour l’instant la mesure la plus efficace pour protéger le nourrisson dès la naissance.
● Le traitement des malades et des cas contacts repose en France toujours sur les macrolides.
In 2024, a new pertussis epidemic will occur, predictable but of very high intensity, with a very high mortality rate.Infants will be the most vulnerable to malignant forms and serious complications. Immune indebtedness, changes in strains and the reduced effectiveness of acellular vaccines are among the explanations for the size of the epidemic, which is decreasing but still active.For the time being, maternal vaccination during the 2nd trimester of each pregnancy is the most effective way to protect infants from birth. In France, treatment of patients and contacts is still based on macrolides.
¡ Bibliographie
11. DGS. Intensification de la circulation de la coqueluche en France et en Europe. 07/06/2024. 2VAIVRE-DOURET L et col. Étude des caractéristiques psychologiques et psychobiologiques des enfants à haut potentiel. Enfance n◦ 1/2010 | pp. 27-44 2CECDC. Increase of pertussis cases in the EU/EEA. 8 May 2024. https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/increase-pertussis-cases-eueea. 3Nguyen HS. Am J ObstetGynecol2022;226:52-67.e10. Guzman-Holst A. Vaccine 2021;39:2311-8. Amirthalingam G, Lancet 2014;384(9953):1521-8. Amirthalingam G Clin Infect Dis 2016;63:S236- S43. Rowe SL ;Pediatrics 2021;148:e2021051076. Winter K, Clin Infect Dis 2017;64(1):9-14. Sancho Uriarte P, Heliyon 2019;5(2):e01207. Romanin V, Clin Infect Dis 2020;70:380-7. Godoy P, J Infect 2021;83(5):554-8. Quinn HE; Pediatr Infect Dis J 2022;41(3):180-5. Amirthalingam et al. Clinical Infectious Diseases, Volume 76, Issue 3, 1 Febr 2023, e1129–e1139, 4Parents fratrie, grands-parents et autres personnes susceptibles d’être en contact étroit et durable avec le nourrisson au cours de ses six premiers mois.,
Doit-on prescrire une antibioprophylaxie à un petit nourrisson d’un mois et demi dont le frère de 5 ans a une coqueluche prouvée si la mère a été vaccinée pendant la grossesse ?
► Oui !!! Certes la vaccination maternelle est très efficace (8590%) mais pas totalement et la coqueluche du nouveau-né et du petit nourrisson est grave : il faut courir le minimum de risque.
Doit-on prescrire une vaccination de l’entourage d’un nouveau-né né à terme dont la mère a été vaccinée à 32 semaines d’aménorrhée ?
► Non !!! ce n’est pas indispensable et plus recommandé. La vaccination maternelle est bien plus efficace (85-90%) que le cocooning (au mieux 50%). Néanmoins, il faut profiter pour mettre à jour le calendrier vaccinal de toute famille.
Quel est le taux de protection conféré par 1 ou 2 doses de vaccin chez le nourrisson ?
► Une large étude européenne répond à cette question pour les formes hospitalisées : 48 % (IC 95% : 5-71) pour une dose et 76 % (IC 95%: 43-90) pour 2 doses.
Quel vaccin faut-il proposer à un patient qui vient de faire la coqueluche et qui est en âge de recevoir une injection de vaccin ?
► Le vaccin qui était prévu à son âge !!! En effet, pour les nourrissons, la maladie est peu immunisante et un vaccin contenant la valence coquelucheuse s’impose (en l’occurrence un hexavalent). Pour les plus âgés, DTCaP (Tetravac®) ou dTcaP (Boostrix® ou Repevax®) en fonction de l’âge.
Une jeune fille de 18 ans n’a jamais été vaccinée car la famille ne voulait pas. Je lui ai prescrit un Tetravac ®. Comment continuer : Tetravac ® 0-2-7-mois ou relais par Repevax ® ou Boostrix ® ?
► Les adultes jamais vaccinés (comme pour cette patiente) sont assez rares – et donc les données limitées ! Les vaccins tétravalents de l’adulte sont 15 fois moins dosés pour la diphtérie, 3 à 10 fois moins pour la toxine pertussique, 2 fois moins pour le tétanos. Il existe des contradictions dans les documents officiels : les vaccins adultes n’ont pas d’AMM en primo-vaccination et le Tetravac® n’a pas d’AMM chez l’adulte ! Bien que le calendrier vaccinal recommande d’utiliser des vaccins adultes faiblement dosés, InfoVac recommande d’utiliser le Tetravac ® (ou l’Infanrixtetra® lorsque disponible) pour induire une meilleure réponse immunitaire contre la diphtérie/la coqueluche.
J’ai eu 3 cas de coqueluche (PCR +) dont 2 chez de très jeunes enfants (14 et 30 mois) correctement vaccinés. Que faut-il en penser ?
Dans un contexte où de faux certificats circulent, s’assurer en premier lieu que les enfants sont effectivement vaccinés. De plus, si c’est B parapertussis, le vaccin n’offre aucune protection. S’il s’agit bien de B. pertussis, c’est un échec de vaccination. Les études ont démontré que l’efficacité des vaccins acellulaires, dans les 2 ans qui suivent leur administration, avoisine 85-90% (ce n’est donc pas 100%). Il est inutile d’explorer l’immunité de ces enfants, la coqueluche ne suggérant pas un déficit immunitaire.
Faut-il vacciner les prématurés < 33 SA avec un schéma 2+1 (comme le recommande le calendrier vaccinal) ou 3+1 (comme le préconisent InfoVac-France et le GPIP) ?
► Pour InfoVac la réponse est claire : un schéma renforcé 3+1 (2, 3, 4, 11 mois) pour les prématurés de moins de 33 SA, pour le Prevenar13 ® / Vaxneuvance ® et pour les hexavalents. En effet, ces grands et très grands prématurés présentent un risque infectieux accru (en fréquence et en gravité : 1/3 de coqueluches malignes !!) mais aussi une réponse immunitaire moins robuste pour presque toutes les valences. L’immunité de groupe limite les risque pour Hib et pneumocoques, mais pas pour la coqueluche ni l’hépatite B, pour laquelle l’immunité est supposée durer à vie... Ces grands et très grands prématurés représentant moins de 2% des naissances, il n’y pas d’enjeu économique. Ils doivent recevoir la 1ère dose avant leur retour à domicile s’ils sortent à 6 semaines de vie (J 42) du fait des risques d’apnée-bradycardie- désaturation dans les 48 heures qui suivent la vaccination. Pour réduire les retards vaccinaux, et permettre leur sortie précoce si c’est possible, la vaccination est donc initiée dès 6 semaines de vie (42 jours !) renforçant l’utilité d’un schéma renforcé de primovaccination « 3+1 ». Enfin, une
étude récente suggère que même pour les enfants à terme, le schéma 2+1 induit un peu plus d’échec que le schéma 3+1 (RR 1·7 (95% CI 1·4-2·0). Pour des patients plus à risque de contracter la maladie et des formes graves, un schéma 3+1 parait plus raisonnable.
Une auxiliaire de puériculture travaillant en crèche est suspecte bien qu’elle ait été vaccinée, il y a 6 ans, par un dTPca. Ce diagnostic est-il envisageable ? En attendant les résultats, doit-on traiter par antibiotiques les nourrissons de 5 à 10 mois dont elle s’occupait et qui ont tous reçu 2 doses d’Hexavalent ?
► La réponse à votre première question est OUI. La durée de protection avec les vaccins acellulaires est probablement moins longue que celle obtenue avec les anciens vaccins entiers (Guiso N, Vaccine 2017) et le diagnostic decoqueluche est donc possible. La réponse à votre deuxième question est NON. On considère qu’après 2 doses, les enfants de moins de 1 an ne justifient pas de prophylaxie.
Quel programme de vaccination proposer à un adolescent de 13 ans n’ayant pas reçu de valence coquelucheuse à 11 ans mais à jour pour les autres valences ?
► La question est plus compliquée qu’il n’y parait... A titre individuel, qu’il ait reçu sa dernière dose de vaccin coquelucheux à 18 mois ou à 6 ans, il n’est probablement plus protégé et il faut lui proposer une vaccination dTcaP. En termes de santé publique, l’objectif principal de la vaccination contre la coqueluche est la protection des nouveau-nés et des petits nourrissons (qui sont exposés aux formes les plus graves de la maladie) d’où la stratégie de vaccination des femmes enceintes et le fait qu’un adolescent ne soit pas protégé contre la maladie n’aura pas de conséquence majeure s’il n’est pas en contact avec des nouveau-nés et des petits nourrissons dont la mère n'aurait pas été vaccinée pendant la grossesse.
Combien de doses et quel vaccin faut-il donner aux grands-parents qui vont garder un bébé et qui ne savent pas s’ils ont eu la coqueluche ou ont été vaccinés ?
► Si la mère a été vaccinée pendant la grossesse ; aucun vaccin coqueluche n’est nécessaire ni utile. Sinon, il y a peu de chances qu’ils n’aient jamais reçu de vaccin et qu’ils n’aient pas fait la maladie… Il suffit de donner une dose unique de Boostrix ® ou de Repevax ® , SANS FAIRE DE SEROLOGIE puisqu’elle n’indique absolument pas l’existence d’une protection même si elle est positive. Seuls les enfants encore non vaccinés nécessitent 2 doses (8-10 ans) ou 3 doses (0-7 ans) de vaccin coqueluche pour être immunisés.
Est-ce qu'un enfant ayant fait une coqueluche est protégé à vie ? De façon générale, quelles sont les maladies qui entraînent une immunité suffisante pour ne plus nécessiter une vaccination ?
► On a pu croire que la coqueluche conférait une immunité définitive tant que l’intense circulation du germe permettait des contacts répétés réalisant des rappels naturels. Maintenant que ces contacts sont devenus rares, la maladie immunise pour une dizaine d’années. Le maintien de l'immunité, qu'elle soit post-infectieuse ou post-vaccinale repose essentiellement sur la persistance de taux d'anticorps suffisants à la protectionque ceux-ci soient directement protecteurs ou reflètent aussi le maintien de l'immunité cellulaire ou de cellules B-mémoires. Une immunité prolongée est observée après quelques maladies virales (hépatites A et B, rougeole, rubéole, oreillons, varicelle, encéphalite à tiques…), probablement par la persistance dans l'organisme d'antigènes viraux stimulant les cellules mémoires à se différencier en plasmocytes producteurs d'anticorps. Au contraire, les maladies bactériennes induisent une immunité qui n'est que transitoire (coqueluche, pneumocoques), voire absente (diphtérie, tétanos, méningites bactériennes chez le nourrisson) ou encore limitée à un seul sérotype/sérogroupe (pneumocoques, méningocoques). Il est donc indispensable de (re)vacciner après ces infections bactériennes !
Robert Cohen, Odile Launay, Pierre Bakhach, Maeva Lefebvre, Didier Pinquier, Isabelle Hau, François Vie le Sage, Franck Thollot, Marie-Aliette Dommergues, Véronique Dufour, Pierre Bégué, Joël Gaudelus, Cécile Janssen, Anne-Sophie Romain, Georges Thiebault, Catherine Weil-Olivier, Hervé Haas.
La rougeole continue de circuler en raison de sa forte contagiosité et d’une couverture vaccinale insuffisante. Pendant l’épidémie observée en Auvergne-Rhône-Alpes en 2024, 97 cas ont été signalés dont 66 enfants. Parmi les 20 hospitalisés, 11 avaient moins de 1 an. La majorité d’entre eux n’était pas ou mal vaccinée (1 seule dose ou 1 dose avant 12 mois).
Le retard au diagnostic, les difficultés de communication et de contact-tracing participent à la progression de l’épidémie. Les bons réflexes en cas de rougeole confirmée ou non, pour le patient et les contacts, sont rappelés dans l’article. Ils sont importants pour programmer la vaccination des sujets non protégés dans les 3 jours et les gammaglobulines polyvalentes pour les personnes à risque dans les 6 jours.
D’après une intervention de Nathalie GRANGERET : ARS / DD73 et Anne-Sophie RONNAUX –BARON : ARS ARA. 11ème Réunion d’Infectiologie Pédiatrique Ambulatoire Alpine. Aix les Bains. 31 janvier 2024.
Rédaction : Véronique Desvignes. Mots-clés : rougeole
2023-2024 : une nouvelle épidémie de rougeole en Auvergne-Rhône-Alpes (ARA).
Après l’épidémie de rougeole de 2010-2012 qui a impacté toute la France puis celle de 2019 qui a surtout été observée dans les stations de sports d’hiver en ARA, une nouvelle épidémie a été constatée d’abord en septembre 2023 en Drôme-Ardèche puis dans le Rhône à partir de janvier 2024 et jusqu’en juin 2024. Les cas étaient groupés dans des établissements scolaires et des crèches. Le cas source dans le Rhône était un enfant non vacciné revenant d’un séjour Émirats Arabes Unis. Plusieurs chaînes de transmission ont ensuite été identifiées sans identification d’autres cas index.
97 cas, 66 enfants et 31 adultes, ont été diagnostiqués. Parmi les enfants, 30 étaient âgés de 12 mois ou moins et non vaccinés. 12 enfants avaient de 1 à 3 ans (1 vacciné 2 doses, 4 vaccinés 1 dose et 7 non vaccinés). 24 étaient âgés de 4 à 16 ans (9 vaccinés 2D dont au moins 5 avant 1 an, 2 vaccinés 1D, 12 non vaccinés et 1 « NSP »).
Les adultes étaient âgés de 17 à 43 ans. Parmi eux 9 vaccinés 2D, 5 vaccinés 1D, 6 non vaccinés et 11 « NSP ». 20 ont été hospitalisés dont 11 enfants de moins de 1 an. 5 cas ont présenté une complication pulmonaire.
● 18% des cas de rougeole étaient vaccinés 2 doses. Cependant 5 enfants sur 9 avaient reçu la première dose avant l’âge de 12 mois. La vaccination à 9 mois est déconseillée depuis quelques années car beaucoup moins immunogène.
● L’objectif de 95% de personnes vaccinées «2 doses» capable d’interrompre la circulation du virus n’est toujours pas atteint. La couverture vaccinale (CV) en Auvergne-RhôneAlpes est de 86,4%, à peine plus élevée que la CV nationale (85,7%). La CV en Drôme-Ardèche est la moins bonne (82,9%)
Les difficultés rencontrées
Beaucoup de retard
La vaccination des cas contacts est efficace dans les 72h suivant le premier contact et l’administration des immunoglobulines chez les personnes à risque1 doit se faire dans les 6 jours suivant le contage.
Tout retard au diagnostic peut être une perte de chance. Beaucoup de retards ont été constatés en matière de :
● Diagnostic clinique : Beaucoup de médecins n’ont jamais vu de rougeole. Autre difficulté : dans le même temps circulait une épidémie de parvovirus B19.
● Confirmation biologique : les bons examens à prescrire sont mal connus.
● Déclaration obligatoire.
Des difficultés dans la communication
Les parents n’ont pas toujours été rapidement informés par les établissements scolaires, pas plus que les médecins ne l’ont été par le CDOM…
Le contact-tracing en milieu de soins et dans les collectivités est très complexe
La rougeole est une maladie infectieuse particulièrement contagieuse avec le R0 le plus élevé de toutes les maladies infectieuses (15-20). 2
Les sujets contacts sont nombreux puisque ce sont les personnes :
● ayant côtoyé le malade de 5 jours avant à 5 jours après l’éruption.
● celles qui ont séjourné dans une pièce fréquentée par le malade jusqu'à 2 h après son départ.
Leur identification est donc extrêmement difficile, que ce soit au domicile, en crèche, en milieu scolaire ou dans les salles d’attente en ville ou à l’hôpital.
La vérification du statut vaccinal des cas contacts est aussi très complexe et chronophage. C’est aussi sans compter les personnes éloignées du système de santé ou les anti-vax.
Les actions de vaccination dans les collectivités se sont avérées peu efficaces
Les actions engagées dans différents établissements scolaires ont été pour la plupart des échecs avec très peu de jeunes vaccinés.
Dès sa suspicion, la rougeole est une maladie à déclaration obligatoire car elle nécessite la mise en œuvre de mesures de santé publique dans des délais contraints.
La clinique
● L’incubation dure 10 à 12 jours.
● La phase d’invasion (2 à 4 jours) débute avec une fièvre élevée (> 38,5°C), des yeux rouges et larmoyants, une rhinite, de la toux et une importante asthénie. Le signe de Koplik est pathognomonique mais inconstant et précoce : il disparaît avec le début de l'éruption.
● L'éruptionmaculo-papuleuse dure 5-6 jours. Elle débute au niveau du visage, derrière les oreilles et descend vers les extrémités en 3 jours.
Les formes compliquées sont plus fréquentes chez les enfants de moins de 1 an et de plus de 20 ans. La première cause de décès est la pneumonie chez l’enfant et l’encéphalite aiguë chez l’adulte.
La confirmation biologique
Il est important de prévenir le laboratoire de la recherche d’une rougeole.
Compte tenu de la raréfaction de la maladie, le diagnostic de la rougeole doit être confirmé biologiquement soit par :
● PCR : J0 correspondant au jour de l’éruption, l’ARN viral peut être détecté dans la salive, le nez, la gorge et même les urines de J- 3 à 5 à J +10-12. La période optimale s’étend de J0 à J +5.
● Sérologie : les IgM peuvent être détectés dans la salive et/ou le sérumde J0 à J 60. La période optimale se situe de J+3 à J +28.
La rougeole continue de circuler. Les principales raisons en sont sa très forte contagiosité, une couverture vaccinale qui reste < 95% de la poæpulation et des épidémies actuelles importantes notamment au Maroc et en Italie.
Les sous-diagnostics et les sous-déclarations obligatoires fréquentes retardent trop souvent la vaccination des cas contacts
Le cas est alors confirmé biologiquement.
En cas de suspicion de rougeole et de notion de contact avec un cas confirmé biologiquement dans les 7 à 18 jours avant le début de l’éruption, la confirmation biologique n’est plus obligatoire. On parle alors de cas confirmé épidémiologiquement.
Les bons réflexes en cas de rougeole confirmée ou non
Pour le patient
● Signalement à l’ARS.
● Confirmation biologique par PCR (salive, nez ou gorge)ou IgM (salive ou sérum).
● Recherche d’un contact dans les 7 à 18 jours avant le début de l’éruption.
● Éviction de la collectivité (crèche, établissement scolaire…) 5 jours après le début de l’éruption.
Pour l’entourage, les contacts proches, les contacts en crèche et en halte- garderie. Annexes 1 et 2
● Recherche d’autres cas.
● Confirmation biologique des cas symptomatiques. En situation épidémique, la plupart des cas seront confirmés épidémiologiquement. Les examens biologiques sont inutiles pour les contacts asymptomatiques.
● Vérification du statut vaccinal.
● Vaccination des sujets contacts non protégés dans les 3 jours suivant le premier contage (sans attendre les résultats de laboratoire).
● Gammaglobulines polyvalentes pour les personnes à risque. Si nécessaire, le schéma vaccinal peut ensuite être repris après un délai minimal de 3 mois.
ou les immunoglobulines polyvalentes pour les populations à risque. Les difficultés de collaboration entre professionnels et de communication avec la population se traduisent par la persistance d’une circulation communautaire. Pour autant et malgré ces points faibles, l’épidémie est restée limitée à une zone géographique restreinte.
rougeole
Messages essentiels
● La vaccination contre la rougeole comporte 2 doses : 12 et 16-18 mois.
● Pas de vaccin avant 12 mois car la protection n’est pas bonne.
● Si le vaccin a été fait avant l’âge de 12 mois, prévoir une 3ème dose.
● Toutes les personnes nées depuis 1980 doivent avoir bénéficié de 2 doses.
● La couverture vaccinale en France reste insuffisante (< 95%) et la rougeole circule toujours.
● La rougeole est une maladie à déclaration obligatoire, qu’elle soit confirmée ou non.
● La confirmation biologique se fait par PCR et/ou IgM (dans la salive ou le sérum).
● En cas de contage : - vaccination dans les 72 heures des sujets contacts non protégés. - immunoglobulines polyvalentes dans les 6 jours chez les sujets fragiles.
Annexe 1
Annexe 2
Measles continues to circulate due to its highly contagious nature and poor vaccination coverage. During the 2024 epidemic in Auvergne-Rhône-Alpes, 97 cases were reported, including 66 children. Of the 20 hospitalized, 11 were under 1 year old. Most of them were unvaccinated or poorly vaccinated (1 single dose or 1 dose before 12 months).
Delays in diagnosis, communication difficulties and contact tracing all contribute to the spread of the epidemic. The article reminds us of the right reflexes for patients and contacts in the case of confirmed or unconfirmed measles. They are important for planning vaccination of unprotected persons within 3 days and polyvalent gamma globulin for persons at risk within 6 days.
¡ Bibliographie
1Les femmes enceintes non vaccinées et sans antécédent de rougeole, les immunodéprimés,les enfants de moins de 6 mois dont la mère présente une rougeole, les enfants âgés de 6 à 11 mois non vaccinés. 2CECDC. Increase of pertussis cases in the EU/EEA. 8 May 2024. https://www.ecdc.europa.eu/en/publications-data/increase-pertussis-cases-eueea. / 2Un malade peut contaminer 15 à 20 personnes
Infections respiratoires
quel impact à long terme ?
Une hausse importante des infections respiratoires basses (IRB) pédiatriques a été observée après la levée des mesures barrière en 2021, suscitant des préoccupations quant aux conséquences de ces mesures. Afin d’évaluer leur impact à moyen terme, nous avons réalisé une analyse de séries chronologiques interrompues à partir des données ambulatoires du réseau PARI (juin 2017 à mars 2023) et des données hospitalières du PMSI (Programme de Médicalisation des Systèmes d’Information, janvier 2015 à mars 2023).
Les taux de consultations pour IRB ont fortement diminué pendant la période d’implémentation des mesures barrière et sont restés inférieurs à la tendance de base, même après leur levée.
L’incidence des hospitalisations pour IRB a connu une baisse significative durant cette période avant un rebond après la levée des mesures, dépassant la tendance de base (+12,8 %, IC à 95 % de 6,7 à 19,0). Malgré ce rebond, 31 777 (IC à 95 %, de 25 375 à 38 179) hospitalisations pour IRB pédiatriques ont été évitées depuis la mise en œuvre des mesures barrière jusqu’en 2023.
Les mesures barrière restent donc bénéfiques à moyen terme pour la prévention globale des IRB pédiatriques, à la fois en milieu ambulatoire et hospitalieret pourraient ainsi être envisagées pour réduire le fardeau des IRB pédiatriques pendant les périodes épidémiques.
Liste des auteurs : Inès Fafi, MD1,2; Zein Assad, MD1,2,3; Léa Lenglart, MD2,4; ZabaValtuille, MSc5,6; FlorentiaKaguelidou, MD, PhD5,6; Camille Aupiais, MD2,7; Aurélie Bourmaud, MD6; Alexis Rybak, MD, PhD3,8,9; Stéphane Bechet, Msc9,10; Corinne Levy, MD3,9,10; Robert Cohen, MD3,9,10; Bruno Frandji, MD10; Andreas Werner, MD9,11; François Angoulvant8; Romain Basmaci, MD, PhD2,3,12; NaïmOuldali, MD,PhD1,2,3.
Mots-clés : Infections respiratoires basses, bronchite, bronchiolite, pneumonie, mesures barrière
Infections respiratoires basses (IRB) en pédiatrie : et la pandémie de SARS-CoV-2 dans tout ça ?
Les infections respiratoires basses (IRB) sont la principale cause de décès chez les enfants de moins de 5 ans dans le monde. Elles sont également à l’origine d’une consommation importante des soins de santé1. Leur épidémiologie a fortement été influencée par les mesures barrière implémentées dans le cadre de la pandémie de SARS-CoV-2, puisqu’une baisse majeure des consultations et hospitalisations pour IRB a initialement été observée2–5. Néanmoins un rebond des hospitalisations pour IRB, dépassant les niveaux prépandémiques, a suscité d’importantes inquiétudes quant à l’impact à moyen terme des mesures barrière6–9. La résurgence de cas a-t-elle annihilée le bénéfice initial de ces mesures ? Une analyse de séries chronologiques interrompues a répondu à la question !
Population étudiée, périodes d’étude et critère de jugement
Ont été inclus tous les enfants de moins de 16 ans ayant consulté un pédiatre du réseau PARI pour une bronchiolite ou une pneumonie entre juin 2017 et mars 2023, ainsi que tous les enfants de moins de 18 ans hospitalisés pour une IRB entre janvier 2015 et mars 2023 (données du PMSI, programme de médicalisation des systèmes d’information). Une IRB était définie comme une bronchite, bronchiolite, pneumonie, ou pneumonie avec épanchement pleural (codes CIM-10 de la classification internationale des maladies).
Trois périodes d’étude ont été définies : une première précédant la mise en place des mesures barrière (janvier 2015 à mars 2020), une deuxième correspondant à la période
d’implémentation des mesures barrière (avril 2020 à mars 2021), et une troisième faisant suite à la levée des mesures barrière (avril 2021 à mars 2023).
Le critère de jugement principal était le taux mensuel de bronchiolites et de pneumonies/1000 consultations et l'incidence mensuelle des hospitalisations pour IRB/100 000 enfants.
Les variations des taux de consultations et des incidences d’hospitalisations pour IRB après l’implémentation puis la levée des mesures barrière (par rapport aux valeurs attendues sans les mesures barrière) ont été estimées à l’aide d’un modèle de régression se basant sur les tendances précédant la mise en place des mesures barrière.
Résultats
Au total, 5 425 855 consultations ambulatoires ont été incluses, avec 28 005 bronchiolites (0,5 %) et 2 831 pneumonies (0,05 %).
L’implémentation des mesures barrière en mars 2020 a été associée à une réduction des taux de consultations pour bronchiolite et pneumonie (-76,2 % et -85,8 %, respectivement, tableau 2, figure 1). Après la levée des mesures barrière, ces taux sont restés inférieurs aux tendances de base précédant la mise en place des mesures barrière, aussi bien pour les bronchiolites que pour les pneumonies (-20,7 % et -44,4 % respectivement).
Entre le 01/01/2015 et le 31/03/2023, 845,047 les hospitalisations pour IRB ont été incluses. L’implémentation des mesures barrière a été associée à une diminution significative de l’incidence des IRB (-61,7 %, IC à 95 % de -98,4 à -24,9, p = 0,0014), puis à une augmentation significative après la levée des mesures barrière, qui a dépassé la tendance de base observée avant la mise en place des mesures barrière (+ 12,8 %, IC à 95 % de 6,7 à 19,0). Plusieurs analyses de sensibilité ont confirmé ces résultats.
Nous avons estimé que 51 905 (IC à 95 % de 44 064 à 59 746) hospitalisations pour IRB ont été évitées pendant la période d’implémentation des mesures barrière, tandis que 20 128 (IC à 95 % de 18 689 à 21 567) hospitalisations excédentaires ont eu lieu après la levée des mesures barrière.
Globalement, 31 777 hospitalisations pour IRB ont été évitées en prenant en compte ces deux périodes (IC à 95 % de 25 375 à 38 179), de la mise en place des mesures barrière à fin mars 2023.
Enfin, il est important de noter qu’une diminution notable de la proportion de bronchiolites non documentées a été observée après la levée des mesures barrière (-29,4%).
IRB pédiatriques : les leçons tirées de la pandémie
Un rebond dans l’incidence des infections respiratoires basses a donc été noté après la levée des mesures barrière en avril 2021, mais plus de 31 000 hospitalisations ont malgré tout été évitées jusqu’en mars 2023.
Leur bénéfice sur les IRB pédiatriques reste toutefois à confirmer, car la réduction de l'exposition à certains agents pathogènes pourrait avoir des conséquences à plus long terme. L’intensité des épidémies récentes d’IRB à Mycoplasmapneumoniae et Bordetella pertussis pourrait en être le témoin 10, 11.
L’augmentation des hospitalisations pour bronchiolite avec détection d’un agent pathogène a été plus marquée par rapport à celle des hospitalisations globales pour bronchiolite.
Le changement de pratique avec la réalisation des tests de dépistage rapide (VRS, grippe, Covid) en cabinet et à l’hôpital est probablement responsable d’une surestimation de la résurgence des IRB par agent pathogène, par rapport à la résurgence globale des IRB, tous agents infectieux confondus.
Pre-NPI period: 1er juin 2017 au 31 mars 2020.
Figure 1. Impact des mesures barrière sur les taux mensuels de bronchiolites (N=28,005) et pneumonies (N=2,831) parmi les consultations ambulatoires en France, entre juin 2017 et mars 2023 (N=5,425,855).
NPI period: 1er avril 2020 to 31 mars 2021. NPI-lifting period: 1er avril 2021 au 31 March 2023. Abréviations : NPI, non-pharmaceutical interventions (mesures barrière).
Taux exprimé en nombre de cas pour 1 000 consultations par mois.
La ligne noire représente les données observées. La ligne bleue montre les estimations du modèle basées sur les données observées en utilisant un modèle de régression de
type quasi-Poisson. La ligne rouge en pointillés représente les valeurs attendues si les mesures barrières n'avaient pas été mises en place, en utilisant le même modèle de régression de type quasi-Poisson. Les zones bleues et rouges indiquent les intervalles de confiance à 95 %. Les lignes verticales en pointillés indiquent la mise en place et la levée des mesures barrière.
Infections respiratoires
Figure 2. Impact global des mesures barrière sur l’incidence mensuelle des hospitalisations pour infections respiratoires basses chez les enfants < 18 ans, entre janvier 2015 et mars 2023, en France (N = 671,323).
Figure 3. Impact des mesures barrière sur la proportion de A) Bronchiolites non documentées (N=241,329), et B) Pneumonies non documentées (N=162,435) chez les enfants < 18 ans hospitalisés en France entre janvier 2015 et mars 2023.
Remerciements à l’AFPA et aux investigateurs du réseau PARI.
Conclusion
Compte tenu des hospitalisations évitées et des taux de consultations pour IRB restant inférieurs aux niveaux pré-pandémiques, le recours à certaines mesures barrière pourrait être envisagé comme mesure de santé publique, notamment pendant les épidémies et/ou pour
les populations les plus vulnérables. La réduction du fardeau associé aux IRB devrait également passer par une action plus ciblée sur le VRS, grâce notamment à l’implémentation des nouvelles prophylaxies anti-VRS.
A significant increase in pediatric lower respiratory infections (LRIs) was observed after non-pharmaceutical interventions (NPI) in 2021, raising concerns about the consequences of these measures.
To assess their middle-term impact, we performed an interrupted time series analysis using outpatient data from the PARI network (June 2017 to March 2023) and hospital data from the PMSI (French Medicalization of Information Systems Program, January 2015 to March 2023).
The NPI implementation period was associated with a decreased rate of ambulatory visits for LRIs and remained below the baseline trend even after NPI lifting in April 2021.
The incidence of hospital admissions for LRIs decreased significantly during the NPI implementation period but a significant increase, that exceeded the pre-NPI baseline trend(+12.8%, 95% CI 6.7 to 19.0), was observed after NPI lifting. Despite this rebound, 31,777 (95% CI 25,375 to 38,179) hospitalizations for pediatric LRIswere avertedsince NPI implementation up to 2023.
The middle-term impact of NPI remains beneficial in preventing overall pediatric LRIs, both in outpatient and inpatient settings, and may be considered to reduce the burden of pediatric LRIs during epidemics.
Emilie Roquand Wagner, Doc Lili
S’il y a bien un sujet que les parents appréhendent d’aborder, voire essaient carrément d’éviter, avec leurs enfants, c’est bien la mort ! A la fois qui a envie d’en parler à moins d’y être confronté ? Dans un désir de protection de cette réalité fatidique, les parents aimeraient maintenir leurs enfants dans une bulle… Ce qui n’est ni possible ni souhaitable, ces questions arriveront tôt ou tard, elles sont normales, légitimes et importantes pour grandir. La mort est un sujet universel qui traverse tous les humains, du tout petit au plus vieux et qui soulève beaucoup d’émotions, parfois contradictoires, comme la peur, la fascination ou la répulsion.
Un album de littérature jeunesse peut être un médiateur intéressant pour aborder ce sujet délicat, qui par son style, sa mise en perspective, son graphisme, son univers et sa qualité artistique s’avère être un bon allié pour les parents afin d’ouvrir la discussion.
Quand les enfants, généralement vers 6 ans, réalisent ce que la mort signifie, son caractère imprévisible, naturel et irréversible, cela peut les angoisser. Ils prennent conscience que leurs grands-parents, leurs parents vont mourir un jour… et eux aussi. Et ils y seront confrontés à un moment ou à un autre, parfois plus tôt d’ailleurs, que ce soit pour la perte du chat ou le décès d’un membre de la famille, mais aussi dans les informations qu’ils reçoivent du monde actuel, où il est régulièrement question de conflits, accidents, homicides... La mort est un concept assez abstrait pour les enfants et son coté irréversible pas simple à appréhender, les albums proposent différentes mises en perspective qui peuvent répondre à leurs questions : se remémorer des belles choses et des moments précieux partagés avec la personne disparue pour dire « Au revoir Blaireau » (Susan Varley, Gallimard, 1984), partager une ultime aventure avec « Capitaine Papy » (Benji Davies, Milan, 2022), chérir la relation privilégiée partagée « Ou l’océan rencontre le ciel » (Fan Brothers, Little Urban, 2019), évoquer le doux souvenir de sa mamie comme « La caresse du papillon » (Christian Voltz, Le Rouergue, 2005) ou partager le deuil du grand-père dans « Le top trois de Théo » (Wendy Meddour et Daniel Egnéus, Little Urban, 2019)
Certains ont besoin d’explications concrètes et pragmatiques, sur les événements qui ont eu lieu comme dans « petit lapin Hoplà » (Elziebeta, Pastel, 2001) où toutes les étapes de l’accident, du décès et de l’enterrement vont se succéder, ou ce qu’il va se passer ensuite, les rituels et coutumes qui permettent de donner du sens par exemple, et organiser « Nos petits enterrements » (Ulf Nilsson et Eva Erikson, Ecole des loisirs, 2006)
Certains enfants perdent un de leurs parents et aborder ce deuil particulier peut être intensément douloureux pour
l’autre parent ou les membres de la famille. Dans une histoire, les enfants peuvent trouver des ressources, des réponses, tout en gardant une certaine distance sécurisante, symboliser les étapes du deuil par la cicatrisation de « La croute » (Charotte Mondlic et Olivier Tallec, Flammarion, 2009), voir son « Papa partout » (Emilie Chazerand et Sebastien Pelon, L’Elan vert, 2024) dont les souvenirs vont progressivement être moins douloureux avec le temps ou encore suivre « Thomas » (Martine Arpin et Claude K Dubois, édition d’Eux, 2021) qui essaie de réparer son cœur brisé. Un album aborde même de façon tout à fait sensible le décès des deux parents au travers de l’histoire d’une petite fille devenue orpheline « Depuis ce jour » (Colette Nys Mazure et Estelle Meens, Mijade, 2009)
Certains évènements familiaux peuvent sembler indicibles, comme la perte d’un enfant ou un deuil périnatal suite à une mort fœtale, et pourtant un album peut poser des mots là où les adultes n’en trouvent pas, parler de cet enfant qui n’est pas là de façon poétique, délicate et pour autant sans tabou : « Je t’aimais déjà » (Andrée-Anne Cyr et Bérengère Delaporte et, Les 400 coups, 2021) ou « Un petit frère pour toujours » (Marie-Hélène Delval et Ulises Wensell, Bayard, 2002)
Leurs questions sont normales, légitimes et il n’y a ni « bonne façon » de faire, ni de « bonne réponse », chaque parent doit y répondre simplement, sincèrement, sans tabou, sans mentir ni inventer des explications farfelues, une des réponses pouvant être d’ailleurs « je ne sais pas ». La proposition de plusieurs albums, adaptés à la maturité et la compréhension de chaque enfant, peut permettre d’offrir différentes mises en perspectives et répondre à leurs questionnements tout en privilégiant leur autonomie de choix. En effet, votre enfant peut être attiré par un album qui « lui » parle, différent de celui qui parle au parent... Chacun sa sensibilité. Et pour ne pas être soi-même submergé par ses propres émotions au moment de la lecture, toujours lire les albums proposés avant.
Les adultes doivent rester sincères, selon leurs convictions, leur culture et leur foi. Répondre patiemment à toutes les interrogations dans « Je veux pas être mort » (Isabelle Carier, Alice jeunesse, 2020) ou ramener aux jolies choses et instants précieux dans « Le goût de la vie » (Chiara Pastorini et Annick Masson, Père Castor, 2022)
Et puis les enfants appréhendent aussi cette notion par le jeu, comme pour tout, jouer pour de faux pour vivre pour de vrai. Qui n’a pas joué à faire la guerre, au cowboy et aux indiens, à « T’es pas mort ! » (Catherine Pineur, Pastel, 2022), ou à parler de l’univers « Mortel » (Emmanuelle Houdart, Les Fourmis Rouges, 2021)
Chronique DocLili
On ne protège pas les enfants en n’en parlant pas, alors autant être outillés et partager de jolies lectures pour aider à mettre des mots sur ce sujet délicat et sensible. Et dans un moment intime, complice de lecture, c’est aussi partager ses émotions, ses ressentis, ses souvenirs, ce qui est très précieux pour les enfants et les aident à grandir.
Lire un livre avec un enfant permet d’aborder des sujets difficiles et poser des mots là où on n’en trouve parfois pas…
Alors profitez-en !
Et retrouvez toutes les thématiques sur la chaine https://www.youtube.com/@doclili
Vidéos sur la mort : https://youtu.be/RWw6M6DXtPk et https://youtu.be/kppVD_RDS4I
Vidéo sur le deuil périnatal : https://youtu.be/qLuI0rIh6xU
Rejoignez moi à l’association LiJeP, Littérature Jeunesse et Parentalité : https://www.helloasso.com/associations/lijep
¡ Bibliographie
Pour recevoir chez vous les prochains numéros de