Lionel Estève, Poussières urbaines

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POUSSIÈRES URBAINES

Je pensai profiter de quelques mois de désœuvrement pour vagabonder, une sorte de pèlerinage de Kinshasa à Los Angeles, New York puis Rome, quand Laurent Jacob me proposa d’exposer à La Comète en septembre 2016. Ce qui me fut donné était un grand espace de 800 m2 sur 11 m de haut et l’opportunité d’une nouvelle manière de travailler. Cette itinérance m’imposait de travailler sans atelier, sans organisation, avec des matériaux improvisés et me poussait à produire de petites sculptures facilement transportables. De toutes petites choses dans un si grand espace, comme un jeu d’équilibre sur du vide. Cela me plaisait d’autant plus que mes toutes premières sculptures avaient été minuscules. Cette expérience ne ressemblait pas à un nouveau départ mais plutôt à un retour au commencement. Je m’en allai donc sans autre parti pris que de glaner de ville en ville aussi bien des idées, des formes que des matériaux.

A Kinshasa, je ne fis rien. Mon voyage fut trop court et, surtout, je restai abasourdi par l’énormité et le paradoxe de ce que j’y ai vu. Par la suite, en Amérique, je dois admettre qu’une partie de mon travail fut sans joie et empreinte de pessimisme. Certainement, l’influence de l’air du temps. Lors de mes promenades, je m’astreignais à être attentif aux ambiances de la ville afin de les utiliser et de les traduire. Je rentrais les poches pleines de bricoles que j’appelais assez vite des « poussières urbaines ». Des lettres puis des mots sont apparus. Il me paraissait cohérent de procéder par collage et assemblage. Des dizaines de petites sculptures faites de détritus ou de shopping à 50 cents prenaient forme. En somme, tout se passait comme prévu.

L’imprévu survint à Rome. Jamais je n’aurai imaginé pouvoir représenter une figure humaine. Au-delà de l’art figuratif : une figure humaine. Je ne savais même pas que je savais le faire  ! On avait essayé de me l’enseigner et je n’y voyais qu’exploits techniques liés à la ressemblance, confrontations à l’histoire de l’art et à l’exemple des anciens. J’y suis venu par affection, tendresse et camaraderie en dessinant des petits personnages sur des papiers à cigarette comme pour confirmer la fugacité de notre rencontre. Je m’escrimais aussi avec une aiguille et du fil à coudre pour fabriquer des petites poupées et des scénettes quotidiennes. Je ne pus éviter de me poser les questions si peu originales sur l’héroïsme, le déterminisme et la destinée… Tous ces bruits qui accompagnent la représentation humaine. Toutefois, je n’ai jamais souhaité prendre du recul ou de la hauteur ; je m’incluais dans ces petits constats sur la condition humaine. J’aurais aimé susciter un sentiment de fraternité.

Petit à petit, je m’aperçois qu’involontairement, même par accident, c’est le portrait de la monstruosité de la ville que j’ai fait, de ce qui la compose, de l’attrait pour la diversité de sa foule à l’effroi de son anonymat. Je ne souhaite tirer aucune conclusion de ces périples, juste montrer ces reliques qui peuvent se lire comme un journal.

I thought I would enjoy a few months of idleness to travel, a kind of pilgrimage from Kinshasa to Los Angeles, New York then Rome, when Laurent Jacob invited me to exhibit at La Comète in September 2016. I was given the opportunity to work in a large space (  800 square meters, 11 meters high ) in a revolutionary way. This journey meant that I had to work without a studio, without organization, with ad hoc materials and pushed me to produce small sculptures that could be easily transportable. Such tiny things in such a large space, just like a balancing act on an empty space. I enjoyed this even more because my very first sculptures were tiny as well. This experience was not like a fresh start but more like a return to the roots. I then left with the firm intention to gather ideas, shapes and materials from city to city.

In Kinshasa, I did nothing. My journey was too short and above all, I remained stunned by the enormity and the paradox of what I saw there. Afterwards, in the United States, I must admit that part of my work was difficult and imbued with pessimism. Most certainly the influence of modern times. During my strolls, I forced myself to be attentive to the atmospheres of the city to use them and render them. I returned with a pocketful of trifles that I quickly named “ poussières urbaines ”. Letters and then words appeared. I believed it would be coherent to apply collage and assembling. Dozens of small sculptures made of scraps and jetsam took shape. In short, everything was going as planned.

The unexpected occurred in Rome. I would never have imagined that I could represent a human figure. Beyond figurative art : a human figure. I did not even know that I was able to do it ! One had tried to teach it to me and I connected it only to technical feats linked to likeness, to similarities with art history and to the example of the ancients. I eventually came to it by affection, tenderness and camaraderie while drawing small figures on cigarette papers to confirm the fleeting nature of our encounter. I also wore myself out making small dolls and representing daily scenes with a needle and sewing thread. I could not avoid asking myself the ordinary questions about heroism, determinism and destiny… All these noises that go with human representation. However, I never wanted to step back and take a more general overview ; I included myself in these small observations on human condition. I would have loved to arouse a feeling of brotherhood.

Little by little, I realized that I accidentally portrayed the monstrosity of the city, its components, from the attraction for the diversity of its crowd to the dread of its anonymity. I do not want to draw any conclusion from this journey  ; I only want to show these relics that can be read as a diary.

POUSSIÈRES URBAINES & SCULPTURES PLATES

La comète — Du 24.09 au 29.10.2016

JARDIN

PIERRE HENRION Comme souvent dans le cas d’œuvres créées pour un lieu déterminé à l’avance, les contraintes de ce dernier constituent une source d’information primordiale. Peux-tu expliquer en quoi les spécificités de La Comète ont compté dans le développement de Poussières urbaines ?

LIONEL ESTÈVE

La Comète est en effet un espace très particulier, exceptionnel en Belgique. Il se compose principalement d’une salle de 800 m2 sans cloison, sans encombrement sinon deux colonnes. Le plafond est à 11 m. Ces dispositions incitent à présenter des œuvres monumentales. Quand Laurent Jacob m’a invité à y exposer, j’ai d’emblée eu l’envie de prendre un contre-pied et de présenter des travaux minuscules de telle façon que le visiteur éprouve d’emblée une forme de vacuité puis découvre une multitude au fur et à mesure qu’il parcoure l’installation. Poussières urbaines était ainsi constituée de plusieurs centaines de petites pièces suspendues avec du fil transparent et de dessins sur papier à cigarette épinglés au mur. Je n’ai pas voulu définir davantage le protocole d’accrochage : il n’y avait pas de système de présentation, pas d’alignement. Les sculptures arrivaient à une hauteur par rapport au sol variant de 80 cm à 3,5 m, de façon aléatoire. Il y avait comme un phénomène de contraction : des éléments infimes qui constituent une exposition avec une énorme emprise spatiale.

PH Tu présentais également un jardin.

LE Il y avait deux installations. Mais, elles formaient un ensemble. Poussières urbaines porte sur la ville, sur son énergie, son chaos, ses cheminements et ses turbulences. Et, dans toutes les villes, il y a des espaces verts. Ils sont là comme s’ils étaient nécessaires. Pour mettre en place ce jardin de fleurs sur la mezzanine qui surplombe la grande salle de La Comète, j’ai employé des matériaux pauvres et colorés. Ceci constituait un répondant à Poussières urbaines à la manière dont un jardin peut entrer en dialogue avec une ville.

PH Ces travaux reprennent des qualités récurrentes de tes démarches : petits formats comme les familles d’œuvres apparues à la fin des années 1990, matériaux trouvés, savoir-faire manuel, production méticuleuse voire obsédante, suspension des pièces, économie des moyens… J’avais l’impression de lire l’exposition comme une rétrospective de ton vocabulaire plastique. Es-tu d’accord avec cette analyse ?

LE Le s caractéristiques que tu viens de donner ont en effet beaucoup d’importance dans mes recherches sauf quand tu parles d’économie des moyens. Poussières urbaines n’est pas minimale. Il n’y a pas d’économie des moyens. Au contraire, j’ai travaillé sur l’accumulation d’éléments et sur la débauche de gestes. C’est aussi une attitude que j’actualise : me présenter sur le site d’exposition avec des pièces réalisées et d’autres à faire sur place. Je voudrais également souligner que le format réduit

des sculptures est lié au caractère itinérant de leur fabrication. J’ai effectué un voyage qui m’a amené de Kinshasa, à New York, Los Angeles et puis Rome surtout, où j’ai séjourné deux mois. Cela m’imposait de créer des sculptures facilement transportables, dans mes bagages tout simplement. Je les ai fabriquées avec des matériaux trouvés sur place sans être à même de précisément déterminer à l’avance ce que j’aillais faire. Cela s’apparente à une forme de collecte dans une itinérance urbaine. A New York, les pièces ont à voir avec le langage comme dans les enseignes lumineuses. A Rome, je me suis davantage centré sur le corps humain et la figuration. J’ai eu la même démarche quand j’ai commencé à travailler à Liège où j’ai développé le jardin et les sculptures plates. J’aime aussi l’idée que ce mode de fabrication « en voyage » puisse engendrer un nomadisme accru de l’installation avec des protocoles d’accrochage chaque fois renouvelés en fonction des lieux. J’ai expérimenté ce mode de production alors que j’étais invité au PS1 à New York, en 1998. C’était aussi intéressant de voir ce que je pouvais produire 20 ans plus tard en suivant la même démarche.

PH Il y avait par ailleurs un caractère atypique dans ta proposition pour La Comète : la plupart des pièces étaient figuratives.

LE Quand j’étais étudiant, la figuration était considérée comme hautement ringarde. On nous inculquait qu’il s’agissait d’un choix académique et sclérosé. Pour moi, elle ne pouvait receler que très peu d’âme. Je la ressentais en outre comme une confrontation stérile avec les grands

maîtres. Et d’une façon générale, mon travail compte très peu de figurations. Mais ce n’est pas absolu. Je ne m’interdis rien a priori.

PH Et ici …

LE Mon séjour à Rome doit être pris en considération. La ville est peuplée d’œuvres d’art, souvent attachées à la figure humaine dont les modalités de représentation me sont apparues chaleureuses, enthousiastes et marquées par une forme de confiance. Toutes ces mosaïques, ces sculptures... j’y ai éprouvé de l’affection. Je me suis dès lors également attaché à la figure humaine, avec mes moyens. Cela me semblait en outre pertinent par rapport à mon intention d’exploiter le thème de la ville. Il y a tous ces « visages qu’on croise sans vraiment les regarder ». Cet anonymat n’empêche pas les habitants de former un ensemble, une communauté, une fraternité. Je dois aussi te dire que j’ai travaillé sur Poussières urbaines après les attentats de Bruxelles, en mars 2016. Un tel acte de terrorisme constitue pour moi une attaque par rapport à la foule, par rapport à cet anonymat et il me semblait important d’aborder le sujet.

PH Pour le carton d’invitation, tu as choisi une photographie mystérieuse - comme souvent dans tes cartons d’invitation - puisque le lien entre la jeune fille qui y est représentée et l’exposition n’est pas explicite.

LE A Rome, le deuxième jour après mon arrivée, j’ai croisé cette jeune fille. Installée sur un trottoir, Deborah fabriquait des porte-clés au crochet et les vendait. J’avais passé

la matinée sur une sculpture en fil à coudre qui représentait un homme. Je lui ai dit qu’elle et moi avions le même type d’activité. Elle était au départ dubitative et même effrayée. Je suis allé chercher ma petite sculpture. Comme elle semblait enthousiaste, je lui ai proposé de m’assister. Elle a accepté. C’était surprenant de collaborer avec une personne au mode de vie très différent du mien : Deborah squattait à droite, à gauche ; elle n’avait pas de domicile fixe, restait difficilement joignable. C’était enrichissant de confronter nos points de vue. Je crois que, pour l’un et l’autre, l’expérience a été aussi inattendue que féconde.

PH Poussières urbaines me semble engager des réflexions sur la perception des œuvres. Peux-tu me parler de cette question ?

LE J’aime l’idée d’une installation où le visiteur ne puisse pas avoir la certitude de tout voir. Je l’ai expérimentée lors de ma première exposition à la Galerie Baronian, à Bruxelles, en 1999. Cela a à voir avec le paysage, la nature où il y a une profusion qui interdit de consommer l’espace de façon absolue.

PH Et en ce qui concerne le rapport au corps ?

LE J’ai comparé la déambulation dans Poussières urbaines à une plongée sous-marine. La multitude d’éléments suspendus rendait l’espace très palpable. Le visiteur devait mobiliser son corps et pouvait y acquérir une conscience accrue de sa présence. Il devait être attentif, circuler lentement avec le sentiment de ne

pas être à même de cerner l’ensemble par le regard. De cette manière, les corps des autres visiteurs devenaient parties intégrantes de la proposition. Cela tenait de ce type d’expérience qu’il faut vivre réellement, proche de celle que la musique peut fournir, et qui reste difficilement transmissible.

PH Considères-tu que son sens soit accessible à tous ?

LE Il ne faut pas se méprendre sur ce point. Ce n’est pas un souhait a priori. Mais que certaines de mes œuvres puissent parler au plus grand nombre est une bonne surprise pour moi.

PH Il y avait à La Comète une part d’émerveillement. On revient aussi sur la question du beau et de l’ornemental. Tu déclares d’ailleurs : « Mon travail met en avant quelque chose de visuel de l’ordre du plaisir et qui a à voir avec une recherche de la beauté. » Tu parles pourtant ici des réflexions sur l’héroïsme du quotidien, le déterminisme, la destinée… « tous ces bruits qui accompagnent la représentation humaine ». Peux-tu développer cela ?

LE Je n’ai jamais conçu mes recherches comme monolithiques. Je ne me suis jamais interdit de me contredire, même si il y a des éléments qui persistent. Je pense que Poussières urbaines a un caractère plus sociétal parce que je l’ai produite dans une situation particulière : les attentats à Bruxelles, ne pas être chez moi, voyager, répondre à un quotidien qui n’est pas le mien. J’étais dans une complexité différente. Il y a un rapport avec l’anonymat, le fouillis mais c’était plus affectif que réflexif.

PH On peut revenir sur la question du dessin et de la sculpture. Quand tu soulignes notamment que tes dessins sont des dessins de sculpteur. On pourrait comprendre tes sculptures plates comme des graphiques dans l’espace. Après tout le décloisonnement des disciplines artistiques, je m’étonne que tu reviennes souvent sur cette question.

LE Quand je souligne que je suis sculpteur, c’est surtout pour dire que je ne suis pas peintre même si mon travail a un rapport à la couleur. Je sais que je ne fais pas de peinture. Un peintre entretient une relation avec l’histoire de la peinture. Il met en place un dialogue avec des facteurs très définis : une image, un format, une matière... Il y a moins de spontanéité que dans le dessin ou la sculpture. Il y a aussi une mise en œuvre spécifique. D’un point de vue plus général, un sculpteur ne dit pas quelque chose, il fait. Une sculpture « est » ; elle ne représente pas.

Bruxelles, le 7 février 2018

Ces quatre cents sculptures et dessins ont été réalisés à Kinshasa, Los Angeles, New York, Rome, Liège en 2016.

PIERRE HENRION As is often th e case in works created for a place determined in advance, the constraints of this place constitute a valuable source of information. Could you explain how the specificities of La Comète impacted the development of Poussières Urbaines ?

LIONEL ESTÈVE

La Comète is indeed a very particular space, outstanding in Belgium. It is mainly composed of a 800-square-meter room without partition, without cluttering but two columns. The ceiling peaks at 11 meters. This layout encourages the presentation of monumental works. When Laurent Jacob invited me to exhibit there, I directly had the wish to do the complete opposite and to present tiny works so that the visitor immediately feels a kind of vacuity and discovers a multitude while going all over the room. Poussières Urbaines was thus made of hundreds of small pieces hung with invisible thread and drawings on cigarette paper pinned on the wall. I did not want to define more accurately the hanging process: there was no display system, no alignment. The sculptures were randomly between 80 cm and 3,5 m high. There was a sort of shrinking phenomenon : tiny elements forming an exhibition with a huge spatial impact.

PH You also presented a garden.

LE There were two installations. However, they formed a coherent whole. Poussières Urbaines focuses on the city, its energy, its chaos, its movements and its turbulences. And in every city, there are green spaces. They are there as they were necessary. To set up this flower garden on the mezzanine that overhangs the large room of La Comète, I used poor and colorful materials. This represented an answer to Poussières Urbaines as if a garden could enter into dialogue with a city.

PH These works involve recurring qualities of your approach: small formats like the series of works created in the late 90’s, random materials, manual know-how, meticulous and even obsessive production, hanging of the pieces, economy of means… I had the feeling I was understanding the exhibition as a retrospective of your plastic vocabulary. Do you agree with this analysis ?

LE The characteristics that you just tackled are indeed very important in my approach except when you mention the economy of means. Poussières Urbaines is not minimalist. There is no economy of means. On the contrary, I focused my work on the accumulation of elements and gestures. It is also an attitude that I bring up to date : presenting myself on the exhibition site with pieces that are already created and others that would be designed on the site. I would also like to highlight that the small format of the sculptures is linked to the itinerant nature of their fabrication. I travelled from Kinshasa to New York,

Los Angeles and then especially Rome where I spent two months. This journey forced me to create sculptures that could be easily transportable, simply in my luggage. I created them with materials that I found there without being able to determine precisely upfront what I was going to do with them. This is similar to a sort of collection during an urban journey. In New York, the pieces are related to language like on the neon signs. In Rome, I particularly focused on the human body and the figuration. I had the same approach as when I started to work in Liege where I developed the garden and the flat sculptures. I also like the idea that this “ travelling ” creation method could lead to an increased nomadism of the installation with hanging techniques that were different according to the places. I experimented this creation method when I was invited to the PS1 in New York in 1998. It was also interesting to see what I was able to create 20 years later following the same approach.

PH Moreover your proposal for La Comète had an atypical nature : most of the pieces were figurative.

LE When I was a student, figuration was perceived as very old-fashioned. We were taught that it was an academic and fossilized choice. For me, it could only involve a very small part of my soul. I perceived it as a futile confrontation with the great masters. And overall, my work includes very few figurations. It is not however uncompromising. At first glance, I refrain from nothing.

LE My trip to Rome must be taken into consideration. The city is filled with works of art that are often related to the human figure whose representation standards seemed welcoming, enthusiastic and marked by a sort of confidence. All these mosaics, these sculptures… I felt affection for them. From then on, I became attached to the human figure, in my very own way. Moreover it seemed coherent in relation to my intention of tackling the topic of the city. There are all these “ faces that we see without really looking at them ”. This anonymity does not prevent the inhabitants from forming a whole, a community, a brotherhood. I also have to tell you that I worked on Poussières Urbaines after the Brussels bombings in March 2016. Such an act of terrorism represents for me an attack on the crowd, in relation to that anonymity and I felt it was important to tackle the topic.

PH For the invitation card, you chose a mysterious photography - as often for your invitation cards - because the connection between the young girl on the card and the exhibition is not explicit.

LE In Rome, on the second day after my arrival, I saw this young girl. Deborah was crocheting key rings on the sidewalk to sell them. I had spent the morning on a sculpture made of sewing thread that represented a man. I told her that we both had the same type of activity. She first was dubious and even scared. I showed her my small sculpture. As she looked enthusiastic, I offered her to assist

me. She accepted. It was surprising to collaborate with a person whose way of life was completely different from mine : Deborah was squatting here and there ; she was homeless and hardly reachable. It was so enriching to share our points of view. I think that the experience was as unexpected as prolific for each of us.

PH Poussières Urbaines seems to involve reflections on the perception of the works. Could you tell me more about this question ?

LE I like the idea of an installation where the visitor can’t be sure to see everything. I experienced it during my first exhibition at the Galerie Baronian in Brussels in 1999. This is related to the landscape, the nature where there is an abundance that does not allow the artist to occupy the entire space.

PH And what about the relation to the body ?

LE I compared the stroll in Poussières Urbaines to scuba diving. The multitude of hanging elements made the space very palpable. The visitor had to mobilize his body and could gain a greater awareness of his presence. He had to be attentive, walk around slowly with the feeling of not being able to define the whole while looking at it. In this way, the bodies of the other visitors were an integral part of the proposal. That was the purpose of this type of experience that needs to be really experienced, that is close to what music can offer, and that remains barely communicable.

PH Do you think that its meaning could be accessible to all ?

LE This point should not be misunderstood. At first glance, it is not my wish but I would be positively surprised to see that some of my works could be understood by the largest number of people.

PH At La Comète, there was a part of wonder. We also come back to the topics of beauty and ornamental. You incidentally declare: “ My work highlights something visual related to pleasure and the search for beauty. ” Yet you mention here the reflections on daily heroism, determinism, destiny… “ All these noises that go with human representation ”. Could you elaborate on this ?

LE I have never perceived my research as being monolithic. I have never refrained from contradicting myself, even if there are elements that remain. I think that Poussières Urbaines has a more societal nature because I created it in special circumstances : Brussels bombings, being away from home, travelling, experiencing a different everyday life. I was in a different sort of complexity. There is a connection to anonymity and jumble but it was more emotional than reflexive.

PH We can come back to the drawing and the sculpture. In particular when you emphasize that your drawings are sculptor’s drawings. We could perceive your flat sculptures as graphs in the space. After the breakdown of the barriers between artistic disciplines, I’m surprised that you regularly come back to this topic.

LE When I highlight that I’m a sculptor, it is mainly to say that I’m not a painter even though my work is related to painting. I know that I’m not painting. A painter is connected to the history of painting. He establishes a dialogue with very definite factors : an image, a format, a material… There is less spontaneity than in the sphere of drawing or sculpture. There is also a specific implementation. From a more general point of view, a sculptor does not say something, he creates it. A sculpture “ is ” ; it does not represent anything.

Brussels, February 7th 2018

These four hundred sculptures were produced in Kinshasa, Los Angeles, New York, Rome and Liège in 2016.

Lieu : La Comète (Espace 251 Nord)

Production : Espace 251 Nord

Commissariat : Laurent Jacob

Chargé de projets : Olivier Robichon

Assistantes de l’artiste : Maëlle Delaplanche, Valentina Greco Kenis, Alessandra Rossi, Debora Sardano

Stagiaire : Robin Lachal

Régisseur : Ibrahim Ali Hassan

Assistants pour le montage et la production : Simon Defosse, Pierre Haulotte, Tiziano Lavoratornovi, Macha Lazarevitch

Médiation : Thibaut D’Hont, Julie Farina, Pauline Salinas, Cécile Sacino

Avec le soutien du Service culturel de l’Ambassade de France en Belgique, de la Province de Liège, de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Remerciements : Galerie Albert Baronian, Georges Uhoda.

Avec la collaboration de La Comète.

Un remerciement spécial pour Christine DuchironBrachot.

Espace 251 Nord

Rue Vivegnis, 251, B-4000 Liège

00 32 4 227 10 95 info@e2n.be www.e2n.be

Conception : Lionel Estève et Laurent Jacob

Textes : Lionel Estève et Pierre Henrion

Assistante de l’artiste : Sofia Chalaguina

Photographies : Isabelle Arthuis, Lionel Estève, Alain

Janssens

Traduction : Gérôme Henrion

Editeurs : Espace 251 Nord / Lionel Estève Graphisme et suivi éditorial : NNstudio, Liège

Typographie : Spectral

Impression : Snel, Vottem

Remerciements : Galerie Albert Baronian, Gérôme et Emile Henrion.

Cet ouvrage ne peut être reproduit, même partiellement, par quelque moyen que ce soit, sans l’autorisation de l’éditeur.

ISBN : 978-2-9601301-2-6

Dépôt légal : D/2018/9601301/2

Poussières urbaines & sculptures plates Commissariat / Curator : Laurent Jacob 24.09 / 29.10.2016 — La Comète Espace 251 Nord, Liège

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