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ATTENTION, L’ITINÉRAIRE IDÉAL N’EST PAS L’ITINÉRAIRE PARFAIT.

RECHERCHE GUIDES POUR NON-VOYANTS

Le témoignage de Corinne, animatrice et présidente d’une association labellisée Rando Santé, qui accueille des non-voyants depuis quinze ans. Nos malvoyants sont extrêmement demandeurs de randonnée, au point d’être parmi les plus assidus de notre club. Ils commencent généralement par des sorties de distance standard (12 km) à une vitesse normale de 4 km/h. Avec l’âge, ils se tournent vers nos randos « cool » de 8 km, puis vers notre offre Rando Santé de 5 km. Nous les accueillons avec grand plaisir mais la limitation de leur nombre est nécessaire car cela nous demande des efforts supplémentaires : il faut aller les chercher chez eux pour les amener aux départs des itinéraires, puis les guider pendant toute la sortie. C’est parfois la même personne qui voiture et guide, parfois non. Ces pratiquants dépendent de leur guide à qui ils se fient totalement : ils sont leurs yeux. Cet accompagnement ne s’improvise pas. Il faut être en bonne santé et suffisamment costaud pour prévenir une chute éventuelle et tenir l’accrochage du non-voyant soit au sac à dos, soit au bras. Le guide doit rester très attentif au terrain, éviter les branches et les racines, sans noyer son partenaire d’informations superflues car celui-ci perçoit très bien son comportement par l’accrochage et s’y conforme spontanément. Enfin, le plaisir de converser et de guider en même temps est nécessaire pour s’impliquer durablement. La bienveillance des guides est à ménager, même si nos pratiquants non voyants sont des gens joyeux et de bonne compagnie. Pour éviter de lasser les binômes (la conversation est essentielle), nous essayons d’avoir au moins deux guides qui se relaient à mi-chemin. Pour alléger leur tension d’attention, nous choisissons bien les parcours (surtout sans dévers) mais sans en faire des déambulations inintéressantes parce que trop lisses ; et nous imposons un bâton de marche télescopique à nos malvoyants. En revanche, nous ne voulons pas de personnes avec des bâtons à leurs côtés, car ils risquent de se prendre les pieds dedans et de chuter, voire d’entraîner leur guide avec eux si celui-ci n’a pas le temps de réagir adéquatement. Nous avons formé nos guides sur le terrain. Pour aller plus loin, nous envisageons un stage dans une école pour nonvoyants. Avons-nous des conjoints de malvoyants pour guides ? Non, nous voulons qu’ils profitent de la randonnée et se détendent grâce au relais pris par le guide.

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Grâce au guide, la personne malvoyante esquive un obstacle en mouvement (chien, cycliste, branche d’arbre rabattue par un marcheur qui précède) et anticipe les accidents de terrain (pierres, ornières, trous). En outre, détail sanitaire d’importance croissante, l’accompagnant/guide peut dépister et retirer les tiques visibles accrochées à la peau, même si le toucher repère leur présence (souvent sous la douche à domicile).

Audition Limit E Ou Absente

Difficile de savoir combien de personnes sont sourdes ou malentendantes. C’est une chose que l’on cache infiniment plus qu’un trouble visuel. Le sourd se retranche d’une société avec laquelle il ne peut plus échanger faute d’entendre les conversations, base de la sociabilité. Ce handicap le plus souvent associé à la sénescence (presbyacousie) l’isole rapidement dans un monde intérieur très clos. Cela accélère le déclin cognitif (aboutissant à la démence) chez les personnes non appareillées. Si la perte auditive est un péril pour le cerveau, encore faut-il oser en parler pour la compenser. La consultation du médecin ORL est indispensable, avec exploration du déficit auditif. La compensation optimale par prothèses en dépend ; il faut appareiller au moins l’oreille déficitaire s’il y en a une et les deux si nécessaire. L’accès à ces dispositifs médicaux s’est beaucoup amélioré depuis la réforme du 100 % santé qui ne laisse plus de reste à charge pour les produits de classe I. Cela dit, les prothèses, quelles que soient leur classe et leurs performances, n’ont pas la subtilité du cerveau. En outre, elles consomment des piles qu’il faut toujours avoir sur soi pour ne pas tomber en panne. Enfin, ne minimisez pas le déclin cognitif lié à une baisse ou à une absence de stimulation auditive qu’on a tardé à compenser. C’est un risque supplémentaire en randonnée, quand il faut être réactif et pertinent dans ses décisions. Le ou les accompagnants restent donc indispensables. Ne marchez pas seul. Parce que l’audition est le sens le plus performant pour détecter les dangers dans l’espace (360° - toutes les directions). Pour l’animateur et l’accompagnant, la surveillance s’exerce particulièrement sur les consignes de traversées de routes et les obstacles en mouvement (animaux, autres usagers du sentier dont les cyclistes et les cavaliers). Faute de les entendre venir, surtout par derrière, le risque de collision est plus grand. Situation aggravée quand il y a du vent, des conversations en groupe (bruit de fond noyant les bruits signifiants). Enfin, mal ou non appareillés, les sourds et malentendants ne participent plus aux échanges, se renfrognent et perdent le bénéfice de la sortie : incitez-les à revenir dans l’espace social des sorties en groupe. Une dernière considération triviale : les bouchons de cérumen sont une cause facilement résorbable de surdité, à retirer plutôt chez le médecin.

Anosmie Temporaire Qui Dure

La COVID-19 provoque fréquemment des troubles de l’odorat (anosmie) plus ou moins prononcés. La rééducation accélère le retour à un odorat normal. Les sorties en pleine nature en font partie si l’on se focalise sur les végétaux qui distillent de fortes huiles essentielles. C’est d’ailleurs un thème de randonnée très apprécié de tout le monde, dont les effets sont biologiquement profonds : autant de plaisir et de sérénité souhaitables à des personnes rendues moroses par le fait de vivre dans un monde sans odeur ni saveur.

Troubles Du Toucher Ind Sirables

Aussi surprenant que cela paraisse, il faut être attentif lorsqu’on accompagne les personnes défaillantes du toucher. De nombreux traitements contre le cancer altèrent plus ou moins durablement les fibres nerveuses des différents récepteurs de la peau (toucher fin, chaud/froid, pression). C’est un handicap de perception de l’environnement qui occasionne des blessures évitables. Le port des chaussures de marche aggrave parfois les difficultés de perception du sol et de sa texture, ainsi que des pieds eux-mêmes : les ampoules et les plaies passent inaperçues pendant un temps toujours trop long. La préhension des objets devient malhabile. Tout cela est également vrai pour les personnes avec une atteinte nerveuse diabétique, dont le nombre augmente constamment. Une surveillance attentive et serrée s’impose avant, pendant et après la sortie. ✱

CONDUITE AUTOMOBILE AUSSI CONCERNÉE !

Le handicap sensoriel constitue une cause d’incompatibilité à la conduite automobile que les randonneurs doivent respecter. L’arrêté du 28 mars 2022 a mis à jour les limites du permis de conduire à partir de son article 1 : la conduite d’un véhicule terrestre à moteur requiert une aptitude physique, cognitive et sensorielle. L’aptitude sensorielle est précisée dans les annexes pour les conducteurs hors et en activité professionnelle. En conduite de loisir, on trouve des motifs d’incompatibilité définitive pour les troubles de la vision, alors qu’il n’y en a pas lors de troubles auditifs sans vertiges : la décision relève de l’expertise ORL. Cela surprend quand on sait l’importance de l’évaluation sonore de l’état du véhicule (ronronnement du moteur, bruit suspect) et des périls extérieurs (arrivée brutale d’un véhicule à vitesse considérable, orage) dans un rayon de 360° autour de soi… En conséquence, comme on ne démarre que rarement une randonnée à la porte de chez soi, un déficit incompatible avec la sécurité du trajet automobile jusqu’au départ de la sortie rend indispensable un accompagnant apte à la conduite, en sus de l’aide lors de la randonnée elle-même.

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