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initiateur du projet textes orfèvrerie sculptures sur bois photos et mise en page
Pitt Brandenburger Marie Anne Lorgé Birgit Maringer Pitt Brandenburger Luc Ewen
reliure
Edy Willems
papier
Sabine Thornau
objets feutrés photos portraits , - hambre des métiers
Carine
Mertes
Victor Beusch Tom Wirion
CHAMBRE
DES METIERS MIN ____•Luxembourg
Pitt Brandenburger
Dans « Le baron perché », le roman et conte philosophique d'Italo Calvino, le jeune Côme n'a besoin que d'un arbre, l'Yeuse (ou Chêne vert), pour avoir un royaume. Par analogie, l'oeuvre du sculpteur Pitt Brandenburger est du même bois philosophique, poétique aussi, et tout autant symbolique qu'allégorique. Mais si l'arbre est effectivement un royaume, où terre et ciel complotent, Pitt Brandenburger ne privilégie pas une seule espèce, loin s'en faut : c'est avec toutes les essences qu'il entre en communion, faisant du bois une religion. Tous ses travaux (sculptures, dessins, herbiers et autres recherches botaniques ou taxinomiques) convergent en un langage universel, qui questionne le désir, la peur, la mort, le temps. Le projet de Pitt Brandenburger, c'est de percer les secrets (de communication, d'organisation, d'entraide) de ces êtres immobileis, éminemment sensibles et bavards, que sont les arbres pour réaliser une sorte de fresque du vivant, en tout cas, un choc de la beauté partagée en miroir par l'architecture végétale et la condition humaine, par les arbres (le noyer d'ici ou le baobab d'ailleurs) et les hommes, avec leurs croyances, leurs savoir-faire aussi, sans clivage.
En fait, c'est une fois au sol, terrassés par l'âge ou la cognée, que les tilleuls, frênes, érables, robiniers ou faux-acacias, les fruitiers et autres Fae
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(d'où le titre
du projet) parlent à l'oreille de l'artiste. Et la conversation est intime. Comme l'est une prière. Avec son sens de l'observation, son goût pour l'approche scientifique — sans bouder l'ambiguïté, ni l'anthropomorphisme -, sa fascination pour le mystère, la dimension métaphysique, ésotérique aussi, le sculpteur Brandenburger bouture les mythes, les légendes, les nombres « sacrés » ou « chiffres magiques » - le 3, le 7 et le 21 — pour faire naître des formes d'une complexe sensualité, autant de demeures de l'alliance de la lumière et des ténèbres, autrement dit: des tabernacles. Chaque forme - sentinelle oblongue, guerrier fuselé - recèle des objets - pièces d'orfèvrerie, de ferronnerie ou de maroquinerie -, comme tout gardien visible de cette quête précieuse qu'est l'invisible.
Par sa charge humaniste, sa spiritualité, sa façon de concevoir une communauté de corps et d'esprit - associant création artistique, métiers d'art et essences -,
/cite 7;ees a l'envergure d'un projet de vie. Du reste, chemin faisant, à chaque fois qu'un arbre tombé intègre le projet, Pitt Brandenburger prévoit d'installer un macaron — un objet circulaire, plat et en bronze — dans le trou, à l'endroit même où l'arbre est tombé. Sachant que sur chaque macaron figure un logo qui identifie le projet. Au final, et c'est là aussi que réside l'utopie, ou la folie douce de l'aventure, faire un relevé de tous les macarons permettrait de réaliser une cartographie rare, celle des êtres connectés. Marie Anne Lorgé
Fallen Trees Quoi, comment, pourquoi et pour qui? Parce qu'il parle de l'arbre, être sensible, millénaire trait d'union entre le ciel et la terre, le projet
irae Zes , intimement lié à l'esprit du vivant, propose de
transformer notre regard, d'inciter à la contemplation ou, déjà, de prendre son temps. Ce qui, inévitablement, suscite une autre façon de penser, liée à l'émerveillement, à une sérénité retrouvée, entraînant naturellement une autre façon d'agir, motivée non par le profit mais par le respect. Maintenant et pour demain. Ethique autant qu'esthétique,
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est un projet évolutif, interactif,
fédérateur (aussi humainement qu'artistiquement) et nomade. Explications.
La sculpture, sa réalité physique et son symbole métaphysique Donc, il y a la communauté des arbres, les feuillus surtout, les conifères aussi. Et bien sûr, il y a le sculpteur, un complice attentif, un créateur aussi singulier qu'exigeant. Qui fait naître du bois des figures anthropomorphes. Ces sculptures, chacune emblématique d'une espèce précise - le sycomore incarnant les 400 sortes possibles d'érables, par exemple,
ou le chêne représentant une vaste famille -, ces sculptures, donc, sont toutes traitées comme des gisants, autrement dit, elles sont couchées. Afin de combiner les dimensions physique et métaphysique, elles sont ainsi couchées dans une sorte de sarcophage, lequel, dans l'Egypte ancienne, signifiait «maître de la vie», sa forme symbolisant une barque, ou le passage idéal vers l'au-delà. Les matières et la communauté des métiers d'art Le bois, matière noble, n'entre pas seul en scène. Sont incorporés d'autres matériaux: le bronze, l'acier, le cuivre, les métaux précieux (argent, or ou autres pierres), la porcelaine, la terre glaise ou le cuir. De sorte que chaque sculpture fait appel à d'autres savoir-faire, lesquels nécessitent l'intervention de différents artisans d'art,
sachant que pour chacun, il s'agit non pas de valoriser son propre métier mais de réaliser une oeuvre commune, ce qui suppose de réfléchir ensemble, avant et pendant la création, aux solutions esthétiques et techniques.
La vie des formes Chaque sculpture n'est pas un bloc flou ou anonyme. C'est de l'observation des éléments naturels que doivent naître diverses formes insufflant à la sculpture son «humanité». C'est ainsi qu'une noix ouverte peut suggérer une tête ou un casque, ou que les samares, les fruits secs «ailés» du sycomore, peuvent représenter la partie abdominale de la figurine, ou encore qu'une aiguille d'épicéa vue au microscope peut inspirer la coupe transversale d'une sculpture. En trois dimensions mais aussi en deux: plans et dessins En amont, tous les éléments naturels que sont les feuilles, fleurs, fruits et autres pollens, ceux-là qui président à la naissance de la sculpture, sont reproduits en détail, picturalement ou à l'encre, sinon au crayon, sur une vaste planche botanique. Outre la description scientifique et esthétique, la planche représente en même temps comment tous les détails botaniques sont repris sculpturalement dans la figurine. En fait, la planche est un écosystème à elle seule. On y voit, par le dessin, les hôtes
typiques de l'érable ou du chêne, à savoir: les insectes et les parasites, les oiseaux aussi. Parallèlement, d'autres plans se penchent sur la seconde vie de l'arbre, sa transformation, son utilisation dérivée que ce soit dans la fabrication de meubles, de manches d'outils, de prothèses. L'atout non négligeable du dessin, c'est que, exempt de textes et de traductions, il est accessible à tous. Non seulement ça élargit les publics, mais ça permet une
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itinérance du projet. Projet itinérant
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Visualisé par le dessin, « Fallen Trees » peut mieux voyager. On peut ainsi imaginer que des artisans africains, par exemple, contribuent au projet en ajoutant dans le même esprit une sculpture accompagnée d'une planche botanique idoine. Conséquemment, de l'Europe à l'Afrique, les savoirs se transmettent et s'enrichissent mutuellement. A l'image de l'arbre, le voyage peut se ramifier et, dès lors, rien n'empêche l'itinéraire de transiter aussi par... l'Asie ou la Norvège. Au final, d'un petit projet local naît un projet mondial, source d'un échange culturel magnifique.
Les publics Puisqu'il charrie le spirituel, les symboles, les coutumes tombées dans l'oubli, les croyances anciennes liées à l'arbre, ici et ailleurs, le projet
Filet
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les chances de séduire les adeptes d'ésotérisme, les historiens aussi; il peut également être source d'inspiration pour des écrivains, des poètes ou des illustrateurs. Sans oublier les homéopathes et bien sûr, tous les botanistes et horticulteurs, tout autant que les gardes-forestiers. Ces experts, importants maillons de la chaîne de transmission, peuvent à leur tour, par le biais de conférences ou de workshops, éveiller un large public sur les inestimables beautés et bienfaits des forêts, en même temps que sur les menaces qui, plus que jamais, pèsent sur la faune et la flore, mettant en péril l'équilibre écologique du monde. Et tout ceci, partant du projet
Eddi
7rees , qui devient un véritable cas d'école: une référence artistique ca-
pable d'influencer la prise de conscience de l'individu et de la collectivité. Marie Anne Lorgé
Pitt Brandenburger